Titre : L'Univers
Éditeur : L'Univers (Paris)
Date d'édition : 1893-02-12
Contributeur : Veuillot, Louis (1813-1883). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, Pierre (1859-1907). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, François (1870-1952). Rédacteur
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 12 février 1893 12 février 1893
Description : 1893/02/12 (Numéro 9047). 1893/02/12 (Numéro 9047).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
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Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/02/2011
Dimanche 12 Février 1893
A* 9047 — Edition quotidienne
■B—BMÇa——■JMHII1W raiw
r Dimanche 12 Février 1893
ÉDITION QUOTIDIENNE
PARIS
■t département!
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BUREAUX. g Paris, 10, rue des Saints-Pêrsr
EDITION SEMI-QUOTIDIENNE
PARIS
et départements
Un an 30 »
Six mois -16 »
Trois mois. ... 8 50
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19 »
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On «'«bonne l Rome, place du Geaù, 8
Les abonnements partent des l sr et 16 de chaque dois,
L 'UNIVERS m répond pas des marais qui lui sont adressés
ANNONCES
MM. LAGRANGE, GERF et G", 6, place de la Bourse
FRANCE
PARIS, U FÉVRIER 1893 .
On a vainement attendu hiër l'in
terpellation de M. Leydet. Sera-t-elle
déposée aujourd'hui ? Les avis, sur ce
point, sont contradictoires. : Tout le
monde à gauche reconnaît la néces
sité d'une interpellation pour éclaircir
la situation créée parle vote de l'ordre
du jour Gavaignac, mais on n'est pas
rassuré sur les suites de cette inter
pellation. Gela pourrait mal tourner.
De là des hésitations, des tâtonne
ments. Les habiles et les prudents
voudraient s'assurer à l'avance d'une
entente des divers groupes de gauche,
et ce n'est pas très facile;.
Nos députés ont tenu hier_ une
séance d'affaires; ils ont terminé le
vote du budget des dépensés ; aujour
d'hui, ils doivent prendre la Moi de
finances, eh commençant par le droit
d'accroissement, à moins qu'il n'y ait
ùn nouvel ajournement, ou qu'il ne se
produise quelque incident.
Au début de là séance, hier,M, Tur-
rel a déposé une demande d'interpel
lation sur la situation économique,,
dont la discussion a été fixée à
trente jours.
Au Sénat, séance de pure forme : on
s'est réuni pour s'en aller après avoir
voté quelques, lois d'intérêt local.
Et la fameuse proposition Monis l
On était jadis si pressé de la voter. Le
rapport a été déposé et, au lieu de le
discuter, le Sénat s'est ajourné à jeudi.
On'peut croire que bien des sénateurs
regrettent de s'être trop pressés pour
cette proposition. Le député Lasserre
doit se féliciter d'avoir été prévenu
p$r le sénateur Monis.
Gomme on l'annonçait, le procès
de'Mgr Gazet contre deux francs-ma
çons de Madagascar est revenu devant
la cour de cassation ; le prononcé du
jugement a été renvoyé à huitaine. On
est . convaincu que la cour, de cassa
tion, persistant dans sa j urisprudence,
cassera le jugement de la cour d'Aix
comme elle avait cassé celui* de la
cour de la Réunion.
Nous donnons plus loin une lon
gue analyse de la note de M. Gréard,
relative à la réforme de l'orthogra
phe. On a beaucoup parlé de cette
note dont l'Académie française s'est
occupée et qui paraît y avoir trouvé ,un
médiocre accueil. Alors même qu'elle
serait à peu près repoussée, la note
mérite l'attention, au moins comme
indice des idées plus ou moins heu
reuses de réforme qui ont cours même
à l'Académie.
On n'a pas terminé hier à la Cham
bre des communes la discussion de
l'Adresse et l'on continue auj ourd'hui.
Les conservateurs ne se seront pas
rendus sans combat. Hier, un amen
dement, visant l'ingérence du clergé
catholique dans les élections irlandai
ses, a été repoussé à 43 voix de majo
rité.
(Voir aux DernièreB Nouvelles)
Allons, la France, en dépit d'un
siècle de bourgeoisisme et de vingt
ans d'opportunisme, reste elle-même.
C'est toujours la nation que les idées
emportent, enflamment ; que le triom
phe injuste et insolent révolte; qui,
lorsqu'une faute lui paraît trop sévè
rement punie,, ne voit, plus,la faute,
et dont les plus violentes colères,
même quand ce sont de justes eolères,
tombent devant un désastre, un écra
sement qui l'émeut.
Voilà ce que nous montre aujo ur
d'hui l'affaire du Panama,, qui d éjà
nous avait montré tant de choses > et
dont nous pouvons encore attendre
beaucoup. "• "
Depuis des mois et jusqu'à cette
dernière semaine, que de malédictions,
que d'injures entouraient le nom de
M. de Lesseps! Que d'accusations,
particulièrement, abaissantes, s'ajou
taient à celles que l'on pouvait rai
sonnablement formuler I Avec quelle
passion on demandait, qu'il fût frappé
à outrance afin qu'un grand exemple,
un exemple indispensable, fût donné
et que tant de pauvres gens ruinés
pussent croire encore à la justice et
goûter la vengeance !
. Il fallait du courage , pour ne pas
s'associer sans réserve à ces. clameurs,
qui voulaient dicter aux juges leur
arrêt, et l'on se serait rendu suspect,
d'avoir' soi-même touché en faisant
remarquer que toutes les sommes sous
crites n'avaient point été empochées
par les corrupteurs ou.distribuées aux
corrompuâ. Que de gens restent con
vaincus,pour l'avoir lu mille fois dans
tels et tels journaux, que M. de Les
seps tout le premier n'a jamais cru
au Panama; qu'aucun travail sérieux
et pouvant aboutir n'a jamais étér fait
dans l'isthme ; qu'enfin cette immense
entreprise n'a jamais été qu'une im
mense essroqueriel...
Mais les juges parlent; ces juges,
qu'on accusait déjà de complaisance,
de complicité, tant on craignait qu'ils
ne fussent pas assez sévères, condam
nent M. de Lesseps et son fils au maxi
mum de la peine. Ils sont sans pitié
pour ce vieillard de 87 /ans; ils ne
voient, ni dans son glorieux passé, ni
dans son affaiblissement physique et
intellectuel, ni dans l'inconnu et l'im
prévu qui l'ont accablé, rien qui atté
nue ses fautes, et ils flétrissent abso
lument le « Grand Français ».
Alors une émotion profonde, puis
sante, gagne et domine tous les esprits,
et chacun de s'écrier : C'est trop ! un
tel arrêt passe toute mesuré ; il ne fal
lait pas frapper ainsi Ferdinand de
Lesseps. Ses services et sa gloire de
vaient morne protéger quelque peu
son fils et ceux qui, admirant son gé
nie et croyant en son étoile , l'ont,
suivi.
Cette émotion trop vive, trop fran
çaise diminuera; mais il en restera
quelque chose, et ce sera bon. L'opi
nion, qui, sans être injuste, redevien
dra sévère pour les administrateurs
et directeurs du Panama, voyant les
hommes politiques, leurs compères et
complices, ou plutôt leurs oppresseurs
et exploiteurs, se tirer si bien d'affaire,
voudra que les corrompus soient trai •
tés, tout au moinâ, comme l'ont été
les corrupteurs, d'autant plus que
ceux-ci ont ' généralement cédé à
ceux-là.
Déjà cet état d'esprit s'affirme.
Vous avez durement frappé M. de
Lesseps, dit-on au gouvernement et
à la justice. Soit I Mais ce serait une
iniquité par trop criante, par trop
scandaleuse, de s'en tenir là. Il faut
poursuivre l'œuvre Commencée. La
France n'entend pas que de miséra
bles, de véreux politiciens soient épar
gnés, quand un homme qui lui a fait
honneur ne l'est pas.
De telle sorte que ces révélations
scandaleuses, dont on commençait à
se fatiguer malgré leur nécessité et
leur justice, vont être accueillies avec
une faveur nouvelle. Trop de ceux
qui tiennent le pouvoir, l'influence et
les emplois depuis quinze ans y pas
seront, pour que le régime tout entier
n'y passe point. Si le3 opportunistes
et les radicaux ont cru que l'arrêt de
la cour d'appel suffirait à~ l'opinion et
leur rendait servicé, ils se sont bien
trompés.
Eugène Veuillot.
Un de nos gens de lettres sceptique,
amateur de Bibelots, avait dans son
cabinèt une collection d'idoles de di
vers pays;, un. ami, par mégardéT en
fait tomber une, qui se casse ; « Mal
heureux, s'écrie le sceptique, qu'avez-
vous fait?C'est peut-être le vrai Dieu. »
Telle était, il y a dix ans, toute la
théologie de notre gouvernement. Dans
la discussion de la loi d'instruction
laïque, au Sénat, M. Jules Simon, avec
plusieurs de ses collègues, demandait
au nom de la philosophie, qu'on fit
mention de Dieu dans la loi: « Quel
Dieu? » objecta M. Jules Ferry, pré
sident du conseil et ministre de l'ins
truction publique et des cultes. Et il
n'en fut plus question.
pepuisj on a fini par découvrir au
ministère de l'instruction publique
quel est ce Dieu dont parlait M. Jules
Simon. A force d'entendre les hon
nêtes gens se plaindre des écoles sans
Dieu, on s'est mis à la recherche de
ce Dieu inconnu et on l'a trouvé.
Rien n'a été changé à la loi athée, à
la loi officielle ; mais, subrepticement,
à la faveur d'une nouvelle organisa
tion des écoles primaires-supérieures
publiques, on a introduit Dieu dans le
programme des matières de l'ensei
gnement dans ces écoles.
Il y est, comme par raccroc, entre
parenthèses. A la fin d'un cours de
trois ans de morale laïque, et indé
pendante, comme conclusion de l'en
seignement, l'idée de Dieu est mise au
nombre des sanctions de la morale.
Elle vient en dernier lieu,, après la
sanction intérieure de la satifaction
ou du remords, après la sanction na?
turelle des conséquences de] la bonne
ou de la mauvaise conduite, pour soi
et pour les autres, après la sanction
sociale de l'estime ou du mépris pu-:
blic. Elle figure au programme sous
cette forme,
Sanolions philosophiques ou religieuses
(l'idée de Dieu).
C'est bien peu ^que'cette mention
finale de Dieu ! au bout ■ de trois ans
d'enseignement consacré à l'étude: des
principes^ et des applications de la
morale. C'est bien peu que cette petite
place accordée à l'Etre suprême,
créateur et providence du monde,
dans la catégorie des sanctions de la
morale. Que peut être une science
morale qui attend à la fin pour faire
intervenir, comme dernier corollaire,
l'idée de Dieu ? Et cependant, avec,
notre système de'laïcisation, avec no
tre enseignement scolaire athée, on
en est réduit à considérer comme
un progrès l'insertion de l'idée de
Dieu dans les programmes d'écoles.
L'éducation morale ne sera donc plus
entièrement constituée en dehors de
Dieu ; il ne sera plus tout à fait inter
dit à l'instituteur, au moins dans les
écoles primaires supérieures et dans
les classes d'enseignement primaire
supérieur, de parler à ses élèves du
Souverain Créateur et Maitre du
monde. :
Le programme suppose même qu'il
ne se cornera pas à faire simplement
mention de l'Etre suprême, mais qu'il
parlera àt ses élèves de ce Dieu que
M. Jules Ferry a repoussé de la loi
scolaire. Car le programme dit que
« le professeur s'attachera à ne parler
des croyances religieuses qu'avec un
grand respect et de manière à ne ja
mais froisser la conscience des en
fants qui lui sont confiés. » Le maître
ne dira donc pas aux enfants qu'il ne
sait pas de quel Dieu il est question
lorsqu'on parle de Dieu; il ne le
mettra pas au nombre des idoles de
musée ou de cabinet d'antiquités ; il
n'attribuera pas l'idée de Dieu à la
peur ou à la superstition, et, loin de
rejeter ou de dénigrer les croyances
chrétiennes, il devra les traiter avec
respect.
La loi de 1884 n'est pas changée.
Mais elle se trouve un peu atténuée en
pratique par l'introduction de l'idée
de Dieu dans le nouveau programme
d'enseignement moral et par l'obliga
tion du' respect envers les croyances
chrétiennes. .
On est bien loin encore de l'ensei*
gnement religieux. La loi reste athée
et l'instruction laïque. Néanmoins, il
y a là l'indice d'une préoccupation
nouvelle dans les conseils du minis
tère de l'instruction publique. Com-
meneerait-on à comprendre que la
morale sans Dieu.est une morale vide
et inefficace ; que les écoles, sans
Dieu sont des écoles d'erreur; que la
jeunesse sans Dieu est une jeunesse
sans vertu, et que le suffrage universel
lui-niême sans Dieu est un instrument
de désordre ?
Nous en féliciterions la Répu
blique.
Arthur Loth.
Le Courrier de la. Cornouaille du
11 février nous donne la conclusion
d'une curieuse affaire, où ne brille pas
la clairvoyance du fonctionnaire :qui
préside à l'administration départe
mentale du Finistère. Cette affaire,
dont nous avons déjà dit quelque
chose, peut se résumer en peu de
mots.-*,.
Il s'agit . de l'école religieuse des
filles de Mahalon, que M. le préfet
Proudhon résolut,le 5 octobre dernier,
de laïciser. Mais, pour exécuter sans
retard cette décision, il fallait s'empa
rer du local occupé par les sœurs. Or
ce local est bâti sur un terrain appar
tenant à M. le comte de Sàlaberry, et
celui-ci, un fier chrétien, n'entendait
pas le moins du monde délaisser son
immeuble aux mains de l'administra
tion pour l'usage qu'elle en veut faire.
Ajoutons que le maire de Mahalon
n'entendait pas davantage prêter son
concours, à pareille iniquité.
Lors donc que, le 22 octobre,se pré
senta M.-l'inspecteur Nonus accompa
gnant l'institutrice qu'il venait instal
lerai! trouva la porte barrée par M. de
Salaberry, qui, avec autant de cour
toisie que de fermeté, lui disait :
« Monsieur l'inspecteur, je suis le pro
priétaire, et vous ne passerez pas. »
M. Nonus ne passa pas, mais le préfet
se flatta d'avoir le dernier mot. Après
avoir vainement incité le maire à re
vendiquer, au nom de la commune,
le local en litige, M. Proudhon, se
substituant au ïnaire, introduisait, à
la date du 10 janvier dernier, un ré
féré devant le président du tribunal
de Quimper,pour voir ordonner « pro
visoirement » l'expulsion de M. de
Salaberry et de ses ayants cause des
bâtiments de l'école communale de
Mahalon.
Fort de son droit, M. de Salaberry,
se contenta de représenter que la loi
municipale de 1884, pas plus que celle
de 1837, n'autorise le préfet à ester en
justice aux lieu et place du maire,con
trairement au vœu et à la décision du
conseil municipal. Cette objection
était concluante ; M. le préfet ni ses
conseils ne l'ayant prévue, le prési
dent du tribunal renvoya sa sentence
au 14 janvier. Ce jour-là, nouveau ren
voi, et comme véritablement, après
tous ces délais, il n'y avait plus lieu de
prononcer sur le cas en audience de
référé, c'est devant le tribunal civil
que l'affaire fut renvoyée pour être
plaidée le 17 janvier.
Or, à cette date, il fallut constater
un fait plus surprenant que tout le
reste : Mv le préfet, jusque-là si pressé
d'agir, puisqu'il avait introduit un ré
féré, déclarait n'être plus prêt à plaider
et, par l'organe de son avocat, deman
dait le renvoi. Vainement les défen
seurs de la religieuse en cause et de
M: de Salaberry s'opposaient à cette
demanderont ils faisaient ressortir la
bizarrerie. Venant au secours du pré
fet dans l'embarras, le tribunal ren
voyait la cause pour dernier délai, au
7 février. Mais ce jour-là, surprise
plus grande encore, on apprenait que
définitivement M. le préfet se désis
tait! .
Nous n'aurons pas la cruauté de
commenter cette piteuse attitude à
laquelle est réduit un administrateur,
si grossièrement ignorant de la loi
qu'il prétend appliquer dans toute sa
rigueur. Mais il est bon de rappeler
que le préfet qui. reçoit cette leçon est
le même qui,naguère, ayant à fixer le
jour du bal officiel à donner dans les
salons de la préfecture, faisait choix
de l'anniversaire de l'exécution du roi
Louis XVI, ce qui lui valut cette ré
ponse de la femme d'un fonctionnaire
qu'il y invitait : « J'irai si vous l'exi
gez, monsieur le préfet, mais alors
vous m'y verrez en toilette de deuil ! »
A côté de cette leçon, il en est une
autre qu'on ne saurail trop mettre en
lumière. Que serait-il advenu si M. le
comte de Salaberry n'avait aussi fer
mement résisté pied à pied aux pré
tentions préfectorales ? Son écoje serait
aujourd'hui occupée par une maîtresse
laïque! Avis aux catholiques qui se
raient trop enclins, en pareille cir
constance, à céder devant la première
sommation de l'arbitraire persécu
teur!
Auguste Roussel.
Une rétractation
Notre correspondant de Rome a
dénoncé à nos lecteurs l'odieux blas
phème que le député Colajanni pro
féra à la Chambre lors de la discussion
sur l'enquête parlementaire. On lit à
ce sujet dans le Moniteur de Rome.;.
Cette sacrilège et grossière insulte faite
à la foi de l'immense majorité des Italiens
au sein de l'Assemblée des représentants de
l'Italie légale, a susoi t é partout un profond
sentiment d'horreur, auquel n'ont pas man
qué de s'ajouter aussi le dégoût et la répro
bation de beaucoup d'incrédules,qui ont en-
oore le respect des convenances.
Aussi est-il arrivé, dans, telles réunions
publiques, que des observations ont été
faites à ce sujet à M. Colajanni et que
celui-ci n'a pas caché son regret d'avoir
laissé échapper un blasphème qui, impiété
& part, est une inconvenance vulgaire.
Mais verba volant,et il était à désirer que
la retractation fût mieux constatée et plus
eflicaoe.
C'est pourquoi Mgr Deggiovanni, prélat
bien connu pour son zèle, n'a pas hésité à
écrire au député blasphémateur pour lui
manifester toute l'horreur qu'une aussi
odieuse offense aux sentiments les plus
chers des catholiques avait suscitée parmi
eux et pour l'exhorter à vouloir réparer ce
soandale. 4
M. Colajanni a aussitôt répondu, en dé
clarant que « bien qu'il n'ait pas personnel
lement la foi dans le dogme de l'Immaculée
Conception de Marie, il reconnaît avoir mal
fait d'offenser la oroyance professée par le
grand nombre et qu'il a, dit-il, toujours res
pectée » ; il ajoute le regretter surtout « à
cause de la manière inconvenante dont cette
offense lui a échappé dans un moment d'ex
citation ».
Nous ne pouvons que prendre acte de cette
rétractation et en louer la franchise.
Mais nous devons observer qu'il est ar
rivé à M. Colajanni, comme à d'autres im
pies qui font profession d'incrédulité, de
vivrô dans une ignorance grossière de la
religion et de blasphémer ce qu'ils ne con
naissent même pas. C'est ainsi que, dans
sa lettre de rétractation, M. Colajanni, ne
sachant pas faire de distinction entre le
dogme de la virginité de Marie et celui de
son Immaculée Conception,parle de celui-oi
et oublie que son blasphème avait été lancé
contre celui-là.
Encore une fois, on ne saurait avoir plus
d'ignorance des choses de la religion, et
ceux qui affectent de ne pas y oroire, fe
raient mieux d'avouer qu'ils ne la oônnais-
sent point.
Le Jubilé épiscopal du Pape
Voici de nouveaux détails donnés;
par les Missions Catholiques, dans une
lettre de Gonstantinople,sur la mission
de Mgr Azarian auprès du P8pe :
S. B. Mgr Azarian, pntriarche des Ar
méniens catholiques, devait se rendre à
Rome pour assister aux fêtes du jubilé
épiscopal de Sa Sainteté, S. M. I. le sultan
a bien voulu encore cette fois lui confier,
par un iradé impérial, la mission honori
fique de présenter à Sa Sainteté l'expres
sion de ses sentiments d'amitié et ses féli
citations à l'oûfcasion de son jubilé épisco-,
pal. Sa Béatitude doit en môme temps re-
mettre au Saint-Père une tabatière en or,:
enrichie de brillants. Une lettre de S. A. le,
grand vizir notifie à S. Em. le cardinal
Rampolla cette mission de Mgr Azarian*
qui est en môme temps porteur de deux
grands cordons de Tordre du Medjidié que
le sultan a gracieusement accordés, sur la .
demande du patriarche, à S. Em. le cardi
nal Ledoohowski, préfet de la Propagande,
et & S. Em. le cardinal Mocenni.
La nouvelle répandue dans cette capitale
de cette nouvelle preuve des bons senti
ments du sultan envers le Chef auguste de
la catholioité a produit une profonde im
pression ; on a vu, encore une fois, dans la
haute bienveillance et la déférenoe que Sa
Majesté nourrit pour Sa Sainteté, un té-:
moignage de confiance à l'égard du patriar
che arméno-oatholique; et de sympathie
pour les catholiques en général. Aussitôt
que cette nouvelle arrivera dans les pro
vinces de l'empire, elle produira un effet
salutaire sur toutes les autorités officielles,
rehaussera le prestige du patriarche et des
catholiques,et donnera une nouvelle impul
sion au mouvement de conversions, surtout
dans le sein de la communauté arménienne
non unie.
Mgr Azarian quittera Constantinople
dans quelques jours pour se rendre par voie
de Brindisi à Rome, où déjà quatre de ses
évêques'suffragants l'attendent. Mgr Aza
rian s'est fait un devoir de présenter à
S. M. I. le sultan une adresse de remercie
ments, et de lui exprimer de vive voix sa
profonde et sincère reconnaissance pour la
mission dont le Souverain avait bien voulu
le charger et pour l'éclatante démonstra
tion d'amitié et de bienveillance impériale
envers l'Auguste Chef de la catholicité.
Le sultan a souhaité un bon voyagé au
patriarche; il Ta chargé aussi de porter au
Saint-Père son salut impérial et de lui faire
agréer son présent comme un souvenir de
la grande solennité du jubilé papal.
On sait que, en 1888, à l'occasion du ju
bilé sacerdotal du Saint-Père, Mgr Azarian
avait porté à Sa Sainteté, comme don impé
rial, le fameux solitaire qui occupait une
place brillante dans l'exposition du Vatican.
L'exemple du sulton excitera j il faut l'es
pérer, le zèle des fidèles et des souverains
chrétiens : ils enverront à notre Père oom-
mun des offrandes précieuses et lui vien
dront aussi en aide dans ces circonstances
si solennelles.
Mgr Azarian sera accompagné de son se
crétaire, l'abbé Jean Polatian, ancien élève
du séminaire de Saint-Sulpice, et prendra
logement pendant son séjour à >Rome dans -
le collège arménien, près l'église Saint-Ni
colas de Tolentino. On dit que Mgr Azarian*
après les fêtes du jubilé, se rendra à Paris*
et de là retournera à Constanttnople par
Y Orient-Express.
L'Agence Havas nous communique
la dépêche suivante :
Vienne, 10 février.
Par suite d'une décision du conseil mu
nicipal, le bourgmestre de Vienne et ses
adjoints se sont rendus en cortège de ga|a
chez le cardinal Galimberti, pour le prier
de transmettre leurs félicitations au Pape,
à l'ocoasion de son jubilé épisoopal.
Question ecclésiastique de droit
Le 31 janvier, la cour de cassation
a rendu l'arrêt suivant dans une
affaire d'école au profit de la mense
épiscopale de Grenoble:
La cour, ouï M. le conseiller Faure-Bi-
guet, en son rapport; MM" Sabatièr et
Lesage, avocats,en leurs observations res
pectives, et M. l'avocat général Desjardins
FEUILLETON DE UUMVERS
DU 12 FÉVRIER 1893
ENFANTS DE PARIS
Esquisses d'après nature
A Passy
; Le pensionnat des frères & Passy s'élève
sur les hauteurs qui font suite au Trocadéro
et qui dominent la Seine comme les grandes
falaises de Normandie. Les bâtiments sont
magnifiques, les jardins spacieux. La cour
d'honneur a un aspect royal, et l'air le plus
pur, planant bien au-dessus des maisons de
Paris, y circule largement, symbole de
l'atmosphère morale que respirent à pleins
poumons les jeunes habitants de oette stu
dieuse demeure.
Le tableau de réduoation et de l'instruc
tion qu'il y reçoivent, des plaisirs artisti
ques et littéraires qui leur sont offerts, des
fortes vertus qui y, fleurissent, des voca
tions de tout genre qui s'y forment pour
aller s'achever.ailleurs, ne rentre pas dans
notre cadre, bien que ces pensionnaires
privilégiés ne diffèrent des enfants de Pa
ris élevés dans les écoles de frères que
par-la situation plus aisée de leurs familles
et une instruction primaire supérieure.
Mais il est un endroit, dans ce pensionnat
modèle, où les jeunes gens des patrona
ges se trouvent comme chez eux; c'est
la salle des fêtes, nne des plus belles
et des plus vastes de Paris. Trois mille per
sonnes y tiennent à l'aise, et o'est làque se
fait, en assemblée générale, la distribution
annuelle des récompenses.......
La fête est solennelle et mérite d'être
raoontée. Sur une estrade monumentale à
laquelle on accède par de nombreux degrés,
siègent les dignitaires des œuvres, les sé
nateurs de la charité, entourés de prêtres
d'élite, de religieux et de catholiques de
distinction. — Par une tradition touohante
et toujours observée depuis bien de années,
c'est l'arohevêque de Paris, le père des pe
tits et des grands, qui préside et vient se
retremper tous les ans au contaot de cette
ardente et généreuse jeunesse.
Près' de la pourpré romaine, l'habit noir
et la oravate blanche de l'orateur, qui doit
versersur l'auditoire les flots de sa parole
harmonieuse,semblent quelque peu prosaï
ques, mais dès qu'il ouvre la boucheçsa
prose est si belle qu'en un olin d'œil elle
le poétise. On ne pense plus qu'à l'écouter,
à l'applaudir, et quand on le regarde, il ap
paraît comme auréolisé, transfiguré par son
éloquence, — Inutile de dire que l'orateur
choisi est toujours éminent. C'est plus que
de tradition, c'est de règle.
Bref,' les vénérables occupants de l'es
trade, vus d'ensemble et de loin, font un
un effet imposant. De près, on s'apercevrait
bien, hélas I que l'illustration, le droit aux
places d'honneur, se paient; comme tout se
paie en ce monde, par la-jeunesse envolée,
par la calvitie des uns, la maigreur ou l'é
largissement excessif des autres, par la
barbe blanohie et les fronts sillonnés de ri
des, que sais-je ? par tout ce qui est l'op
posé de la fraîcheur et de la grâce des jeu
nes années. Mais, hâtons-nous de 'le dire,
ces injures du temps se fondent et s'effa
cent presque dans l'expression de bonté,
de sympathie, de paix sereine et joyeuse
qu'on lit sur ces visages vieillis, et je ne
crois pas mé tromper en disant qu'aux yeux
de celte jeunesse aimable et respectueuse
qui les regarde d'en bas, ces vétérans du
travail, de la foi, de la charité, de l'ensei
gnement, apparaissent revêtus du charme
des services rendus, de l'expérience indul
gente, et, pour tout dire en un mot, de la
paternité catkolique.
Quoi qu'il en soit de l'effet de l'estrade
sur l'auditoire, l'effet de l'auditoire con
templé du haut de l'estrade est inexprima
ble. Ce peuple de jeunes gens qui remplis
sent la nef, inondent les bas-côtés de la
salle et s'étendent jusqu'aux gradins occu
pés tout là-bas par l'orchestre des enfants
de Passy, de Saint-Nicolas ou du cercle des
Francs-Bourgeois; ces milliers de têtes
brunes ou blondes, dont les chevelures
rapprochées offrent l'aspect d'une immense
fourrure, ces visages illuminés de tous les
rayonnements de la jeunesse, donnent une
sensation inouïe de vie, de force, de vic
toire. Malgré le poète, on ne peut croire
que les longues pensées, les promesse's de
l'avenir n'appartiennent pas plus à cet âge
qu 'à la vieillesse ; et, quand on se dit que,
dans oes braves cœurs, vivent les ardeurs
de la foi, les énergies et les triomphes de
la chasteté, l'enthousiasme de toutes les
saintes causes, on reprend courage, on rend
grâces à Dieu, et on salue, [en cette vail
lante armée, l'espérance de l'Eglise et le
relèvement de la patrie.
Le programme de la fête est toujours le
même : ouverture à grand orchestre, dis
cours de l'orateur, déclamation, musique
vocale et instrumentale, chansonnettes
comiques, sans lesquelles une séance de
jeunes gens ressemblerait à une soupe sans
sel, appel des lauréats et distribution des
récompenses accordées à la persévérance, à
l'assiduité, au mérite ; enfin, causerie et bé
nédiction paternelle de l'archevêque prési
dent: voilà en quelques mots l'histoire de
ces solennités, qui se renouvellent tous les
ans, au printemps, et ne vieillissent jamais.
Je dois le confesser, dans ce programme
divers et abondant, ee qui amuse le plus
cette immense assemblée d'enfants de
Paris, c'est la chansonnette et le mono
logue. Ils écoulent sérieusement les choses
sérieuses ; ils sont émus, enlevés par les
grands mouvements d'éloquence, par les
accents inspirés de la foi et du patriotisme.
Ces graves impressions leur restent et vont
grossir, au fond de leur cœur, le trésor de
vérités et de sentiments dont se nourrit
leur vie chrétienne. Mais, pour la minute
présente, l'explosion de leur rire provoqué
par l'agréable .plaisanterie d'un monologue,
par le gros sel d'une chansonnette comique,
ou par les imitations dont ils raffolent, dé
passe en éclat les autres manifestations de
leur enthousiasme. C'est à cette partie, la
moins élevée de la séance, qu'ils prodi
guent les battements de mains les plus
bruyants, et les honneurs du bis impérieu
sement réclamé.
Malgré tout ce tapage de surface, l'arti
cle du programme qu'ils attendent avec le
plus d'impatience, et pour lequel ils sacri
fieraient volontiers tout le reste, c'est la
distribution des récompenses, c'est l'appel
des lauréats qui, chacun à son tour, passent
au milieu des rangs pressés de leurs cama
rades, pour aller recevoir, des mains de
l'archevêque de Paris et de ses assistants,
leurs médailles de bronze et d'argent, ou
les livres destinés aux plus jeunes.
Rien n'est plus gracieux et plus sélennel
en môme temps que de les voir escalader
les gradins de l'estrade avec leur souplesse
de-vingt ans, ^'agenouiller devant le bon
cardinal, baiser son anneau pastoral et re
descendre vivement aveo leur prix assai
sonné d'une caresse et d'une bénédiction.
Les applaudissements de l'assemblée les
accompagnent à l'aller et au retour, comme
un roulement de tambour, comme un Ùux
et un reflux d'enthousiasme qxi les apporte
et les remporte d'un bout à l'autre de la
salle.
A certains moments, le flot des applau
dissements grandit, monte et mugit en
tempête. Ces recrudescences de bruyante
sympathie s'ont toujours justifiées : on en
jugera par quelques exemples, que je choi
sis parmi tant d'autres.
Voici d'abord un soldat : c'est un membre
d'une des sociétés présentes, enlevé par le
service militaire et venu en permission pour
recevoir la récompense de ses années de
jeunesse passées au patronage. On salue 'so
uniforme par des battements de mains for
midables. Quand il se trouve aux pieds du
cardinal, agenouillé en pantalon rouge de
vant la robe iouge du prinoe de l'Eglise
l'enthousiasme s'accroît encore : ce qu'on
acclame oette fois, c'est l'union de l'Eglise
et de la France, du soldat qui donne son
sang à la patrie, et du prêtre prêt à donner
le sien pour Jésus-Christ, père de toutes
les patries.
Si le soldat porte sur sa tunique les galons
de caporal ou ceux de sous-officier, la sym
pathie s'exalte et moute d'un dégré ou deux.
Avec ces cœurs et oes mains de vingt ans,
on avance toujours sans jamais arriver au'
bout.
Mais qu'est ceci ? Pourquoi ce mouve
ment tumultueux dans les rangs, ces têtes
qui se retournent vers ce lauréat? On se
lève sur son passage, le bruit des voix se
mêle à celui des mains. Est-ce un officier ?
Non : ce n'est même pas un sergent, ni un
caporal. C'est un simple soldat, à la taille
droite, aux cheveux blonds, à l'œil bleu,
qui passe grave et digne dans ce tourbil
lon d'ardente sympathie. Il arrive au bas dé
l'estrade, en franchit les degrés : le voilà
aux pieds du cardinal, qui échange quel
ques mots avec lui et l'embrasse étroite
ment. Alors l'enthousiasme n'a plus de bor-
.nes, il se déchaîne comme une mer en furie;
les acclamations retentissent de toutes
parts, et au cri prolongé de .-Vive la France 1
se mêle un autre cri : Vive l'Alsace 1 Ge
jeune soldat, c'est un Alsacien, exilé de la
maison paternelle, du village natal, qui a
A* 9047 — Edition quotidienne
■B—BMÇa——■JMHII1W raiw
r Dimanche 12 Février 1893
ÉDITION QUOTIDIENNE
PARIS
■t département!
Un an ..... . 65 »
Six mois ..... 28 50
Trois mois. ... 15 »
ÉTRANGER
(union postal*)
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84 »
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ILas abonnements parten t dea 1 " et 16 de chaque mole
un numéro { : : àS 0 -' -
BUREAUX. g Paris, 10, rue des Saints-Pêrsr
EDITION SEMI-QUOTIDIENNE
PARIS
et départements
Un an 30 »
Six mois -16 »
Trois mois. ... 8 50
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On «'«bonne l Rome, place du Geaù, 8
Les abonnements partent des l sr et 16 de chaque dois,
L 'UNIVERS m répond pas des marais qui lui sont adressés
ANNONCES
MM. LAGRANGE, GERF et G", 6, place de la Bourse
FRANCE
PARIS, U FÉVRIER 1893 .
On a vainement attendu hiër l'in
terpellation de M. Leydet. Sera-t-elle
déposée aujourd'hui ? Les avis, sur ce
point, sont contradictoires. : Tout le
monde à gauche reconnaît la néces
sité d'une interpellation pour éclaircir
la situation créée parle vote de l'ordre
du jour Gavaignac, mais on n'est pas
rassuré sur les suites de cette inter
pellation. Gela pourrait mal tourner.
De là des hésitations, des tâtonne
ments. Les habiles et les prudents
voudraient s'assurer à l'avance d'une
entente des divers groupes de gauche,
et ce n'est pas très facile;.
Nos députés ont tenu hier_ une
séance d'affaires; ils ont terminé le
vote du budget des dépensés ; aujour
d'hui, ils doivent prendre la Moi de
finances, eh commençant par le droit
d'accroissement, à moins qu'il n'y ait
ùn nouvel ajournement, ou qu'il ne se
produise quelque incident.
Au début de là séance, hier,M, Tur-
rel a déposé une demande d'interpel
lation sur la situation économique,,
dont la discussion a été fixée à
trente jours.
Au Sénat, séance de pure forme : on
s'est réuni pour s'en aller après avoir
voté quelques, lois d'intérêt local.
Et la fameuse proposition Monis l
On était jadis si pressé de la voter. Le
rapport a été déposé et, au lieu de le
discuter, le Sénat s'est ajourné à jeudi.
On'peut croire que bien des sénateurs
regrettent de s'être trop pressés pour
cette proposition. Le député Lasserre
doit se féliciter d'avoir été prévenu
p$r le sénateur Monis.
Gomme on l'annonçait, le procès
de'Mgr Gazet contre deux francs-ma
çons de Madagascar est revenu devant
la cour de cassation ; le prononcé du
jugement a été renvoyé à huitaine. On
est . convaincu que la cour, de cassa
tion, persistant dans sa j urisprudence,
cassera le jugement de la cour d'Aix
comme elle avait cassé celui* de la
cour de la Réunion.
Nous donnons plus loin une lon
gue analyse de la note de M. Gréard,
relative à la réforme de l'orthogra
phe. On a beaucoup parlé de cette
note dont l'Académie française s'est
occupée et qui paraît y avoir trouvé ,un
médiocre accueil. Alors même qu'elle
serait à peu près repoussée, la note
mérite l'attention, au moins comme
indice des idées plus ou moins heu
reuses de réforme qui ont cours même
à l'Académie.
On n'a pas terminé hier à la Cham
bre des communes la discussion de
l'Adresse et l'on continue auj ourd'hui.
Les conservateurs ne se seront pas
rendus sans combat. Hier, un amen
dement, visant l'ingérence du clergé
catholique dans les élections irlandai
ses, a été repoussé à 43 voix de majo
rité.
(Voir aux DernièreB Nouvelles)
Allons, la France, en dépit d'un
siècle de bourgeoisisme et de vingt
ans d'opportunisme, reste elle-même.
C'est toujours la nation que les idées
emportent, enflamment ; que le triom
phe injuste et insolent révolte; qui,
lorsqu'une faute lui paraît trop sévè
rement punie,, ne voit, plus,la faute,
et dont les plus violentes colères,
même quand ce sont de justes eolères,
tombent devant un désastre, un écra
sement qui l'émeut.
Voilà ce que nous montre aujo ur
d'hui l'affaire du Panama,, qui d éjà
nous avait montré tant de choses > et
dont nous pouvons encore attendre
beaucoup. "• "
Depuis des mois et jusqu'à cette
dernière semaine, que de malédictions,
que d'injures entouraient le nom de
M. de Lesseps! Que d'accusations,
particulièrement, abaissantes, s'ajou
taient à celles que l'on pouvait rai
sonnablement formuler I Avec quelle
passion on demandait, qu'il fût frappé
à outrance afin qu'un grand exemple,
un exemple indispensable, fût donné
et que tant de pauvres gens ruinés
pussent croire encore à la justice et
goûter la vengeance !
. Il fallait du courage , pour ne pas
s'associer sans réserve à ces. clameurs,
qui voulaient dicter aux juges leur
arrêt, et l'on se serait rendu suspect,
d'avoir' soi-même touché en faisant
remarquer que toutes les sommes sous
crites n'avaient point été empochées
par les corrupteurs ou.distribuées aux
corrompuâ. Que de gens restent con
vaincus,pour l'avoir lu mille fois dans
tels et tels journaux, que M. de Les
seps tout le premier n'a jamais cru
au Panama; qu'aucun travail sérieux
et pouvant aboutir n'a jamais étér fait
dans l'isthme ; qu'enfin cette immense
entreprise n'a jamais été qu'une im
mense essroqueriel...
Mais les juges parlent; ces juges,
qu'on accusait déjà de complaisance,
de complicité, tant on craignait qu'ils
ne fussent pas assez sévères, condam
nent M. de Lesseps et son fils au maxi
mum de la peine. Ils sont sans pitié
pour ce vieillard de 87 /ans; ils ne
voient, ni dans son glorieux passé, ni
dans son affaiblissement physique et
intellectuel, ni dans l'inconnu et l'im
prévu qui l'ont accablé, rien qui atté
nue ses fautes, et ils flétrissent abso
lument le « Grand Français ».
Alors une émotion profonde, puis
sante, gagne et domine tous les esprits,
et chacun de s'écrier : C'est trop ! un
tel arrêt passe toute mesuré ; il ne fal
lait pas frapper ainsi Ferdinand de
Lesseps. Ses services et sa gloire de
vaient morne protéger quelque peu
son fils et ceux qui, admirant son gé
nie et croyant en son étoile , l'ont,
suivi.
Cette émotion trop vive, trop fran
çaise diminuera; mais il en restera
quelque chose, et ce sera bon. L'opi
nion, qui, sans être injuste, redevien
dra sévère pour les administrateurs
et directeurs du Panama, voyant les
hommes politiques, leurs compères et
complices, ou plutôt leurs oppresseurs
et exploiteurs, se tirer si bien d'affaire,
voudra que les corrompus soient trai •
tés, tout au moinâ, comme l'ont été
les corrupteurs, d'autant plus que
ceux-ci ont ' généralement cédé à
ceux-là.
Déjà cet état d'esprit s'affirme.
Vous avez durement frappé M. de
Lesseps, dit-on au gouvernement et
à la justice. Soit I Mais ce serait une
iniquité par trop criante, par trop
scandaleuse, de s'en tenir là. Il faut
poursuivre l'œuvre Commencée. La
France n'entend pas que de miséra
bles, de véreux politiciens soient épar
gnés, quand un homme qui lui a fait
honneur ne l'est pas.
De telle sorte que ces révélations
scandaleuses, dont on commençait à
se fatiguer malgré leur nécessité et
leur justice, vont être accueillies avec
une faveur nouvelle. Trop de ceux
qui tiennent le pouvoir, l'influence et
les emplois depuis quinze ans y pas
seront, pour que le régime tout entier
n'y passe point. Si le3 opportunistes
et les radicaux ont cru que l'arrêt de
la cour d'appel suffirait à~ l'opinion et
leur rendait servicé, ils se sont bien
trompés.
Eugène Veuillot.
Un de nos gens de lettres sceptique,
amateur de Bibelots, avait dans son
cabinèt une collection d'idoles de di
vers pays;, un. ami, par mégardéT en
fait tomber une, qui se casse ; « Mal
heureux, s'écrie le sceptique, qu'avez-
vous fait?C'est peut-être le vrai Dieu. »
Telle était, il y a dix ans, toute la
théologie de notre gouvernement. Dans
la discussion de la loi d'instruction
laïque, au Sénat, M. Jules Simon, avec
plusieurs de ses collègues, demandait
au nom de la philosophie, qu'on fit
mention de Dieu dans la loi: « Quel
Dieu? » objecta M. Jules Ferry, pré
sident du conseil et ministre de l'ins
truction publique et des cultes. Et il
n'en fut plus question.
pepuisj on a fini par découvrir au
ministère de l'instruction publique
quel est ce Dieu dont parlait M. Jules
Simon. A force d'entendre les hon
nêtes gens se plaindre des écoles sans
Dieu, on s'est mis à la recherche de
ce Dieu inconnu et on l'a trouvé.
Rien n'a été changé à la loi athée, à
la loi officielle ; mais, subrepticement,
à la faveur d'une nouvelle organisa
tion des écoles primaires-supérieures
publiques, on a introduit Dieu dans le
programme des matières de l'ensei
gnement dans ces écoles.
Il y est, comme par raccroc, entre
parenthèses. A la fin d'un cours de
trois ans de morale laïque, et indé
pendante, comme conclusion de l'en
seignement, l'idée de Dieu est mise au
nombre des sanctions de la morale.
Elle vient en dernier lieu,, après la
sanction intérieure de la satifaction
ou du remords, après la sanction na?
turelle des conséquences de] la bonne
ou de la mauvaise conduite, pour soi
et pour les autres, après la sanction
sociale de l'estime ou du mépris pu-:
blic. Elle figure au programme sous
cette forme,
Sanolions philosophiques ou religieuses
(l'idée de Dieu).
C'est bien peu ^que'cette mention
finale de Dieu ! au bout ■ de trois ans
d'enseignement consacré à l'étude: des
principes^ et des applications de la
morale. C'est bien peu que cette petite
place accordée à l'Etre suprême,
créateur et providence du monde,
dans la catégorie des sanctions de la
morale. Que peut être une science
morale qui attend à la fin pour faire
intervenir, comme dernier corollaire,
l'idée de Dieu ? Et cependant, avec,
notre système de'laïcisation, avec no
tre enseignement scolaire athée, on
en est réduit à considérer comme
un progrès l'insertion de l'idée de
Dieu dans les programmes d'écoles.
L'éducation morale ne sera donc plus
entièrement constituée en dehors de
Dieu ; il ne sera plus tout à fait inter
dit à l'instituteur, au moins dans les
écoles primaires supérieures et dans
les classes d'enseignement primaire
supérieur, de parler à ses élèves du
Souverain Créateur et Maitre du
monde. :
Le programme suppose même qu'il
ne se cornera pas à faire simplement
mention de l'Etre suprême, mais qu'il
parlera àt ses élèves de ce Dieu que
M. Jules Ferry a repoussé de la loi
scolaire. Car le programme dit que
« le professeur s'attachera à ne parler
des croyances religieuses qu'avec un
grand respect et de manière à ne ja
mais froisser la conscience des en
fants qui lui sont confiés. » Le maître
ne dira donc pas aux enfants qu'il ne
sait pas de quel Dieu il est question
lorsqu'on parle de Dieu; il ne le
mettra pas au nombre des idoles de
musée ou de cabinet d'antiquités ; il
n'attribuera pas l'idée de Dieu à la
peur ou à la superstition, et, loin de
rejeter ou de dénigrer les croyances
chrétiennes, il devra les traiter avec
respect.
La loi de 1884 n'est pas changée.
Mais elle se trouve un peu atténuée en
pratique par l'introduction de l'idée
de Dieu dans le nouveau programme
d'enseignement moral et par l'obliga
tion du' respect envers les croyances
chrétiennes. .
On est bien loin encore de l'ensei*
gnement religieux. La loi reste athée
et l'instruction laïque. Néanmoins, il
y a là l'indice d'une préoccupation
nouvelle dans les conseils du minis
tère de l'instruction publique. Com-
meneerait-on à comprendre que la
morale sans Dieu.est une morale vide
et inefficace ; que les écoles, sans
Dieu sont des écoles d'erreur; que la
jeunesse sans Dieu est une jeunesse
sans vertu, et que le suffrage universel
lui-niême sans Dieu est un instrument
de désordre ?
Nous en féliciterions la Répu
blique.
Arthur Loth.
Le Courrier de la. Cornouaille du
11 février nous donne la conclusion
d'une curieuse affaire, où ne brille pas
la clairvoyance du fonctionnaire :qui
préside à l'administration départe
mentale du Finistère. Cette affaire,
dont nous avons déjà dit quelque
chose, peut se résumer en peu de
mots.-*,.
Il s'agit . de l'école religieuse des
filles de Mahalon, que M. le préfet
Proudhon résolut,le 5 octobre dernier,
de laïciser. Mais, pour exécuter sans
retard cette décision, il fallait s'empa
rer du local occupé par les sœurs. Or
ce local est bâti sur un terrain appar
tenant à M. le comte de Sàlaberry, et
celui-ci, un fier chrétien, n'entendait
pas le moins du monde délaisser son
immeuble aux mains de l'administra
tion pour l'usage qu'elle en veut faire.
Ajoutons que le maire de Mahalon
n'entendait pas davantage prêter son
concours, à pareille iniquité.
Lors donc que, le 22 octobre,se pré
senta M.-l'inspecteur Nonus accompa
gnant l'institutrice qu'il venait instal
lerai! trouva la porte barrée par M. de
Salaberry, qui, avec autant de cour
toisie que de fermeté, lui disait :
« Monsieur l'inspecteur, je suis le pro
priétaire, et vous ne passerez pas. »
M. Nonus ne passa pas, mais le préfet
se flatta d'avoir le dernier mot. Après
avoir vainement incité le maire à re
vendiquer, au nom de la commune,
le local en litige, M. Proudhon, se
substituant au ïnaire, introduisait, à
la date du 10 janvier dernier, un ré
féré devant le président du tribunal
de Quimper,pour voir ordonner « pro
visoirement » l'expulsion de M. de
Salaberry et de ses ayants cause des
bâtiments de l'école communale de
Mahalon.
Fort de son droit, M. de Salaberry,
se contenta de représenter que la loi
municipale de 1884, pas plus que celle
de 1837, n'autorise le préfet à ester en
justice aux lieu et place du maire,con
trairement au vœu et à la décision du
conseil municipal. Cette objection
était concluante ; M. le préfet ni ses
conseils ne l'ayant prévue, le prési
dent du tribunal renvoya sa sentence
au 14 janvier. Ce jour-là, nouveau ren
voi, et comme véritablement, après
tous ces délais, il n'y avait plus lieu de
prononcer sur le cas en audience de
référé, c'est devant le tribunal civil
que l'affaire fut renvoyée pour être
plaidée le 17 janvier.
Or, à cette date, il fallut constater
un fait plus surprenant que tout le
reste : Mv le préfet, jusque-là si pressé
d'agir, puisqu'il avait introduit un ré
féré, déclarait n'être plus prêt à plaider
et, par l'organe de son avocat, deman
dait le renvoi. Vainement les défen
seurs de la religieuse en cause et de
M: de Salaberry s'opposaient à cette
demanderont ils faisaient ressortir la
bizarrerie. Venant au secours du pré
fet dans l'embarras, le tribunal ren
voyait la cause pour dernier délai, au
7 février. Mais ce jour-là, surprise
plus grande encore, on apprenait que
définitivement M. le préfet se désis
tait! .
Nous n'aurons pas la cruauté de
commenter cette piteuse attitude à
laquelle est réduit un administrateur,
si grossièrement ignorant de la loi
qu'il prétend appliquer dans toute sa
rigueur. Mais il est bon de rappeler
que le préfet qui. reçoit cette leçon est
le même qui,naguère, ayant à fixer le
jour du bal officiel à donner dans les
salons de la préfecture, faisait choix
de l'anniversaire de l'exécution du roi
Louis XVI, ce qui lui valut cette ré
ponse de la femme d'un fonctionnaire
qu'il y invitait : « J'irai si vous l'exi
gez, monsieur le préfet, mais alors
vous m'y verrez en toilette de deuil ! »
A côté de cette leçon, il en est une
autre qu'on ne saurail trop mettre en
lumière. Que serait-il advenu si M. le
comte de Salaberry n'avait aussi fer
mement résisté pied à pied aux pré
tentions préfectorales ? Son écoje serait
aujourd'hui occupée par une maîtresse
laïque! Avis aux catholiques qui se
raient trop enclins, en pareille cir
constance, à céder devant la première
sommation de l'arbitraire persécu
teur!
Auguste Roussel.
Une rétractation
Notre correspondant de Rome a
dénoncé à nos lecteurs l'odieux blas
phème que le député Colajanni pro
féra à la Chambre lors de la discussion
sur l'enquête parlementaire. On lit à
ce sujet dans le Moniteur de Rome.;.
Cette sacrilège et grossière insulte faite
à la foi de l'immense majorité des Italiens
au sein de l'Assemblée des représentants de
l'Italie légale, a susoi t é partout un profond
sentiment d'horreur, auquel n'ont pas man
qué de s'ajouter aussi le dégoût et la répro
bation de beaucoup d'incrédules,qui ont en-
oore le respect des convenances.
Aussi est-il arrivé, dans, telles réunions
publiques, que des observations ont été
faites à ce sujet à M. Colajanni et que
celui-ci n'a pas caché son regret d'avoir
laissé échapper un blasphème qui, impiété
& part, est une inconvenance vulgaire.
Mais verba volant,et il était à désirer que
la retractation fût mieux constatée et plus
eflicaoe.
C'est pourquoi Mgr Deggiovanni, prélat
bien connu pour son zèle, n'a pas hésité à
écrire au député blasphémateur pour lui
manifester toute l'horreur qu'une aussi
odieuse offense aux sentiments les plus
chers des catholiques avait suscitée parmi
eux et pour l'exhorter à vouloir réparer ce
soandale. 4
M. Colajanni a aussitôt répondu, en dé
clarant que « bien qu'il n'ait pas personnel
lement la foi dans le dogme de l'Immaculée
Conception de Marie, il reconnaît avoir mal
fait d'offenser la oroyance professée par le
grand nombre et qu'il a, dit-il, toujours res
pectée » ; il ajoute le regretter surtout « à
cause de la manière inconvenante dont cette
offense lui a échappé dans un moment d'ex
citation ».
Nous ne pouvons que prendre acte de cette
rétractation et en louer la franchise.
Mais nous devons observer qu'il est ar
rivé à M. Colajanni, comme à d'autres im
pies qui font profession d'incrédulité, de
vivrô dans une ignorance grossière de la
religion et de blasphémer ce qu'ils ne con
naissent même pas. C'est ainsi que, dans
sa lettre de rétractation, M. Colajanni, ne
sachant pas faire de distinction entre le
dogme de la virginité de Marie et celui de
son Immaculée Conception,parle de celui-oi
et oublie que son blasphème avait été lancé
contre celui-là.
Encore une fois, on ne saurait avoir plus
d'ignorance des choses de la religion, et
ceux qui affectent de ne pas y oroire, fe
raient mieux d'avouer qu'ils ne la oônnais-
sent point.
Le Jubilé épiscopal du Pape
Voici de nouveaux détails donnés;
par les Missions Catholiques, dans une
lettre de Gonstantinople,sur la mission
de Mgr Azarian auprès du P8pe :
S. B. Mgr Azarian, pntriarche des Ar
méniens catholiques, devait se rendre à
Rome pour assister aux fêtes du jubilé
épiscopal de Sa Sainteté, S. M. I. le sultan
a bien voulu encore cette fois lui confier,
par un iradé impérial, la mission honori
fique de présenter à Sa Sainteté l'expres
sion de ses sentiments d'amitié et ses féli
citations à l'oûfcasion de son jubilé épisco-,
pal. Sa Béatitude doit en môme temps re-
mettre au Saint-Père une tabatière en or,:
enrichie de brillants. Une lettre de S. A. le,
grand vizir notifie à S. Em. le cardinal
Rampolla cette mission de Mgr Azarian*
qui est en môme temps porteur de deux
grands cordons de Tordre du Medjidié que
le sultan a gracieusement accordés, sur la .
demande du patriarche, à S. Em. le cardi
nal Ledoohowski, préfet de la Propagande,
et & S. Em. le cardinal Mocenni.
La nouvelle répandue dans cette capitale
de cette nouvelle preuve des bons senti
ments du sultan envers le Chef auguste de
la catholioité a produit une profonde im
pression ; on a vu, encore une fois, dans la
haute bienveillance et la déférenoe que Sa
Majesté nourrit pour Sa Sainteté, un té-:
moignage de confiance à l'égard du patriar
che arméno-oatholique; et de sympathie
pour les catholiques en général. Aussitôt
que cette nouvelle arrivera dans les pro
vinces de l'empire, elle produira un effet
salutaire sur toutes les autorités officielles,
rehaussera le prestige du patriarche et des
catholiques,et donnera une nouvelle impul
sion au mouvement de conversions, surtout
dans le sein de la communauté arménienne
non unie.
Mgr Azarian quittera Constantinople
dans quelques jours pour se rendre par voie
de Brindisi à Rome, où déjà quatre de ses
évêques'suffragants l'attendent. Mgr Aza
rian s'est fait un devoir de présenter à
S. M. I. le sultan une adresse de remercie
ments, et de lui exprimer de vive voix sa
profonde et sincère reconnaissance pour la
mission dont le Souverain avait bien voulu
le charger et pour l'éclatante démonstra
tion d'amitié et de bienveillance impériale
envers l'Auguste Chef de la catholicité.
Le sultan a souhaité un bon voyagé au
patriarche; il Ta chargé aussi de porter au
Saint-Père son salut impérial et de lui faire
agréer son présent comme un souvenir de
la grande solennité du jubilé papal.
On sait que, en 1888, à l'occasion du ju
bilé sacerdotal du Saint-Père, Mgr Azarian
avait porté à Sa Sainteté, comme don impé
rial, le fameux solitaire qui occupait une
place brillante dans l'exposition du Vatican.
L'exemple du sulton excitera j il faut l'es
pérer, le zèle des fidèles et des souverains
chrétiens : ils enverront à notre Père oom-
mun des offrandes précieuses et lui vien
dront aussi en aide dans ces circonstances
si solennelles.
Mgr Azarian sera accompagné de son se
crétaire, l'abbé Jean Polatian, ancien élève
du séminaire de Saint-Sulpice, et prendra
logement pendant son séjour à >Rome dans -
le collège arménien, près l'église Saint-Ni
colas de Tolentino. On dit que Mgr Azarian*
après les fêtes du jubilé, se rendra à Paris*
et de là retournera à Constanttnople par
Y Orient-Express.
L'Agence Havas nous communique
la dépêche suivante :
Vienne, 10 février.
Par suite d'une décision du conseil mu
nicipal, le bourgmestre de Vienne et ses
adjoints se sont rendus en cortège de ga|a
chez le cardinal Galimberti, pour le prier
de transmettre leurs félicitations au Pape,
à l'ocoasion de son jubilé épisoopal.
Question ecclésiastique de droit
Le 31 janvier, la cour de cassation
a rendu l'arrêt suivant dans une
affaire d'école au profit de la mense
épiscopale de Grenoble:
La cour, ouï M. le conseiller Faure-Bi-
guet, en son rapport; MM" Sabatièr et
Lesage, avocats,en leurs observations res
pectives, et M. l'avocat général Desjardins
FEUILLETON DE UUMVERS
DU 12 FÉVRIER 1893
ENFANTS DE PARIS
Esquisses d'après nature
A Passy
; Le pensionnat des frères & Passy s'élève
sur les hauteurs qui font suite au Trocadéro
et qui dominent la Seine comme les grandes
falaises de Normandie. Les bâtiments sont
magnifiques, les jardins spacieux. La cour
d'honneur a un aspect royal, et l'air le plus
pur, planant bien au-dessus des maisons de
Paris, y circule largement, symbole de
l'atmosphère morale que respirent à pleins
poumons les jeunes habitants de oette stu
dieuse demeure.
Le tableau de réduoation et de l'instruc
tion qu'il y reçoivent, des plaisirs artisti
ques et littéraires qui leur sont offerts, des
fortes vertus qui y, fleurissent, des voca
tions de tout genre qui s'y forment pour
aller s'achever.ailleurs, ne rentre pas dans
notre cadre, bien que ces pensionnaires
privilégiés ne diffèrent des enfants de Pa
ris élevés dans les écoles de frères que
par-la situation plus aisée de leurs familles
et une instruction primaire supérieure.
Mais il est un endroit, dans ce pensionnat
modèle, où les jeunes gens des patrona
ges se trouvent comme chez eux; c'est
la salle des fêtes, nne des plus belles
et des plus vastes de Paris. Trois mille per
sonnes y tiennent à l'aise, et o'est làque se
fait, en assemblée générale, la distribution
annuelle des récompenses.......
La fête est solennelle et mérite d'être
raoontée. Sur une estrade monumentale à
laquelle on accède par de nombreux degrés,
siègent les dignitaires des œuvres, les sé
nateurs de la charité, entourés de prêtres
d'élite, de religieux et de catholiques de
distinction. — Par une tradition touohante
et toujours observée depuis bien de années,
c'est l'arohevêque de Paris, le père des pe
tits et des grands, qui préside et vient se
retremper tous les ans au contaot de cette
ardente et généreuse jeunesse.
Près' de la pourpré romaine, l'habit noir
et la oravate blanche de l'orateur, qui doit
versersur l'auditoire les flots de sa parole
harmonieuse,semblent quelque peu prosaï
ques, mais dès qu'il ouvre la boucheçsa
prose est si belle qu'en un olin d'œil elle
le poétise. On ne pense plus qu'à l'écouter,
à l'applaudir, et quand on le regarde, il ap
paraît comme auréolisé, transfiguré par son
éloquence, — Inutile de dire que l'orateur
choisi est toujours éminent. C'est plus que
de tradition, c'est de règle.
Bref,' les vénérables occupants de l'es
trade, vus d'ensemble et de loin, font un
un effet imposant. De près, on s'apercevrait
bien, hélas I que l'illustration, le droit aux
places d'honneur, se paient; comme tout se
paie en ce monde, par la-jeunesse envolée,
par la calvitie des uns, la maigreur ou l'é
largissement excessif des autres, par la
barbe blanohie et les fronts sillonnés de ri
des, que sais-je ? par tout ce qui est l'op
posé de la fraîcheur et de la grâce des jeu
nes années. Mais, hâtons-nous de 'le dire,
ces injures du temps se fondent et s'effa
cent presque dans l'expression de bonté,
de sympathie, de paix sereine et joyeuse
qu'on lit sur ces visages vieillis, et je ne
crois pas mé tromper en disant qu'aux yeux
de celte jeunesse aimable et respectueuse
qui les regarde d'en bas, ces vétérans du
travail, de la foi, de la charité, de l'ensei
gnement, apparaissent revêtus du charme
des services rendus, de l'expérience indul
gente, et, pour tout dire en un mot, de la
paternité catkolique.
Quoi qu'il en soit de l'effet de l'estrade
sur l'auditoire, l'effet de l'auditoire con
templé du haut de l'estrade est inexprima
ble. Ce peuple de jeunes gens qui remplis
sent la nef, inondent les bas-côtés de la
salle et s'étendent jusqu'aux gradins occu
pés tout là-bas par l'orchestre des enfants
de Passy, de Saint-Nicolas ou du cercle des
Francs-Bourgeois; ces milliers de têtes
brunes ou blondes, dont les chevelures
rapprochées offrent l'aspect d'une immense
fourrure, ces visages illuminés de tous les
rayonnements de la jeunesse, donnent une
sensation inouïe de vie, de force, de vic
toire. Malgré le poète, on ne peut croire
que les longues pensées, les promesse's de
l'avenir n'appartiennent pas plus à cet âge
qu 'à la vieillesse ; et, quand on se dit que,
dans oes braves cœurs, vivent les ardeurs
de la foi, les énergies et les triomphes de
la chasteté, l'enthousiasme de toutes les
saintes causes, on reprend courage, on rend
grâces à Dieu, et on salue, [en cette vail
lante armée, l'espérance de l'Eglise et le
relèvement de la patrie.
Le programme de la fête est toujours le
même : ouverture à grand orchestre, dis
cours de l'orateur, déclamation, musique
vocale et instrumentale, chansonnettes
comiques, sans lesquelles une séance de
jeunes gens ressemblerait à une soupe sans
sel, appel des lauréats et distribution des
récompenses accordées à la persévérance, à
l'assiduité, au mérite ; enfin, causerie et bé
nédiction paternelle de l'archevêque prési
dent: voilà en quelques mots l'histoire de
ces solennités, qui se renouvellent tous les
ans, au printemps, et ne vieillissent jamais.
Je dois le confesser, dans ce programme
divers et abondant, ee qui amuse le plus
cette immense assemblée d'enfants de
Paris, c'est la chansonnette et le mono
logue. Ils écoulent sérieusement les choses
sérieuses ; ils sont émus, enlevés par les
grands mouvements d'éloquence, par les
accents inspirés de la foi et du patriotisme.
Ces graves impressions leur restent et vont
grossir, au fond de leur cœur, le trésor de
vérités et de sentiments dont se nourrit
leur vie chrétienne. Mais, pour la minute
présente, l'explosion de leur rire provoqué
par l'agréable .plaisanterie d'un monologue,
par le gros sel d'une chansonnette comique,
ou par les imitations dont ils raffolent, dé
passe en éclat les autres manifestations de
leur enthousiasme. C'est à cette partie, la
moins élevée de la séance, qu'ils prodi
guent les battements de mains les plus
bruyants, et les honneurs du bis impérieu
sement réclamé.
Malgré tout ce tapage de surface, l'arti
cle du programme qu'ils attendent avec le
plus d'impatience, et pour lequel ils sacri
fieraient volontiers tout le reste, c'est la
distribution des récompenses, c'est l'appel
des lauréats qui, chacun à son tour, passent
au milieu des rangs pressés de leurs cama
rades, pour aller recevoir, des mains de
l'archevêque de Paris et de ses assistants,
leurs médailles de bronze et d'argent, ou
les livres destinés aux plus jeunes.
Rien n'est plus gracieux et plus sélennel
en môme temps que de les voir escalader
les gradins de l'estrade avec leur souplesse
de-vingt ans, ^'agenouiller devant le bon
cardinal, baiser son anneau pastoral et re
descendre vivement aveo leur prix assai
sonné d'une caresse et d'une bénédiction.
Les applaudissements de l'assemblée les
accompagnent à l'aller et au retour, comme
un roulement de tambour, comme un Ùux
et un reflux d'enthousiasme qxi les apporte
et les remporte d'un bout à l'autre de la
salle.
A certains moments, le flot des applau
dissements grandit, monte et mugit en
tempête. Ces recrudescences de bruyante
sympathie s'ont toujours justifiées : on en
jugera par quelques exemples, que je choi
sis parmi tant d'autres.
Voici d'abord un soldat : c'est un membre
d'une des sociétés présentes, enlevé par le
service militaire et venu en permission pour
recevoir la récompense de ses années de
jeunesse passées au patronage. On salue 'so
uniforme par des battements de mains for
midables. Quand il se trouve aux pieds du
cardinal, agenouillé en pantalon rouge de
vant la robe iouge du prinoe de l'Eglise
l'enthousiasme s'accroît encore : ce qu'on
acclame oette fois, c'est l'union de l'Eglise
et de la France, du soldat qui donne son
sang à la patrie, et du prêtre prêt à donner
le sien pour Jésus-Christ, père de toutes
les patries.
Si le soldat porte sur sa tunique les galons
de caporal ou ceux de sous-officier, la sym
pathie s'exalte et moute d'un dégré ou deux.
Avec ces cœurs et oes mains de vingt ans,
on avance toujours sans jamais arriver au'
bout.
Mais qu'est ceci ? Pourquoi ce mouve
ment tumultueux dans les rangs, ces têtes
qui se retournent vers ce lauréat? On se
lève sur son passage, le bruit des voix se
mêle à celui des mains. Est-ce un officier ?
Non : ce n'est même pas un sergent, ni un
caporal. C'est un simple soldat, à la taille
droite, aux cheveux blonds, à l'œil bleu,
qui passe grave et digne dans ce tourbil
lon d'ardente sympathie. Il arrive au bas dé
l'estrade, en franchit les degrés : le voilà
aux pieds du cardinal, qui échange quel
ques mots avec lui et l'embrasse étroite
ment. Alors l'enthousiasme n'a plus de bor-
.nes, il se déchaîne comme une mer en furie;
les acclamations retentissent de toutes
parts, et au cri prolongé de .-Vive la France 1
se mêle un autre cri : Vive l'Alsace 1 Ge
jeune soldat, c'est un Alsacien, exilé de la
maison paternelle, du village natal, qui a
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