Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1892-07-06
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 06 juillet 1892 06 juillet 1892
Description : 1892/07/06 (A22,N7478). 1892/07/06 (A22,N7478).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k75604709
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 29/04/2013
Vingt-deuxième année. — N*
-
+ Centimes - Paris et Départements - CINO Cèntimes
MERCREDI 6 JUILLET 1899
LE '.j. XIX1 SIÈCLE
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La Question Juife
Quelques israélites ont eu la singu-
lière idée de nous écrire pour nous
demander ce que le XIXe Siècle pen-
sait de la question juive.
De la part d'étrangers ne sachant
rien de la presse française, nous au-
rions, à la rigueur, compris cette de-
mande ; mais ces israélites disent qu'ils
sont des lecteurs assidus du XI >X" Siècle.
Des lecteurs assidus devraient être
fixés.
En dehors de la tâche quotidienne
qui nous incombe, et que nous rem-
plissons de notre mieux, de renseigner
promptement, exactement et complè-
tement le public, que faisons-nous au
XIX0 Siècle ? Q u'avons-ijous toujours
lai t ?
Chaque fois que l'occasion se pré-
sente de combattre un préjugé, nous
le combattons. Voilà pour la ligne
philosophique. Chaque fois qu'une in-
justice nous est signalée, nous prenons
avec toute l'ardeur dont nous sommes
capables, et souvent avec succès, la dé-
fense de la partie lésée. Voilà pour la
ligne sociale. Le public le sait si bien,
qu'on voit à chaque instant dans les
bureaux du XIXe Siècle des délégations
de petits fonctionnaires, instituteurs,
percepteurs, facteurs des postes, gar-
diens de la paix, succéder aux délé-
gations d'employés ou d'ouvriers ap-
partenant aux catégories les plus di-
verses, depuis le marin de la Compa-
gnie des Chargeurs-Réunis jusqu'à
l'ouvrier de la Compagnie parisienne
de déménagements, sans compter les
visites incessantes et les lettres innom-
brables dés dupes et des victimes de
la banque grande, ou petite et aussi,
ne l'oublions pas, de la publicité du
reiu Journal.
Nous n'attaquons pas les juifs en
tant que juifs. Leur religion en vaut
une autre; elle n'est ni meilleure ni
pire. Il y a d'ailleurs beaucoup de juifs
qui sont exploités comme de simples
chrétiens et qui, à ce titre, mérite-
raient d'être défendus. Mais ce qui
nous paraît monstrueux comme à bien
d'autres, c'est l'accumulation indéfinie
dans certaines mains, juives ou non,
de toute la puissance économique et
financière d'un pays qui avait voulu
donner pour base à ses institutions le
code civil, c'est-à-dire la division de
plus en plus grande des propriétés et
l'émiettement des héritages.
On a trouvé le moyen, nous l'avons
dit. déjà, de limiter la puissance politi-
que, d'empêcher qu'elle ne soitaccapa-
rée par un homme ou par un groupe
d'hommes. On n'a pas trouvé le moyen
de limiter la puissance finanèièrèet
d'empêcher qu'elle ne soit accaparée
par un homme, une famille ou une
caste.
C'est cette question, qu'on confond
souvent avec la question juive, qui
nous préoccupe. Quant à la question
juive proprement dite, la soulever à
notre époque nous paraît le plus in-
concevable anachronisme.
Cette préoccupation ne nous est pas
personnelle. La démocratie en a le
sentiment plus ou moins défini, et ses
orateurs les plus écoutés, MM. Mille-
rand et Camille Pclletan, l'ont traduite
l'autre jour dans les admirables dis-
cours qu'ils ont l'un et l'autre pronon-
cés à propos du renouvellement du
privilège de la Banque de France.
Y-lie se fait jour aussi dans les écrits
blêmes de certains conservateurs qui
n'ont rien d'antisémite.
C'est ainsi qu'on lisait avant-hier
dans le Figaro, sous la signature de
M. Saint-Genest, les lignes suivantes,
vraiment caractéristiques :
La vérité, dit M: Saint-Genest, que per-
sonne n'ose avouer, se résume dans le pro-
blème suivant : une petite race d'hommes
ayant reçu de Dieu le génie des affaires
et absorbant peu à peu la fortune de na-
tions immenses, faut-il la laisser continuer
ou faut-il chercher à lui opposer une di-
gue?
La famille Rothschild, par exemple, ayant
déjà absorbé trois milliards, la laissera-ton
absorber cinq, dix, vingt milliards ? Lais-
sel"a-t-n les juifs être pour la France ce que
lss moines étaient avec la mainmorte des
éouvents?
Les juifs formant en Europe un petit
groupe international qui n'a pas un senti-
ment très net de la patrie, les laissera-t-on
disposer du sort même de la France, en
donnant ou en refusant leur argent à un
pays adversaire ou allié ? Au-dessus de tou-
tes les conventions sociales, n'y a-t-il pas
le salut d'un peuple ?
Ce. qui donne plus de poids aux pa-
roles de M. Saint-Genest, c'est qu'il n'a
ni contre les juifs ni contre les princes
de la finance aucune antipathie. Bien
au contraire, aussitôt après la déclara-
tion <.tu'Ón vient de lire, il éprouve
f
l'impérieux besoin d'affirmer qu'il dé-
fend et défendra M. de Rothschild. Il
ajoute même qu'il le défendra comme
il a défendu M. Jules Ferry. Cela veut-
il dire què cert ains écrivains aiment
les causes vaincues et que la puis-
sance des Rothschild doit bientôt s'ef-
fondrer comme s'est effondrée la for-
tune politique de M. Jules Ferry ? M.
Saint-Genest ne le dit pas.
Quant à la polémique de M. Dru-
mont, son résultat le plus clair a été
jusqu'ici de rendre à la haute banque
un inappréciable service. Un mouve-
ment d'opinion très vif se dessinait
contre elle. Les attaques de la Libre
Parole et la mort du capitaine Mayer
ne pouvaient que lui faire obstacle.
On a vu dans la campagne de M. Dru-
mont surtout une campagne clericale.
La presse républicaine, calomniée par
des gehs ^uxquels leurs compromis-
sions ne permettaient pas de se poser
en justiciers, s'est aussitôt tournée
contre M. Drumont, et cette attitude a
pu donner l'illusion qu'elle prenait
parti- pour les hauts barons de la
finance qui, malgré leurs relations
dans le monde monarchique, ont sur
les autres réactionnaires cet avantage,
c'est qu'étant juifs, ils peuvent plus
difficilement être taxés de clérica-
lisnie. --
Il y a même la un danger sur lequel
les pubhcistes républicains indépen-
dants et patriotes ont le devoir d'ap-
peler l'attention de leurs amis politi-
ques. Flétrir la guerre qu'on fait aux
juifs en tant que guerre de race et
guerre de religion, rien de mieux.
Mais prenons garde,en combattant les
antisémites,de paraître prendre la dé-
fense des grands accapareurs de l'ar-
gent. Malgré bien des fautes, la Répu-
blique a l'incomparable fortune de
passer encore pour le gouvernement
qui prend le mieux les intérêts des pe-
tits contre les gros. Le jour où elle
pourrait être soupçonnée d'être la ser-
vante des Rothschild, elle aurait bien-
tôt perdu aux yeux du peuple tout
son prestige et toute sa force.
Le XIXe SIECLE publiera demain la
« Vie dé Paris ». car Henrv Foucruier.
LA SUCCESSION D ALPHAND
Après plusieurs mois d'attente, la direc-
rection des travaux de Paris est à la veille
d'être réorganisée. Le préfet de la Seine et
la commission spéciale du conseil sont
d'accord sur les principaux points de la ré-
forme. Voici les conclusions sommaires du
rapport que M. Sauton va soumettre au
conseil municipal sur la division de l'héri-
tage d'Alphand : 1
Les services départementaux de travaux
seront transférés à la direction départe-
mentale. Le service des concessions et du
contrôle des monopoles autres que celui du
gaz, à la direction des affaires municipales.
Le service du personnel de l'ancienne di-
rection des travaux, au service central du
personnel. Enfin, les beaux-arts et les tra-
vaux historiques seront rattachés au cabi-
net du préfet.
Les travaux seront désormais distincts,
suivant qu'ils relèvent de l'art de l'ingé-
nieur ou de l'art de l'architecte ; le service
de l'architecture relèvera de la direction
des affaires municipales.
Les-services techniques devront être sé-
parés des services administratifs propre-
ment dits; une direction administrative
comprendra les services de voirie, de l'éclai-
rage, des promenades et plantations et du
service municipal des travaux relevant de
l'art de l'ingénieur.
Le service de l'éclairage, celui des pro-
menades et des plantations constitueront
en principe des services distincts; l'ancien
service de voirie sera reconstitué.
Un service central d'hygiène et de salu-
brité des habitations sera constitué à la di-
rection des affaires municipales.
Le service municipal des travaux de la
voie publique relevant de l'art de l'ingé-
nieur sera, dans l'organisation définitive,
réparti en deux divisions, celle de la voie
publique et celle des eaux et égouts, placées
l'une et l'autre sous les ordres d'un ingé-
nieur en chef.
A titre transitoire, la division des eaux et
égouts restera subdivisée en deux servi-
ces, étant entendu que les deux services
fusionneront le jour où une vacance se pro-
duirait dans l'un des deux postes d'ingé-
nieur en chef. Provisoirement, et pour
respecter des situations acquises, l'un des
deux ingénieurs en chef de la voie publi-
que sera chargé des services de l'éclairage,
des promenades et plantations et des con-
cessions.
Comme, derrière les principes, il y a les
hommes, nous croyons savoir que, dans les
intentions du préfet, le sous-directeur ac-
tuel des travaux, M. Huet, serait mis à la
tête de la nouvelle direction administrative
des services d'ingénieurs.
LE MÉRITE AGRICOLE
Une importante promotion dans l'ordre
du Mérite agricole est actuellement en
préparation au ministère de l'agricul-
ture.
Les rapports des préfets sont tous arrivés
au secrétariat et l'on procède en ce mo-
mont au classement des dossiers, afin de
pouvoir publier la liste des titulaires la
veille de la fête nationale.
Cette liste ne sera pas aussi longue que
les années précédentes, un assez grand
nombre de croix ayant été distribuées par
le président de la République et les minis-
tres au cours de leurs voyages et à la suite
des expositions et concours agricoles.
En revanche, il sera décerné de nom-
breuses médailles d'honneur à des ouvriers
ruraux comptant plus de trente années de
bons services dans la même exploitation
agricole.
NOUVELLE ÉMEUTE EN ESPAGNE
Logrono, là juillet. — De nouveaux troubles
se sont produits à Calla-Horra à cause du
transfert de l'évêché à Logrono.
- Les émeutiers demandent la mise en liberté
des individus arrêtés lors des troubles précé-
dents. Ils ont mis le feu à quelques maisons et
ont cerné la caserne de la gendarmerie.
Les émeutiers ont jeté des pierres contre les
demeura dçs conseillers Jnnnicipaux, -
LES
CREDITS DE LA MARINE
A LA CHAMBRE
Une longue séance.-Le duel de M. Ca-
vaignac et de la commission du
budget. — La question des ca-
nons à tir rapide. -M Clé.
menceau et le ministre.
Au début de la séance d'hier, M. Henry
Boucher, rapporteur du projet, adopté sa-
medi, concernant les pensions aux victimes
de la dynamite, a appris à ta Chambre que
la mère du malheureux llamonod, oubliée
dans la répartition primitive d,: ces pen-
sions, sera traitée dans les mêmes condi-
tions que la veuve de M. Véry.
Puis la Chambre a tout aussitôt repris la
discussion des lameux crédits supplémen-
taires demandés pour la marine.Ces crédits
seront-ils votés intégralement, c'est-a-dire
tels que les demande le ministre compé-
tent? Bien fin qui pourrait le dire. On a
siégé hier jusqu'à huit heures du soir, sans
parvenir à trancher la question. Si M. Ca-
vaignac a les nombreux millions qu'il ré-
clame comme indispensables, ce n'aura pas
été sans peine. Il y a eu un fort tirage hier,
et il y en aura sans doute un non moins
gros aujourd'hui.
Toute la première partie de cette longue
séance d'hier a été assez languissante. La
bataille s'est engagée, fort lente pendant
plusieurs heures, entre le ministre qui veut
ses crédits et la commission du budget qui
en propose la réduction notable. On com-
battait en effet à coups de documents, de
chiffres, de statistiques. Les discours étaient
longs, furieusement techniques, si bien
que, quel que fût le gros intérêt de l'affaire,
la Chambre n'arrivait guère à se passion-
ner.
M. Brisson avait récommencé sur nou-
veaùx frais le réquisitoire sévère lancé sa-
medi dernier par M. Lockroy, réquisitoire
dont voici les dernières lignes qui le résu-
ment suffisamment :
M. Brisson..— En résumé, que trouvons-
nous dans ce projet de crédits? Le programme
que vous aviez établi pour 1892 est complète-
ment abandonné; au lieu de 73 navires prêts
à prendre la mer, nous n'en avons plus que
3h; nous avons deux divisions au lieu de trois,
et rien en réserve à Cherbourg et à Brest.
Et c'est pour ce résultat qu'on vous demande
M) millions !
Les lois sur la comptabilité sont méconnues;
les chapitres 19 ter et 19 bis sont de nouveau
confondus, afin que l'administration puisse
employer aux réparations les crédits destinés
aux constructions neuves.
La deuxième et la troisième catégorie sont
rétablies; la mobilisation que vous aviez pré-
parée est compromise, au moins pendant une
penode de six mois ; l'instruction est rendue
impossible; les divisions des équipages sont
rétablies; point d'artillerie à tir rapide. Telles
sont les constatations qu'a dû faire votre com-,
mission du budget.
A l'appui de ces crédits, on vous apporte des
chiffres dans lesquels vous ne pouvez avoir
aucune confiance, car ils sont l'oeuvre des
mêmes personnes qui ont présenté ceux des
dernières années, et rien ne prouve, par con-
séquent, qu'il n'y aura pas de nouveaux crédits
supplémentaires.
■Mais ce qu'il y a de plus grave, c'est là vo-
lonté manifeste du ministre de la marine de
ne tenir compte d'aucune des réformes que
vous avez votées.
De son côté, M. Thomson, rapporteur de
la commission du budget, avait exposé
pourquoi ladite commission avait opéré
une forte réduction de le millions — sans
se faire d'ailleurs trop d'illusions sur l'em-
ploi qui serait sans doute fait du reste,
c'est-à-dire des â8 millions dont elle se ré-
signait, non sans rechigner, à charger le
budget.
Le ministre de la marine, qui n'avait ren-
contré en tout ce débat que l'appui, encore
assez timide, d'un député de la droite, M.
de La Ferronays, le ministre, disons-nous,
avait tenu tête de son mieux à tant d'as-
sauts. Il avait même montré une certaine
crânerie, assez bien accueillie, au moins
sur divers bancs, rappelant que la Chambre
s'était prononcée, lors de la discussion des
derniers budgets, pour une sérieuse aug-
mentation de nos forces navales, quoi qu'il
en dût d'ailleurs coûter. « C'est afin de me
conformer à ce vœu, qui est le vôtre, a
ajouté M. Cavaignac, que je vous demande
ces hO millions, et vous reculez aujour-
d'hui! a 9
M. le ministre. — Si vous pensez que l'ave-
nir est lié au présent, que nous devons suivre
les nations rivales sur mer dans les efforts
qu'elles ont faits et qu'elles font encore, j'affir-
me alors que notre programme est un mini-
mum et qu'il n'a rien d'excessif.
Après avoir accepté les bases de ce program-
me, il ne serait conforme ni à la dignité du
gouvernement et du Parlement, ni à la fran-
chise que le gouvernement doit au Parlement,
de se payer d'illusions.
Si vous voulez avoir li»,000 hommes sur la
flotte, construire vos cuirassés en cinq années
au lieu de dix, livrer au pays 31 croiseurs ra-
pides d'ici à cinq ans, vous ne pourrez pas le
faire sans un budget de la marine qui attein-
dra de 250 à 260 millions, c'est-à-dire sans dé-
penser pour les constructions neuves M) mil-
lions au lieu de 20. (Très bien ! très bien !)
M. de Mahy. — Voilà le langage d'un hon-
nête homme 1
C'est là qu'on en était sur le coup de six
heures, et à ce moment M. Cavaignac sem-
blait tenir le bon bout.
L'artillerie de la marine
Mais, à cette heure avancée, la Chambre,
un peu somnolente, a été réveillée par de
vigoureuses salves qu'est venu tirer M. Clé-
menceau. La métaphore est en situation,
puisque c'est de l'artillerie de notre marine
qu'il s'agit.
Le député du Var est donc venu, recom-
mençant la manœuvre qu'il avait exécutée
lors de la discussion du dernier budget,
braquer de nouveau sur le ministre de la
marine — c'était M. Barbey il y a sept où
huit mois et c'est M. Cavaignac aujourd'hui
— la grosse question des canons à tir ra-
pide.
M. Cléaneoceau. — On nous demande des
crédits pour l'artillerie à tir rapide. Quelles
sont les explications du gouvernement? Zéro.
Les explications de la commission du budget?
Zéro. Ne trouvez-vous pas que ces explica-
tions sont un peu sommaires ? (On rit.)
On nous dit que nous allons aborder là un
terrain dangereux et que je m'expose à faire
connaitre aux ennemis de la France des se-
crets qu'il, nous faut garder.
Je ne partage pas cette illusion. Je crois que
nous cachons avec le plus grand soin à nos
compatriotes des secrets qui sont connus de
tous les étrangers.
J'estime que toutes ces réticences sur le
nombre, sur l'état de nos canons à tir rapide
sont une simple puérilité.
Il faut que nous connaissions le nombre des
canons à tir rapide que nous pouvons oppo-
ser aux hOO canons à tir rapide de l'Angleterre,
aux 300 canons à tir rapide de l'Italie. -
M. le ministre est allé à la commission du
budget. Il a demandé le silence sur les expli-
cations qu'il a donnees. Ce silence a été ob-
servé. Pour moi, je ne le violerai pas, mais je
veux poser une simple question.
Je laisse en dehors et le cabinet et la per-
sonne de M. le ministre, Je. ne discute que les
thèses générales qui intéressent la défense na-
tionale. (Très bienl très bien!)
Je le répété lés explications entendues vous
ont-elles paru assez satislaisantes pour que
vous soyez les répondants du ministre?
J'aurais seulement besoin de savoir, avant
de voter, ce que pensent les trente-trois mem-
bres de la commission qui ont entendu M. le
ministre. Qu'ils nuus disent : « Nous avons en-
tendu les explications de M. le ministre de la
marine sur notre artillerie a tir rapide et nous
en avons été satisiaits. » Et alors je voterai les
crétins.
Je vais plus loin : si on rie me donne pas ces
salisfactions, Je voterai les crédits tu ut ae
même, mais je fais mes reserves jusqu'au mo-
ntfttt ou M. le ministre donnera des expitca-
tious complétés sur l'état de notre marine.
(Très bien I très bien 2)
Que répond la commission du budget,
ainsi mise en cause, par l'organe de son pré-
sident; M Casimir-Périer l Qu'elle ne peut
divulguer des communications confiden-
tielles m substituer sa responsabilité à celle
du mUnstre.
M Cavaignac n'en dit pas beaucoup plus
long:
M. le ministre. — Il y a des renseignements
de fait, comme ceux qui concernent la labri-
cation des canons à tir rapide ou bien la na-
ture de l'artillerie dont sont pourvus les na-
vires de notre flotte, que je considère comme
confidentiets. a dit autre chose il m'a de-
M Clémenceau a dit autre chose il m'a de-
mandé a quoi j'emploierais les crédits que je
demandais.
Sur ce point, je suis prt à lui donner tou-
tes les explications qu'il désire.
Ces crédits me serviront pour installer sur
les navires de notre flotte l'artillerie tranlor-
mée à tir rapide et pour labriquer une nou-
velle artillerie à tir rapide.
,"'7' Canons transformés et canons nou-
veaux seront tels qu'ils pourront supporter
toute comparaison avec ceux de l'étranger,
ajoute M Cavaignac.
— Mais vos canons transformés ne m'ins-
pirent qu'une confiance relative, riposte M.
Clemenceau, et quant à votre nouveau
canon, il n'existe pas à l'heure actuelle.
Vous n'avez que des projets, mais non en-
core de type arrêté l
Un vif engagement
Et la discussion se poursuit, pressée et
ardente, entre M. Clémenceau et M. Cavai-
gnac. Chacun d'eux remonte trois ou qua-
tre fois a la tribune. 1
- Vos canons transformés, s'écrie M. Clé-
menceau, ne sont que de mauvais canons
rafistolés, de tous modèles et de toutes
provenances. Vous ne les avez même pas
éprouvés par des tirs a bord ! Parlons net,
et pas de faux fuyants!
M. le ministre. — Il n'y en a pas à l'heure
actuelle.
lU. Clémenceau. — Il n'y en a pas dans vo-
tre esprit, mais c'est un singulier procedé
parlementaire que de demander le secret.
JM. le ministre.— J'ai dit a la tribune ce que
j'avais l'intention de faire.
M Clemenceau. — C'est entendu. Nous
avons tous l'intention de sauver la patrie, mais
ce n'est pas avec des inientions que nous nous
battrons, c'est avec des canons. (Très bien!
très bien ! sur "divers bancs.)
Vosintenilon,s sont-elles à tir rapide?
crie de son banc M. Pelletan.
M. Cavaignac se fâche un peu. Il déclare
qu'il à indiqué à la Chambre l'emploi qu'il
compte faire dès crédits qu'il demande. Il
ajoute que les critiques faites par M. Cle-
menceau des canons transformés sont-d'une
inexactitude fâcheuse en de telles matières.
Il revendique hautement la responsabilité
de ses fonctions.
Mais son contradicteur ne lâche pas prise.
— M. Barbey, votre prédécesseur, dit M.
Clémenceau, nous tenait pareil langage. Il
nous promettait cent canons nouveaux pour
le mois de janvier dernier. Nous sommes
en juillet et nous attendons toujours ces
canons !
M. le ministre. — Je n'accepte la responsa-
bilité que de mes actes, je n'accepte pas celle
de promesses qui ont été faites avant moi!
(Mouvement.)
M. Clémenceau. — Alors la situation est
singulièrement plus grave! Est-ce donc à M.
Godefroy Cavaignac que nous accordons ces 28
millions?
Non ! Nous les accordons à M. le ministre de
la marine. Et les millions que nous avons
donnés, où sont-ils ? Qui en est responsable ?
Et c'est cela que vous appelez le régime parle-
mentaire?
Eh bien ! et la France, et la défense de la pa-
trie ?
r— Il y a quatre ans, ajoute le député du
Var, que @ le conseil d'amirauté demande des
canons à tir rapide. Et il n'y en a pas!
Hâtez-vous d'en faire. Soyez en état de nous
affirmer qu'il y en a quand nous discute-
rons, en novembre, le budget de la marine.
A cette époque, il ne vous suffira plus d'en-
tamer un couplet patriotique. Il nous fau-
dra des canons, des canons et encore des
canons 1
Fin de séance
La Chambre a ensuite clos la discussion
générale et ordonné le passage aux arti-
cles. Elle a même,— à sept heures passées!
— entrepris l'examen de ces articles. Quel-
ques petits crédits non contestés ont été
admis sans encombre. Mais c'est sur le cha-
pitre des constructions navales que la ba-
taille a commencé, ou plutôt recommencé.
Pour ces constructions, le gouvernement
réclamait plus de trois millions et demi,
alors que le chiffre d'un million était à peine
dépassé dans les propositions de la com-
mission du budget.
M. Burdeau explique longuement les rai-
sons de cette dernière, raisons qui s'inspi-
rent surtout du souci de l'équilibre finan-
cier. M. Cavaignac s'efforce de calmer ces
scrupules d'ordre budgétaire et invoque
l'intérêt de la défense nationale.
On va voter, mais M. de Baudry-d'Asson
— qui ne rate jamais ce coup —déclare que
la Chambre n'est pas en nombre
— C'est la faute à la droite, dont presque
tous les membres sont partis ! crie M. Rei-
nach.
Et finalement, on procède, sur le chapitre
des constructions navales, à un scrutin pu-
blic à la tribune qui doit montrer si la
Chambre est ou n'est pas en nombre.
Le quorum n'est pas atteint. Il n'y a donc
qu'à renvoyer au lendemain le second tour
de scrutin ainsi que la suite du débat.
Il est huit heures du soir - et l'on s'en
va.
LE TSAR AU MAIRE DE BREST
(PE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIERj i
Dunkerque, h juillet.
Le steamer Commel'ziem'ath-Bœhd, arrivé
hier venant de Saint-Pétersbourg, a @ débar-
qué sur le quai de Freycinet un énorme
colis mesurant une dizaine de mètres de
long. C'est un cadeau du tsar pour M. De-
lobeau, maire de Brest, consistant en splen-
dides draperies brodées sur or, en remer-
ciement de la belle réception que M. De-
lobeau fit récemment, lors de son passage à
Brest, à l'escadre russe. Ce cadeau, prove-
nant primitivement de Moscou, sera dirigé
sur Brest par le steamer Légn ou Penfeld.
CHRONIQUE
Notre collaborateur M. Millerand plai-
dait éloquemment ici, hier, une cause
j uste, à laquelle on ne peut pas demeurer
indifférent. Les prisons de Paris se trou-
vent dans des conditions d'installation
déplorables. Ces défauts de construction et
d'aménagement sont tels que le seul parti
à prendre' est un parti, héroïque, èt
qu'il n'y a qu'à les démolir.
Les inconvénients sont de deux sortes.
Ce sont, presque partout, de vieilles cons-
tructions qui se peuvent aisément trans-
lormer en foyers d'épidémies. Les déte-
nus, après tout, ne sout pas condamnés à
mort, cependant, et il importe que leur
agglomération ne fasse pas courir des
dangers aux habitants du quartier où se
trouve la prison.
Quants aux autres inconvénients, mo-
raux ceux-là, il y a longtemps qu'ils ont
été signales. De par les communications
qu'ont entre eux les prisonniers en dépit
de règlements impuissants, les prisons
laissent une si large part a la contagion
du mal qu'elles ne sont plus que des
écoles de vice.
M. Guillot a cité le fait, douloureuse-
ment caractéristique, des assassins d'Au-
teud, un crime retentissant qui eut pour
épilogue l'exécution de deux des coupa-
bles.
- C'est, a-t-il dit, parce que trois con-
damnés à de petites peines, six et huit
mois de prison pour coups et vol, se ren-
contrèrent à la Santé, que, trois mois
après, un malheureux était tué dans les
conditions les plus atroces. Les juges
correctionnels, par la condamnation qu'ils
avaient prononcée contre ces hommes,
les avaient remis à l'administration, et,
bientôt, ils devenaient des assassins. »
Et a Saint-Lazare ! Une femme dé cœur,
Mme de'Graudpré, qui a fondé l'œuvre si
utile des libérées, me faisait, ces jours-ci,
l'honneur de m'écrire, car elle demande
à ceux qui tiennent une plume de protes-
ter contre ce qu'elle appelle « un retour
en arriéré », des promiscuités qu'on avait
tâché d'éviter étant de nouveau rendues
possibles aujourd'hui.
On n'arrivera pas à modifier profondé-
ment l'organisation des prisons actuelles.
On ne réalisera réellement des progrès
qu'avec de nouveaux locaux, plus sage-
ment appropriés à leur destination.
Mais M. Millerand a el'lleuré un point
qui me parait fort intéressant quand il
a parlé des « affreux bâtiments » de Ma-
zas, qui sont la première chose qu'aper-
çoit l'étranger qui débarque à Paris, si
bien que son impression première est
une impression de déception et de mélan-
colie,
J'en veux venir à ceci que c'est en vertu
de je ne sais quelle vieille superstition
romantique que les architectes chargés
de construire une prison lui donnent une
façade lugubre. -
Qu on punisse les coupables par un ré-
gime rigoureux, que leurs cellules soient
d'un aspect sévère, qu'ils sentent vrai-
ment comme un châtiment la privation
de la liberté, c'est tout naturel. Mais
pourquoi punir le public, les passants
inoffensifs, les promeneurs innocents,
par la vue d'une hideuse bâtisse faite
pour jeter du noir dans l'âme ?
Est-ce qu'on n'obéit point là à une con-
ception surannées, à une tradition mélo-
dramatique? Tout un quartier est irré-
médiablement assombri par ces construc-
tions sinistres.
Une prison pourrait parfaitement être
redoutable à l'intérieur, une discipline
de fer y pourrait régner, les mesures de
surveillance les plus rigoureuses pour-
raient être prises, sans qu'elle fut néces-
sairement abominable à l'extérieur, pour
le plus grand déplaisir des honnêtes gens
qui passent devant ses murs et qui n'ont
rien fait pour qu'un pareil spectacle leur
soit imposé.
Les bonnes portes verrouillées, les gril-
les, tout l'appareil de la geôle, toutes les
lamentables dispositions obligées, n'ont
nul besoin qu'on les étale de cette façon
repoussante. Raisonnons un peu, cepen-
dant. Les détenus, une fois internés, une
fois « bouclés », comme dit une expres-
sion un peu inquiétante d'argot, ne voient
plus cette façade, n'ont plus à être intimi-
dés par elle. C'est donc le public seul qui
en subit le désagrément. Pourquoi?
Quelle est, dès lors, la raison de ce luxe
d'horreurs ?
Il y a là, à dire le vrai, une antique ab-
surdité ; et si on a, avec une louable hu-
manité,plaidé la cause des prisonniers,on
peut bien, au point de vue de la décence
et de la belle ordonnance de la rue, plai-
der la cause du public, péniblement af-
fecté, et le plus inutilement du monde,
par ces restes de barbarie.
Nous ne demandons pas, assurément
que les murs d'une prison, en bor-
dure sur une voie publique aient une
élégance parfaite ; mais il n'y a rien de
paradoxal, à ce qu'il semble, à réclamer
qu'ils ne se distinguent pas trop réelle-
ment du style général de la rue, qu'ils ne
forment pas un contraste trop choquant
avec les autres monuments, comme c'est
le cas pour toutes les prisons de contruc-
tion relativement récente, dont les mu-
railles rocailleuses auraient bien pu, au
moins, être recouvertes d'une couche de
plâtre. Dites un peu, par exemple, si la
rue du Cherche-Midi, qui contient nom-
bre de maisons de style et de beaux hô-
tels, n'est pas positivement déshonorée
par la prison militaire qui est, pour l'ap-
parence, un petit Mazas ?
A quoi sert cette épouvante extérieure
pour des édifices placés en plein centre ?
Encore une fois, qui s'agit-il de punir?
Les passants ou les prisonniers ? Ceux-ci
ne craignent que la rigueur du dedans et
se soucient fort peu des airs farouches du
dehors. L'effet de tristesse est donc seule-
ment pour les gens qui ont affaire dans
les parages de la prison et qui n'ont au-
cun démêlé avec la justice. -
Trouvera-t-on que ce sont là des réclama-
tions peu importantes, en raison des gros
problèmes pénitentiaires actuels? C'est
possible,et il est certain que si l'on propo
sait un système de répression qui amen-
dât les coupables, au lieu de les plonger
plus avant dans le mal, cette question
d'architecture devrait céder le pas à lai
discussion de ce système, discussion qui; ,
serait, en effet, infiniment plus urgente. 7
Mais en sommes-nous là, et malheureu-
sement, si on avoue que si les détenu
sortent plus gangrenés de prison qu'.,
leur entrée dans la maison de réclusion,
a-t-on rien imaginé qui soit plus efficaca
dans le régime moral à leur imposer? Jer
dis seulement que, dans une ville d'une
grâce suprême comme Paris, il y a quel-
que chose d'inepte à affliger nos rues de-:
ces façades monstrueuses qui n'ajoutent
rien à la dureté de la peine à subir. 11
vaudrait mieux que certaines prisons
eussent une entrée moins odieuse à voir
et qu'elles fussent mieux surveillées. Tout
le monde y gagnerait.
J'ai visité, à Stockholm, la prison de
Norrmalm. Elle se trouve dans une rue
assez animée. Elle ne se distingue au de-
hors, des autres maisons, que par sa
grande porte cochère fermée. Un étran-
ger peut même être assez étonné d'ap-
prendre que c'est là un lieu de désespoir
Et cependant, malgré cet aspect débon-
naire, elle est terrible, cette prison où la
règle du silence est plus stricte que par-
tout ailleurs et où les moindres infrac-
tions à la discipline ont des conséquences
redoutables. Mais la municipalité de Stock-
holm, de qui - relève cette prison, a com-
pris qu'il n'y avait aucune raison d'infli-
ger aux passants une impression d'an-<
goisse et d'abîmer une belle rue par un
bâtiment extérieurement affreux.
Est-il donc impossible de demander.
que, à Paris, on ait les mêmes scrupules?
Et l'imagination des architectes est-elle sr
pauvre, ou faussée à ce point par les-
romans-feuilletons, qu'elle ne puisse ré-
server les dispositions brutales d'une pri-
son pour les prisonniers seulement ?
Paul Ginisty.
LE RECOURS EN GRACE
DE RAVACHOL
M. le président de la République va sta-*
tuer, ces jours-ci, sur le point de savoir s'il
y a lieu de gracier Ravachol.
A la différence du pourvoi en cassation,
qui ne s'effectue qu'autant que le condamné
a, dans les trois jours qui suivent l'arrêt de
la-cour d'assises, déclaré, s'il ne sait signer,:
se pourvoir devant la cour suprême, le re-
cours en grâce s'exerce d'office, indépen-
damment « de la volonté du condamné. Que
celui-ci le veuille ou ne le veuille pas, M. le
président de là République est toujours ap-'
pelé à examiner en dernier ressort s'il y a
lieu de faire tomber une nouvelle tête sous
le couteau de Deibîer.
Aussitôt après l'expiration des délais de
cassation, en cas de non-pourvoi, le dossier
de l'affaire criminelle dont les débats se
sont terminés par une condamnation à
mort est transmis à la commission des grâ-
ces, qui délibère et émet un avis destiné à
éclairer la religion du président de la Répu-
blique. M. Carnot n'est pas lié par la déci-
sion de la commission des grâces. Il peut
s'en affranchir à sa volonté ; il est absolu-
ment souverain. Toutefois, dans la prati-
que, il se conforme presque toujours à l'a-
vis qui lui a été donné par la commission.
M. Grévy, de clémente mémoire, ne te-
nait, lui, d'ordinaire, compte des décisions
de la commission qu'autant que celles-ci
concluaient à la grâce. Sinon, il passait ou-
tre et graciait, graciait, graciait.
M. Carnot se montre plus constitutionnel
que son prédécesseur. L'avis de ces mes-
sieurs de la commission est, à ses yeux, pa-
role d'Evangile.
Après ces détails quasi techniques, nous.
[ pouvons annoncer que le président de la»
République vient de recevoir le dossier de
Ravachol, auquel est jointe la décision —
qu'il n'est pas difficile de deviner — de la
commission des grâces. M. Carnot va exa-
miner ce dossier. Puis il recevra la visite;
de Me Lagasse qui, en dépit des volontés
de son client et pour accomplir. jusqu'au
bout son devoir professionnel, tentera, au-
près du président de la République, un
dernier et inutile effort en faveur du dyna-
miteur-assassin.
La visite que, sur la convocation qu'il a
sollicitée et qu'il attend, .Me Lagasse fera
ces jours-ci à l'Elysée, n'aura vraisembla-
blement d'autre effet que d'indiquer que
l'exécution de Ravachol à Montbrison est
proche.
LA
STATISTIQUE AGRICOLE DÉCENNALE,
La statistique agricole décennale à la-
quelle il est procédé en ce moment sur
toute la surface du territoire français, et
qui devra être terminée le 15 janvier 1893,
sera la plus importante de toutes celles oui
ont été faites depuis 18A0.
Les commissions spéciales organisées à
cet effet dans toutes les communes et chefs-
lieux de canton comprennent cent mille
piembres.
En dehors de ces commissions, le minis-
tre a chargé les professeurs départemen-
taux d'agriculture de centraliser tous les
renseignements et de faire l'explication des
chiffres fournis par les commissions lo-
cales.
, Le travail sera divisé comme suit : le soi
et le climat, les cultures, les animaux, les
engrais, l'outillage, les industries annexes,
les améliorations foncières, la propriété;
les modes d'exploitation, la main-d'œuvre,
les encouragements à l'agriculture et l'en
seignement agricole.
Enfin, pour compléter le travail, il sera,
dressé trois monographies d'exploitation,
rurale par département : celles de grande,
de moyenne et de petite culture.
M. Develle se propose d'affecter une som-
me de 10,000 francs en prix à décerner aux-.,
auteurs des rapports qui seront jugés leiî
meilleurs par une commission spéciale qui
sera instituée prochainement à cet effet. ,
AU BRÉSIL
La légation des Etats-Unis du Brésil commu*
nique l'information suivante :
Le Congrès a résolu, d'accord avec la ConstiV
tion, que l'élection d'un nouveau président
n'aura pas lieu.
Aux termes de cette résolution, le vice-pr
sident actuellement en exercice, le maréchaï
Peixoto, continuera à rester à la tête de la
présidence de la République iusqu'à la fia d&
1S9h.
-
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MERCREDI 6 JUILLET 1899
LE '.j. XIX1 SIÈCLE
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PARIS
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15 jours, 1 fr. 60.
1 mois, 3 francs.
2 mois, 6 francs.
La Question Juife
Quelques israélites ont eu la singu-
lière idée de nous écrire pour nous
demander ce que le XIXe Siècle pen-
sait de la question juive.
De la part d'étrangers ne sachant
rien de la presse française, nous au-
rions, à la rigueur, compris cette de-
mande ; mais ces israélites disent qu'ils
sont des lecteurs assidus du XI >X" Siècle.
Des lecteurs assidus devraient être
fixés.
En dehors de la tâche quotidienne
qui nous incombe, et que nous rem-
plissons de notre mieux, de renseigner
promptement, exactement et complè-
tement le public, que faisons-nous au
XIX0 Siècle ? Q u'avons-ijous toujours
lai t ?
Chaque fois que l'occasion se pré-
sente de combattre un préjugé, nous
le combattons. Voilà pour la ligne
philosophique. Chaque fois qu'une in-
justice nous est signalée, nous prenons
avec toute l'ardeur dont nous sommes
capables, et souvent avec succès, la dé-
fense de la partie lésée. Voilà pour la
ligne sociale. Le public le sait si bien,
qu'on voit à chaque instant dans les
bureaux du XIXe Siècle des délégations
de petits fonctionnaires, instituteurs,
percepteurs, facteurs des postes, gar-
diens de la paix, succéder aux délé-
gations d'employés ou d'ouvriers ap-
partenant aux catégories les plus di-
verses, depuis le marin de la Compa-
gnie des Chargeurs-Réunis jusqu'à
l'ouvrier de la Compagnie parisienne
de déménagements, sans compter les
visites incessantes et les lettres innom-
brables dés dupes et des victimes de
la banque grande, ou petite et aussi,
ne l'oublions pas, de la publicité du
reiu Journal.
Nous n'attaquons pas les juifs en
tant que juifs. Leur religion en vaut
une autre; elle n'est ni meilleure ni
pire. Il y a d'ailleurs beaucoup de juifs
qui sont exploités comme de simples
chrétiens et qui, à ce titre, mérite-
raient d'être défendus. Mais ce qui
nous paraît monstrueux comme à bien
d'autres, c'est l'accumulation indéfinie
dans certaines mains, juives ou non,
de toute la puissance économique et
financière d'un pays qui avait voulu
donner pour base à ses institutions le
code civil, c'est-à-dire la division de
plus en plus grande des propriétés et
l'émiettement des héritages.
On a trouvé le moyen, nous l'avons
dit. déjà, de limiter la puissance politi-
que, d'empêcher qu'elle ne soitaccapa-
rée par un homme ou par un groupe
d'hommes. On n'a pas trouvé le moyen
de limiter la puissance finanèièrèet
d'empêcher qu'elle ne soit accaparée
par un homme, une famille ou une
caste.
C'est cette question, qu'on confond
souvent avec la question juive, qui
nous préoccupe. Quant à la question
juive proprement dite, la soulever à
notre époque nous paraît le plus in-
concevable anachronisme.
Cette préoccupation ne nous est pas
personnelle. La démocratie en a le
sentiment plus ou moins défini, et ses
orateurs les plus écoutés, MM. Mille-
rand et Camille Pclletan, l'ont traduite
l'autre jour dans les admirables dis-
cours qu'ils ont l'un et l'autre pronon-
cés à propos du renouvellement du
privilège de la Banque de France.
Y-lie se fait jour aussi dans les écrits
blêmes de certains conservateurs qui
n'ont rien d'antisémite.
C'est ainsi qu'on lisait avant-hier
dans le Figaro, sous la signature de
M. Saint-Genest, les lignes suivantes,
vraiment caractéristiques :
La vérité, dit M: Saint-Genest, que per-
sonne n'ose avouer, se résume dans le pro-
blème suivant : une petite race d'hommes
ayant reçu de Dieu le génie des affaires
et absorbant peu à peu la fortune de na-
tions immenses, faut-il la laisser continuer
ou faut-il chercher à lui opposer une di-
gue?
La famille Rothschild, par exemple, ayant
déjà absorbé trois milliards, la laissera-ton
absorber cinq, dix, vingt milliards ? Lais-
sel"a-t-n les juifs être pour la France ce que
lss moines étaient avec la mainmorte des
éouvents?
Les juifs formant en Europe un petit
groupe international qui n'a pas un senti-
ment très net de la patrie, les laissera-t-on
disposer du sort même de la France, en
donnant ou en refusant leur argent à un
pays adversaire ou allié ? Au-dessus de tou-
tes les conventions sociales, n'y a-t-il pas
le salut d'un peuple ?
Ce. qui donne plus de poids aux pa-
roles de M. Saint-Genest, c'est qu'il n'a
ni contre les juifs ni contre les princes
de la finance aucune antipathie. Bien
au contraire, aussitôt après la déclara-
tion <.tu'Ón vient de lire, il éprouve
f
l'impérieux besoin d'affirmer qu'il dé-
fend et défendra M. de Rothschild. Il
ajoute même qu'il le défendra comme
il a défendu M. Jules Ferry. Cela veut-
il dire què cert ains écrivains aiment
les causes vaincues et que la puis-
sance des Rothschild doit bientôt s'ef-
fondrer comme s'est effondrée la for-
tune politique de M. Jules Ferry ? M.
Saint-Genest ne le dit pas.
Quant à la polémique de M. Dru-
mont, son résultat le plus clair a été
jusqu'ici de rendre à la haute banque
un inappréciable service. Un mouve-
ment d'opinion très vif se dessinait
contre elle. Les attaques de la Libre
Parole et la mort du capitaine Mayer
ne pouvaient que lui faire obstacle.
On a vu dans la campagne de M. Dru-
mont surtout une campagne clericale.
La presse républicaine, calomniée par
des gehs ^uxquels leurs compromis-
sions ne permettaient pas de se poser
en justiciers, s'est aussitôt tournée
contre M. Drumont, et cette attitude a
pu donner l'illusion qu'elle prenait
parti- pour les hauts barons de la
finance qui, malgré leurs relations
dans le monde monarchique, ont sur
les autres réactionnaires cet avantage,
c'est qu'étant juifs, ils peuvent plus
difficilement être taxés de clérica-
lisnie. --
Il y a même la un danger sur lequel
les pubhcistes républicains indépen-
dants et patriotes ont le devoir d'ap-
peler l'attention de leurs amis politi-
ques. Flétrir la guerre qu'on fait aux
juifs en tant que guerre de race et
guerre de religion, rien de mieux.
Mais prenons garde,en combattant les
antisémites,de paraître prendre la dé-
fense des grands accapareurs de l'ar-
gent. Malgré bien des fautes, la Répu-
blique a l'incomparable fortune de
passer encore pour le gouvernement
qui prend le mieux les intérêts des pe-
tits contre les gros. Le jour où elle
pourrait être soupçonnée d'être la ser-
vante des Rothschild, elle aurait bien-
tôt perdu aux yeux du peuple tout
son prestige et toute sa force.
Le XIXe SIECLE publiera demain la
« Vie dé Paris ». car Henrv Foucruier.
LA SUCCESSION D ALPHAND
Après plusieurs mois d'attente, la direc-
rection des travaux de Paris est à la veille
d'être réorganisée. Le préfet de la Seine et
la commission spéciale du conseil sont
d'accord sur les principaux points de la ré-
forme. Voici les conclusions sommaires du
rapport que M. Sauton va soumettre au
conseil municipal sur la division de l'héri-
tage d'Alphand : 1
Les services départementaux de travaux
seront transférés à la direction départe-
mentale. Le service des concessions et du
contrôle des monopoles autres que celui du
gaz, à la direction des affaires municipales.
Le service du personnel de l'ancienne di-
rection des travaux, au service central du
personnel. Enfin, les beaux-arts et les tra-
vaux historiques seront rattachés au cabi-
net du préfet.
Les travaux seront désormais distincts,
suivant qu'ils relèvent de l'art de l'ingé-
nieur ou de l'art de l'architecte ; le service
de l'architecture relèvera de la direction
des affaires municipales.
Les-services techniques devront être sé-
parés des services administratifs propre-
ment dits; une direction administrative
comprendra les services de voirie, de l'éclai-
rage, des promenades et plantations et du
service municipal des travaux relevant de
l'art de l'ingénieur.
Le service de l'éclairage, celui des pro-
menades et des plantations constitueront
en principe des services distincts; l'ancien
service de voirie sera reconstitué.
Un service central d'hygiène et de salu-
brité des habitations sera constitué à la di-
rection des affaires municipales.
Le service municipal des travaux de la
voie publique relevant de l'art de l'ingé-
nieur sera, dans l'organisation définitive,
réparti en deux divisions, celle de la voie
publique et celle des eaux et égouts, placées
l'une et l'autre sous les ordres d'un ingé-
nieur en chef.
A titre transitoire, la division des eaux et
égouts restera subdivisée en deux servi-
ces, étant entendu que les deux services
fusionneront le jour où une vacance se pro-
duirait dans l'un des deux postes d'ingé-
nieur en chef. Provisoirement, et pour
respecter des situations acquises, l'un des
deux ingénieurs en chef de la voie publi-
que sera chargé des services de l'éclairage,
des promenades et plantations et des con-
cessions.
Comme, derrière les principes, il y a les
hommes, nous croyons savoir que, dans les
intentions du préfet, le sous-directeur ac-
tuel des travaux, M. Huet, serait mis à la
tête de la nouvelle direction administrative
des services d'ingénieurs.
LE MÉRITE AGRICOLE
Une importante promotion dans l'ordre
du Mérite agricole est actuellement en
préparation au ministère de l'agricul-
ture.
Les rapports des préfets sont tous arrivés
au secrétariat et l'on procède en ce mo-
mont au classement des dossiers, afin de
pouvoir publier la liste des titulaires la
veille de la fête nationale.
Cette liste ne sera pas aussi longue que
les années précédentes, un assez grand
nombre de croix ayant été distribuées par
le président de la République et les minis-
tres au cours de leurs voyages et à la suite
des expositions et concours agricoles.
En revanche, il sera décerné de nom-
breuses médailles d'honneur à des ouvriers
ruraux comptant plus de trente années de
bons services dans la même exploitation
agricole.
NOUVELLE ÉMEUTE EN ESPAGNE
Logrono, là juillet. — De nouveaux troubles
se sont produits à Calla-Horra à cause du
transfert de l'évêché à Logrono.
- Les émeutiers demandent la mise en liberté
des individus arrêtés lors des troubles précé-
dents. Ils ont mis le feu à quelques maisons et
ont cerné la caserne de la gendarmerie.
Les émeutiers ont jeté des pierres contre les
demeura dçs conseillers Jnnnicipaux, -
LES
CREDITS DE LA MARINE
A LA CHAMBRE
Une longue séance.-Le duel de M. Ca-
vaignac et de la commission du
budget. — La question des ca-
nons à tir rapide. -M Clé.
menceau et le ministre.
Au début de la séance d'hier, M. Henry
Boucher, rapporteur du projet, adopté sa-
medi, concernant les pensions aux victimes
de la dynamite, a appris à ta Chambre que
la mère du malheureux llamonod, oubliée
dans la répartition primitive d,: ces pen-
sions, sera traitée dans les mêmes condi-
tions que la veuve de M. Véry.
Puis la Chambre a tout aussitôt repris la
discussion des lameux crédits supplémen-
taires demandés pour la marine.Ces crédits
seront-ils votés intégralement, c'est-a-dire
tels que les demande le ministre compé-
tent? Bien fin qui pourrait le dire. On a
siégé hier jusqu'à huit heures du soir, sans
parvenir à trancher la question. Si M. Ca-
vaignac a les nombreux millions qu'il ré-
clame comme indispensables, ce n'aura pas
été sans peine. Il y a eu un fort tirage hier,
et il y en aura sans doute un non moins
gros aujourd'hui.
Toute la première partie de cette longue
séance d'hier a été assez languissante. La
bataille s'est engagée, fort lente pendant
plusieurs heures, entre le ministre qui veut
ses crédits et la commission du budget qui
en propose la réduction notable. On com-
battait en effet à coups de documents, de
chiffres, de statistiques. Les discours étaient
longs, furieusement techniques, si bien
que, quel que fût le gros intérêt de l'affaire,
la Chambre n'arrivait guère à se passion-
ner.
M. Brisson avait récommencé sur nou-
veaùx frais le réquisitoire sévère lancé sa-
medi dernier par M. Lockroy, réquisitoire
dont voici les dernières lignes qui le résu-
ment suffisamment :
M. Brisson..— En résumé, que trouvons-
nous dans ce projet de crédits? Le programme
que vous aviez établi pour 1892 est complète-
ment abandonné; au lieu de 73 navires prêts
à prendre la mer, nous n'en avons plus que
3h; nous avons deux divisions au lieu de trois,
et rien en réserve à Cherbourg et à Brest.
Et c'est pour ce résultat qu'on vous demande
M) millions !
Les lois sur la comptabilité sont méconnues;
les chapitres 19 ter et 19 bis sont de nouveau
confondus, afin que l'administration puisse
employer aux réparations les crédits destinés
aux constructions neuves.
La deuxième et la troisième catégorie sont
rétablies; la mobilisation que vous aviez pré-
parée est compromise, au moins pendant une
penode de six mois ; l'instruction est rendue
impossible; les divisions des équipages sont
rétablies; point d'artillerie à tir rapide. Telles
sont les constatations qu'a dû faire votre com-,
mission du budget.
A l'appui de ces crédits, on vous apporte des
chiffres dans lesquels vous ne pouvez avoir
aucune confiance, car ils sont l'oeuvre des
mêmes personnes qui ont présenté ceux des
dernières années, et rien ne prouve, par con-
séquent, qu'il n'y aura pas de nouveaux crédits
supplémentaires.
■Mais ce qu'il y a de plus grave, c'est là vo-
lonté manifeste du ministre de la marine de
ne tenir compte d'aucune des réformes que
vous avez votées.
De son côté, M. Thomson, rapporteur de
la commission du budget, avait exposé
pourquoi ladite commission avait opéré
une forte réduction de le millions — sans
se faire d'ailleurs trop d'illusions sur l'em-
ploi qui serait sans doute fait du reste,
c'est-à-dire des â8 millions dont elle se ré-
signait, non sans rechigner, à charger le
budget.
Le ministre de la marine, qui n'avait ren-
contré en tout ce débat que l'appui, encore
assez timide, d'un député de la droite, M.
de La Ferronays, le ministre, disons-nous,
avait tenu tête de son mieux à tant d'as-
sauts. Il avait même montré une certaine
crânerie, assez bien accueillie, au moins
sur divers bancs, rappelant que la Chambre
s'était prononcée, lors de la discussion des
derniers budgets, pour une sérieuse aug-
mentation de nos forces navales, quoi qu'il
en dût d'ailleurs coûter. « C'est afin de me
conformer à ce vœu, qui est le vôtre, a
ajouté M. Cavaignac, que je vous demande
ces hO millions, et vous reculez aujour-
d'hui! a 9
M. le ministre. — Si vous pensez que l'ave-
nir est lié au présent, que nous devons suivre
les nations rivales sur mer dans les efforts
qu'elles ont faits et qu'elles font encore, j'affir-
me alors que notre programme est un mini-
mum et qu'il n'a rien d'excessif.
Après avoir accepté les bases de ce program-
me, il ne serait conforme ni à la dignité du
gouvernement et du Parlement, ni à la fran-
chise que le gouvernement doit au Parlement,
de se payer d'illusions.
Si vous voulez avoir li»,000 hommes sur la
flotte, construire vos cuirassés en cinq années
au lieu de dix, livrer au pays 31 croiseurs ra-
pides d'ici à cinq ans, vous ne pourrez pas le
faire sans un budget de la marine qui attein-
dra de 250 à 260 millions, c'est-à-dire sans dé-
penser pour les constructions neuves M) mil-
lions au lieu de 20. (Très bien ! très bien !)
M. de Mahy. — Voilà le langage d'un hon-
nête homme 1
C'est là qu'on en était sur le coup de six
heures, et à ce moment M. Cavaignac sem-
blait tenir le bon bout.
L'artillerie de la marine
Mais, à cette heure avancée, la Chambre,
un peu somnolente, a été réveillée par de
vigoureuses salves qu'est venu tirer M. Clé-
menceau. La métaphore est en situation,
puisque c'est de l'artillerie de notre marine
qu'il s'agit.
Le député du Var est donc venu, recom-
mençant la manœuvre qu'il avait exécutée
lors de la discussion du dernier budget,
braquer de nouveau sur le ministre de la
marine — c'était M. Barbey il y a sept où
huit mois et c'est M. Cavaignac aujourd'hui
— la grosse question des canons à tir ra-
pide.
M. Cléaneoceau. — On nous demande des
crédits pour l'artillerie à tir rapide. Quelles
sont les explications du gouvernement? Zéro.
Les explications de la commission du budget?
Zéro. Ne trouvez-vous pas que ces explica-
tions sont un peu sommaires ? (On rit.)
On nous dit que nous allons aborder là un
terrain dangereux et que je m'expose à faire
connaitre aux ennemis de la France des se-
crets qu'il, nous faut garder.
Je ne partage pas cette illusion. Je crois que
nous cachons avec le plus grand soin à nos
compatriotes des secrets qui sont connus de
tous les étrangers.
J'estime que toutes ces réticences sur le
nombre, sur l'état de nos canons à tir rapide
sont une simple puérilité.
Il faut que nous connaissions le nombre des
canons à tir rapide que nous pouvons oppo-
ser aux hOO canons à tir rapide de l'Angleterre,
aux 300 canons à tir rapide de l'Italie. -
M. le ministre est allé à la commission du
budget. Il a demandé le silence sur les expli-
cations qu'il a donnees. Ce silence a été ob-
servé. Pour moi, je ne le violerai pas, mais je
veux poser une simple question.
Je laisse en dehors et le cabinet et la per-
sonne de M. le ministre, Je. ne discute que les
thèses générales qui intéressent la défense na-
tionale. (Très bienl très bien!)
Je le répété lés explications entendues vous
ont-elles paru assez satislaisantes pour que
vous soyez les répondants du ministre?
J'aurais seulement besoin de savoir, avant
de voter, ce que pensent les trente-trois mem-
bres de la commission qui ont entendu M. le
ministre. Qu'ils nuus disent : « Nous avons en-
tendu les explications de M. le ministre de la
marine sur notre artillerie a tir rapide et nous
en avons été satisiaits. » Et alors je voterai les
crétins.
Je vais plus loin : si on rie me donne pas ces
salisfactions, Je voterai les crédits tu ut ae
même, mais je fais mes reserves jusqu'au mo-
ntfttt ou M. le ministre donnera des expitca-
tious complétés sur l'état de notre marine.
(Très bien I très bien 2)
Que répond la commission du budget,
ainsi mise en cause, par l'organe de son pré-
sident; M Casimir-Périer l Qu'elle ne peut
divulguer des communications confiden-
tielles m substituer sa responsabilité à celle
du mUnstre.
M Cavaignac n'en dit pas beaucoup plus
long:
M. le ministre. — Il y a des renseignements
de fait, comme ceux qui concernent la labri-
cation des canons à tir rapide ou bien la na-
ture de l'artillerie dont sont pourvus les na-
vires de notre flotte, que je considère comme
confidentiets. a dit autre chose il m'a de-
M Clémenceau a dit autre chose il m'a de-
mandé a quoi j'emploierais les crédits que je
demandais.
Sur ce point, je suis prt à lui donner tou-
tes les explications qu'il désire.
Ces crédits me serviront pour installer sur
les navires de notre flotte l'artillerie tranlor-
mée à tir rapide et pour labriquer une nou-
velle artillerie à tir rapide.
,"'7' Canons transformés et canons nou-
veaux seront tels qu'ils pourront supporter
toute comparaison avec ceux de l'étranger,
ajoute M Cavaignac.
— Mais vos canons transformés ne m'ins-
pirent qu'une confiance relative, riposte M.
Clemenceau, et quant à votre nouveau
canon, il n'existe pas à l'heure actuelle.
Vous n'avez que des projets, mais non en-
core de type arrêté l
Un vif engagement
Et la discussion se poursuit, pressée et
ardente, entre M. Clémenceau et M. Cavai-
gnac. Chacun d'eux remonte trois ou qua-
tre fois a la tribune. 1
- Vos canons transformés, s'écrie M. Clé-
menceau, ne sont que de mauvais canons
rafistolés, de tous modèles et de toutes
provenances. Vous ne les avez même pas
éprouvés par des tirs a bord ! Parlons net,
et pas de faux fuyants!
M. le ministre. — Il n'y en a pas à l'heure
actuelle.
lU. Clémenceau. — Il n'y en a pas dans vo-
tre esprit, mais c'est un singulier procedé
parlementaire que de demander le secret.
JM. le ministre.— J'ai dit a la tribune ce que
j'avais l'intention de faire.
M Clemenceau. — C'est entendu. Nous
avons tous l'intention de sauver la patrie, mais
ce n'est pas avec des inientions que nous nous
battrons, c'est avec des canons. (Très bien!
très bien ! sur "divers bancs.)
Vosintenilon,s sont-elles à tir rapide?
crie de son banc M. Pelletan.
M. Cavaignac se fâche un peu. Il déclare
qu'il à indiqué à la Chambre l'emploi qu'il
compte faire dès crédits qu'il demande. Il
ajoute que les critiques faites par M. Cle-
menceau des canons transformés sont-d'une
inexactitude fâcheuse en de telles matières.
Il revendique hautement la responsabilité
de ses fonctions.
Mais son contradicteur ne lâche pas prise.
— M. Barbey, votre prédécesseur, dit M.
Clémenceau, nous tenait pareil langage. Il
nous promettait cent canons nouveaux pour
le mois de janvier dernier. Nous sommes
en juillet et nous attendons toujours ces
canons !
M. le ministre. — Je n'accepte la responsa-
bilité que de mes actes, je n'accepte pas celle
de promesses qui ont été faites avant moi!
(Mouvement.)
M. Clémenceau. — Alors la situation est
singulièrement plus grave! Est-ce donc à M.
Godefroy Cavaignac que nous accordons ces 28
millions?
Non ! Nous les accordons à M. le ministre de
la marine. Et les millions que nous avons
donnés, où sont-ils ? Qui en est responsable ?
Et c'est cela que vous appelez le régime parle-
mentaire?
Eh bien ! et la France, et la défense de la pa-
trie ?
r— Il y a quatre ans, ajoute le député du
Var, que @ le conseil d'amirauté demande des
canons à tir rapide. Et il n'y en a pas!
Hâtez-vous d'en faire. Soyez en état de nous
affirmer qu'il y en a quand nous discute-
rons, en novembre, le budget de la marine.
A cette époque, il ne vous suffira plus d'en-
tamer un couplet patriotique. Il nous fau-
dra des canons, des canons et encore des
canons 1
Fin de séance
La Chambre a ensuite clos la discussion
générale et ordonné le passage aux arti-
cles. Elle a même,— à sept heures passées!
— entrepris l'examen de ces articles. Quel-
ques petits crédits non contestés ont été
admis sans encombre. Mais c'est sur le cha-
pitre des constructions navales que la ba-
taille a commencé, ou plutôt recommencé.
Pour ces constructions, le gouvernement
réclamait plus de trois millions et demi,
alors que le chiffre d'un million était à peine
dépassé dans les propositions de la com-
mission du budget.
M. Burdeau explique longuement les rai-
sons de cette dernière, raisons qui s'inspi-
rent surtout du souci de l'équilibre finan-
cier. M. Cavaignac s'efforce de calmer ces
scrupules d'ordre budgétaire et invoque
l'intérêt de la défense nationale.
On va voter, mais M. de Baudry-d'Asson
— qui ne rate jamais ce coup —déclare que
la Chambre n'est pas en nombre
— C'est la faute à la droite, dont presque
tous les membres sont partis ! crie M. Rei-
nach.
Et finalement, on procède, sur le chapitre
des constructions navales, à un scrutin pu-
blic à la tribune qui doit montrer si la
Chambre est ou n'est pas en nombre.
Le quorum n'est pas atteint. Il n'y a donc
qu'à renvoyer au lendemain le second tour
de scrutin ainsi que la suite du débat.
Il est huit heures du soir - et l'on s'en
va.
LE TSAR AU MAIRE DE BREST
(PE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIERj i
Dunkerque, h juillet.
Le steamer Commel'ziem'ath-Bœhd, arrivé
hier venant de Saint-Pétersbourg, a @ débar-
qué sur le quai de Freycinet un énorme
colis mesurant une dizaine de mètres de
long. C'est un cadeau du tsar pour M. De-
lobeau, maire de Brest, consistant en splen-
dides draperies brodées sur or, en remer-
ciement de la belle réception que M. De-
lobeau fit récemment, lors de son passage à
Brest, à l'escadre russe. Ce cadeau, prove-
nant primitivement de Moscou, sera dirigé
sur Brest par le steamer Légn ou Penfeld.
CHRONIQUE
Notre collaborateur M. Millerand plai-
dait éloquemment ici, hier, une cause
j uste, à laquelle on ne peut pas demeurer
indifférent. Les prisons de Paris se trou-
vent dans des conditions d'installation
déplorables. Ces défauts de construction et
d'aménagement sont tels que le seul parti
à prendre' est un parti, héroïque, èt
qu'il n'y a qu'à les démolir.
Les inconvénients sont de deux sortes.
Ce sont, presque partout, de vieilles cons-
tructions qui se peuvent aisément trans-
lormer en foyers d'épidémies. Les déte-
nus, après tout, ne sout pas condamnés à
mort, cependant, et il importe que leur
agglomération ne fasse pas courir des
dangers aux habitants du quartier où se
trouve la prison.
Quants aux autres inconvénients, mo-
raux ceux-là, il y a longtemps qu'ils ont
été signales. De par les communications
qu'ont entre eux les prisonniers en dépit
de règlements impuissants, les prisons
laissent une si large part a la contagion
du mal qu'elles ne sont plus que des
écoles de vice.
M. Guillot a cité le fait, douloureuse-
ment caractéristique, des assassins d'Au-
teud, un crime retentissant qui eut pour
épilogue l'exécution de deux des coupa-
bles.
- C'est, a-t-il dit, parce que trois con-
damnés à de petites peines, six et huit
mois de prison pour coups et vol, se ren-
contrèrent à la Santé, que, trois mois
après, un malheureux était tué dans les
conditions les plus atroces. Les juges
correctionnels, par la condamnation qu'ils
avaient prononcée contre ces hommes,
les avaient remis à l'administration, et,
bientôt, ils devenaient des assassins. »
Et a Saint-Lazare ! Une femme dé cœur,
Mme de'Graudpré, qui a fondé l'œuvre si
utile des libérées, me faisait, ces jours-ci,
l'honneur de m'écrire, car elle demande
à ceux qui tiennent une plume de protes-
ter contre ce qu'elle appelle « un retour
en arriéré », des promiscuités qu'on avait
tâché d'éviter étant de nouveau rendues
possibles aujourd'hui.
On n'arrivera pas à modifier profondé-
ment l'organisation des prisons actuelles.
On ne réalisera réellement des progrès
qu'avec de nouveaux locaux, plus sage-
ment appropriés à leur destination.
Mais M. Millerand a el'lleuré un point
qui me parait fort intéressant quand il
a parlé des « affreux bâtiments » de Ma-
zas, qui sont la première chose qu'aper-
çoit l'étranger qui débarque à Paris, si
bien que son impression première est
une impression de déception et de mélan-
colie,
J'en veux venir à ceci que c'est en vertu
de je ne sais quelle vieille superstition
romantique que les architectes chargés
de construire une prison lui donnent une
façade lugubre. -
Qu on punisse les coupables par un ré-
gime rigoureux, que leurs cellules soient
d'un aspect sévère, qu'ils sentent vrai-
ment comme un châtiment la privation
de la liberté, c'est tout naturel. Mais
pourquoi punir le public, les passants
inoffensifs, les promeneurs innocents,
par la vue d'une hideuse bâtisse faite
pour jeter du noir dans l'âme ?
Est-ce qu'on n'obéit point là à une con-
ception surannées, à une tradition mélo-
dramatique? Tout un quartier est irré-
médiablement assombri par ces construc-
tions sinistres.
Une prison pourrait parfaitement être
redoutable à l'intérieur, une discipline
de fer y pourrait régner, les mesures de
surveillance les plus rigoureuses pour-
raient être prises, sans qu'elle fut néces-
sairement abominable à l'extérieur, pour
le plus grand déplaisir des honnêtes gens
qui passent devant ses murs et qui n'ont
rien fait pour qu'un pareil spectacle leur
soit imposé.
Les bonnes portes verrouillées, les gril-
les, tout l'appareil de la geôle, toutes les
lamentables dispositions obligées, n'ont
nul besoin qu'on les étale de cette façon
repoussante. Raisonnons un peu, cepen-
dant. Les détenus, une fois internés, une
fois « bouclés », comme dit une expres-
sion un peu inquiétante d'argot, ne voient
plus cette façade, n'ont plus à être intimi-
dés par elle. C'est donc le public seul qui
en subit le désagrément. Pourquoi?
Quelle est, dès lors, la raison de ce luxe
d'horreurs ?
Il y a là, à dire le vrai, une antique ab-
surdité ; et si on a, avec une louable hu-
manité,plaidé la cause des prisonniers,on
peut bien, au point de vue de la décence
et de la belle ordonnance de la rue, plai-
der la cause du public, péniblement af-
fecté, et le plus inutilement du monde,
par ces restes de barbarie.
Nous ne demandons pas, assurément
que les murs d'une prison, en bor-
dure sur une voie publique aient une
élégance parfaite ; mais il n'y a rien de
paradoxal, à ce qu'il semble, à réclamer
qu'ils ne se distinguent pas trop réelle-
ment du style général de la rue, qu'ils ne
forment pas un contraste trop choquant
avec les autres monuments, comme c'est
le cas pour toutes les prisons de contruc-
tion relativement récente, dont les mu-
railles rocailleuses auraient bien pu, au
moins, être recouvertes d'une couche de
plâtre. Dites un peu, par exemple, si la
rue du Cherche-Midi, qui contient nom-
bre de maisons de style et de beaux hô-
tels, n'est pas positivement déshonorée
par la prison militaire qui est, pour l'ap-
parence, un petit Mazas ?
A quoi sert cette épouvante extérieure
pour des édifices placés en plein centre ?
Encore une fois, qui s'agit-il de punir?
Les passants ou les prisonniers ? Ceux-ci
ne craignent que la rigueur du dedans et
se soucient fort peu des airs farouches du
dehors. L'effet de tristesse est donc seule-
ment pour les gens qui ont affaire dans
les parages de la prison et qui n'ont au-
cun démêlé avec la justice. -
Trouvera-t-on que ce sont là des réclama-
tions peu importantes, en raison des gros
problèmes pénitentiaires actuels? C'est
possible,et il est certain que si l'on propo
sait un système de répression qui amen-
dât les coupables, au lieu de les plonger
plus avant dans le mal, cette question
d'architecture devrait céder le pas à lai
discussion de ce système, discussion qui; ,
serait, en effet, infiniment plus urgente. 7
Mais en sommes-nous là, et malheureu-
sement, si on avoue que si les détenu
sortent plus gangrenés de prison qu'.,
leur entrée dans la maison de réclusion,
a-t-on rien imaginé qui soit plus efficaca
dans le régime moral à leur imposer? Jer
dis seulement que, dans une ville d'une
grâce suprême comme Paris, il y a quel-
que chose d'inepte à affliger nos rues de-:
ces façades monstrueuses qui n'ajoutent
rien à la dureté de la peine à subir. 11
vaudrait mieux que certaines prisons
eussent une entrée moins odieuse à voir
et qu'elles fussent mieux surveillées. Tout
le monde y gagnerait.
J'ai visité, à Stockholm, la prison de
Norrmalm. Elle se trouve dans une rue
assez animée. Elle ne se distingue au de-
hors, des autres maisons, que par sa
grande porte cochère fermée. Un étran-
ger peut même être assez étonné d'ap-
prendre que c'est là un lieu de désespoir
Et cependant, malgré cet aspect débon-
naire, elle est terrible, cette prison où la
règle du silence est plus stricte que par-
tout ailleurs et où les moindres infrac-
tions à la discipline ont des conséquences
redoutables. Mais la municipalité de Stock-
holm, de qui - relève cette prison, a com-
pris qu'il n'y avait aucune raison d'infli-
ger aux passants une impression d'an-<
goisse et d'abîmer une belle rue par un
bâtiment extérieurement affreux.
Est-il donc impossible de demander.
que, à Paris, on ait les mêmes scrupules?
Et l'imagination des architectes est-elle sr
pauvre, ou faussée à ce point par les-
romans-feuilletons, qu'elle ne puisse ré-
server les dispositions brutales d'une pri-
son pour les prisonniers seulement ?
Paul Ginisty.
LE RECOURS EN GRACE
DE RAVACHOL
M. le président de la République va sta-*
tuer, ces jours-ci, sur le point de savoir s'il
y a lieu de gracier Ravachol.
A la différence du pourvoi en cassation,
qui ne s'effectue qu'autant que le condamné
a, dans les trois jours qui suivent l'arrêt de
la-cour d'assises, déclaré, s'il ne sait signer,:
se pourvoir devant la cour suprême, le re-
cours en grâce s'exerce d'office, indépen-
damment « de la volonté du condamné. Que
celui-ci le veuille ou ne le veuille pas, M. le
président de là République est toujours ap-'
pelé à examiner en dernier ressort s'il y a
lieu de faire tomber une nouvelle tête sous
le couteau de Deibîer.
Aussitôt après l'expiration des délais de
cassation, en cas de non-pourvoi, le dossier
de l'affaire criminelle dont les débats se
sont terminés par une condamnation à
mort est transmis à la commission des grâ-
ces, qui délibère et émet un avis destiné à
éclairer la religion du président de la Répu-
blique. M. Carnot n'est pas lié par la déci-
sion de la commission des grâces. Il peut
s'en affranchir à sa volonté ; il est absolu-
ment souverain. Toutefois, dans la prati-
que, il se conforme presque toujours à l'a-
vis qui lui a été donné par la commission.
M. Grévy, de clémente mémoire, ne te-
nait, lui, d'ordinaire, compte des décisions
de la commission qu'autant que celles-ci
concluaient à la grâce. Sinon, il passait ou-
tre et graciait, graciait, graciait.
M. Carnot se montre plus constitutionnel
que son prédécesseur. L'avis de ces mes-
sieurs de la commission est, à ses yeux, pa-
role d'Evangile.
Après ces détails quasi techniques, nous.
[ pouvons annoncer que le président de la»
République vient de recevoir le dossier de
Ravachol, auquel est jointe la décision —
qu'il n'est pas difficile de deviner — de la
commission des grâces. M. Carnot va exa-
miner ce dossier. Puis il recevra la visite;
de Me Lagasse qui, en dépit des volontés
de son client et pour accomplir. jusqu'au
bout son devoir professionnel, tentera, au-
près du président de la République, un
dernier et inutile effort en faveur du dyna-
miteur-assassin.
La visite que, sur la convocation qu'il a
sollicitée et qu'il attend, .Me Lagasse fera
ces jours-ci à l'Elysée, n'aura vraisembla-
blement d'autre effet que d'indiquer que
l'exécution de Ravachol à Montbrison est
proche.
LA
STATISTIQUE AGRICOLE DÉCENNALE,
La statistique agricole décennale à la-
quelle il est procédé en ce moment sur
toute la surface du territoire français, et
qui devra être terminée le 15 janvier 1893,
sera la plus importante de toutes celles oui
ont été faites depuis 18A0.
Les commissions spéciales organisées à
cet effet dans toutes les communes et chefs-
lieux de canton comprennent cent mille
piembres.
En dehors de ces commissions, le minis-
tre a chargé les professeurs départemen-
taux d'agriculture de centraliser tous les
renseignements et de faire l'explication des
chiffres fournis par les commissions lo-
cales.
, Le travail sera divisé comme suit : le soi
et le climat, les cultures, les animaux, les
engrais, l'outillage, les industries annexes,
les améliorations foncières, la propriété;
les modes d'exploitation, la main-d'œuvre,
les encouragements à l'agriculture et l'en
seignement agricole.
Enfin, pour compléter le travail, il sera,
dressé trois monographies d'exploitation,
rurale par département : celles de grande,
de moyenne et de petite culture.
M. Develle se propose d'affecter une som-
me de 10,000 francs en prix à décerner aux-.,
auteurs des rapports qui seront jugés leiî
meilleurs par une commission spéciale qui
sera instituée prochainement à cet effet. ,
AU BRÉSIL
La légation des Etats-Unis du Brésil commu*
nique l'information suivante :
Le Congrès a résolu, d'accord avec la ConstiV
tion, que l'élection d'un nouveau président
n'aura pas lieu.
Aux termes de cette résolution, le vice-pr
sident actuellement en exercice, le maréchaï
Peixoto, continuera à rester à la tête de la
présidence de la République iusqu'à la fia d&
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