Titre : Le Radical
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1904-01-20
Contributeur : Maret, Henry (1837-1917). Rédacteur
Contributeur : Simond, Victor. Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32847124t
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 20 janvier 1904 20 janvier 1904
Description : 1904/01/20 (A24,N20). 1904/01/20 (A24,N20).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Description : Collection numérique : BIPFPIG33 Collection numérique : BIPFPIG33
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7622074b
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-210
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 22/09/2014
24e Année - N° fo - Mercredi 20 Janvier 1001
ÇINft CENTIMES* LE NUMERO.
24° Anné« — 29 Nivôse an Hz - N" 20
-
• J .1
Journal Politique et Littéraire ,
RÉDACTION ET ADMINISTRATION r*?^
142, RUE MONTMARTRE — TÉLÉPHONE : *02-68 ,.r~;;.,
Adresser la correspondance concernant la rédaction à ,'>:'<.T"
M. 'Victor siiwcorro, Directeur
Et las lettres relatives à l'administration à
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Les Annonces sont reçues à l'OFFICE D'ANNONLES
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- Et à l'Administration du Journal « Le Radical 8
l PRIX DES ABOXXEMmKTTS AVEC PRISIS9
Trois mois/ T francs 1 Six mois, î 3 francs 1 Un an, 25 francs
LE PAVÉ
ET , >
LE ifi'oucHÈRôÂ-
Le cas de l'abbé Delsor fait un tel ta-
page qu'il n'est plus possible de n'en pas
parler. Pour une conférence qu'il a été
empêché de prononcer, le voilà plus cé-
lèbre que s'il était l'auteur de cent dis-
cours éloquents : depuis huit jours, il
remplit les-colonnes des journaux, -et
cela durera jusqu'à vendredi, jour fixé
pour la discussion de son interpellation.
Car il a une interpellation pour lui
tout seul, où il ne sera question que'de
lui, où peut-être le ministère sera en
danger à cause de lui 1 C'est la gloire, ou
peu s'en faut.
- Et cependant, il n'est pas intéressant,
-ce curé, prêtre alsacien, devenu député
allemand très loyaliste. Ou, plutôt, il
n'est intéressant qu'au point de vue de
la question générale que soulève son
cas : personnellement il est quelconque,
sans la moindre originalité, simple sup-
pôt de l'Eglise, dressé à son école, fidèle
à ses enseignements, soumis par consé-
quent aux puissances qui se font respec-
ter. Aujourd'hui, soyez-en sûrs, il res-
pecte un peu plus le gouvernement de là
République qu'avant son expulsion.
Mais la question générale est passion-
nante, parce qu'elle intéresse la notion
même que nous devons nous faire du
patriotisme ; et elle se formule ainsi :
'« Un Alsacien-Lorrain, à plus forte rai-
son un député de l'Alsace-Lorraine,
peut-il être considéré en France comme
un étranger ? »
C'est, en effet, parce que ledit Delsor,
abbé de son métier, a été qualifié de
:« sujet allemand » dans l'arrêté préfecto-
ral, que bon nombre de citoyens fran-
çais se sont émus. "c,
Or, il est tout d'abord une chose cer-
tainè, c'est qu'on ne pouvait pas le qua-
lifier autrement, du moment qu'on l'ex-
pulsait. Voyez-vous un préfet expulsant
un « citoyen français » ? C'est donc uni-
quement sa qualité d'« étranger » qui
légitimait vis-à-vis de lui la mesure d'ex-
pulsion, et, cette qualité, il était impos-
sible de ne pas la lui donner, du mo-
ment qu'on l'expulsait.
Mais fallait-il l'expulser ? Tout est là.
Certes, l'indignation serait légitime si
le cas était inédit, si l'abbé Delsor était le
premier député d'Alsace-Lorraine mis à
la porte du territoire français parce que
Iii étranger ».
Mais la plupart de ceux qui s'indi-
gnent aujourd'hui parce que M. Combes
a fait expulser un curé ont approuvé na-
guère M. Barthou faisant expulser un
socialiste, également député d'Alsace-
Lorraine.
Il est vrai que, par contre, presque
tous ceux qui s'indignaient jadis parce
qu'on avait touché à un Alsacien socia-
liste applaudissent M. Combes expul-
sant un Alsacien curé.
Et certes, Bueb, victime de M. Barthou,
était un autre homme et un autre Fran-
çais que Delsor 1 Il était, lui, réellement
un député de la protestation, se faisant
condamner à la prison comme candidat
parce qu'il flétrissait sans ménagement,
dans ses réunions électorales, l'annexion
violente de l'Alsace-Lorraine. Cepen-
dant, quand M. Barthou crut nécessaire
de le faire sortir de France, en compa-
gnie de Bebel, un Allemand, celui-là,
mais un Allemand qui avait toujours
protesté contre la conquête et qui accla-
mait la République française, les mêmes
qui n'ont pas assez de larmes dans la
voix pour flétrir les violences antipatrio-
tiques de M. Combes se taisaient et ap=
prouvaient. Bueb était qualifié d'étran-
ger, de « sujet allemand », expulsé à ce
titre ; et ils trouvaient cela très bien 1
Car telle est la logique et la justice des
partis ! Dans les mêmes circonstances,
pour les mêmes motifs, la même mesure.
est appréciée différemment, selon l'in-
dividu auquel elle s'applique. Barthou
expulse un socialiste : bravo 1 Combes
expulse un curé : haro ! Ou inversement.
Maret est de ceux qui ont blâmé l'ex-
pulsion de Bueb ; lui a le droit de blâ-
mer l'expulsion de Delsor. Les autres,
non. Pas plus d'ailleurs que n'ont le
droit d'approuver l'expulsion de Delsor
ceux qui ont fulminé à propos de l'ex-
pulsion de Bueb.
Ces contradictions -"' qui ôtent toute
force dans la circonstance aux adver-
saires du ministère — prouvent aussi
combien est délicat l'exercice de ce droit
arbitraire d'expulsion, sans explications,
sans garanties d'aucune sorte, legs des
législations passées imbues de la haine
'ù retraiter. Cela semble très facile,.
l'arbitraire : on fait ce qu'on veut ; on
n'a pas de motifs à donner, on se débar-
rasse des individus gênants avec une si-
gnature, et tout est dit. Oui, sous un
gouvernement despotique, rien évidem-
ment n'est plus commode. Mais, sous un
gouvernement parlementaire, avec le
contrôle de la presse et du Parlement,
l'arbitraire crée plus de difficultés qu'il
n'en résout. Et certes, M. Delsor expulsé
cause à M. Combes plus de tracas qu'il
ne vaut.
Un gouvernement intelligent serait ce-
lui qui se prêterait à la limitation de ce
droit d'expulsion, qui d'abord ne l'appli-
querait qu'en cas de nécessité absolue,
de danger imminent, et qui ne s'en ser-
virait pas pour interdire une confé-
rence : il ne faut pas prendre un pavé
pour écraser une mouche. Et vraiment,
l'abbé Delsor n'est rien de plus qu'un
moucheron, qui ne mérite pas tout le
bruit qui se fait autour de lui.
« SIGISMOND LACROIX,
lESBADICAUX - SOCIALISTES
La réunion de la Gauche radicale-socialiste
Les « sauvages » — Les débris
de l'ancien groupe
Le nouveau groupe de la Gauche radicale
s'est réuni hier, sous la présidence de M.
Bienvenu-Martin. Il a constaté que le nom-
bre des adhérents est actuellement de qua-
tre-vingt-deux.
La réunion a ensuite désigné les délégués
du groupe à la délégation des gauches. Ont
été désignés : MM. Bienvenu-Martin, Mau-
jan, Simyan, Pajot, Coulondre, Péronneau
et Fitte.
Quant à la proposition d'arbitrage du co-
mité exécutif du parti radical et radical-so-
cialiste, mise en avant par les membres
restants de l'ancien groupe, le nouveau
groupe estime qu'il n'y a pas lieu d'y don-
ner suite.
Il se bornera, par courtoisie, à donner des
indications au comité sur les causes de la
séparation.
Ajoutons que ce comité exécutif, qui se
réunit dans quelques jours, aura à renou-
veler son bureau et que les adhérents du
nouveau groupe de la Gauche radicale-socia-
liste auront un candidat à la présidence de
ce comité.
Un certain nombre de démissions se sont
encore produites dans le sein de l'ancien
groupe radical-socialiste. La plupart de ces
nouveaux démissionnaires paraissent, du
reste, absolument décidés à n'adhérer puur
le moment à aucun des groupes constitués
et à devenir ce qu'en termes parlementaires
on appelle des « sauvages ».
Au nombre de ceux-ci on peut citer : MM.
Berteaux, Beauquier, Henri Michel, Chena-
vaz, Messimy, Dubief, Tavé, Razimbaud,
Louis Martin, Puech, Bonnevay, Pierre
Baudin, Trouin, Chanoz, Ursleur, Clément,
Buyat, Cornet, Dauzon, Petitjean, Schnei-
der (Haut-Rhin), etc.
L'ancien groupe radical-socialiste compre-
nait cent-quatorze membres : si, aux qua-
tre-vingt-deux députés qui forment la Gau-
che radicale-socialiste, on ajoute les vingt
et un qui ne veulent faire partie d'aucun des
deux groupes, on constate que l'ancien
groupe radical-socialiste comptera désor-
mais onze membres au plus ; ce serait pres-
que, assez pour former un ministère, mais
à peine suffisant pour constituer le bureau
du groupe.
inroar « uasmus
Déclarations du préfet de Meurthe-et-Mo-
selle — La personnalité de l'abbé
Delsor — L'impression
à la frontière
M. Humbert, préfet de Meurthe-et-Mo-
selle, a fait à un rédacteur du Matin des
déclarations qui confirment de tous points
les renseignements que nous avons publiés
hier :
— Je n'ai pas été, a-t-il dit, le promoteur de
la mesure intervenue contre l'abbé Delsor. J'ai
transmis par téléphône, au ministère de l'inté-
rieur, la demande du sous-préfet de Lunéville.
J'accepte, bien entendu, et avec toutes ses con-
séquences éventuelles, la responsabilité de l'acte
qui porte ma signature. Je l'accepte d'autant
plus volontiers que je crois avoir bien servi la
France, que je représente, et l'Alsace-Lorraine,
dont je suis moi-même le fils exilé.
L'abbé Delsor n'a pas été expulsé pour la
conférences qu'il n'a pas faite mais à son occa-
sion, afin d'éviter une propagande également
dangereuse à la tranquillité et à la cordialité
discrète qui nous lie inaltérablement aux pro-
vinces perdues.
Vous savez qu'après 1870 le deuil de l'Alsace-
Lorraine prit bientôt une forme mystique, et
que ses populations religieuses confièrent peu
à peu au clergé le soin de leur protestation.
Cette attitude persévéra jusqu'en vers 1892. A
partir de cette époque, le clergé, toujours maître
de la situation, parut incliner à l'apaisement.
C'était son droit, son"intérêt peut-être, et je n'ai
pas à m'immiscer dans des questions qui ne re-
gardent exclusivement que la conscience de ses
électeurs. Mais pour retenir sans doute le mou-
vement qu'il avait d'abord favorisé, il prit l'ha-
bitude d'exposer à ses ouailles des comparaisons
fâcheuses entre la bienveillance de l'Allemagne
et l'intolérance de la République. C'était encore
son droit, tant que cette théorie respectait la
frontière. Ce ne l'était plus quand elle venait
troubler dans le département de Meurthe-et-
Moselle la colonie de quinze cents Alsaciens-
Lorrains qui s'est faite librement française.
Or, par les journaux, les brochures, les con-
férences, ce concept nouveau de la France op-
pressive a fait de tels progrès que beaucoup se
demandent ostensiblement si leur fidélité à la
patrie n'est pas un marché de dupes. La conta-
gion est même descendue jusqu'aux Lorrains
d'origine, dont quelques-uns, n'osant pas être
Allemands, voudraient être neutres. L'année der-
nière, le maire d'un chef-lieu de canton fron-
tière, M. de Monthureux, n'a pas craint de sou-
haiter a Mgr Turinaz de devenir l'évêque de la
Lorraine une et indépendante. Le prélat n'a pas
protesté, l'auditoire non plus.
- Les paradoxes de Barres et les boutades de
Jules Lemaître prennent une singulière impor-
tance quand elles se matérialisent. Tout ce qui
diminue sur notre terré vulnérable le respect
solidaire de la France et de ses institutions est
un péril national. Voilà pourquoi j'ai dû fermer
la chapelle de Lunéville, qui était le foyer de
la perturbation, interdire le Volkslreund qui en
était l'organe, et expulser l'abbé Delsor qui, in-
volontairement sans doute mais trop pratique-
ment, hélas 1 s'est fait, par la plume et la parole,
le mauvais ouvrier de la désaffection française.
On a dit, il est vrai, que je pouvais interdire
la conférence; j'avoue eue je n'ai cas trouve ce
pouvoir dans la loi. On a dit surtout que je ne
devais pas. appliquer à un Alsacien l'expression
insultante de sujet allemand. Comme lés ïor-
mules nous parviennent du ministère imprimées
et invariables, je demande qu'on me dise, avant
de me condamner, de quel qualificatif je devais
compléter la mention obligatoire de nationalité.
S'il avait été en ma puissance d'effacer l'His-
toire d'un trait de plume, l'abbé Delsor n'eût pas
été expulsé, il eût été Français.
Depuis qu'il a pris cette mesure, le préfet
de Meurthe-et-Moselle reçoit des lettres d'in-
jures grossières et de menaces. Mais, en
regard de ces manifestations nationalistes
et cléricales, il faut placer les manifesta-
tions républicaines.
M. Humbert a reçu du comité républicain
démocratique de l'arrondissement de Mire-
court, des comités de Charmes, Dompaire,
Darney, Vittel, Monthureux-sur-Saône, et
des cercles républicains démocratiques de
l'arrondissement, des adresses le félicitant
d'avoir empêché l'abbé Delsor « de troubler
l'ordre en Lorraine ».
C'est la note qui domine dans nos dépar-
tements de la frontière.
On ne pardonne pas à l'abbé Delsor
d'avoir excipé de sa qualité d'Alsacien pour
venir combattre le gouvernement républi-
cain.
Dans les couloirs de la Chambre, cette
opinion se manifestait ouvertement. -
Hier, l'un des membres do la Gauche radi-
cale, qui n'a pas voté vendredi dernier avec
le cabinet, nous disait qu'à son avis M.
l'abbé Delsor avait commis un acte de lèse-
patriotisme en abritant ses campagnes clé-
ricales et son agitation politique derrière sa
qualité d'Alsacien. l, ,".
Ajoutons que la lumière se fait tous les
jours un peu plus sur la personnalité de
l'abbé Delsor. Les journaux cléricaux
n'avaient-ils pas raconté que l'abbé Delsor
avait payé de la prison son attitude protes- ,
tataire ? - ,
Or, renseignements pris, l'abbé Delsor a
été condamné pour injure publique à un
culte reconnu par l'Etat. Il avait écrit dans
la Revue catholique d'Alsace que Berlin
était, plus que Paris, la capitale de la dé-
bauche universelle, et qu'il ne pouvait en
être autrement puisque le protestantisme
est le père naturel de la prostitution.
Ce n'est donc pas le protestataire, mais
bien le clérical que les tribunaux allemands
ont frappé.
Nous avons 'dit et prouvé que M. l'abbé
Delsor n'était pas protestataire, qu'il avait
voté les crédits pour l'armée allemande.
Dans une dépêche qu'il adresse aux jour-
naux nationalistes, M. l'abbé Delsor dé-
clare qu'il' avait voté contre l'augmentation
des crédits militaires ; mais M. Delsor a
voté, depuis qu'il est député au Reichstag,
tous les budgets de l'empire allemand, y
compris, bien entendu, les crédits militai-
res, alors que les députés protestataires ne
votaient jamais le budget.
A rapprocher l'attitude de M. l'abbé Del-
sor de celle de M. Jules Brice, député natio-
naliste de Nancy, qui refuse, à la Chambre
française, de voter le budget.
LES CONGRÉGATIONS
La quatrième chambre du tribunal cor-
rectionnel de Marseille a rendu son juge-
ment dans les poursuites intentées contre
le père franciscain Charbonnier en vertu
de la loi sur les associations. Le prévenu
avait continué à diriger dans le quartier
Endoume l'établissement de refuge pour
les missionnaires de son ordre, en dépit
de la dissolution de la congrégation. Il a
été condamné à 50 francs d'amende. Le
propriétaire de l'immeuble, également pour-
suivi, a été acquitté.
Le tribunal de Mende a rendu son juge-
ment dans les poursuites intentées contre
les treize religieuses de Saint-Gervais, in-
firmes ou garde-malades, poursuivies sous
l'inculpation d'infraction à la loi sur les
associations.
Toutes ont été condamnées : les infirmes
à 1 franc d'amende avec sursis ; deux ab-
sentes à 16 francs d'amende avec sursis ;
trois autres à 50 francs ; enfin, la supé-
rieure, Mme Assénât, à 500 francs.
La cour d'appel d'Aix-en-Provence a
rendu son jugement dans l'affaire de l'é-
cole libre de Cassis (Bouches-du-Rhône).
Il s'agissait de l'appel d'un jugement du
tribunal correctionnel de Marseille qui
avait condamné M. Emile Duport, pro-
priétaire de l'école, à 100 francs d'amende.
La cour a purement et simplement ac-
quitté l'appelant.
SOCIALISME & BEPtTBtlQÏÏE
Lorsque Millerand, qui était comme la
personnification du socialisme dans le gou-
vernement de la République, n'a plus fait
partie du ministère, n'étant d'ailleurs rem-
placé par aucun autre de @ son parti ni de sa
politique, j'en ai exprimé ici le regret très
formel et très raisonné.
J'ai vu là une lacune, un trou ; on pou-
vait dire aussi un recul dans un certain
sens. On eut une compensation : la pré-
sence de Jaurès dans le bureau du Parle-
ment : compensation parlementaire à un
déficit gouvernemental.
Mais l'élimination de Jaurès devait sui-
vre -et a suivi l'élimination de Millerand.
Bon nombre de socialistes n'en sont pas
fâchés, ils trouvent cela plus correct. Cette
manière de voir devrait tendre cependant
à faire sortir du Parlement tous les repré-
sentants du socialisme. Point de partici-
pation au gouvernement de la République :
point de participation à la vie parleihen-
taire.
C'est le comble de la doctrine. Alors, les
partisans de « la lutte de classes » ont une
entière satisfaction. Alors le divorce appa-
raît en évidence. Mais si l'on pense, comme
nous, que « la lutte de classes » n'est pas
un but, qu'elle ne peut pas être un but, et
que l'on doit toujours finir par s'entendre
pour une action commune de progrès, d'ac-
commodation, on doit penser aussi qu'après
trente années de République le socialisme
a sa place tout indiquée dans le Parle-
ment comme dans le gouvernement de la
République.
Pour nous, la République, issue de la
Révolution française, contient toutes les ré-
formes possibles et réalisables, au fur et à
mesure qu'elles prennent un caractère de
réalisation possible. Le socialisme n'est
pas une chose et la République une autre
chose, entre lesquelles choses serait un
abîme, un fossé, un Malus.
Mais le socialisme, ou ce que nous appe-
lons de ce nom, est dans la République elle-
même, dans sa na.re et dans sa légalité.
C'est pourquoi nous avons demandé bien
souvent l'organisation d'un ministère du
travail. ',.
L'aventure de Jaurès nous inspire donc
absolument le même regret et les mêmes
observations que l'aventure de Millerand.
C'est le double échec d'une méthode qui
nous parait la seule bonne, dont l'heure
était certainement venue, et à laquelle il
faudra revenir tôt ou tard, et le plus vite
serait le mieux.
Hector DEPASSE.
BAVARDAGE.
— Qu'attends-tu pour te faire chrétienne? crie
l'inquisiteur à la sorcière, dans la belle pièce de
Sardou.
— J'attends que les chrétiens soient meilleurs
que nous ! réplique la mahométane- -
Le mot est juste et cingle comme il faut ces
hypocrites, prêcheurs de charité, qui se mon-
trent plus brutaux et plus cruels que les sauva-
ges idolâtrés; - l
Est-il rien de plus répugnant que ces imagina-
tions de nonnes du Bon-Pasteur, inventant, pour
de malheureuses filles, des tortures inédites et
sadiques ? N'est-ce pas dans le cerveau des moi-
nes, affolés. par le mysticisme, que sont nées
ces visions de supplices, réalisées par l'Inquisi-
tion ? Celui-ci, entre autres : frotter de sel la
plante des pieds, et les faire lécher par la langue
râpeuse des chèvres, ainsi qu'il est révélé par les
archives du Saint-Office de Toulouse ? c
Jamais les raffinements de méchanceté, de fé-
rocité, ne furent poussées aussi loin que par les
doux chrétiens, béats et confits en leur Dieu.
La religieuse Bretagne vient encore de donner
une preuve nouvelle de cet esprit d'intolérance
furieuse': les gars du Finistère sé sont orga-
nisés en compagnies, dites de la Trique, daiis
le but avoué de pourchasser et d'assommer les
libres-penseurs, chouannerie nouvelle prête à
tous les guet-apens. T -,.' -;;,."
Que dire aussi de cette aventure? A Cleden-
Cap-Sizïïn, ces honnêtes gens ont juré de faire
déguerpir l'institutrice laïque. Chapitrés au con-
fessionnal, les jeunes chrétiens se Fendent la
nuit à l'école communale, enfoncent les portes,
lacèrent et détruisent livres et cahiers, et —
comme l'Eglise ne perd jamais de vue ses inté-
rêts matériels, - — emportent une somme de
140 francs trouvée dans les. tiroirs. Dieu fut con-
tent. sans cloute ? ,'",
Point. Il lui fallait plus et mieux. Ces mêmes
voleurs, en hâte de devenir assassins, se postent
sur le chemin où passe la sœur de l'institutrice,
une jeune fille de vingt-trois ans, et l'assomment
à coups de bâton. Elle reste sur la place, à demi
morte. Le chef de ces brutes a vingt-sept ans. Il
se nomme Arhau et a été arrêté.
Si nous attendons que les chrétiens soient
meilleurs que nous, nous attendrons longtemps.
Les prêtres, les séculiers, les réguliers, sont là
pour entretenir dans l'âme fruste des ignorants
la haine et la colère. Et nous savons ce qu'elles
valent.
Car c'est surtout de ces gens qu'il faut dire
qu'ils n'ont rien oublié ni rien appris : ils re-
grettent le bon temps où l'Eglise rôtissait ses
ennemis, et dans leurs yeux on retrouve îtt luour
des bûchers d'autrefois. Ah ! s'ils nous tenaient 1
Et c'est nous qu'on traite de bourreaux, alors
que nous nous contentons de les jeter dehors,
avec un coup de pied au cul.
UN PARISIEN.
LE SYSTÈME MÉTRIQUE
INTERNATIONALisa
La nouvelle loi des poids et mesures — Nos
étalons numérotés — Les prototypes in-
ternationaux déposés à Breteuil
La Convention du Mètre — Le
Bureau international — Un
pays neutre dans le parc
de Saint-Gloud
— Qu'est-ce que le mètre ?
- En voilà une question ! Et que vous a
donc appris votre maître d'école, si vous ne
savez pas, comme le plus ignare de vos
contemporains, que le mètre est la dix-mil-
lionnième partie du quart du méridien ter-
restre ? Et si ça ne vous suffit pas, je vous
dirai aussi que le kilogramme est le poids
d'un décimètre cube d'eau distillée à la tem-
pérature de 4 degrés centigrades. Etes-vous
content, maintenant, et vous ai-je assez ré-
pondu ?
— Mon brave ami, c'était peut-être ça
dans le temps ; mais ce ne l'est plus du
tout maintenant ; on a changé tout cela. On
a réformé le système métrique, refait les
étalons des poids et mesures, et si votre re-
jeton s'avisait dorénavant de répondre com-
me vous venez de le faire à son bacnut, ou
même à son simple Certificat d'études, il se-
rait illico blackboulé comme le dernier des
cancres, et ce serait justice.
— Bah ! Alors qu'est-ce qu'il devrait ré-
pondre, mon môme ?
- — lOQue « le mètre est la longueur, à la
température de zéro, du prototype interna-
tional, en platine iridié, qui a été sanctionné
par la Conférence générale des poids et me-
sures, tenue à Paris, en 1889, et qui est dé-
posé au pavillon de Breteuil, à Sèvres ».
2° Que « le kilogramme est la masse du
prototype international, en platine iridié,
qui a été aussi sanctionné par la Confé-
rence générale des poids et mesures, tenue
à Paris, en 1889, et qui est déposé non
moins au pavillon de Breteuil, à Sèvres ».
3° Que « les copies n° 8 de ce prototype
du mètre, et n° 35 du prototype du kilo-
gramme, déposées aux Archives nationales,
sont les étalons légaux pour la France ».
— En voilà une histoire ! On ne pouvait
donc pas nous laisser tranquilles chez nous,
avec notre bon vieux mètre national et no-
tre kilogramme idem, qui régissaient nos
mesures et poids depuis la fondation de no-
tre merveilleux système métrique ?
— Eh non ! C'est précisément parce que
les unités de mesure à système décimal
inaugurées par l'initiative française étaient
merveilleuses que, peu à peu, la majorité
des nations a désiré en faire les unités in-
ternationales, afin d'aboutir à cet idéal civi-
lisateur : un seul poids et une seule lon-
gueur types pour les recherches de la scien-
ce, les applications techniques et les tran-
sactions commerciales du monde entier.
Cette nécessité d'une unité internationale
s'est manifestée tout d'abord lorsqu'il s'est
agi d'établir les cartes géodésiques. autre-
ment dit de grouper en mesure générale de
la terre toutes les mensurations particuliè-
res que chaque pays avait faites chez lui.
Il fallait naturellement tout rapporter à une
même unité, et ce fut un premier hommage
que la science mondiale rendit au système
métrique décimal en demandant, dès la pre-
mière moitié du dernier siècle, que tea rè.
gles géodésiques dont on se servait dans
chaque nation pour exécuter ces mesures
terrestres fussent comparées et rapportées
au mètre français, base du système dét.'i-"
ma!.
Ces déterminations comparatives des rè-
gles géodésiques ayant-été faites du temps
et par les soins d'Arago, tout promettait
donc d'aller pour le mieux. Une fois que
chaque pays aurait terminé sa tâche, il n'y
aurait plus qu'a recoller ensemble tous les
résultats obtenus.
Mais patatras ! le moment venu, vers
1865, de réunir dans le vaste réseau prévu
toutes les opérations particulières des Etats,
ça ne se recolla pas du tout. Et pourtant
lesdites opérations avaient été conduites de
manière impeccable, à n'en point douter.
D'ailleurs, la discordance, étant générale
ne pouvait être attribuée qu'à une cause
unique. Il fallut bien alors se rendre à l'é-
vidence : cette cause de toute l'erreur était,
au point de départ, dans l'unité compara-
tive elle-même, c'est-à-dire dans le mètre
étalon français, sur lequel tout le reste
avait été copié.
Et, en fait, quoi d'étonnant ?
Construite à une-époque où les sciences
métallurgiques, chimiques et physiques n'a-
vaient à leur disposition que des moyens
encore rudimentaires, la règle qui consti-
tuait notre mètre des Archives premier et
primitif présentait d'incontestables défauts,
incompatibles avec les exigences des con-
naissances acquises depuis et nécessitant,
tout le monde en tomba facilement d'accord,
son remplacement.
Mais, et çe fut là le nouveau triomphe du
système métrique, l'accord des nations
groupées pour cet objet en Convention in-
ternationale des poids et mesures ne fut
pas moins unanime pour décider que le
nouveau prototype du mètre, et par la mê-
me occasion celui du kilogramme, seraient
les copies aussi identiques que possible du
mètre et du kilogramme des Archives, qu'il
fallait abandonner, mais qui resteraient
ainsi les pères du système métrique, qu'on
prévoyait déjà devoir s'étendre, en raison
de cette réforme même, à la terre civilisée
tout entière.
La convention pour établir internationa-
lement ces nouveaux poids et mesures mé-
triques fut signée dès 1875, et les nations
signataires convinrent de fonder dans ce
but, à frais communs, ce Bureau interna-
tional des poids et mesures, où, grâce à
l'extrême obligeance des deux éminents sa-
vants, MM. les docteurs Benoît et Guillau-
me, qui assument depuis de longues années
la direction et l'impeccabilité de ce merveil-
leux établissement de science et de préci-
sion, je pourrai un de ces jours vous faire
pénétrer les secrets de cette précision, de
ces balances, qui pèsent le cent-millième
de gramme (vous entendez bien, le 100 mil-
lième) ; de ces instruments comparateurs
pour les règles destinées à former les mè-
tres, et qui mesurent réellement, matériel-
lement, des longueurs de un cent-millième
de millimètre.
Votre pauvre tête, hein ! mais non, vous
verrez que c'est très simple. Pour aujour-
d'hui, comme les jours sont courts et que
mon ruban s'allonge, je me contenterai de
vous faire jeter un œil sur l'endroit, si vous
voulez bien me suivre d'abord dans la
grande rue de Sèvres, un peu plus haut que
la manufacture de porcelaines, puis pren-
dre la première porte à droite, entrer ainsi
dans l'enceinte du parc de Saint-Cloud,
grimper un chemin ombreux et creux, quoi-
que fort abrupt, et vous heurter tout «en
haut à une porte où il est écrit : « Le p-j-
blic n'entre pas ici. »
C'est là l'ancien pavillon de Breteuil, offert
par la France au groupe des vingt-et-une
nations signataires de la Convention inter-
nationale dont elle est elle-même pour de-
venir le Bureau international des poids et
mesures, le laboratoire unique où- les me-
sures fondamentales du monde entier sont
certifiées exactes, le dépôt immuable des
nouveaux prototypes internationaux du
mètre et du kilogramme, en platine iridié —
je vous dirai pourquoi — dont les étalons
nationaux, bien que d'égale valeur, ne sont
plus désormais que de simples copies, telles
que les ont sanctionnées d'une part la Con-
férence générale internationale de 1889, les
lois particulières de toutes les nations coopé-
rantes, et la loi française elle-même du
11 juillet dernier.
Pour assurer, contre absolument tout
danger, la perpétuité de l'œuvre et de son
précieux dépôt, non seulement on a
choisi ce coin presque mystérieux, bien
qu'un peu égayé par une trouée à travers
les arbres sur Paris, soustrait à toutes les
causes de troubles pour les opérateurs et
de trépidations pour les instruments ultra
sensibles ; mais ce territoire, en sa simple
enceinte de bois croisés, a été déclaré
pays neutre et soustrait ainsi même au ris-
que de guerre.
ERNEST Lesigne.
LA RUSSIE & LE JAPON
La réponse de la Russie — L'impression
dans les milieux diplomatiques
Les dernières nouvelles
Une dépêche de Saint-Pétersbourg an-
nonce que le cabinet russe continue à étu-
dier la réponse du Japon, au sujet de la-
quelle on garde actuellement un secret ab-
solu. 1
Le gouvernement japonais ne compte pas
recevoir la répause de la Russie avant une
semaine au moins.
Dans le monde diplomatique, l'on conti-
nue à espérer une solution pacifique. Le mi-
nistre du Japon à Saint-Pétersbourg a décla-
ré au représentant d'une agence que si le
public était en position de connaître tout ce
qui se passe dans les chancelleries, les
bruits alarmistes ne pourraient trquver la
moindre créance.
On télégraphie de Vienne qu'au bal de la
cour qui a eu lieu hier soir, 1 empereur
François-Joseph, parlant aux diplomates
réunis dans le Cercle général, s'est exprimé
en termes optimistes sur ia crise en Extrê-
me-Orient. S'adressant à M. Storer, ambas-
sadeur des Etats-Unis, le souverain a dit :
« A mon avis, il se produit une améliora-
tion en Extrême-Orient, et je crois que tout
va s'arranger d'une façon satisfaisante. »
Le ministre du Japon a été l'une des per-
sonnalités les plus remarquées du bal.
Le ministre de Russie à Séoul, M. Pavlof,
a affirmé au rédacteur du New-York He-
rald qui Interrogeait que la Russie recon-
naissait à la Corée le droit d'ouvrir au com-
merce international tous les ports qu'elle
désirait et qu'elle ne nierait jamais que la
Corée dût rester un Etat indépendant.
M. Pavlof a ajouté que la Russie ne sou-
lèverait pas la question de la construction
par le Japon du chemin de fer Séoul-Fusan,
dont la jconcessiûiï a Mè accordée* il ï a
trois ans, à une compagnie japonaise, mais
elle s'opposerait à ce que la ligne dû nord
Séoul-Wijn, construite par les Coréens, pas-
sât eux mains des Japonais avant qu'un
second accord soit intervenu. ,- -
Voici maintenant des nouvelles plus pes-
simistes :
Pcwl-Arlhur. 13 janvier.
L'occupation de Hsin-Min-Tun, à trente milles
a l'ouest de Moukden. avait été décidée, il y a
une semaine. Les journaux russes annoncent
aujourd'hui qu'elle a été réalisée.
Les banques japonaises se hâtent de clore
leurs comptes en Mandchourie et de suspendre
leurs affaires avec le pays.
Les'Japonais cherchent, en ce moment, en
Mandchourie et en Corée, des agents (les rési-
dents japonais ayant quitté le pays) qui se tien-
nent au courant des mouvements des Musse?.
Les Pusses de Port-Arthur voient dans la der-
nière note japonaise une demande catégorique
peur de nouvelles concessions.
Le vapeur japonais Kamachi-Marll, ve-
nant du Japon et de Chine, est arrivé hier
soir à Marseille avec cinquante-deux passa-
gers, dont vingt ont débarqué.
Peu après son passage à Colombo, la
commandant de ce paquebot, croyant que
les relations diplomatiques étaient rompues
entre le Japon et la Russie, fit enlever lo
nom du navire à l'avant et à l'arrière, chan-
ger les couleurs de la cheminée et arborer
à l'arrière le drapeau anglais.
Le navire est arrivé à Marseille texs in.
cident.
On mande de Tien-Tsin ;au Standard
qu'un train spécial a été formé pour trans-
porter à Port-Arthur les troupes russes qui
vont quitter Pékin et Tien-Tsin. Un faible
détachement-serait laissé à Pékin pour gar-
der la légation, mais Tieu-Tsin serait entiè-
rement évacué.
On annonce, d'autre part, que le gouver-
nement russe a demandé l'envoi en Mand-
chourie de 15,000 hommes de troupes chi-
noises pour protéger'les sujets chinois dans
cette province.
Le transport russe Orcl et le transport
charbonnier Saratof sont arrivés à Port-
Saïd. Ce dernier embarquera 4,000 tonnes
de charbon, ce qui l'obligera à stationner
deux jours ; mais VOrel partira immédiate-
ment. i
La flottille des torpilleurs russes se réap-
provisionne en attendant les deux autres
navires de l'escadre russe. ,
LA CHAMBRE
Le rachat des chemins de fer — MM. Bour-
rat et Plichon
La Chambre a commencé, hier, la dis-
cussion des propositions de loi tendant au
rachat des réseaux de l'Ouest et du Midi
L'urgence déclarée, M. Bourrât monte à la
tribune.
Toute la question, dit M. Bourrât, se résume
en ceci : Etes-vous disposés à continuer à don-
ner aux compagnies de l'Ouest et du Midi, sous
la forme de garanties d'intérêt, des sommes
considérables? Je ne le pense pas.
La compagnie de l'Ouest a remboursé, depuis
sa fondation, 6 0/0 de sa dette. Pourra-t-elle en
cinquante-trois ans, rembourser le reste, c'est-
à-dire 94 0/0 ? Poser la question, c'est la résou-
dre.
La situation de la compagnie du Midi est exac-
tement la même. -
M. Rouvier. — Les propositions de rachat, tel-
les que vous les présentez, reposent sur des tv-
pothèses.
M. Doumer. — Oui, mais le champ des hypo-
thèses est limité. ""Ç
M. Rouvier. — Un gouvernement ne peut frai-
.ter d aussi graves questions en raisonnant sur
des hypothèses.
M. Bourrat. — On invoque, il est vrai, l'avis
des chambres'de commerce, défavorables au ra-
chat ; mais les chambres de commerce représen-
tent-elles bien l'opinion de leurs électeurs sur
ce sujet? -
M. Bourrât examine ce qu'ont fait les
compagnies au point de vue des transports.
La compagnie de l'Ouest manque régulière-
ment de wagons lorsqu'il y a une forte ré-
colte à transporter.
— L'Etat, dit M. Bourrât, a déjà obtenu d'ex-
cellents résultats. Il fera encore mieux lorsqu'il
sera débarrassé des .entraves dont l'enserre le
réseau d'Orléans.
Les compagnies font dire qu'elles rapportent
à l'Etat de grosses sommes. Dans son rapport
de 1891, M. Pelletan établissait ce qu'il y avait
de fantaisiste dans les calculs des compagnies.
M. Bourrât expose qu'en Allemagne la
prospérité tient au développement parallèle
des chemins dé fer et des canaux.
— Dans ce pays, dit-Il, il y a près de 14,000
kilomètres de canaux ou voies navigables contre
4,700 en France. Le trafic de la gare d'eau de
Magdebourg est supérieur au trafic des trente
gares d'eau de notre pays.
De nombreux exemples prouvent que la coopé-
ration des voies navigables ne peut qu'être favo-
rable au trafic des chemins de fer.
M. Bourrât reproche aux compagnies de
faire construire du matériel à l'étranger.,
Leurs frais généraux sont beaucoup trop
élevés.
En prenant pour base le prix du kilomètre
de chemin de fer fourni par le gouverne-
ment, on trouve que le rachat produirait
une économie de plus de 2 millions par an
pour le Midi et de plus de 8 millions pour
l'Ouest -
Le nombre des hauts employés des direct
tions serait réduit par suite du rachat, car
l'Etat ne peut créer des emplois sans une
autorisation du Parlement.
Avec les deux réseaux de l'Ouest et du Midi,
dit l'orateur, l'Etat posséderait un réseau idéal
comprenant, avec les lignes qu'il exploite déjà,
12,446 kilomètres.
Quant à la procédure à suivre pour arriver
au rachat, il suffirait que la Chambre adoptât
celle qu'elle a employée en 1878. Un vote sufli-
rait. >',
M. Bourrât déclare que l'Etat, dans l'inté-
rêt de la défense nationale, doit avoir la
direction des chemins de fer.
Partout, à l'étranger, on rachète les che-
mins de fer, et la prospérité augmente.,
Pourquoi en serait-il autrement èn France ?
M. Bourrât estime que la situation finan-
cière exige le rachat, car l'Etat est, vis-à-vis
de certaines compagnies, dans la situation
d'un bailleur de fonds qui ferait des avances
insolvables.
— Le pays réclame deux choses, dit-il en
terminant, le rachat des chemins de fer et
l'impôt sur le revenu. En votant le rachat,
la Chambre aura rendu un grand service au
pays.
Après M. Bourrât, c'est M. Plichbn, qui
défend la thèse contraire.
Un léger incident a lieu quand M. Plichon
paraît à la tribune. Comme il porte avec lui
un paquet de documents : « Ce sont des
actions 1 » crie quelqu'un. M. Plichon pro-
teste vivement contre ces paroles, et M.
Brisson, qui préside, déclare que s'ij avait
entendu l'interruption, il l1 auraiLréprimée*
l
ÇINft CENTIMES* LE NUMERO.
24° Anné« — 29 Nivôse an Hz - N" 20
-
• J .1
Journal Politique et Littéraire ,
RÉDACTION ET ADMINISTRATION r*?^
142, RUE MONTMARTRE — TÉLÉPHONE : *02-68 ,.r~;;.,
Adresser la correspondance concernant la rédaction à ,'>:'<.T"
M. 'Victor siiwcorro, Directeur
Et las lettres relatives à l'administration à
M. Félix MILLET, administrateur
Les Annonces sont reçues à l'OFFICE D'ANNONLES
19, PLACE DE LA BOURSE, .13
- Et à l'Administration du Journal « Le Radical 8
l PRIX DES ABOXXEMmKTTS AVEC PRISIS9
Trois mois/ T francs 1 Six mois, î 3 francs 1 Un an, 25 francs
LE PAVÉ
ET , >
LE ifi'oucHÈRôÂ-
Le cas de l'abbé Delsor fait un tel ta-
page qu'il n'est plus possible de n'en pas
parler. Pour une conférence qu'il a été
empêché de prononcer, le voilà plus cé-
lèbre que s'il était l'auteur de cent dis-
cours éloquents : depuis huit jours, il
remplit les-colonnes des journaux, -et
cela durera jusqu'à vendredi, jour fixé
pour la discussion de son interpellation.
Car il a une interpellation pour lui
tout seul, où il ne sera question que'de
lui, où peut-être le ministère sera en
danger à cause de lui 1 C'est la gloire, ou
peu s'en faut.
- Et cependant, il n'est pas intéressant,
-ce curé, prêtre alsacien, devenu député
allemand très loyaliste. Ou, plutôt, il
n'est intéressant qu'au point de vue de
la question générale que soulève son
cas : personnellement il est quelconque,
sans la moindre originalité, simple sup-
pôt de l'Eglise, dressé à son école, fidèle
à ses enseignements, soumis par consé-
quent aux puissances qui se font respec-
ter. Aujourd'hui, soyez-en sûrs, il res-
pecte un peu plus le gouvernement de là
République qu'avant son expulsion.
Mais la question générale est passion-
nante, parce qu'elle intéresse la notion
même que nous devons nous faire du
patriotisme ; et elle se formule ainsi :
'« Un Alsacien-Lorrain, à plus forte rai-
son un député de l'Alsace-Lorraine,
peut-il être considéré en France comme
un étranger ? »
C'est, en effet, parce que ledit Delsor,
abbé de son métier, a été qualifié de
:« sujet allemand » dans l'arrêté préfecto-
ral, que bon nombre de citoyens fran-
çais se sont émus. "c,
Or, il est tout d'abord une chose cer-
tainè, c'est qu'on ne pouvait pas le qua-
lifier autrement, du moment qu'on l'ex-
pulsait. Voyez-vous un préfet expulsant
un « citoyen français » ? C'est donc uni-
quement sa qualité d'« étranger » qui
légitimait vis-à-vis de lui la mesure d'ex-
pulsion, et, cette qualité, il était impos-
sible de ne pas la lui donner, du mo-
ment qu'on l'expulsait.
Mais fallait-il l'expulser ? Tout est là.
Certes, l'indignation serait légitime si
le cas était inédit, si l'abbé Delsor était le
premier député d'Alsace-Lorraine mis à
la porte du territoire français parce que
Iii étranger ».
Mais la plupart de ceux qui s'indi-
gnent aujourd'hui parce que M. Combes
a fait expulser un curé ont approuvé na-
guère M. Barthou faisant expulser un
socialiste, également député d'Alsace-
Lorraine.
Il est vrai que, par contre, presque
tous ceux qui s'indignaient jadis parce
qu'on avait touché à un Alsacien socia-
liste applaudissent M. Combes expul-
sant un Alsacien curé.
Et certes, Bueb, victime de M. Barthou,
était un autre homme et un autre Fran-
çais que Delsor 1 Il était, lui, réellement
un député de la protestation, se faisant
condamner à la prison comme candidat
parce qu'il flétrissait sans ménagement,
dans ses réunions électorales, l'annexion
violente de l'Alsace-Lorraine. Cepen-
dant, quand M. Barthou crut nécessaire
de le faire sortir de France, en compa-
gnie de Bebel, un Allemand, celui-là,
mais un Allemand qui avait toujours
protesté contre la conquête et qui accla-
mait la République française, les mêmes
qui n'ont pas assez de larmes dans la
voix pour flétrir les violences antipatrio-
tiques de M. Combes se taisaient et ap=
prouvaient. Bueb était qualifié d'étran-
ger, de « sujet allemand », expulsé à ce
titre ; et ils trouvaient cela très bien 1
Car telle est la logique et la justice des
partis ! Dans les mêmes circonstances,
pour les mêmes motifs, la même mesure.
est appréciée différemment, selon l'in-
dividu auquel elle s'applique. Barthou
expulse un socialiste : bravo 1 Combes
expulse un curé : haro ! Ou inversement.
Maret est de ceux qui ont blâmé l'ex-
pulsion de Bueb ; lui a le droit de blâ-
mer l'expulsion de Delsor. Les autres,
non. Pas plus d'ailleurs que n'ont le
droit d'approuver l'expulsion de Delsor
ceux qui ont fulminé à propos de l'ex-
pulsion de Bueb.
Ces contradictions -"' qui ôtent toute
force dans la circonstance aux adver-
saires du ministère — prouvent aussi
combien est délicat l'exercice de ce droit
arbitraire d'expulsion, sans explications,
sans garanties d'aucune sorte, legs des
législations passées imbues de la haine
'ù retraiter. Cela semble très facile,.
l'arbitraire : on fait ce qu'on veut ; on
n'a pas de motifs à donner, on se débar-
rasse des individus gênants avec une si-
gnature, et tout est dit. Oui, sous un
gouvernement despotique, rien évidem-
ment n'est plus commode. Mais, sous un
gouvernement parlementaire, avec le
contrôle de la presse et du Parlement,
l'arbitraire crée plus de difficultés qu'il
n'en résout. Et certes, M. Delsor expulsé
cause à M. Combes plus de tracas qu'il
ne vaut.
Un gouvernement intelligent serait ce-
lui qui se prêterait à la limitation de ce
droit d'expulsion, qui d'abord ne l'appli-
querait qu'en cas de nécessité absolue,
de danger imminent, et qui ne s'en ser-
virait pas pour interdire une confé-
rence : il ne faut pas prendre un pavé
pour écraser une mouche. Et vraiment,
l'abbé Delsor n'est rien de plus qu'un
moucheron, qui ne mérite pas tout le
bruit qui se fait autour de lui.
« SIGISMOND LACROIX,
lESBADICAUX - SOCIALISTES
La réunion de la Gauche radicale-socialiste
Les « sauvages » — Les débris
de l'ancien groupe
Le nouveau groupe de la Gauche radicale
s'est réuni hier, sous la présidence de M.
Bienvenu-Martin. Il a constaté que le nom-
bre des adhérents est actuellement de qua-
tre-vingt-deux.
La réunion a ensuite désigné les délégués
du groupe à la délégation des gauches. Ont
été désignés : MM. Bienvenu-Martin, Mau-
jan, Simyan, Pajot, Coulondre, Péronneau
et Fitte.
Quant à la proposition d'arbitrage du co-
mité exécutif du parti radical et radical-so-
cialiste, mise en avant par les membres
restants de l'ancien groupe, le nouveau
groupe estime qu'il n'y a pas lieu d'y don-
ner suite.
Il se bornera, par courtoisie, à donner des
indications au comité sur les causes de la
séparation.
Ajoutons que ce comité exécutif, qui se
réunit dans quelques jours, aura à renou-
veler son bureau et que les adhérents du
nouveau groupe de la Gauche radicale-socia-
liste auront un candidat à la présidence de
ce comité.
Un certain nombre de démissions se sont
encore produites dans le sein de l'ancien
groupe radical-socialiste. La plupart de ces
nouveaux démissionnaires paraissent, du
reste, absolument décidés à n'adhérer puur
le moment à aucun des groupes constitués
et à devenir ce qu'en termes parlementaires
on appelle des « sauvages ».
Au nombre de ceux-ci on peut citer : MM.
Berteaux, Beauquier, Henri Michel, Chena-
vaz, Messimy, Dubief, Tavé, Razimbaud,
Louis Martin, Puech, Bonnevay, Pierre
Baudin, Trouin, Chanoz, Ursleur, Clément,
Buyat, Cornet, Dauzon, Petitjean, Schnei-
der (Haut-Rhin), etc.
L'ancien groupe radical-socialiste compre-
nait cent-quatorze membres : si, aux qua-
tre-vingt-deux députés qui forment la Gau-
che radicale-socialiste, on ajoute les vingt
et un qui ne veulent faire partie d'aucun des
deux groupes, on constate que l'ancien
groupe radical-socialiste comptera désor-
mais onze membres au plus ; ce serait pres-
que, assez pour former un ministère, mais
à peine suffisant pour constituer le bureau
du groupe.
inroar « uasmus
Déclarations du préfet de Meurthe-et-Mo-
selle — La personnalité de l'abbé
Delsor — L'impression
à la frontière
M. Humbert, préfet de Meurthe-et-Mo-
selle, a fait à un rédacteur du Matin des
déclarations qui confirment de tous points
les renseignements que nous avons publiés
hier :
— Je n'ai pas été, a-t-il dit, le promoteur de
la mesure intervenue contre l'abbé Delsor. J'ai
transmis par téléphône, au ministère de l'inté-
rieur, la demande du sous-préfet de Lunéville.
J'accepte, bien entendu, et avec toutes ses con-
séquences éventuelles, la responsabilité de l'acte
qui porte ma signature. Je l'accepte d'autant
plus volontiers que je crois avoir bien servi la
France, que je représente, et l'Alsace-Lorraine,
dont je suis moi-même le fils exilé.
L'abbé Delsor n'a pas été expulsé pour la
conférences qu'il n'a pas faite mais à son occa-
sion, afin d'éviter une propagande également
dangereuse à la tranquillité et à la cordialité
discrète qui nous lie inaltérablement aux pro-
vinces perdues.
Vous savez qu'après 1870 le deuil de l'Alsace-
Lorraine prit bientôt une forme mystique, et
que ses populations religieuses confièrent peu
à peu au clergé le soin de leur protestation.
Cette attitude persévéra jusqu'en vers 1892. A
partir de cette époque, le clergé, toujours maître
de la situation, parut incliner à l'apaisement.
C'était son droit, son"intérêt peut-être, et je n'ai
pas à m'immiscer dans des questions qui ne re-
gardent exclusivement que la conscience de ses
électeurs. Mais pour retenir sans doute le mou-
vement qu'il avait d'abord favorisé, il prit l'ha-
bitude d'exposer à ses ouailles des comparaisons
fâcheuses entre la bienveillance de l'Allemagne
et l'intolérance de la République. C'était encore
son droit, tant que cette théorie respectait la
frontière. Ce ne l'était plus quand elle venait
troubler dans le département de Meurthe-et-
Moselle la colonie de quinze cents Alsaciens-
Lorrains qui s'est faite librement française.
Or, par les journaux, les brochures, les con-
férences, ce concept nouveau de la France op-
pressive a fait de tels progrès que beaucoup se
demandent ostensiblement si leur fidélité à la
patrie n'est pas un marché de dupes. La conta-
gion est même descendue jusqu'aux Lorrains
d'origine, dont quelques-uns, n'osant pas être
Allemands, voudraient être neutres. L'année der-
nière, le maire d'un chef-lieu de canton fron-
tière, M. de Monthureux, n'a pas craint de sou-
haiter a Mgr Turinaz de devenir l'évêque de la
Lorraine une et indépendante. Le prélat n'a pas
protesté, l'auditoire non plus.
- Les paradoxes de Barres et les boutades de
Jules Lemaître prennent une singulière impor-
tance quand elles se matérialisent. Tout ce qui
diminue sur notre terré vulnérable le respect
solidaire de la France et de ses institutions est
un péril national. Voilà pourquoi j'ai dû fermer
la chapelle de Lunéville, qui était le foyer de
la perturbation, interdire le Volkslreund qui en
était l'organe, et expulser l'abbé Delsor qui, in-
volontairement sans doute mais trop pratique-
ment, hélas 1 s'est fait, par la plume et la parole,
le mauvais ouvrier de la désaffection française.
On a dit, il est vrai, que je pouvais interdire
la conférence; j'avoue eue je n'ai cas trouve ce
pouvoir dans la loi. On a dit surtout que je ne
devais pas. appliquer à un Alsacien l'expression
insultante de sujet allemand. Comme lés ïor-
mules nous parviennent du ministère imprimées
et invariables, je demande qu'on me dise, avant
de me condamner, de quel qualificatif je devais
compléter la mention obligatoire de nationalité.
S'il avait été en ma puissance d'effacer l'His-
toire d'un trait de plume, l'abbé Delsor n'eût pas
été expulsé, il eût été Français.
Depuis qu'il a pris cette mesure, le préfet
de Meurthe-et-Moselle reçoit des lettres d'in-
jures grossières et de menaces. Mais, en
regard de ces manifestations nationalistes
et cléricales, il faut placer les manifesta-
tions républicaines.
M. Humbert a reçu du comité républicain
démocratique de l'arrondissement de Mire-
court, des comités de Charmes, Dompaire,
Darney, Vittel, Monthureux-sur-Saône, et
des cercles républicains démocratiques de
l'arrondissement, des adresses le félicitant
d'avoir empêché l'abbé Delsor « de troubler
l'ordre en Lorraine ».
C'est la note qui domine dans nos dépar-
tements de la frontière.
On ne pardonne pas à l'abbé Delsor
d'avoir excipé de sa qualité d'Alsacien pour
venir combattre le gouvernement républi-
cain.
Dans les couloirs de la Chambre, cette
opinion se manifestait ouvertement. -
Hier, l'un des membres do la Gauche radi-
cale, qui n'a pas voté vendredi dernier avec
le cabinet, nous disait qu'à son avis M.
l'abbé Delsor avait commis un acte de lèse-
patriotisme en abritant ses campagnes clé-
ricales et son agitation politique derrière sa
qualité d'Alsacien. l, ,".
Ajoutons que la lumière se fait tous les
jours un peu plus sur la personnalité de
l'abbé Delsor. Les journaux cléricaux
n'avaient-ils pas raconté que l'abbé Delsor
avait payé de la prison son attitude protes- ,
tataire ? - ,
Or, renseignements pris, l'abbé Delsor a
été condamné pour injure publique à un
culte reconnu par l'Etat. Il avait écrit dans
la Revue catholique d'Alsace que Berlin
était, plus que Paris, la capitale de la dé-
bauche universelle, et qu'il ne pouvait en
être autrement puisque le protestantisme
est le père naturel de la prostitution.
Ce n'est donc pas le protestataire, mais
bien le clérical que les tribunaux allemands
ont frappé.
Nous avons 'dit et prouvé que M. l'abbé
Delsor n'était pas protestataire, qu'il avait
voté les crédits pour l'armée allemande.
Dans une dépêche qu'il adresse aux jour-
naux nationalistes, M. l'abbé Delsor dé-
clare qu'il' avait voté contre l'augmentation
des crédits militaires ; mais M. Delsor a
voté, depuis qu'il est député au Reichstag,
tous les budgets de l'empire allemand, y
compris, bien entendu, les crédits militai-
res, alors que les députés protestataires ne
votaient jamais le budget.
A rapprocher l'attitude de M. l'abbé Del-
sor de celle de M. Jules Brice, député natio-
naliste de Nancy, qui refuse, à la Chambre
française, de voter le budget.
LES CONGRÉGATIONS
La quatrième chambre du tribunal cor-
rectionnel de Marseille a rendu son juge-
ment dans les poursuites intentées contre
le père franciscain Charbonnier en vertu
de la loi sur les associations. Le prévenu
avait continué à diriger dans le quartier
Endoume l'établissement de refuge pour
les missionnaires de son ordre, en dépit
de la dissolution de la congrégation. Il a
été condamné à 50 francs d'amende. Le
propriétaire de l'immeuble, également pour-
suivi, a été acquitté.
Le tribunal de Mende a rendu son juge-
ment dans les poursuites intentées contre
les treize religieuses de Saint-Gervais, in-
firmes ou garde-malades, poursuivies sous
l'inculpation d'infraction à la loi sur les
associations.
Toutes ont été condamnées : les infirmes
à 1 franc d'amende avec sursis ; deux ab-
sentes à 16 francs d'amende avec sursis ;
trois autres à 50 francs ; enfin, la supé-
rieure, Mme Assénât, à 500 francs.
La cour d'appel d'Aix-en-Provence a
rendu son jugement dans l'affaire de l'é-
cole libre de Cassis (Bouches-du-Rhône).
Il s'agissait de l'appel d'un jugement du
tribunal correctionnel de Marseille qui
avait condamné M. Emile Duport, pro-
priétaire de l'école, à 100 francs d'amende.
La cour a purement et simplement ac-
quitté l'appelant.
SOCIALISME & BEPtTBtlQÏÏE
Lorsque Millerand, qui était comme la
personnification du socialisme dans le gou-
vernement de la République, n'a plus fait
partie du ministère, n'étant d'ailleurs rem-
placé par aucun autre de @ son parti ni de sa
politique, j'en ai exprimé ici le regret très
formel et très raisonné.
J'ai vu là une lacune, un trou ; on pou-
vait dire aussi un recul dans un certain
sens. On eut une compensation : la pré-
sence de Jaurès dans le bureau du Parle-
ment : compensation parlementaire à un
déficit gouvernemental.
Mais l'élimination de Jaurès devait sui-
vre -et a suivi l'élimination de Millerand.
Bon nombre de socialistes n'en sont pas
fâchés, ils trouvent cela plus correct. Cette
manière de voir devrait tendre cependant
à faire sortir du Parlement tous les repré-
sentants du socialisme. Point de partici-
pation au gouvernement de la République :
point de participation à la vie parleihen-
taire.
C'est le comble de la doctrine. Alors, les
partisans de « la lutte de classes » ont une
entière satisfaction. Alors le divorce appa-
raît en évidence. Mais si l'on pense, comme
nous, que « la lutte de classes » n'est pas
un but, qu'elle ne peut pas être un but, et
que l'on doit toujours finir par s'entendre
pour une action commune de progrès, d'ac-
commodation, on doit penser aussi qu'après
trente années de République le socialisme
a sa place tout indiquée dans le Parle-
ment comme dans le gouvernement de la
République.
Pour nous, la République, issue de la
Révolution française, contient toutes les ré-
formes possibles et réalisables, au fur et à
mesure qu'elles prennent un caractère de
réalisation possible. Le socialisme n'est
pas une chose et la République une autre
chose, entre lesquelles choses serait un
abîme, un fossé, un Malus.
Mais le socialisme, ou ce que nous appe-
lons de ce nom, est dans la République elle-
même, dans sa na.re et dans sa légalité.
C'est pourquoi nous avons demandé bien
souvent l'organisation d'un ministère du
travail. ',.
L'aventure de Jaurès nous inspire donc
absolument le même regret et les mêmes
observations que l'aventure de Millerand.
C'est le double échec d'une méthode qui
nous parait la seule bonne, dont l'heure
était certainement venue, et à laquelle il
faudra revenir tôt ou tard, et le plus vite
serait le mieux.
Hector DEPASSE.
BAVARDAGE.
— Qu'attends-tu pour te faire chrétienne? crie
l'inquisiteur à la sorcière, dans la belle pièce de
Sardou.
— J'attends que les chrétiens soient meilleurs
que nous ! réplique la mahométane- -
Le mot est juste et cingle comme il faut ces
hypocrites, prêcheurs de charité, qui se mon-
trent plus brutaux et plus cruels que les sauva-
ges idolâtrés; - l
Est-il rien de plus répugnant que ces imagina-
tions de nonnes du Bon-Pasteur, inventant, pour
de malheureuses filles, des tortures inédites et
sadiques ? N'est-ce pas dans le cerveau des moi-
nes, affolés. par le mysticisme, que sont nées
ces visions de supplices, réalisées par l'Inquisi-
tion ? Celui-ci, entre autres : frotter de sel la
plante des pieds, et les faire lécher par la langue
râpeuse des chèvres, ainsi qu'il est révélé par les
archives du Saint-Office de Toulouse ? c
Jamais les raffinements de méchanceté, de fé-
rocité, ne furent poussées aussi loin que par les
doux chrétiens, béats et confits en leur Dieu.
La religieuse Bretagne vient encore de donner
une preuve nouvelle de cet esprit d'intolérance
furieuse': les gars du Finistère sé sont orga-
nisés en compagnies, dites de la Trique, daiis
le but avoué de pourchasser et d'assommer les
libres-penseurs, chouannerie nouvelle prête à
tous les guet-apens. T -,.' -;;,."
Que dire aussi de cette aventure? A Cleden-
Cap-Sizïïn, ces honnêtes gens ont juré de faire
déguerpir l'institutrice laïque. Chapitrés au con-
fessionnal, les jeunes chrétiens se Fendent la
nuit à l'école communale, enfoncent les portes,
lacèrent et détruisent livres et cahiers, et —
comme l'Eglise ne perd jamais de vue ses inté-
rêts matériels, - — emportent une somme de
140 francs trouvée dans les. tiroirs. Dieu fut con-
tent. sans cloute ? ,'",
Point. Il lui fallait plus et mieux. Ces mêmes
voleurs, en hâte de devenir assassins, se postent
sur le chemin où passe la sœur de l'institutrice,
une jeune fille de vingt-trois ans, et l'assomment
à coups de bâton. Elle reste sur la place, à demi
morte. Le chef de ces brutes a vingt-sept ans. Il
se nomme Arhau et a été arrêté.
Si nous attendons que les chrétiens soient
meilleurs que nous, nous attendrons longtemps.
Les prêtres, les séculiers, les réguliers, sont là
pour entretenir dans l'âme fruste des ignorants
la haine et la colère. Et nous savons ce qu'elles
valent.
Car c'est surtout de ces gens qu'il faut dire
qu'ils n'ont rien oublié ni rien appris : ils re-
grettent le bon temps où l'Eglise rôtissait ses
ennemis, et dans leurs yeux on retrouve îtt luour
des bûchers d'autrefois. Ah ! s'ils nous tenaient 1
Et c'est nous qu'on traite de bourreaux, alors
que nous nous contentons de les jeter dehors,
avec un coup de pied au cul.
UN PARISIEN.
LE SYSTÈME MÉTRIQUE
INTERNATIONALisa
La nouvelle loi des poids et mesures — Nos
étalons numérotés — Les prototypes in-
ternationaux déposés à Breteuil
La Convention du Mètre — Le
Bureau international — Un
pays neutre dans le parc
de Saint-Gloud
— Qu'est-ce que le mètre ?
- En voilà une question ! Et que vous a
donc appris votre maître d'école, si vous ne
savez pas, comme le plus ignare de vos
contemporains, que le mètre est la dix-mil-
lionnième partie du quart du méridien ter-
restre ? Et si ça ne vous suffit pas, je vous
dirai aussi que le kilogramme est le poids
d'un décimètre cube d'eau distillée à la tem-
pérature de 4 degrés centigrades. Etes-vous
content, maintenant, et vous ai-je assez ré-
pondu ?
— Mon brave ami, c'était peut-être ça
dans le temps ; mais ce ne l'est plus du
tout maintenant ; on a changé tout cela. On
a réformé le système métrique, refait les
étalons des poids et mesures, et si votre re-
jeton s'avisait dorénavant de répondre com-
me vous venez de le faire à son bacnut, ou
même à son simple Certificat d'études, il se-
rait illico blackboulé comme le dernier des
cancres, et ce serait justice.
— Bah ! Alors qu'est-ce qu'il devrait ré-
pondre, mon môme ?
- — lOQue « le mètre est la longueur, à la
température de zéro, du prototype interna-
tional, en platine iridié, qui a été sanctionné
par la Conférence générale des poids et me-
sures, tenue à Paris, en 1889, et qui est dé-
posé au pavillon de Breteuil, à Sèvres ».
2° Que « le kilogramme est la masse du
prototype international, en platine iridié,
qui a été aussi sanctionné par la Confé-
rence générale des poids et mesures, tenue
à Paris, en 1889, et qui est déposé non
moins au pavillon de Breteuil, à Sèvres ».
3° Que « les copies n° 8 de ce prototype
du mètre, et n° 35 du prototype du kilo-
gramme, déposées aux Archives nationales,
sont les étalons légaux pour la France ».
— En voilà une histoire ! On ne pouvait
donc pas nous laisser tranquilles chez nous,
avec notre bon vieux mètre national et no-
tre kilogramme idem, qui régissaient nos
mesures et poids depuis la fondation de no-
tre merveilleux système métrique ?
— Eh non ! C'est précisément parce que
les unités de mesure à système décimal
inaugurées par l'initiative française étaient
merveilleuses que, peu à peu, la majorité
des nations a désiré en faire les unités in-
ternationales, afin d'aboutir à cet idéal civi-
lisateur : un seul poids et une seule lon-
gueur types pour les recherches de la scien-
ce, les applications techniques et les tran-
sactions commerciales du monde entier.
Cette nécessité d'une unité internationale
s'est manifestée tout d'abord lorsqu'il s'est
agi d'établir les cartes géodésiques. autre-
ment dit de grouper en mesure générale de
la terre toutes les mensurations particuliè-
res que chaque pays avait faites chez lui.
Il fallait naturellement tout rapporter à une
même unité, et ce fut un premier hommage
que la science mondiale rendit au système
métrique décimal en demandant, dès la pre-
mière moitié du dernier siècle, que tea rè.
gles géodésiques dont on se servait dans
chaque nation pour exécuter ces mesures
terrestres fussent comparées et rapportées
au mètre français, base du système dét.'i-"
ma!.
Ces déterminations comparatives des rè-
gles géodésiques ayant-été faites du temps
et par les soins d'Arago, tout promettait
donc d'aller pour le mieux. Une fois que
chaque pays aurait terminé sa tâche, il n'y
aurait plus qu'a recoller ensemble tous les
résultats obtenus.
Mais patatras ! le moment venu, vers
1865, de réunir dans le vaste réseau prévu
toutes les opérations particulières des Etats,
ça ne se recolla pas du tout. Et pourtant
lesdites opérations avaient été conduites de
manière impeccable, à n'en point douter.
D'ailleurs, la discordance, étant générale
ne pouvait être attribuée qu'à une cause
unique. Il fallut bien alors se rendre à l'é-
vidence : cette cause de toute l'erreur était,
au point de départ, dans l'unité compara-
tive elle-même, c'est-à-dire dans le mètre
étalon français, sur lequel tout le reste
avait été copié.
Et, en fait, quoi d'étonnant ?
Construite à une-époque où les sciences
métallurgiques, chimiques et physiques n'a-
vaient à leur disposition que des moyens
encore rudimentaires, la règle qui consti-
tuait notre mètre des Archives premier et
primitif présentait d'incontestables défauts,
incompatibles avec les exigences des con-
naissances acquises depuis et nécessitant,
tout le monde en tomba facilement d'accord,
son remplacement.
Mais, et çe fut là le nouveau triomphe du
système métrique, l'accord des nations
groupées pour cet objet en Convention in-
ternationale des poids et mesures ne fut
pas moins unanime pour décider que le
nouveau prototype du mètre, et par la mê-
me occasion celui du kilogramme, seraient
les copies aussi identiques que possible du
mètre et du kilogramme des Archives, qu'il
fallait abandonner, mais qui resteraient
ainsi les pères du système métrique, qu'on
prévoyait déjà devoir s'étendre, en raison
de cette réforme même, à la terre civilisée
tout entière.
La convention pour établir internationa-
lement ces nouveaux poids et mesures mé-
triques fut signée dès 1875, et les nations
signataires convinrent de fonder dans ce
but, à frais communs, ce Bureau interna-
tional des poids et mesures, où, grâce à
l'extrême obligeance des deux éminents sa-
vants, MM. les docteurs Benoît et Guillau-
me, qui assument depuis de longues années
la direction et l'impeccabilité de ce merveil-
leux établissement de science et de préci-
sion, je pourrai un de ces jours vous faire
pénétrer les secrets de cette précision, de
ces balances, qui pèsent le cent-millième
de gramme (vous entendez bien, le 100 mil-
lième) ; de ces instruments comparateurs
pour les règles destinées à former les mè-
tres, et qui mesurent réellement, matériel-
lement, des longueurs de un cent-millième
de millimètre.
Votre pauvre tête, hein ! mais non, vous
verrez que c'est très simple. Pour aujour-
d'hui, comme les jours sont courts et que
mon ruban s'allonge, je me contenterai de
vous faire jeter un œil sur l'endroit, si vous
voulez bien me suivre d'abord dans la
grande rue de Sèvres, un peu plus haut que
la manufacture de porcelaines, puis pren-
dre la première porte à droite, entrer ainsi
dans l'enceinte du parc de Saint-Cloud,
grimper un chemin ombreux et creux, quoi-
que fort abrupt, et vous heurter tout «en
haut à une porte où il est écrit : « Le p-j-
blic n'entre pas ici. »
C'est là l'ancien pavillon de Breteuil, offert
par la France au groupe des vingt-et-une
nations signataires de la Convention inter-
nationale dont elle est elle-même pour de-
venir le Bureau international des poids et
mesures, le laboratoire unique où- les me-
sures fondamentales du monde entier sont
certifiées exactes, le dépôt immuable des
nouveaux prototypes internationaux du
mètre et du kilogramme, en platine iridié —
je vous dirai pourquoi — dont les étalons
nationaux, bien que d'égale valeur, ne sont
plus désormais que de simples copies, telles
que les ont sanctionnées d'une part la Con-
férence générale internationale de 1889, les
lois particulières de toutes les nations coopé-
rantes, et la loi française elle-même du
11 juillet dernier.
Pour assurer, contre absolument tout
danger, la perpétuité de l'œuvre et de son
précieux dépôt, non seulement on a
choisi ce coin presque mystérieux, bien
qu'un peu égayé par une trouée à travers
les arbres sur Paris, soustrait à toutes les
causes de troubles pour les opérateurs et
de trépidations pour les instruments ultra
sensibles ; mais ce territoire, en sa simple
enceinte de bois croisés, a été déclaré
pays neutre et soustrait ainsi même au ris-
que de guerre.
ERNEST Lesigne.
LA RUSSIE & LE JAPON
La réponse de la Russie — L'impression
dans les milieux diplomatiques
Les dernières nouvelles
Une dépêche de Saint-Pétersbourg an-
nonce que le cabinet russe continue à étu-
dier la réponse du Japon, au sujet de la-
quelle on garde actuellement un secret ab-
solu. 1
Le gouvernement japonais ne compte pas
recevoir la répause de la Russie avant une
semaine au moins.
Dans le monde diplomatique, l'on conti-
nue à espérer une solution pacifique. Le mi-
nistre du Japon à Saint-Pétersbourg a décla-
ré au représentant d'une agence que si le
public était en position de connaître tout ce
qui se passe dans les chancelleries, les
bruits alarmistes ne pourraient trquver la
moindre créance.
On télégraphie de Vienne qu'au bal de la
cour qui a eu lieu hier soir, 1 empereur
François-Joseph, parlant aux diplomates
réunis dans le Cercle général, s'est exprimé
en termes optimistes sur ia crise en Extrê-
me-Orient. S'adressant à M. Storer, ambas-
sadeur des Etats-Unis, le souverain a dit :
« A mon avis, il se produit une améliora-
tion en Extrême-Orient, et je crois que tout
va s'arranger d'une façon satisfaisante. »
Le ministre du Japon a été l'une des per-
sonnalités les plus remarquées du bal.
Le ministre de Russie à Séoul, M. Pavlof,
a affirmé au rédacteur du New-York He-
rald qui Interrogeait que la Russie recon-
naissait à la Corée le droit d'ouvrir au com-
merce international tous les ports qu'elle
désirait et qu'elle ne nierait jamais que la
Corée dût rester un Etat indépendant.
M. Pavlof a ajouté que la Russie ne sou-
lèverait pas la question de la construction
par le Japon du chemin de fer Séoul-Fusan,
dont la jconcessiûiï a Mè accordée* il ï a
trois ans, à une compagnie japonaise, mais
elle s'opposerait à ce que la ligne dû nord
Séoul-Wijn, construite par les Coréens, pas-
sât eux mains des Japonais avant qu'un
second accord soit intervenu. ,- -
Voici maintenant des nouvelles plus pes-
simistes :
Pcwl-Arlhur. 13 janvier.
L'occupation de Hsin-Min-Tun, à trente milles
a l'ouest de Moukden. avait été décidée, il y a
une semaine. Les journaux russes annoncent
aujourd'hui qu'elle a été réalisée.
Les banques japonaises se hâtent de clore
leurs comptes en Mandchourie et de suspendre
leurs affaires avec le pays.
Les'Japonais cherchent, en ce moment, en
Mandchourie et en Corée, des agents (les rési-
dents japonais ayant quitté le pays) qui se tien-
nent au courant des mouvements des Musse?.
Les Pusses de Port-Arthur voient dans la der-
nière note japonaise une demande catégorique
peur de nouvelles concessions.
Le vapeur japonais Kamachi-Marll, ve-
nant du Japon et de Chine, est arrivé hier
soir à Marseille avec cinquante-deux passa-
gers, dont vingt ont débarqué.
Peu après son passage à Colombo, la
commandant de ce paquebot, croyant que
les relations diplomatiques étaient rompues
entre le Japon et la Russie, fit enlever lo
nom du navire à l'avant et à l'arrière, chan-
ger les couleurs de la cheminée et arborer
à l'arrière le drapeau anglais.
Le navire est arrivé à Marseille texs in.
cident.
On mande de Tien-Tsin ;au Standard
qu'un train spécial a été formé pour trans-
porter à Port-Arthur les troupes russes qui
vont quitter Pékin et Tien-Tsin. Un faible
détachement-serait laissé à Pékin pour gar-
der la légation, mais Tieu-Tsin serait entiè-
rement évacué.
On annonce, d'autre part, que le gouver-
nement russe a demandé l'envoi en Mand-
chourie de 15,000 hommes de troupes chi-
noises pour protéger'les sujets chinois dans
cette province.
Le transport russe Orcl et le transport
charbonnier Saratof sont arrivés à Port-
Saïd. Ce dernier embarquera 4,000 tonnes
de charbon, ce qui l'obligera à stationner
deux jours ; mais VOrel partira immédiate-
ment. i
La flottille des torpilleurs russes se réap-
provisionne en attendant les deux autres
navires de l'escadre russe. ,
LA CHAMBRE
Le rachat des chemins de fer — MM. Bour-
rat et Plichon
La Chambre a commencé, hier, la dis-
cussion des propositions de loi tendant au
rachat des réseaux de l'Ouest et du Midi
L'urgence déclarée, M. Bourrât monte à la
tribune.
Toute la question, dit M. Bourrât, se résume
en ceci : Etes-vous disposés à continuer à don-
ner aux compagnies de l'Ouest et du Midi, sous
la forme de garanties d'intérêt, des sommes
considérables? Je ne le pense pas.
La compagnie de l'Ouest a remboursé, depuis
sa fondation, 6 0/0 de sa dette. Pourra-t-elle en
cinquante-trois ans, rembourser le reste, c'est-
à-dire 94 0/0 ? Poser la question, c'est la résou-
dre.
La situation de la compagnie du Midi est exac-
tement la même. -
M. Rouvier. — Les propositions de rachat, tel-
les que vous les présentez, reposent sur des tv-
pothèses.
M. Doumer. — Oui, mais le champ des hypo-
thèses est limité. ""Ç
M. Rouvier. — Un gouvernement ne peut frai-
.ter d aussi graves questions en raisonnant sur
des hypothèses.
M. Bourrat. — On invoque, il est vrai, l'avis
des chambres'de commerce, défavorables au ra-
chat ; mais les chambres de commerce représen-
tent-elles bien l'opinion de leurs électeurs sur
ce sujet? -
M. Bourrât examine ce qu'ont fait les
compagnies au point de vue des transports.
La compagnie de l'Ouest manque régulière-
ment de wagons lorsqu'il y a une forte ré-
colte à transporter.
— L'Etat, dit M. Bourrât, a déjà obtenu d'ex-
cellents résultats. Il fera encore mieux lorsqu'il
sera débarrassé des .entraves dont l'enserre le
réseau d'Orléans.
Les compagnies font dire qu'elles rapportent
à l'Etat de grosses sommes. Dans son rapport
de 1891, M. Pelletan établissait ce qu'il y avait
de fantaisiste dans les calculs des compagnies.
M. Bourrât expose qu'en Allemagne la
prospérité tient au développement parallèle
des chemins dé fer et des canaux.
— Dans ce pays, dit-Il, il y a près de 14,000
kilomètres de canaux ou voies navigables contre
4,700 en France. Le trafic de la gare d'eau de
Magdebourg est supérieur au trafic des trente
gares d'eau de notre pays.
De nombreux exemples prouvent que la coopé-
ration des voies navigables ne peut qu'être favo-
rable au trafic des chemins de fer.
M. Bourrât reproche aux compagnies de
faire construire du matériel à l'étranger.,
Leurs frais généraux sont beaucoup trop
élevés.
En prenant pour base le prix du kilomètre
de chemin de fer fourni par le gouverne-
ment, on trouve que le rachat produirait
une économie de plus de 2 millions par an
pour le Midi et de plus de 8 millions pour
l'Ouest -
Le nombre des hauts employés des direct
tions serait réduit par suite du rachat, car
l'Etat ne peut créer des emplois sans une
autorisation du Parlement.
Avec les deux réseaux de l'Ouest et du Midi,
dit l'orateur, l'Etat posséderait un réseau idéal
comprenant, avec les lignes qu'il exploite déjà,
12,446 kilomètres.
Quant à la procédure à suivre pour arriver
au rachat, il suffirait que la Chambre adoptât
celle qu'elle a employée en 1878. Un vote sufli-
rait. >',
M. Bourrât déclare que l'Etat, dans l'inté-
rêt de la défense nationale, doit avoir la
direction des chemins de fer.
Partout, à l'étranger, on rachète les che-
mins de fer, et la prospérité augmente.,
Pourquoi en serait-il autrement èn France ?
M. Bourrât estime que la situation finan-
cière exige le rachat, car l'Etat est, vis-à-vis
de certaines compagnies, dans la situation
d'un bailleur de fonds qui ferait des avances
insolvables.
— Le pays réclame deux choses, dit-il en
terminant, le rachat des chemins de fer et
l'impôt sur le revenu. En votant le rachat,
la Chambre aura rendu un grand service au
pays.
Après M. Bourrât, c'est M. Plichbn, qui
défend la thèse contraire.
Un léger incident a lieu quand M. Plichon
paraît à la tribune. Comme il porte avec lui
un paquet de documents : « Ce sont des
actions 1 » crie quelqu'un. M. Plichon pro-
teste vivement contre ces paroles, et M.
Brisson, qui préside, déclare que s'ij avait
entendu l'interruption, il l1 auraiLréprimée*
l
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