Titre : Gil Blas / dir. A. Dumont
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1907-06-04
Contributeur : Dumont, Auguste (1816-1885). Directeur de publication
Contributeur : Gugenheim, Eugène (1857-1921). Directeur de publication
Contributeur : Mortier, Pierre (1882-1946). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 04 juin 1907 04 juin 1907
Description : 1907/06/04 (A28,N10089). 1907/06/04 (A28,N10089).
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-209
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 19/09/2012
GIL BIAS. — MMÙ>I 4 SIM 1907 -
et documents nécessaires, j'ai acquis la preuve mo-
rale de l'innocence absolue de ces malheureux.
Toute la population de Pedernoso, y compris les
autorités civiles et ecclésiastiques, partage ma con-
viction et se joint à moi pour implorer leur grâce
'et certifier qu'en notre âme et conscience nous
affirmons qu'ils n'ont pu matériellement commettre
le crime* qui leur a été imputé.
En outre, j'ai reçu, ainsi que plusieurs autrea
Journalistes, la visite de la femme d'un des con-
damnés. Je ne me suis pas senti le courage d'imi-
ter l'évêque de Madrid, lequel, au nom de son Dieu
vengeur, a pieusement fermé s-a porte à l'infortunée
qui venait intercéder pour son mari.
Je n'ai pas voulu davantage - à l'exemple du
socialiste Pablo Iglesias — refuser de m'adresser
à la Beine, sous le fallacieux prétexte que je ne
veux rien devoir 4 la monarchie.
Je comprends qu'en ma qualité de révolution-
naire, la démarche que je tente aujourd'hui auprès
de Voire Majesté puisse- être considérée par quel-
ques-uns comme une étrange faiblesse, mais j'a-
voue que je n'ai pas pensé un instant à me récuser,
et que j'ai été fier et reconnalsisant de la mission
que l'on me confiait : faire appel à votre pitié.
Si l'on vous dit, Madame, que je suis un ennemi
de la monarchie, croyez-le. -
Mais si l'on ajoute que lorsque vous m'aurez
accordé la grâce que je vous demande au nom
de l'Humanité, je cesserai d'être cet ennemi, ne le
croyez pas.
Je ne veux pas vous offenser en vous supposant
capable de mettre nn tel prix à votre elémence.
Pour tout dire, Madame ce révolutionnaire que
je suis, et qui signerait sans hésiter un document
assez subversif pour le faire incarcérer durant sa
vie entière, tremble en adressant cette requête à
Volre Majesté et la supplie d'accorder la vie à
3eux innocents et do sauver leurs enfants du
Xésthonneur.
JOSÉ NAKENS.
Au palais de justice de Madrid
'Madrid, 3 juin. — Aujourd'hui commencent à
"Aladrid les débats du procès intenté à Nakens et
Fencr pour complicité dans l'attentat anarchiste
de la Caile May or dirigé contre le couple royal
espagnol, le jour de son mariage, le 31 mai lgw.
Ci:nq autres accusés dont une femme prendront
également place au banc des prévenus.
L'enquête judiciaire a relevé des charges graves
.contre François Ferrer, directeur de l'Ecole moder-
die de Barcelone, et a établi que des relations très
'étroites existaient depuis longtemps entre Ferrer et
Ton-arohiste Matteo Morrales, auteur de l'attentat,
qui, on le sait, .se suicida après avoir tué un garde
qui l'arrêtait. Ferrer, s'il n'a pas commandé l'acte
de Morrales,l'a d umoins inspiré et l'a favorisé en
fournissant les subsides nécessaires pour l'accom-
plir. Le procureur du roi demande donc pour Fer-
mer seize ans, cinq mois et dix jours de réclusion.
Les autres accusés sont moins compromis. Ils
n'ont, en somme, à répondre que d'avoir aidé
l'anarchiste à se soustraire pendant quelques jours
aux recherches de la police, et on croit, vu les rè-
gles observées en ce qui concerne l'hospitalité en
Espagne, qu'ils seront acquittés ou tout au moins
frappés d'une peine qui se confondra avec la lon-
frappés
gue prévention subie. -
De nombreux documents seront communiqués
aux jurés, puis ce sera les, lettres de Ferrer, expo-
sant l'esprit subversif et les fins révolutionnaires
de son école moderne de Barcelone, notamment
une qu'il adressait à Mme Léopoldine Baunard, à
Paris.
On commence à se passionner dans toute la pé-
ninsule pour ce procès, et l'opinion dominante est
que les accusés seront condamnés.
Madrid, 3 juin. — Les autorités civiles et la po-
lice ont pris des précautions sévères autour du pa-
ïaisLde justice et dans l'intérieur de l'édifice. On
dit que depuis plusieurs jours le service de la Sû-
reté exerce une surveillance active sur les mouve-
ments des anarchistes espagnols et étrangers.
On relève dans la liste des témoins présentée
p.ar la défense les noms d'Alfred Naquet, Henri
ROchefQrt, Marcel Sembat, Camille Gras, Odon de
Uuçn, sénateur catalan.
L'audience
Madrid, 3 juin. — Les débats de l'affaire de la
calle Mayor dont sont accusés de complicité Fer-,
rer, Nakens, Mayoral y Barro, Mata, Aquilino -:
Martfriez et sa femme Conception Perez, ont com-
mencé aujourd'hui.
A 11 h. 45 les accusés arrivent en voiture cellu-
laire, escortée par un peloton de la garde civile.
Dans la salle d'audience le service d'ordre est
renforcé.
Jusqu'au dernier moment on ignore qui présidera
les débats, le président du tribunal étant indisposé.
Après délibération, les magistrats décident que
M. Albadelejo présidera.
..Le procureur occupe le siège placé à droite du
tribunal. A droite et à gauche du tribunal s'as-
soient les défenseurs qui sont : MM. Iglesia pour
Ferrer, Menendez pour Nakens et Mayoral y Bar-
ro, Rozaleno pour Matfi, Nieto pour Concepcion
.:perez, et Larramendi pour Aquilino Martinez.
A 1 h. 30 les accusés entrent et s'assoient en
face du tribunal.
Le président déclare l'audience ouverte. Le rap-
porteur lit l'acte d'accusation et les conclusions du
procureur et des défenseurs.
Dans la salle du tribunal qui est très exîgiie le
petite espace réservé au public est comble. La
classe populaire domine.
L'interrogatoire de Ferrer
Madrid, 3 juin. — La lecture de l'acte d'accu-
sation est terminée à 2 h. 45.
Aussitôt après, commence l'interrogatoire des
accusés.
Le premier, Ferrer, s'exprime difficilement en
castillan, mêlé souvent d'expressions françaises.
Le président l'interroge sur ses relations avec
Morrales.
L'accusé nie avoir su si Morrales envoyait des
bombes à Paris au moment du voyage du roi Al-
phonse et donne ensuite l'emploi de son - temps
Jf 31 mai et le Ie- juin ; il dit l'impression que
lui causa la nouvelle de l'explosion de la bombe
qui lui fit suspendre un voyage qu'il avait l'in-
iention de faire à Paris.
I Le procureur interroge Ferrer sur sa vie, ses
.antécédents et ses relations ave^les républicains
[et les anarchistes, sur ses rapports avec Mlle
iLéopoldine Baunard et les opérations de fonds qui
: servaient à l'entretien de l'école moderne.
Ferrer nie avoir prêté de l'argent à Morrales pour
venir à Madrid assister aux fêtes du mariage du
Roi et l'avoir recommandé à Nackens.
L'interrogatoire de Ferrer a duré près de deux
heures et demie.
L'audience est suspendue pendant quelques ihs-
,tants.
A la réprise de l'audience, le défenseur de Ferrer
interroge celui-ci sur les relations qu'il a eues
à Paris. -
L'accusé répond qu'il y connut notamment Mlle
Meunier et avec l'argent que celle-ci lui remettait
trimestriellement, il fonda et put soutenir l'école
moderne à Barcelone. Mlle Meunier lui laissa, en
mourant, toute sa fortune.
';: Répondant à une question relative aux relations
J entre Morrales et Mlle ëoledad, de Villafranca, alors
que Morrales était professeur à l'école moderne,
Ferrer déclare q.u'à maintes reprises, tandis qu'il se
trouvait avec Mlle Soledad, le professeur Morrales
entrait soudain et lançait vers lui d'étranges re-
gards. Il affirme qu'il suspendit le voyage qu'il
se proposait de faire le ler juin à Paris, dès qu'il
connut la nouvelle de l'attentat. Ce voyage n'était
nullement simulé, car il l'avait, au contraire,
annoncé et il était motivé par son projet d'hypo-
théquer une maison à Paris.
Placards anarchistes
Madrid. 3 iuin.- Ce matin, des placards anar-
chistes ont été apposés dans plusieurs rues, de-
mandant l'acquittement des accusés de l'attentat
du 31 mai 1900, et contenant des menaces en cas
de condamnation.
Ces placards ont été lacérés par la police.
■ l i ■ i ..I. «» m » i
Le Monde
Pai-la.
Grand dîner suivi de réception avant-hier chez
Mme llarris Phclps dans ses salons de la rue de
Presbourg.
Parmi les invités : l'ambassadeur des Etats-Unis,
marquis de Peralta, ministre de Costa-Rica, mar-
quis et marquise de Montferrler, tnarquise.de Lan-
jamet, marquis de Rochegude, comte et comtesse
de la Chapélie-Crosville,. comte et comtesse d'Au-
lan. comte et comtesse de Caumont-Marivault,
comte et comtesse de Lurcy, comte et comtesse
de Job.comte et comtesse Récopé,vicomte et vicom
'CS3C de Forgemol de Bostquénard, baron et ba-
."Jane de Grandmaison, baron et baronne Carlo
do Marchi, vicomte de Saint-Geniès, baron et ba-
ronne de Mathan, M. Trouard-Riolle, M. Saisset-
Schneider, comtesse de Villarson, comtesse de la
Huellc, vicomtesse de Faria, M. Saint-Hilaire, etc.
— Musique aujourd'hui chez la baronne Tossiz-
za ; tour de valser chez Mme Gallard ; cotillon le 8
chez la vicomtesse de Boislandry ; lé 10, cotillon
chez la vicomtesse de Fiera ; le 11, chez la vicom-
tesse A. de Curel ; eomêdié chez Mme Louis Royer.:
le 12, tasse de thé, à cinq heures, chez la marquise
de Lanjamet.
— Le concert pour l'Œuvre de' Larue qui sera
donné le 10 après-midi dans les salons de Mme
Hériot, 49, rue de la Faisanderie promet d'être un
événement.
Lee concours dont on est certain sont de premier
ordre. Dans le nombre pour commencer par les
étrangères qui reconnaisent ainsi gracieusement
l'hospitalité française, Mme Knrtz, l'étoile mer-
veilleuse de Vienne ; Mme Trouhanova, la déli-
cieuse danseuse russe ; Mme Nora Bayes.
La France sera glorieusement représentée par
Mmes Bréval, Sorel, Georgctte Leblanc, Félicia
Mallei
On trouve des billets chez Mme la duchesse de
Brissac, 26, rue Murillo, la duchesse de Noailles,
26, rue Pomereu, Mme Hériot, 49, rue de la Fai-
sanderie, M. Durand, l'éditeur de .la place de la
Madeleine.
— M. et Mme Alphonse Humbert, le compositeur,
et Mme Gaston Sclz, recevront demain mercredi à
3 heures et demie, dans leurs salons de la rue Ray-
nouard. On fera de la musique.
— La. société littéraire Le Bleuit, donnera, de-
main son dîner annuel suivi de concert et de bal.
— Au Cercle du Bois de Boulogne :
Les dîners du lundi suivis de feu d'artifice et de
cotillon recommenceront le 17 juin pour prendre
fin le 8 juillet.
Comme les années précédentes les membres du
Cercle pourront -se procurer au secrétariat, pour
les personnes étrangères des cartes d'invitation
pour la soirée.
Quant à la salle du pavillon du tir elle sera,
dans l'ordre d'inscription, mise à la disposition des
membres du cercle qui désireraient y donner un
dtner ou une soirée particulière.
— Demain au Polo, concours et présentation des
chiens de luxe présentés par des dames ou des
fillettes.
Les engagements pour les chiens 6eront reçus
au Polo jusqu'à quatre heures.
— Le distingué professeur de musique, Mme
Hirsch Grunthal qui vient récemment d'être pro-
mu officier d'Académie, réunissait hier ses nom-
breux élèves, salle Lemoine, en une audition à
laquelle M. Bouaiinsky premier violon des concerts
Colonne prêtait son gracieux concours. Soirée très
artistique où se sont révélées de charmantes mu-
siciennes d'avenir.
Sont arrivés à Paris et descendus à l'Hôtel Conti-
nental : ,
M. Fossler, de Londres ; M. Rice, de New York ;
M: et Mme Horton, de Londres ; M. et Mlles Fried-
man, de New-York ; M. et Mme Glidden, de Bos-
ton ; M. Loesvenstein, de Londres ; M. et Mme
Ilouravitz, de Prague ; M. et Mme Mendelson, M.
et Mme Ferranti, de New-York ; M. de Baguer, de
Bruxelles ; M. Kirstein, de Berlin ; M. et Mme
Shnitzler, d'Amsterdam.
Mariages
Nous apprenons le prochain mariage de :
M. René Martin, ancien élève de l'Ecole poly-
technique, fils de M. G. Martin; chevalier de la Lé-
gion d'honneur, avec Mlle Françoise Guelliot, fille
du docteur en médecine ;
M. Albert Passerieux, capitaine breveté à l'état-
major de la 20e division d'infanterie, avec Mlle
Yvonne Béchillon ;
M. Georges Baume, chimiste, fils de l'inspecteur
général des ponts et chaussées, officier de la Lé-
gion d'honeur, avec Mlle Suzanne Rouville ;
M. Pierre Lorain, ingénieur de la marine, fils de
1 architecte, chevalier de la Légion d'honneur, avec
Mlle Aline .Broca, fille du professeur agrégé à la
Faculté de médecine.
M. Henri L'Honoré, avec Mlle Louise Eude, fille
de l'ingénieur, chevalier de la Légion d'honneur ;
M. Marcel Hardy, ingénieur des mines, avec Mlle
Cécile de Visme.
— Le comte Max de Couppev de La Fores t, in-
génieur au corps des améliorations 'agricoles, fils
du comte de La Forest et de la comtesse, née de
Courcv, épousera le 12 juin prochain, en l'église
Samt-Rémy de Provence (Bouches-du-Rhône), MUe
Charlotte Mistral-Bernard, fitie de M. Mistral-Ber-
nard et de Mme, née Saint, et petite-cousine du
poète provençal Frédéric MistraL
Nécrologie. -
On annonce la mort de M. Le Verrier, ingénieur
en chef des mines, professeur au Conservatoire
des arts et métiers et à l'Ecole supérieure des mi-
nes, chevalier de la Légion d'honneur, décédé à
Eaubonne (Seine-et-Oise).
Il était le père de M. Charles Le Verrier, profes-
seur an collège Chaptal.
-=-On annonce la mort du directeur de l'Art,
M. Paul Leroi (Léon G au chez).
Né en 1825, il s'est éteint samedi mation à cinq
heures, après une vie toute de labeur consacrée
jusqu'au dernier .noment au cuite de l'art.
La mort i'a surpris au moment où il corrigeait
des épreuves.
De TanviJIa,
» '■
LE PARFUM fauboirg St-Honorè
r tb 0 r»
Le Monument Théophile Roussel
Le président de la République va inaugurer
demain le monument édifié à la mémoire de
l'auteur des lois sur la protection de l'enfan-
ce, le docteur Théophile Houssel.
Treute la carrière du docteur Théophile Rdus-
sel, sénateur de la Corrèze, membre de l'Aca-
démie des Sciences morales et politiques et de
l'Académie de médecine, se résume * dans la
bonté. Cette bonté s'inclinait surtout vers l'en-
fance souffrante, et la couronne de sa vie pu-,
iblique, nullement tapageuse, fut le doublé vote
des lois de 1874 et de 1889 sur la protection des
enfants en bas âge et des enfants maltraités
ou moralement abandonnés.
On va célébrer cet homme de bonté, mort il.
y a quatre ans, comme on le fêta en Sorbonne,
par un jubilé, en 1896, à l'occasion de ses
quatre-vingts ans, en érigeant son monument
à quelques pas de la Maison des Enfants-Assis-
tés, à l'angle de la rue Denfert-Rochereau et
de l'avenue de l'Observatoire.
- Le monument Théophile Roussel est simple
et beau. Il est l'œuvre de deux jeunes artis-
tes que l'amitié unit intelligemment, et tous
deux anciens prix de Rome ; le sculpteur J.-B.
Champeil et l'architecte Chifflot. Leur collabo-
ration fut plusieurs fois heureuse et l'est enco-
re aujourd'hui.
L'œuvre nouvelle de Champeil, monument à
Théophile Roussel, présente le buste du pro-
tecteur de l'enfance au haut d'une stèle de pier-
re de Lorraine, devant laquelle .se dresse un
groupe symbolique en marbre blanc : la Bien-
faisancè, femme à l'allure tranquille et noble,
portant un tout jeune enfant et enveloppant un
jeune garçon sous le pan dé son manteau.
Sur la stèle, ornée d'un rameau, sont inscrites
les belles initiatives de Théophile Roussel et
deux phrases des discours du jubile de 1896,
prononcées à l'éloge du maître par M. Louis
Barthou, ministre de l'instruction publique, et
par M. Tissier, président de l'Association des
Etudiants.
.- Estienne.
■■ ■■ m m & ■1 ■■■"' ■—»
CARNET D'UN ETUDIANT
L'ironie des vieux livres
La fréquentation de la Bibliothèque nationale est,
à divers points de vue, fort utile pour l'instruction
et l'éducation des étudiants. On y prend tout d'a-
bord l'habilude d'une vertu dont Mazarin faisait la
base de sa politique : « Savoir attendre », disait-il
à son maître pour lui apprendre l'art de gouverner
les hommes,
A la Nationale 'il faut savoir attendre, si le livre
demandé n'est pas d'un usage courant. On devient
patient à une pareille école, et cela permet de ne
pas se décourager lorsque l'étudiant enfin muni de
ses diplômes sollicite un poste ou une fonction
dans un ministère. Il est dressé, il sait « attendre ».
Mais on n'acquiert pas seulement, à la Biblio-
thèque, l'art de patienter sans mauvaise humeur ;
on y gaigne à la lecture de certains livres une douce
philosophie, très utile dans la vie, an fond de scep-
ticisme en politique et une ironie charmante. en ce
qui regarde le serment de fidélité 'à la République.
On sait que cela n'engage à rien.
J'ai acquis cette conviction en feuilletant dans la
grande salle de travail la collection complète de
l'Almanach national, depuis 17891 mise à la dispo-
sition du public.
C'est d'abord l'almanach royal, respectueuse-
ment dédié à Sa Majesté. Il devient national en
1795, avec le changement des années en ans H, III,
etc., de la République ine et indivisible.
Et le même éditeur inscrit en première page :
« Mort aux tyrans » ; ce qu'il regrette bientôt, le
pauvre homme, car l'almanach devient impérial,
avec des flatteries excessives pour « Sa Majesté
Napoléon ». -
'En 1815, fannuaire redevient royal, et cette fois
féditeur. toujours le môxne^ s'excusa de DsraHre
un peu tardivement : « L'Almanach de 1814 allait
paraître, dit-il, lorsque survint une révolution à"
jamais mémorable qui replaça sur le trône notre
bon et excellent roi Louis XVIII. »
Cette désinvolture est tout à fait charmante, et
ces convictions de l'imprimeur fort instructîve-s.
L'éditeur meurt, mais l'almarvach continue ses
petites transformations ironiques. National en
1849, 50, 51, impérial en 1853, enfin national de
nouveau en 1871.
cette dernière fois, espérons-le, pour le plus
longtemps possible.
J'ai feuilleté cette vieiJle collection en attendant
le livre de droit que j'avais demandé. Lorsque j'ai
enfin obtenu mon gros in-Jolio, j'y ai lu : « Le ser
ment de fidélité à ja Constitution est inviolable. »
Est-ce bien certain ? J'en doute un peu, désor-
mais. Cela doit, au fond, ressembler aux serment;
des amoureux. On jure de s'adorer toujours, et
chacun sait parfaitement que dans la circonstance,
toujours signifie quelques semaines ou quelques
mois.
On fait tout de même le serment. C'est si gentil.
Raymond Cahu.
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La urève psrale
des inscrits maritimes
Notre commerce extérieur
et la grève
Situation toujours grave. — Pour l'Angleterre
et l'Algérie
Encore que les dernières dépêches signalent
une certaine détente, îa situation faite 'à notre
commerce extérieur et maritime par la grève
des inscrits n'en reste pas moins toujours très
grave.
Nous avons été, avant-hier, les seuls & in-
diquer que les commandants des paquebots
des Messageries avaient refusé de se joindre
au mouvement ; on a appris, hier, que cer-
tains commandants de la Transatlantique,
frappés par l'attitude de ia Compagnie et me-
nacés de révocation immédiate, s'étaient sé-
parés de leurs équipages et avaient rejoint leus
ihnrrl
D'autre part, les ncuvelles reçues par le
syndicat des armateurs prouvent que dans les
ports de l'Ouest surtout, le mouvement gré-
viste diminue d'intensité.
C'est pour les producteurs, commerçants,
industriels commissionnaires ayant des rela-
tions constantes et journalières avec l'Angle-
terre et l'Algérie, que les premiers jours de
grève ont eu les plus terribles effets.
Le service des voyageurs entre la France et
l'Angleterre n'a pas été trop désorganisé,étant
surtout assuré par des "paquebots anglais, mais
le service des marchandises a été, pour ainsi
dire, complètement arrêté.
De tous les ports de la côte normande et
boulonnaise, il part chaque jour un nombre
considérable de navires, petits ou grands, va-
peurs ou voiliers, qui emportent en Angleterre
les produits de la terre ou de l'industrie fran-
çaises.
Depuis vendredi, il n'y a eu que de rares
départs et l'on signale que des cargaisons en-
tières d'oeufs, de beurres, de cerises, de pri-
meurs sont entièrement perdues après un sé-
jour trop prolongé dans les docks, hangars ou.
cales. Dans la région de Caen, principalement,
les cultivateurs exportateurs sonil navrés et
l'écho de leurs plaintes a dû parvenir jusqu'au
gouvernement.
Pour l'Algérie, c'est encore pire.
Encore que les départs postaux aient été,
dès le lendemain de la grève, assurés par des
contre-torpilleurs et des croiseurs de l'Etat,
encore que dès hier, le monopole du pavillon
français ait été supprimé entre la France et
l'Algérie, on n'en a pas moins à regretter une
perturbrtion tellement profonde dans les re-t
lations maritimes entre la métropole et sa co-
lonie, qu'on peut augurcK que si la grève se
prolongerait, une crise formidable éclaterait en
Algérie, qui pourrait causer la ruine complète
de certaines régions.
On sait, en effet, que dans la région d'Alger
principalement, presque toutes les terres de
plaine sont consacrées à la culture des pri-
meurs, culture très coûteuse ; on sait aussi
que, chaque jour, les primeurs algériennes
sent expédiées sur Paris et que le mouvement
commercial qui s'ensuit est tellement impor-
tant que des services spéciaux, à grande vi-
tesse, ont été pour lui créés. Or, depuis qua-
tre jours, des tonnes et des tonnes de primeurs
algériennes pourrissent sur les quais et dans
les docks des ports algériens, ne pouvant être
transportées en France, par suite de la grève;
d'où des pertes très considérables .;pour les
producteurs et les expéditeurs.
Et si l'on se souvient qu'en 1903, une pe-
tite grève de la navogation qui ne dura que
quelques jours, causa la ruine complète de
deux mille cultivateurs algériens, on doit re-
douter que la- grande grève d'aujourd'hui n'en-
traîne pour notre colonie des désastres incal-
nIables, irréparables, peut-être.
Les agences maritimes
Les Compagnies .de navigation ne sont pas
les seules à être frappéBs - et durement par
la grève actuelle. Les Agences maritimes et les
commissionnaires en marchandises qui, en
somme, concentrent entre leurs mains tout le
commerce extérieur, seront si la gTève conti-
nue, aussi profondément atteints dans leurs
affaires et dans leurs intérêts.
Il existe, à Paris, environ soixante agences
maritimes pour expédier dans toutes les par-
ties du monde les produits de l'industrie et de
la fabrication parisienne et française.
Ces agences — les petites comme les gran-
des — ont toujours fait de leur mieux pour ré-
server au pavillon français le frêt dont ils dis-
posent. La grève va les mettre dans dans l'im-
possibilité de favoriser, comme par le passé,
le pavillon français. Voici Ieis renseignements
qu'à ce sujet, le chef d'une des agences les
mieux connues sur la place, a bien voulu nous
fournir.
« La situation de l'armement français n'était
cependant pas précisément brillante depuis
plusieurs années, nous dit notre interlocuteur.
En effet, les marchandises de gros poids mais
de moindre valeur, pour l'Amérique du Nord
et le Canada, sont, depuis assez longtemps,
expédiées par les ports belges ou anglais, au
détriment des ports français. Je ne parle pas
de la région du Pacifique pour laquelle nous
ne faisons plus d'expéditions sérieuses. Mais
il restait tout au moins au pa\illon français
les chargements de valeur pour les Etats-Unis
et le Canada. Nous allons être maintenant,
obligés de faire passer ces chargements par
une autre voie et de les diriger pour cela sur
un port .anglais, belge, voire allemand. Les
clients finiront par s'habituer à cette nouvelle
voie et ce sera une nouvelle cause de déchéan-
« Pour l'Amérique du Sud, ce sera pire en-
« Pour l'Amérique du Sud, ce sera pis en-
core. Déjà, au point de vue frêt, nos Compa-
gnies maritimes ont perdu le Chili ; au Mexi-
que, elles sont très menacées, au Venezuela,
elles ne peuvent plus pénétrer, ; il n'y a que
le Brésil et la République Argentine où
l'armement français soit bien représenté. Or,
si la grève dure, il faudra bien expédier dans
ces pays par bateaux étrangers, qui, de ce fait,
prendront sur la navigation française, une
avance qui ne pourra qu'être bien difficile-
ment regagnée quand la grève sera temlinée.»
« Je pourrai vous en dire tout autant, termina
M. Blondel, pour nos longs-courriers d'Extrê-
me-Orient et d'Océanie. Vous en savez assez
pour juger combien la situation est grave pour
notre commerce maritime - et pour notre com-
merce extérieur. Qui nous tirera de là ? »
Qui ? demande notre agent maritime. Bien
malin sera celui qui lui répondra 1
Si le gouvernement donne satisfaction aux
grévistes, c'est 30 millions qu'il lltft frouvet
par an. Et dans. l'état actuel de nos finances,
où trouver 30 millions ?
Si le gouvernement ne cède pas, peu ou
prou, c'est la continuation de la grève ; c'est-à-
dire l'affaiblissement certain, sinon la ruine,
de notre commerce extérieur et maritime qui
n'avait, certes, pas besoin de ce surcroît d'in-
fortune. -
Qui nous tirera de là ?
En tous cas, nous continuerons demain no-
tre intéressante enquête eh donnant l'avis des
« Rois de la Commission ».
Georges Hache.
A la Compagnie
des Messageries maritimes
L'opinion d'un haut fonctionnaire de ïp Compagnie
des Messageries Maritimes. - La grève n'est
pas le fait de la Compagnie. —Les équi-
pages de l'Etat ne peuvent monter les
bateaux de leur flotte. — Et la
responsabilité ?. -'
J'ai rencontré hier l'un des plus hauts fonc-
tionnaires de la Compagnie des Messageries
Maritimes. Nous avons causé ensemble de
beaucouip de choses, parmi lesquelles la grè-
ve des inscrits, naturellement. Mais, comme ce
ne fut qu'une conversation amicale échangée,
je ne me permettrai pas d'imprimer son nom.
Avant de s'occuper des intérêts d'une grande
Compagnie de transports, il a été, lui-même,
très mêlé au mouvement politique ; c'est pour-
quoi il jug un double point de vue,
— La situation, pour nous, est très bizarre,
en ce sens que la grève ne naît pas de reven-
dications à nous signifiées par .le personnel
Les inscrits ne nous réclament aucune aug-
mentation de salaire. Nous sommes indirecte-
ment en cause, et c'est nous qui subissons tous
les préjudices.
En effet, il se produit un conflit entre le
gouvernement et les inscrits maritimes. Je ne
veux même pas discuter les causes, qui
sont étrangères à la Compagnie, mais le con-
flit se passe sur notre dos. Vous avouerez que
c'est dur. Je comprends qu'on endosse la res-
ponsabilité d'actes par soi accomplis, mais ce
n'est pas le cas présent.
Un fait à signaler, c'est la position prise par
les officiers entre les inscrits et nous. Jusqu'ici
aucun état-major n'a complètement lâché pied.
Je ne sais encore ce qui surviendra, mais, pour
l'instant, nous avons trouvé beaucoup de fer-
meté et de dévouement.
D'ailleurs, ce que la Compagnie redoute,
c'est que la grève, si elle se prolonge et se pro-
page, n'arrive à modifier les relations qui exis-
tent entre la Compagnie et son corps d'oft-
ficiers. Ce personnel d'élite, nous le considé*
rons non comme des sous-ordres, non comme
des fonctionnaires, mais comme des collabo-
rateurs dont les services et l'intelligence ne
sauraient se mesurer aux traitements, même
élevés, qu ils reçoivent.
Voilà surtout ce que nous redoutons, et
-c'es-t, reconnaissez-lç, tout à l'honneur du per-
6onnel de notre flotte.
— Mais, avez-vous été contraints de faire ap-
pel aux étrangers pour assurer vos services, ?
— Oui, évidemment. A Marseille, nous nous
trouvions en présence de stocks assez con-
sidérables de marchandises à enlever. Il
y avait dans le port des bateaux de diverses
nationalités, des grecs et des italiens entre au-
tres. Nous les avons affrétés en location, r
mois, pour enlever nos car^ursons. Nous ne
pouvions pas agir autrement.
— Mais l'Etat ne vous a pas offert d'équipa-
ges pour assurer les mouvements de votre
flotte ?
- C'est très délicat, le système des réquisi-
tions armées. Quand nous remettons un ba-
teau à un capitaine au long cours présentant
toutes les garanties requises, c'est dix millions
au maximum que nous lui confions ; non seu-
lement, il possède toutes les qualités profes-
sionnelles des officiers des équipages de la
flotte, mais il y joint l'habitude des longues
traversées et le maniement de « l'outil » qui
se trouve alors entre ses mains.
L'officier montant les navires de guerre n'a
qu'un défaut.Il fait la navette entre Cherbourg,
Toulon et Brest. S'il est en escadre, il n'aura
que rarement à faire plein usage de sen ini-
trative, tandis que nos officiers, livrés à eux-
mêmes, savent quelle responsabilité person-,
nelle leur incombe.
En 1904, par exemple, une sorte de mutine-
rie se produisit parmi les inscrits. Le mou-
vement s'étendit parmi les officiers qui nous
manifestèrent l'intention de débarquer.
M. Pelletan, alors ministre de la marine,
nous offrit des officiers par réquisition. Nous
nous trcuvions dans une situation difficile,
mais il ne nous était pas possible d'accep-
ter.
Comme je vous le disais tout à l'heure, nos
capitaines, en prenant le commandement de
leur navire, savent quelle responsabilité; ils
acceptent. Mais cette responsabilité, avons-
nous le droit de la transporter a des officiers
en service essentiellement temporaire chez;
nous ? .,.
Supposons un accident grave, un échouage,
un naufrage même.
L'Etat nous aura fourni des équipages, ao-
ceptera-t-il la responsabilité encourue du fait
de ce prêt gracieux ?
C'est peu probable. En tout cas, comme
les machines, le service, le fonctionnement,
tout à bord est différent de ce qui se passe
à' bord d'un bateau de l'Etat, il est bien dif-
ficile de demander aux officiers de la marin'c
militaire, l'accomplissement d'une tâche qui
n'est pas la leur.
Pour assurer le service de la Poste entre la
Pour assurer le service de la poste entre la
des crciseurs, rien de mieux, mais chez nous,
la situation est très différente, quand ce ne se-
rait même qu'au point de vue de la longueur
des traversées. Quand nous envoyons un ba-
teau au Brésil et dans l'Argentine, c'est une
absence de trois mois. Il y aurait donc des
dispositions très spéciales à prendre.
— Et que comptez-vous faire ?
- Nous espérons que nos états-majors ne
nous quitteront pas, et que tout sera rentré
dans l'ordre pour nos prochains départs. Si-
non nous agirons comme les autres compa-
gnies, mais nous n'avons même pas envisagé
l'hypothèse de l'emploi de la réquisition ar-
mée. Du reste, si* nous en venions là, il ne
pourrait être question que d'une partie res-
treinte du personnel de l'équipage, et non des
officiers. Ce qui nous perrne-Íf d'espérer./ je
vous l'ai dit, c'est Ta cause initiale même de
la grève que la Compagnie n'a absolument rien
fait pour provoquer.
D'ici quelques heures on "saura, sans dou-
te, quelle tournure prend le mouvement.
Toujours est-il que dans l'une des plus im-
portantes compagnies, la direction ne mani-
feste aucune hostilité vis-à-vis des inscrits et
témoigne d'une èxlrême confiance dans leur
bon sens et dans leur loyauté.
Eugène Destez.
La détente
Solution prochaine : mécontentements unanimes.
— Un conflit mal engagé. — Les inscrits
ne s'avoueront pas vaincus
C'est Paris qui a ordonné la déclaration de
grève des inscrits maritimes. C'est Paris qui va
mettre fin au conflit.
On nous rendra cette justice que nous étions
bien renseignés dès le premier moment. Nous
annoncions, quarante-huit heures avant nos
confrères, la convocation de délégués des ports
de France. Nous signalions l'influence de la
Confédération du Travail, la veille du jour où
son envoyé spécial galvanisait l'élément turbu-
lent de Marseille. Nous révélions les dissenti-
ments au sein des états-majors, à l'instant mê-
me où le Comité central des armateurs de
France protestait de ses pures intentions.
Nous avons, seuls encore, pronostiqué l'en-
tretien avec M. Thomson, ministre de la ma-
rine, entretien au cours duquel, comme nous
l'avions prévu — et prédit — le Havre manifes-
ta de l'ardeur belliqueuse, tandis que Marseil-
le cherchait un mpyen d'entente.
Dès à' présent, bien que la conversation rue
Royale n'ait pas tenu toutes ses promesses,
on peut affirmer que la grève des inscrits ma-
ritimes est à son déclin.
- Wus1 ne soînmes Da a-u Bout Ses incidents.
Il y a des mécontents parmi les gradés et par-
mi les autres. La pension de six cents francs
sera revendiquée, de nouveau, cet après-midi,
et demain, par des assistances nombreuses,
dans les meetings. Et les syndicats feront, par
ordres du jour platoniques, de la surenchère'
à unanimité que veux-tu.
La grève des inscrits maritimes est à son
déclin. Un'e quinzaine de dépêches, à notre
connaissance, conseillèrent, dès hier soir, le
retour à bord.
Ceux qui escomptaient une grosse perturba-
tion avouent que le pétard a fait long feu. On
s'empresse de renier rengagement, dans les
milieux corporatifs confédérés. On explique :
— La lutte a éclaté par surprise. Elle est ar-
rivée mal à propos. Nous n'y avons participé
que par devoir. Nous ne pouvons compren-
dre, dans une bataille de cette espèce, l'accord,
même de circonstance, qui groupe à la fois
des officiers et des hommeS- d'équipage.
— Mais, cette question des pensions ! inter-
rompons-nous.
— Question accessoire. ou piège habile, ré-
plique notre interlocuteur. On a vraisembla-
blement cherché, sous ce prétexte, à épuiser
l'énergie des gens de mer, à faire dépenser,
d'un coup, tous les efforts dont sont capables
nos camarades marins et pêcheurs.
« C'est un faux calcul, vous pouvez le dire
en toutev certitude. Marins et pêcheurs auront
d'autres occasions, et ils sauront en profiter.
Nous croyops que cela sera bientôt. »
Én définitive — et c'est là surtout ce qui
nous importe — on considère, chez les initiés
(nous allions écrire « chez les meneurs »),que
la grève de la mer, considérable dès la premiè-
re alerte, parce que générale au lendemain du
mot d'ordre prononcé par Marseille, se termi-
nera à brève échéance, en queue de poisson,
comme il convient en la matière. Les capitai-
nes cesseront de bouder, trop heureux de re-
cueillir quelques jolies promesses gouverne-
mentales après les menaces du conseil des mi-
nistres.
Et les armateurs, qui n'ont pas un instant
cessé d'être d'accord, nous affirme leur comi-
té, ne seront pas réduits à la famine. Et le
commerce français en sera quitte pour la peur.
Et les Compagnies de navigation étrangères
auront tout de même réalisé un profit de quel-
ques millions de francs — les quelques mil-
lions nécessaires à la réalisation du nroiet
Siegfried. à la réalisation
Louis Besse.
Une délégation des gens de mer
chez le ministre de la Marine
Une délégation du comité de défense des
gens de mer, sous la présidence de M. Le Bou-
langer, officier mécanicien, a été reçue hier
par le ministre de la marine.
Elle était composée des délégués suivants :
Marseille : Le Boulanger, président, officier mé-
canicien ; Lap-eyre, capitaine au long cours. —
Le Havre : Reynier, capitaine au long cours ; Le-
sieulre, officier mécanicien ; Gouache, inscrit ma-
ritime. — Dunkerque : Girou, capitaine au long
course — Nantes : Pillevuyt, capitaine au long
cours ; Moisdon, inscrit maritime.— Sainl-Nazaire :
Boisson, capitaine au long cours ; Dussart, offi-
cier mécanicien ; Bertho* inscrit maritime. —-
Rouen : Luquet et Saint-Martin, inscrits mari-
times.
M. Armez, président de îa commission de
la marine de la Chambre, assistait à l'entretien.
Parlant au nom du comité de défense des
gens de mer,- M. Lapeyre a rappelé dans quel-
les conditions cette organisation centralisant
les vœux des sous-comités, avait été amenée
à déclarer la grève générale qui vient de se
produire.
Si le gouvernement, a ajouté M. Lapeyre, con-
sentait à accepter le principe des améliorations èt
promettait, en outre, d'assurer qu'aucune sanction
me sera prise contre ceux qui ont pris part au
mouvement, les délégués, en majorité, pourraient
télégraphier à leurs camarades de reprendre le
travail,
M. Armez déclare que la commission de la
marine, qui contient plusieurs représentants
des inscrits maritimes, est animée de disposi-
tions bienveillantes à l'égard de ceux-ci ;
qu'elle est donc prête à écouter leurs observa-
ions sur le projet.
Pour terminer, M. Armez insiste sur ce fait
qu'à ses yeux l'intérêt des inscrits leur com-
mande là reprise immédiate du travail.
Dans sa réponse aux délégués, M. Gastorr
Thomson a tenu à constater, tout d'abord,
qu'il y avait un point qui était hors de cause,
c'est que la sollicitude du gouvernement, dans
ces dernières années, s'était toujours large-
ment exercée à l'égard des inscrits maritimes.
Puis il a abordé la question des pensions de
demi-solde :
En ce qui concerne la proposition de loi sur lés
pensions de demi-solde, j'ai fait, lorsqu'on novem-
bre 1906 j'ai reçu les délégués dès-inscrits, des
réserves sur les, chiffres mêmes, parce que l'Etat,
selon moi - et c'est là peut-être, en matière de
promesse, son infériorité sur les initiatives indi-
viduelles— l'Etat a le devoir de ne rien promettre
qu'il ne soil en mesure de tenir.
Aujourd'hui, -, donc, la situation est celle-ci : le
Parlement est saisi, et c'est devant la commission
de -la marine — dont le président, que je suis
heureux de voir ici, vous a attesté les bonnes dis-
positions à l'égard dès inscrits maritimes, — c'est
devant cette commission que vous avez uon seule-
ment le droit, mais le devoir de porter vos reven-
dications.
Miais je serais surpris qu'avant tout, dans votre
'propre intérêt comme pour sa propre dignité, la
commission, ainsi que l'indiquait tout à l'heure
M. Armez, ne vous demandât pas de cesser prÓa-
lablement une agitation qui n'est guère propice à
l'examen sérieux et réfléchi de pareilles questions.
Seule, croyez-moi bien, la reprise immédiate du
travail peut faciliter l'issue du conflit, et j'ai l'es-
poir qu'à défaut d'une solution instantanée .qu'il
n'est pas en mon pouvoir de vous donner, vous
accepterez, pour le bien même de votre caus,e, ce
bon; eottgeili oc conseil d'apaisement et d'entente
qui ne peut vous être suspect venant d'un homme
dont vous avez appris à connaître les sentiments
personnels à votre égard d'un ministre placé à
la tôte de ce départment de la marine qui s'est
toujours fait honneur de soutenir et de protéger
la classe si intéressante et si laborieuse des ins-
crits.
A la suitè de l'entrevue avec fçs délégués
des inscrits, le ministre de la marine a reçu
M. Charles Roux, président du conseil d'admi-
nistration de la Compagnie Générale Transat-
lantique.
Les délégués des inscrits maritimes ont
quitté le ministère de la marine à cinq heures
pour se rendre à la Chambre des députés où
ils doivent être reçus par les membres déjà
commission de la marine.
Les délégués se refusent à donner des en-
seignements sur leur entrevue avec le minis-
tre. Ils se sont bornés à dire : « Rien n'est ter.
mifté. Nous devons voir la commission de la
marine avant d'être reçus à nouveau par le
ministre. »
Dans les ports --
La journée d'hier a été plutôt calme dans les
ports. Les nouvelles que nous recevons semblent
indiquer que l'on espère beaucoup de l'intervention
du gouvernement.
A Marseille, la. Compagnie Transatlantique ayant
fait savoir qu'elle ne reprendrait pas les officiers
qui auraient quitté leur bord, les états-majors ont
tenu une réunion, à la suite de laquelle ils, ont
décidé d'envoyer à leurs délégués à Paris un
télégramme les priant de surseoir à toutes démar-
ches auprès de la commission de la marine et
d'attendre de nouvelles instructions.
Aux Messageries maritimes, plusieurs états-ma-
jors sont à leur poste et deux paquebots ont leurs
équipages complets. Au siège de la fédération des
capitaines, on se flatte que les uns et les autres
no tarderont pas à descendre à terre.
Le contre-torpilleur Pertuisane est parti hier à
2 heures de l'après-midi' pour Alger avec le courrier
postal.
Le transport Vinh-Long est parti le soir, à 5
heures, pour la même destination, avec des pas-
sagers et des colis postaux.
A Toulon, hier matin, le commissaire central
de police avait fait disposer de nombreux agents
sur les quais et dans les rues avoisinantes, parce
que l'on avait annoncé que plusieurs inscrits vou-
lant reprendre le travail, des incidents allaient se
produire. Une surveillance active a été effectuée.
Mais les inscrits, pris de crainte, n'ont pas donné
suite à leur intention.
Le service des liée d'Hyères et plus particuliè-
rement de porquerolles a été encore assuré par le
remorqueur Faron, qui a dû -partir de l'intérieur
Lé capitaine du valeur Tartarin. de Hie de PÓr-
querollcs, a du renoncer a partir, en présence de
l'hostilité manifestée par les inscrits..
A Oran, les inscrits maritimes ont décidé de sa
solidariser avec leurs camarades de France et d'Al.
ger, et de faire grève.
o En conséquence, les inscrits bateliers et pô-,
cheurs ont déposé hier leurs rôles aux bureaux de
l'inscription maritime. Le plus grand calme A étâ
recommandé.
A Bordeaux, la navigation est complètement ar-
rêtée, ainsi que le bornage, c'est-à-dire la circu-
lation des petites embarcations, et aucune gabare:
n'est passée en rivière depuis hier matin.
Les marins de tous les navires, vapeurs oil
autres, vivent à bord, mais ne font aucun travail
et sont nourris par les capitaines.
Les pilotes qui assurent un service international
ont refusé de faire grève.
Les quais sont peu. actifs ; il n'y a aucun inck
dent. -
Le Comité de défense espère beaucoup de fa
démarche des délégués à Paris.
A Nantes, les inscrits maritimes, drapeau eri,
tête, se sont rendus sur les quais pour faire dé-
barquer les matelots encore à bord. Quelques in-
cidents se sont produits.
Le secrétaire des inscrits maritimes de l'Ouest
-M. Cardin, aceompagné. do deux ou trois de ses
camarades, est monté à bord de la drague n° 3,
des ponts et chaussées, dans le but de persuader
au personnel de cette drague de faire cause com-
mune avec les grévistes en quittant leur travaiL
A la demande d'un conducteur des ponts et chaus-
sées, un commissaire de police et six gendarmes
sont arrivés à bord de la drague et ont intimé
aux grévistes l'ordre de se retirer. M. Cardin a
protesté énergiqueanent., en déclarant que la police
des eaux fluviales n'appartenait pas au commis-c
saire de police ni aux gendarmes, mais au sert
vice de la marine et à la gendarmerie maritime Z
mais les inscrits n'ont pas opposé de résistance, et
se sont retirés, en entraînant d'ailleurs le person-
nel de la drague. -
Un groupe de grévistes a tenté d'envahir le
ponton de la Compagnie des Messageries de
l'Ouest, et d'empêcher le départ d'un bateau de
voyageurs, mais la police a pu dégager le bateau,.
qui a repris sa route.
Les bateaux de voyageurs qui font le service dH
la Loire ont à leur bord des gendarmes, dans la
crainte que les grévistes ie se présentent aux
escales. Toutefois, les communications par eau en-
tre Nantes et Saint-Nazaire sont Interrompues.
A Dieppe, les inscrits maritimes ont tenté hier
d'envahir la gare maritime pour empêcher l'em-
barquement des marchandises à bord du paquebot
anglais le Twuville. - .-
Les gendarmes et lois agents ont résisté, et deux
arrestations ont été opérées. Les grévistes ont
coupé les amarres du même paquebot et demandé
au maire de Dieppe de prendre un arrêté interdU
sant la vente du poisson.
Le maire s'est refusé à fermes un marché d'ali-
mentation.
La garnison est (Consignée et deux compagnies
sont postées sur les quais 2t à la mairie.
Au Havre, le comité exécutif dit que ses délé-
gués à Paris ne se rendent au ministère de la
marine que pour s'informer des intentions du gou-
vernement et non pour outrer en pourparlers avec
les pouvoirs publics.
La Compagnie Transatlantique et la Compagnie
des Messageries maritimes ont informé leurs états-
majors qu'elles les considéraient comme démis-
sionnaires et les rayaient des cadres.
Les inscrits ont pris à nouveau l'engagement de
ne réintégrer leurs bords qTfavee leurs officiera
et sur la promesse qu'ils ne seront pas frappés.
Une bagarre s'est produite à la Poissonnerie en-
tre des femmes de grévistes et des marchandes;
de poisson. Les femmes des grévistes ont renversé
les paniers des poissonnières et jeté le poisson au
ruisseau. Trois arrestations ont été opérées par la
police. Le comité de grève a blâme ces actes de
violence des femmes des grévistes.
Des démarches vont être faites par les grévistes .,
du Havre près des syndicats des marins de
Southampton pour que les navires anglais refu-
sent de transborder les émigrants actuellement au
Havre, ce ce port à Southampton.
Les officiers de la marine marchande ont dé-
cidé de rester sourds aux manœuvres d'intimida-
tion et de continuer la grève.
Les pilotes ont ouvert au comité exécutif ult
crédit illimité.
Quelques médecins et pharmaciens ont offert de
soigner gratuitement les inscrits indigents pendant
la grève. Les ponts et les quais sont gardés mili-
tairement.
Le comité exécutif a fait placarder un appel il
la population, affirmant que les inscrits n'ont pas
l'intention de créer des troubles et regrettent le
déploiement de forces qu'ils considèrent comme
absolument inutile en la circonstance.
A Cherbourg, les grévistes ont déclaré qu'ils
feraient tous leurs efforts pour que les émigrants
ne soient pas embarqués à bord du navire de la
Compagnie Hamburg-Amerika Linie.
La fin de la grève
Le comité de la grève des inscrits "nantî-
mes nous communique le texte du télégramme
suivant qui a été expédié dans tous les ports :
« Les délégués réunis à la Chambre des Dé-
putés ont été reçus par le ministre et la com,
-mission de la marine.
« Le ministre abandonnera toutes poursuis
tes et demandera aux Compagnies la réinté-
gration de tous les marins et officiers. Après
avoir causé individuellement avec la majori-
té des. membres de la .commission, nous avons
acquis l'assurance que le projet Thomson se-
rait amélioré. A Vunanimité, les délégués pvo*
posant la cessation de la grève.
« LE COMITÉ. »
Informations politiques
Les dossiers de la nonciature
M. Guyot-Dessaigne, ministre de la justice, 8
reçu hier matin M. Denys Côchin et lui a demandé
de remettre à aujourd'hui la fixation de son inter-
pellation sur les papiers Montagnini afin de lui
permettre de demander ce matin l'avis du conseil
des ministres.
La crise viticole
La commission des boissons, dans sa séance
d'hier matin, a examiné les articles 3 et 4 du pro<
jet du gouvernement. Ces deux articles ont été
adoptés avec quelques modifications de peu d'im*
portance. Ils concernent l'interdiction de la fabri,
cation du vin de sucre et les. pénalités.
La suppression des conseils de guerre
M. Clemenceau, président du conseil, a conféra
hier matin avec M. Cruppi; président de la coin- :
mission de la réforme judiciaire, et avec M. La-
jbori, rapporteur du projet relatif aux conseils de
'guerrei au sujet de la mise prochaine à l'ordre du
jour de la Chambre de la discussion de cette rë-"
forme,
Aujourd'hui est distribué l'avis, présenté au nom
de la commission tle l'armée par M. Klotz, sur le
projet de loi supprimant les conseils de guerre etf
les établissements pénitentiaires militaires. Parmi
les questions diverses examinées par l'auteur, il
convient de citer le fonctionnement de la justice
militaire en temps de guerre et quelques renseU
gnements statistiques intéressants sur les affaires
engagées par les conseils de guerre depuis îyyi
jusqu'à la fin de 1906.
Au groupe de l'unian républicaine
M. Constant Dulau, député des Landes, élu pré-
sident du groupe de l'union républicaine a pris
possession hier de la présidence et a prononcé à
cette occasion un discours dans lequel il a exami*
né 1&s multiples problèmes politiques actuellemcntt
soumis au Parlement.
L'amiral Péphau et la municipalité de Brest
M. Clemenceau, président du conseil, a reçu hier
matin M. Aubert, maire de Brest, qui venait se:
plaindre de- propos injurieux pour le conseil muni-
cipal, de cette ville qu'aurait tenus M, l'amiral Pe-
phau, préfet maritime.
M. Clemenceau a tout d'abord fait remarquer,
qu'il pourrait peut-être en ce qui le concerne, adres-
ser un reproche identique aux conseillers munici-
paux de Brest qui s'expriment parfois en termesi
assez vifs sur le compte des membres du gouver-
nement. Il a ajouté que l'amiral Pephau contestait!
les propos qui lui étaient attribués, mais que le.
ministre de la marine allait demander à l'amiral
un rapport détaillé sur cet incident.
* w » ■ ■"
La - Chambre
La Chambre n'ayant toujours rien à faire?,-
a continué l'examen de la proposition de loi..
tendant à assurer la liberté et le secret dui
vote.
Elle a adopté sans coup férir un article 6'1
qui autorise l'électeur « atteint d'infirmités loi
mettant dans l'impossibilité d'introduire sorï
bulletin dans l'enveloppe, et de glisser celle-cil
dans la boite du scrutin »» à se faire assister
par un électeur de son choix. — Nous avions
déjà les conducteurs d'aveugle, nous aurons
lès Anti £ one poùr électeurs manqué.sr-
et documents nécessaires, j'ai acquis la preuve mo-
rale de l'innocence absolue de ces malheureux.
Toute la population de Pedernoso, y compris les
autorités civiles et ecclésiastiques, partage ma con-
viction et se joint à moi pour implorer leur grâce
'et certifier qu'en notre âme et conscience nous
affirmons qu'ils n'ont pu matériellement commettre
le crime* qui leur a été imputé.
En outre, j'ai reçu, ainsi que plusieurs autrea
Journalistes, la visite de la femme d'un des con-
damnés. Je ne me suis pas senti le courage d'imi-
ter l'évêque de Madrid, lequel, au nom de son Dieu
vengeur, a pieusement fermé s-a porte à l'infortunée
qui venait intercéder pour son mari.
Je n'ai pas voulu davantage - à l'exemple du
socialiste Pablo Iglesias — refuser de m'adresser
à la Beine, sous le fallacieux prétexte que je ne
veux rien devoir 4 la monarchie.
Je comprends qu'en ma qualité de révolution-
naire, la démarche que je tente aujourd'hui auprès
de Voire Majesté puisse- être considérée par quel-
ques-uns comme une étrange faiblesse, mais j'a-
voue que je n'ai pas pensé un instant à me récuser,
et que j'ai été fier et reconnalsisant de la mission
que l'on me confiait : faire appel à votre pitié.
Si l'on vous dit, Madame, que je suis un ennemi
de la monarchie, croyez-le. -
Mais si l'on ajoute que lorsque vous m'aurez
accordé la grâce que je vous demande au nom
de l'Humanité, je cesserai d'être cet ennemi, ne le
croyez pas.
Je ne veux pas vous offenser en vous supposant
capable de mettre nn tel prix à votre elémence.
Pour tout dire, Madame ce révolutionnaire que
je suis, et qui signerait sans hésiter un document
assez subversif pour le faire incarcérer durant sa
vie entière, tremble en adressant cette requête à
Volre Majesté et la supplie d'accorder la vie à
3eux innocents et do sauver leurs enfants du
Xésthonneur.
JOSÉ NAKENS.
Au palais de justice de Madrid
'Madrid, 3 juin. — Aujourd'hui commencent à
"Aladrid les débats du procès intenté à Nakens et
Fencr pour complicité dans l'attentat anarchiste
de la Caile May or dirigé contre le couple royal
espagnol, le jour de son mariage, le 31 mai lgw.
Ci:nq autres accusés dont une femme prendront
également place au banc des prévenus.
L'enquête judiciaire a relevé des charges graves
.contre François Ferrer, directeur de l'Ecole moder-
die de Barcelone, et a établi que des relations très
'étroites existaient depuis longtemps entre Ferrer et
Ton-arohiste Matteo Morrales, auteur de l'attentat,
qui, on le sait, .se suicida après avoir tué un garde
qui l'arrêtait. Ferrer, s'il n'a pas commandé l'acte
de Morrales,l'a d umoins inspiré et l'a favorisé en
fournissant les subsides nécessaires pour l'accom-
plir. Le procureur du roi demande donc pour Fer-
mer seize ans, cinq mois et dix jours de réclusion.
Les autres accusés sont moins compromis. Ils
n'ont, en somme, à répondre que d'avoir aidé
l'anarchiste à se soustraire pendant quelques jours
aux recherches de la police, et on croit, vu les rè-
gles observées en ce qui concerne l'hospitalité en
Espagne, qu'ils seront acquittés ou tout au moins
frappés d'une peine qui se confondra avec la lon-
frappés
gue prévention subie. -
De nombreux documents seront communiqués
aux jurés, puis ce sera les, lettres de Ferrer, expo-
sant l'esprit subversif et les fins révolutionnaires
de son école moderne de Barcelone, notamment
une qu'il adressait à Mme Léopoldine Baunard, à
Paris.
On commence à se passionner dans toute la pé-
ninsule pour ce procès, et l'opinion dominante est
que les accusés seront condamnés.
Madrid, 3 juin. — Les autorités civiles et la po-
lice ont pris des précautions sévères autour du pa-
ïaisLde justice et dans l'intérieur de l'édifice. On
dit que depuis plusieurs jours le service de la Sû-
reté exerce une surveillance active sur les mouve-
ments des anarchistes espagnols et étrangers.
On relève dans la liste des témoins présentée
p.ar la défense les noms d'Alfred Naquet, Henri
ROchefQrt, Marcel Sembat, Camille Gras, Odon de
Uuçn, sénateur catalan.
L'audience
Madrid, 3 juin. — Les débats de l'affaire de la
calle Mayor dont sont accusés de complicité Fer-,
rer, Nakens, Mayoral y Barro, Mata, Aquilino -:
Martfriez et sa femme Conception Perez, ont com-
mencé aujourd'hui.
A 11 h. 45 les accusés arrivent en voiture cellu-
laire, escortée par un peloton de la garde civile.
Dans la salle d'audience le service d'ordre est
renforcé.
Jusqu'au dernier moment on ignore qui présidera
les débats, le président du tribunal étant indisposé.
Après délibération, les magistrats décident que
M. Albadelejo présidera.
..Le procureur occupe le siège placé à droite du
tribunal. A droite et à gauche du tribunal s'as-
soient les défenseurs qui sont : MM. Iglesia pour
Ferrer, Menendez pour Nakens et Mayoral y Bar-
ro, Rozaleno pour Matfi, Nieto pour Concepcion
.:perez, et Larramendi pour Aquilino Martinez.
A 1 h. 30 les accusés entrent et s'assoient en
face du tribunal.
Le président déclare l'audience ouverte. Le rap-
porteur lit l'acte d'accusation et les conclusions du
procureur et des défenseurs.
Dans la salle du tribunal qui est très exîgiie le
petite espace réservé au public est comble. La
classe populaire domine.
L'interrogatoire de Ferrer
Madrid, 3 juin. — La lecture de l'acte d'accu-
sation est terminée à 2 h. 45.
Aussitôt après, commence l'interrogatoire des
accusés.
Le premier, Ferrer, s'exprime difficilement en
castillan, mêlé souvent d'expressions françaises.
Le président l'interroge sur ses relations avec
Morrales.
L'accusé nie avoir su si Morrales envoyait des
bombes à Paris au moment du voyage du roi Al-
phonse et donne ensuite l'emploi de son - temps
Jf 31 mai et le Ie- juin ; il dit l'impression que
lui causa la nouvelle de l'explosion de la bombe
qui lui fit suspendre un voyage qu'il avait l'in-
iention de faire à Paris.
I Le procureur interroge Ferrer sur sa vie, ses
.antécédents et ses relations ave^les républicains
[et les anarchistes, sur ses rapports avec Mlle
iLéopoldine Baunard et les opérations de fonds qui
: servaient à l'entretien de l'école moderne.
Ferrer nie avoir prêté de l'argent à Morrales pour
venir à Madrid assister aux fêtes du mariage du
Roi et l'avoir recommandé à Nackens.
L'interrogatoire de Ferrer a duré près de deux
heures et demie.
L'audience est suspendue pendant quelques ihs-
,tants.
A la réprise de l'audience, le défenseur de Ferrer
interroge celui-ci sur les relations qu'il a eues
à Paris. -
L'accusé répond qu'il y connut notamment Mlle
Meunier et avec l'argent que celle-ci lui remettait
trimestriellement, il fonda et put soutenir l'école
moderne à Barcelone. Mlle Meunier lui laissa, en
mourant, toute sa fortune.
';: Répondant à une question relative aux relations
J entre Morrales et Mlle ëoledad, de Villafranca, alors
que Morrales était professeur à l'école moderne,
Ferrer déclare q.u'à maintes reprises, tandis qu'il se
trouvait avec Mlle Soledad, le professeur Morrales
entrait soudain et lançait vers lui d'étranges re-
gards. Il affirme qu'il suspendit le voyage qu'il
se proposait de faire le ler juin à Paris, dès qu'il
connut la nouvelle de l'attentat. Ce voyage n'était
nullement simulé, car il l'avait, au contraire,
annoncé et il était motivé par son projet d'hypo-
théquer une maison à Paris.
Placards anarchistes
Madrid. 3 iuin.- Ce matin, des placards anar-
chistes ont été apposés dans plusieurs rues, de-
mandant l'acquittement des accusés de l'attentat
du 31 mai 1900, et contenant des menaces en cas
de condamnation.
Ces placards ont été lacérés par la police.
■ l i ■ i ..I. «» m » i
Le Monde
Pai-la.
Grand dîner suivi de réception avant-hier chez
Mme llarris Phclps dans ses salons de la rue de
Presbourg.
Parmi les invités : l'ambassadeur des Etats-Unis,
marquis de Peralta, ministre de Costa-Rica, mar-
quis et marquise de Montferrler, tnarquise.de Lan-
jamet, marquis de Rochegude, comte et comtesse
de la Chapélie-Crosville,. comte et comtesse d'Au-
lan. comte et comtesse de Caumont-Marivault,
comte et comtesse de Lurcy, comte et comtesse
de Job.comte et comtesse Récopé,vicomte et vicom
'CS3C de Forgemol de Bostquénard, baron et ba-
."Jane de Grandmaison, baron et baronne Carlo
do Marchi, vicomte de Saint-Geniès, baron et ba-
ronne de Mathan, M. Trouard-Riolle, M. Saisset-
Schneider, comtesse de Villarson, comtesse de la
Huellc, vicomtesse de Faria, M. Saint-Hilaire, etc.
— Musique aujourd'hui chez la baronne Tossiz-
za ; tour de valser chez Mme Gallard ; cotillon le 8
chez la vicomtesse de Boislandry ; lé 10, cotillon
chez la vicomtesse de Fiera ; le 11, chez la vicom-
tesse A. de Curel ; eomêdié chez Mme Louis Royer.:
le 12, tasse de thé, à cinq heures, chez la marquise
de Lanjamet.
— Le concert pour l'Œuvre de' Larue qui sera
donné le 10 après-midi dans les salons de Mme
Hériot, 49, rue de la Faisanderie promet d'être un
événement.
Lee concours dont on est certain sont de premier
ordre. Dans le nombre pour commencer par les
étrangères qui reconnaisent ainsi gracieusement
l'hospitalité française, Mme Knrtz, l'étoile mer-
veilleuse de Vienne ; Mme Trouhanova, la déli-
cieuse danseuse russe ; Mme Nora Bayes.
La France sera glorieusement représentée par
Mmes Bréval, Sorel, Georgctte Leblanc, Félicia
Mallei
On trouve des billets chez Mme la duchesse de
Brissac, 26, rue Murillo, la duchesse de Noailles,
26, rue Pomereu, Mme Hériot, 49, rue de la Fai-
sanderie, M. Durand, l'éditeur de .la place de la
Madeleine.
— M. et Mme Alphonse Humbert, le compositeur,
et Mme Gaston Sclz, recevront demain mercredi à
3 heures et demie, dans leurs salons de la rue Ray-
nouard. On fera de la musique.
— La. société littéraire Le Bleuit, donnera, de-
main son dîner annuel suivi de concert et de bal.
— Au Cercle du Bois de Boulogne :
Les dîners du lundi suivis de feu d'artifice et de
cotillon recommenceront le 17 juin pour prendre
fin le 8 juillet.
Comme les années précédentes les membres du
Cercle pourront -se procurer au secrétariat, pour
les personnes étrangères des cartes d'invitation
pour la soirée.
Quant à la salle du pavillon du tir elle sera,
dans l'ordre d'inscription, mise à la disposition des
membres du cercle qui désireraient y donner un
dtner ou une soirée particulière.
— Demain au Polo, concours et présentation des
chiens de luxe présentés par des dames ou des
fillettes.
Les engagements pour les chiens 6eront reçus
au Polo jusqu'à quatre heures.
— Le distingué professeur de musique, Mme
Hirsch Grunthal qui vient récemment d'être pro-
mu officier d'Académie, réunissait hier ses nom-
breux élèves, salle Lemoine, en une audition à
laquelle M. Bouaiinsky premier violon des concerts
Colonne prêtait son gracieux concours. Soirée très
artistique où se sont révélées de charmantes mu-
siciennes d'avenir.
Sont arrivés à Paris et descendus à l'Hôtel Conti-
nental : ,
M. Fossler, de Londres ; M. Rice, de New York ;
M: et Mme Horton, de Londres ; M. et Mlles Fried-
man, de New-York ; M. et Mme Glidden, de Bos-
ton ; M. Loesvenstein, de Londres ; M. et Mme
Ilouravitz, de Prague ; M. et Mme Mendelson, M.
et Mme Ferranti, de New-York ; M. de Baguer, de
Bruxelles ; M. Kirstein, de Berlin ; M. et Mme
Shnitzler, d'Amsterdam.
Mariages
Nous apprenons le prochain mariage de :
M. René Martin, ancien élève de l'Ecole poly-
technique, fils de M. G. Martin; chevalier de la Lé-
gion d'honneur, avec Mlle Françoise Guelliot, fille
du docteur en médecine ;
M. Albert Passerieux, capitaine breveté à l'état-
major de la 20e division d'infanterie, avec Mlle
Yvonne Béchillon ;
M. Georges Baume, chimiste, fils de l'inspecteur
général des ponts et chaussées, officier de la Lé-
gion d'honeur, avec Mlle Suzanne Rouville ;
M. Pierre Lorain, ingénieur de la marine, fils de
1 architecte, chevalier de la Légion d'honneur, avec
Mlle Aline .Broca, fille du professeur agrégé à la
Faculté de médecine.
M. Henri L'Honoré, avec Mlle Louise Eude, fille
de l'ingénieur, chevalier de la Légion d'honneur ;
M. Marcel Hardy, ingénieur des mines, avec Mlle
Cécile de Visme.
— Le comte Max de Couppev de La Fores t, in-
génieur au corps des améliorations 'agricoles, fils
du comte de La Forest et de la comtesse, née de
Courcv, épousera le 12 juin prochain, en l'église
Samt-Rémy de Provence (Bouches-du-Rhône), MUe
Charlotte Mistral-Bernard, fitie de M. Mistral-Ber-
nard et de Mme, née Saint, et petite-cousine du
poète provençal Frédéric MistraL
Nécrologie. -
On annonce la mort de M. Le Verrier, ingénieur
en chef des mines, professeur au Conservatoire
des arts et métiers et à l'Ecole supérieure des mi-
nes, chevalier de la Légion d'honneur, décédé à
Eaubonne (Seine-et-Oise).
Il était le père de M. Charles Le Verrier, profes-
seur an collège Chaptal.
-=-On annonce la mort du directeur de l'Art,
M. Paul Leroi (Léon G au chez).
Né en 1825, il s'est éteint samedi mation à cinq
heures, après une vie toute de labeur consacrée
jusqu'au dernier .noment au cuite de l'art.
La mort i'a surpris au moment où il corrigeait
des épreuves.
De TanviJIa,
» '■
LE PARFUM fauboirg St-Honorè
r tb 0 r»
Le Monument Théophile Roussel
Le président de la République va inaugurer
demain le monument édifié à la mémoire de
l'auteur des lois sur la protection de l'enfan-
ce, le docteur Théophile Houssel.
Treute la carrière du docteur Théophile Rdus-
sel, sénateur de la Corrèze, membre de l'Aca-
démie des Sciences morales et politiques et de
l'Académie de médecine, se résume * dans la
bonté. Cette bonté s'inclinait surtout vers l'en-
fance souffrante, et la couronne de sa vie pu-,
iblique, nullement tapageuse, fut le doublé vote
des lois de 1874 et de 1889 sur la protection des
enfants en bas âge et des enfants maltraités
ou moralement abandonnés.
On va célébrer cet homme de bonté, mort il.
y a quatre ans, comme on le fêta en Sorbonne,
par un jubilé, en 1896, à l'occasion de ses
quatre-vingts ans, en érigeant son monument
à quelques pas de la Maison des Enfants-Assis-
tés, à l'angle de la rue Denfert-Rochereau et
de l'avenue de l'Observatoire.
- Le monument Théophile Roussel est simple
et beau. Il est l'œuvre de deux jeunes artis-
tes que l'amitié unit intelligemment, et tous
deux anciens prix de Rome ; le sculpteur J.-B.
Champeil et l'architecte Chifflot. Leur collabo-
ration fut plusieurs fois heureuse et l'est enco-
re aujourd'hui.
L'œuvre nouvelle de Champeil, monument à
Théophile Roussel, présente le buste du pro-
tecteur de l'enfance au haut d'une stèle de pier-
re de Lorraine, devant laquelle .se dresse un
groupe symbolique en marbre blanc : la Bien-
faisancè, femme à l'allure tranquille et noble,
portant un tout jeune enfant et enveloppant un
jeune garçon sous le pan dé son manteau.
Sur la stèle, ornée d'un rameau, sont inscrites
les belles initiatives de Théophile Roussel et
deux phrases des discours du jubile de 1896,
prononcées à l'éloge du maître par M. Louis
Barthou, ministre de l'instruction publique, et
par M. Tissier, président de l'Association des
Etudiants.
.- Estienne.
■■ ■■ m m & ■1 ■■■"' ■—»
CARNET D'UN ETUDIANT
L'ironie des vieux livres
La fréquentation de la Bibliothèque nationale est,
à divers points de vue, fort utile pour l'instruction
et l'éducation des étudiants. On y prend tout d'a-
bord l'habilude d'une vertu dont Mazarin faisait la
base de sa politique : « Savoir attendre », disait-il
à son maître pour lui apprendre l'art de gouverner
les hommes,
A la Nationale 'il faut savoir attendre, si le livre
demandé n'est pas d'un usage courant. On devient
patient à une pareille école, et cela permet de ne
pas se décourager lorsque l'étudiant enfin muni de
ses diplômes sollicite un poste ou une fonction
dans un ministère. Il est dressé, il sait « attendre ».
Mais on n'acquiert pas seulement, à la Biblio-
thèque, l'art de patienter sans mauvaise humeur ;
on y gaigne à la lecture de certains livres une douce
philosophie, très utile dans la vie, an fond de scep-
ticisme en politique et une ironie charmante. en ce
qui regarde le serment de fidélité 'à la République.
On sait que cela n'engage à rien.
J'ai acquis cette conviction en feuilletant dans la
grande salle de travail la collection complète de
l'Almanach national, depuis 17891 mise à la dispo-
sition du public.
C'est d'abord l'almanach royal, respectueuse-
ment dédié à Sa Majesté. Il devient national en
1795, avec le changement des années en ans H, III,
etc., de la République ine et indivisible.
Et le même éditeur inscrit en première page :
« Mort aux tyrans » ; ce qu'il regrette bientôt, le
pauvre homme, car l'almanach devient impérial,
avec des flatteries excessives pour « Sa Majesté
Napoléon ». -
'En 1815, fannuaire redevient royal, et cette fois
féditeur. toujours le môxne^ s'excusa de DsraHre
un peu tardivement : « L'Almanach de 1814 allait
paraître, dit-il, lorsque survint une révolution à"
jamais mémorable qui replaça sur le trône notre
bon et excellent roi Louis XVIII. »
Cette désinvolture est tout à fait charmante, et
ces convictions de l'imprimeur fort instructîve-s.
L'éditeur meurt, mais l'almarvach continue ses
petites transformations ironiques. National en
1849, 50, 51, impérial en 1853, enfin national de
nouveau en 1871.
cette dernière fois, espérons-le, pour le plus
longtemps possible.
J'ai feuilleté cette vieiJle collection en attendant
le livre de droit que j'avais demandé. Lorsque j'ai
enfin obtenu mon gros in-Jolio, j'y ai lu : « Le ser
ment de fidélité à ja Constitution est inviolable. »
Est-ce bien certain ? J'en doute un peu, désor-
mais. Cela doit, au fond, ressembler aux serment;
des amoureux. On jure de s'adorer toujours, et
chacun sait parfaitement que dans la circonstance,
toujours signifie quelques semaines ou quelques
mois.
On fait tout de même le serment. C'est si gentil.
Raymond Cahu.
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La urève psrale
des inscrits maritimes
Notre commerce extérieur
et la grève
Situation toujours grave. — Pour l'Angleterre
et l'Algérie
Encore que les dernières dépêches signalent
une certaine détente, îa situation faite 'à notre
commerce extérieur et maritime par la grève
des inscrits n'en reste pas moins toujours très
grave.
Nous avons été, avant-hier, les seuls & in-
diquer que les commandants des paquebots
des Messageries avaient refusé de se joindre
au mouvement ; on a appris, hier, que cer-
tains commandants de la Transatlantique,
frappés par l'attitude de ia Compagnie et me-
nacés de révocation immédiate, s'étaient sé-
parés de leurs équipages et avaient rejoint leus
ihnrrl
D'autre part, les ncuvelles reçues par le
syndicat des armateurs prouvent que dans les
ports de l'Ouest surtout, le mouvement gré-
viste diminue d'intensité.
C'est pour les producteurs, commerçants,
industriels commissionnaires ayant des rela-
tions constantes et journalières avec l'Angle-
terre et l'Algérie, que les premiers jours de
grève ont eu les plus terribles effets.
Le service des voyageurs entre la France et
l'Angleterre n'a pas été trop désorganisé,étant
surtout assuré par des "paquebots anglais, mais
le service des marchandises a été, pour ainsi
dire, complètement arrêté.
De tous les ports de la côte normande et
boulonnaise, il part chaque jour un nombre
considérable de navires, petits ou grands, va-
peurs ou voiliers, qui emportent en Angleterre
les produits de la terre ou de l'industrie fran-
çaises.
Depuis vendredi, il n'y a eu que de rares
départs et l'on signale que des cargaisons en-
tières d'oeufs, de beurres, de cerises, de pri-
meurs sont entièrement perdues après un sé-
jour trop prolongé dans les docks, hangars ou.
cales. Dans la région de Caen, principalement,
les cultivateurs exportateurs sonil navrés et
l'écho de leurs plaintes a dû parvenir jusqu'au
gouvernement.
Pour l'Algérie, c'est encore pire.
Encore que les départs postaux aient été,
dès le lendemain de la grève, assurés par des
contre-torpilleurs et des croiseurs de l'Etat,
encore que dès hier, le monopole du pavillon
français ait été supprimé entre la France et
l'Algérie, on n'en a pas moins à regretter une
perturbrtion tellement profonde dans les re-t
lations maritimes entre la métropole et sa co-
lonie, qu'on peut augurcK que si la grève se
prolongerait, une crise formidable éclaterait en
Algérie, qui pourrait causer la ruine complète
de certaines régions.
On sait, en effet, que dans la région d'Alger
principalement, presque toutes les terres de
plaine sont consacrées à la culture des pri-
meurs, culture très coûteuse ; on sait aussi
que, chaque jour, les primeurs algériennes
sent expédiées sur Paris et que le mouvement
commercial qui s'ensuit est tellement impor-
tant que des services spéciaux, à grande vi-
tesse, ont été pour lui créés. Or, depuis qua-
tre jours, des tonnes et des tonnes de primeurs
algériennes pourrissent sur les quais et dans
les docks des ports algériens, ne pouvant être
transportées en France, par suite de la grève;
d'où des pertes très considérables .;pour les
producteurs et les expéditeurs.
Et si l'on se souvient qu'en 1903, une pe-
tite grève de la navogation qui ne dura que
quelques jours, causa la ruine complète de
deux mille cultivateurs algériens, on doit re-
douter que la- grande grève d'aujourd'hui n'en-
traîne pour notre colonie des désastres incal-
nIables, irréparables, peut-être.
Les agences maritimes
Les Compagnies .de navigation ne sont pas
les seules à être frappéBs - et durement par
la grève actuelle. Les Agences maritimes et les
commissionnaires en marchandises qui, en
somme, concentrent entre leurs mains tout le
commerce extérieur, seront si la gTève conti-
nue, aussi profondément atteints dans leurs
affaires et dans leurs intérêts.
Il existe, à Paris, environ soixante agences
maritimes pour expédier dans toutes les par-
ties du monde les produits de l'industrie et de
la fabrication parisienne et française.
Ces agences — les petites comme les gran-
des — ont toujours fait de leur mieux pour ré-
server au pavillon français le frêt dont ils dis-
posent. La grève va les mettre dans dans l'im-
possibilité de favoriser, comme par le passé,
le pavillon français. Voici Ieis renseignements
qu'à ce sujet, le chef d'une des agences les
mieux connues sur la place, a bien voulu nous
fournir.
« La situation de l'armement français n'était
cependant pas précisément brillante depuis
plusieurs années, nous dit notre interlocuteur.
En effet, les marchandises de gros poids mais
de moindre valeur, pour l'Amérique du Nord
et le Canada, sont, depuis assez longtemps,
expédiées par les ports belges ou anglais, au
détriment des ports français. Je ne parle pas
de la région du Pacifique pour laquelle nous
ne faisons plus d'expéditions sérieuses. Mais
il restait tout au moins au pa\illon français
les chargements de valeur pour les Etats-Unis
et le Canada. Nous allons être maintenant,
obligés de faire passer ces chargements par
une autre voie et de les diriger pour cela sur
un port .anglais, belge, voire allemand. Les
clients finiront par s'habituer à cette nouvelle
voie et ce sera une nouvelle cause de déchéan-
« Pour l'Amérique du Sud, ce sera pire en-
« Pour l'Amérique du Sud, ce sera pis en-
core. Déjà, au point de vue frêt, nos Compa-
gnies maritimes ont perdu le Chili ; au Mexi-
que, elles sont très menacées, au Venezuela,
elles ne peuvent plus pénétrer, ; il n'y a que
le Brésil et la République Argentine où
l'armement français soit bien représenté. Or,
si la grève dure, il faudra bien expédier dans
ces pays par bateaux étrangers, qui, de ce fait,
prendront sur la navigation française, une
avance qui ne pourra qu'être bien difficile-
ment regagnée quand la grève sera temlinée.»
« Je pourrai vous en dire tout autant, termina
M. Blondel, pour nos longs-courriers d'Extrê-
me-Orient et d'Océanie. Vous en savez assez
pour juger combien la situation est grave pour
notre commerce maritime - et pour notre com-
merce extérieur. Qui nous tirera de là ? »
Qui ? demande notre agent maritime. Bien
malin sera celui qui lui répondra 1
Si le gouvernement donne satisfaction aux
grévistes, c'est 30 millions qu'il lltft frouvet
par an. Et dans. l'état actuel de nos finances,
où trouver 30 millions ?
Si le gouvernement ne cède pas, peu ou
prou, c'est la continuation de la grève ; c'est-à-
dire l'affaiblissement certain, sinon la ruine,
de notre commerce extérieur et maritime qui
n'avait, certes, pas besoin de ce surcroît d'in-
fortune. -
Qui nous tirera de là ?
En tous cas, nous continuerons demain no-
tre intéressante enquête eh donnant l'avis des
« Rois de la Commission ».
Georges Hache.
A la Compagnie
des Messageries maritimes
L'opinion d'un haut fonctionnaire de ïp Compagnie
des Messageries Maritimes. - La grève n'est
pas le fait de la Compagnie. —Les équi-
pages de l'Etat ne peuvent monter les
bateaux de leur flotte. — Et la
responsabilité ?. -'
J'ai rencontré hier l'un des plus hauts fonc-
tionnaires de la Compagnie des Messageries
Maritimes. Nous avons causé ensemble de
beaucouip de choses, parmi lesquelles la grè-
ve des inscrits, naturellement. Mais, comme ce
ne fut qu'une conversation amicale échangée,
je ne me permettrai pas d'imprimer son nom.
Avant de s'occuper des intérêts d'une grande
Compagnie de transports, il a été, lui-même,
très mêlé au mouvement politique ; c'est pour-
quoi il jug
— La situation, pour nous, est très bizarre,
en ce sens que la grève ne naît pas de reven-
dications à nous signifiées par .le personnel
Les inscrits ne nous réclament aucune aug-
mentation de salaire. Nous sommes indirecte-
ment en cause, et c'est nous qui subissons tous
les préjudices.
En effet, il se produit un conflit entre le
gouvernement et les inscrits maritimes. Je ne
veux même pas discuter les causes, qui
sont étrangères à la Compagnie, mais le con-
flit se passe sur notre dos. Vous avouerez que
c'est dur. Je comprends qu'on endosse la res-
ponsabilité d'actes par soi accomplis, mais ce
n'est pas le cas présent.
Un fait à signaler, c'est la position prise par
les officiers entre les inscrits et nous. Jusqu'ici
aucun état-major n'a complètement lâché pied.
Je ne sais encore ce qui surviendra, mais, pour
l'instant, nous avons trouvé beaucoup de fer-
meté et de dévouement.
D'ailleurs, ce que la Compagnie redoute,
c'est que la grève, si elle se prolonge et se pro-
page, n'arrive à modifier les relations qui exis-
tent entre la Compagnie et son corps d'oft-
ficiers. Ce personnel d'élite, nous le considé*
rons non comme des sous-ordres, non comme
des fonctionnaires, mais comme des collabo-
rateurs dont les services et l'intelligence ne
sauraient se mesurer aux traitements, même
élevés, qu ils reçoivent.
Voilà surtout ce que nous redoutons, et
-c'es-t, reconnaissez-lç, tout à l'honneur du per-
6onnel de notre flotte.
— Mais, avez-vous été contraints de faire ap-
pel aux étrangers pour assurer vos services, ?
— Oui, évidemment. A Marseille, nous nous
trouvions en présence de stocks assez con-
sidérables de marchandises à enlever. Il
y avait dans le port des bateaux de diverses
nationalités, des grecs et des italiens entre au-
tres. Nous les avons affrétés en location, r
mois, pour enlever nos car^ursons. Nous ne
pouvions pas agir autrement.
— Mais l'Etat ne vous a pas offert d'équipa-
ges pour assurer les mouvements de votre
flotte ?
- C'est très délicat, le système des réquisi-
tions armées. Quand nous remettons un ba-
teau à un capitaine au long cours présentant
toutes les garanties requises, c'est dix millions
au maximum que nous lui confions ; non seu-
lement, il possède toutes les qualités profes-
sionnelles des officiers des équipages de la
flotte, mais il y joint l'habitude des longues
traversées et le maniement de « l'outil » qui
se trouve alors entre ses mains.
L'officier montant les navires de guerre n'a
qu'un défaut.Il fait la navette entre Cherbourg,
Toulon et Brest. S'il est en escadre, il n'aura
que rarement à faire plein usage de sen ini-
trative, tandis que nos officiers, livrés à eux-
mêmes, savent quelle responsabilité person-,
nelle leur incombe.
En 1904, par exemple, une sorte de mutine-
rie se produisit parmi les inscrits. Le mou-
vement s'étendit parmi les officiers qui nous
manifestèrent l'intention de débarquer.
M. Pelletan, alors ministre de la marine,
nous offrit des officiers par réquisition. Nous
nous trcuvions dans une situation difficile,
mais il ne nous était pas possible d'accep-
ter.
Comme je vous le disais tout à l'heure, nos
capitaines, en prenant le commandement de
leur navire, savent quelle responsabilité; ils
acceptent. Mais cette responsabilité, avons-
nous le droit de la transporter a des officiers
en service essentiellement temporaire chez;
nous ? .,.
Supposons un accident grave, un échouage,
un naufrage même.
L'Etat nous aura fourni des équipages, ao-
ceptera-t-il la responsabilité encourue du fait
de ce prêt gracieux ?
C'est peu probable. En tout cas, comme
les machines, le service, le fonctionnement,
tout à bord est différent de ce qui se passe
à' bord d'un bateau de l'Etat, il est bien dif-
ficile de demander aux officiers de la marin'c
militaire, l'accomplissement d'une tâche qui
n'est pas la leur.
Pour assurer le service de la Poste entre la
Pour assurer le service de la poste entre la
des crciseurs, rien de mieux, mais chez nous,
la situation est très différente, quand ce ne se-
rait même qu'au point de vue de la longueur
des traversées. Quand nous envoyons un ba-
teau au Brésil et dans l'Argentine, c'est une
absence de trois mois. Il y aurait donc des
dispositions très spéciales à prendre.
— Et que comptez-vous faire ?
- Nous espérons que nos états-majors ne
nous quitteront pas, et que tout sera rentré
dans l'ordre pour nos prochains départs. Si-
non nous agirons comme les autres compa-
gnies, mais nous n'avons même pas envisagé
l'hypothèse de l'emploi de la réquisition ar-
mée. Du reste, si* nous en venions là, il ne
pourrait être question que d'une partie res-
treinte du personnel de l'équipage, et non des
officiers. Ce qui nous perrne-Íf d'espérer./ je
vous l'ai dit, c'est Ta cause initiale même de
la grève que la Compagnie n'a absolument rien
fait pour provoquer.
D'ici quelques heures on "saura, sans dou-
te, quelle tournure prend le mouvement.
Toujours est-il que dans l'une des plus im-
portantes compagnies, la direction ne mani-
feste aucune hostilité vis-à-vis des inscrits et
témoigne d'une èxlrême confiance dans leur
bon sens et dans leur loyauté.
Eugène Destez.
La détente
Solution prochaine : mécontentements unanimes.
— Un conflit mal engagé. — Les inscrits
ne s'avoueront pas vaincus
C'est Paris qui a ordonné la déclaration de
grève des inscrits maritimes. C'est Paris qui va
mettre fin au conflit.
On nous rendra cette justice que nous étions
bien renseignés dès le premier moment. Nous
annoncions, quarante-huit heures avant nos
confrères, la convocation de délégués des ports
de France. Nous signalions l'influence de la
Confédération du Travail, la veille du jour où
son envoyé spécial galvanisait l'élément turbu-
lent de Marseille. Nous révélions les dissenti-
ments au sein des états-majors, à l'instant mê-
me où le Comité central des armateurs de
France protestait de ses pures intentions.
Nous avons, seuls encore, pronostiqué l'en-
tretien avec M. Thomson, ministre de la ma-
rine, entretien au cours duquel, comme nous
l'avions prévu — et prédit — le Havre manifes-
ta de l'ardeur belliqueuse, tandis que Marseil-
le cherchait un mpyen d'entente.
Dès à' présent, bien que la conversation rue
Royale n'ait pas tenu toutes ses promesses,
on peut affirmer que la grève des inscrits ma-
ritimes est à son déclin.
- Wus1 ne soînmes Da a-u Bout Ses incidents.
Il y a des mécontents parmi les gradés et par-
mi les autres. La pension de six cents francs
sera revendiquée, de nouveau, cet après-midi,
et demain, par des assistances nombreuses,
dans les meetings. Et les syndicats feront, par
ordres du jour platoniques, de la surenchère'
à unanimité que veux-tu.
La grève des inscrits maritimes est à son
déclin. Un'e quinzaine de dépêches, à notre
connaissance, conseillèrent, dès hier soir, le
retour à bord.
Ceux qui escomptaient une grosse perturba-
tion avouent que le pétard a fait long feu. On
s'empresse de renier rengagement, dans les
milieux corporatifs confédérés. On explique :
— La lutte a éclaté par surprise. Elle est ar-
rivée mal à propos. Nous n'y avons participé
que par devoir. Nous ne pouvons compren-
dre, dans une bataille de cette espèce, l'accord,
même de circonstance, qui groupe à la fois
des officiers et des hommeS- d'équipage.
— Mais, cette question des pensions ! inter-
rompons-nous.
— Question accessoire. ou piège habile, ré-
plique notre interlocuteur. On a vraisembla-
blement cherché, sous ce prétexte, à épuiser
l'énergie des gens de mer, à faire dépenser,
d'un coup, tous les efforts dont sont capables
nos camarades marins et pêcheurs.
« C'est un faux calcul, vous pouvez le dire
en toutev certitude. Marins et pêcheurs auront
d'autres occasions, et ils sauront en profiter.
Nous croyops que cela sera bientôt. »
Én définitive — et c'est là surtout ce qui
nous importe — on considère, chez les initiés
(nous allions écrire « chez les meneurs »),que
la grève de la mer, considérable dès la premiè-
re alerte, parce que générale au lendemain du
mot d'ordre prononcé par Marseille, se termi-
nera à brève échéance, en queue de poisson,
comme il convient en la matière. Les capitai-
nes cesseront de bouder, trop heureux de re-
cueillir quelques jolies promesses gouverne-
mentales après les menaces du conseil des mi-
nistres.
Et les armateurs, qui n'ont pas un instant
cessé d'être d'accord, nous affirme leur comi-
té, ne seront pas réduits à la famine. Et le
commerce français en sera quitte pour la peur.
Et les Compagnies de navigation étrangères
auront tout de même réalisé un profit de quel-
ques millions de francs — les quelques mil-
lions nécessaires à la réalisation du nroiet
Siegfried. à la réalisation
Louis Besse.
Une délégation des gens de mer
chez le ministre de la Marine
Une délégation du comité de défense des
gens de mer, sous la présidence de M. Le Bou-
langer, officier mécanicien, a été reçue hier
par le ministre de la marine.
Elle était composée des délégués suivants :
Marseille : Le Boulanger, président, officier mé-
canicien ; Lap-eyre, capitaine au long cours. —
Le Havre : Reynier, capitaine au long cours ; Le-
sieulre, officier mécanicien ; Gouache, inscrit ma-
ritime. — Dunkerque : Girou, capitaine au long
course — Nantes : Pillevuyt, capitaine au long
cours ; Moisdon, inscrit maritime.— Sainl-Nazaire :
Boisson, capitaine au long cours ; Dussart, offi-
cier mécanicien ; Bertho* inscrit maritime. —-
Rouen : Luquet et Saint-Martin, inscrits mari-
times.
M. Armez, président de îa commission de
la marine de la Chambre, assistait à l'entretien.
Parlant au nom du comité de défense des
gens de mer,- M. Lapeyre a rappelé dans quel-
les conditions cette organisation centralisant
les vœux des sous-comités, avait été amenée
à déclarer la grève générale qui vient de se
produire.
Si le gouvernement, a ajouté M. Lapeyre, con-
sentait à accepter le principe des améliorations èt
promettait, en outre, d'assurer qu'aucune sanction
me sera prise contre ceux qui ont pris part au
mouvement, les délégués, en majorité, pourraient
télégraphier à leurs camarades de reprendre le
travail,
M. Armez déclare que la commission de la
marine, qui contient plusieurs représentants
des inscrits maritimes, est animée de disposi-
tions bienveillantes à l'égard de ceux-ci ;
qu'elle est donc prête à écouter leurs observa-
ions sur le projet.
Pour terminer, M. Armez insiste sur ce fait
qu'à ses yeux l'intérêt des inscrits leur com-
mande là reprise immédiate du travail.
Dans sa réponse aux délégués, M. Gastorr
Thomson a tenu à constater, tout d'abord,
qu'il y avait un point qui était hors de cause,
c'est que la sollicitude du gouvernement, dans
ces dernières années, s'était toujours large-
ment exercée à l'égard des inscrits maritimes.
Puis il a abordé la question des pensions de
demi-solde :
En ce qui concerne la proposition de loi sur lés
pensions de demi-solde, j'ai fait, lorsqu'on novem-
bre 1906 j'ai reçu les délégués dès-inscrits, des
réserves sur les, chiffres mêmes, parce que l'Etat,
selon moi - et c'est là peut-être, en matière de
promesse, son infériorité sur les initiatives indi-
viduelles— l'Etat a le devoir de ne rien promettre
qu'il ne soil en mesure de tenir.
Aujourd'hui, -, donc, la situation est celle-ci : le
Parlement est saisi, et c'est devant la commission
de -la marine — dont le président, que je suis
heureux de voir ici, vous a attesté les bonnes dis-
positions à l'égard dès inscrits maritimes, — c'est
devant cette commission que vous avez uon seule-
ment le droit, mais le devoir de porter vos reven-
dications.
Miais je serais surpris qu'avant tout, dans votre
'propre intérêt comme pour sa propre dignité, la
commission, ainsi que l'indiquait tout à l'heure
M. Armez, ne vous demandât pas de cesser prÓa-
lablement une agitation qui n'est guère propice à
l'examen sérieux et réfléchi de pareilles questions.
Seule, croyez-moi bien, la reprise immédiate du
travail peut faciliter l'issue du conflit, et j'ai l'es-
poir qu'à défaut d'une solution instantanée .qu'il
n'est pas en mon pouvoir de vous donner, vous
accepterez, pour le bien même de votre caus,e, ce
bon; eottgeili oc conseil d'apaisement et d'entente
qui ne peut vous être suspect venant d'un homme
dont vous avez appris à connaître les sentiments
personnels à votre égard d'un ministre placé à
la tôte de ce départment de la marine qui s'est
toujours fait honneur de soutenir et de protéger
la classe si intéressante et si laborieuse des ins-
crits.
A la suitè de l'entrevue avec fçs délégués
des inscrits, le ministre de la marine a reçu
M. Charles Roux, président du conseil d'admi-
nistration de la Compagnie Générale Transat-
lantique.
Les délégués des inscrits maritimes ont
quitté le ministère de la marine à cinq heures
pour se rendre à la Chambre des députés où
ils doivent être reçus par les membres déjà
commission de la marine.
Les délégués se refusent à donner des en-
seignements sur leur entrevue avec le minis-
tre. Ils se sont bornés à dire : « Rien n'est ter.
mifté. Nous devons voir la commission de la
marine avant d'être reçus à nouveau par le
ministre. »
Dans les ports --
La journée d'hier a été plutôt calme dans les
ports. Les nouvelles que nous recevons semblent
indiquer que l'on espère beaucoup de l'intervention
du gouvernement.
A Marseille, la. Compagnie Transatlantique ayant
fait savoir qu'elle ne reprendrait pas les officiers
qui auraient quitté leur bord, les états-majors ont
tenu une réunion, à la suite de laquelle ils, ont
décidé d'envoyer à leurs délégués à Paris un
télégramme les priant de surseoir à toutes démar-
ches auprès de la commission de la marine et
d'attendre de nouvelles instructions.
Aux Messageries maritimes, plusieurs états-ma-
jors sont à leur poste et deux paquebots ont leurs
équipages complets. Au siège de la fédération des
capitaines, on se flatte que les uns et les autres
no tarderont pas à descendre à terre.
Le contre-torpilleur Pertuisane est parti hier à
2 heures de l'après-midi' pour Alger avec le courrier
postal.
Le transport Vinh-Long est parti le soir, à 5
heures, pour la même destination, avec des pas-
sagers et des colis postaux.
A Toulon, hier matin, le commissaire central
de police avait fait disposer de nombreux agents
sur les quais et dans les rues avoisinantes, parce
que l'on avait annoncé que plusieurs inscrits vou-
lant reprendre le travail, des incidents allaient se
produire. Une surveillance active a été effectuée.
Mais les inscrits, pris de crainte, n'ont pas donné
suite à leur intention.
Le service des liée d'Hyères et plus particuliè-
rement de porquerolles a été encore assuré par le
remorqueur Faron, qui a dû -partir de l'intérieur
Lé capitaine du valeur Tartarin. de Hie de PÓr-
querollcs, a du renoncer a partir, en présence de
l'hostilité manifestée par les inscrits..
A Oran, les inscrits maritimes ont décidé de sa
solidariser avec leurs camarades de France et d'Al.
ger, et de faire grève.
o En conséquence, les inscrits bateliers et pô-,
cheurs ont déposé hier leurs rôles aux bureaux de
l'inscription maritime. Le plus grand calme A étâ
recommandé.
A Bordeaux, la navigation est complètement ar-
rêtée, ainsi que le bornage, c'est-à-dire la circu-
lation des petites embarcations, et aucune gabare:
n'est passée en rivière depuis hier matin.
Les marins de tous les navires, vapeurs oil
autres, vivent à bord, mais ne font aucun travail
et sont nourris par les capitaines.
Les pilotes qui assurent un service international
ont refusé de faire grève.
Les quais sont peu. actifs ; il n'y a aucun inck
dent. -
Le Comité de défense espère beaucoup de fa
démarche des délégués à Paris.
A Nantes, les inscrits maritimes, drapeau eri,
tête, se sont rendus sur les quais pour faire dé-
barquer les matelots encore à bord. Quelques in-
cidents se sont produits.
Le secrétaire des inscrits maritimes de l'Ouest
-M. Cardin, aceompagné. do deux ou trois de ses
camarades, est monté à bord de la drague n° 3,
des ponts et chaussées, dans le but de persuader
au personnel de cette drague de faire cause com-
mune avec les grévistes en quittant leur travaiL
A la demande d'un conducteur des ponts et chaus-
sées, un commissaire de police et six gendarmes
sont arrivés à bord de la drague et ont intimé
aux grévistes l'ordre de se retirer. M. Cardin a
protesté énergiqueanent., en déclarant que la police
des eaux fluviales n'appartenait pas au commis-c
saire de police ni aux gendarmes, mais au sert
vice de la marine et à la gendarmerie maritime Z
mais les inscrits n'ont pas opposé de résistance, et
se sont retirés, en entraînant d'ailleurs le person-
nel de la drague. -
Un groupe de grévistes a tenté d'envahir le
ponton de la Compagnie des Messageries de
l'Ouest, et d'empêcher le départ d'un bateau de
voyageurs, mais la police a pu dégager le bateau,.
qui a repris sa route.
Les bateaux de voyageurs qui font le service dH
la Loire ont à leur bord des gendarmes, dans la
crainte que les grévistes ie se présentent aux
escales. Toutefois, les communications par eau en-
tre Nantes et Saint-Nazaire sont Interrompues.
A Dieppe, les inscrits maritimes ont tenté hier
d'envahir la gare maritime pour empêcher l'em-
barquement des marchandises à bord du paquebot
anglais le Twuville. - .-
Les gendarmes et lois agents ont résisté, et deux
arrestations ont été opérées. Les grévistes ont
coupé les amarres du même paquebot et demandé
au maire de Dieppe de prendre un arrêté interdU
sant la vente du poisson.
Le maire s'est refusé à fermes un marché d'ali-
mentation.
La garnison est (Consignée et deux compagnies
sont postées sur les quais 2t à la mairie.
Au Havre, le comité exécutif dit que ses délé-
gués à Paris ne se rendent au ministère de la
marine que pour s'informer des intentions du gou-
vernement et non pour outrer en pourparlers avec
les pouvoirs publics.
La Compagnie Transatlantique et la Compagnie
des Messageries maritimes ont informé leurs états-
majors qu'elles les considéraient comme démis-
sionnaires et les rayaient des cadres.
Les inscrits ont pris à nouveau l'engagement de
ne réintégrer leurs bords qTfavee leurs officiera
et sur la promesse qu'ils ne seront pas frappés.
Une bagarre s'est produite à la Poissonnerie en-
tre des femmes de grévistes et des marchandes;
de poisson. Les femmes des grévistes ont renversé
les paniers des poissonnières et jeté le poisson au
ruisseau. Trois arrestations ont été opérées par la
police. Le comité de grève a blâme ces actes de
violence des femmes des grévistes.
Des démarches vont être faites par les grévistes .,
du Havre près des syndicats des marins de
Southampton pour que les navires anglais refu-
sent de transborder les émigrants actuellement au
Havre, ce ce port à Southampton.
Les officiers de la marine marchande ont dé-
cidé de rester sourds aux manœuvres d'intimida-
tion et de continuer la grève.
Les pilotes ont ouvert au comité exécutif ult
crédit illimité.
Quelques médecins et pharmaciens ont offert de
soigner gratuitement les inscrits indigents pendant
la grève. Les ponts et les quais sont gardés mili-
tairement.
Le comité exécutif a fait placarder un appel il
la population, affirmant que les inscrits n'ont pas
l'intention de créer des troubles et regrettent le
déploiement de forces qu'ils considèrent comme
absolument inutile en la circonstance.
A Cherbourg, les grévistes ont déclaré qu'ils
feraient tous leurs efforts pour que les émigrants
ne soient pas embarqués à bord du navire de la
Compagnie Hamburg-Amerika Linie.
La fin de la grève
Le comité de la grève des inscrits "nantî-
mes nous communique le texte du télégramme
suivant qui a été expédié dans tous les ports :
« Les délégués réunis à la Chambre des Dé-
putés ont été reçus par le ministre et la com,
-mission de la marine.
« Le ministre abandonnera toutes poursuis
tes et demandera aux Compagnies la réinté-
gration de tous les marins et officiers. Après
avoir causé individuellement avec la majori-
té des. membres de la .commission, nous avons
acquis l'assurance que le projet Thomson se-
rait amélioré. A Vunanimité, les délégués pvo*
posant la cessation de la grève.
« LE COMITÉ. »
Informations politiques
Les dossiers de la nonciature
M. Guyot-Dessaigne, ministre de la justice, 8
reçu hier matin M. Denys Côchin et lui a demandé
de remettre à aujourd'hui la fixation de son inter-
pellation sur les papiers Montagnini afin de lui
permettre de demander ce matin l'avis du conseil
des ministres.
La crise viticole
La commission des boissons, dans sa séance
d'hier matin, a examiné les articles 3 et 4 du pro<
jet du gouvernement. Ces deux articles ont été
adoptés avec quelques modifications de peu d'im*
portance. Ils concernent l'interdiction de la fabri,
cation du vin de sucre et les. pénalités.
La suppression des conseils de guerre
M. Clemenceau, président du conseil, a conféra
hier matin avec M. Cruppi; président de la coin- :
mission de la réforme judiciaire, et avec M. La-
jbori, rapporteur du projet relatif aux conseils de
'guerrei au sujet de la mise prochaine à l'ordre du
jour de la Chambre de la discussion de cette rë-"
forme,
Aujourd'hui est distribué l'avis, présenté au nom
de la commission tle l'armée par M. Klotz, sur le
projet de loi supprimant les conseils de guerre etf
les établissements pénitentiaires militaires. Parmi
les questions diverses examinées par l'auteur, il
convient de citer le fonctionnement de la justice
militaire en temps de guerre et quelques renseU
gnements statistiques intéressants sur les affaires
engagées par les conseils de guerre depuis îyyi
jusqu'à la fin de 1906.
Au groupe de l'unian républicaine
M. Constant Dulau, député des Landes, élu pré-
sident du groupe de l'union républicaine a pris
possession hier de la présidence et a prononcé à
cette occasion un discours dans lequel il a exami*
né 1&s multiples problèmes politiques actuellemcntt
soumis au Parlement.
L'amiral Péphau et la municipalité de Brest
M. Clemenceau, président du conseil, a reçu hier
matin M. Aubert, maire de Brest, qui venait se:
plaindre de- propos injurieux pour le conseil muni-
cipal, de cette ville qu'aurait tenus M, l'amiral Pe-
phau, préfet maritime.
M. Clemenceau a tout d'abord fait remarquer,
qu'il pourrait peut-être en ce qui le concerne, adres-
ser un reproche identique aux conseillers munici-
paux de Brest qui s'expriment parfois en termesi
assez vifs sur le compte des membres du gouver-
nement. Il a ajouté que l'amiral Pephau contestait!
les propos qui lui étaient attribués, mais que le.
ministre de la marine allait demander à l'amiral
un rapport détaillé sur cet incident.
* w » ■ ■"
La - Chambre
La Chambre n'ayant toujours rien à faire?,-
a continué l'examen de la proposition de loi..
tendant à assurer la liberté et le secret dui
vote.
Elle a adopté sans coup férir un article 6'1
qui autorise l'électeur « atteint d'infirmités loi
mettant dans l'impossibilité d'introduire sorï
bulletin dans l'enveloppe, et de glisser celle-cil
dans la boite du scrutin »» à se faire assister
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déjà les conducteurs d'aveugle, nous aurons
lès Anti £ one poùr électeurs manqué.sr-
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