Titre : L'Action française : organe du nationalisme intégral / directeur politique : Henri Vaugeois ; rédacteur en chef : Léon Daudet
Auteur : Action française. Auteur du texte
Éditeur : Action française (Paris)
Date d'édition : 1923-12-07
Contributeur : Vaugeois, Henri (1864-1916). Directeur de publication
Contributeur : Daudet, Léon (1867-1942). Directeur de publication
Contributeur : Maurras, Charles (1868-1952). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 07 décembre 1923 07 décembre 1923
Description : 1923/12/07 (Numéro 340). 1923/12/07 (Numéro 340).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Description : Collection numérique : BIPFPIG87 Collection numérique : BIPFPIG87
Description : Collection numérique : BIPFPIG69 Collection numérique : BIPFPIG69
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k761790d
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, GR FOL-LC2-6354
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 18/01/2011
: Seizième Année. — N° 340,
3 EDITION DU MATIN
Vendredi 7 Décembre 1923.
jl.
U
15
• Seine ei Seine-ei-Oisc.
20 "T 1-
Dépariemenâ, Cortmfac. ;
ABONNEMENTS : o.Ai !
. France.ot Colonies. 48 fr. 25 Tr a 13fr, 1
. Etranger, , , ; , , , 82 » 42 » 22» '
ORGANE DU NATIONALISME INTEGRAL
$ Tout ce qui est national est notre. »
Le Duc d'ORLÉANS
. héritier des quarante Rois qui en mille ans firent la
RÉDACTION & ADMINISTRATION
li? rue d e Rome, P ARIS (8')
Adr.
Tél.
Public: ié: Central 74-77
i Rédaction : Centrai 75-44
Apris 10 h. du soir : Ségu r i 1 -68
Iteflistre dé Commerce s Seine 7S.582
Fondateur s HENRI YALGEOIS Directeurs politiques s LÉON DAUDRT et CHARLES MAURRAS — Rédacteur en chef • MAURICE PUJO
AUX
Maurice Barrés, Déroiilède et les
anlidrcyftlsards avalent raison :
« Le 3 août 1914, les événements ont donné
cruellement raison à la clairvoyance de ceux que
nous considérions comme des aveugles et des
benêts. Les aveugles et les benêts n'étaient pas
du .côté que nous pensions. »
GUSTAVE HERVÉ (bien luné)
dans la Victoire
«
POÈTES
))
Notre directeur Charles Mourras publie
à la': Librairie du Divan, 37, rue Bona
parte, "un petit volume d'études littéraires,
intitulé Poètes : Verlaine, Mallarmé, Mau
rice du Plessys, Jean-Marc Bernard, Paul
Valéry et d'autres y sont présentés tour
à tour dans une lumière étrangement
■ variée, car certaines dè ces pages datent
de 1896 et d'autres sont de Van dernier.
Donnons Fessentiel du portrait de Mal
larmé ; : , ,
■ ...Des personnes qui ont approché Mal
larmé ou regardé ses meilleurs portraits,
quelques-unes" ont ràpp'orté un sentiment"
qui confiime bien «nos impressions de lec
ture. La tête plaisait, mais elle inquiétait-
'aussi par l'excessive finesse-de ses cour
tes,. dont les traits semblaient se replier
les uns dans les autres.- L'œil voilé et pres
que dissimulé dans la profondeur des or
bites, sous le poids- des paupières et la
longueur des cils, laissait à peine voir com
me une gouttelette indécise l'obscur re-
.gard. ; mais, entrouvert, cet. œil singulier
trahissait un monde d'idées fixes et de rê
veries maniaques. Une tête pareille semblait
faite à- souhait pour l'idée d'étonner et de
piper le monde. ,
i> Néanmoins, je crois fermement que cet
homme si fin et si clairvoyant put aussi
être la dupe de son système. Tout au moins,
s'il y eut, à son départ, quelque gageure,
dut-il^ pour la tenir, la prendre au sé
rieux. Un système l'enveloppa, et je ne dis
pas un système de choix ni de. ljasard,
mais bien le système esthétique professé
.par les plus brillants de sa génération.
■ Sous les beaux .dehors de la rime riche
■et d'une stricte correction grammaticale, nos
Parnassiens ajoutent " aux désordres du
• Romantisme up malheur nouveau. Le mot,
jusque-là-asservi tout au moins à son sens,
'c'est-à-dire "à un certain objet qu'il repré
sentait, est désormais pris en lui-même,
uniquement .choyé pour sa valeur musicale,
son coloris ou sa forme. De là l'indiffé
rence des Parnassiens au fond des sujets
évoqués. , Ces messieurs se contentaient
d'assortir des mots à certains thèmes, et
l'essentiel était pour eux d'obtenir un « as
sortiment réussi ».
Mallarmé vécut et mourut Parnassien,
Mallarmé réalisa à la lettre toutes les
idées du Parnasse, parce que nul poète
(il mérite vraiment ce nom) ne naquit avec
une. imagination plus glacée...
Il semble définir son imagination dans
«'apostrophé d'Hérodiade au nfiroir fidèle
Eau froide par i'ennui dans ton cadre gelée !
, . Lie monde lui apparaissait immobile ét
-îgé sur champ de cristal. De là peut-être
l 'éclat de son vers lorsqu'il fixe une image
précise,'"un objet isolé et distinct des autres
objets. On ferait une jolie collection des
.«'beaux, vers » de Stéphane Mallarmé, et
je gage qu'on en trouverait-jusque dans
ses poèmes les plus abscons :
_La chair est triste, hélas ! et j'ai lu tous les li
èvres.
...Donner un sens trop pur aux mots de la tribu.
...Lysr ! et l'un de vous tous pour l'ingénuité.
...Une sonore, vaine et monotone ligne...'
...Où rêve, ô câline sœup,
• Un ' automne jonché de lâches de rousseur.
«Je t 'apporte l'enfant d'une nuit • d'Idumée.
Oui, voilà de. beaux vers, 1 de ces beaux
vers qui « de plusieurs vocables » nous
refont, disait-il lui-même, ,« un : mot total;
neuf, étranger à la langue commune et
comme incantatoire », de ces vers qui
achèvent « l'isolement de la parole »... Mais,
quand il s'agit d'exprimer les rapports de'
ces objets entre eux et donc de se mouvoir
d'un objet à l'objet voisin, la difficulté
commence pour lui. Il se sentait paralyti
que. Nulle chaleur, nulle source de 'mou
vement, Boileau, qui a souffert bien avant
Mallarmé de la même paralysie, et se plai
gnait que les transitions fussent « le plus
difficile chef-d'œuvre de la poésie », avait
cette ressource'de considérer, les relations
objectives, impersonnelles et rationnelles
des objets qui, eux-mêmes^ l'aidaient ainsi
à se transporter de l'un jusqu'à l'autre ;
. ainsi côtoya-t-il, en plus d'un cas, la pro
se •; mais, en d'autres cas,, sa poésie se
soutint assez dignement. Romantique et
; Parnassien* et privé ainsi de ses points
d'appui dans la nature et dans la raison,
Stéphane Mallarmé devait chercher les
principes de son discours dans les éléments
mêmes de ce discours, dans les mots. Ce
qui manquait à son talent le prédestinait
à réaliser ce qu'il est permis d'appeler,
avee un sourire, « le Parnassisme inté
gral ». •
* *
L'objet fut repoussé dans un oubli com
plet. ^M. Mallarmé déclara en vers et 'en
urose que le vrai poète n'avait point souci
' > !e l'objet... -
Les mots choisissent en souverains, se
condes convenances de nombre ou de
couleur, leur place exacte dans le poème.
Ce sont des 'sons associés. Ni syntaxe, ni
j style, une mosaïque de vocables, dont une
jeunesse naïve s'évertuera longtemps à dé-,
couvrir le sens profond...
Pour mon compte,- je tiens que les an
thologies recueilleront certains fragments
de *sa poésie : d'abord une douzaine de
vers isolés et frappants dont j'ai marqué
le charme, une ou deux de ses plus cu
rieuses excentricités (il faut bien que la
postérité connaisse nos monstres), enfin
quelques tirades comme la jolie échappée
d e L'A près-Midi, qui est dans l'œuvre de
Mallarmé comme l'Epître à Jean Racine
dans l'œuvre de Boileau :
Tâchç donc, instrument des' fuites, ô maligne
Syrinx, de refleurir aux lacs où tu m'attends !
Moi, de ma rumeur fier, je vais parler longtemps
Des déesses et par d'idolâtres peintures .
A leur ombres enlever encore des ceintures.
Ainsi, quand des raisins j'ai sucé la clarté,
Pour bannir un regret par ma feinte écarté,
Rieur, j'élève au ciel d'été la grappe vide,
Et, soufflant dans les peaux lumineuses, avide
D'ivresse, jusqu'au soir je regarde au travers.
Ce raisin décharné, traversé d'un coup
de soleil, m'a de tout temps causé la même
joie ingénue et, dirai-je, faunesque. Mais
quelle fine imagination encore, que d'aller >
nommer la flûte de Pan,- la libératrice Sy-
rinx, « instrument des fuites » humaines.
Voilà, certes, de quoi conserver le nom d'un
poète. -
Charles MAURRAS
Commént
Philippe Daudet
est-il mort ?
VIDAL A L'INSTRUCTION
Au début de l'après-midi d'hier, M. Bar-
naud a entendu Gabriel Tondini, 19 ans,
neveu du garagiste Foucault de Levallois-
Perret. Le témoin a confirmé que la voi
ture avait été lavée et ; nettoyée samedi
soir, 24 novembre, dans le garage de son
oncle, par le chauffeur Bajot et par la
femme de celui-ci. Il a ensuite rappelé les
circonstances dans lesquelles un énigma-
tique personnage, grossièrement maquillé,
avait pénétre dans le garage et visité mi
nutieusement le taxi.
A 2 h. 30, l'anarchiste Georges Vidal est
entré dans le cabinet du juge ; il en est
sorti vers 6 heures. Ses explications ont
'porté sur les faits qui se seraient déroulés
depuis le jeudi 22, à 4 heures de l'après-
midi — date à laquelle il prétend que Phi
lippe Daudet se serait présenté seul et
spontanément aux bureaux du Libertaire
— jusqu'au lendemain vendredi, à 16 h. 30.
Vidal, nous dit-on, n'a guère fait que re
produire le récit du Libertaire. L'inter
rogatoire se poursuivra aujourd'hui. Il est
probable que ce récit, qui fourmille de
contradictions et d'absurdités, subira la
critique du juge. '
LE « TEMOIN MYSTEREIUX »
Après le départ de Vidal, deux inspec
teurs de police ont introduit dans le cabi
net de M.,Barnaud celui que les journaux
ont appelé « le témoin mystérieux » et
dont le nom est Binetti Jean.
Ce témoin s'était présenté à nos bureaux
lundi soir en nous faisant passer une lettre.
Reçu par nous, il nous fit des déclarations
;dçnt.la première partie nous parut méri
ter d'être vérifiée parce que certains traits,
pour qui; connaissait le caractère et les
habitudes de Philippe, la rendaient. très;
vraisemblable. L'homme affirmait d'ail
leurs l'existence d'une pièce, qui aurait eu
assurément un intérêt capital, qu'il disait
avoir égarée, mais qu'il se faisait fort de
retrouver. Enfin il invoquait des témoins
dont il nous donnait les noms.
La seconde partie de ses dires; ; où il
racontait que, le samedi, il avait vu le taxi
du chauffeur Bajot stationner dans l'après-
midi devant les bureaux du Libertaire,
nous parut, dès le premier moment, beau
coup moins sérieuse. Nous pensâmes qu'il
essayait peut-être de corser par des in
ventions un peu d-, vérité. Il appartenait
à l'instruction de tirer la chose au clair.
C'est dans ces conditions que mardi,
avec le secret qu'il nous avait demandé,
nous avons conduit Binetti chez le juge à
«mi il rénéta ce qu'il nous avait dit. M.
Barnaud, ayant fait les vérificatifs néces
saires, ueciaraii hier que le récit au témoin
était inexact en ce qui concerne la jour
née de samedi, ce qui ne nous a pas sur
pris. Pour le reste de ses « révélations »,
M. Barnaud n'en a rien dit :on peut sup
poser que les investigations ne sont pas
terminées. Nous croyons savoir toutefois
que la pièce dont il avait été question n'a
pas été retrouvée.
Nous n'attendrons pas longtemps pour
savoir s'il y a lieu de retenir quelque cho
se de cette déposition ou si nous'devons la
considérer comme émanant de l'imagi
nation d'un pauvre diable alcoolique et
toxicomane, sinon d'un compère qui au
rait essayé d'égarer la justice sur une
fausse piste.
. UN MENSONGE DESESPERE
La découverte du pardessus parmi les
vêtements de Philippe à Lariboisière a
trouvé les assassins désemparés. La vente
de ce pardessus par l'enfant dans, la jour
née de samedi constituait un élément
important de la fable par laquelle ils ont
espéré masquer leur crime. Sur ce point,
dans toutes leurs déclarations, ils se sont
engagés et enferrés: Mais Philippe n'avait
pas vendu son- pardessus et les voilà en
peine pour expliquer qu'on ait trouvé dans
sa poche 83 francs. Après s'être tus pen
dant deux jours, les misérables ont tenté
hier une réponse. On «va juger de sa va
leur : .
Dans son papier, Maurice Pujo prétend que
Philippe Daudet est revenu au Libertaire le sa.
medi 24 novembre. Il se base sur ce fait que l'on
a trouvé sur Philippe la somme de 83 francs, au
moment de sa mort, alors que le matin'même il
était sans argent et obligé d'emprunter 35 francs
à Charles d'Avray. Comme d'ordinaire, l'objection
de Pujo est enfantine. En effet, même si Philippe
(jeune homme inconnu à ce moment) était revenu
me trouver samedi au Libertaire quel intérêt au-
rais-je le cacher à l'heure actuelle, M. Pujo ,?
Mais Philippe n'est pas revenu le samedi: et je
ne l'ai plus revu. J'ignore où mon jeune camarade
a pu se procurer l'argent qu'il-possédait. A-t-il
vendu son pardessus V Je le crois. Le chauffeur
affirme qu'au moment où il a pris Philippe dans
son taxi, le jeune homme n'avait pas de pardessus.
Cette thèse me semble la vraie. Mais les Camelots
du Roi prétendent que Philippe n'avait jamais
quitté son pardessus et que ce dernier a été enre
gistré à l'hôpital. A la Police Judiciaire on m'a
fait voir le pardessus. 11 ressemble certainement à 1
celui que portait Philippe quand il est venu au Li
bertaire. Mais on comprend facilement que d'une
part je n'avais pas examiné sur toutes ses coutu
res le pardessus de l'inconnu et que, d'autre part,
il est très facile de substituer un pardessus analo
gue au disparu, quand on s'appelle M. Léon Dau
det et qu'on a des amis qui s'introduisent furtive
ment dans les garages...
« J'ignore... > « Je le crois... > « Cette
thèse me semble la vraie... » Chaque terme
sue l'embarras et l'angoisse. Puis, brusque
ment, le misérable traqué se réfugie dans
l'explication funambulesque c'est Léon
Daudet qui, à l'hôpital, aura substitué un
pardessus pareil à celui qui avait été vendu
par son fils !
Il n'y a qu'un malheur, c'est que la pré
sence du pardessus parmi les vêtements de
l'enfant a été constatée dès le samedi soir
24 novembre sur le registre d'entrée à La
riboisière, ainsi qu'en fait foi le texte du
bulletin que nous avons publié. A ce mo
ment, Léon Daudet, hélas ! n'était pas là.
Il nedevait venir à Lariboisière que dans
l'après-midi du lendemain pour reconnaî
tre son enfant et c'est six jours plus.tard
seulement qu'il devait apprendre l'horrible
machination dont il avait été victime.
« Si. Philippe était retourné au Libertai
re le samedi, quel intérêt aurais-je à le ca
cher ? î> demande le sieur Vidal. Je ré
ponds, pour aujourd'hui, au misérable aux
abois : un intérêt si fort qu'il lui a fait
commettre ce mensonge désespère.
OU EST LA VALISE ?
Un des premiers faits qui ont été si
gnalés au juge d'instruction, c'est que, le
jour de sa fugue, Philippe fut rencontré
par un de ses camarades de lycée, place
Saint-Sulpice, de bonne heure, portant
une valise. A son camarade, il expliqua
qu'il transportait -des accessoires :de :
sport.
Au Havre, le patron de l'hôtel Bellevue
a dit à un de nos confrères que le voya
geur qui s'était inscrit sous le nom "de
Pierre Bouchamps portait un léger ba
gage : valise ou sac. Il n'a pas oit qu'il
l'avait abandonné dans son hôtel au mo
ment "du départ. Philippe est donc parti
avec cette valise.
On sait que l'entant a quitté l'h5tel
Bellevue vers sept heures du matin, avec
l'intention de prendre le premier tfain
pour Paris qui part à 8 h. 45. Mais, pour
un motif ou pour un autre, il le manqua.
C'est alors qu'il prit le taxi du chauffeur
Lefèvre et se. fit promener autour des
bassins. . .
Le chauffeur Lefèvre n'a pas parlé de
valise. L'a-t-il vue ? Philippe, avant de
monter dans sa voiture, l'avait-il déposée
à la consigne de la gare ou ailleurs ? L 'a-
t-il rèprise avant de monter dans le train-
de 10 h. 03 ? L'a-t-il mise, â l'arrivée, à
la consigne de la gare Saint-Lazare 1 L 'a-
t-il portée ailleurs ? L'avâit-il avec lui
lorsqu'il est entré au Libertaire 1 .
De toutes façons, cette valise doit se
retrouver. '
_ Maurice PUJO
ECHOS
— La Chambre a coté la loi électorale
(suppression des listes : incomplètes), M.
Poincaré avait posé la question de con
fiance. .
— Les élections anglaises ont eu lieu hier.
— Le président Coolidge a lu hier le
message présidentiel, devant le Congrès.
Rien ne fait plus plaisir qu'une belle photogra
phie. Fred Boissonnas, l'éminent artiste sait con
cilier la ressemblance la plus vivante avec une pré
sentation parfaite. Vous savez qu'il'a repris l'atelier
Chéri Rousseau, 12 rue Boissy-d'Anglas.
La fille Berton sera jugée
le 18 décembre
On confirme au Palais que les débats
du procès de Germaine Berton demeurent
fixés à la date du 18 décembre. Le bruit
avait été répandu, ces jours derniers, que
l'affaire serait renvoyée à une ■ autre ses
sion.
L'accusation a cité 25 témoins. La Berton
en a déjà fait citer plus de cent : tous les
copains du Libertaire seront là ! Joli cor
tège, en vérité. Du sang et de la boue ! -
LA POLITIQUE
I. Obsèques nationales -
de Maurice Barrés
Les obsèques de'Maurice Barrés seront
donc faites à Notre-Dame aux frais de
l'Etat. Par ce signe visible s'exprimera le
sentiment de toutes les élites et de toutes
foule qui sont dignes- de ce magnifique
pays, mais le remerciement' a un grand
bienfaiteur comportera aussi l'hommage
naturel de tout ce qui pense à un servi
teur éminent des intérêts supérieurs .de
J!esprit. ,
" Les-plus belles couronnes s'accumulent
sur ce -cercueil. Elles pourront passer
copirue toute chose: l'œuvre double de Bar
rés -leur- survit déjà, toute riante des im
mortalités dé la France et. des splendeurs
magiques,de l'ardente perfection de
son art. Le deuil qui nous accable, les
devoirs sévères qui nous incombent, la
nécessité de ne rien céder à l'ennemi pu
blic qui, en nous frappant, espère ralen
tir lès coups que nous lui portons,. nous
obligent,«hélas! à différer le monument
de gratitude et de gloire que nous aussi de
vons à cette noble cendre. Patience !
Nous parlerons, nous aussi, et nous dirons
ce qu'il faudra pour que notre hommage,
jsans être digne..d'une si illustre mémoire,
sans lui rendre' des services dont elle n'a
pas besoin, serve pourtant ' à en faire
comprendre telle ou telle particularité
historique dont les traces pourraient être
obscurcies avec le temps !
Nous n'avons voulu que répéter "«aujour
d'hui la fidélité de notre douleur.
II. La soirée du samedi 24f" :
et la police
Personne n'en parle, J'en parlerai. On
a peur. Mais je nc.,çrarins rien : il faut des
éclaircissements. *
Nous disions l'autre jour : ou bien le
service d'identification policière fonc
tionne extrêmement mal, ou bien les ex
traordinaires négligences commises le sa
medi soir 24 novembre constituent les plus
-suspecte des manœuvres policières. Les
esprits qui inclineraient à expliquer ce
malheur par la négligenpe feront bien de
méditer le renseignement que nous donne
un ancien médecin de Paris.étahli en pro
vince depuis quelques mois :
« J'étais à Paris chargé, par le commis
sariat du quartier ... d'aller
faire le premier rapport médical après
examen des nombreux suicidés du quar
tier, et j'ai vu ainsi quantité de cas sem
blables à celui de l'infortuné petit Dau
det.
« Il est certain que dans tous les cas
oit j'ai été appelé les choses se sont pas
sées bien autrement qu'à Lariboisière.
Iïnquête rapide bien faite, identité vite
établie même en l'absence de pièces. Je
jne souviens d'avoir deux fois attiré l'atten
tion de la police sur des cas douteux de
suicide dont les circonstances suspectes
'me semblaient avoir échappé aux secré
taires ou aux inspecteurs, il n'en était
rien et tout avait été envisagé et éclairci.
J'ajoute que dans ces cas la police tremble
littéralement devant la possibilité d'une
■gaffe et que les examens sont faits plutôt
deux fois qu'une,
« D'autre part, mes fonctions m'envoyè
rent souvent à Lariboisière examiner des
désespérés trouvés sur ta voie publique.
. 'Mon correspondant ajoute que « le per-
«, smittel de l'Assistance publique est très
.« g gauche ». Parbleu !.. Comme son di
recteur. 1 On n'a pas oublié l'étonnante vi-
: site à grand tralala de M. Mourier.au lit
de Germ.' inc Berton.
III. '« Procédés à la Borgia »
ou la Terreur en marclxe
Mais, de droite ou de gauche, ce n'est
pas la question ! Il y a des devoirs d'hu
manité. Il y a un ordre public. Il y a une
police pour, le maintenir. J'ai beau me
creuser la tête et, comme dit le bon peu
ple, me raisonner, je ne parviens pas à
comprendre que, la note aux six adresses,
seule pièce d'identité trouvée sur le corps
de Philippe'Daudet, mais portant le nom
connu de Maxime del Sarte, l'adresse de la
Ligue d'Action française, on soit allé ré
veiller, à dix heures'et demie du soir, Ma
dame ITavard de la Montagne, inscrite sur
le même papier, rogé Maxime, dont le nom est dans tous
les annuaires, que l'on n'ait pas donné un
coup de téléphone au numéro 12 ou au
numéro 14 de la rue de Rome où l'Action
française est installée, la police ne peut
. l'ignorer. Il n'y a pas d'explications va-
igues ou approximatives qui tiennent : la
question se pose, il faut y "répondre. Le
nom. de la Ligue d'Action française était
souligné deux fois. Un journal,"une ligue
sont des centres .de renseignements. Il n'y
a pas un esprit indépendant et réfléchi qui
ne', doive se demander-,pourquoi M. Bene-
zéch :ou M. X... n'ont marché dans cette di
rection, soit pour obtenir de nous des in
formations soit pour nous demander des
comptes.
Il serait inexplicable que la police ne
puisse, reconstituer l'existence de Philippe
Daudet pendant la soirée de . vendredi et
la journée de samedi si le silence, l'inac
tion, l'immobilité de la même police dans
-la soirée de samedi ne proposait natu
rellement la ■ plus terrible et la plus ef
frayante des explications : les mensonges
innombrables dont se couvrent les gens
du Libertaire, les mystères qu'ils accu
mulent, 1ers contradictions, leu/ effroi ont
fait sentir dès le premier jour que le
crime était là, l'assassinat moral ou phy
sique, la machination qui a déterminé la
mort.'Mais, à côté des auteurs directs du
forfait, y a-t-il autre chose ? Les portions
pourries de l'administration policière, en
nemies jurées du nom de Daudet, ont-elles
eu leur part de complicité directe ? Il est
impossible de ne pas se le demander au
jourd'hui. Ceux qui en douteraient
sont priés de vouloir bien lire, à notre
revue de la presse, les paroles, très brè
ves, mais terribles, écrites par notre con
frère Martin-Mamy, le nouveau directeur
du Télégramme du Nord. M. Martin-Mamy
est un républicain patriote et 103'al. Il in
dique les procédés ignobles (« les plus
ignobles », dit-il même), les procédés à
la Borgia. que la compétition politique a
pu dister à l'administration poli
cière. Le respect de ses lecteurs, l'empêche
de préciser. Cela est bien regrettable. Il
faudrait pourtant que le peuple français
sût enfin dans quelles sales et sanglantes
mains il a fini par rouler !
Sinon, qu'arrivera-t-il ?... On dir.a que
Daudet, défenseur de la France et ennemi
des traîtres a été salement frappé aux
plus chères, aux plus vives de ses affec
tions, mais, après tout, c'était sa faute.
Pourquoi s 'étaitril mêlé de la politique '/
Et la politique, la défense de la nation
et de la cité seront de plus en plus aban
données aux pires, abandonnées aux traî
tres, et ceux qui auront tenu ce langage
seront les premiers châtiés de leur lâcheté.
Ils pleureront. Ils pleureront eux aussi !
Un fils perdu. Une fille déshonorée. Peut-
être toute une race de beaux enfants
massacrés par l'ennemi du dehors ou par
l'ennemi du dedans. Leurs biens perdus,
leurs cœurs torturés leur arracheront
alors les larmes de sang.
Réponse : on n'aurait pas pleuré si l'on
avait parlé, écrit, agi à temps.
Nous ne nous adressons ni à la compas
sion, ni même à la froide Justice. Nous
parlons à la Raison: — Français, Français
inconscients, Français distraits et afi 'air-
rés, ce n'est pas notre sort qui est agité,
c'est le vôtre. Ou ces crimes, vraiment pu
blics, seront recherchés, expiés, châtiés
dans tous ceux qui les ont commis, inspi
rés et couverts* ou rien'n'arrêtera les pas
audacieux de la Terreur en marche !
IV. Le gouvernement des Elus !
Un aveu assez pessimiste a échappé
hier à M. Poincaré sur son'refus de poser
la question de confiance à la séance de
l'autre jeudi :
« M. JJÎ PRESIDENT DU CONSEIL. Si je
n'ai pas posé l'autre jour la question de
confiance, c'est par un scrupule dont je
vous dois la confession. Je savais que les
socialistes se prononceraient pour la pro
portionnelle, et je ne voulais pas, en po
sant la question de confiance, les forcer
à voter contre le cabinet (Rires).
« Je ne donne pas ici une explication
de l'escalier. J répète ce que j'ai dit l'au
tre jour à ceux qui m'interrogeaient. En
posant la question de confiance, je per
dais 70 voix. (Applaudissements à droite
et au centre.)
« m. leon blum. — Mais vous en ga
gniez plus de cent.
« m. le president du conseil. j'ai
plus de cektitude en ce qui concerne
l'hostilite des socialistes que dans la
fidélité de mes amis . (Rires à l'extrême
gauche. — (Applaudissements à droite et
au centre.) »
Je comprends que' la droite ait applau
di à pareille satire du gouvernement
des assemblées par le plus parlementaire
des hommes; à cette critique de la Répu
blique par le plus républicai/i de nos mi
nistres et de nos ministrables. Mais le
centre ! Le centre républicain ne voit-il
pas ce que la fermeté des,pires,-opposée,
par-M. Poincaré lui-même! à l'instabilité
et à la volatilité des meilleurs on des moins
mauvais contient de décisif contre 3a con
fiance faite à ce genre de gouvernement ?
Charles MAURRAS
Les élections anglaises
et le liltrc-ëcliange
Nous connaîtrons aujourd'hui le résultat
politique des élections anglaises, les gains
et les pertes des partis. Saurons-nous, même
au cas-d'une victoire des conservateurs,, si
le programme économique de M. Baldwin
pourra être réalisé ? L'abandon du libre-
éehange aurait de telles conséquences et de
telles répercussions que c'est bien une ques
tion aussi importante pour les autres pays
que poiïr TAngleterre elle-même, une ques
tion non moins pratique que théorique.
De toute manière, on peut dire que le
dogme de Cobden n'est plus intangible au
près des Anglais. Au cours de cette cam
pagne, les partisans du tarif ont fourni des
arguments bien propres à ébranler les es
prits. On a répété, on affirmé" encore,
disent-ils, que, par le libre-échange, l'An
gleterre est devenue le pays le plu,s riche
et le plus heureux du monde. Alors pour
quoi, depuis que le commerce est libre, dix
millions d'Anglais ont-ils émigré ? Et vers
quelles contrées s'est porté le principal
courant de l'éprigration ? Aux Etats-Unis,
qui sont protectionnistes, dans les Domi
nions qui le sont aussi. Si l'Angleterre était
un paradis, on ne la quitterait pas. On y
reviendrait si l'on était malheureux dans
les pays qui connaissent les hauts tarifs
douaniers.
L'exemple des Etats-Unis, où il n'y a
pas de chômage, où un ouvrier sur deux
possède téléphone et automobile, est de
nature à frapper l'imagination des travail
leurs anglais. Une'autre raison, c'est que
le libre-échange a ruiné l'agriculture an
glaise et transformé les champs en belles
prairies, mais un désert de-belles prairies.
Longtemps, le blé américain avait été meil
leur marché que celui qui poussait dans la
vieille Angleterre. On n'a plus semé de blé.
Et le jour où le sous-marin allemand a fait
regretter que : la culture fût devenue un
luxe, le jour où le dollar est devenu cher
par rapport à la livre, on a cherché en
vain qui voulût l>ien s'appliquer au dur
travail de la 'terre. L'Irlande elle-même,
jadis la ferme du peuple anglais, avait
perdu la moitié de ses paysans. L'Angleterre
s'aperçoit peut-être un peu tard qu'un pays
ue vit pas seulement d'industrie et de com
merce et qu'il lui manque un élément essen
tiel à tous les égards lorsqu'il lui manque
des ruraux.
Cependant, la faiblesse de la comparai
son entre l'Angleterre et les Etats-Unis ou
les Dominions saute aux yeux. Le Royaume-
Uni (y compris l'Irlande) compte plus de
45 millions d'habitants et seulement 314.000
kilomètres carrés. Les Etats-Unis ont plus
de cent millions d'habitants, mais neuf
millions et demi de kilomètres carrés.
L'Amérique est encore un pays neuf. L'An
gleterre est un pays saturé de population.
Si le libre-échange a cessé de lui donner
la prospérité, est-ce le protectionnisme. qui
ia lui rendra ? L'Angleterre ne souffre-
l-elle pas, comme l'Allemagne, mais à sa
manière, d'une hypertrophie industrielle ?
On doit se le demander. — J. B.
A LA CHAMBRE
La réforme électorale
est votée
La Chambre a terminé hier la discus
sion de la loi de M. Marc Sangnier ten
dant à modifier l'article 10 et à supprimer
l'article 11 de la loi de 1919 sur l'élection
dés députés.
Cette longue et âpre discussion a abouti
à un piètre résultat : la suppression des
listes incomplètes.
Quant à celle de la prime à la majorité
absolue, nous savons qu'elle a échoué
grâce à la manœuvre de Briand, s'étondée
involontairement • — nous voulons du
moins l'espérer —- par le manque de déci
sion du président du Conseil.
Une louche manœuvre des socialistes,
qui sous couleur de mécontentement, ont
abandonné la R. P. pour s'unir aux radi
caux en faveur d'un retour possible au
scrutin majoritaire, a conduit le président
du Conseil à poser la question de con
fiance.
Le résultat 'ne s'est pas fait attendre.
Une majorité de 418 voix est venue se
grouper derrière lui.
Que n'a-t-il fait ce geste quelques jours
plus tôt
Briand ne serait pas le chef incontesté
des gauches et ■ la prime à la majorité,
absolue aurait été abolie.
En tout état de cause, l'opération poli
tique accomplie l'autre jour par ce der
nier, aura eu pour effet de grouper der
rière lui non seulement les radicaux et les
radicaux-socialistes, mais encore les socia
listes et les communistes.
C'est un avertissement dont tout les pa
triotes doivent tenir compte à la veille
des élections.
■ M. Arago, qui préside, fait connaître au
début de la séance que les obsèques de
M. Maurice Barrés auront lieu samedi à
10 heures à Notre-Dame.,
La suppression des listes incomplètes
Puis on revient à la discussion de la
loi sur la réforme électorale. La Chambre
adopte un amendement de M. Cautru ainsi
conçu :
« Lorsque le nombre des votants n'est
pas supérieur au tiers des inscrits ou si
aucune liste n'obtient le quotient électoral,
aucun candidat n'est proclamé.élu. ».
Le président dit qu'il est saisi d'un ar'
ticle additionnel de M. Magne, ainsi
conçu : , ■
L'artfclc 3 de'la loi du 12 juillet 1919 est
modifié comme suit :
« Le-département , forme une seule cir
conscription.
« La loi du 14 octobre 1919 divisant
certains départements en circonscription^
électorales pour la nomination des mem-<
3 EDITION DU MATIN
Vendredi 7 Décembre 1923.
jl.
U
15
• Seine ei Seine-ei-Oisc.
20 "T 1-
Dépariemenâ, Cortmfac. ;
ABONNEMENTS : o.Ai !
. France.ot Colonies. 48 fr. 25 Tr a 13fr, 1
. Etranger, , , ; , , , 82 » 42 » 22» '
ORGANE DU NATIONALISME INTEGRAL
$ Tout ce qui est national est notre. »
Le Duc d'ORLÉANS
. héritier des quarante Rois qui en mille ans firent la
RÉDACTION & ADMINISTRATION
li? rue d e Rome, P ARIS (8')
Adr.
Tél.
Public: ié: Central 74-77
i Rédaction : Centrai 75-44
Apris 10 h. du soir : Ségu r i 1 -68
Iteflistre dé Commerce s Seine 7S.582
Fondateur s HENRI YALGEOIS Directeurs politiques s LÉON DAUDRT et CHARLES MAURRAS — Rédacteur en chef • MAURICE PUJO
AUX
Maurice Barrés, Déroiilède et les
anlidrcyftlsards avalent raison :
« Le 3 août 1914, les événements ont donné
cruellement raison à la clairvoyance de ceux que
nous considérions comme des aveugles et des
benêts. Les aveugles et les benêts n'étaient pas
du .côté que nous pensions. »
GUSTAVE HERVÉ (bien luné)
dans la Victoire
«
POÈTES
))
Notre directeur Charles Mourras publie
à la': Librairie du Divan, 37, rue Bona
parte, "un petit volume d'études littéraires,
intitulé Poètes : Verlaine, Mallarmé, Mau
rice du Plessys, Jean-Marc Bernard, Paul
Valéry et d'autres y sont présentés tour
à tour dans une lumière étrangement
■ variée, car certaines dè ces pages datent
de 1896 et d'autres sont de Van dernier.
Donnons Fessentiel du portrait de Mal
larmé ; : , ,
■ ...Des personnes qui ont approché Mal
larmé ou regardé ses meilleurs portraits,
quelques-unes" ont ràpp'orté un sentiment"
qui confiime bien «nos impressions de lec
ture. La tête plaisait, mais elle inquiétait-
'aussi par l'excessive finesse-de ses cour
tes,. dont les traits semblaient se replier
les uns dans les autres.- L'œil voilé et pres
que dissimulé dans la profondeur des or
bites, sous le poids- des paupières et la
longueur des cils, laissait à peine voir com
me une gouttelette indécise l'obscur re-
.gard. ; mais, entrouvert, cet. œil singulier
trahissait un monde d'idées fixes et de rê
veries maniaques. Une tête pareille semblait
faite à- souhait pour l'idée d'étonner et de
piper le monde. ,
i> Néanmoins, je crois fermement que cet
homme si fin et si clairvoyant put aussi
être la dupe de son système. Tout au moins,
s'il y eut, à son départ, quelque gageure,
dut-il^ pour la tenir, la prendre au sé
rieux. Un système l'enveloppa, et je ne dis
pas un système de choix ni de. ljasard,
mais bien le système esthétique professé
.par les plus brillants de sa génération.
■ Sous les beaux .dehors de la rime riche
■et d'une stricte correction grammaticale, nos
Parnassiens ajoutent " aux désordres du
• Romantisme up malheur nouveau. Le mot,
jusque-là-asservi tout au moins à son sens,
'c'est-à-dire "à un certain objet qu'il repré
sentait, est désormais pris en lui-même,
uniquement .choyé pour sa valeur musicale,
son coloris ou sa forme. De là l'indiffé
rence des Parnassiens au fond des sujets
évoqués. , Ces messieurs se contentaient
d'assortir des mots à certains thèmes, et
l'essentiel était pour eux d'obtenir un « as
sortiment réussi ».
Mallarmé vécut et mourut Parnassien,
Mallarmé réalisa à la lettre toutes les
idées du Parnasse, parce que nul poète
(il mérite vraiment ce nom) ne naquit avec
une. imagination plus glacée...
Il semble définir son imagination dans
«'apostrophé d'Hérodiade au nfiroir fidèle
Eau froide par i'ennui dans ton cadre gelée !
, . Lie monde lui apparaissait immobile ét
-îgé sur champ de cristal. De là peut-être
l 'éclat de son vers lorsqu'il fixe une image
précise,'"un objet isolé et distinct des autres
objets. On ferait une jolie collection des
.«'beaux, vers » de Stéphane Mallarmé, et
je gage qu'on en trouverait-jusque dans
ses poèmes les plus abscons :
_La chair est triste, hélas ! et j'ai lu tous les li
èvres.
...Donner un sens trop pur aux mots de la tribu.
...Lysr ! et l'un de vous tous pour l'ingénuité.
...Une sonore, vaine et monotone ligne...'
...Où rêve, ô câline sœup,
• Un ' automne jonché de lâches de rousseur.
«Je t 'apporte l'enfant d'une nuit • d'Idumée.
Oui, voilà de. beaux vers, 1 de ces beaux
vers qui « de plusieurs vocables » nous
refont, disait-il lui-même, ,« un : mot total;
neuf, étranger à la langue commune et
comme incantatoire », de ces vers qui
achèvent « l'isolement de la parole »... Mais,
quand il s'agit d'exprimer les rapports de'
ces objets entre eux et donc de se mouvoir
d'un objet à l'objet voisin, la difficulté
commence pour lui. Il se sentait paralyti
que. Nulle chaleur, nulle source de 'mou
vement, Boileau, qui a souffert bien avant
Mallarmé de la même paralysie, et se plai
gnait que les transitions fussent « le plus
difficile chef-d'œuvre de la poésie », avait
cette ressource'de considérer, les relations
objectives, impersonnelles et rationnelles
des objets qui, eux-mêmes^ l'aidaient ainsi
à se transporter de l'un jusqu'à l'autre ;
. ainsi côtoya-t-il, en plus d'un cas, la pro
se •; mais, en d'autres cas,, sa poésie se
soutint assez dignement. Romantique et
; Parnassien* et privé ainsi de ses points
d'appui dans la nature et dans la raison,
Stéphane Mallarmé devait chercher les
principes de son discours dans les éléments
mêmes de ce discours, dans les mots. Ce
qui manquait à son talent le prédestinait
à réaliser ce qu'il est permis d'appeler,
avee un sourire, « le Parnassisme inté
gral ». •
* *
L'objet fut repoussé dans un oubli com
plet. ^M. Mallarmé déclara en vers et 'en
urose que le vrai poète n'avait point souci
' > !e l'objet... -
Les mots choisissent en souverains, se
condes convenances de nombre ou de
couleur, leur place exacte dans le poème.
Ce sont des 'sons associés. Ni syntaxe, ni
j style, une mosaïque de vocables, dont une
jeunesse naïve s'évertuera longtemps à dé-,
couvrir le sens profond...
Pour mon compte,- je tiens que les an
thologies recueilleront certains fragments
de *sa poésie : d'abord une douzaine de
vers isolés et frappants dont j'ai marqué
le charme, une ou deux de ses plus cu
rieuses excentricités (il faut bien que la
postérité connaisse nos monstres), enfin
quelques tirades comme la jolie échappée
d e L'A près-Midi, qui est dans l'œuvre de
Mallarmé comme l'Epître à Jean Racine
dans l'œuvre de Boileau :
Tâchç donc, instrument des' fuites, ô maligne
Syrinx, de refleurir aux lacs où tu m'attends !
Moi, de ma rumeur fier, je vais parler longtemps
Des déesses et par d'idolâtres peintures .
A leur ombres enlever encore des ceintures.
Ainsi, quand des raisins j'ai sucé la clarté,
Pour bannir un regret par ma feinte écarté,
Rieur, j'élève au ciel d'été la grappe vide,
Et, soufflant dans les peaux lumineuses, avide
D'ivresse, jusqu'au soir je regarde au travers.
Ce raisin décharné, traversé d'un coup
de soleil, m'a de tout temps causé la même
joie ingénue et, dirai-je, faunesque. Mais
quelle fine imagination encore, que d'aller >
nommer la flûte de Pan,- la libératrice Sy-
rinx, « instrument des fuites » humaines.
Voilà, certes, de quoi conserver le nom d'un
poète. -
Charles MAURRAS
Commént
Philippe Daudet
est-il mort ?
VIDAL A L'INSTRUCTION
Au début de l'après-midi d'hier, M. Bar-
naud a entendu Gabriel Tondini, 19 ans,
neveu du garagiste Foucault de Levallois-
Perret. Le témoin a confirmé que la voi
ture avait été lavée et ; nettoyée samedi
soir, 24 novembre, dans le garage de son
oncle, par le chauffeur Bajot et par la
femme de celui-ci. Il a ensuite rappelé les
circonstances dans lesquelles un énigma-
tique personnage, grossièrement maquillé,
avait pénétre dans le garage et visité mi
nutieusement le taxi.
A 2 h. 30, l'anarchiste Georges Vidal est
entré dans le cabinet du juge ; il en est
sorti vers 6 heures. Ses explications ont
'porté sur les faits qui se seraient déroulés
depuis le jeudi 22, à 4 heures de l'après-
midi — date à laquelle il prétend que Phi
lippe Daudet se serait présenté seul et
spontanément aux bureaux du Libertaire
— jusqu'au lendemain vendredi, à 16 h. 30.
Vidal, nous dit-on, n'a guère fait que re
produire le récit du Libertaire. L'inter
rogatoire se poursuivra aujourd'hui. Il est
probable que ce récit, qui fourmille de
contradictions et d'absurdités, subira la
critique du juge. '
LE « TEMOIN MYSTEREIUX »
Après le départ de Vidal, deux inspec
teurs de police ont introduit dans le cabi
net de M.,Barnaud celui que les journaux
ont appelé « le témoin mystérieux » et
dont le nom est Binetti Jean.
Ce témoin s'était présenté à nos bureaux
lundi soir en nous faisant passer une lettre.
Reçu par nous, il nous fit des déclarations
;dçnt.la première partie nous parut méri
ter d'être vérifiée parce que certains traits,
pour qui; connaissait le caractère et les
habitudes de Philippe, la rendaient. très;
vraisemblable. L'homme affirmait d'ail
leurs l'existence d'une pièce, qui aurait eu
assurément un intérêt capital, qu'il disait
avoir égarée, mais qu'il se faisait fort de
retrouver. Enfin il invoquait des témoins
dont il nous donnait les noms.
La seconde partie de ses dires; ; où il
racontait que, le samedi, il avait vu le taxi
du chauffeur Bajot stationner dans l'après-
midi devant les bureaux du Libertaire,
nous parut, dès le premier moment, beau
coup moins sérieuse. Nous pensâmes qu'il
essayait peut-être de corser par des in
ventions un peu d-, vérité. Il appartenait
à l'instruction de tirer la chose au clair.
C'est dans ces conditions que mardi,
avec le secret qu'il nous avait demandé,
nous avons conduit Binetti chez le juge à
«mi il rénéta ce qu'il nous avait dit. M.
Barnaud, ayant fait les vérificatifs néces
saires, ueciaraii hier que le récit au témoin
était inexact en ce qui concerne la jour
née de samedi, ce qui ne nous a pas sur
pris. Pour le reste de ses « révélations »,
M. Barnaud n'en a rien dit :on peut sup
poser que les investigations ne sont pas
terminées. Nous croyons savoir toutefois
que la pièce dont il avait été question n'a
pas été retrouvée.
Nous n'attendrons pas longtemps pour
savoir s'il y a lieu de retenir quelque cho
se de cette déposition ou si nous'devons la
considérer comme émanant de l'imagi
nation d'un pauvre diable alcoolique et
toxicomane, sinon d'un compère qui au
rait essayé d'égarer la justice sur une
fausse piste.
. UN MENSONGE DESESPERE
La découverte du pardessus parmi les
vêtements de Philippe à Lariboisière a
trouvé les assassins désemparés. La vente
de ce pardessus par l'enfant dans, la jour
née de samedi constituait un élément
important de la fable par laquelle ils ont
espéré masquer leur crime. Sur ce point,
dans toutes leurs déclarations, ils se sont
engagés et enferrés: Mais Philippe n'avait
pas vendu son- pardessus et les voilà en
peine pour expliquer qu'on ait trouvé dans
sa poche 83 francs. Après s'être tus pen
dant deux jours, les misérables ont tenté
hier une réponse. On «va juger de sa va
leur : .
Dans son papier, Maurice Pujo prétend que
Philippe Daudet est revenu au Libertaire le sa.
medi 24 novembre. Il se base sur ce fait que l'on
a trouvé sur Philippe la somme de 83 francs, au
moment de sa mort, alors que le matin'même il
était sans argent et obligé d'emprunter 35 francs
à Charles d'Avray. Comme d'ordinaire, l'objection
de Pujo est enfantine. En effet, même si Philippe
(jeune homme inconnu à ce moment) était revenu
me trouver samedi au Libertaire quel intérêt au-
rais-je le cacher à l'heure actuelle, M. Pujo ,?
Mais Philippe n'est pas revenu le samedi: et je
ne l'ai plus revu. J'ignore où mon jeune camarade
a pu se procurer l'argent qu'il-possédait. A-t-il
vendu son pardessus V Je le crois. Le chauffeur
affirme qu'au moment où il a pris Philippe dans
son taxi, le jeune homme n'avait pas de pardessus.
Cette thèse me semble la vraie. Mais les Camelots
du Roi prétendent que Philippe n'avait jamais
quitté son pardessus et que ce dernier a été enre
gistré à l'hôpital. A la Police Judiciaire on m'a
fait voir le pardessus. 11 ressemble certainement à 1
celui que portait Philippe quand il est venu au Li
bertaire. Mais on comprend facilement que d'une
part je n'avais pas examiné sur toutes ses coutu
res le pardessus de l'inconnu et que, d'autre part,
il est très facile de substituer un pardessus analo
gue au disparu, quand on s'appelle M. Léon Dau
det et qu'on a des amis qui s'introduisent furtive
ment dans les garages...
« J'ignore... > « Je le crois... > « Cette
thèse me semble la vraie... » Chaque terme
sue l'embarras et l'angoisse. Puis, brusque
ment, le misérable traqué se réfugie dans
l'explication funambulesque c'est Léon
Daudet qui, à l'hôpital, aura substitué un
pardessus pareil à celui qui avait été vendu
par son fils !
Il n'y a qu'un malheur, c'est que la pré
sence du pardessus parmi les vêtements de
l'enfant a été constatée dès le samedi soir
24 novembre sur le registre d'entrée à La
riboisière, ainsi qu'en fait foi le texte du
bulletin que nous avons publié. A ce mo
ment, Léon Daudet, hélas ! n'était pas là.
Il nedevait venir à Lariboisière que dans
l'après-midi du lendemain pour reconnaî
tre son enfant et c'est six jours plus.tard
seulement qu'il devait apprendre l'horrible
machination dont il avait été victime.
« Si. Philippe était retourné au Libertai
re le samedi, quel intérêt aurais-je à le ca
cher ? î> demande le sieur Vidal. Je ré
ponds, pour aujourd'hui, au misérable aux
abois : un intérêt si fort qu'il lui a fait
commettre ce mensonge désespère.
OU EST LA VALISE ?
Un des premiers faits qui ont été si
gnalés au juge d'instruction, c'est que, le
jour de sa fugue, Philippe fut rencontré
par un de ses camarades de lycée, place
Saint-Sulpice, de bonne heure, portant
une valise. A son camarade, il expliqua
qu'il transportait -des accessoires :de :
sport.
Au Havre, le patron de l'hôtel Bellevue
a dit à un de nos confrères que le voya
geur qui s'était inscrit sous le nom "de
Pierre Bouchamps portait un léger ba
gage : valise ou sac. Il n'a pas oit qu'il
l'avait abandonné dans son hôtel au mo
ment "du départ. Philippe est donc parti
avec cette valise.
On sait que l'entant a quitté l'h5tel
Bellevue vers sept heures du matin, avec
l'intention de prendre le premier tfain
pour Paris qui part à 8 h. 45. Mais, pour
un motif ou pour un autre, il le manqua.
C'est alors qu'il prit le taxi du chauffeur
Lefèvre et se. fit promener autour des
bassins. . .
Le chauffeur Lefèvre n'a pas parlé de
valise. L'a-t-il vue ? Philippe, avant de
monter dans sa voiture, l'avait-il déposée
à la consigne de la gare ou ailleurs ? L 'a-
t-il rèprise avant de monter dans le train-
de 10 h. 03 ? L'a-t-il mise, â l'arrivée, à
la consigne de la gare Saint-Lazare 1 L 'a-
t-il portée ailleurs ? L'avâit-il avec lui
lorsqu'il est entré au Libertaire 1 .
De toutes façons, cette valise doit se
retrouver. '
_ Maurice PUJO
ECHOS
— La Chambre a coté la loi électorale
(suppression des listes : incomplètes), M.
Poincaré avait posé la question de con
fiance. .
— Les élections anglaises ont eu lieu hier.
— Le président Coolidge a lu hier le
message présidentiel, devant le Congrès.
Rien ne fait plus plaisir qu'une belle photogra
phie. Fred Boissonnas, l'éminent artiste sait con
cilier la ressemblance la plus vivante avec une pré
sentation parfaite. Vous savez qu'il'a repris l'atelier
Chéri Rousseau, 12 rue Boissy-d'Anglas.
La fille Berton sera jugée
le 18 décembre
On confirme au Palais que les débats
du procès de Germaine Berton demeurent
fixés à la date du 18 décembre. Le bruit
avait été répandu, ces jours derniers, que
l'affaire serait renvoyée à une ■ autre ses
sion.
L'accusation a cité 25 témoins. La Berton
en a déjà fait citer plus de cent : tous les
copains du Libertaire seront là ! Joli cor
tège, en vérité. Du sang et de la boue ! -
LA POLITIQUE
I. Obsèques nationales -
de Maurice Barrés
Les obsèques de'Maurice Barrés seront
donc faites à Notre-Dame aux frais de
l'Etat. Par ce signe visible s'exprimera le
sentiment de toutes les élites et de toutes
foule qui sont dignes- de ce magnifique
pays, mais le remerciement' a un grand
bienfaiteur comportera aussi l'hommage
naturel de tout ce qui pense à un servi
teur éminent des intérêts supérieurs .de
J!esprit. ,
" Les-plus belles couronnes s'accumulent
sur ce -cercueil. Elles pourront passer
copirue toute chose: l'œuvre double de Bar
rés -leur- survit déjà, toute riante des im
mortalités dé la France et. des splendeurs
magiques,de l'ardente perfection de
son art. Le deuil qui nous accable, les
devoirs sévères qui nous incombent, la
nécessité de ne rien céder à l'ennemi pu
blic qui, en nous frappant, espère ralen
tir lès coups que nous lui portons,. nous
obligent,«hélas! à différer le monument
de gratitude et de gloire que nous aussi de
vons à cette noble cendre. Patience !
Nous parlerons, nous aussi, et nous dirons
ce qu'il faudra pour que notre hommage,
jsans être digne..d'une si illustre mémoire,
sans lui rendre' des services dont elle n'a
pas besoin, serve pourtant ' à en faire
comprendre telle ou telle particularité
historique dont les traces pourraient être
obscurcies avec le temps !
Nous n'avons voulu que répéter "«aujour
d'hui la fidélité de notre douleur.
II. La soirée du samedi 24f" :
et la police
Personne n'en parle, J'en parlerai. On
a peur. Mais je nc.,çrarins rien : il faut des
éclaircissements. *
Nous disions l'autre jour : ou bien le
service d'identification policière fonc
tionne extrêmement mal, ou bien les ex
traordinaires négligences commises le sa
medi soir 24 novembre constituent les plus
-suspecte des manœuvres policières. Les
esprits qui inclineraient à expliquer ce
malheur par la négligenpe feront bien de
méditer le renseignement que nous donne
un ancien médecin de Paris.étahli en pro
vince depuis quelques mois :
« J'étais à Paris chargé, par le commis
sariat du quartier ... d'aller
faire le premier rapport médical après
examen des nombreux suicidés du quar
tier, et j'ai vu ainsi quantité de cas sem
blables à celui de l'infortuné petit Dau
det.
« Il est certain que dans tous les cas
oit j'ai été appelé les choses se sont pas
sées bien autrement qu'à Lariboisière.
Iïnquête rapide bien faite, identité vite
établie même en l'absence de pièces. Je
jne souviens d'avoir deux fois attiré l'atten
tion de la police sur des cas douteux de
suicide dont les circonstances suspectes
'me semblaient avoir échappé aux secré
taires ou aux inspecteurs, il n'en était
rien et tout avait été envisagé et éclairci.
J'ajoute que dans ces cas la police tremble
littéralement devant la possibilité d'une
■gaffe et que les examens sont faits plutôt
deux fois qu'une,
« D'autre part, mes fonctions m'envoyè
rent souvent à Lariboisière examiner des
désespérés trouvés sur ta voie publique.
. 'Mon correspondant ajoute que « le per-
«, smittel de l'Assistance publique est très
.« g gauche ». Parbleu !.. Comme son di
recteur. 1 On n'a pas oublié l'étonnante vi-
: site à grand tralala de M. Mourier.au lit
de Germ.' inc Berton.
III. '« Procédés à la Borgia »
ou la Terreur en marclxe
Mais, de droite ou de gauche, ce n'est
pas la question ! Il y a des devoirs d'hu
manité. Il y a un ordre public. Il y a une
police pour, le maintenir. J'ai beau me
creuser la tête et, comme dit le bon peu
ple, me raisonner, je ne parviens pas à
comprendre que, la note aux six adresses,
seule pièce d'identité trouvée sur le corps
de Philippe'Daudet, mais portant le nom
connu de Maxime del Sarte, l'adresse de la
Ligue d'Action française, on soit allé ré
veiller, à dix heures'et demie du soir, Ma
dame ITavard de la Montagne, inscrite sur
le même papier,
les annuaires, que l'on n'ait pas donné un
coup de téléphone au numéro 12 ou au
numéro 14 de la rue de Rome où l'Action
française est installée, la police ne peut
. l'ignorer. Il n'y a pas d'explications va-
igues ou approximatives qui tiennent : la
question se pose, il faut y "répondre. Le
nom. de la Ligue d'Action française était
souligné deux fois. Un journal,"une ligue
sont des centres .de renseignements. Il n'y
a pas un esprit indépendant et réfléchi qui
ne', doive se demander-,pourquoi M. Bene-
zéch :ou M. X... n'ont marché dans cette di
rection, soit pour obtenir de nous des in
formations soit pour nous demander des
comptes.
Il serait inexplicable que la police ne
puisse, reconstituer l'existence de Philippe
Daudet pendant la soirée de . vendredi et
la journée de samedi si le silence, l'inac
tion, l'immobilité de la même police dans
-la soirée de samedi ne proposait natu
rellement la ■ plus terrible et la plus ef
frayante des explications : les mensonges
innombrables dont se couvrent les gens
du Libertaire, les mystères qu'ils accu
mulent, 1ers contradictions, leu/ effroi ont
fait sentir dès le premier jour que le
crime était là, l'assassinat moral ou phy
sique, la machination qui a déterminé la
mort.'Mais, à côté des auteurs directs du
forfait, y a-t-il autre chose ? Les portions
pourries de l'administration policière, en
nemies jurées du nom de Daudet, ont-elles
eu leur part de complicité directe ? Il est
impossible de ne pas se le demander au
jourd'hui. Ceux qui en douteraient
sont priés de vouloir bien lire, à notre
revue de la presse, les paroles, très brè
ves, mais terribles, écrites par notre con
frère Martin-Mamy, le nouveau directeur
du Télégramme du Nord. M. Martin-Mamy
est un républicain patriote et 103'al. Il in
dique les procédés ignobles (« les plus
ignobles », dit-il même), les procédés à
la Borgia. que la compétition politique a
pu dister à l'administration poli
cière. Le respect de ses lecteurs, l'empêche
de préciser. Cela est bien regrettable. Il
faudrait pourtant que le peuple français
sût enfin dans quelles sales et sanglantes
mains il a fini par rouler !
Sinon, qu'arrivera-t-il ?... On dir.a que
Daudet, défenseur de la France et ennemi
des traîtres a été salement frappé aux
plus chères, aux plus vives de ses affec
tions, mais, après tout, c'était sa faute.
Pourquoi s 'étaitril mêlé de la politique '/
Et la politique, la défense de la nation
et de la cité seront de plus en plus aban
données aux pires, abandonnées aux traî
tres, et ceux qui auront tenu ce langage
seront les premiers châtiés de leur lâcheté.
Ils pleureront. Ils pleureront eux aussi !
Un fils perdu. Une fille déshonorée. Peut-
être toute une race de beaux enfants
massacrés par l'ennemi du dehors ou par
l'ennemi du dedans. Leurs biens perdus,
leurs cœurs torturés leur arracheront
alors les larmes de sang.
Réponse : on n'aurait pas pleuré si l'on
avait parlé, écrit, agi à temps.
Nous ne nous adressons ni à la compas
sion, ni même à la froide Justice. Nous
parlons à la Raison: — Français, Français
inconscients, Français distraits et afi 'air-
rés, ce n'est pas notre sort qui est agité,
c'est le vôtre. Ou ces crimes, vraiment pu
blics, seront recherchés, expiés, châtiés
dans tous ceux qui les ont commis, inspi
rés et couverts* ou rien'n'arrêtera les pas
audacieux de la Terreur en marche !
IV. Le gouvernement des Elus !
Un aveu assez pessimiste a échappé
hier à M. Poincaré sur son'refus de poser
la question de confiance à la séance de
l'autre jeudi :
« M. JJÎ PRESIDENT DU CONSEIL. Si je
n'ai pas posé l'autre jour la question de
confiance, c'est par un scrupule dont je
vous dois la confession. Je savais que les
socialistes se prononceraient pour la pro
portionnelle, et je ne voulais pas, en po
sant la question de confiance, les forcer
à voter contre le cabinet (Rires).
« Je ne donne pas ici une explication
de l'escalier. J répète ce que j'ai dit l'au
tre jour à ceux qui m'interrogeaient. En
posant la question de confiance, je per
dais 70 voix. (Applaudissements à droite
et au centre.)
« m. leon blum. — Mais vous en ga
gniez plus de cent.
« m. le president du conseil. j'ai
plus de cektitude en ce qui concerne
l'hostilite des socialistes que dans la
fidélité de mes amis . (Rires à l'extrême
gauche. — (Applaudissements à droite et
au centre.) »
Je comprends que' la droite ait applau
di à pareille satire du gouvernement
des assemblées par le plus parlementaire
des hommes; à cette critique de la Répu
blique par le plus républicai/i de nos mi
nistres et de nos ministrables. Mais le
centre ! Le centre républicain ne voit-il
pas ce que la fermeté des,pires,-opposée,
par-M. Poincaré lui-même! à l'instabilité
et à la volatilité des meilleurs on des moins
mauvais contient de décisif contre 3a con
fiance faite à ce genre de gouvernement ?
Charles MAURRAS
Les élections anglaises
et le liltrc-ëcliange
Nous connaîtrons aujourd'hui le résultat
politique des élections anglaises, les gains
et les pertes des partis. Saurons-nous, même
au cas-d'une victoire des conservateurs,, si
le programme économique de M. Baldwin
pourra être réalisé ? L'abandon du libre-
éehange aurait de telles conséquences et de
telles répercussions que c'est bien une ques
tion aussi importante pour les autres pays
que poiïr TAngleterre elle-même, une ques
tion non moins pratique que théorique.
De toute manière, on peut dire que le
dogme de Cobden n'est plus intangible au
près des Anglais. Au cours de cette cam
pagne, les partisans du tarif ont fourni des
arguments bien propres à ébranler les es
prits. On a répété, on affirmé" encore,
disent-ils, que, par le libre-échange, l'An
gleterre est devenue le pays le plu,s riche
et le plus heureux du monde. Alors pour
quoi, depuis que le commerce est libre, dix
millions d'Anglais ont-ils émigré ? Et vers
quelles contrées s'est porté le principal
courant de l'éprigration ? Aux Etats-Unis,
qui sont protectionnistes, dans les Domi
nions qui le sont aussi. Si l'Angleterre était
un paradis, on ne la quitterait pas. On y
reviendrait si l'on était malheureux dans
les pays qui connaissent les hauts tarifs
douaniers.
L'exemple des Etats-Unis, où il n'y a
pas de chômage, où un ouvrier sur deux
possède téléphone et automobile, est de
nature à frapper l'imagination des travail
leurs anglais. Une'autre raison, c'est que
le libre-échange a ruiné l'agriculture an
glaise et transformé les champs en belles
prairies, mais un désert de-belles prairies.
Longtemps, le blé américain avait été meil
leur marché que celui qui poussait dans la
vieille Angleterre. On n'a plus semé de blé.
Et le jour où le sous-marin allemand a fait
regretter que : la culture fût devenue un
luxe, le jour où le dollar est devenu cher
par rapport à la livre, on a cherché en
vain qui voulût l>ien s'appliquer au dur
travail de la 'terre. L'Irlande elle-même,
jadis la ferme du peuple anglais, avait
perdu la moitié de ses paysans. L'Angleterre
s'aperçoit peut-être un peu tard qu'un pays
ue vit pas seulement d'industrie et de com
merce et qu'il lui manque un élément essen
tiel à tous les égards lorsqu'il lui manque
des ruraux.
Cependant, la faiblesse de la comparai
son entre l'Angleterre et les Etats-Unis ou
les Dominions saute aux yeux. Le Royaume-
Uni (y compris l'Irlande) compte plus de
45 millions d'habitants et seulement 314.000
kilomètres carrés. Les Etats-Unis ont plus
de cent millions d'habitants, mais neuf
millions et demi de kilomètres carrés.
L'Amérique est encore un pays neuf. L'An
gleterre est un pays saturé de population.
Si le libre-échange a cessé de lui donner
la prospérité, est-ce le protectionnisme. qui
ia lui rendra ? L'Angleterre ne souffre-
l-elle pas, comme l'Allemagne, mais à sa
manière, d'une hypertrophie industrielle ?
On doit se le demander. — J. B.
A LA CHAMBRE
La réforme électorale
est votée
La Chambre a terminé hier la discus
sion de la loi de M. Marc Sangnier ten
dant à modifier l'article 10 et à supprimer
l'article 11 de la loi de 1919 sur l'élection
dés députés.
Cette longue et âpre discussion a abouti
à un piètre résultat : la suppression des
listes incomplètes.
Quant à celle de la prime à la majorité
absolue, nous savons qu'elle a échoué
grâce à la manœuvre de Briand, s'étondée
involontairement • — nous voulons du
moins l'espérer —- par le manque de déci
sion du président du Conseil.
Une louche manœuvre des socialistes,
qui sous couleur de mécontentement, ont
abandonné la R. P. pour s'unir aux radi
caux en faveur d'un retour possible au
scrutin majoritaire, a conduit le président
du Conseil à poser la question de con
fiance.
Le résultat 'ne s'est pas fait attendre.
Une majorité de 418 voix est venue se
grouper derrière lui.
Que n'a-t-il fait ce geste quelques jours
plus tôt
Briand ne serait pas le chef incontesté
des gauches et ■ la prime à la majorité,
absolue aurait été abolie.
En tout état de cause, l'opération poli
tique accomplie l'autre jour par ce der
nier, aura eu pour effet de grouper der
rière lui non seulement les radicaux et les
radicaux-socialistes, mais encore les socia
listes et les communistes.
C'est un avertissement dont tout les pa
triotes doivent tenir compte à la veille
des élections.
■ M. Arago, qui préside, fait connaître au
début de la séance que les obsèques de
M. Maurice Barrés auront lieu samedi à
10 heures à Notre-Dame.,
La suppression des listes incomplètes
Puis on revient à la discussion de la
loi sur la réforme électorale. La Chambre
adopte un amendement de M. Cautru ainsi
conçu :
« Lorsque le nombre des votants n'est
pas supérieur au tiers des inscrits ou si
aucune liste n'obtient le quotient électoral,
aucun candidat n'est proclamé.élu. ».
Le président dit qu'il est saisi d'un ar'
ticle additionnel de M. Magne, ainsi
conçu : , ■
L'artfclc 3 de'la loi du 12 juillet 1919 est
modifié comme suit :
« Le-département , forme une seule cir
conscription.
« La loi du 14 octobre 1919 divisant
certains départements en circonscription^
électorales pour la nomination des mem-<
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