Titre : L'Univers
Éditeur : L'Univers (Paris)
Date d'édition : 1901-02-08
Contributeur : Veuillot, Louis (1813-1883). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, Pierre (1859-1907). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, François (1870-1952). Rédacteur
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 08 février 1901 08 février 1901
Description : 1901/02/08 (Numéro 12042). 1901/02/08 (Numéro 12042).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse Collection numérique : Bibliographie de la presse
Description : Collection numérique : BIPFPIG44 Collection numérique : BIPFPIG44
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7106342
Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/02/2011
"VSsadFedî 8 Février 4Ô01
Edition quotidienne. — 12,042
\fendredj 8 Février 1901
ÉDITION étroïiDDiEinîB
f»ARIS - ÉTRANGER / : i
ïïs dépakl'emen'çs ; . (union postai^',
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. " Six mois..'. Si i »: Î26 50
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Les abonnements partent des. 1 er et 13 de j chaque mois ,,
UN NUMÉRO
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Paris. -, ,.i., "10 cent. i
Départements...., 15 —
BUREAUX Paria,, yjifi XJafcaBtta, 1?
On s'aÊonnë a Rome, place du Gesi, -8
JET
LE MONDE
ÉBFfïOH SEMJ-QOOTIDÏENïsi jg
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Six mois. 10 * 13 »
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L'UNIVERS ne répond pas des manuscrits qui lui sont adressés
ANNONCES
MM. LAGRANGE, CERF et C ie , 6, place de la Bourse
PAÏttS, 7 FÉVRIER 1SG1
SOMMAIRE
Les « Monita sé
créta.............
La guerre sud-afri
caine
Leur loyauté
Çà et là : As-tu vu
la ferme?...
Au Sénat...........
Le 25 e anniversaire
de l'Institut catho
lique .......
Les conférences, li
bres de l'Institut
catholique
Mélanges oratoires.
E ugène T avbrnier.
F. L.
E. V.
G. d' A zambuja.
J. M antenay.
F rançois V euillot.
E douard A lexandre
A lbert L epitre.
Bulletin. — L'élection sénatoriale de la
Somme. — Un sujet d'étonnement. — Le
port de la soutane. — La lettre de S-
S. Léon XIII et l'épiscopat. — Les céré-
mies funèbres à Lille. — Informations po
litiques et parlementaires, r— Mouve
ment judiciaire. ~ t Le mariage de la reine
de Hollande. — La guerre du Transvaal.
— En Chine. — Dépêches de l'étranger.
— A travers la presse. — Chronique. —
Lettres, sciences et arts. — : A l'Institut
catholique de Toulouse. — A la « Sehola
cantorum ». — La question ouvrière. —
— Les grèves ; — Echos de partout. —
Nécrologie. — Les anarchistes. — Tribu
naux, — Nouvelles diverses. — Calen
drier. — Bourse et bulletin financier. —
Dernière heure.
LES MITA SECRETA
Des épaves pourries flottent sur
l'océan à la dérive, "jouet des cou
rants et de la tempête. Parfois, ra
menées vers la route que suivent
les navires elles les heurtent dans
l'obscurité, causant des avaries ou
bien des catastrophes.
La mer humaine roule de pareils
débris, dont elle fait des instruments
sinistres, dans ses jours de fureur.
Ainsi, de temps en temps, reparais
sent les Momta sécréta, brûlot in
fâme, éteint depuis près de trois
siècles et que des bandits ou des
fous essaient de rallumer.
Les voici encore, réédités, rafraî
chis, annoncés bruyamment par la
Lanterne. Un autre journal, assez
•modéré, qui se flatte d'être impar
tial, : accorde sa publicité à cette
manifestation de naine et de sot
tise.
Il y a cinquante ans que le même
accès derageéclatait en pleinmilieu
de la bourgeoisie raffinée, glo
rieuse et triomphante. Alors, des
feuilles littéraires, universitaires,
académiques, s'abaissaient à repro
duire la prose d'Eugène Sue. Jules
Janin disait que ces histoires sont
en littérature ce qu'est, dans les
compositions de Teniers, l'homme
tourné contre la muraille. La bour
geoisie se passionnait pour cette
saleté, comme auparavant les gen
tilshommes entraînés par Pombal,
Tanucci, d'Aranda, Choiseul,
Les puritains anglais martyrisaient
les Jésuites par la plume et par le
fer. On a vu là-bas subsister long
temps d'ignobles pamphlets tels
que Les amours du Père Peters, con
fesseur de Jacques II. Ce fut un évé
nement, au début de ce siècle, lors
que le bon Sydney Smith osa railler
la conduite féroce de ses contempo
rains, demevirés obsédés par le ro
man de la Conspiration des poudres.
Dans un volume grave et charmant
(L'Inquiétude religieuse), dont nous
préférerions bien nous occuper au
lieu de parler des Monita sécréta,
un Jésuite, le Père Bremond, dé
peint l'état d'esprit que tant de
mensonges avaient créé. Entête
ment rebelle, qui paraît invincible
et qui semble fait pour mettre à une
épreuve suprême la foi dans le bien,
le courage et la persévérance.
Pourtant, malgré la collaboration
des libraires et des fanatiques, on
se fie moins qu'autrefois aux his
toires mensongères ; et certaine
ment beaucoup de libres-penseurs
invétérés n'ont pas été très surpris
d'apprendre ces joursrd, par un
article du Gaulois, que les fameuses
assertions scandaleuses, rajeunies
soudain pour notre public, portent
d'un bout à l'autre le signe vengeur
qui marque le faux.
Cet article très précis, très bien
fait, rappelle l'histoire des Monita
sécréta, édités d'abord à Cracovie
en 1612, oeuvre de Jawrowski, jé
suite polonais chassé par ses frè-
pps Le Gaulois mentionne le juge
ment du Dictionnaire des anonymes
et des pseudonymes où Barbier qua
lifie les Monita de recueil apocry
phe. IL note la réfutation faite en
1618par le P. Gretser, la flétrissure
infligée par la Congrégation de l'In
dex, etc. Qn avait ait que le manus
crit authentique se trouvait à Pa-
derborn, puis à Bruxelles, puis ail
leurs : on ne l'a trouvé nulle part.
C'est un faux insaisissable.
Il est à remarquer que M. Trouil-
lot, lui-même, n'a pas osé en parler
dans le discours où il a dit tant de
choses ridicules.
Il faut descendre jusqu'à la Lan
terne, c'est-à-dire en général jus
qu'au public le plus abaissé, pour
trouver des gens qui croient ces
choses-là ; et encorè- peut-être' n'y ;
croient-ils pas complètement. L'es-
sentiôl, ù leur, goût, est de possé
der des prétextes de dénoncer et de
haïr. Que les accusations amonce
lées recouvrent un amas de men
songes, ils en ont quelque soupçon ;
mais puisque l'arme est utile, ils
s'en servent, en invoquant la
loyauté !
Nous avons vu un journal protes
tant, l 'Eglise libre, faire cet aveu
avec la candeur d'un épileptique.
Un jour que nous voulions lui faire
honte d'en être encore aux imagi
nations du Juif-Errant, cette feuille
répondit qu'elle éprouvait de la re
connaissance pour un roman qui
avait contribué à former l'opinion
moderne. Eugène Sue demeure un
des hommes envers qui le protes
tantisme se sent un devoir de gra
titude. Combien de bandits sont , à
l'origine de la Réforme !
Passion du lucre, amour de la
basse gloriole, folie de haine, ces
éléments do complicité se cherchent
toujours et se rencontrent souvent.
Parfois un honnête homme suffit
pour les mettre en déroute.
Paul Féval racontait que dans sa
jeunesse, mais lorsque la célébrité
lui était venue déjà, il fat itiis en
rapports avec un libraire qui avait
envie de lancer quelque grande en
treprise. Les Jésuites se trouvaient
le point de mire des fureurs. Le
marchand de papier oherchait un
romancier doué d'imagination. On
lui indiqua Féval, qui se sentait
plein d'entrain, mais qui se déclara
dépourvu d'idées sur ce sujet. Une
bibliothèque, ramassée un peu par
tout, fut constituée pour permettre
au futur auteur du pamphlet de s'ap
provisionner et dese tracer un plan.
Au bout d'un mois, Féval fut
invité à commencer la besogne.
Afin de le stimuler, le libraire lui
disait :— Je ferai cinquante mille i
francs de réclame ! -r- C'était pour 1
l'époque un très gros chiffre. Mais
Féval donna une réponse inatten
due i — Je ne connaissais pas les
Jésuites. Tout ce que j'ai lu me
prouve que ce sont de très braves
gens. Je ne veux pas les attaquer.
Au contraire, j'aurais envie de les
défendre. — Interloqué, le libraire
ne tarda pas à rentrer en pqsses-
sion ele ses esprits, où le sens prati
que dominait exclusivement. Re
tourné soudain, il dit au jeune au
teur : — Moi, ça m'est égal ; et même
je crois que votre idée vaudrait
'mieux encore. Au lieu d'abimer
les Jésuites, écrivez le roman en
leur faveur. Je vous avais promis
cinquante mille francs de réclame :
j'en ferai cent mille.
Mais il y a des bêtes venimeuses,
folles et féroces comme Quinet, le
continuateur de Marnix, C 7 est dans
le prospectus annonçant la réédition
des œuvres de Marnix, sous l'égide
de Quinet, que se trouve la fameuse
formule, employée d'instinct même
par les pamphlétaires qui n'ont pas
eu le courage de lire d'une façon
suivie Marnix ou Quinet : « Il s'agit
« non seulement de réfuter le pa-
« pisme, mais de Yextirper ; non
« seulement de l'extirper, mais de
« le déshonorer ; non seulement de
« le déshonorer, mais, Gomme le
« voulait - l'ancienne loi germaine
« contre l'adultère, de Vétouffer dans
« la boue. » Et Quinet en personne
déroulait pendant plusieurs pages
époumonnées le plan des nouveaux
réformateurs : ajouter à la diatribe!
continuelle la for ce. La force ! hur
lait l'apôtre de la tolérance, qui re
prochait à la Révolution d'avoir
manqué d'énergie.
Nous voyons encore beaucoup de ;
fous qui trépignent devant la Croix:
comme les anciennes Tricoteuses;
Ils recrutent des complices parmi
des hommes qui ont la prétention
de savoir raisonner et de savoir vi
vre. Mais au fond, l'opinion géné
rale leur tient tête. Le légiste Du-
pin, qui, sous Louis-Philippe, con
duisait le cortège des énergumènes,
s'apercevrait, avec un indicible éton-
nement, que la société française n'a
pas succombé sous le poids de la
bêtise dont on voulait l'accabler, et
que l'imbécillité jacobine, bien que
furieuse et dangereuse, a mainte
nant des adversaires résolus dans
le monde où Michelet et Quinet fu
rent des dieux. '
Eugène T avernieb.
'BULLETIN
Le Sénat a voté hier le budget de la
marine. Le débat a donné lieu à plu
sieurs incidents. Nous ne signalerons
ici que Véloquente protestation de M. de
Chamaillard contre l'interdiction por
tée par M. de Lanessan en ce qui con
cerne le deuil du vendredi-saint.
La Chambre n'a pas tenu séance hier
après-midi, mais la commission des
associations s'est réunie et les sectaires,
se trouvant par hasard en minorité, se
sont retirés pour empêcher toute discus
sion et surtout tout scrutin.
Le War Office publie unenote annon
çant « qu'en raison del'activité déployée
récemment dans différents districts par
les Boers, le gouvernement avait décidé
d'envoyer à lord liitchener 30,000 hom
mes de renfort ». ..
En Italie, la situation du cabinet Sa-
racco■ semble assez compromise ; on
parlé' même d'une crise ministérielle
imminente.
Guillaume II, à bord du ITohenzollern,
a quitté hier matin l'Angleterre.
Les ministres étrangers à Pékin et les
plénipotentiaires chinois viennent ide
tenir deux séances : les ambassadeurs
ont exigé la peine de mort pour douze
fonctionnaires désignés par eux et gra
vement compromis dans les récents évé
nements. Le prince Tuan ne serait pas
exécuté, mais simplement banni.
Une dépêche de Shanghaï fait con
naître le résumé d'un éditp&r lequel
l'empereur de Chine annonce que le
gouvernement chinois va jirocéder à des
réformes importantes et qu'une commis
sion sera prochainement convoquée à
cet effet.
LA GUERRE SliD-AFRiCA!NE
questions qui intéressent la prospérité
du pays et le bien-être des classes la-
l'-iriâustis.
Tel est le but vers lequel tendent les
efforts du groupe constitutionnel.
L e comité.
Que l'on agisse ainsi partout et
les élections de mai 1902 ouvriront
une ère nouvelle.
LEUR LOYAUTÉ
Après avoir été quasi interrom
pues, ou tout au moins abrégées et
raréfiées de parti pris, à ce qu'il
semble, durant les jours d'émotion
profonde et de grand deuil qui ont
suivi la mort de la reine Victoria, et
jusqu'à l'entier accomplissement de
ses funérailles, lfes nouvelles de
l'Afrique australe redeviennent plus
abondantes et plus explicites.
Ce n'est point toutefois à lord
Kitchener qu'il faut attribuer cet
élargissement, très relatif d'ail
leurs, des informations sud-afri
caines, car cet éminent général
pratique la discrétion profession
nelle d'une telle façon, que l'on se
sent porté à penser j pour son hon-,
neur, que la censure du War,
Office qui passe au crible ses dé
pêches, en exagère encore le laco
nisme habituel, et prend sa bonne ;
part dans les réticences, les équi
voques et les contradictions qu'on
y remarque.
Toujours est-il que l'ensemble
des ; informations relatives à la
guerre sud-africaine n'est point fa
vorable aux Anglais : l'invasion de
la colonie du Cap par les Boers se
maintient et s'étend ; l'état d'esprit
des Afrikanders paraît devenir de
plus en plus hostile ; enfin l'ac
tion militaire des forces britanni
ques, naguère offensive et conqué
rante, semble être maintenant ré
duite à une sorte de défensive très
pénible, «'échelonnant laborieuse
ment le long des lignes de chemins
de fer, pour la protection des cen
tres d'approvisionnement et des
convois de ravitaillement.
Nous devons noter cependant, en
conscience, que, là-bas, onannonoe;
mystérieusement une grande et sa
vante combinaison stratégique qui
va sôus peu changer la faoe des
choses et relever très haut le pres
tige de la Grande-Bretagne dans
Gés contrées,
Il est vrai que l'on annonce éga
lement le rassemblement en An
gleterre et dans les diverses colo
nies de renforts considérables, en
troupes montées, et dont le départ
pour l'Afrique australe va être très
activement pressé : on dit que ces
renforts ne s'élèvent pas à moins
de 50,000 hommes.
C'est évidemment cette dernière
information qui peut éventuelle
ment donner une valeur positive à
la précédente.
F. L.
L'ÉIICTIOJ SÉSilOEULE DE LA SOT
La Vérité , dite française, reconnaît en
rechignant que V Univers n'a pas fait
dans le compte rendu analytique de la
séance du 28 janvier la suppression dont
elle l'a accusé. Elle veut se croire inno
cente de cette fausseté, parce que la .Re
vue catholique de Troyes l'avait com
mise avant elle. Non, son cas est autre.
La Revue catholique a cru dire vrai et la
Vérité a su qu'elle disait faux. La diffé
rence est notable ; c'est celle qu'il y a
entre l'erreur "et le... Soyons modéré,
disonB entre l'erreur involontaire et l'er
reur voulue.
Au lieu de s'excuser de nous avoir ac
cusé déloyalement d'un acte déloyal, la
Vérité, dite française, toujours oblique,
nous pose diverses questions au sujet de
i l'apostrophe a de M. de Mun à M. Le-
mire. C'est là un trait de son habituelle
inconscience. Elle doit des explications,
elle en demande. Qu'elle avoue explici
tement son tort et nous verrons ensuite
s'il y a lieu d'entrer avec elle sur ce point
en conversation.
Mais puisque des journaux, plus ou
moins catholiques, contre lesquels nous
avons maintes fois défendu M. de Mun,
s'avisent d'exploiter contre nous le si
lence gardé sur son interruption, nous
comblerons la lacune du compte rendu
analytique en donnant cet incident d'a
près le compte rendu in extenso. Oe sera
pour le prochain numéro, car voulant être
complet, nous donnerons aussi la partie
du discours de M. l'abbé Lemire où cette
interruption est encadrée.
E. V.
On nous écrit d'Amiens :
Vous connaissez le résultat de l'élec
tion sénatoriale de la Somme. Ce qui
caractérise particulièrement cette élec
tion, c'est que l'union s'est faite entre les
catholiques, les républicains modérés et
la majorité des conservateurs, contre les
sectaires, sur le terrain de la République
tolérante et libérale.
M. Raguet, le candidat élu, a fait de
bonnes déclarations en faveur de la li
berté d'enseignement et de la liberté
d'association.
Ce premier succès en annonce
d'autres.Nous en avons la promesse
par la formation dans la Somme
d'un « groupe constitutionnel » qui
veut agir et dont voici l'appel :
Groupe constitutionnel
de la Somme
Communication.
Le ministère, préoccupé par-dessus
tout de satisfaire les haines de ses maî
tres, juifs, francs-maçons et socialistes,
s'applique, avec une déplorable énergie,
à traquer la liberté, à persécuter la reli
gion et à désorganiser l'armée. A cette
triple entreprise, il sacrifie le repos, la
richesse et la sécurité de la France.
L'inquiétude et la discorde régnent
partout. La liberté d'enseignement et la
liberté d'association sont gravement me
nacées. L'ère des confiscations va peut-
être s'ouvrir. Les grèves se multiplient
hautement encouragées. Au dehors,
notre prestige s'efface et l'alliance russe
menace ruine.
Catholiques, constitutionnels, nous fai
sons appel à tous ceux qui veulent la
liberté pour tous dans une république
tolérante, sous un gouvernement sou
cieux des intérêts publics, et libre d'en
gagements avec les sectaires de toutes
couleurs.
Il faut remplacer la majorité parle
mentaire actuelle par une majorité hon
nête et patriote capable de nous rendre
la paix et de poursuivre la solution des
Çà et là
AS-TU VU LA FERME?
Les lecteurs de l'Univers ne comptant
pas, pour la plupart, au nombre des
« personnalités éminemment parisien
nes », il convient que nous les mettions
âu courant, par intervalles, des nouveaux
traits d'esprit par lesquels la Ville Lu
mière accroît de temps à autre son intel
lectuelle réputation.
Sachez donc que le « dernier cri », en
ce moment, consiste à interpeller comme
il suit les personnes que l'on rencontre,
pour peu que l'on soit avec elles sur un
pied de suffisante familiarité :
s As-tu vu la ferme ?»
L'interpellé répond nécessairement :
« Quelle ferme ?» A quoi l'on riposte
aussitôt : « Ta g... » (Il n'est pas défendu
de dire « Ta bouche », mais c'est beau
coup moins expressif). Si l'ami n'est pas
content, il n'a qu'à se venger... sur les
autres.
II faut avouer que nous faisons des
progrès. En 1895, on s'en souvient, la
question à la mode était la suivante :
« En voulez-vous des /-homards ?» à
laquelle on ajoutait après un temps de
repos, et sur un ton caverneux : « Oh !
les sales bétes ! » La formule n'était alors
gentille que pour les crustacés ; elle l'est
aujourd'hui pour les hommes. On le voit,
ces déploiements d'urbanité expansive
relèguent dans une pénombre tout à fait
humiliante le cri insignifiant de : « Ohé !
Lambert ! » qui n'avait pas même le mé
rite de contenir la moindre injure ni
pour Lambert, ni pour quelque autre
animal que ce fût.
Pour l'instant, des gens bien informés,
ou soi-disant tel3, assurent que, dans les
musées, à l'heure réglementaire où l 'on
fait sortir le public, les gardiens n'osent
plus crier : « On ferme! on ferme ! » En
dépit du principe de Victor Hugo :
Plus de mot sénateur ! Plus de met roturier!
le mot v. ferme » a subi une déchéance,
sans qu'on puisse déterminer si, en vertu
de cette dégringolade, c'est l'épithète de
roturier ou celle de sénateur qui lui con
vient désormais.
Il est dommage qu'on ne connaisse ja
mais les inventeurs de oes mots ou de
ces cris à succès, et que de tels person
nages ne puissent, comme force grands
hommes de mérite approximativement
égal, rétrécir du piédestal de leur statue
l'avare pelouse-de quelque square. La
législation des brevets devrait prévoir
les créations de ce genre et assurer aux
créateurs un bénéfice proportionné au
retentissement de leur trouvaille. L'hom
me ingénieux qui, le premier, lança les
« ténèbres du moyen âge », celui qui
découvrit les « droits de la société laï
que », celui qui servit de parrain au
« gouvernement des curés » auraient dû,
en stricte justice, pouvoir se faire de
bonnes rentes avec ces heureuse» pro
ductions de leur imagination créatrice. Il
est vrai que c'est précisément, sans
doute, ce qui leur est arrivé.
On dirait parfois que le succès de cer
taines formules, comme celui de certains
refrains, tient à la profondeur démesu
rée de leur ineptie. La propriété qu'ils
ont de ne rien signifier d'humain leur
donne un charme sui generis, quelque
chose comme l'attrait du mystère, car
c'en est un que l'homme puisse arriver à
se servir de la parole pour n'exprimer
rien du tout, mais absolument rien du
tout. Où serait le sel, si de telles locu
tions signifiaient quelqae chose, et quel
plaisir, dès lors, une créature raisonna
ble, au seuil du vingtième siècle, éprou
verait-elle à les répéter ?
Nous ne .croyons pas que la province,
à ce point de vue, ait jamais pu rivaliser
avec les « performances » de Paris. Les
Marseillais ont essayé jadis, mais ils
n'ont pas su s'élever au-dessus d'un vul
gaire symbolisme. C'était sous Louis-
Philippe. Les bonnes femmes du quar
tier Saint-Jean, à Marseille, qui étaient
légitimistes jusqu'au bout des ongles,
avaient trouvé, lorsque quelque autorité
ou personnalité philippiste s'aventurait
dans leurs rues, un moyen singulier de
se livrer impunément à des manifesta
tions agréablement séditieuses. Plantées
devant leurs portes, selon l'usage, elles
appelaient : « Charlo 1 manda mi Enri ! »
(Charles, envoie-moi Henri!) Et, de porte
en porte, de rue en rue, l'appel se répé
tait, s'étendait au loin, à la barbe des
autorités pour qui il était aussi facile de
comprendre que difficile de sévir. Pau
vres femmes, qui avaient l'extraordi
naire idée de cacher un sens sous leur
cri, ne devinant pas que le dernier mot
de la civilisation, le joli, le select, le fin
du fin, consisterait un jour à s'aborder
sur le boulevard en disant : « Dis donc,
as-tu vu la ferme? »
G. d' A zamuuja.
AU SÉNAT
Le budget de la marine. — Violents
incidents.
Le Sénat a voté hier sans chan
gement le budget de la marine. Au
cours de ce débat, trois incidents
fort vifs se sont produits. C'est
d'abord M. de Chamaillard qui a
reproché, avec une certaine véhé
mence, an ministre de la marine
d'avoir interdit la célébration des
cérémonies du Vendredi-saint dans
nos ports de guerre. L'orateur bre
ton s'est adressé en ces termes à
M. de Lanessan :
—Vous ne vous trouviez pas, mon
sieur le ministre, a-t-il dit, en pré
sence des congrégations dont l'exis
tence trouble le sommeil de M. le
président du conseil ! Vous ne vous
trouviez pas en présence des sou
tanes qui attirent la vigilance de M.
le maire de Kremlin-Bicêtre! Vous
n'étiez pas en face d'une manifesta
tion cléricale, pas même d'une ma
nifestation catholique! Vous avez
voulu, de votre propre autorité,
de votre propre initiative, paraît-il,
empêcher une manifestation sim
plement chrétienne!
« Vous avez voulu proscrire la
pensée chrétienne qui commémo
rait, dans ce signe de deuil, le j our
anniversaire de la mort du Juste ! »
M. do Lanessan a balbutié qu'il
avait simplement observé les règle
ments, lesquels ne prescrivent pas
les cérémonies en question. M. de
Chamaillard, très applaudi à droite
et au centre, a reçu les félicitations
de nombre de ses collègues.
Le second incident a été soulevé
par le général Mercier ou — pour
etre plus exact —- par les adversai
res du général.
Relatons-le sans commentaire :
L'ex-ministre de la guerre déve
loppait un amendement diminuant
de 250,000 francs le chapitre 25
(achat de bâtiments neufs à l'indus
trie privée) et reportant eette som
me au chapitre 26 (aehat et cons
truction de bâtiments de servitude).
Se référant à son récent discours
sur la possibilité, en cas de guerre,
d'une descente de nos troupes en
Angleterre, le nouveau sénateur de
la Loire-Inférieure avait dit :
—Il est indispensable de doter nos
services de guerre du matériel né
cessaire pour transporter très ra
pidement une importante fraction
d'armée sur un territoire ennemi.
Ce matériel, qui n'existe pas, il faut
le créer.
I gî , la gauche, qui n'avait cessé de
souligner de ses murmures les pa
roles de l'orateur, l'interrompt bru
talement.
— Pourquoi, s'écrie M. Leydet,
avez-vous eu recours aux Anglais
pour transporter les canonnières
françaises à Madagascar?
— Je vais vous répondre, réplique
le général.
— La parole est à l'accusé ! s'é
crie le farouche M. Delpech.
— A l'ordre ! crie la droite.
— De telles paroles ne sont pas
permises! observe doucement M.
Fallières qui se voit contraint d'in
tervenir, mais ne veut pas mécon
tenter les adversaires de l'orateur.;
— Le gouvernement n'a pas at
tendu les conseils de M. le général
Mercier pour assurer la défense du
pays! prononce d'un ton fort dé
daigneux M. deLane.ssan,
Le général Mercier est remonté à
la tribune,
— Nous allons voir, dit-il, quel est
l'accusé.
Et il explique que les prix et lès
délais exigés par les armateurs fran
çais étant excessifs, il a dû, à son
grand regret, recourir aux Anglais.
Cela dit, le général déclare reti
rer son amendement, puisque le mi
nistre luia donné satisfaction.
Nouvelles rumeurs. M. de La
nessan s'écrie que l'orateur n'a pas
exactement interprété son langage
et il ajoute qu' « il n'en dira pas plus
long ».
M. Ilalgan soulève un troisième
incident. 11 reproche au ministre de
la marine d'avoir fait affréter un na
vire portugais afin de transporter
nos troupes en Chine*, ce qui prouve
l'insuffisance de nos moyens de
transport.
M. de Lanessan nie le fait.
M. Ilalgan lui fait observer que,
dans l'espèce, une simple dénéga
tion ne suffit point. En effet, dit-il,
Içs journaux ont - donné le nom du
navire, son tonnage, la date de son
départ, en un mot, tous les rensei
gnements possibles !
M. de Lanessan garde le silence.
Le président déclare que l'inci
dent est clos. . ' T '
Après avoir voté le budget de la
marine — que M. Càbart-Danne-
ville avait examiné avec autant de
sagesse que de compétence — le
Sénat a abordé le budget de l'ins
truction publique. M. Denoix a pro
noncé un long discours pour attirer
la bienveillante attention du Sénat
sur la situation du personnel de
l'enseignement primaire, lequel, dit
M. Denoix, est très mécontent et se
plaint d'être oublié.
M. Leygues, qui est orfèvre, a
répondu à M. Denoix ; il a déclaré
superbement que la crise universi
taire n'existait point et que tout
était pour le mieux.
— Plus que jamais, s'est-il écrié
— et ici nous reproduisons l 'Offi
ciel — plus que-jamais nous devons
proclamer que i'Université répond
véritablement aux besoins de la so
ciété moderne. C'est l'Université
qui a recueilli les principes de la
révolution et qui demeu-re la gar
dienne de la société civile et laï
que!
Ce couplet de bravoure a été fort
applaudi par les gauches. M. Com
bes, rapporteur, voulait parler,
mais la prolixité de l'ex-séminariste
est connue. —A demain ! à demain!
ont crié les sénateurs en quittant
précipitamment leur fauteuil.
— A demain! arépétéM.Fallières,
qui semblait partager l'effroi de ses
collègues.
J. M antenay.
♦- : :
US SUJET D'ÉTOMBEHT
La Lanterne signale un fait qui la
dépasse, et dont elle ne peut revenir.
Le conseil municipal de Redon va, dit-
elle, « livrer le bureau de bienfaisance
aux sœurs de Saint-Vincent de Paul ».
Or, ce conseil, toujours d'après la Lan
terne, est le même qui. il y a dix ans,
ordonna la laïcisation de ce bureau de
bienfaisance.
« Nous nous demandons, dit le journal
socialiste, quel peut bien être le secret
de cette mesure de réaction prise par des
républicains ? »
Il n'est pas besoin d'être sorcier pour
répondre à cette question naïve.
Les édiles de Redon n'aimaient pas les
Sœurs. Ils les ont renvoyées et, promet
tant que les choses marcheraient mieux,
ils ont essayé les laïques. Ils ont vu que
cela ne marchait pas, et ils rappellent
les Sœurs.
Cela prouve qu'il y a, même parmi les
anticléricaux, des gens disposés à s'in
cliner devant les leçons de l'expérience.
Il est seulement dommage que ces gens-
là soient si peu nombreux.
LE PORT DE LA SOUTANE
Un procès-verbal a été dressé à Auxerre
contre M. l'abbé Lamblin, curé d'An-
dryes, qui, heureusement, ne s'en portera
pas plus mal.
Les arrêtés de ce genre, on le sait, ont
désormais l'exacte valeur qu'auraient des
arrêtés pris par les curés pour interdire
aux maires la redingote ou le veston.
LE XXV e ADVERSAIRE
DE L'MSTITir CATMIPE
Avant de raconter la réunion si cor
diale et de résumer les allocutions si dé
licates et si applaudies qui ont clôturé
ces belles fêtes hier soir, il faut revenir
en quelques mots sur l'éloquent discours
que Mgr Péchenard a fait entendre à la
cérémonie du matin.
Il nous a été permis d'en publier dès
hier un extrait. C'est le discours entier
que nous aurions été heureux d'insérer.
Toute la vie de l'Institut catholique, en
ce quart de siècle, et tous les arguments
qui démontrent l'obligation d'assurer à
cette existence.féconde une prolongation
indéfinie, sont contenues dans ces quel
ques pages, au ton robuste et sobre, à
l'inspiration élevée, au souffle large et
vigoureux.
C'est le passé qui revit, avec les illus
tres combats dont e3t sortie la liberté
d'enseignement, aveo la généreuse ini
tiative de l'épisoopat français créant de
toutes pièces un enseignement supérieur
libre, avec le concours empressé des
maîtres éminents qui vinrent sans re-
tard offrir aux universités catholiques
l'appui de leur science et de leur dévoue
ment.
Oui, l'éloquent recteur a bien raison
de voir en ces origines l'action de Dieu
lui-même et de rendre grâce à la Provi
dence, en ce jour du vingt-cinquième an
niversaire. Il a raison de voir l'action de
Dieu jusque dans les épreuves et dans
les soucis qui n'ont point manqué à cette
institution et dont elle sent encore au
jourd'hui le poids. La souffrance et les
adversités ne sont-elles pas le sceau des
œuvres divines,ou plutôt la rosée amère,
et nourricière en même temps, qui ali-
Edition quotidienne. — 12,042
\fendredj 8 Février 1901
ÉDITION étroïiDDiEinîB
f»ARIS - ÉTRANGER / : i
ïïs dépakl'emen'çs ; . (union postai^',
fta an. fV ,«. v , ^0 ■■ J $1 i • '! ' '
. " Six mois..'. Si i »: Î26 50
Troismoi*..... -11 »■ " 1 . Î4 » ■« i •'
Les abonnements partent des. 1 er et 13 de j chaque mois ,,
UN NUMÉRO
i
Paris. -, ,.i., "10 cent. i
Départements...., 15 —
BUREAUX Paria,, yjifi XJafcaBtta, 1?
On s'aÊonnë a Rome, place du Gesi, -8
JET
LE MONDE
ÉBFfïOH SEMJ-QOOTIDÏENïsi jg
PARIS ÉTRANGER
es départements (union postale)
Un an 20 » 26 »
Six mois. 10 * 13 »
Trois mois.... 0 5 * 6 50
Les abonnements partent des 1 er et 18 de chaque mois
L'UNIVERS ne répond pas des manuscrits qui lui sont adressés
ANNONCES
MM. LAGRANGE, CERF et C ie , 6, place de la Bourse
PAÏttS, 7 FÉVRIER 1SG1
SOMMAIRE
Les « Monita sé
créta.............
La guerre sud-afri
caine
Leur loyauté
Çà et là : As-tu vu
la ferme?...
Au Sénat...........
Le 25 e anniversaire
de l'Institut catho
lique .......
Les conférences, li
bres de l'Institut
catholique
Mélanges oratoires.
E ugène T avbrnier.
F. L.
E. V.
G. d' A zambuja.
J. M antenay.
F rançois V euillot.
E douard A lexandre
A lbert L epitre.
Bulletin. — L'élection sénatoriale de la
Somme. — Un sujet d'étonnement. — Le
port de la soutane. — La lettre de S-
S. Léon XIII et l'épiscopat. — Les céré-
mies funèbres à Lille. — Informations po
litiques et parlementaires, r— Mouve
ment judiciaire. ~ t Le mariage de la reine
de Hollande. — La guerre du Transvaal.
— En Chine. — Dépêches de l'étranger.
— A travers la presse. — Chronique. —
Lettres, sciences et arts. — : A l'Institut
catholique de Toulouse. — A la « Sehola
cantorum ». — La question ouvrière. —
— Les grèves ; — Echos de partout. —
Nécrologie. — Les anarchistes. — Tribu
naux, — Nouvelles diverses. — Calen
drier. — Bourse et bulletin financier. —
Dernière heure.
LES MITA SECRETA
Des épaves pourries flottent sur
l'océan à la dérive, "jouet des cou
rants et de la tempête. Parfois, ra
menées vers la route que suivent
les navires elles les heurtent dans
l'obscurité, causant des avaries ou
bien des catastrophes.
La mer humaine roule de pareils
débris, dont elle fait des instruments
sinistres, dans ses jours de fureur.
Ainsi, de temps en temps, reparais
sent les Momta sécréta, brûlot in
fâme, éteint depuis près de trois
siècles et que des bandits ou des
fous essaient de rallumer.
Les voici encore, réédités, rafraî
chis, annoncés bruyamment par la
Lanterne. Un autre journal, assez
•modéré, qui se flatte d'être impar
tial, : accorde sa publicité à cette
manifestation de naine et de sot
tise.
Il y a cinquante ans que le même
accès derageéclatait en pleinmilieu
de la bourgeoisie raffinée, glo
rieuse et triomphante. Alors, des
feuilles littéraires, universitaires,
académiques, s'abaissaient à repro
duire la prose d'Eugène Sue. Jules
Janin disait que ces histoires sont
en littérature ce qu'est, dans les
compositions de Teniers, l'homme
tourné contre la muraille. La bour
geoisie se passionnait pour cette
saleté, comme auparavant les gen
tilshommes entraînés par Pombal,
Tanucci, d'Aranda, Choiseul,
Les puritains anglais martyrisaient
les Jésuites par la plume et par le
fer. On a vu là-bas subsister long
temps d'ignobles pamphlets tels
que Les amours du Père Peters, con
fesseur de Jacques II. Ce fut un évé
nement, au début de ce siècle, lors
que le bon Sydney Smith osa railler
la conduite féroce de ses contempo
rains, demevirés obsédés par le ro
man de la Conspiration des poudres.
Dans un volume grave et charmant
(L'Inquiétude religieuse), dont nous
préférerions bien nous occuper au
lieu de parler des Monita sécréta,
un Jésuite, le Père Bremond, dé
peint l'état d'esprit que tant de
mensonges avaient créé. Entête
ment rebelle, qui paraît invincible
et qui semble fait pour mettre à une
épreuve suprême la foi dans le bien,
le courage et la persévérance.
Pourtant, malgré la collaboration
des libraires et des fanatiques, on
se fie moins qu'autrefois aux his
toires mensongères ; et certaine
ment beaucoup de libres-penseurs
invétérés n'ont pas été très surpris
d'apprendre ces joursrd, par un
article du Gaulois, que les fameuses
assertions scandaleuses, rajeunies
soudain pour notre public, portent
d'un bout à l'autre le signe vengeur
qui marque le faux.
Cet article très précis, très bien
fait, rappelle l'histoire des Monita
sécréta, édités d'abord à Cracovie
en 1612, oeuvre de Jawrowski, jé
suite polonais chassé par ses frè-
pps Le Gaulois mentionne le juge
ment du Dictionnaire des anonymes
et des pseudonymes où Barbier qua
lifie les Monita de recueil apocry
phe. IL note la réfutation faite en
1618par le P. Gretser, la flétrissure
infligée par la Congrégation de l'In
dex, etc. Qn avait ait que le manus
crit authentique se trouvait à Pa-
derborn, puis à Bruxelles, puis ail
leurs : on ne l'a trouvé nulle part.
C'est un faux insaisissable.
Il est à remarquer que M. Trouil-
lot, lui-même, n'a pas osé en parler
dans le discours où il a dit tant de
choses ridicules.
Il faut descendre jusqu'à la Lan
terne, c'est-à-dire en général jus
qu'au public le plus abaissé, pour
trouver des gens qui croient ces
choses-là ; et encorè- peut-être' n'y ;
croient-ils pas complètement. L'es-
sentiôl, ù leur, goût, est de possé
der des prétextes de dénoncer et de
haïr. Que les accusations amonce
lées recouvrent un amas de men
songes, ils en ont quelque soupçon ;
mais puisque l'arme est utile, ils
s'en servent, en invoquant la
loyauté !
Nous avons vu un journal protes
tant, l 'Eglise libre, faire cet aveu
avec la candeur d'un épileptique.
Un jour que nous voulions lui faire
honte d'en être encore aux imagi
nations du Juif-Errant, cette feuille
répondit qu'elle éprouvait de la re
connaissance pour un roman qui
avait contribué à former l'opinion
moderne. Eugène Sue demeure un
des hommes envers qui le protes
tantisme se sent un devoir de gra
titude. Combien de bandits sont , à
l'origine de la Réforme !
Passion du lucre, amour de la
basse gloriole, folie de haine, ces
éléments do complicité se cherchent
toujours et se rencontrent souvent.
Parfois un honnête homme suffit
pour les mettre en déroute.
Paul Féval racontait que dans sa
jeunesse, mais lorsque la célébrité
lui était venue déjà, il fat itiis en
rapports avec un libraire qui avait
envie de lancer quelque grande en
treprise. Les Jésuites se trouvaient
le point de mire des fureurs. Le
marchand de papier oherchait un
romancier doué d'imagination. On
lui indiqua Féval, qui se sentait
plein d'entrain, mais qui se déclara
dépourvu d'idées sur ce sujet. Une
bibliothèque, ramassée un peu par
tout, fut constituée pour permettre
au futur auteur du pamphlet de s'ap
provisionner et dese tracer un plan.
Au bout d'un mois, Féval fut
invité à commencer la besogne.
Afin de le stimuler, le libraire lui
disait :— Je ferai cinquante mille i
francs de réclame ! -r- C'était pour 1
l'époque un très gros chiffre. Mais
Féval donna une réponse inatten
due i — Je ne connaissais pas les
Jésuites. Tout ce que j'ai lu me
prouve que ce sont de très braves
gens. Je ne veux pas les attaquer.
Au contraire, j'aurais envie de les
défendre. — Interloqué, le libraire
ne tarda pas à rentrer en pqsses-
sion ele ses esprits, où le sens prati
que dominait exclusivement. Re
tourné soudain, il dit au jeune au
teur : — Moi, ça m'est égal ; et même
je crois que votre idée vaudrait
'mieux encore. Au lieu d'abimer
les Jésuites, écrivez le roman en
leur faveur. Je vous avais promis
cinquante mille francs de réclame :
j'en ferai cent mille.
Mais il y a des bêtes venimeuses,
folles et féroces comme Quinet, le
continuateur de Marnix, C 7 est dans
le prospectus annonçant la réédition
des œuvres de Marnix, sous l'égide
de Quinet, que se trouve la fameuse
formule, employée d'instinct même
par les pamphlétaires qui n'ont pas
eu le courage de lire d'une façon
suivie Marnix ou Quinet : « Il s'agit
« non seulement de réfuter le pa-
« pisme, mais de Yextirper ; non
« seulement de l'extirper, mais de
« le déshonorer ; non seulement de
« le déshonorer, mais, Gomme le
« voulait - l'ancienne loi germaine
« contre l'adultère, de Vétouffer dans
« la boue. » Et Quinet en personne
déroulait pendant plusieurs pages
époumonnées le plan des nouveaux
réformateurs : ajouter à la diatribe!
continuelle la for ce. La force ! hur
lait l'apôtre de la tolérance, qui re
prochait à la Révolution d'avoir
manqué d'énergie.
Nous voyons encore beaucoup de ;
fous qui trépignent devant la Croix:
comme les anciennes Tricoteuses;
Ils recrutent des complices parmi
des hommes qui ont la prétention
de savoir raisonner et de savoir vi
vre. Mais au fond, l'opinion géné
rale leur tient tête. Le légiste Du-
pin, qui, sous Louis-Philippe, con
duisait le cortège des énergumènes,
s'apercevrait, avec un indicible éton-
nement, que la société française n'a
pas succombé sous le poids de la
bêtise dont on voulait l'accabler, et
que l'imbécillité jacobine, bien que
furieuse et dangereuse, a mainte
nant des adversaires résolus dans
le monde où Michelet et Quinet fu
rent des dieux. '
Eugène T avernieb.
'BULLETIN
Le Sénat a voté hier le budget de la
marine. Le débat a donné lieu à plu
sieurs incidents. Nous ne signalerons
ici que Véloquente protestation de M. de
Chamaillard contre l'interdiction por
tée par M. de Lanessan en ce qui con
cerne le deuil du vendredi-saint.
La Chambre n'a pas tenu séance hier
après-midi, mais la commission des
associations s'est réunie et les sectaires,
se trouvant par hasard en minorité, se
sont retirés pour empêcher toute discus
sion et surtout tout scrutin.
Le War Office publie unenote annon
çant « qu'en raison del'activité déployée
récemment dans différents districts par
les Boers, le gouvernement avait décidé
d'envoyer à lord liitchener 30,000 hom
mes de renfort ». ..
En Italie, la situation du cabinet Sa-
racco■ semble assez compromise ; on
parlé' même d'une crise ministérielle
imminente.
Guillaume II, à bord du ITohenzollern,
a quitté hier matin l'Angleterre.
Les ministres étrangers à Pékin et les
plénipotentiaires chinois viennent ide
tenir deux séances : les ambassadeurs
ont exigé la peine de mort pour douze
fonctionnaires désignés par eux et gra
vement compromis dans les récents évé
nements. Le prince Tuan ne serait pas
exécuté, mais simplement banni.
Une dépêche de Shanghaï fait con
naître le résumé d'un éditp&r lequel
l'empereur de Chine annonce que le
gouvernement chinois va jirocéder à des
réformes importantes et qu'une commis
sion sera prochainement convoquée à
cet effet.
LA GUERRE SliD-AFRiCA!NE
questions qui intéressent la prospérité
du pays et le bien-être des classes la-
l'-iriâustis.
Tel est le but vers lequel tendent les
efforts du groupe constitutionnel.
L e comité.
Que l'on agisse ainsi partout et
les élections de mai 1902 ouvriront
une ère nouvelle.
LEUR LOYAUTÉ
Après avoir été quasi interrom
pues, ou tout au moins abrégées et
raréfiées de parti pris, à ce qu'il
semble, durant les jours d'émotion
profonde et de grand deuil qui ont
suivi la mort de la reine Victoria, et
jusqu'à l'entier accomplissement de
ses funérailles, lfes nouvelles de
l'Afrique australe redeviennent plus
abondantes et plus explicites.
Ce n'est point toutefois à lord
Kitchener qu'il faut attribuer cet
élargissement, très relatif d'ail
leurs, des informations sud-afri
caines, car cet éminent général
pratique la discrétion profession
nelle d'une telle façon, que l'on se
sent porté à penser j pour son hon-,
neur, que la censure du War,
Office qui passe au crible ses dé
pêches, en exagère encore le laco
nisme habituel, et prend sa bonne ;
part dans les réticences, les équi
voques et les contradictions qu'on
y remarque.
Toujours est-il que l'ensemble
des ; informations relatives à la
guerre sud-africaine n'est point fa
vorable aux Anglais : l'invasion de
la colonie du Cap par les Boers se
maintient et s'étend ; l'état d'esprit
des Afrikanders paraît devenir de
plus en plus hostile ; enfin l'ac
tion militaire des forces britanni
ques, naguère offensive et conqué
rante, semble être maintenant ré
duite à une sorte de défensive très
pénible, «'échelonnant laborieuse
ment le long des lignes de chemins
de fer, pour la protection des cen
tres d'approvisionnement et des
convois de ravitaillement.
Nous devons noter cependant, en
conscience, que, là-bas, onannonoe;
mystérieusement une grande et sa
vante combinaison stratégique qui
va sôus peu changer la faoe des
choses et relever très haut le pres
tige de la Grande-Bretagne dans
Gés contrées,
Il est vrai que l'on annonce éga
lement le rassemblement en An
gleterre et dans les diverses colo
nies de renforts considérables, en
troupes montées, et dont le départ
pour l'Afrique australe va être très
activement pressé : on dit que ces
renforts ne s'élèvent pas à moins
de 50,000 hommes.
C'est évidemment cette dernière
information qui peut éventuelle
ment donner une valeur positive à
la précédente.
F. L.
L'ÉIICTIOJ SÉSilOEULE DE LA SOT
La Vérité , dite française, reconnaît en
rechignant que V Univers n'a pas fait
dans le compte rendu analytique de la
séance du 28 janvier la suppression dont
elle l'a accusé. Elle veut se croire inno
cente de cette fausseté, parce que la .Re
vue catholique de Troyes l'avait com
mise avant elle. Non, son cas est autre.
La Revue catholique a cru dire vrai et la
Vérité a su qu'elle disait faux. La diffé
rence est notable ; c'est celle qu'il y a
entre l'erreur "et le... Soyons modéré,
disonB entre l'erreur involontaire et l'er
reur voulue.
Au lieu de s'excuser de nous avoir ac
cusé déloyalement d'un acte déloyal, la
Vérité, dite française, toujours oblique,
nous pose diverses questions au sujet de
i l'apostrophe a de M. de Mun à M. Le-
mire. C'est là un trait de son habituelle
inconscience. Elle doit des explications,
elle en demande. Qu'elle avoue explici
tement son tort et nous verrons ensuite
s'il y a lieu d'entrer avec elle sur ce point
en conversation.
Mais puisque des journaux, plus ou
moins catholiques, contre lesquels nous
avons maintes fois défendu M. de Mun,
s'avisent d'exploiter contre nous le si
lence gardé sur son interruption, nous
comblerons la lacune du compte rendu
analytique en donnant cet incident d'a
près le compte rendu in extenso. Oe sera
pour le prochain numéro, car voulant être
complet, nous donnerons aussi la partie
du discours de M. l'abbé Lemire où cette
interruption est encadrée.
E. V.
On nous écrit d'Amiens :
Vous connaissez le résultat de l'élec
tion sénatoriale de la Somme. Ce qui
caractérise particulièrement cette élec
tion, c'est que l'union s'est faite entre les
catholiques, les républicains modérés et
la majorité des conservateurs, contre les
sectaires, sur le terrain de la République
tolérante et libérale.
M. Raguet, le candidat élu, a fait de
bonnes déclarations en faveur de la li
berté d'enseignement et de la liberté
d'association.
Ce premier succès en annonce
d'autres.Nous en avons la promesse
par la formation dans la Somme
d'un « groupe constitutionnel » qui
veut agir et dont voici l'appel :
Groupe constitutionnel
de la Somme
Communication.
Le ministère, préoccupé par-dessus
tout de satisfaire les haines de ses maî
tres, juifs, francs-maçons et socialistes,
s'applique, avec une déplorable énergie,
à traquer la liberté, à persécuter la reli
gion et à désorganiser l'armée. A cette
triple entreprise, il sacrifie le repos, la
richesse et la sécurité de la France.
L'inquiétude et la discorde régnent
partout. La liberté d'enseignement et la
liberté d'association sont gravement me
nacées. L'ère des confiscations va peut-
être s'ouvrir. Les grèves se multiplient
hautement encouragées. Au dehors,
notre prestige s'efface et l'alliance russe
menace ruine.
Catholiques, constitutionnels, nous fai
sons appel à tous ceux qui veulent la
liberté pour tous dans une république
tolérante, sous un gouvernement sou
cieux des intérêts publics, et libre d'en
gagements avec les sectaires de toutes
couleurs.
Il faut remplacer la majorité parle
mentaire actuelle par une majorité hon
nête et patriote capable de nous rendre
la paix et de poursuivre la solution des
Çà et là
AS-TU VU LA FERME?
Les lecteurs de l'Univers ne comptant
pas, pour la plupart, au nombre des
« personnalités éminemment parisien
nes », il convient que nous les mettions
âu courant, par intervalles, des nouveaux
traits d'esprit par lesquels la Ville Lu
mière accroît de temps à autre son intel
lectuelle réputation.
Sachez donc que le « dernier cri », en
ce moment, consiste à interpeller comme
il suit les personnes que l'on rencontre,
pour peu que l'on soit avec elles sur un
pied de suffisante familiarité :
s As-tu vu la ferme ?»
L'interpellé répond nécessairement :
« Quelle ferme ?» A quoi l'on riposte
aussitôt : « Ta g... » (Il n'est pas défendu
de dire « Ta bouche », mais c'est beau
coup moins expressif). Si l'ami n'est pas
content, il n'a qu'à se venger... sur les
autres.
II faut avouer que nous faisons des
progrès. En 1895, on s'en souvient, la
question à la mode était la suivante :
« En voulez-vous des /-homards ?» à
laquelle on ajoutait après un temps de
repos, et sur un ton caverneux : « Oh !
les sales bétes ! » La formule n'était alors
gentille que pour les crustacés ; elle l'est
aujourd'hui pour les hommes. On le voit,
ces déploiements d'urbanité expansive
relèguent dans une pénombre tout à fait
humiliante le cri insignifiant de : « Ohé !
Lambert ! » qui n'avait pas même le mé
rite de contenir la moindre injure ni
pour Lambert, ni pour quelque autre
animal que ce fût.
Pour l'instant, des gens bien informés,
ou soi-disant tel3, assurent que, dans les
musées, à l'heure réglementaire où l 'on
fait sortir le public, les gardiens n'osent
plus crier : « On ferme! on ferme ! » En
dépit du principe de Victor Hugo :
Plus de mot sénateur ! Plus de met roturier!
le mot v. ferme » a subi une déchéance,
sans qu'on puisse déterminer si, en vertu
de cette dégringolade, c'est l'épithète de
roturier ou celle de sénateur qui lui con
vient désormais.
Il est dommage qu'on ne connaisse ja
mais les inventeurs de oes mots ou de
ces cris à succès, et que de tels person
nages ne puissent, comme force grands
hommes de mérite approximativement
égal, rétrécir du piédestal de leur statue
l'avare pelouse-de quelque square. La
législation des brevets devrait prévoir
les créations de ce genre et assurer aux
créateurs un bénéfice proportionné au
retentissement de leur trouvaille. L'hom
me ingénieux qui, le premier, lança les
« ténèbres du moyen âge », celui qui
découvrit les « droits de la société laï
que », celui qui servit de parrain au
« gouvernement des curés » auraient dû,
en stricte justice, pouvoir se faire de
bonnes rentes avec ces heureuse» pro
ductions de leur imagination créatrice. Il
est vrai que c'est précisément, sans
doute, ce qui leur est arrivé.
On dirait parfois que le succès de cer
taines formules, comme celui de certains
refrains, tient à la profondeur démesu
rée de leur ineptie. La propriété qu'ils
ont de ne rien signifier d'humain leur
donne un charme sui generis, quelque
chose comme l'attrait du mystère, car
c'en est un que l'homme puisse arriver à
se servir de la parole pour n'exprimer
rien du tout, mais absolument rien du
tout. Où serait le sel, si de telles locu
tions signifiaient quelqae chose, et quel
plaisir, dès lors, une créature raisonna
ble, au seuil du vingtième siècle, éprou
verait-elle à les répéter ?
Nous ne .croyons pas que la province,
à ce point de vue, ait jamais pu rivaliser
avec les « performances » de Paris. Les
Marseillais ont essayé jadis, mais ils
n'ont pas su s'élever au-dessus d'un vul
gaire symbolisme. C'était sous Louis-
Philippe. Les bonnes femmes du quar
tier Saint-Jean, à Marseille, qui étaient
légitimistes jusqu'au bout des ongles,
avaient trouvé, lorsque quelque autorité
ou personnalité philippiste s'aventurait
dans leurs rues, un moyen singulier de
se livrer impunément à des manifesta
tions agréablement séditieuses. Plantées
devant leurs portes, selon l'usage, elles
appelaient : « Charlo 1 manda mi Enri ! »
(Charles, envoie-moi Henri!) Et, de porte
en porte, de rue en rue, l'appel se répé
tait, s'étendait au loin, à la barbe des
autorités pour qui il était aussi facile de
comprendre que difficile de sévir. Pau
vres femmes, qui avaient l'extraordi
naire idée de cacher un sens sous leur
cri, ne devinant pas que le dernier mot
de la civilisation, le joli, le select, le fin
du fin, consisterait un jour à s'aborder
sur le boulevard en disant : « Dis donc,
as-tu vu la ferme? »
G. d' A zamuuja.
AU SÉNAT
Le budget de la marine. — Violents
incidents.
Le Sénat a voté hier sans chan
gement le budget de la marine. Au
cours de ce débat, trois incidents
fort vifs se sont produits. C'est
d'abord M. de Chamaillard qui a
reproché, avec une certaine véhé
mence, an ministre de la marine
d'avoir interdit la célébration des
cérémonies du Vendredi-saint dans
nos ports de guerre. L'orateur bre
ton s'est adressé en ces termes à
M. de Lanessan :
—Vous ne vous trouviez pas, mon
sieur le ministre, a-t-il dit, en pré
sence des congrégations dont l'exis
tence trouble le sommeil de M. le
président du conseil ! Vous ne vous
trouviez pas en présence des sou
tanes qui attirent la vigilance de M.
le maire de Kremlin-Bicêtre! Vous
n'étiez pas en face d'une manifesta
tion cléricale, pas même d'une ma
nifestation catholique! Vous avez
voulu, de votre propre autorité,
de votre propre initiative, paraît-il,
empêcher une manifestation sim
plement chrétienne!
« Vous avez voulu proscrire la
pensée chrétienne qui commémo
rait, dans ce signe de deuil, le j our
anniversaire de la mort du Juste ! »
M. do Lanessan a balbutié qu'il
avait simplement observé les règle
ments, lesquels ne prescrivent pas
les cérémonies en question. M. de
Chamaillard, très applaudi à droite
et au centre, a reçu les félicitations
de nombre de ses collègues.
Le second incident a été soulevé
par le général Mercier ou — pour
etre plus exact —- par les adversai
res du général.
Relatons-le sans commentaire :
L'ex-ministre de la guerre déve
loppait un amendement diminuant
de 250,000 francs le chapitre 25
(achat de bâtiments neufs à l'indus
trie privée) et reportant eette som
me au chapitre 26 (aehat et cons
truction de bâtiments de servitude).
Se référant à son récent discours
sur la possibilité, en cas de guerre,
d'une descente de nos troupes en
Angleterre, le nouveau sénateur de
la Loire-Inférieure avait dit :
—Il est indispensable de doter nos
services de guerre du matériel né
cessaire pour transporter très ra
pidement une importante fraction
d'armée sur un territoire ennemi.
Ce matériel, qui n'existe pas, il faut
le créer.
I gî , la gauche, qui n'avait cessé de
souligner de ses murmures les pa
roles de l'orateur, l'interrompt bru
talement.
— Pourquoi, s'écrie M. Leydet,
avez-vous eu recours aux Anglais
pour transporter les canonnières
françaises à Madagascar?
— Je vais vous répondre, réplique
le général.
— La parole est à l'accusé ! s'é
crie le farouche M. Delpech.
— A l'ordre ! crie la droite.
— De telles paroles ne sont pas
permises! observe doucement M.
Fallières qui se voit contraint d'in
tervenir, mais ne veut pas mécon
tenter les adversaires de l'orateur.;
— Le gouvernement n'a pas at
tendu les conseils de M. le général
Mercier pour assurer la défense du
pays! prononce d'un ton fort dé
daigneux M. deLane.ssan,
Le général Mercier est remonté à
la tribune,
— Nous allons voir, dit-il, quel est
l'accusé.
Et il explique que les prix et lès
délais exigés par les armateurs fran
çais étant excessifs, il a dû, à son
grand regret, recourir aux Anglais.
Cela dit, le général déclare reti
rer son amendement, puisque le mi
nistre luia donné satisfaction.
Nouvelles rumeurs. M. de La
nessan s'écrie que l'orateur n'a pas
exactement interprété son langage
et il ajoute qu' « il n'en dira pas plus
long ».
M. Ilalgan soulève un troisième
incident. 11 reproche au ministre de
la marine d'avoir fait affréter un na
vire portugais afin de transporter
nos troupes en Chine*, ce qui prouve
l'insuffisance de nos moyens de
transport.
M. de Lanessan nie le fait.
M. Ilalgan lui fait observer que,
dans l'espèce, une simple dénéga
tion ne suffit point. En effet, dit-il,
Içs journaux ont - donné le nom du
navire, son tonnage, la date de son
départ, en un mot, tous les rensei
gnements possibles !
M. de Lanessan garde le silence.
Le président déclare que l'inci
dent est clos. . ' T '
Après avoir voté le budget de la
marine — que M. Càbart-Danne-
ville avait examiné avec autant de
sagesse que de compétence — le
Sénat a abordé le budget de l'ins
truction publique. M. Denoix a pro
noncé un long discours pour attirer
la bienveillante attention du Sénat
sur la situation du personnel de
l'enseignement primaire, lequel, dit
M. Denoix, est très mécontent et se
plaint d'être oublié.
M. Leygues, qui est orfèvre, a
répondu à M. Denoix ; il a déclaré
superbement que la crise universi
taire n'existait point et que tout
était pour le mieux.
— Plus que jamais, s'est-il écrié
— et ici nous reproduisons l 'Offi
ciel — plus que-jamais nous devons
proclamer que i'Université répond
véritablement aux besoins de la so
ciété moderne. C'est l'Université
qui a recueilli les principes de la
révolution et qui demeu-re la gar
dienne de la société civile et laï
que!
Ce couplet de bravoure a été fort
applaudi par les gauches. M. Com
bes, rapporteur, voulait parler,
mais la prolixité de l'ex-séminariste
est connue. —A demain ! à demain!
ont crié les sénateurs en quittant
précipitamment leur fauteuil.
— A demain! arépétéM.Fallières,
qui semblait partager l'effroi de ses
collègues.
J. M antenay.
♦- : :
US SUJET D'ÉTOMBEHT
La Lanterne signale un fait qui la
dépasse, et dont elle ne peut revenir.
Le conseil municipal de Redon va, dit-
elle, « livrer le bureau de bienfaisance
aux sœurs de Saint-Vincent de Paul ».
Or, ce conseil, toujours d'après la Lan
terne, est le même qui. il y a dix ans,
ordonna la laïcisation de ce bureau de
bienfaisance.
« Nous nous demandons, dit le journal
socialiste, quel peut bien être le secret
de cette mesure de réaction prise par des
républicains ? »
Il n'est pas besoin d'être sorcier pour
répondre à cette question naïve.
Les édiles de Redon n'aimaient pas les
Sœurs. Ils les ont renvoyées et, promet
tant que les choses marcheraient mieux,
ils ont essayé les laïques. Ils ont vu que
cela ne marchait pas, et ils rappellent
les Sœurs.
Cela prouve qu'il y a, même parmi les
anticléricaux, des gens disposés à s'in
cliner devant les leçons de l'expérience.
Il est seulement dommage que ces gens-
là soient si peu nombreux.
LE PORT DE LA SOUTANE
Un procès-verbal a été dressé à Auxerre
contre M. l'abbé Lamblin, curé d'An-
dryes, qui, heureusement, ne s'en portera
pas plus mal.
Les arrêtés de ce genre, on le sait, ont
désormais l'exacte valeur qu'auraient des
arrêtés pris par les curés pour interdire
aux maires la redingote ou le veston.
LE XXV e ADVERSAIRE
DE L'MSTITir CATMIPE
Avant de raconter la réunion si cor
diale et de résumer les allocutions si dé
licates et si applaudies qui ont clôturé
ces belles fêtes hier soir, il faut revenir
en quelques mots sur l'éloquent discours
que Mgr Péchenard a fait entendre à la
cérémonie du matin.
Il nous a été permis d'en publier dès
hier un extrait. C'est le discours entier
que nous aurions été heureux d'insérer.
Toute la vie de l'Institut catholique, en
ce quart de siècle, et tous les arguments
qui démontrent l'obligation d'assurer à
cette existence.féconde une prolongation
indéfinie, sont contenues dans ces quel
ques pages, au ton robuste et sobre, à
l'inspiration élevée, au souffle large et
vigoureux.
C'est le passé qui revit, avec les illus
tres combats dont e3t sortie la liberté
d'enseignement, aveo la généreuse ini
tiative de l'épisoopat français créant de
toutes pièces un enseignement supérieur
libre, avec le concours empressé des
maîtres éminents qui vinrent sans re-
tard offrir aux universités catholiques
l'appui de leur science et de leur dévoue
ment.
Oui, l'éloquent recteur a bien raison
de voir en ces origines l'action de Dieu
lui-même et de rendre grâce à la Provi
dence, en ce jour du vingt-cinquième an
niversaire. Il a raison de voir l'action de
Dieu jusque dans les épreuves et dans
les soucis qui n'ont point manqué à cette
institution et dont elle sent encore au
jourd'hui le poids. La souffrance et les
adversités ne sont-elles pas le sceau des
œuvres divines,ou plutôt la rosée amère,
et nourricière en même temps, qui ali-
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