Titre : Le Constitutionnel : journal du commerce, politique et littéraire
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1869-08-10
Contributeur : Véron, Louis (1798-1867). Rédacteur
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 10 août 1869 10 août 1869
Description : 1869/08/10 (Numéro 222). 1869/08/10 (Numéro 222).
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Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/02/2011
c. t;
54e ANNEE.—N* 222»
BUREAUX A PARIS
rue de Valois (Palais-Royal)? n7 40«
»^, m s-i«âteigÉèsiBaâa:
MARDI' 10 AOUT I
ab0nnemen3 des dèpaetemens^
AEfONNEMENS DE PARIS.
TROIS MOIS.;..
SIX MOIS.
UN AN.
16 FR.
32 FR.
64
FR.
—hï'îiifc.t.es pats étrangers , voir le tableau
publié les s et 30 de chaque mois.
Imprimerie du Constitutionnel,
E. Gibîat et C®.
rue des Bons-Enfans, 19.
TROIS MOIS....
SIX MOIS
UN AN.........
18 FR.
26 FR.
32 FR.
UN NUMÉRO 20 CENTIMES.
JOURNAL POLITIQUE LITTERAIRE
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Les AnnoneeFne^oTU^recu^^el'otîs'la réserve 1 ^examen',, f^Uya lieu, de modification par
du journal. •
T.'jCZ
PARIS, 9 AOUT.
Pas de nouvelles d'Espagne. La retraite de
Sabariego en Portugal est démentie parles
correspondances de source carliste. Des sou-
lèvemens ont eu lieu en Catalogne; mais les
détails manquent. Le ministère sent la né
cessité de sortir le plus tôt possible du pro-
vis«ire : aussi, ne sommes-nous pas éton
nés d'apprendre que la première question
dont s'occuperont les Gortès lors de leur
prochaine réunion sera l'élection du mo
narque." Sans doute ce serait là un grand
pas de fait, si on pouvait seulement le
faire; mais, par les temps qui courent, il
ne suffit pas* toujours de vouloir un roi :
les princes sont devenus difficiles, ils s'in
forment des conditions avant d'endosser
la pourpre et l'hermine. La .Roumanie et
la Grèce ont eu bien du niai à trouver des
souverains. L'Espagne a déjà essuyé plu
sieurs xefus; ilost vrai qu'elle s'était adres
sée à des étrangers, et l'Espagne n'aime pas
l'étvanger.
Du côté de Cuba, la situation ne s'éclair-
cit pas non plus. A Washington, de puis
santes influences se remuent pour faire
abandonner la politique d'abstentiQû vis-à-
vis de l'insurrection cubaine. Le gouverne
ment de Madrid se propose d'envoyer des
renforts à la Havane! c'est dire que les nou
velles ne sont pas bonnes.
La délégation du Parlement hongrois pour
lés affaires austro-hongroises a donné un
■vote de confiance à M. de Beust. Un vif dé
bat a eu lieu, au sein de cette assemblée,
sur la politique extérieure. Plusieurs mem
bres ont pris la parole, soit pour défendre,
soit pour critiquer la politique de M. de
Beust; le baron Orczy, commissaire du cabi-
riftt austro^hongrois, a répondu aux orateurs
iet fourni des explications. A la suite de ces
débats, le budget des affaires extérieures a
ét£ voté tel qu'il avait été proposé par le
gouvernement. La majorité, par l'organe,de
ses orateurs et par son vote,a donné son ad
hésion à la politique suivie par M. de Beust
daiis les affaires d'Allemagne et d'Orient.
Ce fait mérite d'autant plus d'être signalé
que, dans ces derniers temps, le presse
prussienne s'était appliquée à semer la mé
fiance entre Pesth et Vienne et à soutenir
cette thèse que la politique de M. de Beust
était contraire aux intérêts hongrois, de
plus, qu'elle était impopulaire en Hongrie.
A l'heure-qu'il est, il ne subsiste plus de
douté sur la parfaite harmonie de vues en
tra les représentans officiels de l'empire
aastro-hongrois. :
A Vienne,-on s'entretient toujours de la
dépêcha prussienne relative à l'attitude que
M. «le Beust a prise dans l'incident franco-
beJ;ge, Le public est à môme aujourd'hui de
S6 former une opinion sur cette affaire. La
dépêche prussienne prouve qu'en somme
M. de Beust a dit vrai en affirmant que le ca
binet de Berlin avait inexactement corinmenté
-auprès des gouvernemens allemands la po
litique autrichieine. M. de Thile, sous-sè-
erétaire d'Etat, et signataire.de la dépêche
prussienne, refuse toute explication à ce
sujet, non parce qu'il regarde le reproche
comme injuste, mais parce que, selon lui,
les communications diplomatiques entre la
Prusse et d'autres Etats allemands ne re
gardent pas Iqs puissances étrangères, l'Au
triche naturellement comprise.
Cette manière dë .voir, s'appuie évidem
ment sur la, lettre du traité de Prague qui
laisse à la Prusse pleinè liberté dans l'Alle
magne du Nord. C'est là un argument bien
délicat vis-à-vis de l'Autriche qui, du mo
ment qu'on invoque devant elle, le , traité
de Prague, pourrait précisément rappeler les
stipulations non exécutées jusqu'ici de ce
traité, entre autres celles qui ont' trait à.la
Confédération des Etats du Sud.
Au point de vue européen, nous avons dé
jà fait ressortir ce qu'il y a d'inadmissible
dans la prétention émise dans la dépêche
prussienne, à savoir que les puissances étran
gères n'avaient pas à prendre connaissance
des rapports diplomatiques de la Prusse
avec les États allemands. Nous n'avons rien
à ajouter à ces réflexions.
Le fait important c'est que la délégation
hongroise a voté les dépenses pour la léga-
SSBBOBBSaBS
-—7; < jv > „■ A 1
tion £ustra-hâpgroise-à Ipresde. Ce vote est
significatif;, 1 ; Ç" |
V V tJ ,~>. r /édouard simon.
tëk(wêie privée.
AGENCE HAVAS.
Etats-Unis.
New-York. 7 aioût, soir.
(par le câDle«françai3.)
On assure que des membres influens du Con
grès poussent fortement le gouvernement à re
connaître les droits de beliigérans aux ins urgé
cubains. -
Espagne;
Madrid,août, soir.
L Impartial assure que £0,000 hommes de
renfort seront envoyés à Cuba en septembre
prochain. Il .dit ensuite: « La première question
dont s'occuperont les Coriès, lors de leur réu -
nion en octobre prochain, sera l'élection du
monarque. ».
Deux sergens de la garde civile (gendarme
rie) ont été arrêtés cette nuit porteurs de vingt
brevets d'çfficiers,. On a également arrêté un
individu se disant capitaine général de la Nou
velle Castille et un autre se disant commandant
général de Madrid, au nom de Don Carlos.
Italie.
.... Venise, 9 août.
On fait ici des préparatifs au palais royal
pour recevoir l'Impératrice des Français. On as
sure que Sa Majesté arrivera le 1 er septembre.
Elle sera accompagnée par le roi Victor-Em
manuel.
france.
- Grenoble, 9 août.
Election d'un conseiller général pour le can
ton de Sassenage : .
M. Giraud, candidat officiel, a été élu par 661
voix ; M. Reynaud en a obtenu 632.'
Dans le canton sud de Vienne, M. Joliot, can
didat de l'administration, a été élu conseiller
général par 1,879 voix ; M. Roujat (opposition),
en a obtenu 1,826.
SERVICE DE NUIT.
Antrlelte.
Lemberg, 9 août.
L'ex-gouverneur de la Galicie, M. Goluchowski,
déclare qu'il est nécessaire que la Galicie envoie
le nombre complet do ses , députés au Reichs-
rath: que l'abstention n'aurait aucun avantage
et que la politique de M: Smoika ne s'accorde
jjas avec sa conscience. .......
Espagne.
Madrid, 9 août.
Hier, 17 gardes civiques de la garnison de
Madrid ont été arrêtés. Ils étaient porteurs de
brevets de sousrtieutenans de l'armée do don
Carlos.
La Gazelle annonce que Balansteguy, chef
d'une bande carliste, a été fusillé le 6 août à
Valcobedo.
On pense que la bande de Polo est dissoute.
Les bandes de la. province de Léon sont com
plètement dissoutes. , .
Amérique.
. Saint Nazaire, 9 août, 3 h. du soir.
Le paquebot do la compagnie générale tran
satlantique, la Louisiane, mouille à l'instant
sur notre rade, avec les dépêches du Mexique,
de la Havane, de Saint-Thomas et des Àutillos
françaises.
La* Louisiane apporte 82 passagers, 3S0 ton
neaux de marchandises et 400,000 francs d'es
pèces à fret. ' " •
Plusieurs faillites importantes avaient para
lysé le commerce à Mexico. •
• A la Havane, la tranquillité n'était pas encore
rétablie, mais on espérait beaucoup de la pru
dence et de l'énergie du gouverneur Rodas.
Chaque jour nous apporte une adhésion
nouvelle à l'Empire libéral. Chaque jour un
irréconcilié de la veille se rapproche et se
place franchement, loyalement sur le ter
rain constitutionnel. :
Certes , nous n'espérons pas désarmer
l'opposition irréconciliable. Il est des ambi
tions qui ne se résignent jamais. Les a re
vendicateurs » resteront ce qu'ils sont. Leur
origine, leurs professions de foi, leur intérêt
personnel leur en font une loi. Mais si le sé-
natus-consulte ne les réconcilie pas, du
moins il leur arrache leur drapeau libéral,
il les oblige à renoncer à leur programme et
à se déclarer révolutionnaires.
C'est là une grande victoire pour le gou
vernement impérial.
Le jour où l'opposition ne représente que
la guerre civile contre la liberté, elle n'est
plus à craindre. Mais pour que la victoire de
l'Empire soit complète, éclatante, indiscu
tée, ne faut-il pas que les actes du gouver
nement soient en complet accord avec les
principes que l'Empereur vient de procla
mer ? ne faut-il pas que les lois libérales '
soient libéralement appliquées?
Au moment où le souverain vient de
provoquer lui-même une sorte de révolu
tion constitutionnelle, pourquoi encore des
CTgrsE iuuiumaim j BEB
procès de presse? pourquoi des incarcé
rations ? Une politique généreuse est tou
jours une bonne politique et il est certain
qu'une amnistie générale, qui effacerait les
condamnations passées, et préviendrait les
condamnations futures, donnerait une en
tière satisfaction à l'opinion publique.
En France, les grandes victoires sont tou
jours suivies d'une amnistie.
Est-il dans l'histoire une victoire plus
grande, plus noble, plus décisive, que celle
que l'Empereur vient de remporter sur ses
ennemis à l'intérieur?
. Le message du 12 juillet n'est-il pas plus
important pour l'avenir de notre pays que
la bataille de l'Aima ou celle de Solférino?
L'amnistie d'abord, la liberté ensuite, car
l'expérience a démentré'que si les procès
dé presse sont parfois dangereux, ils sont
toujours inutiles.
Robert Mitchell.
COURS DE LA BOURSE.
cours de clôture. ie7 le 9 Hausse. Baisse
30/0aucompt. 73.20 73 20
—Fin du mois. 73 27 73 30
41/2aucompt. 104.25 104. »
o
02
»
I)
»
25
LE PROJET DE SÉNATUS-CONSULTE.
IV.
L'article 5 du projet de sénatus-consulte
étend et transforme les attributions du Sénat.
Rechercher dans les Constitutions an
ciennes les précédens de la question, c'est
faire l'histoire de la Chambre haute et de
son rôle dans les institutions pelitiques de
la France. ,,
Il semble qu'au début de la Révolution
française, l'établissement des deux Cham
bres dût se présenter naturellement à l'es-
, prit des hommes libéraux et patriotes qui
travaillaient à transformer la monarchie ab
solue en un gouvernement représentatif et
pondéré. Les élémens de la Chambre haute
existaient ; il suffisait de détacher du Parle
ment la cour des pairs, composée des prin
ces du sang et des pairs héréditaires, et de
grouper autour de cette aristocratie tradi
tionnelle des hommes nouveaux que là cou
ronne aurait choisis, parmi les plus illustres
et les plus respectés.
Mais ce fut à la fois la grandeur et le
malheur de la Révolution française ; elle ne
voulut rien accepter du passé ; elle conçut
le gouvernement comme une formule abs
traite qui .se déduit d'un principe absolu ;
affamée d'égalité, elle ne supportait pas l'i
dée de .consacrer l'existence légale d'une
noblesse qui lui était odieuse.;
D'ailleurs, un événement capital domine
au début cette phase de notre histoire ; c'est
la déclaration par laquelle les,Etats-Géné
raux se proclamèrent Assemblée 1 nationale^
La réunion des trois ordres, tel est le pre
mier acte de la Révolution., Le système des
deux Chambres paraissait, à tout le mon
de, une tentative de réaction contre la réu
nion des ordres et, par conséquent, contre la
révolution elle-même. Aussi se trouvait-il
immédiatement frappé et de discrédit et
d'impopularité; ceux qui en étaient les par
tisans ou qu'on soupçonnait de l'être, et qui
pour la plupart faisaient partie du club des
Feuillant se virent qualifiés du surnom
méprisant de parti ministériel, car la gauche
ne voulait ni , des d'àux< Chambres ■• ni d u
gouvernement parlementaire; et la défa
veur attachée au système anglais, considéré
comme le triomphe de l'aristocratie, fut si
grande que, dans la discussion de la Cons
titution de 1791, M. de Lally-Tollendal eut
seul le courage de demander l'établissement
d'une Chambre des pairs.
Il y avait là plus qu'un préjugé, il y avait
un sentiment de haine £t, une passion que
les membres de la Législative éprouvèrent
aussi profondément que lés membres de la
Constituante. Un' curieux article du Moni
teur universel du 27 ayril 1792 dénonça
comme encore dangereuse l'ancienne « coa-*
lition » qui avait pour but « d'amener, par/
» une subversion générale, le retour dé la
» noblesse et l'établissement d'une Chambre
» haute dans le Corps Législatif. »
Dans l'Assemblée, les partis extrêmes
s'accusaient réciproquement,comme de des
seins également pernicieux et séditieux, les
uns de vouloir la destruction de la monar
chie,, les entres s de vouloir la destruction
» de l'égalité constitutionnelle et le gouver-
» nemént aristocratique connu sous le nom
» des deux Chambres. » Ce sont les expres
sions mêmes qu'employa l'abbé Lamou-
rette, dans la séance du 8 juillet 1792, pour
exposer l'objet de sa fameuse motion ainsi
conçue : « Foudroyons, Messieurs, par une
» exécration commune, et par un irrévoca-
» ble serment, foudroyons et la République
» et les deux Chambres... Je demande que
» M. le président (M. de Girardin) mette aux
» voix cette proposition : Que ceux qui ab-
» jurentégalement et exècrent la République
» et les deux Chambres se lèvent!... »
Tout le monde s'embrassa : monarchistes,
constitutionnels ou autoritaires, feuillans,
jacobins et républicains Trente-t r ois
jours plus tard, le roi était chassé de son
palais par l'émeute triomphante, et après
quarante et un autres jours , la République
était proclamée.
Il ne fallut rien moins que les fautes, les
malheurs, les faiblesses ■ et les crimes des
assemblées uniques pour transformer l'opi
nion publique, si violemment prévenue con
tre le système des deux Chambres.
Il apparut enfin dans la Constitution de
l'an 111, sous des conditions particulières et
avec des tempéramens combinés en vue de
réfuter les„objections et de faire certaines
concessions aux préventions anciennes.
Ainsi, l'existence de deux Chambres dis
tinctes est atténuée et pour ainsi dire voilée
par la fiction d'un Corps Législatif unique
divisé en deux Conseils.
Les deux Chambres sont nommées par
le même vote du suffrage universelles con
tribuables fonctionnant à deux degrés.
L'initiative, l'aetion, le vote prépondérant
sont laissés à la Chambre des jeunes, du con
seil des Cinq-Cents. Le conseil des Anciens,
ou Chambre haute, n'a qu'uû droit de rejet et
d'annulation pour cause d'inconstitutionna-
lité. 11 peut repousser la loi, mais non la
modifier. La ressemblance est grande entre
le conseil des Anciens et le Sénat de la Con
stitution de 1852. Il avait, comme,celui-ci,
le droit de proposer la révision partielle de
la Constitution ; seulement, sa proposition
devait être, ratifiée par le conseil des Cinq-
Cents.
Ii est facile d'apercevoir, dans le mode
dexiâtence du conseil des Anciens, l'esquis
se très avancée du Sénat conservateur ins
titué par la Constitution consulaire, de
l'an VIII.
La grande originalité de cette Constitution,
lentëmerfi élaborée dans le cerveau de Sieyès,
c'était les listes nationales , s'engendrant
l'une l'autre, de telle sorte que le suffrage
universel des citoyens inscrits sur les listes
communales formait les listes d'arrondisse
ment; le suffrage des électeurs,d'arrondisse
ment donnait les listes départementales; en
fin les électeurs de département préparaient
la liste nationale, sur laquelle le Sénat éli
sait lés membres du Corps Législatif, du
Tribunat, de la cour de cassation et de la
cour des comptes (commission de la comp
tabilité). Le Sénat se recrutait d'obord lui-
même sur des propositions faites par le
Corp#Législatif, le Tribunat et les conseils.
Mais, dans la suite, les sénateurs furent
nommés directement par le Premier Consul
et par l'Empereur. ;
Le Sénat maintenait ou annulait les actes
qui lui étaient déférés comme inconstitu
tionnels par le Tribunal ou par le gouverne
ment, y compris les listes d'éligibles. Sauf
le recours d'inconstitutionnalité, il ne pre
nait aucune part à la confection des lois et
n'intervenait pas dans leur promulgation.
Le sénatus-consulte organique de l'an X
ajouta aux attributions du Sénat : le règle
ment de la Constitution des colonies ; l'in
terprétation et le complément la Consti
tution; le droit de suspendre pour cinq ans
l'institution du jury dans certains départe-
mens, et de les mettre hors de la Constitu
tion, ce qui était un espèce d'état de siège
civil; d'annuler les jugemens des tribunaux,
lorsqu'ils étaient considérés comme attenta
toires à la sûreté de l'Etat; enfin de dissou
dre le Corps Législatif et le Tribunat.
Outre ces prérogatives exorbitantes et con
traires à la séparation des pouvoirs, le Sénat
reçut du sénatus-consulte organique de
l'an XII la mission de veiller à la liberté de
la- presse et à la liberté individuelle en
statuant sur les recours que des particu
liers lui adresseraient, et le droit de for
muler l'opinion qu'il y a lieu de ne pas
promulguer une loi votée par le Corps Lé
gislatif, dans le cas où cette loi serait dénon
cée par un sénateur comme inconstitution
nelle, ou comme tendant au rétablissement
du régime féodal, ou Comme contraire S
l'irrévocabilité des ventes des bleûs natio
naux. L'avis du Sénat donnait lieu ultérieu
rement à une procédure singulière. L'Empe
reur devait ensuite entendre le conseil d'Etat
et déclarer par un décret qu'il adhérait à la
délibération du Sénat, ou promulguer la loi
dans les dix jours. Passé ce délai, la loi ne
pouvait plus être promulguée si elle n'avait
été de nouveau délibérée et adoptée par le
Corps Législatif. Enfin, le Sénat, qui avait
déjà le droit d'annuler et de casser tant de
choses, fut autorisé à casser, pour cause
d'inconstitutionnaUté, les opérations des
collèges électoraux.
Le Sénat, on le voit, avait fini par dévo
rer, absorber et confondre tous les pouvoirs
dans son sein. Il ne pouvait plus être qu'un
instrument de tyrannie, soit au profit du
chef de l'Etat, soit contre lui.
La Chambre des pairs, dans laquelle le
Sénat conservateur s'introduisit presque
tout entier en 1814, n'eut rien decesredou^
tables et dangereux privilèges. Elle fut sim
plement une portion de pouvoir législatif,
n'ayant d'autre initiative, comme la Cham
bre des députés, que la faculté de supplier
le monarque de proposer telle ou telle loi.
Les pairs étaient nommés par le roi, viagers
ou héréditaires. La Chambre fut investie du
droit de juger les ministres mis en accusa
tion par la Chambre des députés et de con
naître des crimes de haute trahison et des
attentats à la sûreté de l'Etat.
L'acte additionnel de 1815 et la Charte de
1830 ne modifièrent point le caractère de la
Chambre des pairs , sauf en .ce point que
l'acte additionnel attribua l'hérédité à cha
cun de ses membres , et que l'article 68 de
la Charte de 1830 prépara l'abolition com
plète de cette même hérédité , abolition qui
s'accomplit par là loi de 1831.
La Chambre des pairs disparut la 24 fé
vrier 1848. La Constitution de la République
française n'admettait qu'une assemblée
unique.
Dans la proclamation adressée le 14 jan
vier 1852 au peuple français, le prince LoUis-
Napoléon déclare hauten^ent qu'il a em
prunté les. bases principales de la Constitu
tion nouvelle à celle de l'an Vlll. Au Corps
Législatif seul appartiennent ladiscussiouetle
vote des lois. Le Sénat n'intervient que pour
vérifier.la constitutionnaliïé de ces lois;
cour de cassation politique, il a le droit
d'annuler tout ce qui est arbitraire et illé
gal, et, pour nous servir des expression mê
mes du Prince-Président : « il remplit dans
» l'Etat le rôle indépendant, salutaire, con
servateur des anciens Parlemens. » v
Mais, à la suite de la lettre impériale du
19 janvier 1867, qui donna une impulsion
si vive au développement de nos institutions
politiques èn accentuant de plus en plus le
rôle et l'action de l'assemblée élue, un sé
natus-consulte changea la forme de l'inter
vention du Sénat, en lui donnant le droit de
renvoyer les lois à une seconde délibération
du Corps Législatif. Cette disposition est
étendue et complétée par l'article 5 du projet
du sénatus-consulte, aux termes duquel le
Sénat pourra motiver et expliquer en détail
la portée de son vote, soit qu'il renvoie
la loi à une seconde délibération du Corps
Législatif, soit qu'il s'oppose à sa promul
gation. ■
Ces attributions, qui n'excèdent pas celles
de l'ancienne Chambre des pairs, sont Ifr
contre-poids nécessaire du droit d'initiative
attribué au Corps Législatif.
Rien, d'ailleurs, n'est changé aux préro
gatives du Sénat en matière d'interprétation
ou de modifications constitutionnelles; et,
plus heureux que les anciennes Chambres
des pairs, il est délivré de touté compétence
judiciaire, à moins qu'il ne s'agisse de ses
propres membres inculpés de crimes ou de
délits de droit commun. Le Sénat n'a pas
eu, en dix-huit ans, à faire usagé une seule
fois de sa juridiction disciplinaire et penale
Le secrétaire de la rédaction,
. c. piel
Nous ne pouvons pas encore signaler
d'amélioration dans l'état du maréchal NieL
Cependant les douleurs sont devenues
moins vives et Vliémàtûrie'a, cessé. Mais
comme l'estomac ne" peut supporter d'au—
mens, le malade reste, atteint d'une grande
faiblesse. -
C'est par erreur qu on a. dit qu une opéra
tion pratiquée par le docteur Nélaton n'a
vait pas réussi. Il n'est pas exact non plus
qu'une sonde se soit cassée dans la vessie.
Ce qui est vrai, c'est que des accidens pos
térieurs à l'opération ont amené depuis quel
ques jours une aggravation dans Ja maladie
de M. le maréchal NieL
c. piel.
.On nous annonce que le ministère de la
guerre vient de terminer le travail d'avance
ment qu'il soumet chaque année à l'Empe
reur à l'occasion du 15 août.
Le Journal officiel a publié, il y a quel
ques jours, les promotions de généraux et
d'officiers supérieurs de toutes armes ; elles
vont être suivies de nominations dans la
Légion-d'Honneur et d'un mouvement très
accentué d'avancement dans les grades in
férieurs. •
On parle d'un grand nombre de capitai
nes de cavalerie et d'infanterie, de 275 lieu-
tenans et de 400 sous -lieutenans, ce qui
donne satisfaction à îa légitime impatience
du corps si intéressant des sous-officiers.
Nous sommes heureux de constater qu©
l'avancement reprend dans rarmée son cours
normal et que les sous-officiers surtout ont
une grande part dans le mouvement qui va
se produire dans le personnel de l'armée.
C'est la meilleure réponse à faire aux in
sinuations d'un journal qui.se plaignait du
peu d'avancement accordé aux sous-officiers.
r c. piel.
NOUVELLES POLITIQUES.
Nous croyons savoir que, s'il est dérogé,
aux anciens usages d'après lesquels ce se
rait au président du Sénat que reviendrait
l'honneur de rédiger le rapport sur le. séna
tus-consulte, cela tient uniquement à l'abs
tention volontaire de M. Rouber, qui n'a pas
cru qu'il pouvait être l'auteur d'un rapport
dont les conclusions devaient êlre diseutees
sous sa direction et sa présidence.
On croit que le fapport de la commission
né sera déposé que peu avant'le 23 août et
que la discussion ne commencera que dans
les premiers jour du mois prochain, ce quu
permettra aux Sénateurs, membres de cob-
seils généraux, de s'éloigner de Pans pen
dant une dizaine de jours pour remplir leur
mandat.
Nous devons • ajouter, cependant qu n
était aujourd'hui question eu Sénat oe la
prorogation au 30 août de la séssioc
conseils généraux.
Hier, à Ssint-Cloud, le conseil des mi
nistres a examihél'attitude qu'> prenduiit le
gouvernement en face des amc-ijderïjefls li
béraux qui sont proposés par le 1, K
notamment en ce' qtii concerne ]'«•:m n -Mi
ment relatif à l'élection d'une cfertaiat: partie
des sénateurs par les conseils géuéiaux.
M. Baroehtf a adressé la lettre i;uiYau!e. à
la rallie :
Juziorp, le 8 août 1860.
, - Monsieur,
Je lis dans voire numéro d'hier soi r -lue, dauff
lo premier bureau du Sénat, MM. Devienne et
Delangle l'ont emporté àur M. Baroche dans lo
scrutin pour la nomination des mnrribr!>h de la
commission chargée d'examiner le piojet de
sénatus-consuito. Vous avez été mal renseigne
à cet égard. Voici la venté :
En ouvrant, comme président, la aisc -ussion, 1
j'ai déclaré qu'à raison de ma posiuo;i person
nelle, je no voulais pas faire oartie do la corn-
mission. Pendant la discussion, le niosms iioine
à faire quelques observations en réponse a de»
objections contre divers articles du senatus-
consulté et dans le sens de leur adoixion-. .1 ai
ensuite voté très ostensiblement pour. MM. I)e-
lsngle et Devienne.
Je vous serai obligé de pôrter celte rectifica
tion à la connaissante da vos lecteurs.
Agréez, Monsieur, l'assurance de ma consi
déra lion très distinguée. .
J. BAROCHE.
Le rapporteur de la commission du Sénat
sera, selon toute vraisemblance, nommé à
la prochaine séance.
C'est toujours M. .Delangle qui est dési
gné comme le candidat de la majorité. 11 le
doit à son attitude franchement libérale, à
la netteté de ses déclarations et à la loyauté
de son caractère.
La première réunion de la commission
chargée d'examin"r les questions qui se
rattachent à la . librairie pt à l'imprimerie a
Feuilleton du Constitutionnel, 10 août.
LA DESTINÉE
Première partie.
XV.
(Snite.)
II y eut ici une petite pause, très habile
ment calculée,, pendant laquelle Antoinette
baissa tristement ses beaux yeux, pour lais
ser à son interlocuteur le loisir de la regar
der tout à son aise. ■ k >
Elle faisait tableau, et c'était:vraiment le
plus ravissant tableau qu i se pût voir.
Blottie et comme repliée sur*elle-même,
au fond de son grand fauteuil, elle présen
tait au jeuDe homme jô ne sais quel en
semble de lignes fuyantes, dont les molles
et gracieuses inflexions semblaient défier
le pinceau du plus suave et du plus vapo-
(Voir le Constitutionnel du 7 août.)
reux des peintres. Il é lai t ilû ^uaaxbiD Jô rê-
ver une plus touchante image de l'abandon
dans la douleur; de la faiblesse désarmée,
se soumettant d'avance, reconnaissant un
maître et lui demandant grâce, sans par
ler. C'était la sensitive délicate, que l'on
froisse rien qu'en approchant de ses pé
tales un doigt indiscret ; p'était cette fleur
exquise, éclose dans les vallons du Gan
ge, dont les Péris célestes forment leur
bouquet, ét que le plus léger souffle flétrit.
On n'eût pas osé lui dire une parole dure,
de peur de la tuer. Elle garda quelques ins-
tans le silence, douce, recueillie. C'était
comme une trêve qu'elle s'accordait à elle-
même. Elle était bien certaine que M. d'Am-
bieuse ne la violerait pas.
— J'ai beaucoup souffert, Madame ! dit-
il enfin, d'une voix grave, très basse, et
comme s'il n'eût pas voulu l'accuser plus
directement.
— El moi, donc ! SHis -je sur des roses ?
répliqua la marquise d'une voix toujours
languissante, eh parodiant, sans le savoir
peut-être, le mot touchant et sublime de la
première victime du Mexique.
A ce moment, pour,la première fois, elle
releva ses beaux yeux vers lui; il crut voir
des larmes entre ses longs cils.
Ah ! votre mère fut bien coupable, —
bien coupable contre nous'deux I reprit M.
d'Ambleuse au bout d'un instant.
— Que voulez-vous, mon ami? répliqua
répliqua la jeune femme : elle a fait ce que
beaucoup d'autres mères eussent fait à sa
place... Je ne puis pas lui reprocher d'a
voir voulu mon bonheur... elle s'est trom
pée sans doute... mais ses intentions étaient
bonnes...
— Ah 1 je les connais, ces intentions-là,
répliqua M. d'Ambleuse, non point sans
quelque amertume; c'est avec elles que l'on
a pavé l'enfer ! Elles ont à tout jamais déso
lé ma vie.
— Croyez-vous qu'elles aient épargné la
mienne?
— Oh ! non! je sais que non I
— Ah! vous savez?, fit Antoinette, avec
une certaine vivacité et un regard tout plein
dequestions.
— Est-ce que tout ne se sait pas ?
— Mais qui donc vous a dit?
— Qu'importe, si je sais ?
Mme de Meillan porta son mouchoir à ses
yeux ; puis, sucouant la tôto comme si elle
eût voulu rejeter bien l©iu d'importunes et
tristes pensées:
— J'aimerais mi'.-ux ,reprit -elle d'une
voix douce- et tri-te , j'aimerais mieux que
tout le inonde eût ignoré... A quoi bon la
pitié et pourquoi la plainte? Mon sort, iîprès
tout, n'esl-il pas celui de la plupart des
femmes? Ni meilleur ni pire! Je subis la loi
de la vie. Ce sent les hommes qui l'ont faite,
et iis l'ont faite pour ©ux èt contre nous.
Mais, allez! j'y ai bien réfléchi, ét je suis
arrivée à cette conviction désormais inébran-
■ lable : Celle qui ne se résigne pas est in
sensée ! elle perd sa dignité, sans retrouver
son bonheur. Souffrir et se taire, c'est en
core le plus sage.
— Je vous admire, Madame, sans toutefois
avoir la force de vous imiter... Pardonnez-
moi! car j« me plains, et je ne puis me ré
signer... Mon excuse, c'est, je crois, que j'ai
perdu plus que vous.
— Non, mon ami, car M vous reste l'espé-
rancé qui ne m'est plus permise. Quand la
femme n'a pas le bonheur à son foyer, elle
n'a plus rien nulle part... Ah ! je sais que je
suis trop franche de vous parler comme je
fais... Je sais que je devrais, vis-à-vis de
vous comme de tous les autres, garder mon
masque de femme heureuse, cacher, dissi
muler, mentir ! Mais que voulez-vous, Jac
ques ? avec les autres je puis... avec vous je
ne puis pas ! c'est plus fort que moi... la
vérité m'échappe 1
— Èt pourquoi ne seriez-vous pas sincère
avec moi comme avec vous-même? Antoi
nette; ma;chère Antoinette! allez, je ne suis
pas de ceux qu© le malheur éloigne; il m'at
tire, au contraire.
—Cela prouve votre bonté. Mais mon mal
heur à moi n'est pas importuu, fit la mar
quise, redoutant peut-être le tour un peu
trop sentimental que prenait l'entretien ; je
ne donne pas à ma tristesse le droit d'être
larmoyante, et je porte moryieuil en ru
bans roses.
— C'est un deuil d'e cour !
- t - Peut-être! mais en tout cas,mon ami,
c'est le seul, sachez-le bien, que se permet
tent en public les femmes qui prennent sou
ci de leur dignité.
Il y eut une nouvelle pause;,puis Antoi
nette reprit : -
— Toutes ces explications sont très péni
bles entre nous; mais je,crois qu'elles
étaient nécessaires. 11 fallait les aborder une
fois avec franchise et loyauté, pour n'y plus
jamais revenir. Je ne suis ni prude ni co
quette, et j'ai vouloir m'ouvrir à vous; à
vous qui avez souffert pour moi. Une
expérience déjà longue, et qui n'a pas été
sans amertume, m'a révélé bien des choses.
Tous les hommes, et je parle des plus hon
nêtes et des meilleurs — do ceux qui vous
ressemblent — tous, en apprenant les mal
heurs d'une femme qui n'est pas encore
arand'mèr", se défendent mal d'une.e [)"Ctin ". Geît— esp^raue", j f - me ferais un
( rif>j" -! ■ l'erico.ifa.vr, parc-" que je v qu't 'li- , u'autanl plu •> cruelle qm. i'i>iu-»km auïciii
été plus grande. Si nous devons nous, re
voir. .. et je vous jure que ie le souhaite!
ajouta-t-elle avec un accent voilé de mélan
colie, il faut nous revoir loyalement, sans-
arrière-pensée, sans douleur pour vous, sans
lutte pour moi. D'autres idées, une autre
conduite, seraient également indigne de
nous deux.
Tout ce petit discours fut débité avec un
art extrême et une science des détails vrai
ment admirables : toutes les nuances déli
cates delà pensée et du sentiment s'y. trou-
vaient reproduites par le ton de la parole et
l'expression de là physionomie ; il y avait
tour à tour des larmes dans la voix et des
éclairs dans les yeux : une noble langueur
succédait à un emportement passionné.
Cette belle affligée avait une éloquence ir
résistible. Peut-être un homme plus rompu
aux petits, manèges de la coquetterie eût-il
été mis en défiance par la perfection même -
de cette exécution ; Antoinette avait joué sa
variation avec une habileté par trop magis
trale. La simple nature n'atteint pas à çes
hauteurs. Il faut que l'art vienne à son -
aide. Mais, sous.certains rapports, notre
commandant s'était qu'un conscrit. II. tie
connaissait rien aux manœuvres du boudoir.
C'était pour lui un champ de bataille tout
nouveau, où il n'avait pas la liberté do
se momeme - "-. Otte «tratégie-là est,
pu^i ,e moiii!-, uus-i difficile que l'autre.
Il crut donc tout ce qu'on lui disait, et
comme on le lui disait. Eûi-il pu s'imaginer
que des lèvres aussi belles se seraient soui^.
54e ANNEE.—N* 222»
BUREAUX A PARIS
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»^, m s-i«âteigÉèsiBaâa:
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publié les s et 30 de chaque mois.
Imprimerie du Constitutionnel,
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UN NUMÉRO 20 CENTIMES.
JOURNAL POLITIQUE LITTERAIRE
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Les articles déposés ne sont pas rendus.
DMVERSEL. ..
S'adresser pour les Annonce à MjT. FACCHEy LAFFm BuLUER ET Ce
> de la Bourse, 8,. à M. Doport ,_7, rue, Goq-Heron, ^ R ^ZfSa\ m mslratm
Les AnnoneeFne^oTU^recu^^el'otîs'la réserve 1 ^examen',, f^Uya lieu, de modification par
du journal. •
T.'jCZ
PARIS, 9 AOUT.
Pas de nouvelles d'Espagne. La retraite de
Sabariego en Portugal est démentie parles
correspondances de source carliste. Des sou-
lèvemens ont eu lieu en Catalogne; mais les
détails manquent. Le ministère sent la né
cessité de sortir le plus tôt possible du pro-
vis«ire : aussi, ne sommes-nous pas éton
nés d'apprendre que la première question
dont s'occuperont les Gortès lors de leur
prochaine réunion sera l'élection du mo
narque." Sans doute ce serait là un grand
pas de fait, si on pouvait seulement le
faire; mais, par les temps qui courent, il
ne suffit pas* toujours de vouloir un roi :
les princes sont devenus difficiles, ils s'in
forment des conditions avant d'endosser
la pourpre et l'hermine. La .Roumanie et
la Grèce ont eu bien du niai à trouver des
souverains. L'Espagne a déjà essuyé plu
sieurs xefus; ilost vrai qu'elle s'était adres
sée à des étrangers, et l'Espagne n'aime pas
l'étvanger.
Du côté de Cuba, la situation ne s'éclair-
cit pas non plus. A Washington, de puis
santes influences se remuent pour faire
abandonner la politique d'abstentiQû vis-à-
vis de l'insurrection cubaine. Le gouverne
ment de Madrid se propose d'envoyer des
renforts à la Havane! c'est dire que les nou
velles ne sont pas bonnes.
La délégation du Parlement hongrois pour
lés affaires austro-hongroises a donné un
■vote de confiance à M. de Beust. Un vif dé
bat a eu lieu, au sein de cette assemblée,
sur la politique extérieure. Plusieurs mem
bres ont pris la parole, soit pour défendre,
soit pour critiquer la politique de M. de
Beust; le baron Orczy, commissaire du cabi-
riftt austro^hongrois, a répondu aux orateurs
iet fourni des explications. A la suite de ces
débats, le budget des affaires extérieures a
ét£ voté tel qu'il avait été proposé par le
gouvernement. La majorité, par l'organe,de
ses orateurs et par son vote,a donné son ad
hésion à la politique suivie par M. de Beust
daiis les affaires d'Allemagne et d'Orient.
Ce fait mérite d'autant plus d'être signalé
que, dans ces derniers temps, le presse
prussienne s'était appliquée à semer la mé
fiance entre Pesth et Vienne et à soutenir
cette thèse que la politique de M. de Beust
était contraire aux intérêts hongrois, de
plus, qu'elle était impopulaire en Hongrie.
A l'heure-qu'il est, il ne subsiste plus de
douté sur la parfaite harmonie de vues en
tra les représentans officiels de l'empire
aastro-hongrois. :
A Vienne,-on s'entretient toujours de la
dépêcha prussienne relative à l'attitude que
M. «le Beust a prise dans l'incident franco-
beJ;ge, Le public est à môme aujourd'hui de
S6 former une opinion sur cette affaire. La
dépêche prussienne prouve qu'en somme
M. de Beust a dit vrai en affirmant que le ca
binet de Berlin avait inexactement corinmenté
-auprès des gouvernemens allemands la po
litique autrichieine. M. de Thile, sous-sè-
erétaire d'Etat, et signataire.de la dépêche
prussienne, refuse toute explication à ce
sujet, non parce qu'il regarde le reproche
comme injuste, mais parce que, selon lui,
les communications diplomatiques entre la
Prusse et d'autres Etats allemands ne re
gardent pas Iqs puissances étrangères, l'Au
triche naturellement comprise.
Cette manière dë .voir, s'appuie évidem
ment sur la, lettre du traité de Prague qui
laisse à la Prusse pleinè liberté dans l'Alle
magne du Nord. C'est là un argument bien
délicat vis-à-vis de l'Autriche qui, du mo
ment qu'on invoque devant elle, le , traité
de Prague, pourrait précisément rappeler les
stipulations non exécutées jusqu'ici de ce
traité, entre autres celles qui ont' trait à.la
Confédération des Etats du Sud.
Au point de vue européen, nous avons dé
jà fait ressortir ce qu'il y a d'inadmissible
dans la prétention émise dans la dépêche
prussienne, à savoir que les puissances étran
gères n'avaient pas à prendre connaissance
des rapports diplomatiques de la Prusse
avec les États allemands. Nous n'avons rien
à ajouter à ces réflexions.
Le fait important c'est que la délégation
hongroise a voté les dépenses pour la léga-
SSBBOBBSaBS
-—7; < jv > „■ A 1
tion £ustra-hâpgroise-à Ipresde. Ce vote est
significatif;, 1 ; Ç" |
V V tJ ,~>. r /édouard simon.
tëk(wêie privée.
AGENCE HAVAS.
Etats-Unis.
New-York. 7 aioût, soir.
(par le câDle«françai3.)
On assure que des membres influens du Con
grès poussent fortement le gouvernement à re
connaître les droits de beliigérans aux ins urgé
cubains. -
Espagne;
Madrid,août, soir.
L Impartial assure que £0,000 hommes de
renfort seront envoyés à Cuba en septembre
prochain. Il .dit ensuite: « La première question
dont s'occuperont les Coriès, lors de leur réu -
nion en octobre prochain, sera l'élection du
monarque. ».
Deux sergens de la garde civile (gendarme
rie) ont été arrêtés cette nuit porteurs de vingt
brevets d'çfficiers,. On a également arrêté un
individu se disant capitaine général de la Nou
velle Castille et un autre se disant commandant
général de Madrid, au nom de Don Carlos.
Italie.
.... Venise, 9 août.
On fait ici des préparatifs au palais royal
pour recevoir l'Impératrice des Français. On as
sure que Sa Majesté arrivera le 1 er septembre.
Elle sera accompagnée par le roi Victor-Em
manuel.
france.
- Grenoble, 9 août.
Election d'un conseiller général pour le can
ton de Sassenage : .
M. Giraud, candidat officiel, a été élu par 661
voix ; M. Reynaud en a obtenu 632.'
Dans le canton sud de Vienne, M. Joliot, can
didat de l'administration, a été élu conseiller
général par 1,879 voix ; M. Roujat (opposition),
en a obtenu 1,826.
SERVICE DE NUIT.
Antrlelte.
Lemberg, 9 août.
L'ex-gouverneur de la Galicie, M. Goluchowski,
déclare qu'il est nécessaire que la Galicie envoie
le nombre complet do ses , députés au Reichs-
rath: que l'abstention n'aurait aucun avantage
et que la politique de M: Smoika ne s'accorde
jjas avec sa conscience. .......
Espagne.
Madrid, 9 août.
Hier, 17 gardes civiques de la garnison de
Madrid ont été arrêtés. Ils étaient porteurs de
brevets de sousrtieutenans de l'armée do don
Carlos.
La Gazelle annonce que Balansteguy, chef
d'une bande carliste, a été fusillé le 6 août à
Valcobedo.
On pense que la bande de Polo est dissoute.
Les bandes de la. province de Léon sont com
plètement dissoutes. , .
Amérique.
. Saint Nazaire, 9 août, 3 h. du soir.
Le paquebot do la compagnie générale tran
satlantique, la Louisiane, mouille à l'instant
sur notre rade, avec les dépêches du Mexique,
de la Havane, de Saint-Thomas et des Àutillos
françaises.
La* Louisiane apporte 82 passagers, 3S0 ton
neaux de marchandises et 400,000 francs d'es
pèces à fret. ' " •
Plusieurs faillites importantes avaient para
lysé le commerce à Mexico. •
• A la Havane, la tranquillité n'était pas encore
rétablie, mais on espérait beaucoup de la pru
dence et de l'énergie du gouverneur Rodas.
Chaque jour nous apporte une adhésion
nouvelle à l'Empire libéral. Chaque jour un
irréconcilié de la veille se rapproche et se
place franchement, loyalement sur le ter
rain constitutionnel. :
Certes , nous n'espérons pas désarmer
l'opposition irréconciliable. Il est des ambi
tions qui ne se résignent jamais. Les a re
vendicateurs » resteront ce qu'ils sont. Leur
origine, leurs professions de foi, leur intérêt
personnel leur en font une loi. Mais si le sé-
natus-consulte ne les réconcilie pas, du
moins il leur arrache leur drapeau libéral,
il les oblige à renoncer à leur programme et
à se déclarer révolutionnaires.
C'est là une grande victoire pour le gou
vernement impérial.
Le jour où l'opposition ne représente que
la guerre civile contre la liberté, elle n'est
plus à craindre. Mais pour que la victoire de
l'Empire soit complète, éclatante, indiscu
tée, ne faut-il pas que les actes du gouver
nement soient en complet accord avec les
principes que l'Empereur vient de procla
mer ? ne faut-il pas que les lois libérales '
soient libéralement appliquées?
Au moment où le souverain vient de
provoquer lui-même une sorte de révolu
tion constitutionnelle, pourquoi encore des
CTgrsE iuuiumaim j BEB
procès de presse? pourquoi des incarcé
rations ? Une politique généreuse est tou
jours une bonne politique et il est certain
qu'une amnistie générale, qui effacerait les
condamnations passées, et préviendrait les
condamnations futures, donnerait une en
tière satisfaction à l'opinion publique.
En France, les grandes victoires sont tou
jours suivies d'une amnistie.
Est-il dans l'histoire une victoire plus
grande, plus noble, plus décisive, que celle
que l'Empereur vient de remporter sur ses
ennemis à l'intérieur?
. Le message du 12 juillet n'est-il pas plus
important pour l'avenir de notre pays que
la bataille de l'Aima ou celle de Solférino?
L'amnistie d'abord, la liberté ensuite, car
l'expérience a démentré'que si les procès
dé presse sont parfois dangereux, ils sont
toujours inutiles.
Robert Mitchell.
COURS DE LA BOURSE.
cours de clôture. ie7 le 9 Hausse. Baisse
30/0aucompt. 73.20 73 20
—Fin du mois. 73 27 73 30
41/2aucompt. 104.25 104. »
o
02
»
I)
»
25
LE PROJET DE SÉNATUS-CONSULTE.
IV.
L'article 5 du projet de sénatus-consulte
étend et transforme les attributions du Sénat.
Rechercher dans les Constitutions an
ciennes les précédens de la question, c'est
faire l'histoire de la Chambre haute et de
son rôle dans les institutions pelitiques de
la France. ,,
Il semble qu'au début de la Révolution
française, l'établissement des deux Cham
bres dût se présenter naturellement à l'es-
, prit des hommes libéraux et patriotes qui
travaillaient à transformer la monarchie ab
solue en un gouvernement représentatif et
pondéré. Les élémens de la Chambre haute
existaient ; il suffisait de détacher du Parle
ment la cour des pairs, composée des prin
ces du sang et des pairs héréditaires, et de
grouper autour de cette aristocratie tradi
tionnelle des hommes nouveaux que là cou
ronne aurait choisis, parmi les plus illustres
et les plus respectés.
Mais ce fut à la fois la grandeur et le
malheur de la Révolution française ; elle ne
voulut rien accepter du passé ; elle conçut
le gouvernement comme une formule abs
traite qui .se déduit d'un principe absolu ;
affamée d'égalité, elle ne supportait pas l'i
dée de .consacrer l'existence légale d'une
noblesse qui lui était odieuse.;
D'ailleurs, un événement capital domine
au début cette phase de notre histoire ; c'est
la déclaration par laquelle les,Etats-Géné
raux se proclamèrent Assemblée 1 nationale^
La réunion des trois ordres, tel est le pre
mier acte de la Révolution., Le système des
deux Chambres paraissait, à tout le mon
de, une tentative de réaction contre la réu
nion des ordres et, par conséquent, contre la
révolution elle-même. Aussi se trouvait-il
immédiatement frappé et de discrédit et
d'impopularité; ceux qui en étaient les par
tisans ou qu'on soupçonnait de l'être, et qui
pour la plupart faisaient partie du club des
Feuillant se virent qualifiés du surnom
méprisant de parti ministériel, car la gauche
ne voulait ni , des d'àux< Chambres ■• ni d u
gouvernement parlementaire; et la défa
veur attachée au système anglais, considéré
comme le triomphe de l'aristocratie, fut si
grande que, dans la discussion de la Cons
titution de 1791, M. de Lally-Tollendal eut
seul le courage de demander l'établissement
d'une Chambre des pairs.
Il y avait là plus qu'un préjugé, il y avait
un sentiment de haine £t, une passion que
les membres de la Législative éprouvèrent
aussi profondément que lés membres de la
Constituante. Un' curieux article du Moni
teur universel du 27 ayril 1792 dénonça
comme encore dangereuse l'ancienne « coa-*
lition » qui avait pour but « d'amener, par/
» une subversion générale, le retour dé la
» noblesse et l'établissement d'une Chambre
» haute dans le Corps Législatif. »
Dans l'Assemblée, les partis extrêmes
s'accusaient réciproquement,comme de des
seins également pernicieux et séditieux, les
uns de vouloir la destruction de la monar
chie,, les entres s de vouloir la destruction
» de l'égalité constitutionnelle et le gouver-
» nemént aristocratique connu sous le nom
» des deux Chambres. » Ce sont les expres
sions mêmes qu'employa l'abbé Lamou-
rette, dans la séance du 8 juillet 1792, pour
exposer l'objet de sa fameuse motion ainsi
conçue : « Foudroyons, Messieurs, par une
» exécration commune, et par un irrévoca-
» ble serment, foudroyons et la République
» et les deux Chambres... Je demande que
» M. le président (M. de Girardin) mette aux
» voix cette proposition : Que ceux qui ab-
» jurentégalement et exècrent la République
» et les deux Chambres se lèvent!... »
Tout le monde s'embrassa : monarchistes,
constitutionnels ou autoritaires, feuillans,
jacobins et républicains Trente-t r ois
jours plus tard, le roi était chassé de son
palais par l'émeute triomphante, et après
quarante et un autres jours , la République
était proclamée.
Il ne fallut rien moins que les fautes, les
malheurs, les faiblesses ■ et les crimes des
assemblées uniques pour transformer l'opi
nion publique, si violemment prévenue con
tre le système des deux Chambres.
Il apparut enfin dans la Constitution de
l'an 111, sous des conditions particulières et
avec des tempéramens combinés en vue de
réfuter les„objections et de faire certaines
concessions aux préventions anciennes.
Ainsi, l'existence de deux Chambres dis
tinctes est atténuée et pour ainsi dire voilée
par la fiction d'un Corps Législatif unique
divisé en deux Conseils.
Les deux Chambres sont nommées par
le même vote du suffrage universelles con
tribuables fonctionnant à deux degrés.
L'initiative, l'aetion, le vote prépondérant
sont laissés à la Chambre des jeunes, du con
seil des Cinq-Cents. Le conseil des Anciens,
ou Chambre haute, n'a qu'uû droit de rejet et
d'annulation pour cause d'inconstitutionna-
lité. 11 peut repousser la loi, mais non la
modifier. La ressemblance est grande entre
le conseil des Anciens et le Sénat de la Con
stitution de 1852. Il avait, comme,celui-ci,
le droit de proposer la révision partielle de
la Constitution ; seulement, sa proposition
devait être, ratifiée par le conseil des Cinq-
Cents.
Ii est facile d'apercevoir, dans le mode
dexiâtence du conseil des Anciens, l'esquis
se très avancée du Sénat conservateur ins
titué par la Constitution consulaire, de
l'an VIII.
La grande originalité de cette Constitution,
lentëmerfi élaborée dans le cerveau de Sieyès,
c'était les listes nationales , s'engendrant
l'une l'autre, de telle sorte que le suffrage
universel des citoyens inscrits sur les listes
communales formait les listes d'arrondisse
ment; le suffrage des électeurs,d'arrondisse
ment donnait les listes départementales; en
fin les électeurs de département préparaient
la liste nationale, sur laquelle le Sénat éli
sait lés membres du Corps Législatif, du
Tribunat, de la cour de cassation et de la
cour des comptes (commission de la comp
tabilité). Le Sénat se recrutait d'obord lui-
même sur des propositions faites par le
Corp#Législatif, le Tribunat et les conseils.
Mais, dans la suite, les sénateurs furent
nommés directement par le Premier Consul
et par l'Empereur. ;
Le Sénat maintenait ou annulait les actes
qui lui étaient déférés comme inconstitu
tionnels par le Tribunal ou par le gouverne
ment, y compris les listes d'éligibles. Sauf
le recours d'inconstitutionnalité, il ne pre
nait aucune part à la confection des lois et
n'intervenait pas dans leur promulgation.
Le sénatus-consulte organique de l'an X
ajouta aux attributions du Sénat : le règle
ment de la Constitution des colonies ; l'in
terprétation et le complément la Consti
tution; le droit de suspendre pour cinq ans
l'institution du jury dans certains départe-
mens, et de les mettre hors de la Constitu
tion, ce qui était un espèce d'état de siège
civil; d'annuler les jugemens des tribunaux,
lorsqu'ils étaient considérés comme attenta
toires à la sûreté de l'Etat; enfin de dissou
dre le Corps Législatif et le Tribunat.
Outre ces prérogatives exorbitantes et con
traires à la séparation des pouvoirs, le Sénat
reçut du sénatus-consulte organique de
l'an XII la mission de veiller à la liberté de
la- presse et à la liberté individuelle en
statuant sur les recours que des particu
liers lui adresseraient, et le droit de for
muler l'opinion qu'il y a lieu de ne pas
promulguer une loi votée par le Corps Lé
gislatif, dans le cas où cette loi serait dénon
cée par un sénateur comme inconstitution
nelle, ou comme tendant au rétablissement
du régime féodal, ou Comme contraire S
l'irrévocabilité des ventes des bleûs natio
naux. L'avis du Sénat donnait lieu ultérieu
rement à une procédure singulière. L'Empe
reur devait ensuite entendre le conseil d'Etat
et déclarer par un décret qu'il adhérait à la
délibération du Sénat, ou promulguer la loi
dans les dix jours. Passé ce délai, la loi ne
pouvait plus être promulguée si elle n'avait
été de nouveau délibérée et adoptée par le
Corps Législatif. Enfin, le Sénat, qui avait
déjà le droit d'annuler et de casser tant de
choses, fut autorisé à casser, pour cause
d'inconstitutionnaUté, les opérations des
collèges électoraux.
Le Sénat, on le voit, avait fini par dévo
rer, absorber et confondre tous les pouvoirs
dans son sein. Il ne pouvait plus être qu'un
instrument de tyrannie, soit au profit du
chef de l'Etat, soit contre lui.
La Chambre des pairs, dans laquelle le
Sénat conservateur s'introduisit presque
tout entier en 1814, n'eut rien decesredou^
tables et dangereux privilèges. Elle fut sim
plement une portion de pouvoir législatif,
n'ayant d'autre initiative, comme la Cham
bre des députés, que la faculté de supplier
le monarque de proposer telle ou telle loi.
Les pairs étaient nommés par le roi, viagers
ou héréditaires. La Chambre fut investie du
droit de juger les ministres mis en accusa
tion par la Chambre des députés et de con
naître des crimes de haute trahison et des
attentats à la sûreté de l'Etat.
L'acte additionnel de 1815 et la Charte de
1830 ne modifièrent point le caractère de la
Chambre des pairs , sauf en .ce point que
l'acte additionnel attribua l'hérédité à cha
cun de ses membres , et que l'article 68 de
la Charte de 1830 prépara l'abolition com
plète de cette même hérédité , abolition qui
s'accomplit par là loi de 1831.
La Chambre des pairs disparut la 24 fé
vrier 1848. La Constitution de la République
française n'admettait qu'une assemblée
unique.
Dans la proclamation adressée le 14 jan
vier 1852 au peuple français, le prince LoUis-
Napoléon déclare hauten^ent qu'il a em
prunté les. bases principales de la Constitu
tion nouvelle à celle de l'an Vlll. Au Corps
Législatif seul appartiennent ladiscussiouetle
vote des lois. Le Sénat n'intervient que pour
vérifier.la constitutionnaliïé de ces lois;
cour de cassation politique, il a le droit
d'annuler tout ce qui est arbitraire et illé
gal, et, pour nous servir des expression mê
mes du Prince-Président : « il remplit dans
» l'Etat le rôle indépendant, salutaire, con
servateur des anciens Parlemens. » v
Mais, à la suite de la lettre impériale du
19 janvier 1867, qui donna une impulsion
si vive au développement de nos institutions
politiques èn accentuant de plus en plus le
rôle et l'action de l'assemblée élue, un sé
natus-consulte changea la forme de l'inter
vention du Sénat, en lui donnant le droit de
renvoyer les lois à une seconde délibération
du Corps Législatif. Cette disposition est
étendue et complétée par l'article 5 du projet
du sénatus-consulte, aux termes duquel le
Sénat pourra motiver et expliquer en détail
la portée de son vote, soit qu'il renvoie
la loi à une seconde délibération du Corps
Législatif, soit qu'il s'oppose à sa promul
gation. ■
Ces attributions, qui n'excèdent pas celles
de l'ancienne Chambre des pairs, sont Ifr
contre-poids nécessaire du droit d'initiative
attribué au Corps Législatif.
Rien, d'ailleurs, n'est changé aux préro
gatives du Sénat en matière d'interprétation
ou de modifications constitutionnelles; et,
plus heureux que les anciennes Chambres
des pairs, il est délivré de touté compétence
judiciaire, à moins qu'il ne s'agisse de ses
propres membres inculpés de crimes ou de
délits de droit commun. Le Sénat n'a pas
eu, en dix-huit ans, à faire usagé une seule
fois de sa juridiction disciplinaire et penale
Le secrétaire de la rédaction,
. c. piel
Nous ne pouvons pas encore signaler
d'amélioration dans l'état du maréchal NieL
Cependant les douleurs sont devenues
moins vives et Vliémàtûrie'a, cessé. Mais
comme l'estomac ne" peut supporter d'au—
mens, le malade reste, atteint d'une grande
faiblesse. -
C'est par erreur qu on a. dit qu une opéra
tion pratiquée par le docteur Nélaton n'a
vait pas réussi. Il n'est pas exact non plus
qu'une sonde se soit cassée dans la vessie.
Ce qui est vrai, c'est que des accidens pos
térieurs à l'opération ont amené depuis quel
ques jours une aggravation dans Ja maladie
de M. le maréchal NieL
c. piel.
.On nous annonce que le ministère de la
guerre vient de terminer le travail d'avance
ment qu'il soumet chaque année à l'Empe
reur à l'occasion du 15 août.
Le Journal officiel a publié, il y a quel
ques jours, les promotions de généraux et
d'officiers supérieurs de toutes armes ; elles
vont être suivies de nominations dans la
Légion-d'Honneur et d'un mouvement très
accentué d'avancement dans les grades in
férieurs. •
On parle d'un grand nombre de capitai
nes de cavalerie et d'infanterie, de 275 lieu-
tenans et de 400 sous -lieutenans, ce qui
donne satisfaction à îa légitime impatience
du corps si intéressant des sous-officiers.
Nous sommes heureux de constater qu©
l'avancement reprend dans rarmée son cours
normal et que les sous-officiers surtout ont
une grande part dans le mouvement qui va
se produire dans le personnel de l'armée.
C'est la meilleure réponse à faire aux in
sinuations d'un journal qui.se plaignait du
peu d'avancement accordé aux sous-officiers.
r c. piel.
NOUVELLES POLITIQUES.
Nous croyons savoir que, s'il est dérogé,
aux anciens usages d'après lesquels ce se
rait au président du Sénat que reviendrait
l'honneur de rédiger le rapport sur le. séna
tus-consulte, cela tient uniquement à l'abs
tention volontaire de M. Rouber, qui n'a pas
cru qu'il pouvait être l'auteur d'un rapport
dont les conclusions devaient êlre diseutees
sous sa direction et sa présidence.
On croit que le fapport de la commission
né sera déposé que peu avant'le 23 août et
que la discussion ne commencera que dans
les premiers jour du mois prochain, ce quu
permettra aux Sénateurs, membres de cob-
seils généraux, de s'éloigner de Pans pen
dant une dizaine de jours pour remplir leur
mandat.
Nous devons • ajouter, cependant qu n
était aujourd'hui question eu Sénat oe la
prorogation au 30 août de la séssioc
conseils généraux.
Hier, à Ssint-Cloud, le conseil des mi
nistres a examihél'attitude qu'> prenduiit le
gouvernement en face des amc-ijderïjefls li
béraux qui sont proposés par le 1, K
notamment en ce' qtii concerne ]'«•:m n -Mi
ment relatif à l'élection d'une cfertaiat: partie
des sénateurs par les conseils géuéiaux.
M. Baroehtf a adressé la lettre i;uiYau!e. à
la rallie :
Juziorp, le 8 août 1860.
, - Monsieur,
Je lis dans voire numéro d'hier soi r -lue, dauff
lo premier bureau du Sénat, MM. Devienne et
Delangle l'ont emporté àur M. Baroche dans lo
scrutin pour la nomination des mnrribr!>h de la
commission chargée d'examiner le piojet de
sénatus-consuito. Vous avez été mal renseigne
à cet égard. Voici la venté :
En ouvrant, comme président, la aisc -ussion, 1
j'ai déclaré qu'à raison de ma posiuo;i person
nelle, je no voulais pas faire oartie do la corn-
mission. Pendant la discussion, le niosms iioine
à faire quelques observations en réponse a de»
objections contre divers articles du senatus-
consulté et dans le sens de leur adoixion-. .1 ai
ensuite voté très ostensiblement pour. MM. I)e-
lsngle et Devienne.
Je vous serai obligé de pôrter celte rectifica
tion à la connaissante da vos lecteurs.
Agréez, Monsieur, l'assurance de ma consi
déra lion très distinguée. .
J. BAROCHE.
Le rapporteur de la commission du Sénat
sera, selon toute vraisemblance, nommé à
la prochaine séance.
C'est toujours M. .Delangle qui est dési
gné comme le candidat de la majorité. 11 le
doit à son attitude franchement libérale, à
la netteté de ses déclarations et à la loyauté
de son caractère.
La première réunion de la commission
chargée d'examin"r les questions qui se
rattachent à la . librairie pt à l'imprimerie a
Feuilleton du Constitutionnel, 10 août.
LA DESTINÉE
Première partie.
XV.
(Snite.)
II y eut ici une petite pause, très habile
ment calculée,, pendant laquelle Antoinette
baissa tristement ses beaux yeux, pour lais
ser à son interlocuteur le loisir de la regar
der tout à son aise. ■ k >
Elle faisait tableau, et c'était:vraiment le
plus ravissant tableau qu i se pût voir.
Blottie et comme repliée sur*elle-même,
au fond de son grand fauteuil, elle présen
tait au jeuDe homme jô ne sais quel en
semble de lignes fuyantes, dont les molles
et gracieuses inflexions semblaient défier
le pinceau du plus suave et du plus vapo-
(Voir le Constitutionnel du 7 août.)
reux des peintres. Il é lai t ilû ^uaaxbiD Jô rê-
ver une plus touchante image de l'abandon
dans la douleur; de la faiblesse désarmée,
se soumettant d'avance, reconnaissant un
maître et lui demandant grâce, sans par
ler. C'était la sensitive délicate, que l'on
froisse rien qu'en approchant de ses pé
tales un doigt indiscret ; p'était cette fleur
exquise, éclose dans les vallons du Gan
ge, dont les Péris célestes forment leur
bouquet, ét que le plus léger souffle flétrit.
On n'eût pas osé lui dire une parole dure,
de peur de la tuer. Elle garda quelques ins-
tans le silence, douce, recueillie. C'était
comme une trêve qu'elle s'accordait à elle-
même. Elle était bien certaine que M. d'Am-
bieuse ne la violerait pas.
— J'ai beaucoup souffert, Madame ! dit-
il enfin, d'une voix grave, très basse, et
comme s'il n'eût pas voulu l'accuser plus
directement.
— El moi, donc ! SHis -je sur des roses ?
répliqua la marquise d'une voix toujours
languissante, eh parodiant, sans le savoir
peut-être, le mot touchant et sublime de la
première victime du Mexique.
A ce moment, pour,la première fois, elle
releva ses beaux yeux vers lui; il crut voir
des larmes entre ses longs cils.
Ah ! votre mère fut bien coupable, —
bien coupable contre nous'deux I reprit M.
d'Ambleuse au bout d'un instant.
— Que voulez-vous, mon ami? répliqua
répliqua la jeune femme : elle a fait ce que
beaucoup d'autres mères eussent fait à sa
place... Je ne puis pas lui reprocher d'a
voir voulu mon bonheur... elle s'est trom
pée sans doute... mais ses intentions étaient
bonnes...
— Ah 1 je les connais, ces intentions-là,
répliqua M. d'Ambleuse, non point sans
quelque amertume; c'est avec elles que l'on
a pavé l'enfer ! Elles ont à tout jamais déso
lé ma vie.
— Croyez-vous qu'elles aient épargné la
mienne?
— Oh ! non! je sais que non I
— Ah! vous savez?, fit Antoinette, avec
une certaine vivacité et un regard tout plein
dequestions.
— Est-ce que tout ne se sait pas ?
— Mais qui donc vous a dit?
— Qu'importe, si je sais ?
Mme de Meillan porta son mouchoir à ses
yeux ; puis, sucouant la tôto comme si elle
eût voulu rejeter bien l©iu d'importunes et
tristes pensées:
— J'aimerais mi'.-ux ,reprit -elle d'une
voix douce- et tri-te , j'aimerais mieux que
tout le inonde eût ignoré... A quoi bon la
pitié et pourquoi la plainte? Mon sort, iîprès
tout, n'esl-il pas celui de la plupart des
femmes? Ni meilleur ni pire! Je subis la loi
de la vie. Ce sent les hommes qui l'ont faite,
et iis l'ont faite pour ©ux èt contre nous.
Mais, allez! j'y ai bien réfléchi, ét je suis
arrivée à cette conviction désormais inébran-
■ lable : Celle qui ne se résigne pas est in
sensée ! elle perd sa dignité, sans retrouver
son bonheur. Souffrir et se taire, c'est en
core le plus sage.
— Je vous admire, Madame, sans toutefois
avoir la force de vous imiter... Pardonnez-
moi! car j« me plains, et je ne puis me ré
signer... Mon excuse, c'est, je crois, que j'ai
perdu plus que vous.
— Non, mon ami, car M vous reste l'espé-
rancé qui ne m'est plus permise. Quand la
femme n'a pas le bonheur à son foyer, elle
n'a plus rien nulle part... Ah ! je sais que je
suis trop franche de vous parler comme je
fais... Je sais que je devrais, vis-à-vis de
vous comme de tous les autres, garder mon
masque de femme heureuse, cacher, dissi
muler, mentir ! Mais que voulez-vous, Jac
ques ? avec les autres je puis... avec vous je
ne puis pas ! c'est plus fort que moi... la
vérité m'échappe 1
— Èt pourquoi ne seriez-vous pas sincère
avec moi comme avec vous-même? Antoi
nette; ma;chère Antoinette! allez, je ne suis
pas de ceux qu© le malheur éloigne; il m'at
tire, au contraire.
—Cela prouve votre bonté. Mais mon mal
heur à moi n'est pas importuu, fit la mar
quise, redoutant peut-être le tour un peu
trop sentimental que prenait l'entretien ; je
ne donne pas à ma tristesse le droit d'être
larmoyante, et je porte moryieuil en ru
bans roses.
— C'est un deuil d'e cour !
- t - Peut-être! mais en tout cas,mon ami,
c'est le seul, sachez-le bien, que se permet
tent en public les femmes qui prennent sou
ci de leur dignité.
Il y eut une nouvelle pause;,puis Antoi
nette reprit : -
— Toutes ces explications sont très péni
bles entre nous; mais je,crois qu'elles
étaient nécessaires. 11 fallait les aborder une
fois avec franchise et loyauté, pour n'y plus
jamais revenir. Je ne suis ni prude ni co
quette, et j'ai vouloir m'ouvrir à vous; à
vous qui avez souffert pour moi. Une
expérience déjà longue, et qui n'a pas été
sans amertume, m'a révélé bien des choses.
Tous les hommes, et je parle des plus hon
nêtes et des meilleurs — do ceux qui vous
ressemblent — tous, en apprenant les mal
heurs d'une femme qui n'est pas encore
arand'mèr", se défendent mal d'une.
( rif>j" -! ■ l'erico.ifa.vr, parc-" que je v
été plus grande. Si nous devons nous, re
voir. .. et je vous jure que ie le souhaite!
ajouta-t-elle avec un accent voilé de mélan
colie, il faut nous revoir loyalement, sans-
arrière-pensée, sans douleur pour vous, sans
lutte pour moi. D'autres idées, une autre
conduite, seraient également indigne de
nous deux.
Tout ce petit discours fut débité avec un
art extrême et une science des détails vrai
ment admirables : toutes les nuances déli
cates delà pensée et du sentiment s'y. trou-
vaient reproduites par le ton de la parole et
l'expression de là physionomie ; il y avait
tour à tour des larmes dans la voix et des
éclairs dans les yeux : une noble langueur
succédait à un emportement passionné.
Cette belle affligée avait une éloquence ir
résistible. Peut-être un homme plus rompu
aux petits, manèges de la coquetterie eût-il
été mis en défiance par la perfection même -
de cette exécution ; Antoinette avait joué sa
variation avec une habileté par trop magis
trale. La simple nature n'atteint pas à çes
hauteurs. Il faut que l'art vienne à son -
aide. Mais, sous.certains rapports, notre
commandant s'était qu'un conscrit. II. tie
connaissait rien aux manœuvres du boudoir.
C'était pour lui un champ de bataille tout
nouveau, où il n'avait pas la liberté do
se momeme - "-. Otte «tratégie-là est,
pu^i ,e moiii!-, uus-i difficile que l'autre.
Il crut donc tout ce qu'on lui disait, et
comme on le lui disait. Eûi-il pu s'imaginer
que des lèvres aussi belles se seraient soui^.
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