Titre : La Lanterne : journal politique quotidien
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1884-01-08
Contributeur : Flachon, Victor. Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb328051026
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 08 janvier 1884 08 janvier 1884
Description : 1884/01/08 (N2453,A8). 1884/01/08 (N2453,A8).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Description : Collection numérique : BIPFPIG33 Collection numérique : BIPFPIG33
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7507135b
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-54
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 10/07/2012
-
ADMINISTRATION. RÉDACTION & ANNONCES
A PARIS
1. iS — Hue Richep — t 8
Lçs articles non insérés ne seront pa~e~M.
ABONNEMENTS
PARIS
TROIS MOIS. 5 FR.
SIX XOIS g FR.
UN an 18 ra.
JOURNAL POLITIQUE
QUOTIDIEN
DN NUMÉRO: 5 CENTIMES
ABONNEMENTS
DÉPARTEMENTS
TROIS MOIS. 6 FR.
SIX MOIS. 12 FR
UN AN. 24 FR,
HUITIÈME ANNÉE.-NUMÉRO 2453
Mardi 8 Janvier 1884
(22 nivôse an 91)
Nous avons souvent parlé des barba-
ries légales que recouvrent les appa-
rences de notre civilisation. Derrière
des façades brillantes, il y a encore d'é-
pouvantables barbaries, comme celles
que la Lanterne a dévoilées dans ses
campagnes contre la Préfecture de po-
lice et contre les asiles d'aliénés.
Le grand ministère, pour remédier
aux plaies sociales, n'a eu qu'une idée :
— Faire une loi sur les récidivistes.
C'est simple, ce n'est pas compliqué. Il
ne s'est pas demandé auparavant s'il ne
faudrait point tout d'anord prévenir
l'éclosion du criminel.
Voici un fait que racontent les jour-
naux de Nantes, le pays de M. Wal-
deck-Rousseau :
Un jeune enfant, qui, commettant une gaminerie
plutôt qu'un abus de confiance, avait gardé pour lui
une pièce de cinq francs appartenant à une de ses
voisines, avait été, il y a près d'un an, jugé par dé-
faut. Le tribunal l'avait alors acquitte, comme
ayant agi sans discernement, mais renvoyé en mai-
son de correction jusqu'à l'âge de vingt-et-un ans.
Depuis, cet enfant a été arrêté et il revenait pour
le fait d'autrefois devant la justice.
De son in' errogatoire, il résultait qu'à la suite du
très léger larcin dont il s'était rendu coupabie, il
avait quitté le domicile de ses parents ou plus exac-
tement de sa mère et du second mari de celle-ci. Il
avait travaillé avec assiduité, comme garçon meu-
nier, chez différents patrons et dans d'assez bonnes
conditions pour meriter de chacun d'eux un certiti-
cat satisfaisant, il s'était suffi, malgré son jeune
âge, pendant près d'une année.
La mère — une femme des Hauts-Pavés — appelée
à l'audiunce pour savoir si elle réclamait son en-
fant, a eu la plus triste attitude.
Erhf à oavoué, sau* ia, moindre expression de re-
gret, qu'après la disparition de son enfant, elle ne
s'était nullement inquiétée de lui et ne l'avait récla-
mé à personne : elle a ajouté qu'elle ne voulait pas
le reprendre.
M. le président du tribunal correctionnel a flétri,
comme elle le méritait, une aussi indigne conduite
et exprimé le regret que la. loi ne permit pas de
punir de pareils parents.
Mais que faire en pareille occurrence ?L'enfant ne
pouvant être ni puni de prison, à raison de son âge,
ni rendu à sa famille qui n'en voulait pas, le tri-
bunal a maintenu sa décision première et renvoyé
en maison de correction ce jeune enfant.
,N'cst-ce pas dommage qu'il n'y ait pns eu d'autre
solution possible? et n'y aura-t-il pas quelque âme
charitable, quelque patron bienfaisant qui. en of-
frant de prendre cet enfant à son service et sous sa
surveillance, le retirera d'un milieu où il ne saurait
que se pervertir?
« Que faire?» demande le journal.
« N'y aura-il pas quelque âme chari-
table ? j)
Voilà longtemps que la question se
pose ; l'âme charitable peut se présen-
ter ; mais la société ne doit pas compter
sur ces hasards.
Nous allons apprendre à notre con-
frère de la Loire-Inférieure, que la so-
lution dépend, tout simplement, du con-
seil général de son département.
A Paris, la question se posait aussi,
et dans de plus larges proportions. Le
conseil général de la Seine n'a pas at-
tendu de législation nouvelle.
P Le 25. août 1880, la direction de l'as-
.Ë tance publique, répondant aux vœux
jiu conseil général, soumettait - au - préfet
de la Seine, un rapport exposant le plan
d'organisation dè ce service. L'imma-
triculation du premier enfant de cette
catégorie avait lieu le 1er janvier >881.
Maintenant, il compte plus de 2,500 en-
fants arrachés à la police correction-
nelle, à la maison de correction, aux
brutalités ou à l'immoralité de leurs pa-
rents, en train de devenir des citoyens
utiles au lieu de mûrir pour la prison
ou le bagne. -
Le projet a reçu la sanction de l'ex-
périence; les autres départements n'ont
qu'à examiner ce qui a été fait à Paris,
et à suivre. Au lieu de se borner à des
vœux platoniques, il faut que les jour-
naux locaux, les électeurs, poussent
leurs conseils genéraux respectifs à
entrer dans cette voie.
Mais ne nous dissimulons pas l'obsta-
cle. Nous avons encore si peu de senti-
ment et de solidarité, que la grande ma-
jorité des conseils généraux trouvent
qu'ils dépensent toujours trop pour les
enfants assistés et les aliénés. N'avons-
nous pas eu cet exemple de départe-
ments riches qui, en dépit, de la loi de
1838, au lieu d'avoir un asile, adju-
geaient leurs fous au rabais à l'asile'de
Clermont ?
De même, ne citions-nous pas récem-
ment l'exemple de malheureux enfants
qui avaient été repoussés dans leur dé-
partement, et qui auraient été voués à
la mort, si l'Assistance publique de Pa-
ris ne les avait pas recueillis, mettant
la conservation de l'enfant au-dessus de
la barbarie légale du domicile de se-
cours, derrière iaqfuéllelSe retranchaient
si volontiers les administrations de
leurs départements respectifs.
Et pourquoi ces barbaries ? Les pri-
sons ne coûtent-elles pas plus cher que
l'éducation de l'enfant ? Chaque enfant
moralement abandonné ne revient à
l'Assistance publique qu'à 110 ou 120
francs par an. Des donateurs, pour une
somme de près de 250,000 francs, sont
venus au secours de cette œuvre.
Les élèves du collège Chaptal et du
lycée Charlemagne donnent chaque an-
née un exemple touchant de solidarité
entre la jeunesse heureuse et la jeu-
nesse misérable. En 1883, la somme que
les élèves de chacun de ces établisse-
ments ont prélevée sur leurs menus
plaisirs, au profit de l'œuvre du dépar-
tement de la Seine, a été de 1,500 francs.
Ce service n'a point exigé de grandes
dépenses de construction. Presque tous
ces enfants sont placés chez des parti-
culiers, dans des usines, dans des ate-
liers, dans des manufactures où ils de-
viennent les compagnons, les camarades
des autres enfants, où ils vivent de la
vie commune. Les autres sont placés à
l'école d'ébénisterie de Montévrain et à
l'école d'horticulture de Villepreux. —
Rien de M. Bonjean.
La ville de Paris n'a pas laissé au
budget départemental la charge entière
de cette dépense et y a concouru par
une large subvention. Les grandes vil-
les des départements doivent suivre cet
exemple ët pousseï-Teïïrs conseils géné-
raux respectifs à établir des services de
moràlement abandonnés.
Cette réforme sociale si importante
qui modifie les racines de la société, qui
garantit son avenir, peut être accomplie
par chaque département, du jour au
lendemain. Il faut que les conseils mu-
nicipaux et départementaux sachentuser
des libertés qu'ils ont, afin de prouver
par les œuvres réalisées, qu'ils sont di-
gnes de celles qu'ils réclament.
lia» ——
.A.TJ TOXTKLI3ST
Retour de M. Harmand
M. le ministre de la marine a reçu du gouverneur
de la Cochinchine les dépêches suivantes :
Saigon, 5 janvier, 9 h. 45 soir.
MM. Harmand et Tricou ont quitté ensemble Hai-
Phong. M. Tricou est parti de Tourane, sur l'Alouette
pour arriver à Thuan-An et à Hué.
M. Harmand est arrivé à Saïgon ; il part aujour-
d'hui pour la France avec ua aide. de camp et deux
secrétaires.
Le traité de Hué
Saïgon, 6 janvier, 5 h., matin.
La canonnière l'Aspic, venant de Tourane, arrivé
avec un télégramme de M. Tricou au président du
conseil, annonçant la reconnaissance sans aucune
restriction, par le nouveau roi, du traité du 25 août.
Cette nouvelle enlève tout intérêt au télégramme
que je vous annonçais par lequel j'avais l'intention
de vous rendre compte, d'une manière détaillée,
que dans ses lettres des 16 et 21 novembre, M. de
Champ eaux exposait qu'il avait conjuré les consé-
quences de la mort de Hiep-Hoa, que sa situation
vis-à-vis la cour de Hué était aussi satisfaisante
(Sta? possible, et que les négociations engagées par
lui avaient eu les résultats suivants :
Maintien du traité dans son intégrité ;
t Affichage du traité par les soins du conseil de
régence ;
Peines sévères obtenues contre les
mandarins les plus hostiles à notre
cause et contre les assassins des
chrétiens.
Poste de la légation augmenté de 100 hommes.
Le résident à Hué ajoutait que le conseil de ré-
gence était même disposé à consentir à l'occupa-
tion de la citadelle de Hué.
Que viennent faire les chrétiens en cette af-
faire? L'expédition du Tonkin ne serait-elle
donc qu'une CROISADE DÉGUISÉE 'f
Dans la soirée le gouvernement commu-
nique à la presse par l'Agence Havas la dé-
pêche suivante :
Le président du conseil, ministre des affaires
étrangères, a reçu de M. Tricou, par la voie de
Saïgon, la dépêche suivante, datée de Hué,
1" janvier :
« La nouvelle cour de Hué vient de me remettre
la déclaration suivante :
« A M. Tricou, ministre plénipotentiaire, envoyé de
la République française près S. M. le roi d'An-
nam.
La cour de Hué et le gouvernement d'Annam
Il déclarent officiellement, par les présentes, donner
Il leur adhésion pleine et entiere au traité du
» 25 août 1883, s'en remettant au bon vouloir de la
» République quant aux adoucissements qui pour-
n raient y être ultérieurement apportés. Le texte
» français seulferafoi.
D Fait au palais de Hué. le 1er janvier 1884.
» Le sceau royal a été apposé sur la présente dé-
claration. 11
».Je serai reçu demain en audience solennelle pa?
le roi, entouré do son conseil de régence. Je ne sau-
rais trop louer le tact, l'habileté et le courage dont
a fait preuve notre résident, M. de Champeaux, dans
des circonstances aussi critiques.
11 Signé : TRICOU. «
On se rappellequ6 ce fameux traité de Hué,
contient des conditions tellement onéreuses
pour la France que, jusqu'à présent, M. J.
Ferry n'a pas osé le prés nter à la ratification
des Chambres, comme le lui ordonne la cons-
titution, et bien qu'il ait été conclu depuis'
cinq mois.
La France et la Chine.
L'Agence Havas nous communique la dépêche sui-
vante :
Londres, 5 janvier.
La Pall Mail Gazette de ce soir apprend que le
marquis de Tseng n'a adressé aucune communica-
tion au gouvernement français depuis la prise do
Son-Tay, et qu'il n'échangera aucune correspon-
dance
dance avec le cabinet français tant qu'il n'aura pas
reçu de nouvelles instructions. Il est prématuré de'
croire que la prise de Son-Tay sera acceptée comme
un fait accompli, ou que la conduite de la Chine à
ce sujet sera telle qu'elle encouragera le gouver-
nement français à avancer sur Bac-Ninh. Le journal
ajoute que les menaces de la presse française con-
cernant une indemnité n'empêcheront pas. la Chine
de revendiquer ses droits. -'
La « Carabine »
On écrit de Haï-Phong à l'Agence Havas, le 21 no-
vembre 1883 :
Je viens de vous envoyer une dépêche vous an-
nonçant l'attaque de Haï-Dzuong. C'est dans la ma-
tinée du 17, à cinq heures, que le feu a commencé.
L'ennemi avait profité de la nuit pour entrer dans
la partie non occupée de la citadelle. Le réduit do
la citadelle était occupé par trente honunes d'infan-
terie et une centaine de miliciens tonkinois, le tout
commandé par le sergent-major Geschvind. Le res-
tant des troupes, une centaine de Français et une
cinquantaine d'Annamites commandes par le capi-
taine Bertin et un lieutenant occupaient un fortin
qui défend la ville. La canonnière la Carabine, qui
était arrivée la veille, était mouillée dans le Taï-
Bigne. Les bandes ennemies au nombre de 3,000
environ, concentrèrent tous leurs efforts contre lo
réduit de la citadelle empêchant, la garnison du
fort de sortir et de porter secours à leurs cama-
rades.
C'est alors que la Carabine s'engfrgea résolument
dans le petit arroyo qui mène à la forteresse et
s'embossa juste en face de la rue qui y conduit et
soutint pendant trois quarts d'heure le feu do
l'ennemi.
Ne se voyant point appuyee par la troupe qui
n'avait pu se livrer passage par la ville elle battit
en retraite non sans avoir causé beaucoup de mal à
l'ennemi.
La Carabine avait plus de quatre cents traces de
balles à son bord, la cheminée était percée en dix-
sept endroits, les tôles de svs et huit millimètres
étaient traversées et huit hommes de l'équipage
étaient blessés. La conduite du capitaine, M. Bauer
lieutenant de vaisseau, a été admirable. Ces!
grâce à son courage et à son sang-froid que la ca-
nonnière put résister contre un ennemi auss.
acharné que nombreux.
Ce n'est que dans l'après-midi, à l'arrivée dl
Lynx, que les bandes se sauvèrent en nous aban-
donnant un petit canon qu'ils n'avaient pas eu le
temps d'emporter.
Nous avons eu 4 TonkSnois tués et 4 blessés et
18 Français blessés. Les pertes de l'ennemi sont
évaluées à environ 400 hommes. Le combat a duré
neuf heures.
Il v avait notamment parmi les bandes des sol-
dats réguliers chinois parfaitement reconnaissables
à leurs vêtements, ils étaient très bien armés et se
battaient bien
L'honneur de la journée revient surtout à M. Bauer
et au sergept-major Geschvind (deux Alsaciens) qui
ont montre un courage au-dessus de tout éloge.
La ville de Haï-Dzuong est à peu près détruite com-
plètement, des marins venus d'Hanoï en occupent
la citadelle.
Quang-Yen a été également attaqué sans succès
par une bande, le mandarin a été fait prisonnier
comme celui de Haï-Dzuong.
FEUILLETON DU 8 JANVIER 1884
<
, 66 -
Le Point Noir
PREMIÈRE PARTIE
LE TRONC DES PAUVRES
XLIII
Re, our inattendu
, (Suite.
, Le sort avait ainsi disposé les choses
que Raoul de Fernic eut dû avoir pour
compagne une femme telle que Fernande,
et que Paul de Richemond était le mari
convenable à Diane. -
Leurs deux tempéraments cadraient.
Elle refit trompé, à la vérité, comme elle
eût trompé tout mari, et comme toute
femme, soumise à l'éducation qu'il avait
inculquée à Fernande, eût trompé le
! vicomte de Richemond.
Mais, pour lui, c'était pain bénit; — il
ne méritait pas mieux !
Depuis son retour, Raoul était retombé
dans une crise de -' défiance plus aiguë, --
justifiée par les diverses circonstances que
nous avons racontées.
Aussi était-ce avec une sorte d'angoisse,
une émotion cruelle, non avec joie, qu'il
revenait ainsi chez lui, à l'improviste.
Il avait comme le pressentiment de
quelque affreuse surprise, de quelque ter-
rible découverte.
A huit heures moins vingt, il arrivait
rue Bonaparte, où il apprenait que la
comtesse venait de partir pour aller à
l'Opéra.
- Seule ? — demanda-t-il.
- Madame n'a rien dit.
Le comte ne voulut pas questionner da-
vantage et remonta dans son appartement.
Un trouble étrange l'agitait, cependant.
Qu'y avait-il d'étonnant à ce que la
comtesse fût allée dans sa loge à l'Opéra ?
Rien.
Et, pourtant, il n'y put tenir.
En un un tour de main, il eut quitté
son vêtement de voyage, revêtu l'habit
noir et la cravate blanche de rigueur.
Le bruit d'une voiture entrant dans la
cour, attira tout à coup son attention.
— Qu'est-ce donc ? — demanda-t-il à son
valet de chambre qui lui passait un par-
dessus.
— C'est le coupé qui rentre,- fit ce der-
après un coup d'œil jeté à la fenêtre.
nier, Allez dire au cocher de ne point dé-
—
teler.
Ginçj minute plus tard, il roulait vers
la place de l'Opéra.
— Vous attendrez à la sortie, — ordon-
na-t-il au cocher, et il s'élança vers l'en-
trée, où, s'étant fait reconnaître au con-
trôle, au lieu de rejoindre la comtesse
dans sa loge, il vint s'embusquer à l'en-
trée des fauteuils d'orchestre.
Là, il ne quitta plus du regard sa fem-
me, dont le manège insignifiant ou natu-
rel pour des indifférents,lui sembla cacher
quelque chose d'anormal.
- Pourquoi était-elle venue seule, d'ail-
leurs, sans se faire accompagner, tout au
moins, de son gendre ou de sa fille ?
Pourquoi affectait-elle de se montrer
avec ostentation, puis de se dissimuler
alternativement?
Il le comprit, lorsqu'à un jet de lumière,
il devina qu'elle ouvrait sa porte et sor-
tait.
11 se lança aussitôt sur ses traces, pres-
que sans réflexion, emporté par la jalousie
incessante qui le mordait au cœur.
Rien ne lui eût été plus facile que de
sauter dans son coupé, dont l'excellent
cheval eût suivi sans peine la voiture qui
emportait Diane.
Mais c'eût été mettre ses gens dans la
confidence de ses- soupçons, compromettre
à jamais l'honneur de celle qui portait son
nom.
Et à cela, il n'eût consenti à aucun prix.
On connaît l'accident survenu à son vé-
hicule.
En sautant hors de la voiture, après
avoir payé le cocher, il avait disparu,
courant, presque dans l'espoir insensé de
retrouver le fiacre jaune ou il savait qu'é-
tait sa femme.
XLIV
Rue du' Puis de l'Hermite
Après avoir suivi la rue, le comte tra-
versa le pont.
Plusieurs fiacres roulaient devant lui.
Lequel était celui de Diane?
Celui-là, il l'avait remarqué, portait des
lanternes rouges.
Il en aperçut un, ayant de semblables
lanternes, qui s'engageait dans la rue des
Fossés- Saint-Bernard.
Il s'élança pour le rattrapper, s'inquié-
tant peu, à ce moment d'exaltation, des
regards curieux dont on accompagnait cet
homme de grand air, marchant comme un
fou, courant plutôt.
Mais le fiacre le gagnait de vitesse.
Lorsque le comte parvint à l'angle de là
rue de la Halle-aux-Vins, le fiacre aux
lanternes rouges était déjà au tournant de
la rue des Fossés-Saint-Victor et de la rue
de Jussieu.
Quand le comte arriva, à son tour, à
rentrée de cette dernière rue, le fiacre
avait disparu.
Il s'arrêta, haletant, épuisé, frappa. de
son pied le sol avec colère^ - —
ADMINISTRATION. RÉDACTION & ANNONCES
A PARIS
1. iS — Hue Richep — t 8
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TROIS MOIS. 5 FR.
SIX XOIS g FR.
UN an 18 ra.
JOURNAL POLITIQUE
QUOTIDIEN
DN NUMÉRO: 5 CENTIMES
ABONNEMENTS
DÉPARTEMENTS
TROIS MOIS. 6 FR.
SIX MOIS. 12 FR
UN AN. 24 FR,
HUITIÈME ANNÉE.-NUMÉRO 2453
Mardi 8 Janvier 1884
(22 nivôse an 91)
Nous avons souvent parlé des barba-
ries légales que recouvrent les appa-
rences de notre civilisation. Derrière
des façades brillantes, il y a encore d'é-
pouvantables barbaries, comme celles
que la Lanterne a dévoilées dans ses
campagnes contre la Préfecture de po-
lice et contre les asiles d'aliénés.
Le grand ministère, pour remédier
aux plaies sociales, n'a eu qu'une idée :
— Faire une loi sur les récidivistes.
C'est simple, ce n'est pas compliqué. Il
ne s'est pas demandé auparavant s'il ne
faudrait point tout d'anord prévenir
l'éclosion du criminel.
Voici un fait que racontent les jour-
naux de Nantes, le pays de M. Wal-
deck-Rousseau :
Un jeune enfant, qui, commettant une gaminerie
plutôt qu'un abus de confiance, avait gardé pour lui
une pièce de cinq francs appartenant à une de ses
voisines, avait été, il y a près d'un an, jugé par dé-
faut. Le tribunal l'avait alors acquitte, comme
ayant agi sans discernement, mais renvoyé en mai-
son de correction jusqu'à l'âge de vingt-et-un ans.
Depuis, cet enfant a été arrêté et il revenait pour
le fait d'autrefois devant la justice.
De son in' errogatoire, il résultait qu'à la suite du
très léger larcin dont il s'était rendu coupabie, il
avait quitté le domicile de ses parents ou plus exac-
tement de sa mère et du second mari de celle-ci. Il
avait travaillé avec assiduité, comme garçon meu-
nier, chez différents patrons et dans d'assez bonnes
conditions pour meriter de chacun d'eux un certiti-
cat satisfaisant, il s'était suffi, malgré son jeune
âge, pendant près d'une année.
La mère — une femme des Hauts-Pavés — appelée
à l'audiunce pour savoir si elle réclamait son en-
fant, a eu la plus triste attitude.
Erhf à oavoué, sau* ia, moindre expression de re-
gret, qu'après la disparition de son enfant, elle ne
s'était nullement inquiétée de lui et ne l'avait récla-
mé à personne : elle a ajouté qu'elle ne voulait pas
le reprendre.
M. le président du tribunal correctionnel a flétri,
comme elle le méritait, une aussi indigne conduite
et exprimé le regret que la. loi ne permit pas de
punir de pareils parents.
Mais que faire en pareille occurrence ?L'enfant ne
pouvant être ni puni de prison, à raison de son âge,
ni rendu à sa famille qui n'en voulait pas, le tri-
bunal a maintenu sa décision première et renvoyé
en maison de correction ce jeune enfant.
,N'cst-ce pas dommage qu'il n'y ait pns eu d'autre
solution possible? et n'y aura-t-il pas quelque âme
charitable, quelque patron bienfaisant qui. en of-
frant de prendre cet enfant à son service et sous sa
surveillance, le retirera d'un milieu où il ne saurait
que se pervertir?
« Que faire?» demande le journal.
« N'y aura-il pas quelque âme chari-
table ? j)
Voilà longtemps que la question se
pose ; l'âme charitable peut se présen-
ter ; mais la société ne doit pas compter
sur ces hasards.
Nous allons apprendre à notre con-
frère de la Loire-Inférieure, que la so-
lution dépend, tout simplement, du con-
seil général de son département.
A Paris, la question se posait aussi,
et dans de plus larges proportions. Le
conseil général de la Seine n'a pas at-
tendu de législation nouvelle.
P Le 25. août 1880, la direction de l'as-
.Ë tance publique, répondant aux vœux
jiu conseil général, soumettait - au - préfet
de la Seine, un rapport exposant le plan
d'organisation dè ce service. L'imma-
triculation du premier enfant de cette
catégorie avait lieu le 1er janvier >881.
Maintenant, il compte plus de 2,500 en-
fants arrachés à la police correction-
nelle, à la maison de correction, aux
brutalités ou à l'immoralité de leurs pa-
rents, en train de devenir des citoyens
utiles au lieu de mûrir pour la prison
ou le bagne. -
Le projet a reçu la sanction de l'ex-
périence; les autres départements n'ont
qu'à examiner ce qui a été fait à Paris,
et à suivre. Au lieu de se borner à des
vœux platoniques, il faut que les jour-
naux locaux, les électeurs, poussent
leurs conseils genéraux respectifs à
entrer dans cette voie.
Mais ne nous dissimulons pas l'obsta-
cle. Nous avons encore si peu de senti-
ment et de solidarité, que la grande ma-
jorité des conseils généraux trouvent
qu'ils dépensent toujours trop pour les
enfants assistés et les aliénés. N'avons-
nous pas eu cet exemple de départe-
ments riches qui, en dépit, de la loi de
1838, au lieu d'avoir un asile, adju-
geaient leurs fous au rabais à l'asile'de
Clermont ?
De même, ne citions-nous pas récem-
ment l'exemple de malheureux enfants
qui avaient été repoussés dans leur dé-
partement, et qui auraient été voués à
la mort, si l'Assistance publique de Pa-
ris ne les avait pas recueillis, mettant
la conservation de l'enfant au-dessus de
la barbarie légale du domicile de se-
cours, derrière iaqfuéllelSe retranchaient
si volontiers les administrations de
leurs départements respectifs.
Et pourquoi ces barbaries ? Les pri-
sons ne coûtent-elles pas plus cher que
l'éducation de l'enfant ? Chaque enfant
moralement abandonné ne revient à
l'Assistance publique qu'à 110 ou 120
francs par an. Des donateurs, pour une
somme de près de 250,000 francs, sont
venus au secours de cette œuvre.
Les élèves du collège Chaptal et du
lycée Charlemagne donnent chaque an-
née un exemple touchant de solidarité
entre la jeunesse heureuse et la jeu-
nesse misérable. En 1883, la somme que
les élèves de chacun de ces établisse-
ments ont prélevée sur leurs menus
plaisirs, au profit de l'œuvre du dépar-
tement de la Seine, a été de 1,500 francs.
Ce service n'a point exigé de grandes
dépenses de construction. Presque tous
ces enfants sont placés chez des parti-
culiers, dans des usines, dans des ate-
liers, dans des manufactures où ils de-
viennent les compagnons, les camarades
des autres enfants, où ils vivent de la
vie commune. Les autres sont placés à
l'école d'ébénisterie de Montévrain et à
l'école d'horticulture de Villepreux. —
Rien de M. Bonjean.
La ville de Paris n'a pas laissé au
budget départemental la charge entière
de cette dépense et y a concouru par
une large subvention. Les grandes vil-
les des départements doivent suivre cet
exemple ët pousseï-Teïïrs conseils géné-
raux respectifs à établir des services de
moràlement abandonnés.
Cette réforme sociale si importante
qui modifie les racines de la société, qui
garantit son avenir, peut être accomplie
par chaque département, du jour au
lendemain. Il faut que les conseils mu-
nicipaux et départementaux sachentuser
des libertés qu'ils ont, afin de prouver
par les œuvres réalisées, qu'ils sont di-
gnes de celles qu'ils réclament.
lia» ——
.A.TJ TOXTKLI3ST
Retour de M. Harmand
M. le ministre de la marine a reçu du gouverneur
de la Cochinchine les dépêches suivantes :
Saigon, 5 janvier, 9 h. 45 soir.
MM. Harmand et Tricou ont quitté ensemble Hai-
Phong. M. Tricou est parti de Tourane, sur l'Alouette
pour arriver à Thuan-An et à Hué.
M. Harmand est arrivé à Saïgon ; il part aujour-
d'hui pour la France avec ua aide. de camp et deux
secrétaires.
Le traité de Hué
Saïgon, 6 janvier, 5 h., matin.
La canonnière l'Aspic, venant de Tourane, arrivé
avec un télégramme de M. Tricou au président du
conseil, annonçant la reconnaissance sans aucune
restriction, par le nouveau roi, du traité du 25 août.
Cette nouvelle enlève tout intérêt au télégramme
que je vous annonçais par lequel j'avais l'intention
de vous rendre compte, d'une manière détaillée,
que dans ses lettres des 16 et 21 novembre, M. de
Champ eaux exposait qu'il avait conjuré les consé-
quences de la mort de Hiep-Hoa, que sa situation
vis-à-vis la cour de Hué était aussi satisfaisante
(Sta? possible, et que les négociations engagées par
lui avaient eu les résultats suivants :
Maintien du traité dans son intégrité ;
t Affichage du traité par les soins du conseil de
régence ;
Peines sévères obtenues contre les
mandarins les plus hostiles à notre
cause et contre les assassins des
chrétiens.
Poste de la légation augmenté de 100 hommes.
Le résident à Hué ajoutait que le conseil de ré-
gence était même disposé à consentir à l'occupa-
tion de la citadelle de Hué.
Que viennent faire les chrétiens en cette af-
faire? L'expédition du Tonkin ne serait-elle
donc qu'une CROISADE DÉGUISÉE 'f
Dans la soirée le gouvernement commu-
nique à la presse par l'Agence Havas la dé-
pêche suivante :
Le président du conseil, ministre des affaires
étrangères, a reçu de M. Tricou, par la voie de
Saïgon, la dépêche suivante, datée de Hué,
1" janvier :
« La nouvelle cour de Hué vient de me remettre
la déclaration suivante :
« A M. Tricou, ministre plénipotentiaire, envoyé de
la République française près S. M. le roi d'An-
nam.
La cour de Hué et le gouvernement d'Annam
Il déclarent officiellement, par les présentes, donner
Il leur adhésion pleine et entiere au traité du
» 25 août 1883, s'en remettant au bon vouloir de la
» République quant aux adoucissements qui pour-
n raient y être ultérieurement apportés. Le texte
» français seulferafoi.
D Fait au palais de Hué. le 1er janvier 1884.
» Le sceau royal a été apposé sur la présente dé-
claration. 11
».Je serai reçu demain en audience solennelle pa?
le roi, entouré do son conseil de régence. Je ne sau-
rais trop louer le tact, l'habileté et le courage dont
a fait preuve notre résident, M. de Champeaux, dans
des circonstances aussi critiques.
11 Signé : TRICOU. «
On se rappellequ6 ce fameux traité de Hué,
contient des conditions tellement onéreuses
pour la France que, jusqu'à présent, M. J.
Ferry n'a pas osé le prés nter à la ratification
des Chambres, comme le lui ordonne la cons-
titution, et bien qu'il ait été conclu depuis'
cinq mois.
La France et la Chine.
L'Agence Havas nous communique la dépêche sui-
vante :
Londres, 5 janvier.
La Pall Mail Gazette de ce soir apprend que le
marquis de Tseng n'a adressé aucune communica-
tion au gouvernement français depuis la prise do
Son-Tay, et qu'il n'échangera aucune correspon-
dance
dance avec le cabinet français tant qu'il n'aura pas
reçu de nouvelles instructions. Il est prématuré de'
croire que la prise de Son-Tay sera acceptée comme
un fait accompli, ou que la conduite de la Chine à
ce sujet sera telle qu'elle encouragera le gouver-
nement français à avancer sur Bac-Ninh. Le journal
ajoute que les menaces de la presse française con-
cernant une indemnité n'empêcheront pas. la Chine
de revendiquer ses droits. -'
La « Carabine »
On écrit de Haï-Phong à l'Agence Havas, le 21 no-
vembre 1883 :
Je viens de vous envoyer une dépêche vous an-
nonçant l'attaque de Haï-Dzuong. C'est dans la ma-
tinée du 17, à cinq heures, que le feu a commencé.
L'ennemi avait profité de la nuit pour entrer dans
la partie non occupée de la citadelle. Le réduit do
la citadelle était occupé par trente honunes d'infan-
terie et une centaine de miliciens tonkinois, le tout
commandé par le sergent-major Geschvind. Le res-
tant des troupes, une centaine de Français et une
cinquantaine d'Annamites commandes par le capi-
taine Bertin et un lieutenant occupaient un fortin
qui défend la ville. La canonnière la Carabine, qui
était arrivée la veille, était mouillée dans le Taï-
Bigne. Les bandes ennemies au nombre de 3,000
environ, concentrèrent tous leurs efforts contre lo
réduit de la citadelle empêchant, la garnison du
fort de sortir et de porter secours à leurs cama-
rades.
C'est alors que la Carabine s'engfrgea résolument
dans le petit arroyo qui mène à la forteresse et
s'embossa juste en face de la rue qui y conduit et
soutint pendant trois quarts d'heure le feu do
l'ennemi.
Ne se voyant point appuyee par la troupe qui
n'avait pu se livrer passage par la ville elle battit
en retraite non sans avoir causé beaucoup de mal à
l'ennemi.
La Carabine avait plus de quatre cents traces de
balles à son bord, la cheminée était percée en dix-
sept endroits, les tôles de svs et huit millimètres
étaient traversées et huit hommes de l'équipage
étaient blessés. La conduite du capitaine, M. Bauer
lieutenant de vaisseau, a été admirable. Ces!
grâce à son courage et à son sang-froid que la ca-
nonnière put résister contre un ennemi auss.
acharné que nombreux.
Ce n'est que dans l'après-midi, à l'arrivée dl
Lynx, que les bandes se sauvèrent en nous aban-
donnant un petit canon qu'ils n'avaient pas eu le
temps d'emporter.
Nous avons eu 4 TonkSnois tués et 4 blessés et
18 Français blessés. Les pertes de l'ennemi sont
évaluées à environ 400 hommes. Le combat a duré
neuf heures.
Il v avait notamment parmi les bandes des sol-
dats réguliers chinois parfaitement reconnaissables
à leurs vêtements, ils étaient très bien armés et se
battaient bien
L'honneur de la journée revient surtout à M. Bauer
et au sergept-major Geschvind (deux Alsaciens) qui
ont montre un courage au-dessus de tout éloge.
La ville de Haï-Dzuong est à peu près détruite com-
plètement, des marins venus d'Hanoï en occupent
la citadelle.
Quang-Yen a été également attaqué sans succès
par une bande, le mandarin a été fait prisonnier
comme celui de Haï-Dzuong.
FEUILLETON DU 8 JANVIER 1884
<
, 66 -
Le Point Noir
PREMIÈRE PARTIE
LE TRONC DES PAUVRES
XLIII
Re, our inattendu
, (Suite.
, Le sort avait ainsi disposé les choses
que Raoul de Fernic eut dû avoir pour
compagne une femme telle que Fernande,
et que Paul de Richemond était le mari
convenable à Diane. -
Leurs deux tempéraments cadraient.
Elle refit trompé, à la vérité, comme elle
eût trompé tout mari, et comme toute
femme, soumise à l'éducation qu'il avait
inculquée à Fernande, eût trompé le
! vicomte de Richemond.
Mais, pour lui, c'était pain bénit; — il
ne méritait pas mieux !
Depuis son retour, Raoul était retombé
dans une crise de -' défiance plus aiguë, --
justifiée par les diverses circonstances que
nous avons racontées.
Aussi était-ce avec une sorte d'angoisse,
une émotion cruelle, non avec joie, qu'il
revenait ainsi chez lui, à l'improviste.
Il avait comme le pressentiment de
quelque affreuse surprise, de quelque ter-
rible découverte.
A huit heures moins vingt, il arrivait
rue Bonaparte, où il apprenait que la
comtesse venait de partir pour aller à
l'Opéra.
- Seule ? — demanda-t-il.
- Madame n'a rien dit.
Le comte ne voulut pas questionner da-
vantage et remonta dans son appartement.
Un trouble étrange l'agitait, cependant.
Qu'y avait-il d'étonnant à ce que la
comtesse fût allée dans sa loge à l'Opéra ?
Rien.
Et, pourtant, il n'y put tenir.
En un un tour de main, il eut quitté
son vêtement de voyage, revêtu l'habit
noir et la cravate blanche de rigueur.
Le bruit d'une voiture entrant dans la
cour, attira tout à coup son attention.
— Qu'est-ce donc ? — demanda-t-il à son
valet de chambre qui lui passait un par-
dessus.
— C'est le coupé qui rentre,- fit ce der-
après un coup d'œil jeté à la fenêtre.
nier, Allez dire au cocher de ne point dé-
—
teler.
Ginçj minute plus tard, il roulait vers
la place de l'Opéra.
— Vous attendrez à la sortie, — ordon-
na-t-il au cocher, et il s'élança vers l'en-
trée, où, s'étant fait reconnaître au con-
trôle, au lieu de rejoindre la comtesse
dans sa loge, il vint s'embusquer à l'en-
trée des fauteuils d'orchestre.
Là, il ne quitta plus du regard sa fem-
me, dont le manège insignifiant ou natu-
rel pour des indifférents,lui sembla cacher
quelque chose d'anormal.
- Pourquoi était-elle venue seule, d'ail-
leurs, sans se faire accompagner, tout au
moins, de son gendre ou de sa fille ?
Pourquoi affectait-elle de se montrer
avec ostentation, puis de se dissimuler
alternativement?
Il le comprit, lorsqu'à un jet de lumière,
il devina qu'elle ouvrait sa porte et sor-
tait.
11 se lança aussitôt sur ses traces, pres-
que sans réflexion, emporté par la jalousie
incessante qui le mordait au cœur.
Rien ne lui eût été plus facile que de
sauter dans son coupé, dont l'excellent
cheval eût suivi sans peine la voiture qui
emportait Diane.
Mais c'eût été mettre ses gens dans la
confidence de ses- soupçons, compromettre
à jamais l'honneur de celle qui portait son
nom.
Et à cela, il n'eût consenti à aucun prix.
On connaît l'accident survenu à son vé-
hicule.
En sautant hors de la voiture, après
avoir payé le cocher, il avait disparu,
courant, presque dans l'espoir insensé de
retrouver le fiacre jaune ou il savait qu'é-
tait sa femme.
XLIV
Rue du' Puis de l'Hermite
Après avoir suivi la rue, le comte tra-
versa le pont.
Plusieurs fiacres roulaient devant lui.
Lequel était celui de Diane?
Celui-là, il l'avait remarqué, portait des
lanternes rouges.
Il en aperçut un, ayant de semblables
lanternes, qui s'engageait dans la rue des
Fossés- Saint-Bernard.
Il s'élança pour le rattrapper, s'inquié-
tant peu, à ce moment d'exaltation, des
regards curieux dont on accompagnait cet
homme de grand air, marchant comme un
fou, courant plutôt.
Mais le fiacre le gagnait de vitesse.
Lorsque le comte parvint à l'angle de là
rue de la Halle-aux-Vins, le fiacre aux
lanternes rouges était déjà au tournant de
la rue des Fossés-Saint-Victor et de la rue
de Jussieu.
Quand le comte arriva, à son tour, à
rentrée de cette dernière rue, le fiacre
avait disparu.
Il s'arrêta, haletant, épuisé, frappa. de
son pied le sol avec colère^ - —
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