Titre : Le Radical
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1906-11-18
Contributeur : Maret, Henry (1837-1917). Rédacteur
Contributeur : Simond, Victor. Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32847124t
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 18 novembre 1906 18 novembre 1906
Description : 1906/11/18 (A26,N322). 1906/11/18 (A26,N322).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Description : Collection numérique : BIPFPIG33 Collection numérique : BIPFPIG33
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k76090331
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-210
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 02/05/2014
Directeur : A. MAUJAN
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SOMMAIRE
IÀJB Devoirs de l'llomme. - PAUL BRULAT.
Fermeture intégrale. — A. MAUJAN. •
Un Prélat schismatique. — M. V,
Bavardage. - UN PARISIEN.
La Science et la vie. — DOCTEUR BAILLON.
!Au dehors et à côté. — JEAN-BERNARD.
Autour de l'Actualité. - G. D'A.
Petites conversations. - YVES MIRANDE.
Notes du liseur. — ALFRED-JOÛSSELIN.
LES DEVOIRS
DE L'HOMME
M. Paul Adam, avec la louable ten-
dance aux idées générales qui le carac-
térise et dont il abuse parfois, vient de
mèttre en présence et en action, sur la
scène du Théâtre-Français, deux mo-
rales contraires, celile du Christ et celile
de Nietzche, l'une fondée sur l'abnéga-
tion, l'autre sur l'égoïsme le plus im-
placable. A vrai dire, le conflit n'est pas
récent, il date de l'origine même des
sociétés ; mais il semble qu'il ait pris,
depuis vingt ou trente ans, un carac-
tère plus aigu, el qu'il s'aggrave de jour
en jour. Aussi, la question, si ancienne
qu'elle soit, demeure-t-elle d'une actua-
lité passionnante. ,
La morale de Nietzche n'est pas
moins vieille que celle du Christ ; elle
a été seulement formulée avec ses pré-
tentions scientifiques et une intransi-
geance particulière par le philosophe
allemand. Nietzche ne serait, d'ailleurs,
pas célèbre, s'il n'avait- répondu à un
état d'esprit général, si les nouvelles
générations n'avaient été préparées à
accueillir favorablement ces désolantes
doctrines d'un individualisme forcené.
Sa détestable gloire lui vint de ce qu'il
exprima les tendances et flatta l'orgueil
d'une certaine jeunesse âpre, avide, ru-
sée, véritable bande de renards à deux
pieds qui se croient supérieurs et peut-
être destinés à devenir des surhommes,
parce qu'ils sont dépourvus de scru-
pules, de générosité, de sens moral et
de tous les sentiments dont s'honore
quiconque a vécu, réfléchi et souffert.
Tout l'art de vivre, heureusement, ne
consiste pas à découvrir un plus faible
Çu» soi pouc le dévorer. §ans doute, il
est dans l'ordre naturel que le fort
triomphe du faible, et nous sommes
obligés d'accepter à cet égard les obser-
vations de Darwin, qui, d'ailleurs, n'en
tire aucun système social ou philoso-
phique. Mais c'est justement Tœuvre
de la civilisation de protéger les faibles
contre la tyrannie des plus forts ; c'est
dans ce but qu'elle a créé des lois, des
juges, des institutions, qui, si impar-
faits qu'ils soient, valent encore
mieux que les hommes ; c'est la raison
du progrès de chercher la sécurité de
tous dans le soulagement de ceux qui
souffrent; de faire que la liberté soit
une richesse commune et non le patei-
nloine de quelques-uns,
S'il fallait choisir entre ces deux mo-
rales, celle de l'Evangile et celile de
Nietzche, c'est la première qui aurait
toutes nos préférences. Cependant, il y
a place pour une troisième doctrine,
qui n'est ni de renoncement ni de rési-
gnation et qui s'accommode d'un indi-
vidualisme raisonnable, lequel ne pré-
tend pas tout écraser, mais, au con-
traire, peut parfaitement s'allier à l'al-
truisme le plus sincère et le plus géné-
reux. La liberté de penser, de rester
soi-même, n'exclut nullement, en effet,
le sentiment de solidarité humaine.
Télle est aussi, je crois, l'opinion de
M. Clemenceau, qui, dans la dernière
séance du Sénat, se défendait contre
M. de Lamarzelle d'un individualisme
à outrance. Sans cette protestation,
comment eût-il pu se prétendre, lui
aussi, un instant après, sincèrement so-
cialiste ?
Vraiment, la morale- de Nietzche est
trop commode pour s'affranchir des de-
voirs sociaux, en vertu de ce précepte
que l'individu se doit avant tout à lui-
même; elle fait trop le jeu des jouis-
seurs et des arrivistes féroces dont four-
mille la société contemporaine; elle
flatte trop, en les parant des beaux de-
hors de la philosophie, les bas instincts
de l'égoïsme et le coupable désintéres-
sement des misères et des iniquités so-
ciales. Un individualisme aussi exagéré
s'adapte mal à la pauvre condition hu-
maine, l'homme étant, de tous les êtrés
de la création, le moins fait pour vivre
seul et se passer de l'aide de ses sem-
blables. Qu'est-ce qu'un individu, sinon
le produit d'un milieu, des générations
qui se sont succédé jusqu'à lui et aux-
quelles il est redevable de sa culture
intellectuelle, des pensées et des senti-
ments qui composent son être moral ?
Des siècles ont travaillé pour lui, il bé-
néficie de tous les travaux, de toutes
les découvertes du génie humain, et il
prétendrait ne rien devoir, et il ne par-
lerait que de ses droits !
Il existe une déclaration célèbre des
droits de l'homme et du citoyen, et une
ligue du même nom. C'est parfait, et
nous en approuvons tous les principes.
Mais d'où vient qu'on nous parle sans
cesse des droits de l'homme et qu'on
nous entretient si rarement de ses de-
voirs ? Serait-ce qu'on accorde plus
d'importance à ceux-là qu'à ceux-ci ?
Il nous semble, au contraire, qu'avant
d'avoir des droits l'individu a des de-
voirs, et l'on ne saurait en tout cas con.
cevoir les uns sans les autres. Oui,
pourquoi proclamer les premiers avec
tant d'éclat et taire les seconds ? C'est
une lacune regrettable, et' je verrais vo-
lontiers se fonder la Ligue des devoirs
de l'homme et du citoyen.
Sans doute, il est plus agréable à
celui-ci d'entendre parler de ses droits,
et comme les candidats du suffrage uni-
versel cherchent avant tout à plaire à
leurs électeurs, il est bien naturel que,
dans les rapports qu'ils entretiennent
avec ces derniers, ils préfèrent placer
la conversation sur ce terrain. Toute-
fois, nous vivons en un temps où il
n'est pas indifférent 'de rappeler aux
hommes qu'ils ont des devoirs, car ja-
mais ils n'ont paru considérer ceux-ci
d'un cœur plus léger.
Nous ne nous contentons pas du pro-
grès scientifique et mécanique il ne
nous suffit pas que les automobiles fas-
sent aujourd'hui cent kilomètres à
l'heure. C'est le progrès moral qui im-
porte le plus. Montesquieu faisait de la
vertu, qui ordonne justement d'accom-
plir tous ses devoirs, le ressort indis-
pensable des Ebats démocraUques. Au
point de vue social, la vertu consiste
dans l'harmonie entre l'amour que
l'homme se porte à lui-même et celui
qu'il doit à ses semblables ; elle est
dans le monde moral ce que l'ordre est
dans le monde physique. Or, comme
l'a dit fort. bien Louis Blanc, «le ré-
gime démocratique tend, par essence,
à concilier le sentiment individuel et le
sentiment-social ; il rend hommage au
premier en adnfettant la représentation
de chaque intérêt, au second en sou-
mettant tous les intérêts à la loi de
l'égalité. Ne séparant, jamais l'homme
du citoyen et ce qui revient à l'indi-
vidu de ce que la société réclame, les
démocraties disent : « Tu mourras pour
ton pays, parce que c'est ta propriété ;
pour tes citoyens, parce qu'ils sont tes
frères ; pour ta patrie, parce qu'elle est
ta mère. »
1 PAUL BRULAT.
Actes et Paroles
totem irauLE
A la bonne heure ! voici
un collectiviste révolution-
naire qui ne mâche pas sa
pensée : le citoyen Révelin,
à propos de la loi sur le repos hebdo-
madaire, claironne un appel aux armes
dans Y Humanité. Avec, lui, on est car-
rément fixé.
Le citoyen Révelin exige que toutes
les demandes de dérogation, formulées
conformément aux dispositions de la
loi, soient rejetées en bloc.
C'est bien simple, l'article 2 et l'ar-
ticle 8 n'ont pas à être appliqués. Ils
n'existent pas pour M. Révelin et ses
amis.
Pour eux, l'application de la loi con-
siste à ne rien appliquer du tout.
Ces messieurs parlent même de récla-
mer très prochainement une sanction
des plus efficaces qui manque à cette
loi : la fermeture obligatoire, le diman-
che, de tous les magasins.
Ce n'est pas trop bête, vraiment ; et
les petits détaillants sont alors sûrs de
leur affaire : c'est la ruine à brève
échéance, puisque ces malheureux n'au-
ront même plus le droit, par leur tra-
vail personnel, de défendre leur exis-
tence commerciale.
Bien entendu, il y aura un nombre
considérable de travailleurs entraînés
dans ce désastre ; il ne faut pas ou-
blier, en effet, que la petite industrie
représente plus des neuf dixièmes des
établissements de ce pays.
La fermeture, dit le citoyen Révelin,
égalise les chances des concurrents —
les chances de mort - surtout si l'on
songe que la recette du dimanche re-
présente 40 o o de la recette totale de
la semaine !
« La fermeture, s'écrie-t-il en termi-
nant, c'est le contrôle facile. »
Tout à fait ingénieux ! Combien le
contrôle sera encore plus facilité quand
la fermeture s'étendra du dimanche aux
autres jours de la semaine !
Le leader de rH umanité veut bien
nous prévenir que ses amis et lui vont
boycotter et mettre à l'index tout jour-
nal qui se permettra de défendre une
autre thèse que la leur.
Ce n'est point gentil, confrère — et
pas très sûr, car il n'est pas prouvé que
nos lecteurs s'empresseront d'aller chez
vous lire la bonne parole.
Vous ne vous contentez pas de la fer-
meture de toutes les boutiques, vous
voulez faire fermer les journaux.
C'est la fermeture intégrale, cela —
mais je ne crois pas au succès de la for-
mule, car il sera assez difficile aux gens
que vous aurez guillotinés de s'abonner
à vos feuilles.
A. MAUJAN.
UN PRELAT SCHISMATIQUE
M. l'évêque d'Angers serait-il un ironis-
te ? Au lendemain de l'aven tore plutôt plai-
sante du cardinal' Lecot, le voilà qui tombe
à bras raccourcis sur les faiseurs de cul-
tuelles. Le dernier numéro de la Semaine
religieuse du diocèse d'Angers' nous fait
part des colères de révêque. -, Eooutez-le :
Nous croyons devoir rappeler, écrit la Se-
maine religieuse, que le souveraàn pontife a
condamné d'une façon formeHe et absolue les
associations cultuelles, stipulées par la loi de
séparation.
Donc quiconque formeraiit une association cul-
tuelle ou oonsentiratit à en faire partie : 1° péche-
rait mortellement; 2° encourrait la peine d'ex-
communication ; 3" deviendrait schismatique ;
4° n.e pourrait plus être admis aux sacrements,
si ce n'est après une sincère conversion et une
réparation publique du scandale ; 5° serait privé
de la sépulture ecclésiastique, s'il mourait dans
cet état.
S'il se trouvait un prêtre assez oublieux de son
caractère sacré et de ses obligations pour oser se
rné-ttre, malgré la défense du souverain pontife,
à la tôle d'une association cultuelle, il serait lui
aussi excommunié et schismatique ; il perdrait
ipso fado tous ses pouvoirs, y compris la fa-
culté de célébrer la sainte messe.
M. l'évêque d'Angers n'a certainement
pas manqué d'envoyer ce petit article à
son confrère de Bordeaux, l'archevêque
Leoot, amateur de cultuelles, on le sait.
M. Lecot les baptise, à .la vérité, « diocé-
saines ». Mais ce sont des « cultuelles »
tout de même. Voilà donc le cardinal dé-
claré schismatique et bel et bien excom-
munié. Il court même le risque de se voir
refuser la sépulture ecclésiastique. Il ne
peut plus, en tout cas, prétendre à célé-
brer les saints mystères. Le pauvre
homme !
Car enfin, il n'y a pas à sorlir de là, le
cardinal Lecot a créé une cultuelle, et il
tombe, le premier, sous le coup des ana-
thèmes du prélat angevin. Sainte ironie !
M. V.
ÉCHOS
(!Aujourd'hui
- Courses à Auteuil, à une heure quinze.
Nos gagnants\: v
Prix la Périchole. — Kara, Oie Sauvage.
Prix de Nice. - Creusotin, Gamester.
Prix Agua-do. - Chloral, GutlisŒl.
Prix de Chatons. — Alligator, Ulster.
Prix Le Torpilleur. — Désert, Mathusa-
lem. •
Prix du Perray. — Torpille, Chi Lo Sa.
AU CONSERVATOIRE,
- ;¡¡:.
M. Pierre Veber, dont les informa-
tions dans le New-York Herald sont ra-
rement démenties, nous révèle cet aveu
d'un juré du chant au dernier concours
d'admission.
— Il y avait une centaine de concur-
rents pour une vingtaine de places.
Après beaucoup d'hésitations nous en
avons choisi cinq.
— Alors, il y a quinze places va-
cantes ?
— Pas du tout. Il nous a fallu choisir
quinze élèves supplémentaires pour
remplir les classes et donner les répli-
qeus aux autres.
— Quinze élèves. de valeur tout de
même ?
— Nullement : ce sont des médiocres,
qui ne feront jamais rien du tout.
Quand ils auront terminé leurs deux ans
de -Conservatoire sans être récom-
pensés, on les rejettera sur le pavé.
Franchement, conclut le juré, est-ce
honnête ?
M. Pierre Veber trouve que non, et
il n'est pas seul de son avis.
Heureusement que le jury n'est pas
infaillible et que plus d'une fois des
élèves jugés comme très médiocres par
lui, qui même ne remportaient pas de
récompense au concours, sont devenus
deô artistes émérites.
L'un des plus illustres exemples n'est-
il pas Mme Rose Caron, qui ne parvint
pas à décrocher son premier prix de
chant ?
COMMERCE MACABRE.
Un procès contre un journaliste so-
cialiste de Hambourg vient de révéler
le curieux commerce de cadavres et de
pièces anatomiques qui se pratique
dans un hôpital hambourgeois. Des
têtes étaient fréquemment envoyées
pour le prix de 8 marks à Strasbourg,
où elles étaient revendues en tout ou
en partie à des universités ou à des
instituts anatomiques.
Les cercueils ainsi vidés étaient re-
chargés avec des pierres pour leur re-
donner le poids normal, et plus d'une
fois ce sont des bières emplies de cail-
loux que des parents éplorés ont con-
duites au cimetière.
Le journaliste qui a révélé ces abus
a été acquitté, malgré les efforts du mi-
nistère public, qui demandait contre
lui l'amende et la prison.
ENQUETE.
Le parquet de la Seine, ayant reçu de
nombreuses plaintes, vient d'ouvrir
une enquête au sujet d'un concours bi-
zarre organisé par une maison de vins
spéciaux.
Le concours consiste à trouver le
nombre de gouttes contenues dans les
bouteilles vendues par cette maison.
Des prix en espèces doivent être attri-
bués aux gagnants, et c'est là le hic,
car ce concours constitue bel et bien
une loterie déguisée.
SARDOU ECOLIER.
-
Le théâtre de la Gaîté vient de re-
prendre Nos bons. Villageois, et voici
encore Victorien Sardou d'actualité.
C'est à sa jeunesse que nous emprun-
tons une anecdote, et ce fut lui-même
qui la conta avec verve et esprit :
« J'ai été nommé officier de la Lé-
gion d'honneur sur la proposition du
ministre de l'instruction publique
écrit-il. Or, le ministre était M. Victor
Duruy, mon ancien maître d'histoire
au lycée Henri IV, dont j'avais gardé
un souvenir particulièrement désa-
gréable, car il est le seul professeur qui
m'ait jamais mis à la pettecte sa classe.
« Le scandale s'était produit à la
suite d'une question d'histoire que m'a-
vait posée Duruy, question à laquelle
il m'avait été impossible de' répondre.
par la raison que j'avais la bouche
pleine. En effet, mon voisin de pupitre,
Bibesco, horrible gourmand dont les
poches étaient toujours remplies de
friandises, venait de me passer des
fruits cristalrlisés absolument exquis.
Je savourais l'avant-dernier, lorsque
Duruy me posa la question importune.
Je fis des grimaces atroces pour avaler
le fruit, laissant tomber l'autre de mes
mains. Mais je m'étranglais. Ce fut un
désastre.
« — La porte est de ce côté, mon-
sieur Sardou, me fit Duruy avec un
geste. impératif.
« Je ne demandai pas mon reste et
m'en allai tout penaud.
« Quarante ans après, mon illustre
professeur devait solliciter ma voix
comme candidat à l'Académie,
w ,
« — Je sais que vous ne voterez pas
pour moi, fit-il en souriant, et que vous
me laisserez à la porte de l'Académie.
Avouez que la vengeance est un délice
dans certains cas ?
« — Moi ne pas voter pour-vous ? fis-
je. Mais je voterai des deux mains !
D'abord, parce qu'il y a vingt, ans que
vous devriez être de l'Académie ; en-
suite, parce que je sais être reconnais-
sant : si vous m'avez mis à la porte de
votre classe, vous m'avez aussi nommé
officier de la Légion d'honneur. Il y a
eu compensation.
« Puis, pour lancer un trait direct au
professeur :
« — Mais vous savez que votre puni-
tion est restée sans effet. «Je suis plus
gourmand que jamais ! »
LES ENFANTS MARTYRS.
Sous ce titre, l'auteur (anonyme
comme presque tous les collaborateurs
de la Quarterly Review) d'un article sur
la protection de l'enfance et sur les.
mauvais traitements dont. les enfants
sont victimes retrace le sort épouvan-
table des enfants d'ouvriers en Angle-
terre, à la fin du dix-huitième siècle et
dans la première moitié du dix-neu-
vième, à l'époque du grand essor indus-
triel qui transforma tout le pays, quand
aucune loi ne protégeai.t encore le tra-
vail des femmes et des enfants. Les ou-
vriers, très mal payés. e.t très miséra-
bl.es, louaient leurs enfants aux chefs
d'industries, dès l'âge de cinq ou six
ans ; quelquefois des mioches de trois
ans étaient employés pour tenir Les
chandelles ; les communes se faisaient
des revenus en livrant les enfants as-
sistés dont elles avaient la garde. Ces
pauvres petits travaillaient couramment
douze à quatorze heures par jour, par-
fois seize et jusqu'à dix-huit heures ;
souvent une équipe sur deux travaillait
la nuit. Des milliers d'enfants assistés
des communes rurales étaient envoyés
dans les centres industriels e:t livrés
sans contrôle aux patrons ou aux con-
tremaîtres. Leur condition était en-
core plus effroyable dans les mines que
dans les manufactures: de toutes jeu-
nes filles passaient leur journée à traî-
ner des wagonnets de charbon, à qua-
tre pattes, avec une chaîne qu'on ri-
vait à leur taille et qui passait entre
leurs jambes ; parfois, la voûte était si
basse que, même dans cette position,
elle leur meurtrissait le dos.
On sait que c'est seulement en 1844
que la Chambre des communes vota un
bill pour la surveillance et la limita-
tion du travail des enfants, après que
la grande enquête de 1842 eut révélé
ces odieux abus. -
UN PARI ORIGINAL.
Un pari assez original vient d'être
fait entre deux personnalités bien con-
nues. Il s'agit de savoir si aujourd'hui
il existe à Paris un seul établissement
de consommation ouvert au public :
café, bar, brasserie, marchand de vins,
ne tenant pas de « Dubonnet ». L'enjeu
est assez intéressant, mais il faudra un
certain temps, /trois mois peut-être,
avant que cette « tournée », qui ne
comprend pas moins de 15,000 établis-
sements, soit terminée.
LES DROITS DE LA FEMME.
Un ingénieux marchand de nouveau-
tés a résolu élégamment la question. Il
a accroché au-dessus de son étalage
une grande pancarte :
Entrer, visiter, choisir, acheter
c'est le droit de la femme.
Payer
c'est le devoir de l'homme.
Panurge.
CONSEIL DES MINISTRES
Les ministres et s ou s-secrétaires d'Etat se
sont réunis, hier matin à l'Elysée, sous la
présidence de M. Fallières.
La séance, qui à été de très courte durée,
a été consacrée à l'expédition- des affaires
courantes.
Le ga'rde des sceaux a soumis à la signa-
ture du présidant de la République un pro-
jet de, loi ayant pour objet d'autoriser le
ministre du travail à se faipe représenter au
Conseil d'Etat par l'un de ses directeurs en
qualité de conseiller d'Etat en service
extraordinaire.
LE SERMENT MILITAIRE
»
Dans les milieux militaires, on affirme
que le ministre de la guerre d'accord avec
M. Clemenceau, prépare un projet de réta-
blissement du serment des officiers.
La formule de ce serment serait, parait-il,
des plus impératïves, en ce qui concerne
la fidélité à la forme républicaine et aux
devoirs « civiques » que cette fidélité com-
porte.
APRÈS LA SEPARATION
Les inventaires
On sait que M. Clemenceau a résolu de
faire procéder aux inventaires des- biens
d'Eglise dans les localités où ce travail
n'avait pas été fait jusqu'ici.
Soixante-cinq mille inventaires ont été
faits jusqu'à ce jour. Il reste à en faire
exactement 3,605 répartis dans 46 départe-
ments.
Mais la répartition est très inégale en-
tre ces départements, comme.!'Aveyron où
il y a environ 450 inventaires à faire et
au contraire des départements où il n'y en
a que deux ou trois.
L'assemblée des évêques
Une confusion s'est introduite au sujet
de la pr-ochaine réunion des évêques, dont
il a déjà été parlé.
Il n'est pas exact que la commission per-
manente des évêques de France ait été
convoquée pour la fin du 'mois, dans le
but de préparer l'ordre du jour d'une pro-
Vchaine rassemblée générale qui devait se
tenir dans la première quinzaine de dé-
cembre.
Ce sont les évêques protecteurs de l'Ins-
titut cathodique qui so réuniront' rue de
Vaugirard, le 28 courant.
Il est probable que les évêques profite-
ront de cette réunion pour traiter des af-
faires de l'Eglise de France ; mais cette
réunion n'aura pas Te caractère d'une as-
semblée générale et, quant à la commis-
sion permanente, elle n'a nullement été
convoquée.
BAVARDAGE
Sans tomber, ie l'espère, sous la loi
qui frappe les antimilitaristes, je me per-
mettrai une légère critique à l'adresse de
Vautorité militaire.
Voici qu'on annonce que de nouvelles
constructions, nécessitées par le service,
vont être édifiées au Val-de-Grâce. Loin
de moi la pensée de critiquer les améliora-
tions qu'on désire apporter à l'installation
des malades, mais je me demande si, vrai-
ment, on est bien venu à tuer tout un quar-
tier de Paris, non pas physiquement, mais
commercialement et moralement.
Sur une longueur de plus de trois cents
mètres, le mur du Val-dc-Grdce borde un
des plus beaux boulevards de Paris, Port-
Royal, que j'ai habité pendant quinze ans
et que te connais.
Eh bien ! de celle voie superbe qui ne
demande qu'à vivre, le Val-de-Grâce fait
une avenue morte, presque sinistré et peu
sûre le soir. Sans parler de la laideur for-
midable de ce mur mal crépi sur lequel
des réparations hâtives ont laissé des
silhouettes fantastiques de monstrueux
mastodontes.
Nous serions certainement fondés à de-
mander le déplacement de l'hôpital mili-
taire, qui pourrait être mieux placé un peu
plus loin, sur les confins de la grande
ville, du côté de Montsouris par exem-
ple : mais sans exiger tant, est-ce que nous
ne pourrions pas obtenir l'aliénation d'une
bande de terrains sur le côté droit de Port-
Royal, où des maisons et des boutiques
viendraient apporter la vie nécessaire ?
Les deux tronçons, séparés par tin dé-
sert, se rejoindraient, et tout le monde ap-
plaudirait.
Les couvents, ler prisons et les ca-
sernes font de ce. malheureux quartier
une sorte de Sahara dans la grande ville.
Pourquoi ? Montparnasse et les Gobelins
qui se touchent semblent à cent lieues
l'un de l'autre. C'est inutile et [dcheux.
Mais voilà : l'autorité militaire, à qui on
a déjà pris naguère le Champ de Afars,
n'entend rien lâcher de son domaine :
voyez ces fortifications, ces trous dont la
ceinture de pierre écrase Paris, sans pro-
fit pour personne, et avec lesquelles on ne
peut en finir.
Je ne m'illusionne pas sur le sort de ma
requête, mais il était bon d'en poser les
termes. On verra à la tbngue. Tout ar-
rive. - ,-- - -.
: 't-, Un Parisien.
Terrible Incendie
à la Villette
La cité des Flamands détruite
Le feu a consumé une fabrique de produits
chimiques, un laboratoire d'herboristet-
rie, des ateliers aérostatiques et
une chapelle — Une femme est
morte de peur, deux pom-
piers ont été blessés
, Un incendie qui a pris les proportions
d'un véritable .sinistre a déliaiit presque en
totalité la cité des Flamands, située 95,
rue de Flandre. ,
Cette cité, qui s'étend sur une superficie
de deux hectares environ, comprend plu-
sieurs corps de bâtiments uniquement oc-
cupés par des fabriques ou des usines.
)Cest dans les locaux de M. Dautour, her-
boriste en gros, que le feu s'est déclaré
vers seipt heures et demie du soir, par
suite de circonstances encore inconnues.
L'alarme fut donnée presque aussitôt
par M. Becker, inspecteur des gardiens de
la paix, et tandis qu'on organisait les pre-
miers secours on prévenait en hâte les
'pompiers de la .caserne Château-Landon.
'Malheureusement, le feu, se propageant
au milieu de matières éminemment com-
bustibles, avait déjà gagné sur la gauche
de vastes magasins de produits chimiques
appartenant à M. Thibault. L'incendie se
développait avec une violence inouïe lors-
que les premières pompes purent être mi-
ses en batterie.
On s'aperçut bientôt qu'elles étaient in-
suffisantes. Il faWut faire appel aux ren-
forts. Déjà le colonel des pompiers et les
pompes de i'Etat-Major arrivaient sur les
lieux du sinistre. Et bientôt M. Lépine en
personne, aidé des officiers de paix Gau-
thier et Faralicq, parut pour organiser un
service d'ordre des plus rigoureux.
Les quelques personnes qui se trou-
vaient encore dans la cité, au moment où
le feu se déclara, avaient pu se sauver à
temps. Et l'on put se convaincre, par la
suite, qu'il n'était resté personne dans les
premiers bâtiments attaqués. Cependant,
dès qu'on donna l'alarme, une jeune femme
de trente ans, Mille Evrat, était en visite
chez M. Thibault. Elle fut tel'l'ement .-ef-
frayée par les cris et les clameurs reten-
tissant de toutes parts qu'elle tomba en
syncope et expira au bout de quelques mi-
nutes, malgré tous les soins qui lui furent
prodigués.
En dépit des importants renforts, le feu
continuait son œuvre de destruction. Il at-
teignit une petite chapelle italienne, fon-
dée là depuis plusieurs* années, où elle oc-,
cupe l'étroit emplacement d'un rez-de-
ehâu$s-é-e et d'un premier étage. Au-dessus
se trouvait une fabrique d'aérostats diri-
gée par M. Gass. La fabrique abritait éga-
lement onze ballons qui y étaient remisés.
Le tout fut dévoré par les flammes. Enfin,
une partie des ateliers de M. Bloch, im-
primeur sur tissus, n'a pu être préservée.
L'intensité du feu a diminué seulement
à partir de onze heures du soir, et ce n'est
que vers minuit que les pompiers se sont
rendus maîtres du sinistre. A ce moment,
onze pompes se trouvaient encore en bat-
terie et plus de trente lances en manœu-
vre.
Les dégâts, presque tous couverts par
des assurances, sont très importants. Ils
sont évalués à plus d'un million.
Au cours 'du sauvetage, le caporal des
pompiers Philippe, de la caserne de la rue
Blanche, a été grièvement brûlé à la tête
par l'explosion d'une bonbonne d'acide. Le
pompier Dassonville, de la caserne Châ-
teau-Landon, est tombé sur un vitrage et
s'est coupé profondément le poignet. Tous-
deux ont été transportés à l'hôpital Saint-
Martin,
LE REPOS HEBDOMADAIRE
**-!" — —» "W'M" - > -.
Le Comité républicain du commerce
Le comité républicain du commerce
vient d'émettre le vœu suivant :
Le comité républicain du commerce, de
l'industrie et de l'agriculture,
Considérant qu'avant de -rechercher.
toute modification de la loi sur le repos
hebdomadaire il importe d'en assurer
l'application intégrale et loyale ;
Que, dans ses articles 2 et 8, elle pré-
voit les dérogations indispensables aux be-
soins du travail national et à l'intérêt dis
public ;
Emet le vœu que la loi reçoive* son ap-
plication aves les garanties. qu'elle accorde
au commerce et à l'industrie.
Les commerçants détaillants
On nous communique la note que voici :
« La Fédération des commerçants détail-
lants renouvelle une fois de plus son af-
firmation la plus catégorique que tous, ses
adhérents appliquent à leurs employés le
repos hebdomadaire dans son principe,
c'est-à-dire que tous ses membres accor-
dent aux travailleurs un jour de repos sur
sept.
« Proteste contre les insinuations, mal-
veillantes qui n'ont pour but que d'induire
le public en erreur en nous considérant
comme des gens « hors la loi », tandis
que, au contraire, les commerçants détail-
lants ont été des premiers à respecter cette
loi et à en faire bénéficier leurs employés,
contrairement aux inexactitudes des me-
neurs qui prétendent défendre les intérêts
de leurs camarades, qu'ils sacrifient en
réalité à leurs passions politiques.
« La Fédération ne désire aucune modi-
fication à la loi, qu'elle trouve juste et
humanitaire — avec ses dérogations.
« Le comité directeur de la Fédération. »
AVIS IMPORTANT
Le secrétaire général se tiendra en per-
manence dimanche 18 novembre, au siège
social, 10, rue de Lancry, pour fournir
tous renseignements utiles.
Malgré 189 affirmations erronées et les
manœuvres intéressées d'un « Groupe ano-
nyme d'employés », le comité de la Fédé-
ration ne répondra qu'à des organisations
qui acceptent au moins tLa responsabilité
de leurs publications.
L'application de la loi
Le ministre du travail, d'accord avec le
préfet de police, a décidé, pour que l'appli-
cation de la loi sur le repos hebdomadaire
soit intégrale, de prendre les mesures sui-
vantes: - f
Tous les commiss'ariats' de police, d'ordi-
naire fermés le dimanche, resteront ou-
verts. Un registre sera déposé pour re-
cueillir les réclamations, et, sur le vu de
ces réclamations, les procès-verbaux, s'il y
a lieu, seront dressés.
De plus, les attributions des représen-
tants de la loi sont fixées de la façon sui-
vantes • -
Dans tous les commerces de détail ci-
après,: bazars, chaussures, confections,
nouveautés, chapeaux, chemiserie, linge-
rie, mercerie ; — dans les établissements
de vente de denrées alimentaires au détail
(article 5, paragraphe 2) ; — dans les hô-
tels, magasins -de fleurs naturelles et éta-
blissements de bains (article 3), ainsi que
dans les salons de coiffure, le commissaire
de police du quartier sera spécialement
chargé d'assurer l'application de la loi.
* Dans les établissements suivants, admis
de droit à donner le repos par roulement :
fabrication de produits alimentaires desti-
nés à la consommation immédiate (boulan-
gers, pâtissiers, charcutiers, glaciers), res-
taurants et débits de boissons, débits de
tabac, les commissaires de police, inspec-
teurs des poids et mesures, seront spécia-
lement chargés des vérifications et sanc-
tions nécessaires.
Le contrôle de l'exécution des disposi-
tions de la loi dans tous les autres établis-
sements sera réservé aux inspecteurs du
travail, qui s'abstiendront de faire dans
les établissements énumérés ci dessus les
visites de contrôle uniquement destinées à
contrôler la loi du 13 juillet 1906.
Il va sans dire que si, au cours de tour-
nées motivées par la surveillance de l'ap-
plication des autres lois de protection ou-
vrière, l'inspecteur est amené à constater"
des infractions à l'obligation du repos heb-
domadaire, il aurait à relever cas in~T'
tions dans des procès-verbaux dont il dôn-
nerait connaissance au commissaire de
police plus spécialement chargé de la sur-
veillance de l'étal, lissement intéressé.
Cette division des attributions est fon-
dée sur ce fait que, s'agissant du roule-
ment et des questions complexes qu'il
pose, les inspecteurs du travail ont une
compétence professionnelle plus étendue.
Le ministre du travail a saisi le ministre
de la justice de la difficulté que rencon-
trait l'application de la loi dans les prétoi-
res de justice de paix. Les juges de paix,
surtout à Paris, saisis des procès-verbaux,
remettent leurs décisions à des dates trop
lointaines. Il n'y a donc plus de sanction.
Le ministre-de la justice a pris rengage-
ment de recommander pour l'avenir aux
magistrats du ministère public près I!es
justices de paix d'insister pour que des
décisions immédiates soient rendues.
Manifestations
Le comité intersvndical a fait apposer
hier soir, sur les murs de Paris, le mani-
feste suivant :
Le ministre a dit : « La loi sur le repos heb-
domadaire sera appliquée sans faiblesse. » Le
préfet de police a ajouté : « Les commerçants se
sont jusqu'alors moqués de mes agents. Je mis
maintenant faire drosser des contraventions. J'ai
des instructions pour agir vigoureusement con-
tre les patrons réfractaires. »
Nous. enregistrons. mais venions sans fai-
blesse ! Organisons le contrôle. réduisons les ré-
sistances. Dans ce but, rendez-vous est donné
pour ie dimanche 18 novembre, à neuf heures et
demie du matin, sur les points suivants :
Jonction du faubourg du Temple et de la rue
de Bel'eville ; rotonde de la ViIlêtte; place des
Ternes ; place Maubert : place de la Bastille ;
place Ca.mbronne; jonction de la rue de la
Gaîté et du boulevard Edgar-Quinet,
Camarades ! Faites votre devoir. Allez tous à
ces rendez-vous. Exigeons notre droit.
Ajoutons que le préfet de police, afin
d'éviter tout désordre, a pris des mesures
très sévères.
Au Conseil supérieur du Travail
Les cours professionnels
Le conseil supérieur du travail, réunij hi -il
matin au ministère du travail sous la pre-
sidence de M. Keufer, vice-président, a
continué l'examen du projet relatif à l'en- -
seignement professionnel.
Le débat, auquel ont pris part MM. Raoul
Jay, de Montgolfier, Charles Gide, Benoist,
Denis, Manoury, Pardoux, Mortier, Borde-
rel, Herissey et Briat, rapporteur, a porté
sur l'article 52 du projet, qui prescrit en
.principe l'obligation et-4& gratuité dès-coura
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REDACTION et ADMINISTRATION
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Adresser la correspondance concernant la Rédaction à M. ADOLPHE MAUJAN
TÉLÉPHONE : 102-55 - 102-88
Adresse Télégraphique : Radical-Paris,
SOMMAIRE
IÀJB Devoirs de l'llomme. - PAUL BRULAT.
Fermeture intégrale. — A. MAUJAN. •
Un Prélat schismatique. — M. V,
Bavardage. - UN PARISIEN.
La Science et la vie. — DOCTEUR BAILLON.
!Au dehors et à côté. — JEAN-BERNARD.
Autour de l'Actualité. - G. D'A.
Petites conversations. - YVES MIRANDE.
Notes du liseur. — ALFRED-JOÛSSELIN.
LES DEVOIRS
DE L'HOMME
M. Paul Adam, avec la louable ten-
dance aux idées générales qui le carac-
térise et dont il abuse parfois, vient de
mèttre en présence et en action, sur la
scène du Théâtre-Français, deux mo-
rales contraires, celile du Christ et celile
de Nietzche, l'une fondée sur l'abnéga-
tion, l'autre sur l'égoïsme le plus im-
placable. A vrai dire, le conflit n'est pas
récent, il date de l'origine même des
sociétés ; mais il semble qu'il ait pris,
depuis vingt ou trente ans, un carac-
tère plus aigu, el qu'il s'aggrave de jour
en jour. Aussi, la question, si ancienne
qu'elle soit, demeure-t-elle d'une actua-
lité passionnante. ,
La morale de Nietzche n'est pas
moins vieille que celle du Christ ; elle
a été seulement formulée avec ses pré-
tentions scientifiques et une intransi-
geance particulière par le philosophe
allemand. Nietzche ne serait, d'ailleurs,
pas célèbre, s'il n'avait- répondu à un
état d'esprit général, si les nouvelles
générations n'avaient été préparées à
accueillir favorablement ces désolantes
doctrines d'un individualisme forcené.
Sa détestable gloire lui vint de ce qu'il
exprima les tendances et flatta l'orgueil
d'une certaine jeunesse âpre, avide, ru-
sée, véritable bande de renards à deux
pieds qui se croient supérieurs et peut-
être destinés à devenir des surhommes,
parce qu'ils sont dépourvus de scru-
pules, de générosité, de sens moral et
de tous les sentiments dont s'honore
quiconque a vécu, réfléchi et souffert.
Tout l'art de vivre, heureusement, ne
consiste pas à découvrir un plus faible
Çu» soi pouc le dévorer. §ans doute, il
est dans l'ordre naturel que le fort
triomphe du faible, et nous sommes
obligés d'accepter à cet égard les obser-
vations de Darwin, qui, d'ailleurs, n'en
tire aucun système social ou philoso-
phique. Mais c'est justement Tœuvre
de la civilisation de protéger les faibles
contre la tyrannie des plus forts ; c'est
dans ce but qu'elle a créé des lois, des
juges, des institutions, qui, si impar-
faits qu'ils soient, valent encore
mieux que les hommes ; c'est la raison
du progrès de chercher la sécurité de
tous dans le soulagement de ceux qui
souffrent; de faire que la liberté soit
une richesse commune et non le patei-
nloine de quelques-uns,
S'il fallait choisir entre ces deux mo-
rales, celle de l'Evangile et celile de
Nietzche, c'est la première qui aurait
toutes nos préférences. Cependant, il y
a place pour une troisième doctrine,
qui n'est ni de renoncement ni de rési-
gnation et qui s'accommode d'un indi-
vidualisme raisonnable, lequel ne pré-
tend pas tout écraser, mais, au con-
traire, peut parfaitement s'allier à l'al-
truisme le plus sincère et le plus géné-
reux. La liberté de penser, de rester
soi-même, n'exclut nullement, en effet,
le sentiment de solidarité humaine.
Télle est aussi, je crois, l'opinion de
M. Clemenceau, qui, dans la dernière
séance du Sénat, se défendait contre
M. de Lamarzelle d'un individualisme
à outrance. Sans cette protestation,
comment eût-il pu se prétendre, lui
aussi, un instant après, sincèrement so-
cialiste ?
Vraiment, la morale- de Nietzche est
trop commode pour s'affranchir des de-
voirs sociaux, en vertu de ce précepte
que l'individu se doit avant tout à lui-
même; elle fait trop le jeu des jouis-
seurs et des arrivistes féroces dont four-
mille la société contemporaine; elle
flatte trop, en les parant des beaux de-
hors de la philosophie, les bas instincts
de l'égoïsme et le coupable désintéres-
sement des misères et des iniquités so-
ciales. Un individualisme aussi exagéré
s'adapte mal à la pauvre condition hu-
maine, l'homme étant, de tous les êtrés
de la création, le moins fait pour vivre
seul et se passer de l'aide de ses sem-
blables. Qu'est-ce qu'un individu, sinon
le produit d'un milieu, des générations
qui se sont succédé jusqu'à lui et aux-
quelles il est redevable de sa culture
intellectuelle, des pensées et des senti-
ments qui composent son être moral ?
Des siècles ont travaillé pour lui, il bé-
néficie de tous les travaux, de toutes
les découvertes du génie humain, et il
prétendrait ne rien devoir, et il ne par-
lerait que de ses droits !
Il existe une déclaration célèbre des
droits de l'homme et du citoyen, et une
ligue du même nom. C'est parfait, et
nous en approuvons tous les principes.
Mais d'où vient qu'on nous parle sans
cesse des droits de l'homme et qu'on
nous entretient si rarement de ses de-
voirs ? Serait-ce qu'on accorde plus
d'importance à ceux-là qu'à ceux-ci ?
Il nous semble, au contraire, qu'avant
d'avoir des droits l'individu a des de-
voirs, et l'on ne saurait en tout cas con.
cevoir les uns sans les autres. Oui,
pourquoi proclamer les premiers avec
tant d'éclat et taire les seconds ? C'est
une lacune regrettable, et' je verrais vo-
lontiers se fonder la Ligue des devoirs
de l'homme et du citoyen.
Sans doute, il est plus agréable à
celui-ci d'entendre parler de ses droits,
et comme les candidats du suffrage uni-
versel cherchent avant tout à plaire à
leurs électeurs, il est bien naturel que,
dans les rapports qu'ils entretiennent
avec ces derniers, ils préfèrent placer
la conversation sur ce terrain. Toute-
fois, nous vivons en un temps où il
n'est pas indifférent 'de rappeler aux
hommes qu'ils ont des devoirs, car ja-
mais ils n'ont paru considérer ceux-ci
d'un cœur plus léger.
Nous ne nous contentons pas du pro-
grès scientifique et mécanique il ne
nous suffit pas que les automobiles fas-
sent aujourd'hui cent kilomètres à
l'heure. C'est le progrès moral qui im-
porte le plus. Montesquieu faisait de la
vertu, qui ordonne justement d'accom-
plir tous ses devoirs, le ressort indis-
pensable des Ebats démocraUques. Au
point de vue social, la vertu consiste
dans l'harmonie entre l'amour que
l'homme se porte à lui-même et celui
qu'il doit à ses semblables ; elle est
dans le monde moral ce que l'ordre est
dans le monde physique. Or, comme
l'a dit fort. bien Louis Blanc, «le ré-
gime démocratique tend, par essence,
à concilier le sentiment individuel et le
sentiment-social ; il rend hommage au
premier en adnfettant la représentation
de chaque intérêt, au second en sou-
mettant tous les intérêts à la loi de
l'égalité. Ne séparant, jamais l'homme
du citoyen et ce qui revient à l'indi-
vidu de ce que la société réclame, les
démocraties disent : « Tu mourras pour
ton pays, parce que c'est ta propriété ;
pour tes citoyens, parce qu'ils sont tes
frères ; pour ta patrie, parce qu'elle est
ta mère. »
1 PAUL BRULAT.
Actes et Paroles
totem irauLE
A la bonne heure ! voici
un collectiviste révolution-
naire qui ne mâche pas sa
pensée : le citoyen Révelin,
à propos de la loi sur le repos hebdo-
madaire, claironne un appel aux armes
dans Y Humanité. Avec, lui, on est car-
rément fixé.
Le citoyen Révelin exige que toutes
les demandes de dérogation, formulées
conformément aux dispositions de la
loi, soient rejetées en bloc.
C'est bien simple, l'article 2 et l'ar-
ticle 8 n'ont pas à être appliqués. Ils
n'existent pas pour M. Révelin et ses
amis.
Pour eux, l'application de la loi con-
siste à ne rien appliquer du tout.
Ces messieurs parlent même de récla-
mer très prochainement une sanction
des plus efficaces qui manque à cette
loi : la fermeture obligatoire, le diman-
che, de tous les magasins.
Ce n'est pas trop bête, vraiment ; et
les petits détaillants sont alors sûrs de
leur affaire : c'est la ruine à brève
échéance, puisque ces malheureux n'au-
ront même plus le droit, par leur tra-
vail personnel, de défendre leur exis-
tence commerciale.
Bien entendu, il y aura un nombre
considérable de travailleurs entraînés
dans ce désastre ; il ne faut pas ou-
blier, en effet, que la petite industrie
représente plus des neuf dixièmes des
établissements de ce pays.
La fermeture, dit le citoyen Révelin,
égalise les chances des concurrents —
les chances de mort - surtout si l'on
songe que la recette du dimanche re-
présente 40 o o de la recette totale de
la semaine !
« La fermeture, s'écrie-t-il en termi-
nant, c'est le contrôle facile. »
Tout à fait ingénieux ! Combien le
contrôle sera encore plus facilité quand
la fermeture s'étendra du dimanche aux
autres jours de la semaine !
Le leader de rH umanité veut bien
nous prévenir que ses amis et lui vont
boycotter et mettre à l'index tout jour-
nal qui se permettra de défendre une
autre thèse que la leur.
Ce n'est point gentil, confrère — et
pas très sûr, car il n'est pas prouvé que
nos lecteurs s'empresseront d'aller chez
vous lire la bonne parole.
Vous ne vous contentez pas de la fer-
meture de toutes les boutiques, vous
voulez faire fermer les journaux.
C'est la fermeture intégrale, cela —
mais je ne crois pas au succès de la for-
mule, car il sera assez difficile aux gens
que vous aurez guillotinés de s'abonner
à vos feuilles.
A. MAUJAN.
UN PRELAT SCHISMATIQUE
M. l'évêque d'Angers serait-il un ironis-
te ? Au lendemain de l'aven tore plutôt plai-
sante du cardinal' Lecot, le voilà qui tombe
à bras raccourcis sur les faiseurs de cul-
tuelles. Le dernier numéro de la Semaine
religieuse du diocèse d'Angers' nous fait
part des colères de révêque. -, Eooutez-le :
Nous croyons devoir rappeler, écrit la Se-
maine religieuse, que le souveraàn pontife a
condamné d'une façon formeHe et absolue les
associations cultuelles, stipulées par la loi de
séparation.
Donc quiconque formeraiit une association cul-
tuelle ou oonsentiratit à en faire partie : 1° péche-
rait mortellement; 2° encourrait la peine d'ex-
communication ; 3" deviendrait schismatique ;
4° n.e pourrait plus être admis aux sacrements,
si ce n'est après une sincère conversion et une
réparation publique du scandale ; 5° serait privé
de la sépulture ecclésiastique, s'il mourait dans
cet état.
S'il se trouvait un prêtre assez oublieux de son
caractère sacré et de ses obligations pour oser se
rné-ttre, malgré la défense du souverain pontife,
à la tôle d'une association cultuelle, il serait lui
aussi excommunié et schismatique ; il perdrait
ipso fado tous ses pouvoirs, y compris la fa-
culté de célébrer la sainte messe.
M. l'évêque d'Angers n'a certainement
pas manqué d'envoyer ce petit article à
son confrère de Bordeaux, l'archevêque
Leoot, amateur de cultuelles, on le sait.
M. Lecot les baptise, à .la vérité, « diocé-
saines ». Mais ce sont des « cultuelles »
tout de même. Voilà donc le cardinal dé-
claré schismatique et bel et bien excom-
munié. Il court même le risque de se voir
refuser la sépulture ecclésiastique. Il ne
peut plus, en tout cas, prétendre à célé-
brer les saints mystères. Le pauvre
homme !
Car enfin, il n'y a pas à sorlir de là, le
cardinal Lecot a créé une cultuelle, et il
tombe, le premier, sous le coup des ana-
thèmes du prélat angevin. Sainte ironie !
M. V.
ÉCHOS
(!Aujourd'hui
- Courses à Auteuil, à une heure quinze.
Nos gagnants\: v
Prix la Périchole. — Kara, Oie Sauvage.
Prix de Nice. - Creusotin, Gamester.
Prix Agua-do. - Chloral, GutlisŒl.
Prix de Chatons. — Alligator, Ulster.
Prix Le Torpilleur. — Désert, Mathusa-
lem. •
Prix du Perray. — Torpille, Chi Lo Sa.
AU CONSERVATOIRE,
- ;¡¡:.
M. Pierre Veber, dont les informa-
tions dans le New-York Herald sont ra-
rement démenties, nous révèle cet aveu
d'un juré du chant au dernier concours
d'admission.
— Il y avait une centaine de concur-
rents pour une vingtaine de places.
Après beaucoup d'hésitations nous en
avons choisi cinq.
— Alors, il y a quinze places va-
cantes ?
— Pas du tout. Il nous a fallu choisir
quinze élèves supplémentaires pour
remplir les classes et donner les répli-
qeus aux autres.
— Quinze élèves. de valeur tout de
même ?
— Nullement : ce sont des médiocres,
qui ne feront jamais rien du tout.
Quand ils auront terminé leurs deux ans
de -Conservatoire sans être récom-
pensés, on les rejettera sur le pavé.
Franchement, conclut le juré, est-ce
honnête ?
M. Pierre Veber trouve que non, et
il n'est pas seul de son avis.
Heureusement que le jury n'est pas
infaillible et que plus d'une fois des
élèves jugés comme très médiocres par
lui, qui même ne remportaient pas de
récompense au concours, sont devenus
deô artistes émérites.
L'un des plus illustres exemples n'est-
il pas Mme Rose Caron, qui ne parvint
pas à décrocher son premier prix de
chant ?
COMMERCE MACABRE.
Un procès contre un journaliste so-
cialiste de Hambourg vient de révéler
le curieux commerce de cadavres et de
pièces anatomiques qui se pratique
dans un hôpital hambourgeois. Des
têtes étaient fréquemment envoyées
pour le prix de 8 marks à Strasbourg,
où elles étaient revendues en tout ou
en partie à des universités ou à des
instituts anatomiques.
Les cercueils ainsi vidés étaient re-
chargés avec des pierres pour leur re-
donner le poids normal, et plus d'une
fois ce sont des bières emplies de cail-
loux que des parents éplorés ont con-
duites au cimetière.
Le journaliste qui a révélé ces abus
a été acquitté, malgré les efforts du mi-
nistère public, qui demandait contre
lui l'amende et la prison.
ENQUETE.
Le parquet de la Seine, ayant reçu de
nombreuses plaintes, vient d'ouvrir
une enquête au sujet d'un concours bi-
zarre organisé par une maison de vins
spéciaux.
Le concours consiste à trouver le
nombre de gouttes contenues dans les
bouteilles vendues par cette maison.
Des prix en espèces doivent être attri-
bués aux gagnants, et c'est là le hic,
car ce concours constitue bel et bien
une loterie déguisée.
SARDOU ECOLIER.
-
Le théâtre de la Gaîté vient de re-
prendre Nos bons. Villageois, et voici
encore Victorien Sardou d'actualité.
C'est à sa jeunesse que nous emprun-
tons une anecdote, et ce fut lui-même
qui la conta avec verve et esprit :
« J'ai été nommé officier de la Lé-
gion d'honneur sur la proposition du
ministre de l'instruction publique
écrit-il. Or, le ministre était M. Victor
Duruy, mon ancien maître d'histoire
au lycée Henri IV, dont j'avais gardé
un souvenir particulièrement désa-
gréable, car il est le seul professeur qui
m'ait jamais mis à la pettecte sa classe.
« Le scandale s'était produit à la
suite d'une question d'histoire que m'a-
vait posée Duruy, question à laquelle
il m'avait été impossible de' répondre.
par la raison que j'avais la bouche
pleine. En effet, mon voisin de pupitre,
Bibesco, horrible gourmand dont les
poches étaient toujours remplies de
friandises, venait de me passer des
fruits cristalrlisés absolument exquis.
Je savourais l'avant-dernier, lorsque
Duruy me posa la question importune.
Je fis des grimaces atroces pour avaler
le fruit, laissant tomber l'autre de mes
mains. Mais je m'étranglais. Ce fut un
désastre.
« — La porte est de ce côté, mon-
sieur Sardou, me fit Duruy avec un
geste. impératif.
« Je ne demandai pas mon reste et
m'en allai tout penaud.
« Quarante ans après, mon illustre
professeur devait solliciter ma voix
comme candidat à l'Académie,
w ,
« — Je sais que vous ne voterez pas
pour moi, fit-il en souriant, et que vous
me laisserez à la porte de l'Académie.
Avouez que la vengeance est un délice
dans certains cas ?
« — Moi ne pas voter pour-vous ? fis-
je. Mais je voterai des deux mains !
D'abord, parce qu'il y a vingt, ans que
vous devriez être de l'Académie ; en-
suite, parce que je sais être reconnais-
sant : si vous m'avez mis à la porte de
votre classe, vous m'avez aussi nommé
officier de la Légion d'honneur. Il y a
eu compensation.
« Puis, pour lancer un trait direct au
professeur :
« — Mais vous savez que votre puni-
tion est restée sans effet. «Je suis plus
gourmand que jamais ! »
LES ENFANTS MARTYRS.
Sous ce titre, l'auteur (anonyme
comme presque tous les collaborateurs
de la Quarterly Review) d'un article sur
la protection de l'enfance et sur les.
mauvais traitements dont. les enfants
sont victimes retrace le sort épouvan-
table des enfants d'ouvriers en Angle-
terre, à la fin du dix-huitième siècle et
dans la première moitié du dix-neu-
vième, à l'époque du grand essor indus-
triel qui transforma tout le pays, quand
aucune loi ne protégeai.t encore le tra-
vail des femmes et des enfants. Les ou-
vriers, très mal payés. e.t très miséra-
bl.es, louaient leurs enfants aux chefs
d'industries, dès l'âge de cinq ou six
ans ; quelquefois des mioches de trois
ans étaient employés pour tenir Les
chandelles ; les communes se faisaient
des revenus en livrant les enfants as-
sistés dont elles avaient la garde. Ces
pauvres petits travaillaient couramment
douze à quatorze heures par jour, par-
fois seize et jusqu'à dix-huit heures ;
souvent une équipe sur deux travaillait
la nuit. Des milliers d'enfants assistés
des communes rurales étaient envoyés
dans les centres industriels e:t livrés
sans contrôle aux patrons ou aux con-
tremaîtres. Leur condition était en-
core plus effroyable dans les mines que
dans les manufactures: de toutes jeu-
nes filles passaient leur journée à traî-
ner des wagonnets de charbon, à qua-
tre pattes, avec une chaîne qu'on ri-
vait à leur taille et qui passait entre
leurs jambes ; parfois, la voûte était si
basse que, même dans cette position,
elle leur meurtrissait le dos.
On sait que c'est seulement en 1844
que la Chambre des communes vota un
bill pour la surveillance et la limita-
tion du travail des enfants, après que
la grande enquête de 1842 eut révélé
ces odieux abus. -
UN PARI ORIGINAL.
Un pari assez original vient d'être
fait entre deux personnalités bien con-
nues. Il s'agit de savoir si aujourd'hui
il existe à Paris un seul établissement
de consommation ouvert au public :
café, bar, brasserie, marchand de vins,
ne tenant pas de « Dubonnet ». L'enjeu
est assez intéressant, mais il faudra un
certain temps, /trois mois peut-être,
avant que cette « tournée », qui ne
comprend pas moins de 15,000 établis-
sements, soit terminée.
LES DROITS DE LA FEMME.
Un ingénieux marchand de nouveau-
tés a résolu élégamment la question. Il
a accroché au-dessus de son étalage
une grande pancarte :
Entrer, visiter, choisir, acheter
c'est le droit de la femme.
Payer
c'est le devoir de l'homme.
Panurge.
CONSEIL DES MINISTRES
Les ministres et s ou s-secrétaires d'Etat se
sont réunis, hier matin à l'Elysée, sous la
présidence de M. Fallières.
La séance, qui à été de très courte durée,
a été consacrée à l'expédition- des affaires
courantes.
Le ga'rde des sceaux a soumis à la signa-
ture du présidant de la République un pro-
jet de, loi ayant pour objet d'autoriser le
ministre du travail à se faipe représenter au
Conseil d'Etat par l'un de ses directeurs en
qualité de conseiller d'Etat en service
extraordinaire.
LE SERMENT MILITAIRE
»
Dans les milieux militaires, on affirme
que le ministre de la guerre d'accord avec
M. Clemenceau, prépare un projet de réta-
blissement du serment des officiers.
La formule de ce serment serait, parait-il,
des plus impératïves, en ce qui concerne
la fidélité à la forme républicaine et aux
devoirs « civiques » que cette fidélité com-
porte.
APRÈS LA SEPARATION
Les inventaires
On sait que M. Clemenceau a résolu de
faire procéder aux inventaires des- biens
d'Eglise dans les localités où ce travail
n'avait pas été fait jusqu'ici.
Soixante-cinq mille inventaires ont été
faits jusqu'à ce jour. Il reste à en faire
exactement 3,605 répartis dans 46 départe-
ments.
Mais la répartition est très inégale en-
tre ces départements, comme.!'Aveyron où
il y a environ 450 inventaires à faire et
au contraire des départements où il n'y en
a que deux ou trois.
L'assemblée des évêques
Une confusion s'est introduite au sujet
de la pr-ochaine réunion des évêques, dont
il a déjà été parlé.
Il n'est pas exact que la commission per-
manente des évêques de France ait été
convoquée pour la fin du 'mois, dans le
but de préparer l'ordre du jour d'une pro-
Vchaine rassemblée générale qui devait se
tenir dans la première quinzaine de dé-
cembre.
Ce sont les évêques protecteurs de l'Ins-
titut cathodique qui so réuniront' rue de
Vaugirard, le 28 courant.
Il est probable que les évêques profite-
ront de cette réunion pour traiter des af-
faires de l'Eglise de France ; mais cette
réunion n'aura pas Te caractère d'une as-
semblée générale et, quant à la commis-
sion permanente, elle n'a nullement été
convoquée.
BAVARDAGE
Sans tomber, ie l'espère, sous la loi
qui frappe les antimilitaristes, je me per-
mettrai une légère critique à l'adresse de
Vautorité militaire.
Voici qu'on annonce que de nouvelles
constructions, nécessitées par le service,
vont être édifiées au Val-de-Grâce. Loin
de moi la pensée de critiquer les améliora-
tions qu'on désire apporter à l'installation
des malades, mais je me demande si, vrai-
ment, on est bien venu à tuer tout un quar-
tier de Paris, non pas physiquement, mais
commercialement et moralement.
Sur une longueur de plus de trois cents
mètres, le mur du Val-dc-Grdce borde un
des plus beaux boulevards de Paris, Port-
Royal, que j'ai habité pendant quinze ans
et que te connais.
Eh bien ! de celle voie superbe qui ne
demande qu'à vivre, le Val-de-Grâce fait
une avenue morte, presque sinistré et peu
sûre le soir. Sans parler de la laideur for-
midable de ce mur mal crépi sur lequel
des réparations hâtives ont laissé des
silhouettes fantastiques de monstrueux
mastodontes.
Nous serions certainement fondés à de-
mander le déplacement de l'hôpital mili-
taire, qui pourrait être mieux placé un peu
plus loin, sur les confins de la grande
ville, du côté de Montsouris par exem-
ple : mais sans exiger tant, est-ce que nous
ne pourrions pas obtenir l'aliénation d'une
bande de terrains sur le côté droit de Port-
Royal, où des maisons et des boutiques
viendraient apporter la vie nécessaire ?
Les deux tronçons, séparés par tin dé-
sert, se rejoindraient, et tout le monde ap-
plaudirait.
Les couvents, ler prisons et les ca-
sernes font de ce. malheureux quartier
une sorte de Sahara dans la grande ville.
Pourquoi ? Montparnasse et les Gobelins
qui se touchent semblent à cent lieues
l'un de l'autre. C'est inutile et [dcheux.
Mais voilà : l'autorité militaire, à qui on
a déjà pris naguère le Champ de Afars,
n'entend rien lâcher de son domaine :
voyez ces fortifications, ces trous dont la
ceinture de pierre écrase Paris, sans pro-
fit pour personne, et avec lesquelles on ne
peut en finir.
Je ne m'illusionne pas sur le sort de ma
requête, mais il était bon d'en poser les
termes. On verra à la tbngue. Tout ar-
rive. - ,-- - -.
: 't-, Un Parisien.
Terrible Incendie
à la Villette
La cité des Flamands détruite
Le feu a consumé une fabrique de produits
chimiques, un laboratoire d'herboristet-
rie, des ateliers aérostatiques et
une chapelle — Une femme est
morte de peur, deux pom-
piers ont été blessés
, Un incendie qui a pris les proportions
d'un véritable .sinistre a déliaiit presque en
totalité la cité des Flamands, située 95,
rue de Flandre. ,
Cette cité, qui s'étend sur une superficie
de deux hectares environ, comprend plu-
sieurs corps de bâtiments uniquement oc-
cupés par des fabriques ou des usines.
)Cest dans les locaux de M. Dautour, her-
boriste en gros, que le feu s'est déclaré
vers seipt heures et demie du soir, par
suite de circonstances encore inconnues.
L'alarme fut donnée presque aussitôt
par M. Becker, inspecteur des gardiens de
la paix, et tandis qu'on organisait les pre-
miers secours on prévenait en hâte les
'pompiers de la .caserne Château-Landon.
'Malheureusement, le feu, se propageant
au milieu de matières éminemment com-
bustibles, avait déjà gagné sur la gauche
de vastes magasins de produits chimiques
appartenant à M. Thibault. L'incendie se
développait avec une violence inouïe lors-
que les premières pompes purent être mi-
ses en batterie.
On s'aperçut bientôt qu'elles étaient in-
suffisantes. Il faWut faire appel aux ren-
forts. Déjà le colonel des pompiers et les
pompes de i'Etat-Major arrivaient sur les
lieux du sinistre. Et bientôt M. Lépine en
personne, aidé des officiers de paix Gau-
thier et Faralicq, parut pour organiser un
service d'ordre des plus rigoureux.
Les quelques personnes qui se trou-
vaient encore dans la cité, au moment où
le feu se déclara, avaient pu se sauver à
temps. Et l'on put se convaincre, par la
suite, qu'il n'était resté personne dans les
premiers bâtiments attaqués. Cependant,
dès qu'on donna l'alarme, une jeune femme
de trente ans, Mille Evrat, était en visite
chez M. Thibault. Elle fut tel'l'ement .-ef-
frayée par les cris et les clameurs reten-
tissant de toutes parts qu'elle tomba en
syncope et expira au bout de quelques mi-
nutes, malgré tous les soins qui lui furent
prodigués.
En dépit des importants renforts, le feu
continuait son œuvre de destruction. Il at-
teignit une petite chapelle italienne, fon-
dée là depuis plusieurs* années, où elle oc-,
cupe l'étroit emplacement d'un rez-de-
ehâu$s-é-e et d'un premier étage. Au-dessus
se trouvait une fabrique d'aérostats diri-
gée par M. Gass. La fabrique abritait éga-
lement onze ballons qui y étaient remisés.
Le tout fut dévoré par les flammes. Enfin,
une partie des ateliers de M. Bloch, im-
primeur sur tissus, n'a pu être préservée.
L'intensité du feu a diminué seulement
à partir de onze heures du soir, et ce n'est
que vers minuit que les pompiers se sont
rendus maîtres du sinistre. A ce moment,
onze pompes se trouvaient encore en bat-
terie et plus de trente lances en manœu-
vre.
Les dégâts, presque tous couverts par
des assurances, sont très importants. Ils
sont évalués à plus d'un million.
Au cours 'du sauvetage, le caporal des
pompiers Philippe, de la caserne de la rue
Blanche, a été grièvement brûlé à la tête
par l'explosion d'une bonbonne d'acide. Le
pompier Dassonville, de la caserne Châ-
teau-Landon, est tombé sur un vitrage et
s'est coupé profondément le poignet. Tous-
deux ont été transportés à l'hôpital Saint-
Martin,
LE REPOS HEBDOMADAIRE
**-!" — —» "W'M" - > -.
Le Comité républicain du commerce
Le comité républicain du commerce
vient d'émettre le vœu suivant :
Le comité républicain du commerce, de
l'industrie et de l'agriculture,
Considérant qu'avant de -rechercher.
toute modification de la loi sur le repos
hebdomadaire il importe d'en assurer
l'application intégrale et loyale ;
Que, dans ses articles 2 et 8, elle pré-
voit les dérogations indispensables aux be-
soins du travail national et à l'intérêt dis
public ;
Emet le vœu que la loi reçoive* son ap-
plication aves les garanties. qu'elle accorde
au commerce et à l'industrie.
Les commerçants détaillants
On nous communique la note que voici :
« La Fédération des commerçants détail-
lants renouvelle une fois de plus son af-
firmation la plus catégorique que tous, ses
adhérents appliquent à leurs employés le
repos hebdomadaire dans son principe,
c'est-à-dire que tous ses membres accor-
dent aux travailleurs un jour de repos sur
sept.
« Proteste contre les insinuations, mal-
veillantes qui n'ont pour but que d'induire
le public en erreur en nous considérant
comme des gens « hors la loi », tandis
que, au contraire, les commerçants détail-
lants ont été des premiers à respecter cette
loi et à en faire bénéficier leurs employés,
contrairement aux inexactitudes des me-
neurs qui prétendent défendre les intérêts
de leurs camarades, qu'ils sacrifient en
réalité à leurs passions politiques.
« La Fédération ne désire aucune modi-
fication à la loi, qu'elle trouve juste et
humanitaire — avec ses dérogations.
« Le comité directeur de la Fédération. »
AVIS IMPORTANT
Le secrétaire général se tiendra en per-
manence dimanche 18 novembre, au siège
social, 10, rue de Lancry, pour fournir
tous renseignements utiles.
Malgré 189 affirmations erronées et les
manœuvres intéressées d'un « Groupe ano-
nyme d'employés », le comité de la Fédé-
ration ne répondra qu'à des organisations
qui acceptent au moins tLa responsabilité
de leurs publications.
L'application de la loi
Le ministre du travail, d'accord avec le
préfet de police, a décidé, pour que l'appli-
cation de la loi sur le repos hebdomadaire
soit intégrale, de prendre les mesures sui-
vantes: - f
Tous les commiss'ariats' de police, d'ordi-
naire fermés le dimanche, resteront ou-
verts. Un registre sera déposé pour re-
cueillir les réclamations, et, sur le vu de
ces réclamations, les procès-verbaux, s'il y
a lieu, seront dressés.
De plus, les attributions des représen-
tants de la loi sont fixées de la façon sui-
vantes • -
Dans tous les commerces de détail ci-
après,: bazars, chaussures, confections,
nouveautés, chapeaux, chemiserie, linge-
rie, mercerie ; — dans les établissements
de vente de denrées alimentaires au détail
(article 5, paragraphe 2) ; — dans les hô-
tels, magasins -de fleurs naturelles et éta-
blissements de bains (article 3), ainsi que
dans les salons de coiffure, le commissaire
de police du quartier sera spécialement
chargé d'assurer l'application de la loi.
* Dans les établissements suivants, admis
de droit à donner le repos par roulement :
fabrication de produits alimentaires desti-
nés à la consommation immédiate (boulan-
gers, pâtissiers, charcutiers, glaciers), res-
taurants et débits de boissons, débits de
tabac, les commissaires de police, inspec-
teurs des poids et mesures, seront spécia-
lement chargés des vérifications et sanc-
tions nécessaires.
Le contrôle de l'exécution des disposi-
tions de la loi dans tous les autres établis-
sements sera réservé aux inspecteurs du
travail, qui s'abstiendront de faire dans
les établissements énumérés ci dessus les
visites de contrôle uniquement destinées à
contrôler la loi du 13 juillet 1906.
Il va sans dire que si, au cours de tour-
nées motivées par la surveillance de l'ap-
plication des autres lois de protection ou-
vrière, l'inspecteur est amené à constater"
des infractions à l'obligation du repos heb-
domadaire, il aurait à relever cas in~T'
tions dans des procès-verbaux dont il dôn-
nerait connaissance au commissaire de
police plus spécialement chargé de la sur-
veillance de l'étal, lissement intéressé.
Cette division des attributions est fon-
dée sur ce fait que, s'agissant du roule-
ment et des questions complexes qu'il
pose, les inspecteurs du travail ont une
compétence professionnelle plus étendue.
Le ministre du travail a saisi le ministre
de la justice de la difficulté que rencon-
trait l'application de la loi dans les prétoi-
res de justice de paix. Les juges de paix,
surtout à Paris, saisis des procès-verbaux,
remettent leurs décisions à des dates trop
lointaines. Il n'y a donc plus de sanction.
Le ministre-de la justice a pris rengage-
ment de recommander pour l'avenir aux
magistrats du ministère public près I!es
justices de paix d'insister pour que des
décisions immédiates soient rendues.
Manifestations
Le comité intersvndical a fait apposer
hier soir, sur les murs de Paris, le mani-
feste suivant :
Le ministre a dit : « La loi sur le repos heb-
domadaire sera appliquée sans faiblesse. » Le
préfet de police a ajouté : « Les commerçants se
sont jusqu'alors moqués de mes agents. Je mis
maintenant faire drosser des contraventions. J'ai
des instructions pour agir vigoureusement con-
tre les patrons réfractaires. »
Nous. enregistrons. mais venions sans fai-
blesse ! Organisons le contrôle. réduisons les ré-
sistances. Dans ce but, rendez-vous est donné
pour ie dimanche 18 novembre, à neuf heures et
demie du matin, sur les points suivants :
Jonction du faubourg du Temple et de la rue
de Bel'eville ; rotonde de la ViIlêtte; place des
Ternes ; place Maubert : place de la Bastille ;
place Ca.mbronne; jonction de la rue de la
Gaîté et du boulevard Edgar-Quinet,
Camarades ! Faites votre devoir. Allez tous à
ces rendez-vous. Exigeons notre droit.
Ajoutons que le préfet de police, afin
d'éviter tout désordre, a pris des mesures
très sévères.
Au Conseil supérieur du Travail
Les cours professionnels
Le conseil supérieur du travail, réunij hi -il
matin au ministère du travail sous la pre-
sidence de M. Keufer, vice-président, a
continué l'examen du projet relatif à l'en- -
seignement professionnel.
Le débat, auquel ont pris part MM. Raoul
Jay, de Montgolfier, Charles Gide, Benoist,
Denis, Manoury, Pardoux, Mortier, Borde-
rel, Herissey et Briat, rapporteur, a porté
sur l'article 52 du projet, qui prescrit en
.principe l'obligation et-4& gratuité dès-coura
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