Titre : Le Constitutionnel : journal du commerce, politique et littéraire
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1852-09-24
Contributeur : Véron, Louis (1798-1867). Rédacteur
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32747578p
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 24 septembre 1852 24 septembre 1852
Description : 1852/09/24 (Numéro 268). 1852/09/24 (Numéro 268).
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Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/02/2011
NUMÉRO 368.
BUREAUX. ! rue de Valois (Palalg'Bojal) o. !©.
1852tl—VENDREDI 24 SEPTEMBRE,
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F&R1S ET DEPARTEWENS ;
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§2 FR. POUR L'ANNÉE.
UN NUMÉRO : 15 CENTIMES.
pora les pats étrangers , se repor-
! ter au tableau publié dans le journal,
les 10 et 25 de chaque mois.
S'sàrsîser, iïâico, pour la rédaction ; 4 Mï C çcheval -C î jjaiî
Les articles déposés ne sont pas rendu; |
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JOURNAL POLITIQUE, LITTÉRAIRE, UNIVERSEL.
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TIONNEL est au-dessous de celui de tous les
journaux politiques.
PARIS, 25 SEPTEMBRE
Nous lisons dans le Moniteur ;
« L'Europe a les yeux fixés sur ce qui se
passe en ce moment dans le midi de la Fran
ce. C'est ua magnifique spectacle que celui
d'un grand peuple s'id-nti fiant ainsi, par
touslessentimensducdëur, avec le chef qu'il
s'est donné ! Que l'on compare cette marche
triomphale du prince au milieu de la sécu
rité publique, des fêtes et du bonheur des
populations, avec le spectacle effrayant qui
était réservé au monde, si la Providence
n'eût inspiré et soutenu la vigoureuse réso
lution qui a tout sauvé, et l'on ne s'étonnera
pas que ce soit dans les lieux mêmes où le
socialisme semblait le plus sûi' de réaliser
ses sinistres projets^ que les masses font
éeleter leur plus vif enthousiasme.
» Cette foule qui se précipité au-devant du
prince, est-ce seulement un parti, une clas
se, une fraction .de la France? Non, c'est la
nation tout entière; le clergé et îa magistra
ture, la noblesse et la bourgeoisie, l'armée de
terre et de mer, l'ouvrierdes viilesetl'habitant
des campagnes; ce sont toutes les classes et
tous les citoyens qui s'arrachent à leurs
travaux pour venir des pointsles plus éloignés
se confondre dans un même élan de recon
naissance et de dévoûme&t. Les pontifes de la
religion, qui savent que toute puissance vient
d'en haut, et que la voix du peuple est la voix
de Dieu, rendent au prince les honneurs sou
verains, et voient en lui le fidèle héritier de
celui qui a relevé les autels ; les naag/itrats
le saluent comme -le restaurateur de l'auto
rité, et des lois; la véritable noblesse l'hono
re, parce qu'il est assez noble pour honorer
toutes les gloires nationales, et qu'iln'a usur-
Eé d'autre place que celle de l'anarchie ; la
ourgt oiïie le remercie d'avoir rétabli la
confiance, développé le crédit, ranimé le com
merce et l'industrie ; l'armée compte sur lui
. comme il a compté suf l'armée ; elle lui sait
gré surtout do l'avoir associée ail salut du
pays: la mariie connaît ses vives syuipa'hies
pour elle et tout ce qu'il en- attend pour af
fermir les bienfaits de la paix, comme pour
soutenir i honneur du paviiion national ; le
Cultiv.iteuret 1 ouuu.r n ignorent pas qu'ils
sont l objet de ses préoccupations constan
tes, et tous ceux qui souffrent savent qu'ils
n'ont.pas d'ami plus compatissant, plus gé
néreux.
» Aussi voyf z quelle touchante intimité en
tre le prince et le peuple! Une sorte dë com
munication électrique unit le cœur des mas
ses au sien. Vainement ceux qui l'accompa
gnent s'efforceraient d'écarter la foule; le
prince veut se mêler à elle, il ne veut point
de gardes qui le séparent du peuple.
» K-st-il nécessaire de dire, que le prince,
dans ces voyages qui le mettent en contact
immédiat avec les populations, a pour but
principal d'éiudier sur les lieux et par luir
même les besoins, les intérêts, ks vœux de
ceux qui lui ont donné kur confiance? As
surément les acclamations unanimes qui
l'accueillent partout sur son passage le tou
chent profondément. Mais le prince sait que
sa véritable mission est moins de recueillir^
ces hommages que de les mériter.
» D'un autre côté, Faris n'est pas toute h
France. S'il est juste, nécessaire même, d'as
surer à cette grande capitale la sécurité et le
travail, s'il est bien de l'embellir, d'y encou
rager des sciences et les arts, qui font la
gloire du pays, il y a en dehors de son en-.
ceinte 35 millions d'hommes dont chacun a
des droits égaux à la sollicitude du chef de
VEtat.
» N'est-il pas juste aussi que ces ouvriers
des grandes villes, ces habitans des campa
gnes, qui, deux fois déjà, ont acclamé Louis-
Napôléon, puissent, a leur tour, le voir et
l'entendre et recevoir de sa bouche l'assu
rance de ses dispositions généreuses? Tout
le monde gagne â ces communications inti
mes. Le prince y retrempe son courage et son
dévoûment, le peuple sa confiance et sefn af
fection; l'union entre la nation et son chef
se resserre au profit de la puissance et de la
prospérité du pays.' - n
» On sait quelle importance l'Empereur
attachait à ces relations immédiates avec les
populations. Les rares intervalles de repos
que lui laissait la guerre, il les employait à
visiter les points les plus reculés de son em
pire, et il a vivement regretté, à Sainte-Hé-
lène, de n'avoir pu remplir plus souvent Ce
rôle du vrai père de famille, qui s'assure par
lui-même des besoins de tous ses enfans.
» Louis-Napoléon vient de quitter la secon
de' ville de France. A chaque étape ds ce
voyage national, les acclamations semblent
redoubler, comme se sont accrues les sym
pathies du pays à chaque phase du gouver
nement du prince. S/millions et demi d& suf
frages l'avaient élu'Président pour quatre
ans. A la suite du 2 décembre, près de
8 millions de voix ont applaudi à son caura-
ge, ont sanctionné les actes de sa dictature
féconde et lui ont. conféré l'autorité suprê
me. Quelques mois se sont à peine écoulés,
que, grâce à l'usage qu'il a fait de son pou
voir, la France, qui lui doit la salut du pré
sent, veut aussi lui confier son avenir,
» Partout, à tous les degrés de l'ordre so
cial, ce sont les mêmes sentimens et les mê
mes vœux. A ceux des conseils d'arrondis
sement se sont joints les vœux plus formels
des conseils généraux r confirmés plus expli
citement encore par les adresses des com-,
munes ; puis arrivent les acclamations de la
foule qui, avec cette franchise du cœur qui
ne connaît ni périphrase ni détours, déclare
hautement qu'elle veut donner à son élu
non-seulement toute l'autorité dont il a be
soin pour accomplira mission, mais toutes
les conditions qui en assurent la permanence,
tous les titres qui en sont la consécration
solennelle. ,
» Telle est la volonté du pays. Le prince a
répondu comme il pouvait, comme il devait
y répondre :
« Quand il s'agit de l'intérêt général, je
» cherche à devancer les vœux de la nation.
» Je îes suis quand il s'agit d'un intérêt qui
» peut sembler personnel. » ; •
» Ce que 1 p . prince avait dit à Nevers, il l'a
confirmé à Lyon lors de l'inauguration de la
statue de l'Ecnpereur :
a Sur tous les points de mon passage s'est
» élevé le cri unanime de Vive l'Empereurt
» Mais ce cri est bien plus, à mes yeux, un
» solivenir qui touche mon cœur q'u'un es-
» poir qui touche mon orgueil... La {rudence
» et le patriotisme exigent que dans, de sem-
» blables momens, la-nation se recueille
» avant de fixer ses destinées ; et il est en-
» core. pour moi difficile de savoir sous quel
» nom je puis rendre les plus grands ser
vices.
» Si le titre modeste de Président pouvait
» faciliter la mission qui» m'était confiée, et
» devapt laquelle je n'ai pas reculé, ce n'est
» pas moi qui, par intérêt personnel, dési
rerais changer ce titre contre celui d'em-
» pereur. »
s -Qu'importe, en effet, aux hommes pro
videntiels le titre sous lequel ils accomplis
sent leur auguste missiou? Leur gloire per
sonnelle n'en sera ni amoindrie', ni rehaus
sée dans la postérité. Mais les nations ont
des instincts dontil faut tenir compte, parce
qu'ils s'accerdent généralement avec leurs
véritables intérêts. Ea consolidant le pou
voir de leur chef, c'est leur prospérité qu'el
les veulent garni tir. La France, déjà si fière
de voir à sa tête l'héritier du nom le plus
glorieux,>eut s'assurer un long avenir dé
grandeur et de paix, en donnant un pouvoir
durable au prince qui l'a sauvée. »
Nous reproduisons plus loin une note pu-
>liée par le Moniteur oely$ et un article de
'Indépendance au sujetdu décret qui a élevé le
droit sur les houilles et leston tes de la Belgi
que. On verra, d'après la Lote du Moniteur
belge, que le gouvernement de Bruxelles,
comme nous le disions ce matin, réserve
a question des rapports commerciaux entre
:.es deux pays jusqu'au moment de la réu
nion des chambres. Q tant à l'article de l'In
dépendance, il renferme un historique dé
taillé des négociations, sur lequel iSms appe
lons l'attention, et dont nous essaierons de
dégager les points les plus importans.
Admettons que les renseignemens don
nés par l'Indépendance soient parfaitement
exacts, en résulte-t-il que le gouvernement
français a eu tort d'éleve-r les droits sur les
houilles et les fontes belges? Loin de là, les"
explications de Y Indépendance justifient, com
plètement, suivaûtnous, le nouveau décret.;
Ce qui ressort, en effet, de ces explications,,
c'est que le refus de renouveler le traité de
4848 n'est pas venu du gouvernement fran->
Çdis, mais du gouvernement belge. C'est le
gouvernement belge qui a prétendu que ce
traité lui avait été défavorable, et qui s'est
refusé à;le continuer, si on ne lui concédait
pas de nouveaux avantages. Voilà un premier
point nettement établi.
Maintenant, pourquoi le gouvernement
belge se plaignait-il du traité de 1845 et met
tait-il des conditions à sou renouvellement?
Parce que les importations de fils et de tissus
de lin belges en Françe avaient diminué mal
gré le tarif différentiel dont elles jouissaient.
Que ces importations aient décru, cela est
incontestable. Mais , ce qui ne l'est pas
moins, c'est qu'elles auraient décru dans
une proportion bien plus forte, si les fils et
les tissus belges n'eusses t été reçus à un
aroit moitié moindre que celui qui pesai t sur
les fils et les tissus anglais. La meilleure
preuve que nous puissions en .donner j
ce sont {es réclamations élevées en ce mo
ment même par; les Flandres belges contre le
relèvement du tarif; qui a suivi l'expiration
du traité de 1845, et qui menacé de les pri- '
ver entièrement du débouché' français,
Mais ce que le gouvernement dé Bruxelles
aurait dû surtout ne pas perdre dé vue,
c'est que toutes les faveurs accordées "par la
France à la Belgique ne figuraient pas dans lé
traité de 1845. Nousrîne demandions que 1S e.
par quintal à ses houilles, tandis que nous
en demandions KO aux houilles anglaises im
portées par le littoral de la Manche. Nous ne
Riisitffis payer que 4 fr. à segmentes, tan—
'dil que nous soumettions les fontes anglai
ses à un droit de 7 fr. C'étaient là, ce nous
semble, des avantages assez considérables
pour compenser, et au-delà, le prétendu tort
que la Belgique aurait éprouvé par suite du
renouvellement du traite de 1845.
La Belgique à voulu tout à la fois repous
ser le traité de 1845 et conserverjes faveurs
que nous accordions à ses produits miné
raux. C'est ce qui n'a pas semblé possible
au gouvernement français. Nous étions, en
effet, dans une situation que nous ne pou
vions guère accepter.
Voici quelle était cette situation ;
D'une part, la Belgique, après avoir retiré
les droits de f iveur à nos vins et à nos soie
ries, n&conticuaitpa's moins à en faire jouir -s
les- soieries et les vins du Zollverein, qui
étaient ainsi protégés à riqs dépens.
D'autre part, tandis que la Belgique re-
pous-ait nos vins et nos soieries pour ceux
du Zollverein, la France se trouvait mainte
nir un traitement de faveur à ses houilles et
à ses font*s.
Ce simple rapprochement suffit pour ex
pliquer la conduite du gouvernement fran- :
çais. Il a dit tout simplement à la Belgique : .
Faveur pour faveur ; renouvelez le traite de
1845, ou, sinon, Ja France vous retirerai es:
avantages qu'il accorde à vos houilles et à vos
fontes. La Belgique n'a-pas voulu renouveler
le traité de 1845, ou.du moi«s elle a voulu
se faire acheter le renouvellement par de
nouvelles concessions, et le gouvernement
français a élevé alors les droits sur les houil
les et les fontes belges, sans cependant les
porter niveau des droits que paient les
produits*"similaires anglais.
Tels sont les faits qui ressortent de l'arti
cle semi-officiel publié par l'Indépendance-, ils
donnent complètement raison à ltf mesure
prise par le gouvernement français.
J. B urvt.
.On lit dans le Moniteur belge :
« Un décret du prince-Président de la Républi
que française vient d'élever les droits sur les
houilles et les fontes entrant en France par la
frontière belge.
s En signant le traité du 22 août dernier, le
gouvernement belge était loin de s'attendre à ce
qu'une mesure de cet'.e nature succéderait de si
près à un arrangement qui, d'après les termes
mêmes de son préambule, devait assurer et con
solider h maintien des bons rapparts existons en
tre les deux pays.
» Les chambres législatives belges'se réuniront
dans quelques jours. En leur rendant compte de
l'ensemble des négociations; le gouvernement leur
fera connaître la ligne de conduite % qu'il a suivie
en présence des exigences produites "en dernier
lieu. »
L'Indépendance, en reproduisant la note
du Moniteur belge, l'accompagne de l'article
suivant :
« Au contenu de la note du Moniteur, nous pou
vons joindre les explications suivantes. Nous avons
.tout lieu de croire entièrement exacts les faits que
nous allons mettre sous les yeox de nos lecteurs.
. » La convention du 13 décembre 1845 avait,
comme on sait, son terme fixé au 10 août 1852.
Dès le commencement de l'année. 1831, le gouver
nement belge ouvrit des pourparlers avec le gou-
'«rnem. nt français pour la conclusion d'un nou-
•vel arrangement commercial ; il posait comme
po'iiït de départ que, -si les bases de la convention
de i8io devaient être réprises, une compensation
était due à la Belgique, à féum de la diminution
notable survenue dans les importations de fils et
tissus de lin belges en France, diminution qui
contrastait avec l'accroissement considérable que
présentait l'importation en Belgique des pro
duits français auxquels la convention assur.iit
des droits de fateur; le gouvernement ^deman
dait que cette compensation fût accordée de
préférence à l'indùttrie bnière même, au mo.yen,
entre autres, d'une nouvelle réduction de droits;
il exprimait le v désir formel que la convention
à intervenir garantît d'une manière expresse
lè m sintien «lu tarif français pour les houilles et
les fontes belges ; enfin, et sans parier d'autres
points moins importans, le gouvernement se dé
clarait prêt à accéder au vœu, souvent manifesté,
du cabinet de Paris, quant à la reconnaissance in
ternationale de la propriété littéraire èt artistique,
si, d'ailleurs, l'arrangement projeté devait offrir à
la Belgique un ensemble de conditions acceptables.
\ » Lés pourparlers commencés en 1851 avaient
d'abord étl engagés par écrit; ils furent continués,
à partir du mois de février 18S2, dans des confé
rences verbales. La négociation se poursuivait au
_ mois de juillet dans des conditions auxquelles les
chambres seront, pemons-nous, initiées en détail,
lorsque le 9 du même mois, les membres du ca
binet jugèrent devoir offrir leur démission au roi.
Cette démarche fut immédiatement portée à la
connaissance du gouvernement frinç|iis, auquel
on; proposa, en même temps, la prorogation de la
convention de 1845 jusqu'à la fin de l'année, afin
•que la situation' passât intacte aux mains d'un
nouvçau cabinet, et que celui-ci pût se détermi-
. ner en toute libsrté. -
» Le cabinet de Paris rejeta cette proposition,
qui résultait, en quelque sorte, de la nature des
faits, et ne semblait pouvoir rencontrer d'objec
tion ; il déclara ne vouloir admettre la prorogation,
fût-e.Ue d'un jour, que ai le gouvernement belge
consentait à la signature immédiate de la conven
tion littéraire et d'une convention de douane. Il
est à peine besoin de dire que cette combinaison
fut absolumeat repoussée.
» Plus tard, le gouvernement français se désista
de l'une de» deux conditions; lasignature immédia
te de la convention littéraire fut seule demandée.
Tout le monde comprendra que pour obtenir la
simple prorogation de la convention de 1815 pen
dant quelques mois, le gouvernement belge ne
pouvait accorder une concussion de cette impor
tance, et cela sans compensation spéciale, et sur
tout sans garantie quant à l'issue définitive des
négociations.
» Les pourparlers se prolongèrent encore pen
dant quelque temps sur le terrain de la proroga
tion, lorsque, par suite de faits qui seront portés,
sans d«ute, à la csnnaissance de la législature, le
cabinet se trouva autorisé à traiter, même d'un
arrangement définitif. Quatre combinaisons diffé
rentes furent alors presestées au gouvernement
français ; deux de ces combinaisons avaient pour
base la remise en vigueur de la convention du 13
deceiabre 184S jusqu'au 1" janvier 1853 ; les
deux autres constituaient des solutions définiti
ves. L'une reproduisait les élémens de 1a conven-
tien de 1845, sauf que la Belgique, pour com
penser la îéduction considérable de ses exportations
de produits liniers, reprenait la concession rela
tive aux lainages; elle offrait, d'un autre côté, l'a
bandon de l'industrie de la réimpression, en oiéme
teiisps qu'elle demandait une garantie pour les.
houilles. L'autre combinaison se bornait à des sti-
■ pulatieins concernant la question littéraire, avec
quelques dédominsgcmens pour la Belgique, et
««Mit former expressément le gage de la. conti
nuation des boanes relations des d. ux pays entre
eux. Le gouvernement français fut appelé à choi
sir librement entre ces quatre combinaisons dont
chacune excluait l'autre. Il se prononça pour la
quatrième, dont le caractère est suffisamment pré
cisé par ce préambule, que l'arrangement a pour
objet «.-d'assurer et de consolider le maintien des
» bons rapports existant entre les deux pays. »
» D'après la manière même dont cet accord avait
été amené, la Belgique restait complètement libre
de reprendre ou de ne pas r,prendre la négocia
tion d'un arrangement ultérieur;-dans tous les
cas, après la signature de la convention du 22
août, îa pewiés de rendre la vie à la convention du
13 décembre 1845 telle qu'elle avait été conclue,
ne pouvait plus même entrer dans les prévisions
du gouvernement belge.
» Cependant, malgré tous les motifs que devait
avoir ce dernier d'être entièrement rassuré sur
l'avenir dei relations commerciales entre les deux
pays, quinze jours s'étaient à peine écoulés depuis
la conclusion de l'arrangement du 22 août, qu'une
invitation presque comminatoire lui était adressée
de faire revivre sur-le-champ et sans modification
aucune, la cepventien de 1845, sauf, disait-on, à
ouvrir ultérieurement une négociation nouvelle.
Le gouvernement bdge était prévenu, en même
temps que, faute d'adhérer à cette sorte ^'injonc
tion, le tarif français sur les fonte» et les houilles
serait relevé.
» Nous laissons à nos lecteurs le soin d'appré
cier si celte démarche pouvait se concilier avec le
caractère de la convention du 22 août. Elle ten
dait à dépouiller la Belgique du bénéfice moral de
FEUILLETON DO CONSTITUTIONNEL, 24SEPTEMBRE
E -JL COMTJESîSIE
DE MAULÉON.'
XXIII.
w l'on pbouvb, bnb fois db plus, l'incon
vénient qu'il i a a ne pas regarder de
vant soi quand on sb promène. .
J'arrivai ainsi.à ia veille du jour désigné
sur le biilet d'invitation. En vain m'étais je
creusé le cerveau , rien ne venait ; j'y per
dais le peu de latinité qui me reste. Tantôt,
je songeais à la riise, tantôt j'inclinais vers la
violence; il y eut un moment où je méprisa
regretter les lettres de cachet. La chanoi-
nesse, de son côté, n'y allait pas moins ron
dement; elle parlait d'enlever Lucien et de
l's conduire en lieu sûr ; volontiers elle en
eût accepté la garde. Mais ces beaux plans
avortaient faute dé meyens d'exécution j ils
croulaient sous nos doigts comme des édi
fices fî-agiles. Elle et moi nous ne savions
plus qu'imaginer; nous étions vaincus et à
bout de voies. Le hasard fut plus habile ou
plus fort que nous.
La journée avançait, et déjà la nuit com
mençait à se faire lorsqu'on sonna chez moi
avec une certaine vivacité. J'ouvris ; c'était
le portier de la mai=en qu'habitait Lucien; il
vernit me dire eu toute hâte que le jeune
horume avait été blessé dans ia rue et
transporté chez lui dans un état assez aiar-
* La Hfroducti u interdite.
mant. Qu'on juge de l'effet que produisit
sur moi une nouvelle aussi inattendue 1 En
un clin-d'œil je fus prêt, et, au bout de quel-
3ues minutes, j'étais rendu dans la chambre
e Lucien et au pied de son lit. Un médecin
du voisinage s'y trouvait déjà et achevait de
tirer du brasdu patient une copieuse palette
de sang. Quoique affaibli par l'opération, Lu
cien me reconnut et me tendit la main qu'il
avait de libre; je la serrai avec une doulou
reuse émotion. J'ignorais encore si le mal
était grave et jusqu'à quelpointily avait lieu
de s'en inquiéter. Impossible, en l'état des
choses, d'interroger le docteur; il fallait se
contenter d'épier sur sa physionomie le ?en-
limsat qu'il se formait de l'état du blessé, à
mesure que les symptômes se succédaient
devant lui. Pour obtenir une opinion plus
précise, j'attendis sa sortie et l'accompagnai
jusque sur l'escalier :
— Eh bien? lui demandai-je avec une an
xiété visible.
— Eh! eh! répondit-il en secouant la tête;
il n'y arien à dire cë soir. L'hémorrhagie
intérieure est arrêtée, c'est quelque chose;
maintenant il faut voir comment le cerveau
se comportera. Veillez avec soin, et au moin
dre accident envoyez-moi chercher.
Il me quitta sur ces mots qui n'avaient
rien de rassurant. Je rentrai dans la cham
bre de Lucien, te cœur navré et l'esprit rem
pli d'alarmes. Il venait de s'assoupir; sa tête
portait sur le bras dont la veine avait été ou
verte et presqu'à la hauteur de la saignée. Il
fallutle dégager et donner au corpsune pose
plus naturelle, mettre un peu d'ordre sur le
lit, sans troubler lereposdu blessé. Je fis tout
cela moi-même, doucement, minutieuse
ment, avec des ménagemens infinis et com
me aurait pu le faire une mère. C'est que
Lucien était mon enfant adoptif, et auxsan-
goissea.doat ^étais assailli, je sentais que sa
perte me serait aussi cruelle que s'il eût été
de mon sang. Seul, je le veillai cette nuit-
là ; je ne voulus m'en remettre de ce soin à
personne. Mon regard demeurait attaché à
ce visage, où, la douleur était empreinte, et
cherchait à y lire l'approche d'accidens fâ
cheux , afin de les prévenir et de les conju
rer. Je passai de longues heures ainsi, sans
fermer l'œil ni faire un mouvement. Jamais
tâche ne fut mieux remplie ; le cœur y ai
dait.
Mais dans Je cours de cette longue veille,
que de réflexions vinrent m'assiéger ! Com
ment Lucien en était-il là? Par quelle cir
constance imprévue reposait-il sur ce lit de
souffrance? Quelles étaient les causes de l'évé
nement? Sauple, alerte comme on l'est à son
âge, il avait fallu un bien grand concours
de fatalités pour qu'il en pût être victime.
Telles étaient les questions que ma curiosité
se posait et aùxquedes je n'obtins de répon
se que plus tard. Voici comment les choses
s'étaient passées.
Le matin même, Lucien était sorli, afin
de poursuivre, du côté où l'entraînait son
penchant, le cours de ses stations habituel
les. C'était un dimanche, c'est-à-dire un jour
de libres allures, où chacun appartient au
bonheur préféré et au délassement favori.
Le soleil brillait dans le ciel ; les rues étaient
encombrées de monde. Notre amoureux
marchait lentement; il foulait le pavé d'un
pas distrait et en homme qui poursuit avec
son cœur un doux et interminable entretien.
Il songeait au lendemain, à ce lendemain
qu'il avait tant cherché, tant désiré, et, au
moment d'y atteindre, il se sentait pris d'un
profond découragement. Qui le sait? Peut-
être y trouverait-il la fin d'un rêve qui lui
était cher? Adieu les illusions et les joies
sans trouble d'un amour à distance ! Et si,
de près, il n'sllait recueillir ejue des mé
comptes! Si ces beaux songes, entrée par
la porte d'ivoire, allaient tout à coup s'éva
nouir ! Lucien n'y arrêtait sa pensée qu'avec
un certain effroi.
Ce fut sous l'empire de ce sentiment qu'il
arriva devant l'hôtel de la comtesse. Il vou
lait goûter une dernière fois le bonheur
d'une discrète contemplation, la voir sans eu
être vu, la suivre du regard dans le brillant
équipage qui" l'emportait. Cette attente fut
. d'abord trompée. Il eut beau interroger la
façade, les croisées, l'entrée, la cour inté
rieure, il ne lui arriva de réponse d'aucun
côté ; l'entrée et k cour étaient désertes, les'
croisées fermée?, la façade muette. Partout
le vide et le néant, le silence et la solitude.
Lucien ne se rebuta pas; il avait le gîte sous
la main, tôt ou tard le gibier y paraîtrait;
ce n'était qu'une affaire de patience, et
il en avait de vastes approvisionnemens.
Il poursuivit donc sa promenade ordinaire
en long ou en large, en droite ligne ou en
zig-zag, s'arrêtant devant une affiche qu'il
avait lue deux cents fuis, profitant avec art.
des moindres diversions, des exercices d'un
j'oueur d'orgue ou des gambades d'un sapa
jou, changeant d'allures suivant les rencon
tres, déroutant enfin de son mieux ce que sa
présence invétérée pouvait avoir de suspect.
L'épreuve fut rude ce jour-là; elle se pro
longea durant trois mortelles heures, Lu
cien les offrit à la comtesse comnie un der
nier holocauste déposé sur le senil du temple
et à.la veille d'y entrer. Cependant il y eut
un moment où il s'avoua vaincu; soit lassi
tude, soit pudeur,- il allait quitter la place.
Seulement, en homme-qui renonce mal
gré lui et se rattache à un espoir fugi
tif, it ne se retirait qu'à reculons et en
jetant çà et là un coup-d'oeil suprême et
presque désespéré. Sans doute il eût poussé
cet effort jusqu'au bout et coatinué cette
de* arrangement, tandis que la France conservait
sa conquête, et nous replaçait devant l'inconnu
d'une négociation nouvelle. La proposition du
gouvernement français, abstraction faite de ces
vices intrinsèques, portait d'ailleurs atteinte à
notre pacte fondamental, qui n'attribue pas au
gouvernement le pouvoir de mettre ou de remet
tre en vigueur les traités de commerce fans le con
cours "de la législature. Le cabinet rejeta, ea con
séquence, pour tous ces motifs, la proposition qui
lui était faite. ;
» Youlant, néanmoins, persévérer dans la voie
de conciliation qu'il avait toujours suivie, et
quoique dégagé de toute obligation, il offrit de
signer, dans les vingt-quatre heures, une conven
tion sur les bases de la troisième combinaison,
dont nous ayons parlé plus haut. Mais le gouver
nement français, maintenant sa proposition, refusa
même de discuter tout ce qui s'en écartait ; seule
ment il ne demanda plus que le gouvernement
belge se passât du concours des chambres, mai* il
exigea que celles-ci fussent convoquées à bref
dél-ji et qu'elles prissent sans retard un parti. En
présence de semblables exigénees, le gouvernement
belge ne put, de son côte, que se référer à ses
résolutions antérieures. C'est dans ces circonstan
ces qu'est intervenu le décret publié par le Moni
teur wiiversel dû 21 septembre.
» Nous venons d'exposer simplement les faits ;
nous aurons l'occasion, dans un prochain article,
d'examiner les motifs sur lesquels la note publiée
par le journal officiel français base cette mesure
d'hostilité gratuite, en désaccord si complet avec
la lettre et l'esprit de la convention du 22 août. »
VOYAGE DU PRINCE-PRÉSIDENT,
dépêches officielles.
Lyon, le 22 septembre 1852, à trois
heures et demie.
j 'ai l'honneur de vous transmettre les nouvelles
que je reçois à l'instant de Grenoble ; elles sont
extraites d'une très longue correspondance de la
quelle il résulte que la réception faite à Son Al-
•tesse impériale est vraiment magnifique.
Ci-après l'extrait du journal :
« L'aspect de Grenoble est des plus animés. On
» a déserté les villages et les montagnes, de vingt
» lieues à la ronde, pour descendre dans la ville que
» le prince-Président va honorer de saprésence. Les
» fenêtres sont pavoisées ; les emblèmes impériaux
» brillent sur .tous les points ; d'immenses trans-
» psrens portent les inscriptions suivantes : Vive
» Napoléon III! Vive l'Empereur! A l'Empire,
» Grenoble fut toujours fidèle! Al' Etnpereurl 7 mars
» 1815! A Napoléon III l son immortel 2 décem-
n trel Vive l'Empereur Napoléon Il\ Napo-
v léon llV.
i,! Les marchés sont, décorés avec un goût exqu s,
» et les dames de la halle y ont placé, au milieu
» de guirlandes de verdure, des médaillons où on
» lit : Vive le sauveur de la France !
» Des arcs de. triomphe sont élevés de toutes
» parts; des préparatifs multipliés annoncent une
» illumination brillante qui doit être complétée
» demain par l'éclairage simultané de tous les pics
» des montagnes qwi dominent Grenoble. On cite
» la commune de Laffrey qui doit consacrer à son
» fèu quatre mille fagots.
» Cette commune est celle où l'Empereur fit
» tomber les armes des troupes envoyées à sa
» rencontre, en leur disant : Mes enfans, ne re-
v connaissez-vous pas votre Empereur? » _
»; J'écris ces lignes avant l'arrivée du prince;
» mais il e«t facile de pressentir que l'ovation se-
» ra complète.
» A fix heures précises, le prince, au-devant
m > duquel M. Bérard, pré!et de l'Isère, était allé
» jusqu'à fa limite du département, entrait à Gre-
» noble, au milieu d'une foule innombrable. H a
» été reçu à la porte de France par M. Arnaud,
» maire, qui lui a présenté les clés de la ville. Les
» cris de Vive l'Empereur ! ont éclaté aussitôt, et
» n'ont pas cessé de retentir sur tout le chemin
» que le prince a parcouru pour se rendie à l'hô-
» tel dî la préfecture.
» Ce n'est que demain que S. A. recevra.
» L'accueil ti unanimement enthousiaste qui vient
» de lui être fait permet de présager pour demain
» une des plus belles journées d'un voyage où les
» belles journées se succèdent. »
Lyon, 23 septembre 1852, 7 b. 47 m.
Grenoble ,-22 septembre, 7 h. du matin.
Les populations rurales accourent en foule de
tous ks points du département pour assister à là
grande revue qui aura lieu à midi à l'Hippodro
me. De tous côtés on entend le tambour, et des
communes entières entrent dans la ville le dra
peau en tête , conduites par leur municipalité.
Une animation extraordinaire règne dans tous les
quartiers. Les rués que doit traverser le prinee
sont pavoisée3 et décorées. Tout présage une jour
née magnifique. S. A. jouit d'une santé parfaite.
manœuvre, si au confluent de deux rues il
n'eût reçu un choc violent qui le renversa sur
le pavé. C'était une voiture qui débouchait
à toute vitesse et dont les chevaux n'avaient
nlgndue
possible de s'en défendre; aussi fut-il frappé
par le timon comme on est frappé par la
foudre, instantanément.
A cet-accident imprévu, un cri sortit de la
voiture, et une femme en descendit pour al
ler au secours du blessé.D'un autre côté, les
passans accouraient et formaient déjà autour
dedui un cercle plus embarrassant qu'offi
cieux et où la curiosité l'emportait sur la
compassion. La maîtresse de l'équipage y
mit ordre sans retard ; sur un mot d'elle,
ses gens portèrent Lucien dans sa voiture qùi
s'éloigna tout aussitôt. Le - jeune homme
était évanoui 'et ne recouvra ses sens qu'au
mouvement des ressorts et après quelques
tours de roue. L'ouïe fut la première a se
réveiller, et il put entendre une conversation
engagée à ses côtés.
— Si, au moins, nous savions où le re
conduire! disait une voix de femme.
— Comtesse, dit une autre voix, je le re
connais, c'est le jeune Mérmval que je de
vais vous présenter demain.
— Donnez alors son adresse au cocher,
nous le ramènerons chez lui, reprit la pre
mière voix.
Le hasard avait servi Lucien, même dans
son malheur. C'était l'équipage de la com
tesse qui l'avait jeté sur le pavé, «t il se trou
vait assis près d'elle et en face de Triuuchon.
Cette perception fugitive fut la srule qu'il
put recueillir ; elle suffit pour lui faire per
dre de nouveau le sentiment. Il n'était pas
en état de résister à une émotion si grande.
Envainessaya-t -il d'ouvrir lesyeux ; la force
Lyon, 23 septembre, 7 h. du matin.
Grenoble, 22 septembre, 3 h. du toir.
La revue de la population rurale passée au po
lygone a été magnifique et favorisée par le beau
temps. Toute la ville y assistait. Les communes
avaient formé^ un contingent que l'on ne peut
évaluer à moins de 45 à 50,000 aines. S. A: est
rentrée par la porte de Beaune, où U population,
rangée sur son passage, lui a fait l'ovation.la plus
éclatante et la plus spontanée. Des arcs de triom;-
-phe, -des bouquets de verdure, ornaient toutes lês
rues que le prince devait traverser. Les»eris de
Vive VEmpereur! nlpnt cessé de retentir avec urçe
force croissante. L'enthousiasme règne partout.
Lyon, 23 septembre, 9 heures/
Grenoble, 2;2 septembre, 7 heures du soir.
Le prince est morté dans l'après-midi au fort
B-rot et au fort de la Bastille, qu'il a successivé-
ment visités dans le plus grand détail. En descen-
, dant, le prince est entré à l'improviste dans le
quartier Saint-Laurent, habité en presque totalité-
parlés ouvriers de Grenoble; il a été reçu avec
un enthousiasme indicible, et littéralement cou
vert de fleurs par des femmes d'ouvriers, bien que
rieh n'eût annoncé sa venue, à laquelle personne
n'était préparé et que rien n'eût étédisposé pour Iç
recevoir.
Les illuminations commencent dans la ville. Le
temps est magnifique ; tout présage que les illu
minations des montagnes donneront à S. A. un
spectacle digne d'elle, et digne de cé beau pays,
qui vient de manifester d'une manière si éclatante
les pathétiques sentimens dont il est animé.
Lyon, 23 septembre, 9 h. 1/4. .
Grenoble, 22 septembre.
Le prince vient de rentrer après avoir passé la
revue des troupes, et vu défiler devant lui une
quantité, immense de population, dont l'enthou-
s asme est très grand. Il est impossible # de ne pas
se sentir profondément ému devant l'accueil ad
mirable que le Dauphiné vient, de faire au prince.
La santé de S. A. est parfaite.
A Rive-de-Gier, le prince-Président s'e3t porté
seul, sans escorte, au milieu ds 10,000 ouvriers
rassemblés pour le fêter. Sa présence parmi eux,
sa confiance, sa noble simplicité, ont excité les
plus vifs transports d'enthousiasme. (Moniteur.)
L'empre3sement pour accueillir le prince et les
personnes qui devaient l'accompagner s'est mani
festé à Lyon de la manière la plus significative.
Les premiers négocians et fabricans, les habitans
les plus notables se sont rendus, plusieurs jours à
l'avance, à l'Hôtel-de-Ville, pour mettre leurs mai
sons à la disposition des personnes qui accompa
gnaient le prince, et des étrangers de distinction
qu'on attendait à Lyon. (Idem.)
Lorsque le prince-Président s'e»t rendu au pa
lais de l'archevêché de Lyon, pour y assister au
spectacle des régates sur la Saône, Mgr le cardinal
de Bonald lui a fait les honneurs de sa résidence
avec une urbanité aussi digne qu'empressée. S.
Em. a conduit le prince dans la chambre où l'Em
pereur Napoléon a -couché en 1815, qui 'n'a subi
aucun changement, où personne n'a habité de
puis, et Mgr de Bonald, en introduisant Je prince
dans cette chambre, n'a pu se défendre d'une vive
émolion, que tous les assiitans ont partagée.
Daris la soirée, le prince a quiité le bal vers dix
heures et demie, et est resté, pendant long-temps
en conférence avec M Paléocapa, ministre des tra
vaux publics du roi de Piémont. (Idem.)
Y oèqx des Conseils d'arrondissemesî.
Le Moniteur ajoute aux vœux des conseils
d'arrondissement que nous avons déjà fait
connaître, ceux des conseils du Mans, de
B -auvais, de Clermont (Oise), de Senlis, de
Compiègne, de Dinan r de Montmorilion, de
Brest, de Besançon, de Beaune, de Saint-
Brieuc, de Chinon, de Louviers, de Nogent-
sur-Seine, de Gray, de Fontainebleau, de
Pitliiviers, d'Alençon, de Civray, de Wiss"m-
bourg, de Baume, Montbéliard, Laon et Ver-
vins.
Nous ajouterons que notre correspon
dance nous apporte ce matin le vœu du con
seil de Mende.
Toutes ces adresses demandent la conso
lidation du pouvoir sur la tète du prince-
Président.
a Prince, dit le conseil du Mans (dont le
vœu figure ce matin le premier dans le Mo
niteur), achevez l'œuvre que vous avez si
courageusement entreprise ; que la Républi
que, ce symbole de nos discordes civiles et
manqua à ses paupières; il voulut parler, sa
voiX Je trahit : ce double effort n'aboutit qu'à
le plonger dans un anéantissement plus pro
fond. Jamais il ne sut bien ce qui s'étaitpassé
depuis ce moment j usqu'à celui où il se re
trouva dans sa chambre, étendu sur en lit
et eir face d'un homme de l'art qui avait une
main sur son pouls et agitait une lancette
de l'autre. C'était trop de secousses à la fois;
il se crut le jouet d'une vision et éprouva
uue nouvelle syncope.
XXIV.
ou l'on verra que ia chanoine8se joue de
malheur. — le grand pas est franuhi.
Pendant le cours de la nuit, il ne me sem
bla pas que la situation de Lucien .tendît
à empirer : en apparence il était calme^ et
n'exhalait des plaintes que de loin en loin,
et quand il essayait de changer de position.
Mais, vers le matin, il survint dans son état
une aggravation évidente ; la tête s'engagea
et l'abattement s'en suivit. Le médecin n'hé
sita pas : il eut encore recours à des moyens
énergiques. La force du patient, sa jeunesse,
sa robuste "constitution en conseillaient l'em
ploi; d'ailleurs, on combattait ainsi les deux
principes de destruction qu'il portait dans
son sein, les blessures du corps et celles de
l'ame. Vis-à-vis des unes et des autres, il fal-*
lait agir vigoureusement.
Ponr seconder les efforts de l'art, j'eu§ le
soin d'écarter du chevet du malade tout ce
qui pouvait réveiller chez lui des émotions
trop vives Ainsi il ne sut rien des témoi
gnages d'intérêt que lui donna la comtesse
de Miuléan pendant tout le temps.que ooa
état offrit quelque danger. Plusieurs fois par
jour elle envoyait prendre des nouvelle»,
et non contente d'être ainsi tenue au
* • -
BUREAUX. ! rue de Valois (Palalg'Bojal) o. !©.
1852tl—VENDREDI 24 SEPTEMBRE,
Prix de l'abonmeiaenl.
F&R1S ET DEPARTEWENS ;
8 m. POUR TROIS MOIS.
§2 FR. POUR L'ANNÉE.
UN NUMÉRO : 15 CENTIMES.
pora les pats étrangers , se repor-
! ter au tableau publié dans le journal,
les 10 et 25 de chaque mois.
S'sàrsîser, iïâico, pour la rédaction ; 4 Mï C çcheval -C î jjaiî
Les articles déposés ne sont pas rendu; |
vij
T
s . ;
JOURNAL POLITIQUE, LITTÉRAIRE, UNIVERSEL.
en ekefi s On t*a&ome, dam let département, eux Messag&iei tt eux Llntiitm de poste;—A Londres J ehei MM? C owie et fils?
, I — A Strasbourg, ches M. AïSXAïWBE, pour t'AUemsgnel
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et au bureau du journal.
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Peur six mois. . . 10 fr,
Ponr l'année. . . . 52 fr.
Le prix d'abonnement du CONSTITO
TIONNEL est au-dessous de celui de tous les
journaux politiques.
PARIS, 25 SEPTEMBRE
Nous lisons dans le Moniteur ;
« L'Europe a les yeux fixés sur ce qui se
passe en ce moment dans le midi de la Fran
ce. C'est ua magnifique spectacle que celui
d'un grand peuple s'id-nti fiant ainsi, par
touslessentimensducdëur, avec le chef qu'il
s'est donné ! Que l'on compare cette marche
triomphale du prince au milieu de la sécu
rité publique, des fêtes et du bonheur des
populations, avec le spectacle effrayant qui
était réservé au monde, si la Providence
n'eût inspiré et soutenu la vigoureuse réso
lution qui a tout sauvé, et l'on ne s'étonnera
pas que ce soit dans les lieux mêmes où le
socialisme semblait le plus sûi' de réaliser
ses sinistres projets^ que les masses font
éeleter leur plus vif enthousiasme.
» Cette foule qui se précipité au-devant du
prince, est-ce seulement un parti, une clas
se, une fraction .de la France? Non, c'est la
nation tout entière; le clergé et îa magistra
ture, la noblesse et la bourgeoisie, l'armée de
terre et de mer, l'ouvrierdes viilesetl'habitant
des campagnes; ce sont toutes les classes et
tous les citoyens qui s'arrachent à leurs
travaux pour venir des pointsles plus éloignés
se confondre dans un même élan de recon
naissance et de dévoûme&t. Les pontifes de la
religion, qui savent que toute puissance vient
d'en haut, et que la voix du peuple est la voix
de Dieu, rendent au prince les honneurs sou
verains, et voient en lui le fidèle héritier de
celui qui a relevé les autels ; les naag/itrats
le saluent comme -le restaurateur de l'auto
rité, et des lois; la véritable noblesse l'hono
re, parce qu'il est assez noble pour honorer
toutes les gloires nationales, et qu'iln'a usur-
Eé d'autre place que celle de l'anarchie ; la
ourgt oiïie le remercie d'avoir rétabli la
confiance, développé le crédit, ranimé le com
merce et l'industrie ; l'armée compte sur lui
. comme il a compté suf l'armée ; elle lui sait
gré surtout do l'avoir associée ail salut du
pays: la mariie connaît ses vives syuipa'hies
pour elle et tout ce qu'il en- attend pour af
fermir les bienfaits de la paix, comme pour
soutenir i honneur du paviiion national ; le
Cultiv.iteuret 1 ouuu.r n ignorent pas qu'ils
sont l objet de ses préoccupations constan
tes, et tous ceux qui souffrent savent qu'ils
n'ont.pas d'ami plus compatissant, plus gé
néreux.
» Aussi voyf z quelle touchante intimité en
tre le prince et le peuple! Une sorte dë com
munication électrique unit le cœur des mas
ses au sien. Vainement ceux qui l'accompa
gnent s'efforceraient d'écarter la foule; le
prince veut se mêler à elle, il ne veut point
de gardes qui le séparent du peuple.
» K-st-il nécessaire de dire, que le prince,
dans ces voyages qui le mettent en contact
immédiat avec les populations, a pour but
principal d'éiudier sur les lieux et par luir
même les besoins, les intérêts, ks vœux de
ceux qui lui ont donné kur confiance? As
surément les acclamations unanimes qui
l'accueillent partout sur son passage le tou
chent profondément. Mais le prince sait que
sa véritable mission est moins de recueillir^
ces hommages que de les mériter.
» D'un autre côté, Faris n'est pas toute h
France. S'il est juste, nécessaire même, d'as
surer à cette grande capitale la sécurité et le
travail, s'il est bien de l'embellir, d'y encou
rager des sciences et les arts, qui font la
gloire du pays, il y a en dehors de son en-.
ceinte 35 millions d'hommes dont chacun a
des droits égaux à la sollicitude du chef de
VEtat.
» N'est-il pas juste aussi que ces ouvriers
des grandes villes, ces habitans des campa
gnes, qui, deux fois déjà, ont acclamé Louis-
Napôléon, puissent, a leur tour, le voir et
l'entendre et recevoir de sa bouche l'assu
rance de ses dispositions généreuses? Tout
le monde gagne â ces communications inti
mes. Le prince y retrempe son courage et son
dévoûment, le peuple sa confiance et sefn af
fection; l'union entre la nation et son chef
se resserre au profit de la puissance et de la
prospérité du pays.' - n
» On sait quelle importance l'Empereur
attachait à ces relations immédiates avec les
populations. Les rares intervalles de repos
que lui laissait la guerre, il les employait à
visiter les points les plus reculés de son em
pire, et il a vivement regretté, à Sainte-Hé-
lène, de n'avoir pu remplir plus souvent Ce
rôle du vrai père de famille, qui s'assure par
lui-même des besoins de tous ses enfans.
» Louis-Napoléon vient de quitter la secon
de' ville de France. A chaque étape ds ce
voyage national, les acclamations semblent
redoubler, comme se sont accrues les sym
pathies du pays à chaque phase du gouver
nement du prince. S/millions et demi d& suf
frages l'avaient élu'Président pour quatre
ans. A la suite du 2 décembre, près de
8 millions de voix ont applaudi à son caura-
ge, ont sanctionné les actes de sa dictature
féconde et lui ont. conféré l'autorité suprê
me. Quelques mois se sont à peine écoulés,
que, grâce à l'usage qu'il a fait de son pou
voir, la France, qui lui doit la salut du pré
sent, veut aussi lui confier son avenir,
» Partout, à tous les degrés de l'ordre so
cial, ce sont les mêmes sentimens et les mê
mes vœux. A ceux des conseils d'arrondis
sement se sont joints les vœux plus formels
des conseils généraux r confirmés plus expli
citement encore par les adresses des com-,
munes ; puis arrivent les acclamations de la
foule qui, avec cette franchise du cœur qui
ne connaît ni périphrase ni détours, déclare
hautement qu'elle veut donner à son élu
non-seulement toute l'autorité dont il a be
soin pour accomplira mission, mais toutes
les conditions qui en assurent la permanence,
tous les titres qui en sont la consécration
solennelle. ,
» Telle est la volonté du pays. Le prince a
répondu comme il pouvait, comme il devait
y répondre :
« Quand il s'agit de l'intérêt général, je
» cherche à devancer les vœux de la nation.
» Je îes suis quand il s'agit d'un intérêt qui
» peut sembler personnel. » ; •
» Ce que 1 p . prince avait dit à Nevers, il l'a
confirmé à Lyon lors de l'inauguration de la
statue de l'Ecnpereur :
a Sur tous les points de mon passage s'est
» élevé le cri unanime de Vive l'Empereurt
» Mais ce cri est bien plus, à mes yeux, un
» solivenir qui touche mon cœur q'u'un es-
» poir qui touche mon orgueil... La {rudence
» et le patriotisme exigent que dans, de sem-
» blables momens, la-nation se recueille
» avant de fixer ses destinées ; et il est en-
» core. pour moi difficile de savoir sous quel
» nom je puis rendre les plus grands ser
vices.
» Si le titre modeste de Président pouvait
» faciliter la mission qui» m'était confiée, et
» devapt laquelle je n'ai pas reculé, ce n'est
» pas moi qui, par intérêt personnel, dési
rerais changer ce titre contre celui d'em-
» pereur. »
s -Qu'importe, en effet, aux hommes pro
videntiels le titre sous lequel ils accomplis
sent leur auguste missiou? Leur gloire per
sonnelle n'en sera ni amoindrie', ni rehaus
sée dans la postérité. Mais les nations ont
des instincts dontil faut tenir compte, parce
qu'ils s'accerdent généralement avec leurs
véritables intérêts. Ea consolidant le pou
voir de leur chef, c'est leur prospérité qu'el
les veulent garni tir. La France, déjà si fière
de voir à sa tête l'héritier du nom le plus
glorieux,>eut s'assurer un long avenir dé
grandeur et de paix, en donnant un pouvoir
durable au prince qui l'a sauvée. »
Nous reproduisons plus loin une note pu-
>liée par le Moniteur oely$ et un article de
'Indépendance au sujetdu décret qui a élevé le
droit sur les houilles et leston tes de la Belgi
que. On verra, d'après la Lote du Moniteur
belge, que le gouvernement de Bruxelles,
comme nous le disions ce matin, réserve
a question des rapports commerciaux entre
:.es deux pays jusqu'au moment de la réu
nion des chambres. Q tant à l'article de l'In
dépendance, il renferme un historique dé
taillé des négociations, sur lequel iSms appe
lons l'attention, et dont nous essaierons de
dégager les points les plus importans.
Admettons que les renseignemens don
nés par l'Indépendance soient parfaitement
exacts, en résulte-t-il que le gouvernement
français a eu tort d'éleve-r les droits sur les
houilles et les fontes belges? Loin de là, les"
explications de Y Indépendance justifient, com
plètement, suivaûtnous, le nouveau décret.;
Ce qui ressort, en effet, de ces explications,,
c'est que le refus de renouveler le traité de
4848 n'est pas venu du gouvernement fran->
Çdis, mais du gouvernement belge. C'est le
gouvernement belge qui a prétendu que ce
traité lui avait été défavorable, et qui s'est
refusé à;le continuer, si on ne lui concédait
pas de nouveaux avantages. Voilà un premier
point nettement établi.
Maintenant, pourquoi le gouvernement
belge se plaignait-il du traité de 1845 et met
tait-il des conditions à sou renouvellement?
Parce que les importations de fils et de tissus
de lin belges en Françe avaient diminué mal
gré le tarif différentiel dont elles jouissaient.
Que ces importations aient décru, cela est
incontestable. Mais , ce qui ne l'est pas
moins, c'est qu'elles auraient décru dans
une proportion bien plus forte, si les fils et
les tissus belges n'eusses t été reçus à un
aroit moitié moindre que celui qui pesai t sur
les fils et les tissus anglais. La meilleure
preuve que nous puissions en .donner j
ce sont {es réclamations élevées en ce mo
ment même par; les Flandres belges contre le
relèvement du tarif; qui a suivi l'expiration
du traité de 1845, et qui menacé de les pri- '
ver entièrement du débouché' français,
Mais ce que le gouvernement dé Bruxelles
aurait dû surtout ne pas perdre dé vue,
c'est que toutes les faveurs accordées "par la
France à la Belgique ne figuraient pas dans lé
traité de 1845. Nousrîne demandions que 1S e.
par quintal à ses houilles, tandis que nous
en demandions KO aux houilles anglaises im
portées par le littoral de la Manche. Nous ne
Riisitffis payer que 4 fr. à segmentes, tan—
'dil que nous soumettions les fontes anglai
ses à un droit de 7 fr. C'étaient là, ce nous
semble, des avantages assez considérables
pour compenser, et au-delà, le prétendu tort
que la Belgique aurait éprouvé par suite du
renouvellement du traite de 1845.
La Belgique à voulu tout à la fois repous
ser le traité de 1845 et conserverjes faveurs
que nous accordions à ses produits miné
raux. C'est ce qui n'a pas semblé possible
au gouvernement français. Nous étions, en
effet, dans une situation que nous ne pou
vions guère accepter.
Voici quelle était cette situation ;
D'une part, la Belgique, après avoir retiré
les droits de f iveur à nos vins et à nos soie
ries, n&conticuaitpa's moins à en faire jouir -s
les- soieries et les vins du Zollverein, qui
étaient ainsi protégés à riqs dépens.
D'autre part, tandis que la Belgique re-
pous-ait nos vins et nos soieries pour ceux
du Zollverein, la France se trouvait mainte
nir un traitement de faveur à ses houilles et
à ses font*s.
Ce simple rapprochement suffit pour ex
pliquer la conduite du gouvernement fran- :
çais. Il a dit tout simplement à la Belgique : .
Faveur pour faveur ; renouvelez le traite de
1845, ou, sinon, Ja France vous retirerai es:
avantages qu'il accorde à vos houilles et à vos
fontes. La Belgique n'a-pas voulu renouveler
le traité de 1845, ou.du moi«s elle a voulu
se faire acheter le renouvellement par de
nouvelles concessions, et le gouvernement
français a élevé alors les droits sur les houil
les et les fontes belges, sans cependant les
porter niveau des droits que paient les
produits*"similaires anglais.
Tels sont les faits qui ressortent de l'arti
cle semi-officiel publié par l'Indépendance-, ils
donnent complètement raison à ltf mesure
prise par le gouvernement français.
J. B urvt.
.On lit dans le Moniteur belge :
« Un décret du prince-Président de la Républi
que française vient d'élever les droits sur les
houilles et les fontes entrant en France par la
frontière belge.
s En signant le traité du 22 août dernier, le
gouvernement belge était loin de s'attendre à ce
qu'une mesure de cet'.e nature succéderait de si
près à un arrangement qui, d'après les termes
mêmes de son préambule, devait assurer et con
solider h maintien des bons rapparts existons en
tre les deux pays.
» Les chambres législatives belges'se réuniront
dans quelques jours. En leur rendant compte de
l'ensemble des négociations; le gouvernement leur
fera connaître la ligne de conduite % qu'il a suivie
en présence des exigences produites "en dernier
lieu. »
L'Indépendance, en reproduisant la note
du Moniteur belge, l'accompagne de l'article
suivant :
« Au contenu de la note du Moniteur, nous pou
vons joindre les explications suivantes. Nous avons
.tout lieu de croire entièrement exacts les faits que
nous allons mettre sous les yeox de nos lecteurs.
. » La convention du 13 décembre 1845 avait,
comme on sait, son terme fixé au 10 août 1852.
Dès le commencement de l'année. 1831, le gouver
nement belge ouvrit des pourparlers avec le gou-
'«rnem. nt français pour la conclusion d'un nou-
•vel arrangement commercial ; il posait comme
po'iiït de départ que, -si les bases de la convention
de i8io devaient être réprises, une compensation
était due à la Belgique, à féum de la diminution
notable survenue dans les importations de fils et
tissus de lin belges en France, diminution qui
contrastait avec l'accroissement considérable que
présentait l'importation en Belgique des pro
duits français auxquels la convention assur.iit
des droits de fateur; le gouvernement ^deman
dait que cette compensation fût accordée de
préférence à l'indùttrie bnière même, au mo.yen,
entre autres, d'une nouvelle réduction de droits;
il exprimait le v désir formel que la convention
à intervenir garantît d'une manière expresse
lè m sintien «lu tarif français pour les houilles et
les fontes belges ; enfin, et sans parier d'autres
points moins importans, le gouvernement se dé
clarait prêt à accéder au vœu, souvent manifesté,
du cabinet de Paris, quant à la reconnaissance in
ternationale de la propriété littéraire èt artistique,
si, d'ailleurs, l'arrangement projeté devait offrir à
la Belgique un ensemble de conditions acceptables.
\ » Lés pourparlers commencés en 1851 avaient
d'abord étl engagés par écrit; ils furent continués,
à partir du mois de février 18S2, dans des confé
rences verbales. La négociation se poursuivait au
_ mois de juillet dans des conditions auxquelles les
chambres seront, pemons-nous, initiées en détail,
lorsque le 9 du même mois, les membres du ca
binet jugèrent devoir offrir leur démission au roi.
Cette démarche fut immédiatement portée à la
connaissance du gouvernement frinç|iis, auquel
on; proposa, en même temps, la prorogation de la
convention de 1845 jusqu'à la fin de l'année, afin
•que la situation' passât intacte aux mains d'un
nouvçau cabinet, et que celui-ci pût se détermi-
. ner en toute libsrté. -
» Le cabinet de Paris rejeta cette proposition,
qui résultait, en quelque sorte, de la nature des
faits, et ne semblait pouvoir rencontrer d'objec
tion ; il déclara ne vouloir admettre la prorogation,
fût-e.Ue d'un jour, que ai le gouvernement belge
consentait à la signature immédiate de la conven
tion littéraire et d'une convention de douane. Il
est à peine besoin de dire que cette combinaison
fut absolumeat repoussée.
» Plus tard, le gouvernement français se désista
de l'une de» deux conditions; lasignature immédia
te de la convention littéraire fut seule demandée.
Tout le monde comprendra que pour obtenir la
simple prorogation de la convention de 1815 pen
dant quelques mois, le gouvernement belge ne
pouvait accorder une concussion de cette impor
tance, et cela sans compensation spéciale, et sur
tout sans garantie quant à l'issue définitive des
négociations.
» Les pourparlers se prolongèrent encore pen
dant quelque temps sur le terrain de la proroga
tion, lorsque, par suite de faits qui seront portés,
sans d«ute, à la csnnaissance de la législature, le
cabinet se trouva autorisé à traiter, même d'un
arrangement définitif. Quatre combinaisons diffé
rentes furent alors presestées au gouvernement
français ; deux de ces combinaisons avaient pour
base la remise en vigueur de la convention du 13
deceiabre 184S jusqu'au 1" janvier 1853 ; les
deux autres constituaient des solutions définiti
ves. L'une reproduisait les élémens de 1a conven-
tien de 1845, sauf que la Belgique, pour com
penser la îéduction considérable de ses exportations
de produits liniers, reprenait la concession rela
tive aux lainages; elle offrait, d'un autre côté, l'a
bandon de l'industrie de la réimpression, en oiéme
teiisps qu'elle demandait une garantie pour les.
houilles. L'autre combinaison se bornait à des sti-
■ pulatieins concernant la question littéraire, avec
quelques dédominsgcmens pour la Belgique, et
««Mit former expressément le gage de la. conti
nuation des boanes relations des d. ux pays entre
eux. Le gouvernement français fut appelé à choi
sir librement entre ces quatre combinaisons dont
chacune excluait l'autre. Il se prononça pour la
quatrième, dont le caractère est suffisamment pré
cisé par ce préambule, que l'arrangement a pour
objet «.-d'assurer et de consolider le maintien des
» bons rapports existant entre les deux pays. »
» D'après la manière même dont cet accord avait
été amené, la Belgique restait complètement libre
de reprendre ou de ne pas r,prendre la négocia
tion d'un arrangement ultérieur;-dans tous les
cas, après la signature de la convention du 22
août, îa pewiés de rendre la vie à la convention du
13 décembre 1845 telle qu'elle avait été conclue,
ne pouvait plus même entrer dans les prévisions
du gouvernement belge.
» Cependant, malgré tous les motifs que devait
avoir ce dernier d'être entièrement rassuré sur
l'avenir dei relations commerciales entre les deux
pays, quinze jours s'étaient à peine écoulés depuis
la conclusion de l'arrangement du 22 août, qu'une
invitation presque comminatoire lui était adressée
de faire revivre sur-le-champ et sans modification
aucune, la cepventien de 1845, sauf, disait-on, à
ouvrir ultérieurement une négociation nouvelle.
Le gouvernement bdge était prévenu, en même
temps que, faute d'adhérer à cette sorte ^'injonc
tion, le tarif français sur les fonte» et les houilles
serait relevé.
» Nous laissons à nos lecteurs le soin d'appré
cier si celte démarche pouvait se concilier avec le
caractère de la convention du 22 août. Elle ten
dait à dépouiller la Belgique du bénéfice moral de
FEUILLETON DO CONSTITUTIONNEL, 24SEPTEMBRE
E -JL COMTJESîSIE
DE MAULÉON.'
XXIII.
w l'on pbouvb, bnb fois db plus, l'incon
vénient qu'il i a a ne pas regarder de
vant soi quand on sb promène. .
J'arrivai ainsi.à ia veille du jour désigné
sur le biilet d'invitation. En vain m'étais je
creusé le cerveau , rien ne venait ; j'y per
dais le peu de latinité qui me reste. Tantôt,
je songeais à la riise, tantôt j'inclinais vers la
violence; il y eut un moment où je méprisa
regretter les lettres de cachet. La chanoi-
nesse, de son côté, n'y allait pas moins ron
dement; elle parlait d'enlever Lucien et de
l's conduire en lieu sûr ; volontiers elle en
eût accepté la garde. Mais ces beaux plans
avortaient faute dé meyens d'exécution j ils
croulaient sous nos doigts comme des édi
fices fî-agiles. Elle et moi nous ne savions
plus qu'imaginer; nous étions vaincus et à
bout de voies. Le hasard fut plus habile ou
plus fort que nous.
La journée avançait, et déjà la nuit com
mençait à se faire lorsqu'on sonna chez moi
avec une certaine vivacité. J'ouvris ; c'était
le portier de la mai=en qu'habitait Lucien; il
vernit me dire eu toute hâte que le jeune
horume avait été blessé dans ia rue et
transporté chez lui dans un état assez aiar-
* La Hfroducti u interdite.
mant. Qu'on juge de l'effet que produisit
sur moi une nouvelle aussi inattendue 1 En
un clin-d'œil je fus prêt, et, au bout de quel-
3ues minutes, j'étais rendu dans la chambre
e Lucien et au pied de son lit. Un médecin
du voisinage s'y trouvait déjà et achevait de
tirer du brasdu patient une copieuse palette
de sang. Quoique affaibli par l'opération, Lu
cien me reconnut et me tendit la main qu'il
avait de libre; je la serrai avec une doulou
reuse émotion. J'ignorais encore si le mal
était grave et jusqu'à quelpointily avait lieu
de s'en inquiéter. Impossible, en l'état des
choses, d'interroger le docteur; il fallait se
contenter d'épier sur sa physionomie le ?en-
limsat qu'il se formait de l'état du blessé, à
mesure que les symptômes se succédaient
devant lui. Pour obtenir une opinion plus
précise, j'attendis sa sortie et l'accompagnai
jusque sur l'escalier :
— Eh bien? lui demandai-je avec une an
xiété visible.
— Eh! eh! répondit-il en secouant la tête;
il n'y arien à dire cë soir. L'hémorrhagie
intérieure est arrêtée, c'est quelque chose;
maintenant il faut voir comment le cerveau
se comportera. Veillez avec soin, et au moin
dre accident envoyez-moi chercher.
Il me quitta sur ces mots qui n'avaient
rien de rassurant. Je rentrai dans la cham
bre de Lucien, te cœur navré et l'esprit rem
pli d'alarmes. Il venait de s'assoupir; sa tête
portait sur le bras dont la veine avait été ou
verte et presqu'à la hauteur de la saignée. Il
fallutle dégager et donner au corpsune pose
plus naturelle, mettre un peu d'ordre sur le
lit, sans troubler lereposdu blessé. Je fis tout
cela moi-même, doucement, minutieuse
ment, avec des ménagemens infinis et com
me aurait pu le faire une mère. C'est que
Lucien était mon enfant adoptif, et auxsan-
goissea.doat ^étais assailli, je sentais que sa
perte me serait aussi cruelle que s'il eût été
de mon sang. Seul, je le veillai cette nuit-
là ; je ne voulus m'en remettre de ce soin à
personne. Mon regard demeurait attaché à
ce visage, où, la douleur était empreinte, et
cherchait à y lire l'approche d'accidens fâ
cheux , afin de les prévenir et de les conju
rer. Je passai de longues heures ainsi, sans
fermer l'œil ni faire un mouvement. Jamais
tâche ne fut mieux remplie ; le cœur y ai
dait.
Mais dans Je cours de cette longue veille,
que de réflexions vinrent m'assiéger ! Com
ment Lucien en était-il là? Par quelle cir
constance imprévue reposait-il sur ce lit de
souffrance? Quelles étaient les causes de l'évé
nement? Sauple, alerte comme on l'est à son
âge, il avait fallu un bien grand concours
de fatalités pour qu'il en pût être victime.
Telles étaient les questions que ma curiosité
se posait et aùxquedes je n'obtins de répon
se que plus tard. Voici comment les choses
s'étaient passées.
Le matin même, Lucien était sorli, afin
de poursuivre, du côté où l'entraînait son
penchant, le cours de ses stations habituel
les. C'était un dimanche, c'est-à-dire un jour
de libres allures, où chacun appartient au
bonheur préféré et au délassement favori.
Le soleil brillait dans le ciel ; les rues étaient
encombrées de monde. Notre amoureux
marchait lentement; il foulait le pavé d'un
pas distrait et en homme qui poursuit avec
son cœur un doux et interminable entretien.
Il songeait au lendemain, à ce lendemain
qu'il avait tant cherché, tant désiré, et, au
moment d'y atteindre, il se sentait pris d'un
profond découragement. Qui le sait? Peut-
être y trouverait-il la fin d'un rêve qui lui
était cher? Adieu les illusions et les joies
sans trouble d'un amour à distance ! Et si,
de près, il n'sllait recueillir ejue des mé
comptes! Si ces beaux songes, entrée par
la porte d'ivoire, allaient tout à coup s'éva
nouir ! Lucien n'y arrêtait sa pensée qu'avec
un certain effroi.
Ce fut sous l'empire de ce sentiment qu'il
arriva devant l'hôtel de la comtesse. Il vou
lait goûter une dernière fois le bonheur
d'une discrète contemplation, la voir sans eu
être vu, la suivre du regard dans le brillant
équipage qui" l'emportait. Cette attente fut
. d'abord trompée. Il eut beau interroger la
façade, les croisées, l'entrée, la cour inté
rieure, il ne lui arriva de réponse d'aucun
côté ; l'entrée et k cour étaient désertes, les'
croisées fermée?, la façade muette. Partout
le vide et le néant, le silence et la solitude.
Lucien ne se rebuta pas; il avait le gîte sous
la main, tôt ou tard le gibier y paraîtrait;
ce n'était qu'une affaire de patience, et
il en avait de vastes approvisionnemens.
Il poursuivit donc sa promenade ordinaire
en long ou en large, en droite ligne ou en
zig-zag, s'arrêtant devant une affiche qu'il
avait lue deux cents fuis, profitant avec art.
des moindres diversions, des exercices d'un
j'oueur d'orgue ou des gambades d'un sapa
jou, changeant d'allures suivant les rencon
tres, déroutant enfin de son mieux ce que sa
présence invétérée pouvait avoir de suspect.
L'épreuve fut rude ce jour-là; elle se pro
longea durant trois mortelles heures, Lu
cien les offrit à la comtesse comnie un der
nier holocauste déposé sur le senil du temple
et à.la veille d'y entrer. Cependant il y eut
un moment où il s'avoua vaincu; soit lassi
tude, soit pudeur,- il allait quitter la place.
Seulement, en homme-qui renonce mal
gré lui et se rattache à un espoir fugi
tif, it ne se retirait qu'à reculons et en
jetant çà et là un coup-d'oeil suprême et
presque désespéré. Sans doute il eût poussé
cet effort jusqu'au bout et coatinué cette
de* arrangement, tandis que la France conservait
sa conquête, et nous replaçait devant l'inconnu
d'une négociation nouvelle. La proposition du
gouvernement français, abstraction faite de ces
vices intrinsèques, portait d'ailleurs atteinte à
notre pacte fondamental, qui n'attribue pas au
gouvernement le pouvoir de mettre ou de remet
tre en vigueur les traités de commerce fans le con
cours "de la législature. Le cabinet rejeta, ea con
séquence, pour tous ces motifs, la proposition qui
lui était faite. ;
» Youlant, néanmoins, persévérer dans la voie
de conciliation qu'il avait toujours suivie, et
quoique dégagé de toute obligation, il offrit de
signer, dans les vingt-quatre heures, une conven
tion sur les bases de la troisième combinaison,
dont nous ayons parlé plus haut. Mais le gouver
nement français, maintenant sa proposition, refusa
même de discuter tout ce qui s'en écartait ; seule
ment il ne demanda plus que le gouvernement
belge se passât du concours des chambres, mai* il
exigea que celles-ci fussent convoquées à bref
dél-ji et qu'elles prissent sans retard un parti. En
présence de semblables exigénees, le gouvernement
belge ne put, de son côte, que se référer à ses
résolutions antérieures. C'est dans ces circonstan
ces qu'est intervenu le décret publié par le Moni
teur wiiversel dû 21 septembre.
» Nous venons d'exposer simplement les faits ;
nous aurons l'occasion, dans un prochain article,
d'examiner les motifs sur lesquels la note publiée
par le journal officiel français base cette mesure
d'hostilité gratuite, en désaccord si complet avec
la lettre et l'esprit de la convention du 22 août. »
VOYAGE DU PRINCE-PRÉSIDENT,
dépêches officielles.
Lyon, le 22 septembre 1852, à trois
heures et demie.
j 'ai l'honneur de vous transmettre les nouvelles
que je reçois à l'instant de Grenoble ; elles sont
extraites d'une très longue correspondance de la
quelle il résulte que la réception faite à Son Al-
•tesse impériale est vraiment magnifique.
Ci-après l'extrait du journal :
« L'aspect de Grenoble est des plus animés. On
» a déserté les villages et les montagnes, de vingt
» lieues à la ronde, pour descendre dans la ville que
» le prince-Président va honorer de saprésence. Les
» fenêtres sont pavoisées ; les emblèmes impériaux
» brillent sur .tous les points ; d'immenses trans-
» psrens portent les inscriptions suivantes : Vive
» Napoléon III! Vive l'Empereur! A l'Empire,
» Grenoble fut toujours fidèle! Al' Etnpereurl 7 mars
» 1815! A Napoléon III l son immortel 2 décem-
n trel Vive l'Empereur Napoléon Il\ Napo-
v léon llV.
i,! Les marchés sont, décorés avec un goût exqu s,
» et les dames de la halle y ont placé, au milieu
» de guirlandes de verdure, des médaillons où on
» lit : Vive le sauveur de la France !
» Des arcs de. triomphe sont élevés de toutes
» parts; des préparatifs multipliés annoncent une
» illumination brillante qui doit être complétée
» demain par l'éclairage simultané de tous les pics
» des montagnes qwi dominent Grenoble. On cite
» la commune de Laffrey qui doit consacrer à son
» fèu quatre mille fagots.
» Cette commune est celle où l'Empereur fit
» tomber les armes des troupes envoyées à sa
» rencontre, en leur disant : Mes enfans, ne re-
v connaissez-vous pas votre Empereur? » _
»; J'écris ces lignes avant l'arrivée du prince;
» mais il e«t facile de pressentir que l'ovation se-
» ra complète.
» A fix heures précises, le prince, au-devant
m > duquel M. Bérard, pré!et de l'Isère, était allé
» jusqu'à fa limite du département, entrait à Gre-
» noble, au milieu d'une foule innombrable. H a
» été reçu à la porte de France par M. Arnaud,
» maire, qui lui a présenté les clés de la ville. Les
» cris de Vive l'Empereur ! ont éclaté aussitôt, et
» n'ont pas cessé de retentir sur tout le chemin
» que le prince a parcouru pour se rendie à l'hô-
» tel dî la préfecture.
» Ce n'est que demain que S. A. recevra.
» L'accueil ti unanimement enthousiaste qui vient
» de lui être fait permet de présager pour demain
» une des plus belles journées d'un voyage où les
» belles journées se succèdent. »
Lyon, 23 septembre 1852, 7 b. 47 m.
Grenoble ,-22 septembre, 7 h. du matin.
Les populations rurales accourent en foule de
tous ks points du département pour assister à là
grande revue qui aura lieu à midi à l'Hippodro
me. De tous côtés on entend le tambour, et des
communes entières entrent dans la ville le dra
peau en tête , conduites par leur municipalité.
Une animation extraordinaire règne dans tous les
quartiers. Les rués que doit traverser le prinee
sont pavoisée3 et décorées. Tout présage une jour
née magnifique. S. A. jouit d'une santé parfaite.
manœuvre, si au confluent de deux rues il
n'eût reçu un choc violent qui le renversa sur
le pavé. C'était une voiture qui débouchait
à toute vitesse et dont les chevaux n'avaient
nlgndue
possible de s'en défendre; aussi fut-il frappé
par le timon comme on est frappé par la
foudre, instantanément.
A cet-accident imprévu, un cri sortit de la
voiture, et une femme en descendit pour al
ler au secours du blessé.D'un autre côté, les
passans accouraient et formaient déjà autour
dedui un cercle plus embarrassant qu'offi
cieux et où la curiosité l'emportait sur la
compassion. La maîtresse de l'équipage y
mit ordre sans retard ; sur un mot d'elle,
ses gens portèrent Lucien dans sa voiture qùi
s'éloigna tout aussitôt. Le - jeune homme
était évanoui 'et ne recouvra ses sens qu'au
mouvement des ressorts et après quelques
tours de roue. L'ouïe fut la première a se
réveiller, et il put entendre une conversation
engagée à ses côtés.
— Si, au moins, nous savions où le re
conduire! disait une voix de femme.
— Comtesse, dit une autre voix, je le re
connais, c'est le jeune Mérmval que je de
vais vous présenter demain.
— Donnez alors son adresse au cocher,
nous le ramènerons chez lui, reprit la pre
mière voix.
Le hasard avait servi Lucien, même dans
son malheur. C'était l'équipage de la com
tesse qui l'avait jeté sur le pavé, «t il se trou
vait assis près d'elle et en face de Triuuchon.
Cette perception fugitive fut la srule qu'il
put recueillir ; elle suffit pour lui faire per
dre de nouveau le sentiment. Il n'était pas
en état de résister à une émotion si grande.
Envainessaya-t -il d'ouvrir lesyeux ; la force
Lyon, 23 septembre, 7 h. du matin.
Grenoble, 22 septembre, 3 h. du toir.
La revue de la population rurale passée au po
lygone a été magnifique et favorisée par le beau
temps. Toute la ville y assistait. Les communes
avaient formé^ un contingent que l'on ne peut
évaluer à moins de 45 à 50,000 aines. S. A: est
rentrée par la porte de Beaune, où U population,
rangée sur son passage, lui a fait l'ovation.la plus
éclatante et la plus spontanée. Des arcs de triom;-
-phe, -des bouquets de verdure, ornaient toutes lês
rues que le prince devait traverser. Les»eris de
Vive VEmpereur! nlpnt cessé de retentir avec urçe
force croissante. L'enthousiasme règne partout.
Lyon, 23 septembre, 9 heures/
Grenoble, 2;2 septembre, 7 heures du soir.
Le prince est morté dans l'après-midi au fort
B-rot et au fort de la Bastille, qu'il a successivé-
ment visités dans le plus grand détail. En descen-
, dant, le prince est entré à l'improviste dans le
quartier Saint-Laurent, habité en presque totalité-
parlés ouvriers de Grenoble; il a été reçu avec
un enthousiasme indicible, et littéralement cou
vert de fleurs par des femmes d'ouvriers, bien que
rieh n'eût annoncé sa venue, à laquelle personne
n'était préparé et que rien n'eût étédisposé pour Iç
recevoir.
Les illuminations commencent dans la ville. Le
temps est magnifique ; tout présage que les illu
minations des montagnes donneront à S. A. un
spectacle digne d'elle, et digne de cé beau pays,
qui vient de manifester d'une manière si éclatante
les pathétiques sentimens dont il est animé.
Lyon, 23 septembre, 9 h. 1/4. .
Grenoble, 22 septembre.
Le prince vient de rentrer après avoir passé la
revue des troupes, et vu défiler devant lui une
quantité, immense de population, dont l'enthou-
s asme est très grand. Il est impossible # de ne pas
se sentir profondément ému devant l'accueil ad
mirable que le Dauphiné vient, de faire au prince.
La santé de S. A. est parfaite.
A Rive-de-Gier, le prince-Président s'e3t porté
seul, sans escorte, au milieu ds 10,000 ouvriers
rassemblés pour le fêter. Sa présence parmi eux,
sa confiance, sa noble simplicité, ont excité les
plus vifs transports d'enthousiasme. (Moniteur.)
L'empre3sement pour accueillir le prince et les
personnes qui devaient l'accompagner s'est mani
festé à Lyon de la manière la plus significative.
Les premiers négocians et fabricans, les habitans
les plus notables se sont rendus, plusieurs jours à
l'avance, à l'Hôtel-de-Ville, pour mettre leurs mai
sons à la disposition des personnes qui accompa
gnaient le prince, et des étrangers de distinction
qu'on attendait à Lyon. (Idem.)
Lorsque le prince-Président s'e»t rendu au pa
lais de l'archevêché de Lyon, pour y assister au
spectacle des régates sur la Saône, Mgr le cardinal
de Bonald lui a fait les honneurs de sa résidence
avec une urbanité aussi digne qu'empressée. S.
Em. a conduit le prince dans la chambre où l'Em
pereur Napoléon a -couché en 1815, qui 'n'a subi
aucun changement, où personne n'a habité de
puis, et Mgr de Bonald, en introduisant Je prince
dans cette chambre, n'a pu se défendre d'une vive
émolion, que tous les assiitans ont partagée.
Daris la soirée, le prince a quiité le bal vers dix
heures et demie, et est resté, pendant long-temps
en conférence avec M Paléocapa, ministre des tra
vaux publics du roi de Piémont. (Idem.)
Y oèqx des Conseils d'arrondissemesî.
Le Moniteur ajoute aux vœux des conseils
d'arrondissement que nous avons déjà fait
connaître, ceux des conseils du Mans, de
B -auvais, de Clermont (Oise), de Senlis, de
Compiègne, de Dinan r de Montmorilion, de
Brest, de Besançon, de Beaune, de Saint-
Brieuc, de Chinon, de Louviers, de Nogent-
sur-Seine, de Gray, de Fontainebleau, de
Pitliiviers, d'Alençon, de Civray, de Wiss"m-
bourg, de Baume, Montbéliard, Laon et Ver-
vins.
Nous ajouterons que notre correspon
dance nous apporte ce matin le vœu du con
seil de Mende.
Toutes ces adresses demandent la conso
lidation du pouvoir sur la tète du prince-
Président.
a Prince, dit le conseil du Mans (dont le
vœu figure ce matin le premier dans le Mo
niteur), achevez l'œuvre que vous avez si
courageusement entreprise ; que la Républi
que, ce symbole de nos discordes civiles et
manqua à ses paupières; il voulut parler, sa
voiX Je trahit : ce double effort n'aboutit qu'à
le plonger dans un anéantissement plus pro
fond. Jamais il ne sut bien ce qui s'étaitpassé
depuis ce moment j usqu'à celui où il se re
trouva dans sa chambre, étendu sur en lit
et eir face d'un homme de l'art qui avait une
main sur son pouls et agitait une lancette
de l'autre. C'était trop de secousses à la fois;
il se crut le jouet d'une vision et éprouva
uue nouvelle syncope.
XXIV.
ou l'on verra que ia chanoine8se joue de
malheur. — le grand pas est franuhi.
Pendant le cours de la nuit, il ne me sem
bla pas que la situation de Lucien .tendît
à empirer : en apparence il était calme^ et
n'exhalait des plaintes que de loin en loin,
et quand il essayait de changer de position.
Mais, vers le matin, il survint dans son état
une aggravation évidente ; la tête s'engagea
et l'abattement s'en suivit. Le médecin n'hé
sita pas : il eut encore recours à des moyens
énergiques. La force du patient, sa jeunesse,
sa robuste "constitution en conseillaient l'em
ploi; d'ailleurs, on combattait ainsi les deux
principes de destruction qu'il portait dans
son sein, les blessures du corps et celles de
l'ame. Vis-à-vis des unes et des autres, il fal-*
lait agir vigoureusement.
Ponr seconder les efforts de l'art, j'eu§ le
soin d'écarter du chevet du malade tout ce
qui pouvait réveiller chez lui des émotions
trop vives Ainsi il ne sut rien des témoi
gnages d'intérêt que lui donna la comtesse
de Miuléan pendant tout le temps.que ooa
état offrit quelque danger. Plusieurs fois par
jour elle envoyait prendre des nouvelle»,
et non contente d'être ainsi tenue au
* • -
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