Titre : La Fronde / directrice Marguerite Durand
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1900-03-30
Contributeur : Durand, Marguerite (1864-1936). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb327788531
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 30 mars 1900 30 mars 1900
Description : 1900/03/30 (A4,N842). 1900/03/30 (A4,N842).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k6703961m
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, GR FOL-LC2-5702
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 04/01/2016
UN PEU PARTOUT
LA roi de Saxe avec sa tuile est paru de
Menton hier soir à 10 h. 45, pour Dresde.
La reine de Saxe prolongera 80D séjour
jusqu'au 15 avril...
On annonce la prochaine arrivée au Cap
Hartin de la comtesse Lonyay. i
—o—
Le Lycée Louis-le-Grand a donné hier,
dans le grand amphithéâtre de la Sor-
bonne, une brillante matinée musicale et
littéraire à laquelle ont pris part : Mues
Rioton, de l'Opéra-Comique, Klob, de la
Comédie-Française. MM. Note,
file, de l'Opéra ainsi que les frères Coque-
"Mme Sarah Bernardt qui devait dire quel
ques fragments de Y Aiglon rele""®*
théâtre par la matinée donnée par la presse
ihunicipale. a dû se faire excuser.
LA DAME D. VOILÉE.
UN QUESTIONNAIRE
adopté par la Société Libre
POUR L'ÉTUDE PSYCHOLOGIQUE DE L'ENFANT
Mes lecteurs connaissent le but de la
Société dont le titre, un peu longuet,
s'étend en tête de cet article. Je leur rap-
pelle, en passant, que cette Société est
ouverte à tous : savants, philosophes,
écrivi-ins, parents, instituteurs, amis de
l'enfance; que le Bureau reçoit le sujets
qui lui sont proposes : qu il en choisit
lui-même; qu'il prépare, avec soin, les
questionnaires, destines à élucider cha-
cune des questions; qu'il envoie ces
Questionnaires a tous les adhérents, pour
que chacun l'étudie à son tour, en re-
tranche, y ajoute, l'accepte en bloc tou
le modifie en détail, après quoi,en séance
plénière, ce questionnaire lest mis en
discussion et, finalement adopté, est
livré à la publicité.
Parmi les premières questions propo-
sées se trouvait celle des « enfants indis-
ciplinés ou rebelles ", question extrême-
ment intéressante, moins difficile, peut-
être, moins délicate, surtout à élucider
que beaucoup d'autres, et dont l'étude
pourrait être féconde en résultats heu-
reux autant pour les enfants, pour leurs
parents et pour leurs maîtres que pour
i'école elle même.
Il a fallu s'entendre,d'abord sur le mot
lui-mème : « Qu'est ce qu'un enfant in
disciftiné?
C est, a-t -on dit. d'abord, un enfant qui
s'insurge contre ses parents ou ses maî-
tres ; contre les uns et les autres, par-
fois ; c'est celui qui vit avec eux à l'état
de Il belligérants ». C'est vrai, certes L,
Ei l'on veut; cependant, j'ai trouvé -la
définition incomplète ; incomplète au
point d être presque fausse. Je suis per-
suadée, en effet, que sur cent enfants
indisciplinés ou rcuelles,il y en a quatre-
vingt-dix qui aimeraientleurs parents et
leurs maîtres <)m, même, au fond, les
aiment, mais ont l'air de les hair, parce
qu il-; les identifient malheureusement,
avec la règle qu'eux, enfants, détestent,
et que les parents et les maîtres repré-
sentent et s'efforcent de faire respec-
ter.
ha règle, pour ces enfants, c'est l'en-
nemi. M ni s avouez avec moi qu'elle n'est
pas aimable, et que souvent même elle
est inintclligente(j'ai railli écrire « bête 1)) ;
qu'elle c>t tatillonne, vexatoire, allant à
t encontre du développement rationnel
de l'enfant 1
fi Ne bouge pas n, « ne touche pas »,
« ne parle pas n, sont les trois comman-
dements les plus honorés par beaucoup.
de disciplinaires c'est, pour eux, le com-
mencement et la fin de la sagesse. Ce-
pendant, le mouvement est absolument
nécessaire au développement physique ;
la curiosité, qui fait inconsciemment
porter la main sur les objets, est le
mobile le plus naturel et le plus sûr du
développement intellectuel, et l'échange
des idées, indispensable a la sympathie,
ne se peut faire que par la parole.Je ren-
voie mes lecteurs au livre de M. Il. La-
combc,' H-quissc d'une éducation basée
sur la psychologie de l'enfant, » que j 'ai
récemment analysé à cette place, et je
pense, avec la majorité, plus que cela :
avec l'unanimité du Bureau que l'on ne
doit pas considérer comme preuve d in-
discipline le bavardage pendant l'étude,
l'agilalion du corps, la tendance à taqui-
ner les camarades, la brutalité dans les
jeux, la paresse : je dis,comme tous mes
collègues que l'indisciplineconsiste dans
une révolte déclarée, contre le maître,
l'inobéissance à un ordre précis, les ré-
ponses ou apostrophes impertinentes, le
bruit fait systématiquement pour empê-
cher le maître de faire sa classe, mais
j'ajoute ou plutôt je répète, que la plu-
part du temps, le maître ou les parents
sont attaqués « par procuration », c'est à
la règle qu'on en veut, à tort le plus sou-
vent, à raison, quelquefois. Ce question-
naire aurait donc d'heureux effet» ■ il
faisait réfléchir les parents et les maîtres,
et si,Ode leurs réflexions, résultait une
discipline vraiment libérale, une disci-
pline bâtie sur la nature même des en-
fants.Et maintenant voici le Questionnaire :
Nom de l'enfant (initiales du nom, et pré-
noms en toutes lettres). sexe, nationalité, condi-
tion sociale des parents (p. ex. ouvrier, agricul-
teur, commerçanl), date de naissance de I en-
fant.
2 De quelle date à quelle date avez-vous
connu cet enfant ?
3' Quelles sont les autres personnes qui ont
pu le connaitre et l'apprécier?
4* Quelles écoles l'enfant a-t-il fréquentées ?
— A-t-on eu à se plaindre de lui dans ces
écoles ?
5 Donnez en détail le réeit des actes d'indis-
cipline qui sont à reprocher à l'enfant (faites la
distinction entre les laits que vous connaissez
personnellement et ceux que vous connaissez
de seconde main, mais dont vous pouvez ga-
rantir l'exactitude).
C' Les actes d'indiscipline se sont-ils produits
dès les premiers jours passés à l'école ? — Y a-
t-il eu un fait initial qui ouvre la période d in-
discipline?.7' L'indiscipline se traduit-elle par des actes
et des paroles ou par l'inertie ? L'enfant est-il
boudeur?
8- L'indiscipline est-elle constante ou inter-
mittente, plus fréquente au début de la journée
ou au contraire à la fin quand la fatigue se fait
sentir 1
9- Quel est son état de santé? Quel est son dé-
veloppement physique, comparé a celui des en-
fants de son age ? Quelles ont été sea maladies ?
A-t-il des tics, fait-il des grimaces involontaires
des yeux, de la bouche, du front ?
i 10- Quel est le rang de l'enfant dans sa classe,
indiquez le nombre d'élèves, quelle est son in-
telligence naturelle ?
11 L'enfant fait-il preuve dans le travail d'in-
dépendance d esprit, d'initiative, d'invention ? Le
penchant à l imitation est-il chez lui très déve-
loppé? ...
12- ttaisonne-t -il ten indiscipline, s , en vante-t-
il auprès de ses camarades? Aime-t-il à attirer
l'attention sur lui? Est-il vaniteux ?
1.) Que Bavez-vous de son caractère ? Est-il
par exemple, courageux, peureux, brusque,
doux, raisonnable. etc...
14* L'enfant est -il également indiscipline à 1 é-
cole et dans la fanuUe? Quelles sont ses rela-
tions avec ses camarades : en classe, en récréa-
tion, en dehors de l'école
15- Quels procédés avez-vous employés pour
ramener l'enfant à son devoir? Quelle a été 1 at-
titude de 1 entant? Quelles méthodes ont le
mieux réussi ? La famille emploie-t-elle les mê-
mes mélhodcs que le maître ?
IG- Quelles sont les relations de la famille avec
le maître ? — L'indiscipline n'avait elle pas pour
cause, dans certains cas, la position elevée et
la richesse des parents ou inversement leur état
social inférieur, leur grande misère?
17- Quelle est, d'après le correspondant, la
cause principale de l'indiscipline de 1 enfant?
18 Prière d'indiquer ici toutes vos observa-
tions complémentaires qui ne rentreraient pas
dans le cadre tics questions précédantes.
19- Nom du correspondant, profession,adresse,
et lien de parenté avec l'enfant.
20- Autorisez-vous la publication de votre
nom ? (l'adresse, en aucun cas, ne sera publiée,
ni votre lien de parenté.)
Envoyer le questionnaire rempli, comme pa
piers d affaires, à Mlle U.ERTsott. secretaire gé-
néral, G, rue de la Sorbonne, Paris.
L'envoi de ce questionnaire est accom-
pagné des renseignements et conseils
pratiques suivants :
Indications et conseils pratiques aux correspon
dants. - Les renseignements qui nous seront
envoyés garderont un caractère strictement con-
lidcntiel ; t-n aucun cas, il ne sera publié par
nous d'indications permettant de soupçonner
l'identité des enfants sur lesquels les renseigne-
ments seront donnes ; par conséquent, nos cor-
respondants ont toute sécurité pour faire une
étude sérieuse, approfondie, complète, vraiment
scientifique, sans avoir la crainte de porter le
moindre préjudice à autrui.
S'il arrive à un de nos correspondants de ne
pas pouvoir répondre à quelques-unes de nos
questions, il doit quand méine nous renvoyer la
feuille du questionnaire ; cette feuille, quoique
incomplètement remplie, nous sera utile ; d a
bord elle peut contenir des documents intéres-
sants sur d'autres points ; ensuite, le silence 1
gardé sur une question peut être pour nous le
signe que cette question était mal posée.
Les réponses les plus instructives sont celles
qui contiennent le plus grand nombre de faits
précis et bien détaillés.
Je demandeinstamment à nos lecteurs
et à nos lectrices de se faire les collabo-
rateurs de notre CI étude ». Le point le
plus important en a été à peine indiqué ;
(par pure délicatesse et prudence) ; je
veux parler de la question d'tiérédité ; les
personnes réellement dévouées fi nos re-
cherches, celles surtout dont la situation
est indépendante feraient une butine
œuvre en insistant sur ce sujet.
P. S. — Les élections au Conseil supé-
rieur de l'Instruction publique auront
lieu en avril, je compte tenir mes lec-
teurs au courant des candidatures et des
Drourammes des candidats.
PAULINE KERGOMARD.
Une Lettre de M. Joseph Fabre
Le Soir ayant publié une lettre de M. De-
vos, gérant de la Libre Parole, et dans la-
quelle était directement visé, M. Joseph
Fabre, l'honorable sénateur, a envoyé à M.
Gaston Pollonnais les lettres suivantes :
Paris, le 27 mars 1900.
Monsieur le gérant. ,
Me réclamant de votre loyauté et de la loi, je
vous prie d insérer en due place la lettre ci-apres
en réponse à la lettre de M. IJevos, parue dans
votre numéro d'hier soir lundi, où je suis visé.
J'oflre de payer, selon le tarif légal, l'excé-
dant du double des lignes.
Veuillez acréer mes sentiments les plus dis-
tingués.
JOSEPH FABRE.
Paris, 27 mars.
Monsieur le Directeur,
Le Soir vient d'insérer une lettre qui dénature
le sous de ma requête à M. le président de tri-
banal civil, publiée par le Rappel et le Temps
d'hier.
Dans cette requête, je n'ai fait qu'établir et
défendre ma probité outragée.
Telles sont les tristes mœurs de notre tempe 1
que c'est aux accusés de commencer par faire la
preuve de leur innocence ; et je me demande
avec émotion quelle aurait été 1 attitude de mes
adversaires politiques ou même des personnes
qui ne me connaissent pas, si, il y a dix-neuf
ans, j'eusse eu le malheur de prendre pour in-
termédiaire de mes achats et de mes paiemeats
une maison de crédit ne conservant point les
bordereaux et les comptes de ses clients.
Puis, je pense à cette foule de pauvres gens,
investis de fonctions ou de mandats publies,
qui, du jour au lendemain, se trouvent désho-
norés par d'injustes attaques contre lesquelles
ils restent désarmés.
Il serait temps de porter le fer rouge sur 1 ab-
cès dont le. pays souflreet amurt.
Vous allez répéter que je suis un ennemi de
la liberté de la presse. Point. La loi de 1031 a
supprimé tous les délite d'opinion. Je n'en veux
rétablir aucun. Mais ie yeux qtw, soi t PAf.1a
juridiction du tribunal conwttbunel" soit sim-
plement si l'on veut par la juridiction du tribu.
nal civil, les délits d'injure et de diffamation
puissent être atteints.
La peine efficace est celle qui frappe à la
bourse; et d'autres pays, l'Angletorre en parti-
culier, nous révèlent, par la bonne tenue d'une
presse qui, sans cesser d'être vigilante et sévère
dans ses censures, se respecte et respecte la di-
gnité humaine, les bienfaisants effets de très
forts dommages intérêts.
Quant aux dénonciations loyales de la presse
contre les prévaricateurs quels qu'ils soient, je
les estime utiles, louables, généreuses, dignes
d'être encouragées pour l'intérêt et l'honneur
de tous.....
Veuillez agréer, Monsieur le directeur, 1 ex-
pression de mes sentiments les plus distingués.
JOSEPII FAURE.
Hier, M. Pollonnais déclare qu'il accepte
la proposition de M. Joseph Fabre, de payer
au tarif légal les lignes supplémentaires et
que le montant de la somme sera versé à
la souscription ouverte par VIntransigeant
pour offrir une épée d'honneur au géné-
rai Cronje.
Cette combinaison, nous scmble-t-il, ne
pourra qu'être fort agréable à M. Joseph
Fabre qui doit apprécier au moins aussi
bien que M. Pollonnais les indéniables qua-
lités du vaillant soldat qu'est le général
Cronje.
UN BRILLANT CONCERT
L'Association mutuelle des femmes ar-
tistes de Paris donnait, hier, dans la salle
des Fêtes de l'avenue Hoche, un concert.
Le programme, très complet, très varié,
était plein do promesses ; nous ne fûmes
pas déçue, empressons-nous de le dire.
Après plusieurs morceaux d'ouverture de
charme simple mais réel, on goûta fort. un
trio pour violon, violoncelle et piano exé-
cuté d'une façon remarquable par MM. Pen-
nequin, Turct et l'auteur lui-même Emile
Trepard.
La Brouette, de Rostand, le grand poète
du jour, dite avec sentiment et gràce par
Mlle Maïa du théâtre Sarah-Bcrnhardt a plu
infiniment, et a été applaudie de môme.
Mme Arvyl Eiguesier dans Air d'Alceste
de 'iiuck, lit entendre une belle voix de
contralto dont la puissance et l'étendue
emplissaient toute la salle.
Signalons Mlle lierlhe lleynold du théâtre
Antoine dans ses œuvres où elle montre
une vraie fougue d'Espagnole. Puis vint M.
Charles Hené qui s'assit au piano pour jouer
toute une série d'œuvres qui sont siennas
et qui dénote de la part de l'auteur uno
grande habileté.
Nous en passons, et des meilleurs. Mais
il se fait tard et à regret nous quittons le
concert tandis que 1 on représente une dé-
licieusi féerie sur ce thème éternel : l'a-
mour.
La salle est encore coroble. Beaucoup de
femmes élégantes, toutes nu-tetc — c'est
aujourd'hui de rigueur. C'est beaucoup
plus joli et,en somme, pers 0 1lI1l\ s'en plaint.
RENÉE RAMUAUD.
LA BIBLIOTHÈQUE
DE LA "FRONDE"
Nous avons eu le plaisir de recevoir pour
notre bibliothèque :
Otfcrt par Mme de Rute-Rattazzi
La Petite llevue internationale — 3 volu-
mes.
Otlert par Mme Mary Summer
Les Aventures (le la princesse Soundari.
Le roman d'un académicien.
Ollert par M. Pierre Massoni
Deux volumes de poésies.
Les joies prochaines.
Lielitia.
Reçu :
La Heuue Blanche.
Sommaire : Lettres 1 Madeleine Vcrni-
quet, par Sophie Arnould. — Journal d une
femme de chambre, Octave Mirbeau. —
Fleurs de lassitude, X... etc.
La Vie nouvelle, revue littéraire. — Dia-
logue philosophique sur l'Amour, Joseph
Bossi. — Paradoxes, André Gide. — La !~'en-
sitive, roman, Christian Berck, etc.
La Re, ue des Revues. - La guérison de la
tuberculose, par le docteur Caze. — La vé-
rité sur la révolution des Philippines, par
Emilio Aguinaldo. — Nouvelles poésies de
Gahriele d'Annunzio.
La Revue municipale. — La sécurité au
théâtre par Quentin-Bauchart, eonseiller
municipal de Paris.
i Le Socialisme municipal 11 étranger, pu
1 Adrien Veber...
Lo meilleur pain au meilleur marcM,
analyse d'un rapport de IL A. Muni*, de
ÏÏMHtut.
Le Mercure de France.
Le Journal Officiel des vaîeuos de t Bxpo-
tUion de 1900.
La Vogue, revue mensuelle de littéra-
ture, d'art et d'actualité.
Nous adressons nos bien sincères remer-
ciements à nos aimables donateurs.
MAROA DU PUYSSANNIÈUBS.
Bibliothécaire.
SUGAR PERNOT
Nouvelle Gaufrette vanille.
LA CHAMBRE
La grand événement de la journée était
1* nominfettoo de cinq membres au con-
seil supérieur du travail. Les groupes se
sont réunis, les présidents desdits grou-
pes ont tenté de se mettre d'accord —
sans y parvenir — à seule fin de savoir
si un-socialiste devait faire partie du
conseil du travail. Il serait fastidieux
d'entrer dans les détails de ces combi-
naisons louches; mais il nous parait utile
de dénoncer cette petite manœuvre du
groupe progressiste. D 'un commun ac-
cord, il avait été décidé que M. Colliard
eprésenterait dans la liste l'élément so-
cialiste. Au dernier moment, les mélinis-
tes remanièrent la liste effaçant le nom
de M. Colliard pour le remplacer par
celui de M. Charles Ferry. On comptait
sur un échec violent du député socia-
liste, et ce vote devait être pour M. Mil-
lerand une indication sérieuse. Or, voici
ce qu'il advint. Les deux candidats sont
arrivés avec cent trente-sept voix cha-
cun. Quoi qu'il advienne au deuxième
tour — qui aura lieu tantôt, — la ma-
nœuvre a échoué.
Toutes ces coteries ont animé les cou-
loirs,tandis qu'en séance règne un calme
plat. M. Charles-Bernard ne réussit
même pas à passionner le débat en de-
mandant à interpeller le gouvernement
sur les radiations faites au préjudice des
électeurs de la 1" circonscription de Bor-
deaux.
Le garde des sceaux se déclare à la
disposition de la Chambre, mais celle-ci
renvoie à un mois l'interpellation du
député antisémite de la Gironde.
Le président prononce l'éloge funèbre
du baron des Rotoûrs, député républi-
cain, de la 2* circonscription de Douai,
décédé subitement à l'âge de quarante
ans.
Des applaudissements unanimes ont
accueilli les dernières paroles du prési-
dent « qui, en adressant un suprême
hommage à la mémoire du regretté col-
lègue, saluait en lui trois générations
de parlementaires ». fi
On procède ensuite au scrutin pour
l'élection de cinq membres du conseil
supérieur du travail.
Kn voici le résultat :
MM. Maruéjouls Elus.
Louis Kicard
Mesureur
Dubiof 171
Il sera procédé aujourd'hui à un
deuxième tour de scrutin pour le der-
nier membre qui reste à élire.
La Chambre reprend la discussion du
projet de loi relatif à l'armée coloniale.
M. Chautemps prononce un discours
fort intéressant.
Il importe, dit il, de rechercher les sources de
la crise que subit le recrutement de notre armée
coloniale, d'en indiquer les remèdes.
Nutre armée coloniale n'est pas à créer. Elle
existe déjà. Les projets soumis à la Chambre
n'ajoutent pas un homme aux disponibilités
existantes, ,.
Sans doute, le rattachement une lois réglé,
la question sera simplifiée. Pour moi, je suis
partisan du rattachement à la guerre que je vo
Íeral. (Très bien !)
Mais la question vitale, c c'est le recrutement
de nos troupes coloniales.
Aucun des projets soumis à la Chambre ne
fournit un homme de plus que les contingents
actuels à l'armée coloniale.
Qui ne conçoit pourtant combien il serait dan-
gereux de perpétuer la faillite de notre recru-
tement colonial en présence de 1 extension
énorme de notre domaine d outre mer ? C est un
péril qui apparaît aux yeux des moins inities,
que les événements de Fachoda ont laissé appa-
raître dans leur tragique urgenc(,, que montrent
avec force les événements sud-africains.
te sera l'honneur de la troisième République
d'avoir ajouté à la France un immense empire
colonial. Quelle est donc, dans notre his.oire
nationale, la période comparable à celle de ces
trente dernières années où la République, au
lendemain d une guerre qui avait laisse la
France ruinée et démembrée, a su lui conquérir
glorieusement l lndo-Chine, la Tunisie, Mada-
gascar et les espaces africains ?
L'auteur déclare que le rattachement
des troupes coloniales à la marine ne se
comprendrait pas. Cette faute, dit M.
Cîsaulcmps, n'aurait d'autres résultats
que de créer l'anarchie et de nous mener
peut-être un jour à la défaite.
La Chambre ne ménage pas ses ap-
plaudissements à roratenx auquel suc-
cède M. Lucien Hubert.
Vous aves entendu, dit-il, lei partisans du
rattachement de l'armée coloniale I la guerre et
les partisans du rattachement à la marine. Je
viens vous demander à mon tour le rattache-
ment de l'armée coloniale au ministère des co-
lonies. (On rit.) La défense des colonies doit lui
appartenir.
Le dernier orateur hier a été M. Plichon
qui recherche pourquoi l'armée colo-
niale, dont tous les éléments existent,
n'est pas encore créée.
M. Plichon. — Depuis trente ans, l'énormité
même des dépenses ainsi créées par l'Europe à
ses armements a maintenu la paix. Pas un
point du globe, cependant, où n'ait, durant cette
tonne période, retenti les grondements du canon; il
>nne en ce moment même au sud de l'Afrique.
Qui nous dit lorsqu'il se sera tu, rassurant en-
fin le cœur de ceux qui gardent opiniâtres les
idées de justice, qui nous dit que, ce jour-là, on
ne l'entendra pas ailleurs?
.Aux soldats de nos troupes coloniales incom-
bera l'honneur de défendre les premiers le dra-
peau français.
Je veux chasser loin de mon esprit de pareil-
les pensées: mais il serait criminel de perdre
plus de temps pour leur donner l'organisation
qui, au jour du péril, sera avec leur courage le
gage de la victoire.
Il ne reste plus qu'une dizaine d'ora-
teurs inscrits 11
Aussi, remet-on ce plaisir à aujour-
d'hui, mais sur la demande de M. Du-
bief, la Chambre inscrit en tête de son
ordre du jour la discussion du projet mo-
difié par le Sénat relatif au travail des
femmes et des enfants dans les établis-
sements industriels.
Il est probable que cette discussion
prendra cinq minutes au maximum, la
t'.nmmisgion l'esnère du moins.
HÉLÈNE SÉB.
SÉNAT
Beaucoup do monde hier au Luxembourg.
Ne croyez pas quo cette affluence ina-
coutumée ait été attirée par le vote du
quatrième douzième provisoire. Non, c'est
réfection contestée du Rhône qui seule a
amené dans les tribunes cette brillante
assistance.
Lors du dernier renouvellement le 28 jan-
vier, M. Thévenet, sénateur sortant, obte-
nait 367 voix, alors que ta majorité absolue
était de 368. Ou avait retranché à M. Thé
venet une voix parce que son nom avait été
rayé sur un bulletin. Un troisième tour eut
lieu et M. Repiquet fut élu à cinq voix de
majorité.
Il eut des protestations et le 3' bu-
reau fut chargé d'examiner cette élection ;
mais le bureau ne conclut pas, laissant au
Sénat le soin de se prononcer sur cette dé-
licate question.
M. Monestier, au nom du bureau, fait un
exposé impartial des faits. Lors du dé-
pouillement du scrutin, M. Rieussec, pré-
sident de la 3' section, déclara que le nom
de M. Thévenet avait été rayé sur un bulle-
tin. Deux des assesseurs prétendent que lo
bulletin n'a pas été compté dans le dépouil-
lement. M. Rieussec et l'autre assesseur
affirment le contraire. Le bulletin fut porte
au bureau central.A l'unanimité, il déplara
que le nom de M. Thévenet était bien rayé.
Le président tit brûler les bulletins et on
procéda à un troisième tour.
Le rapporteur fait connaître que M. Thé-
venet et ses amis se demandent si le bulle-
tin, présenté au bureau central était bien
le même sur lequel avait porté la dilii-
culté. , ......
M. Moncstier. —Le nom de M. Thevcnct était-
il ou non rayé ! M. Hieusscc a-t-il bien porté au
bureau cC:¡lr,d le bulletin contesté? Avait-on
dan. la troisième section marqué à M. Thévenet
la voix conl"slée" Enfin peut-on attribuer à M.
Thévenet ledit uuHctin? La jurisprudence du
Cu:.s -il d ):'at dit non ; mais elle reconnut que
les Chambres ont le droit de le faire.
Suivant la réponse que vous ferez à ces di-
verses questions, vous validerez M. Repiquet
ou vous proclamerez M. Thévenet, ou enlin
plus vraiâcmblifcblemtnt vous renverrez la solu-
tion au meilleur juge, c'est-à-dire au col:ège
électorat. Tout le monde s'inclinera respectueu-
sement devant la décision du Sénat.
M. Baduel qui a fait partie d'une sous-
commission chargée d'examiner les pièces,
demande au Sénat de valider les opérations
électorales du Rhône et d'admettre M. Re-
piquet.
M. Théodore Girard estime qu'il convient
d'annuler pareilles élections, des irrégula-
rités ont été commises et l'orateur pense
que le candidat ne peut souffrir de la faute
de M. Rieussec, ni des maladresses ou de
l'incurie du bureau central.
M. Gourju, un ami de M. itepiquet pro-
nonce un plaidoyer interminable en laveur
de l'élu contesté. j
M. Raynal remet les choses au point. Et |
en demandant l'annulation des opérations
électorales du llhùne, l'orateur estime qu'il
détend strictement la cause des électeurs
et celle d'un ami qu'il regrette profondé-
ment.
L'annulation est mise aux voix et adoptée
car 127 voix contre 123 après pointage. I
H. S.
INFORMATIONS PARLMENTAIRES
Le monopole des inhumations
La commission du monopole des inhuma-
tions a décidé de repousser le projet,
adopté par le Sénat, aux termes duquel le
monopole des inhumations qui appartient
exclusivement aux fabriques et constslolÑl
serait donné aux fabriques 0&1 aux com..
non, au choix des familles.
Elle a pris pour base de sa discussion 1.
projet accepté par la Chambre en t883 ti
accepté par la commission de la précé-
dente législature, projet qui donne le m0-
nopole aux communes à l'exclusion des f..
briques.
M. Rabier a été nommé rapporteur.
La commission fera tous ses efforts pou
que la proposition vienne rapidement es
discussion.
POLITIQUE ETRANGERE
La guerre au Transvaal
La mort du général Joubert bien que ré-
sonnant douloureusement dans le cœur de
tous les Boers ne porte aucune atteinte à
leur courage, ne modifie en quoi que cet
soit la marche qu'ils entendent suivre. Ce-
pendant devant la supériorité du nombre
de l'ennemi, les républicains du Transvaal
n'étaient pas sans espérer que l'issue des
événements dépendait encore de la science,
de l'habileté du grand citoyen qui a Slla,
combé.
Le retard apporté par lord Roberts dans
la marche en avant que l'on avait signalé,
vient de ce que la pacification que 1'011
croyait accomplie dans le sud de l'Orange
est loin d'être faite. Lord Roberts ne quit-
tera donc Iilœmfontein qu'en rendant la sé-
curité aux habitants sur tous les points
de ces régions dévastées. Or, les détache-
ments anglais sont envoyés dans toutes
les directions sans parvenir à assurer la
tranquillité; aussi un changement s'est-il
opère dans la marche sur Mafeking et SUIL
Pretoria. Lord Kitchener, en quittant
Prieska, a dli se rendre auprès du généra-
lissime afin de se concerter au sujet de la,
triple action action à mener : Sir Redvers
Buller pénétrerait dans le Transvaal en
s'engageant dans le nord du Natal, lord
Roberts se dirigerait du côté de Kroonstadt;
lord Kitchener,après avoir atteint Mafeking,
marcherait entin sur Pretoria. Kt l'on s'em-
presse de faire cette remarque, que son iti-
néraire est celui qu'a suivi Jameson. Il est
évident que la tactique est d une habileté
rare, attendu que les corps d'armée trans-
vaaliens étant campé au Nord de l'Orange
et du Natal ne pourront donner leur con-
cours aux Boers qui, en ce moment, assiè-
gent Mafeking et vont exécuter toutes les
tentatives possibles pour tenir tête à lord
Kitchener.
IBO.
Afrique du Sud
Lourenço-Marquez, 29 mars.
Le Standard and Diggers Neit s publie une
dépêche de Prétoria, du mars, disant :
Le lield cornet Marais a re<, u lner le télé-
gramme suivant :
« Le commando tout entier, fort de 10,000
hommes, est arrivé à un point oil il est en
sûreté. Adresser les lettres à Smaldcel,
Tout va bien.
Un autre télégramme, daté de Préloria,
26 mars, au même journal, dit que le capt-
Laine Ganelzki et son corps de cent éclai-
reurs russes, ont fait tuue reconnaissanco
entre les patrouilles anglaises et le camp
de Sunday-Hiver, au cours de laquelle ils
se sont emparés de 10 mulots et d'un wa«
gon.
Le Cap, 20 mars.
Répondant aujourd'hui à uno deputatiou,
M. Schreiner a déclaré qu'il avait adressé
des représentations énergiques au gouver-
nement impérial pourprotestor contre l'en-
voi des prisonniers boers à Sainte-Hélène,
mais sans succès.
Angleterre
Londres, 29 mars.
Lord Roberts confirme l'occupation de
Fauresmilh par le général Clements, et la
découverte dans un puits d'exploitation de
mines d'un canon pour projectiles de neuf,
livres, et d'un Martini-Maxim, et la capture
d'une grande quantité de munitions que les
Béera avaient enterrées.
Lord Roberts ajoute que les armes con-
tinuent à être rendues graduellement et
que les habitants reprennent leurs occu-
pations.
Londres, 29 mars.
Le Times, 2' édition, public la dépêche
suivante :
BloemfonteÍn, 28 mprs.
11 doit être bien entendu que la halte de
l'armée anglaise dans le voisinage de
Bloemfontein est absolument nécessaire
comme précaution militaire. Les forces
anglaises sont sur le point d entrer dans,
une nouvelle phase des opérations, aveo
leurs lignes principales de communications
situées dans un territoire récemment hos-
tile. De plus, les récentes opérations ont
beaucoup éprouvé les chevaux.
D'un autre côté, t'armée anglaiso va se
mettre en marche au commencement de
l'hiver sud-africain, et il serait criminel de
lancer les troupes avant quelles soient
préparées à supporter les rigueurs de la
température. Auparavant, les chevaux, les
vêlements et les vivres, doivent être réu-
nis en uuantité suffisante.
Etats-Unis d'Amérique
New-York, 29 mars.
Une dépêche de Prétoria au World dit
qu'au cours d'une interview, le 7 février^
le président Kriiger a fait la déclaration*
suivante :
« Lorsque j'ai ditique les pertes qui -.;urtà
viendraient pendant la guerre enraieraient
l'humanité, les Anglais ont ri, et ont dit
qu'il ne leur faudrait pas plus d un moM<
LA TRIBUNE
Variations sur les Cantatrices
Comme une chaîne, dont les anneaux
brisés ne sonnent plus, apparait dans
l'histoire de l'art la liste des grans noms,
sonores, — ou des jolis noms roucou-
lants — des cantatrices qui furent, —
enchantèrent, — et passèrent...
Le génie, dans l'art du Ihe'dtre pro-
nonça Alexandre Dumas fils sur la tombe
d'Aimée Desclée, ne survit pas aux victi-
mes qu'il fait...
Parole brutale, amère — parce que
vraie. Cir, il est réel, qu'élu entre tous
les artistes — pour mieux prendre à la
gorge, en émotion sacrée, toute une
foui»', l'acteur, en mourant, emporte
toute cette flamme et cette fièvre, de
sorte que le nom d'un qui passionna
deux générations, est moins aux géné-
rations qui viennent qu'un faible écho,
qu'un impalpable nuage de cendre lé-
gère. C'est là la rançon de cette gloire
inégalée : posséderjune foule par la seule
magie de sa présence, de sa parole, créa-
trice de beauté, incarnation de rève.
Et par dessus l'acteur qui joue et parle,
nous placerons le chanteur, et par des-
sus encore le chanteur, la cantatrice. Car
onc femme, détentrice de grâce, dans la
fête de la parure, ou le désordre sublime
de la vérité joint ce don de sa personne
en image héroïque ou charmante au don
de son génie. C'est pourquoi les triom-
phes qu'on fit à quelques cantatrices dé-
passèrent de beaucoup ceux faits à des
chanteurs qui égalèrent celles-ci par la
puissance et la beauté de leur talent.
Aussi d'avoir eu, — et d'emporter da-
vantage, — mortes, elles ont pourtant
encore un charme nostalgieux et doux.
On les lit, ces noms brillants qui étoi-
lèreot deux siècles, et on songe à ce peu
ie poussière au définitif silenco,.. Et,
dans leur histoire, en les regardant vi-
vre, peintes en quelques mots sous les
traits qui furent leurs, on les aime en-
core d'avoir été si vivantes un jour — et
tant aimées...
Deux siècles seulement; car aux épo-
ques antérieures on usait de la voix
humaine comme l'oiseau use de son
gosier, selon ses moyens individuels
innés, mais sans métier. La première
technique de l'art du chant vint d'Italie
où on commença de les découvrir et de
l'appliquer vers la fin du xvil siècle. Mais
il fallut encore pas mal d'années pour
que cet art se développât et ce n'est que
vers 1645 qu'on découvre les noms de-
meurés célèbres de cantatrices. La pre-
mière de toutes fut une: Marguerite Ber-
tolazzi qui, venue de Milan, chanta à la
cour de France. Une Française, Marthe
le Hochais, qui interpréta avec une ex-
pression brillante et juste l'œuvre de
Lulli (Proserpine et Armide).
Simultanément en France et en Italie
(et ce seront pendant longtemps encore
les deux seuls terrains fertiles à l'har-
monie) en voici quatre : Mile Pélissier,,
Mlle le Maure, la Bastardini, la 'Gabrielli.
Des deux premiires nous apprenons
qu'elles furent vives et capricieuses —
plus gracieuses que belles — bien pari-
siennes enfin : Mlle le Maure créa le
10 novembre 1735 la Jeptité de Monté-
clair à l'Opéra, puis aussitôt — en précè-
dent de plus récentes et célèbres fugues !
— quitta ce théâtre mécontente sans
doute de son rôle et de soit directeur...
Catarina Gabriclli vers la môme épo
que à peu près enchante Métastase, et
c'est d'elle qu'on tient cette gamine ré-
ponse à Catherine Il qui l'avait appelée
a sa cour - pour l'enchanter également.
L'impératrice s'étonnait du chiffre de
5000 ducats exigés par la chanteuse et
disait : qu'aucun de ses feld-maréchaux
ne recevait pareille somme. • Et la Ga-
brieHi aussitôt.
— Sa Majesté n'a donc qu'à faire chan-
ter ses maréchaux #
Il est à croire qu elle obtint ses 5000
ducats — et la curiosité sympathique de
Sa Majesté.
On retient encore, à Paris, à la date de
1750 le nom de Sophie Arnould et sa ré-
putation d'esprit endiablé.
Le 1" décembre 1783 voici qu'apparaît
Mlle Clavel dite : la Sainte-Hubert y ,d'une
beauté tout irrégulière mais ravissante.
Elle créé la Didon de Piccini et c'est elle
qui presque simultanément avec la Clai-
ron et Talma inaugure la vérité dans le
costume au théâtre. Spirituelle, sensible,
de cœur et de sens prompts la Saint-Hu-
berty est un des plus charmants por-
traits féminins du 18* siècle.
Avec elle et ses contemporains on
commence de voir grossir le chiffre des
appointements accordés aux artistes
lyriques, appointements qu'à l'Opéra de
Paris un demi siècle auparavant on ne
craignait pas de fixer i 1200 par an !
Mais c'est, à cette même époque (1782)
une cantatrice anglaise (la seule presque
de telle nationalité qui apparaitra en
ces brèves mais fidèles notes) qui va dé-
tenir le record des appointements. Elle
se nomme Mrs Bellington. on lui offre
à Covent-Garden 1000 livres sterling. Et
voici toute une floraison d'artistes. En
cette fin du dix-huitième il y eut parmi
tant de cris et de plaintes d'une portée
incalculable, il y eut le frisson merveil-
leux de la beauté triomphalement clamée
ou murmurée en action de passion fac-
tice :
Favart, la très parisienne comédienne
délicieuse, et d'une bonté et d'une géné-
rosité égales à son remarquable talent
— puis une Portugaise : Mme Todi
(Luigia d'Aguiar) qui fut aussi accueillie
par à Catherine 11 de Russie. Née en 1753
Sétubal en Portugal, elle épousa à 15
ans le chef d'orchestre de Lisbonne :
Todi.
Devenue veuve très jeune,elle demeura
fidèle à la mémoire de son mari et dé-
vouée tout entière à ses enfants. Ello
avait cependant un tempérament d'éner-
gie et de passion. En 1809, quand le ma-
réchal Soult tenait son quartier, près de
Porter elle se décide à fuir ,* elle s'em-
barque avec ses enfants et une caisse
d'argent monnayé, l'embarcation cha-
vire, toute cette petite fortune est per-
due, par un miracle elle et ses enfants
sont sauvés. Elle va alors se mettre sous
la protection du maréchal qui t'accueillit
bien et la protégea elle et les siens des
misères de la guerre.
Très intelligente, elle parlait quatre
langues ; elle garda longtemps sa belle
voix et son talent dans toute leur pléni-
tude et par eux reconstitua l'avoir de ses
enfants. Elle ne mourut qu'à 80 ans. Au
commencement du dix-neuvième siècle,
voici, en Italie : Joseph Grassini, Mme
Catalani qui fut un moment directrice
du théâtre italien et qui épousa un offi-
cier français: M. Valabrègue — nom
connu aujourd'hui dans les annales théâ-
trales — qu'elle avait rencontré à Lis-
bonne. Très jolie, très fêtée, on nous la
montre très prodigue, mais très géné-
reuse.
La Colbrani,une Espagnole qui épousa
Rossini après de glorieux débuts pres-
que simultanés avec ceux de Manuel Gar-
Cià le célèbre, le terrible, le père de celle
que nous allons retrouver un peu plus
tard sous le nom de la Malibrau — et qui
battait sa fille quand elle était encore
une enfant... pour la faire chanter 1 I
Une autre, très brillante, la Fodor,fllle
d'un violoniste hongrois, née à Paris au
n' 14 de la rue Taitbout, le 13 octobre
1789 - fut celle qui, la première, intro-
duisit et posa en France les traditions de
la vocale italienne appliquée à la diction
française.
Une exquise créature: Cinthie Monta-
land née en 1801, celle qui ayant épousé
M. Damoreau, fut connue plus tard sous
le nom de Mmo Cinthie-Damoreau. Des
parents l'élevèrent dans les plus grandes
privations, n'ayant guère de ressources.
A 10 ans, Cinthie gagnait son pain en
copiant de la musique à un sou la page.
Mais de tous ces petits signes noirs
mystérieux, que sa petite main traçait
pendant de longues heures, il se leva
bientôt une suggestive harmonie —
muette d'abord, mais à laquelle un jour
Cinthie osa prêter la jeunesse adorable de
son adorable voix;— son destin était des
lors fixé — elle y marcha patiemment,
courageusement — et le remplit tout
entier.
Plus ardente peut-être que celle-là qui
était toute de douceur et de sensibilité,
voici Judith Pasta, Milanaise d'origine.
Elle interpréta avec une expression ad-
mirable les œuvres de Bellini qui mou-
rut si jeune et dont le souvenir lui de-
meura sacré.
Tous ceux qui l'entendirent furent
frappés de sa puissance tragique et pas-
sionnée qui ne jaillissait sans doute pas
seulement —quoi qu'on en dit — de son
gosier et de son art, mais de son cœur
vibrant.
Et voici enfin celle dont le nom de-
meurera fixé comme une étoile par la
poésie :
Ah ! tu vivrais encore, sans cette âme indomptable.
Ce fut là ton seul mal, et le secret fardeau * ^
Sous lequel ton beau corps plia comme un roseau,
Ne savais-tu donc pas, comédienne imprudente,"
Que ces cris insensés qui te sortaient du coeur
De ta joue amaigrie augmentaient la pâleur. *
Ne savais-tu donc pas que, sur ta tempe ardente
Ta main de jour en jour se posait prus tremblante
Et que c'est tenter Dieu que d'aimer la douleur ?
Oui, oui, tu le savais, et que, dans cette vie,
Rien n'est boa que d'aimer, n'est vrai que de souflrir,
Chaque soir dans tes chants tu te sentais pâlir.
Tu connaissais le monde, et la foule et l'envie,
Et, dans ce corps brisé concentrant ton génie
Tu regardais la Malibran mourir. (t)
Nous savons que ce n'est pas la pas-
sion seule de son art et de l'amour qui
tua la Malibran. Elle en vécut certes —
et c'est assez pour justifier la vision du
poète, mais elle mourut en réalité des
suites d'une chute de cheval.
Il est vrai que ceux qui meurent j,,,
nés sont aimés des dieux, et dès que vient
le nom de la Malibran, c'est le fait de
(t) Alfred de Musset•
;
cette fin rapide, prématurée, qui frappe
si vivement, au point qu'on parle de saf'
mort pour être ému avant de parler de
sa vie, qui fut un éblouissement.
Le célèbre dialogue entre elle et Gar-
cia, son père, à la veille de son début à
New-York, dans le rôle de Desdémona
d'V/hel/o, elle avait seize ans, est presque
trop connu pour être encore répété, mais
il est si joli 1
Marietta-Félicia (elle avait des noms
de bonheur), était seule dans sa cham-
bre à l'hôtel, bien tranquille. Son père
qui était à la fois imprésario et premier
rôle de la troupe, actuellement en re-1
présentations à New-York, entre et lui,
dit :
— Vous débuterez samedi avec mo*,ii
dans Othello...
— Samedi, mais c'est dans six jours b
— Je le sais bien...
— Six jours pour répéter Íun rôle
comme celui de Desdéinona, pour m'ha-
bituer à la scène.
— Pas d'objections Vous débuterez
samedi èt vous serez excellente, ooj
sinon, à la dernière SCtmc... quand ja'
suis censé vous frapper d'un coup de;
poignard, je vous frapperai réelle»;
ment... » «
Et elle joua, et elle fut ( excellente
Excellente? mot faible— et, ne le se-,
raient-ils pas tous pour [exprimer le su*.
blime terrifiant de son jeu à cette der»<
nière scène, qu'elle ne {put jamais jouet,
deux fois avec des mouvements iden^
tiques, car elle disait aux différents par-,
tenaires qui, avec elle, remplirent le rôlcr..
d'Othello : ,
— Saisissez-moi où vous pourrez à laj
dernière scène, car, à ces moments-là jer
ne puis répondre de mes mouvements.^!
Et, une telle phrase, frappée à la vé4
rité de la vie rend inutiles tous les
mots.
[illisible]MAX ARMAND
(4 mi"
LA roi de Saxe avec sa tuile est paru de
Menton hier soir à 10 h. 45, pour Dresde.
La reine de Saxe prolongera 80D séjour
jusqu'au 15 avril...
On annonce la prochaine arrivée au Cap
Hartin de la comtesse Lonyay. i
—o—
Le Lycée Louis-le-Grand a donné hier,
dans le grand amphithéâtre de la Sor-
bonne, une brillante matinée musicale et
littéraire à laquelle ont pris part : Mues
Rioton, de l'Opéra-Comique, Klob, de la
Comédie-Française. MM. Note,
file, de l'Opéra ainsi que les frères Coque-
"Mme Sarah Bernardt qui devait dire quel
ques fragments de Y Aiglon rele""®*
théâtre par la matinée donnée par la presse
ihunicipale. a dû se faire excuser.
LA DAME D. VOILÉE.
UN QUESTIONNAIRE
adopté par la Société Libre
POUR L'ÉTUDE PSYCHOLOGIQUE DE L'ENFANT
Mes lecteurs connaissent le but de la
Société dont le titre, un peu longuet,
s'étend en tête de cet article. Je leur rap-
pelle, en passant, que cette Société est
ouverte à tous : savants, philosophes,
écrivi-ins, parents, instituteurs, amis de
l'enfance; que le Bureau reçoit le sujets
qui lui sont proposes : qu il en choisit
lui-même; qu'il prépare, avec soin, les
questionnaires, destines à élucider cha-
cune des questions; qu'il envoie ces
Questionnaires a tous les adhérents, pour
que chacun l'étudie à son tour, en re-
tranche, y ajoute, l'accepte en bloc tou
le modifie en détail, après quoi,en séance
plénière, ce questionnaire lest mis en
discussion et, finalement adopté, est
livré à la publicité.
Parmi les premières questions propo-
sées se trouvait celle des « enfants indis-
ciplinés ou rebelles ", question extrême-
ment intéressante, moins difficile, peut-
être, moins délicate, surtout à élucider
que beaucoup d'autres, et dont l'étude
pourrait être féconde en résultats heu-
reux autant pour les enfants, pour leurs
parents et pour leurs maîtres que pour
i'école elle même.
Il a fallu s'entendre,d'abord sur le mot
lui-mème : « Qu'est ce qu'un enfant in
disciftiné?
C est, a-t -on dit. d'abord, un enfant qui
s'insurge contre ses parents ou ses maî-
tres ; contre les uns et les autres, par-
fois ; c'est celui qui vit avec eux à l'état
de Il belligérants ». C'est vrai, certes L,
Ei l'on veut; cependant, j'ai trouvé -la
définition incomplète ; incomplète au
point d être presque fausse. Je suis per-
suadée, en effet, que sur cent enfants
indisciplinés ou rcuelles,il y en a quatre-
vingt-dix qui aimeraientleurs parents et
leurs maîtres <)m, même, au fond, les
aiment, mais ont l'air de les hair, parce
qu il-; les identifient malheureusement,
avec la règle qu'eux, enfants, détestent,
et que les parents et les maîtres repré-
sentent et s'efforcent de faire respec-
ter.
ha règle, pour ces enfants, c'est l'en-
nemi. M ni s avouez avec moi qu'elle n'est
pas aimable, et que souvent même elle
est inintclligente(j'ai railli écrire « bête 1)) ;
qu'elle c>t tatillonne, vexatoire, allant à
t encontre du développement rationnel
de l'enfant 1
fi Ne bouge pas n, « ne touche pas »,
« ne parle pas n, sont les trois comman-
dements les plus honorés par beaucoup.
de disciplinaires c'est, pour eux, le com-
mencement et la fin de la sagesse. Ce-
pendant, le mouvement est absolument
nécessaire au développement physique ;
la curiosité, qui fait inconsciemment
porter la main sur les objets, est le
mobile le plus naturel et le plus sûr du
développement intellectuel, et l'échange
des idées, indispensable a la sympathie,
ne se peut faire que par la parole.Je ren-
voie mes lecteurs au livre de M. Il. La-
combc,' H-quissc d'une éducation basée
sur la psychologie de l'enfant, » que j 'ai
récemment analysé à cette place, et je
pense, avec la majorité, plus que cela :
avec l'unanimité du Bureau que l'on ne
doit pas considérer comme preuve d in-
discipline le bavardage pendant l'étude,
l'agilalion du corps, la tendance à taqui-
ner les camarades, la brutalité dans les
jeux, la paresse : je dis,comme tous mes
collègues que l'indisciplineconsiste dans
une révolte déclarée, contre le maître,
l'inobéissance à un ordre précis, les ré-
ponses ou apostrophes impertinentes, le
bruit fait systématiquement pour empê-
cher le maître de faire sa classe, mais
j'ajoute ou plutôt je répète, que la plu-
part du temps, le maître ou les parents
sont attaqués « par procuration », c'est à
la règle qu'on en veut, à tort le plus sou-
vent, à raison, quelquefois. Ce question-
naire aurait donc d'heureux effet» ■ il
faisait réfléchir les parents et les maîtres,
et si,Ode leurs réflexions, résultait une
discipline vraiment libérale, une disci-
pline bâtie sur la nature même des en-
fants.Et maintenant voici le Questionnaire :
Nom de l'enfant (initiales du nom, et pré-
noms en toutes lettres). sexe, nationalité, condi-
tion sociale des parents (p. ex. ouvrier, agricul-
teur, commerçanl), date de naissance de I en-
fant.
2 De quelle date à quelle date avez-vous
connu cet enfant ?
3' Quelles sont les autres personnes qui ont
pu le connaitre et l'apprécier?
4* Quelles écoles l'enfant a-t-il fréquentées ?
— A-t-on eu à se plaindre de lui dans ces
écoles ?
5 Donnez en détail le réeit des actes d'indis-
cipline qui sont à reprocher à l'enfant (faites la
distinction entre les laits que vous connaissez
personnellement et ceux que vous connaissez
de seconde main, mais dont vous pouvez ga-
rantir l'exactitude).
C' Les actes d'indiscipline se sont-ils produits
dès les premiers jours passés à l'école ? — Y a-
t-il eu un fait initial qui ouvre la période d in-
discipline?.7' L'indiscipline se traduit-elle par des actes
et des paroles ou par l'inertie ? L'enfant est-il
boudeur?
8- L'indiscipline est-elle constante ou inter-
mittente, plus fréquente au début de la journée
ou au contraire à la fin quand la fatigue se fait
sentir 1
9- Quel est son état de santé? Quel est son dé-
veloppement physique, comparé a celui des en-
fants de son age ? Quelles ont été sea maladies ?
A-t-il des tics, fait-il des grimaces involontaires
des yeux, de la bouche, du front ?
i 10- Quel est le rang de l'enfant dans sa classe,
indiquez le nombre d'élèves, quelle est son in-
telligence naturelle ?
11 L'enfant fait-il preuve dans le travail d'in-
dépendance d esprit, d'initiative, d'invention ? Le
penchant à l imitation est-il chez lui très déve-
loppé? ...
12- ttaisonne-t -il ten indiscipline, s , en vante-t-
il auprès de ses camarades? Aime-t-il à attirer
l'attention sur lui? Est-il vaniteux ?
1.) Que Bavez-vous de son caractère ? Est-il
par exemple, courageux, peureux, brusque,
doux, raisonnable. etc...
14* L'enfant est -il également indiscipline à 1 é-
cole et dans la fanuUe? Quelles sont ses rela-
tions avec ses camarades : en classe, en récréa-
tion, en dehors de l'école
15- Quels procédés avez-vous employés pour
ramener l'enfant à son devoir? Quelle a été 1 at-
titude de 1 entant? Quelles méthodes ont le
mieux réussi ? La famille emploie-t-elle les mê-
mes mélhodcs que le maître ?
IG- Quelles sont les relations de la famille avec
le maître ? — L'indiscipline n'avait elle pas pour
cause, dans certains cas, la position elevée et
la richesse des parents ou inversement leur état
social inférieur, leur grande misère?
17- Quelle est, d'après le correspondant, la
cause principale de l'indiscipline de 1 enfant?
18 Prière d'indiquer ici toutes vos observa-
tions complémentaires qui ne rentreraient pas
dans le cadre tics questions précédantes.
19- Nom du correspondant, profession,adresse,
et lien de parenté avec l'enfant.
20- Autorisez-vous la publication de votre
nom ? (l'adresse, en aucun cas, ne sera publiée,
ni votre lien de parenté.)
Envoyer le questionnaire rempli, comme pa
piers d affaires, à Mlle U.ERTsott. secretaire gé-
néral, G, rue de la Sorbonne, Paris.
L'envoi de ce questionnaire est accom-
pagné des renseignements et conseils
pratiques suivants :
Indications et conseils pratiques aux correspon
dants. - Les renseignements qui nous seront
envoyés garderont un caractère strictement con-
lidcntiel ; t-n aucun cas, il ne sera publié par
nous d'indications permettant de soupçonner
l'identité des enfants sur lesquels les renseigne-
ments seront donnes ; par conséquent, nos cor-
respondants ont toute sécurité pour faire une
étude sérieuse, approfondie, complète, vraiment
scientifique, sans avoir la crainte de porter le
moindre préjudice à autrui.
S'il arrive à un de nos correspondants de ne
pas pouvoir répondre à quelques-unes de nos
questions, il doit quand méine nous renvoyer la
feuille du questionnaire ; cette feuille, quoique
incomplètement remplie, nous sera utile ; d a
bord elle peut contenir des documents intéres-
sants sur d'autres points ; ensuite, le silence 1
gardé sur une question peut être pour nous le
signe que cette question était mal posée.
Les réponses les plus instructives sont celles
qui contiennent le plus grand nombre de faits
précis et bien détaillés.
Je demandeinstamment à nos lecteurs
et à nos lectrices de se faire les collabo-
rateurs de notre CI étude ». Le point le
plus important en a été à peine indiqué ;
(par pure délicatesse et prudence) ; je
veux parler de la question d'tiérédité ; les
personnes réellement dévouées fi nos re-
cherches, celles surtout dont la situation
est indépendante feraient une butine
œuvre en insistant sur ce sujet.
P. S. — Les élections au Conseil supé-
rieur de l'Instruction publique auront
lieu en avril, je compte tenir mes lec-
teurs au courant des candidatures et des
Drourammes des candidats.
PAULINE KERGOMARD.
Une Lettre de M. Joseph Fabre
Le Soir ayant publié une lettre de M. De-
vos, gérant de la Libre Parole, et dans la-
quelle était directement visé, M. Joseph
Fabre, l'honorable sénateur, a envoyé à M.
Gaston Pollonnais les lettres suivantes :
Paris, le 27 mars 1900.
Monsieur le gérant. ,
Me réclamant de votre loyauté et de la loi, je
vous prie d insérer en due place la lettre ci-apres
en réponse à la lettre de M. IJevos, parue dans
votre numéro d'hier soir lundi, où je suis visé.
J'oflre de payer, selon le tarif légal, l'excé-
dant du double des lignes.
Veuillez acréer mes sentiments les plus dis-
tingués.
JOSEPH FABRE.
Paris, 27 mars.
Monsieur le Directeur,
Le Soir vient d'insérer une lettre qui dénature
le sous de ma requête à M. le président de tri-
banal civil, publiée par le Rappel et le Temps
d'hier.
Dans cette requête, je n'ai fait qu'établir et
défendre ma probité outragée.
Telles sont les tristes mœurs de notre tempe 1
que c'est aux accusés de commencer par faire la
preuve de leur innocence ; et je me demande
avec émotion quelle aurait été 1 attitude de mes
adversaires politiques ou même des personnes
qui ne me connaissent pas, si, il y a dix-neuf
ans, j'eusse eu le malheur de prendre pour in-
termédiaire de mes achats et de mes paiemeats
une maison de crédit ne conservant point les
bordereaux et les comptes de ses clients.
Puis, je pense à cette foule de pauvres gens,
investis de fonctions ou de mandats publies,
qui, du jour au lendemain, se trouvent désho-
norés par d'injustes attaques contre lesquelles
ils restent désarmés.
Il serait temps de porter le fer rouge sur 1 ab-
cès dont le. pays souflreet amurt.
Vous allez répéter que je suis un ennemi de
la liberté de la presse. Point. La loi de 1031 a
supprimé tous les délite d'opinion. Je n'en veux
rétablir aucun. Mais ie yeux qtw, soi t PAf.1a
juridiction du tribunal conwttbunel" soit sim-
plement si l'on veut par la juridiction du tribu.
nal civil, les délits d'injure et de diffamation
puissent être atteints.
La peine efficace est celle qui frappe à la
bourse; et d'autres pays, l'Angletorre en parti-
culier, nous révèlent, par la bonne tenue d'une
presse qui, sans cesser d'être vigilante et sévère
dans ses censures, se respecte et respecte la di-
gnité humaine, les bienfaisants effets de très
forts dommages intérêts.
Quant aux dénonciations loyales de la presse
contre les prévaricateurs quels qu'ils soient, je
les estime utiles, louables, généreuses, dignes
d'être encouragées pour l'intérêt et l'honneur
de tous.....
Veuillez agréer, Monsieur le directeur, 1 ex-
pression de mes sentiments les plus distingués.
JOSEPII FAURE.
Hier, M. Pollonnais déclare qu'il accepte
la proposition de M. Joseph Fabre, de payer
au tarif légal les lignes supplémentaires et
que le montant de la somme sera versé à
la souscription ouverte par VIntransigeant
pour offrir une épée d'honneur au géné-
rai Cronje.
Cette combinaison, nous scmble-t-il, ne
pourra qu'être fort agréable à M. Joseph
Fabre qui doit apprécier au moins aussi
bien que M. Pollonnais les indéniables qua-
lités du vaillant soldat qu'est le général
Cronje.
UN BRILLANT CONCERT
L'Association mutuelle des femmes ar-
tistes de Paris donnait, hier, dans la salle
des Fêtes de l'avenue Hoche, un concert.
Le programme, très complet, très varié,
était plein do promesses ; nous ne fûmes
pas déçue, empressons-nous de le dire.
Après plusieurs morceaux d'ouverture de
charme simple mais réel, on goûta fort. un
trio pour violon, violoncelle et piano exé-
cuté d'une façon remarquable par MM. Pen-
nequin, Turct et l'auteur lui-même Emile
Trepard.
La Brouette, de Rostand, le grand poète
du jour, dite avec sentiment et gràce par
Mlle Maïa du théâtre Sarah-Bcrnhardt a plu
infiniment, et a été applaudie de môme.
Mme Arvyl Eiguesier dans Air d'Alceste
de 'iiuck, lit entendre une belle voix de
contralto dont la puissance et l'étendue
emplissaient toute la salle.
Signalons Mlle lierlhe lleynold du théâtre
Antoine dans ses œuvres où elle montre
une vraie fougue d'Espagnole. Puis vint M.
Charles Hené qui s'assit au piano pour jouer
toute une série d'œuvres qui sont siennas
et qui dénote de la part de l'auteur uno
grande habileté.
Nous en passons, et des meilleurs. Mais
il se fait tard et à regret nous quittons le
concert tandis que 1 on représente une dé-
licieusi féerie sur ce thème éternel : l'a-
mour.
La salle est encore coroble. Beaucoup de
femmes élégantes, toutes nu-tetc — c'est
aujourd'hui de rigueur. C'est beaucoup
plus joli et,en somme, pers 0 1lI1l\ s'en plaint.
RENÉE RAMUAUD.
LA BIBLIOTHÈQUE
DE LA "FRONDE"
Nous avons eu le plaisir de recevoir pour
notre bibliothèque :
Otfcrt par Mme de Rute-Rattazzi
La Petite llevue internationale — 3 volu-
mes.
Otlert par Mme Mary Summer
Les Aventures (le la princesse Soundari.
Le roman d'un académicien.
Ollert par M. Pierre Massoni
Deux volumes de poésies.
Les joies prochaines.
Lielitia.
Reçu :
La Heuue Blanche.
Sommaire : Lettres 1 Madeleine Vcrni-
quet, par Sophie Arnould. — Journal d une
femme de chambre, Octave Mirbeau. —
Fleurs de lassitude, X... etc.
La Vie nouvelle, revue littéraire. — Dia-
logue philosophique sur l'Amour, Joseph
Bossi. — Paradoxes, André Gide. — La !~'en-
sitive, roman, Christian Berck, etc.
La Re, ue des Revues. - La guérison de la
tuberculose, par le docteur Caze. — La vé-
rité sur la révolution des Philippines, par
Emilio Aguinaldo. — Nouvelles poésies de
Gahriele d'Annunzio.
La Revue municipale. — La sécurité au
théâtre par Quentin-Bauchart, eonseiller
municipal de Paris.
i Le Socialisme municipal 11 étranger, pu
1 Adrien Veber...
Lo meilleur pain au meilleur marcM,
analyse d'un rapport de IL A. Muni*, de
ÏÏMHtut.
Le Mercure de France.
Le Journal Officiel des vaîeuos de t Bxpo-
tUion de 1900.
La Vogue, revue mensuelle de littéra-
ture, d'art et d'actualité.
Nous adressons nos bien sincères remer-
ciements à nos aimables donateurs.
MAROA DU PUYSSANNIÈUBS.
Bibliothécaire.
SUGAR PERNOT
Nouvelle Gaufrette vanille.
LA CHAMBRE
La grand événement de la journée était
1* nominfettoo de cinq membres au con-
seil supérieur du travail. Les groupes se
sont réunis, les présidents desdits grou-
pes ont tenté de se mettre d'accord —
sans y parvenir — à seule fin de savoir
si un-socialiste devait faire partie du
conseil du travail. Il serait fastidieux
d'entrer dans les détails de ces combi-
naisons louches; mais il nous parait utile
de dénoncer cette petite manœuvre du
groupe progressiste. D 'un commun ac-
cord, il avait été décidé que M. Colliard
eprésenterait dans la liste l'élément so-
cialiste. Au dernier moment, les mélinis-
tes remanièrent la liste effaçant le nom
de M. Colliard pour le remplacer par
celui de M. Charles Ferry. On comptait
sur un échec violent du député socia-
liste, et ce vote devait être pour M. Mil-
lerand une indication sérieuse. Or, voici
ce qu'il advint. Les deux candidats sont
arrivés avec cent trente-sept voix cha-
cun. Quoi qu'il advienne au deuxième
tour — qui aura lieu tantôt, — la ma-
nœuvre a échoué.
Toutes ces coteries ont animé les cou-
loirs,tandis qu'en séance règne un calme
plat. M. Charles-Bernard ne réussit
même pas à passionner le débat en de-
mandant à interpeller le gouvernement
sur les radiations faites au préjudice des
électeurs de la 1" circonscription de Bor-
deaux.
Le garde des sceaux se déclare à la
disposition de la Chambre, mais celle-ci
renvoie à un mois l'interpellation du
député antisémite de la Gironde.
Le président prononce l'éloge funèbre
du baron des Rotoûrs, député républi-
cain, de la 2* circonscription de Douai,
décédé subitement à l'âge de quarante
ans.
Des applaudissements unanimes ont
accueilli les dernières paroles du prési-
dent « qui, en adressant un suprême
hommage à la mémoire du regretté col-
lègue, saluait en lui trois générations
de parlementaires ». fi
On procède ensuite au scrutin pour
l'élection de cinq membres du conseil
supérieur du travail.
Kn voici le résultat :
MM. Maruéjouls Elus.
Louis Kicard
Mesureur
Dubiof 171
Il sera procédé aujourd'hui à un
deuxième tour de scrutin pour le der-
nier membre qui reste à élire.
La Chambre reprend la discussion du
projet de loi relatif à l'armée coloniale.
M. Chautemps prononce un discours
fort intéressant.
Il importe, dit il, de rechercher les sources de
la crise que subit le recrutement de notre armée
coloniale, d'en indiquer les remèdes.
Nutre armée coloniale n'est pas à créer. Elle
existe déjà. Les projets soumis à la Chambre
n'ajoutent pas un homme aux disponibilités
existantes, ,.
Sans doute, le rattachement une lois réglé,
la question sera simplifiée. Pour moi, je suis
partisan du rattachement à la guerre que je vo
Íeral. (Très bien !)
Mais la question vitale, c c'est le recrutement
de nos troupes coloniales.
Aucun des projets soumis à la Chambre ne
fournit un homme de plus que les contingents
actuels à l'armée coloniale.
Qui ne conçoit pourtant combien il serait dan-
gereux de perpétuer la faillite de notre recru-
tement colonial en présence de 1 extension
énorme de notre domaine d outre mer ? C est un
péril qui apparaît aux yeux des moins inities,
que les événements de Fachoda ont laissé appa-
raître dans leur tragique urgenc(,, que montrent
avec force les événements sud-africains.
te sera l'honneur de la troisième République
d'avoir ajouté à la France un immense empire
colonial. Quelle est donc, dans notre his.oire
nationale, la période comparable à celle de ces
trente dernières années où la République, au
lendemain d une guerre qui avait laisse la
France ruinée et démembrée, a su lui conquérir
glorieusement l lndo-Chine, la Tunisie, Mada-
gascar et les espaces africains ?
L'auteur déclare que le rattachement
des troupes coloniales à la marine ne se
comprendrait pas. Cette faute, dit M.
Cîsaulcmps, n'aurait d'autres résultats
que de créer l'anarchie et de nous mener
peut-être un jour à la défaite.
La Chambre ne ménage pas ses ap-
plaudissements à roratenx auquel suc-
cède M. Lucien Hubert.
Vous aves entendu, dit-il, lei partisans du
rattachement de l'armée coloniale I la guerre et
les partisans du rattachement à la marine. Je
viens vous demander à mon tour le rattache-
ment de l'armée coloniale au ministère des co-
lonies. (On rit.) La défense des colonies doit lui
appartenir.
Le dernier orateur hier a été M. Plichon
qui recherche pourquoi l'armée colo-
niale, dont tous les éléments existent,
n'est pas encore créée.
M. Plichon. — Depuis trente ans, l'énormité
même des dépenses ainsi créées par l'Europe à
ses armements a maintenu la paix. Pas un
point du globe, cependant, où n'ait, durant cette
tonne période, retenti les grondements du canon; il
>nne en ce moment même au sud de l'Afrique.
Qui nous dit lorsqu'il se sera tu, rassurant en-
fin le cœur de ceux qui gardent opiniâtres les
idées de justice, qui nous dit que, ce jour-là, on
ne l'entendra pas ailleurs?
.Aux soldats de nos troupes coloniales incom-
bera l'honneur de défendre les premiers le dra-
peau français.
Je veux chasser loin de mon esprit de pareil-
les pensées: mais il serait criminel de perdre
plus de temps pour leur donner l'organisation
qui, au jour du péril, sera avec leur courage le
gage de la victoire.
Il ne reste plus qu'une dizaine d'ora-
teurs inscrits 11
Aussi, remet-on ce plaisir à aujour-
d'hui, mais sur la demande de M. Du-
bief, la Chambre inscrit en tête de son
ordre du jour la discussion du projet mo-
difié par le Sénat relatif au travail des
femmes et des enfants dans les établis-
sements industriels.
Il est probable que cette discussion
prendra cinq minutes au maximum, la
t'.nmmisgion l'esnère du moins.
HÉLÈNE SÉB.
SÉNAT
Beaucoup do monde hier au Luxembourg.
Ne croyez pas quo cette affluence ina-
coutumée ait été attirée par le vote du
quatrième douzième provisoire. Non, c'est
réfection contestée du Rhône qui seule a
amené dans les tribunes cette brillante
assistance.
Lors du dernier renouvellement le 28 jan-
vier, M. Thévenet, sénateur sortant, obte-
nait 367 voix, alors que ta majorité absolue
était de 368. Ou avait retranché à M. Thé
venet une voix parce que son nom avait été
rayé sur un bulletin. Un troisième tour eut
lieu et M. Repiquet fut élu à cinq voix de
majorité.
Il eut des protestations et le 3' bu-
reau fut chargé d'examiner cette élection ;
mais le bureau ne conclut pas, laissant au
Sénat le soin de se prononcer sur cette dé-
licate question.
M. Monestier, au nom du bureau, fait un
exposé impartial des faits. Lors du dé-
pouillement du scrutin, M. Rieussec, pré-
sident de la 3' section, déclara que le nom
de M. Thévenet avait été rayé sur un bulle-
tin. Deux des assesseurs prétendent que lo
bulletin n'a pas été compté dans le dépouil-
lement. M. Rieussec et l'autre assesseur
affirment le contraire. Le bulletin fut porte
au bureau central.A l'unanimité, il déplara
que le nom de M. Thévenet était bien rayé.
Le président tit brûler les bulletins et on
procéda à un troisième tour.
Le rapporteur fait connaître que M. Thé-
venet et ses amis se demandent si le bulle-
tin, présenté au bureau central était bien
le même sur lequel avait porté la dilii-
culté. , ......
M. Moncstier. —Le nom de M. Thevcnct était-
il ou non rayé ! M. Hieusscc a-t-il bien porté au
bureau cC:¡lr,d le bulletin contesté? Avait-on
dan. la troisième section marqué à M. Thévenet
la voix conl"slée" Enfin peut-on attribuer à M.
Thévenet ledit uuHctin? La jurisprudence du
Cu:.s -il d ):'at dit non ; mais elle reconnut que
les Chambres ont le droit de le faire.
Suivant la réponse que vous ferez à ces di-
verses questions, vous validerez M. Repiquet
ou vous proclamerez M. Thévenet, ou enlin
plus vraiâcmblifcblemtnt vous renverrez la solu-
tion au meilleur juge, c'est-à-dire au col:ège
électorat. Tout le monde s'inclinera respectueu-
sement devant la décision du Sénat.
M. Baduel qui a fait partie d'une sous-
commission chargée d'examiner les pièces,
demande au Sénat de valider les opérations
électorales du Rhône et d'admettre M. Re-
piquet.
M. Théodore Girard estime qu'il convient
d'annuler pareilles élections, des irrégula-
rités ont été commises et l'orateur pense
que le candidat ne peut souffrir de la faute
de M. Rieussec, ni des maladresses ou de
l'incurie du bureau central.
M. Gourju, un ami de M. itepiquet pro-
nonce un plaidoyer interminable en laveur
de l'élu contesté. j
M. Raynal remet les choses au point. Et |
en demandant l'annulation des opérations
électorales du llhùne, l'orateur estime qu'il
détend strictement la cause des électeurs
et celle d'un ami qu'il regrette profondé-
ment.
L'annulation est mise aux voix et adoptée
car 127 voix contre 123 après pointage. I
H. S.
INFORMATIONS PARLMENTAIRES
Le monopole des inhumations
La commission du monopole des inhuma-
tions a décidé de repousser le projet,
adopté par le Sénat, aux termes duquel le
monopole des inhumations qui appartient
exclusivement aux fabriques et constslolÑl
serait donné aux fabriques 0&1 aux com..
non, au choix des familles.
Elle a pris pour base de sa discussion 1.
projet accepté par la Chambre en t883 ti
accepté par la commission de la précé-
dente législature, projet qui donne le m0-
nopole aux communes à l'exclusion des f..
briques.
M. Rabier a été nommé rapporteur.
La commission fera tous ses efforts pou
que la proposition vienne rapidement es
discussion.
POLITIQUE ETRANGERE
La guerre au Transvaal
La mort du général Joubert bien que ré-
sonnant douloureusement dans le cœur de
tous les Boers ne porte aucune atteinte à
leur courage, ne modifie en quoi que cet
soit la marche qu'ils entendent suivre. Ce-
pendant devant la supériorité du nombre
de l'ennemi, les républicains du Transvaal
n'étaient pas sans espérer que l'issue des
événements dépendait encore de la science,
de l'habileté du grand citoyen qui a Slla,
combé.
Le retard apporté par lord Roberts dans
la marche en avant que l'on avait signalé,
vient de ce que la pacification que 1'011
croyait accomplie dans le sud de l'Orange
est loin d'être faite. Lord Roberts ne quit-
tera donc Iilœmfontein qu'en rendant la sé-
curité aux habitants sur tous les points
de ces régions dévastées. Or, les détache-
ments anglais sont envoyés dans toutes
les directions sans parvenir à assurer la
tranquillité; aussi un changement s'est-il
opère dans la marche sur Mafeking et SUIL
Pretoria. Lord Kitchener, en quittant
Prieska, a dli se rendre auprès du généra-
lissime afin de se concerter au sujet de la,
triple action action à mener : Sir Redvers
Buller pénétrerait dans le Transvaal en
s'engageant dans le nord du Natal, lord
Roberts se dirigerait du côté de Kroonstadt;
lord Kitchener,après avoir atteint Mafeking,
marcherait entin sur Pretoria. Kt l'on s'em-
presse de faire cette remarque, que son iti-
néraire est celui qu'a suivi Jameson. Il est
évident que la tactique est d une habileté
rare, attendu que les corps d'armée trans-
vaaliens étant campé au Nord de l'Orange
et du Natal ne pourront donner leur con-
cours aux Boers qui, en ce moment, assiè-
gent Mafeking et vont exécuter toutes les
tentatives possibles pour tenir tête à lord
Kitchener.
IBO.
Afrique du Sud
Lourenço-Marquez, 29 mars.
Le Standard and Diggers Neit s publie une
dépêche de Prétoria, du mars, disant :
Le lield cornet Marais a re<, u lner le télé-
gramme suivant :
« Le commando tout entier, fort de 10,000
hommes, est arrivé à un point oil il est en
sûreté. Adresser les lettres à Smaldcel,
Tout va bien.
Un autre télégramme, daté de Préloria,
26 mars, au même journal, dit que le capt-
Laine Ganelzki et son corps de cent éclai-
reurs russes, ont fait tuue reconnaissanco
entre les patrouilles anglaises et le camp
de Sunday-Hiver, au cours de laquelle ils
se sont emparés de 10 mulots et d'un wa«
gon.
Le Cap, 20 mars.
Répondant aujourd'hui à uno deputatiou,
M. Schreiner a déclaré qu'il avait adressé
des représentations énergiques au gouver-
nement impérial pourprotestor contre l'en-
voi des prisonniers boers à Sainte-Hélène,
mais sans succès.
Angleterre
Londres, 29 mars.
Lord Roberts confirme l'occupation de
Fauresmilh par le général Clements, et la
découverte dans un puits d'exploitation de
mines d'un canon pour projectiles de neuf,
livres, et d'un Martini-Maxim, et la capture
d'une grande quantité de munitions que les
Béera avaient enterrées.
Lord Roberts ajoute que les armes con-
tinuent à être rendues graduellement et
que les habitants reprennent leurs occu-
pations.
Londres, 29 mars.
Le Times, 2' édition, public la dépêche
suivante :
BloemfonteÍn, 28 mprs.
11 doit être bien entendu que la halte de
l'armée anglaise dans le voisinage de
Bloemfontein est absolument nécessaire
comme précaution militaire. Les forces
anglaises sont sur le point d entrer dans,
une nouvelle phase des opérations, aveo
leurs lignes principales de communications
situées dans un territoire récemment hos-
tile. De plus, les récentes opérations ont
beaucoup éprouvé les chevaux.
D'un autre côté, t'armée anglaiso va se
mettre en marche au commencement de
l'hiver sud-africain, et il serait criminel de
lancer les troupes avant quelles soient
préparées à supporter les rigueurs de la
température. Auparavant, les chevaux, les
vêlements et les vivres, doivent être réu-
nis en uuantité suffisante.
Etats-Unis d'Amérique
New-York, 29 mars.
Une dépêche de Prétoria au World dit
qu'au cours d'une interview, le 7 février^
le président Kriiger a fait la déclaration*
suivante :
« Lorsque j'ai ditique les pertes qui -.;urtà
viendraient pendant la guerre enraieraient
l'humanité, les Anglais ont ri, et ont dit
qu'il ne leur faudrait pas plus d un moM<
LA TRIBUNE
Variations sur les Cantatrices
Comme une chaîne, dont les anneaux
brisés ne sonnent plus, apparait dans
l'histoire de l'art la liste des grans noms,
sonores, — ou des jolis noms roucou-
lants — des cantatrices qui furent, —
enchantèrent, — et passèrent...
Le génie, dans l'art du Ihe'dtre pro-
nonça Alexandre Dumas fils sur la tombe
d'Aimée Desclée, ne survit pas aux victi-
mes qu'il fait...
Parole brutale, amère — parce que
vraie. Cir, il est réel, qu'élu entre tous
les artistes — pour mieux prendre à la
gorge, en émotion sacrée, toute une
foui»', l'acteur, en mourant, emporte
toute cette flamme et cette fièvre, de
sorte que le nom d'un qui passionna
deux générations, est moins aux géné-
rations qui viennent qu'un faible écho,
qu'un impalpable nuage de cendre lé-
gère. C'est là la rançon de cette gloire
inégalée : posséderjune foule par la seule
magie de sa présence, de sa parole, créa-
trice de beauté, incarnation de rève.
Et par dessus l'acteur qui joue et parle,
nous placerons le chanteur, et par des-
sus encore le chanteur, la cantatrice. Car
onc femme, détentrice de grâce, dans la
fête de la parure, ou le désordre sublime
de la vérité joint ce don de sa personne
en image héroïque ou charmante au don
de son génie. C'est pourquoi les triom-
phes qu'on fit à quelques cantatrices dé-
passèrent de beaucoup ceux faits à des
chanteurs qui égalèrent celles-ci par la
puissance et la beauté de leur talent.
Aussi d'avoir eu, — et d'emporter da-
vantage, — mortes, elles ont pourtant
encore un charme nostalgieux et doux.
On les lit, ces noms brillants qui étoi-
lèreot deux siècles, et on songe à ce peu
ie poussière au définitif silenco,.. Et,
dans leur histoire, en les regardant vi-
vre, peintes en quelques mots sous les
traits qui furent leurs, on les aime en-
core d'avoir été si vivantes un jour — et
tant aimées...
Deux siècles seulement; car aux épo-
ques antérieures on usait de la voix
humaine comme l'oiseau use de son
gosier, selon ses moyens individuels
innés, mais sans métier. La première
technique de l'art du chant vint d'Italie
où on commença de les découvrir et de
l'appliquer vers la fin du xvil siècle. Mais
il fallut encore pas mal d'années pour
que cet art se développât et ce n'est que
vers 1645 qu'on découvre les noms de-
meurés célèbres de cantatrices. La pre-
mière de toutes fut une: Marguerite Ber-
tolazzi qui, venue de Milan, chanta à la
cour de France. Une Française, Marthe
le Hochais, qui interpréta avec une ex-
pression brillante et juste l'œuvre de
Lulli (Proserpine et Armide).
Simultanément en France et en Italie
(et ce seront pendant longtemps encore
les deux seuls terrains fertiles à l'har-
monie) en voici quatre : Mile Pélissier,,
Mlle le Maure, la Bastardini, la 'Gabrielli.
Des deux premiires nous apprenons
qu'elles furent vives et capricieuses —
plus gracieuses que belles — bien pari-
siennes enfin : Mlle le Maure créa le
10 novembre 1735 la Jeptité de Monté-
clair à l'Opéra, puis aussitôt — en précè-
dent de plus récentes et célèbres fugues !
— quitta ce théâtre mécontente sans
doute de son rôle et de soit directeur...
Catarina Gabriclli vers la môme épo
que à peu près enchante Métastase, et
c'est d'elle qu'on tient cette gamine ré-
ponse à Catherine Il qui l'avait appelée
a sa cour - pour l'enchanter également.
L'impératrice s'étonnait du chiffre de
5000 ducats exigés par la chanteuse et
disait : qu'aucun de ses feld-maréchaux
ne recevait pareille somme. • Et la Ga-
brieHi aussitôt.
— Sa Majesté n'a donc qu'à faire chan-
ter ses maréchaux #
Il est à croire qu elle obtint ses 5000
ducats — et la curiosité sympathique de
Sa Majesté.
On retient encore, à Paris, à la date de
1750 le nom de Sophie Arnould et sa ré-
putation d'esprit endiablé.
Le 1" décembre 1783 voici qu'apparaît
Mlle Clavel dite : la Sainte-Hubert y ,d'une
beauté tout irrégulière mais ravissante.
Elle créé la Didon de Piccini et c'est elle
qui presque simultanément avec la Clai-
ron et Talma inaugure la vérité dans le
costume au théâtre. Spirituelle, sensible,
de cœur et de sens prompts la Saint-Hu-
berty est un des plus charmants por-
traits féminins du 18* siècle.
Avec elle et ses contemporains on
commence de voir grossir le chiffre des
appointements accordés aux artistes
lyriques, appointements qu'à l'Opéra de
Paris un demi siècle auparavant on ne
craignait pas de fixer i 1200 par an !
Mais c'est, à cette même époque (1782)
une cantatrice anglaise (la seule presque
de telle nationalité qui apparaitra en
ces brèves mais fidèles notes) qui va dé-
tenir le record des appointements. Elle
se nomme Mrs Bellington. on lui offre
à Covent-Garden 1000 livres sterling. Et
voici toute une floraison d'artistes. En
cette fin du dix-huitième il y eut parmi
tant de cris et de plaintes d'une portée
incalculable, il y eut le frisson merveil-
leux de la beauté triomphalement clamée
ou murmurée en action de passion fac-
tice :
Favart, la très parisienne comédienne
délicieuse, et d'une bonté et d'une géné-
rosité égales à son remarquable talent
— puis une Portugaise : Mme Todi
(Luigia d'Aguiar) qui fut aussi accueillie
par à Catherine 11 de Russie. Née en 1753
Sétubal en Portugal, elle épousa à 15
ans le chef d'orchestre de Lisbonne :
Todi.
Devenue veuve très jeune,elle demeura
fidèle à la mémoire de son mari et dé-
vouée tout entière à ses enfants. Ello
avait cependant un tempérament d'éner-
gie et de passion. En 1809, quand le ma-
réchal Soult tenait son quartier, près de
Porter elle se décide à fuir ,* elle s'em-
barque avec ses enfants et une caisse
d'argent monnayé, l'embarcation cha-
vire, toute cette petite fortune est per-
due, par un miracle elle et ses enfants
sont sauvés. Elle va alors se mettre sous
la protection du maréchal qui t'accueillit
bien et la protégea elle et les siens des
misères de la guerre.
Très intelligente, elle parlait quatre
langues ; elle garda longtemps sa belle
voix et son talent dans toute leur pléni-
tude et par eux reconstitua l'avoir de ses
enfants. Elle ne mourut qu'à 80 ans. Au
commencement du dix-neuvième siècle,
voici, en Italie : Joseph Grassini, Mme
Catalani qui fut un moment directrice
du théâtre italien et qui épousa un offi-
cier français: M. Valabrègue — nom
connu aujourd'hui dans les annales théâ-
trales — qu'elle avait rencontré à Lis-
bonne. Très jolie, très fêtée, on nous la
montre très prodigue, mais très géné-
reuse.
La Colbrani,une Espagnole qui épousa
Rossini après de glorieux débuts pres-
que simultanés avec ceux de Manuel Gar-
Cià le célèbre, le terrible, le père de celle
que nous allons retrouver un peu plus
tard sous le nom de la Malibrau — et qui
battait sa fille quand elle était encore
une enfant... pour la faire chanter 1 I
Une autre, très brillante, la Fodor,fllle
d'un violoniste hongrois, née à Paris au
n' 14 de la rue Taitbout, le 13 octobre
1789 - fut celle qui, la première, intro-
duisit et posa en France les traditions de
la vocale italienne appliquée à la diction
française.
Une exquise créature: Cinthie Monta-
land née en 1801, celle qui ayant épousé
M. Damoreau, fut connue plus tard sous
le nom de Mmo Cinthie-Damoreau. Des
parents l'élevèrent dans les plus grandes
privations, n'ayant guère de ressources.
A 10 ans, Cinthie gagnait son pain en
copiant de la musique à un sou la page.
Mais de tous ces petits signes noirs
mystérieux, que sa petite main traçait
pendant de longues heures, il se leva
bientôt une suggestive harmonie —
muette d'abord, mais à laquelle un jour
Cinthie osa prêter la jeunesse adorable de
son adorable voix;— son destin était des
lors fixé — elle y marcha patiemment,
courageusement — et le remplit tout
entier.
Plus ardente peut-être que celle-là qui
était toute de douceur et de sensibilité,
voici Judith Pasta, Milanaise d'origine.
Elle interpréta avec une expression ad-
mirable les œuvres de Bellini qui mou-
rut si jeune et dont le souvenir lui de-
meura sacré.
Tous ceux qui l'entendirent furent
frappés de sa puissance tragique et pas-
sionnée qui ne jaillissait sans doute pas
seulement —quoi qu'on en dit — de son
gosier et de son art, mais de son cœur
vibrant.
Et voici enfin celle dont le nom de-
meurera fixé comme une étoile par la
poésie :
Ah ! tu vivrais encore, sans cette âme indomptable.
Ce fut là ton seul mal, et le secret fardeau * ^
Sous lequel ton beau corps plia comme un roseau,
Ne savais-tu donc pas, comédienne imprudente,"
Que ces cris insensés qui te sortaient du coeur
De ta joue amaigrie augmentaient la pâleur. *
Ne savais-tu donc pas que, sur ta tempe ardente
Ta main de jour en jour se posait prus tremblante
Et que c'est tenter Dieu que d'aimer la douleur ?
Oui, oui, tu le savais, et que, dans cette vie,
Rien n'est boa que d'aimer, n'est vrai que de souflrir,
Chaque soir dans tes chants tu te sentais pâlir.
Tu connaissais le monde, et la foule et l'envie,
Et, dans ce corps brisé concentrant ton génie
Tu regardais la Malibran mourir. (t)
Nous savons que ce n'est pas la pas-
sion seule de son art et de l'amour qui
tua la Malibran. Elle en vécut certes —
et c'est assez pour justifier la vision du
poète, mais elle mourut en réalité des
suites d'une chute de cheval.
Il est vrai que ceux qui meurent j,,,
nés sont aimés des dieux, et dès que vient
le nom de la Malibran, c'est le fait de
(t) Alfred de Musset•
;
cette fin rapide, prématurée, qui frappe
si vivement, au point qu'on parle de saf'
mort pour être ému avant de parler de
sa vie, qui fut un éblouissement.
Le célèbre dialogue entre elle et Gar-
cia, son père, à la veille de son début à
New-York, dans le rôle de Desdémona
d'V/hel/o, elle avait seize ans, est presque
trop connu pour être encore répété, mais
il est si joli 1
Marietta-Félicia (elle avait des noms
de bonheur), était seule dans sa cham-
bre à l'hôtel, bien tranquille. Son père
qui était à la fois imprésario et premier
rôle de la troupe, actuellement en re-1
présentations à New-York, entre et lui,
dit :
— Vous débuterez samedi avec mo*,ii
dans Othello...
— Samedi, mais c'est dans six jours b
— Je le sais bien...
— Six jours pour répéter Íun rôle
comme celui de Desdéinona, pour m'ha-
bituer à la scène.
— Pas d'objections Vous débuterez
samedi èt vous serez excellente, ooj
sinon, à la dernière SCtmc... quand ja'
suis censé vous frapper d'un coup de;
poignard, je vous frapperai réelle»;
ment... » «
Et elle joua, et elle fut ( excellente
Excellente? mot faible— et, ne le se-,
raient-ils pas tous pour [exprimer le su*.
blime terrifiant de son jeu à cette der»<
nière scène, qu'elle ne {put jamais jouet,
deux fois avec des mouvements iden^
tiques, car elle disait aux différents par-,
tenaires qui, avec elle, remplirent le rôlcr..
d'Othello : ,
— Saisissez-moi où vous pourrez à laj
dernière scène, car, à ces moments-là jer
ne puis répondre de mes mouvements.^!
Et, une telle phrase, frappée à la vé4
rité de la vie rend inutiles tous les
mots.
[illisible]MAX ARMAND
(4 mi"
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