Titre : Le Constitutionnel : journal du commerce, politique et littéraire
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1852-04-03
Contributeur : Véron, Louis (1798-1867). Rédacteur
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Description : 03 avril 1852 03 avril 1852
Description : 1852/04/03 (Numéro 94). 1852/04/03 (Numéro 94).
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Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/02/2011
NUMÉRO 94.
V Pne de f r àt&ia pPalals^Ûoj'ttl), n. 10,
1852. - SAMEDI 3 AVRIL.
PRIX B6 JVABONHIWMrf
mis J3 F, PAS nmpsTBf;
PÉPARTEMENS. 16 F. . —
•'"BU NUMÉRO : SrboH les pats ktkakge&s, se reporte»
■a jtâbjeauqui serapïibMdâûslS jouraaV
Imûo. et t& de chaque pais.
Lit abotpmnens datçnidet 1 er et ta
• • 'de chaque mot*.
JOURNAL POUTIQIJI* LITTERAIRE,
S'adresser } franco, pour ia rédaction^ à.M. GtiCHEVAirClAïiiGNY, rédacteur tn chef,
; Les articles déposés na sobt'pw ïSfcdiuU .
On ïafotme, dans-Jet
PARIS, 2 AVR1L.
i dép jrtenuns, aux Messageries et ma Oireçtùm* de pistel-^-A Londres, eïftç
■ — A Strasbourgïchez M.' ftuâijlDHi, four l'AîlemaaM.. ; o. )
1 J " j U "'g' ' l 1 '"'. • , "'- J > f, - ■' ' - ' • - TV
Delà déportation des Conda&ûfts. :
' v i.. . ' • . >
Parmi les mesures quWbpt été prises, par
Louis-Napoléon esn vertu de 'sesïpoyyoir ex
traordinaires, il en est une qui a été accueil
lie par l'approbation da tous les partis : c'est
celle qui a appliqué aux habitans des bagnes
la„déportaùûn effective. Cetteréformë, depuis
si long-temps réclamée par l'opinion publi
que, eût été peut-rêtre indéfiniment ajournée
sans l'initiative puissante du Président de
la République, qui a pu faire par un dé
cret ce que tant de législatures successives
n'avaient su menpr à fin. On sait, d'ailleurs,
avec quelle prudence k gouvernement a pro
cédé. Pour ne pas donner à la peinenouvelle
un effet rétroactif, on a fait appel à la bonne
volonté des condamnés eux-mêmes. Des re
gistres .ont été ouverts pour recueillir l'adhé
sion de ceux qui consentent à entrer dans les
cadres de la colonisation pénitentiaire. En
quelques jours ces registres ont-été couverts
de si gnatures. L'administratiSn peut donc,
dès à présent, essayer sur une large échelle
1^ réforme décrétée par- le Président de la
République. Plusieurs milliers de forçats se
sent mis volontairement à sa disposition.
v Voilà pour le passé. Quant à l'avenir, une
loi sera proposée très incessamment au corps
législatif. - Si-nous, se nous trompons .,
cette loi se contente de décider que doréna
vant, les condamnés aux travaux forcés subi
ront leur peine dans des établissemens pé
nitenciers, sans toucher à l'économie géné
rale du Code, et en laissant au gouvernement
le soin de déterminer le lieu de la déporta
tion, et de faise les règlemens nécessaires.
La loi en outre dispense, dit-on, de la dé
portation effective les condamnés parve
nus à l'âge de soixante ans. On a pensé qu'à
cet âge l'acclimatement leur serait difficile,
et qu'ils ne pourraient être employés avec
fruit à des travaux agricoles. Cette loi d'ail
leurs ne constituera, qu'un état transitoire,
qui cessera quand la réforme pénitentiaire
aura pris tous les développemens qu'elle
comporte et qui sont en germe dans le dé
cret de Louis-Napoléon.
. En-effet, pour quel'amélioration soit com- ■
plète; il faut que non-seulement les con
damnés aux travaux forcés^ mais encore les
réclusionnaires, et, s'il est possiblé d'aller
jusque-là, les récidivistes,soient atteints par
la déportation/C'est le seul moyen de pur
ger la société d'élémens iinpurs qui y entre
tiennent le trouble et le désordre, de rom
pre les redoutables associations des malfai-
"teurs, tout en ouvrant aux condamnés une
porte vers une meilleure existence. Nous sa
vons que k gouvernement est résolu à aller
jusqu'au bout dans celte voie excellente^ il a
déjà -décidé que de» établissemens corree-
tionhèls seraient fondés prochainement'en
Algérie, pour soustraire à la contagion du
mal la population des jeunes-détenus, parmi
lesquels se recrutent si souvent, dans l'état
actuel des choses, les criminels les plus dan
gereux et les plus endurcis.. ,,
Cette situation donne beaucoup d'à-propos
à tous les travaux qui se rattachent à la ré
forme pénitentiaire. A ce titre, nous avons
lu avec intérêt et avec fruit, le rapport que
M. Louis Perrot, inspecteur général des pri
sons, vient d'adresser à M. le ministre de
l'intérieur; M. Loui9.Perrot avait- reçu, avant
le 2 décembre, la mission 'de se gendre en
• Corse et en Algérie, pour y étudier les di
verses questions relatives au transfèrement
dans ces deux contrées - des condamnés cri
minels et correctionnels. Une -double rai
son motivait cette mission. D'une part',
la proposition de MM. Boinvilliers et
Dunetit - Thouars avait posé devant l'As
semblée législative la.question de la tr^ns-
porlalion effective. De-l'autre, un- rapport
de la commisèip»-d'assistance ^ publique, '
qui, jplus tard, est devenu la loi du 5 août
-1851, relative à l'éducation, et ^\t patronage
4es jeunes détenus^ avaitposé en_prtacipe
ja formation en'Algérie et en- Corse d'éta-
blissemeqs correctionnels.' H était des'lors
utile raient être fondées ces colonies péniten
tiaires , à quelles dépenses • elles entraî
neraient ,■ de quels élémens devait se com
poser leur personnel
Le premier fait à connaître, c'est le nom
bre des condamnés transportables.'Il est cer
tain d'abord que la déportation effective de
vra surtout s'appliquer £ux détenus du sexe
masculin. Onpourra sans doute,si l'on veut,
•employer un certain nombre de femmes
condamnées dans les fermes pénitentiaires,
si l'on vient à en créer. Mais de prime abord
on ne comprend guère,commele ditM. PerrQt,
dans * son rapport, qu'on pû organiser des
pénitenciers agricoles de femmes. ,1\ serait
plus facile de les fonder en France qu'ail
leurs. C'est donc dans les bagnes,et plus tard
dans les maisons centrales, qu'il faut cher-,
cher les«moyeni d« peupler les établisse
mens pénitentiaires.
; Or, d'après les statistiques de la marine
pour 1847, les bagnes renfermaient en 1847
7,953 condamnés. Les forçats, comme on
sait, ne travaillent que jusqu'à soixante-dix
ans. Passé xet âge ils sonttkyisférés dansles
maisons centrales. D'ailleurs, après l'âge de
soixante ans, il est impossible de songer à
appliquer à un homme la mesure de la dé
portation. Les différentes défalcations des
hommes non valides, des sexagénaires, etc.,'
réduisent le personnel des bagnes à 7,530 in
dividus, parmi lesquels on compte 4,611
condamnés, nés dans les campagnes, et par
conséquent éminemment propres aux tra
vaux agricoles. Voilà de quels élémens se
composeront les premiers établissemens péni
tenciers, avec cette réserve, toutefois, que le
consentement des forçats est nécessaire pour
que la mesure de la transportation leur soit
appliquée. Lorsqu'on voudra étgndre cette
mesure aux réclusionnaires, on se trouvera
en fece d'un personnel beaucoup moins nom
breux. D'après, M. Per/ot, on compte -3,306
individus disponibles pour les étaWissemens
pénitenciers. Enfin, les condamnés correc
tionnels valides sont au nombre de 9,070. :
On sait que la Guyane française a été dési
gnée pour la déportation des forçais. Quant
aux établissemens correctionnels qui vont
s'élever en Algérie^ les emplacemens ont été
déjà désignés par l'administration. Nous
croyons qu'il en est de même en Corse, où
l'agriculture doit prendre^ "phw^grandff
extension, dès que des bras suffisans pour
ront cultiver ce sol magnifique. M. Perrot
s'est livré.à l'examen minutieux des dépenses
qu'entraînerait le transport des forçats, des
réclusionnaires et des condamnés correction
nels en Algérie et en Corse. Les bases de ces
évaluations se trouvent nécessairement mo
difiées, puisque les principaux établissemens
pénitenciers doivent être créés dans la Guya
ne française, et que le calcul des dépenses,
soit- pour le transport, soit pour les cons
tructions nécessaires, soit pour l'entretien
des condamnés, ne saurait être le même.
Néanmoins des faits très concluans résul
tent des. études de M. Perrot. Il est cer
tain d'abord que le travail des . forçats
est onéreux à l'Etat. On estime que l f em-
pl*i d'ouvriers libres, au lieu des con
damnés au bagne, économiserait à l'ad
ministration plus d'un million par an. L'en
tretien des forçats coûte fort cher, puisqu'il.;
faut l'évaluer à près d'un franc par jour et
par homme. Cet entretien serait moins coû
teux dans des établissemens coloniaux. Et*
4à du moins le travail des condamnés aurait
I ! Jl*;. >'«,
p6up résultat " de léguer au puys, ay bout
fl'unf certain laps de temps, "des colonies*
finissantes, ; - • ? «»
! Celte ''considération sera» bien plus puis- r
santé,encore^ si i'ori ; coprpare les dépense$ s .
qu'oebasionérait ,là*éforme péhjtgçtiaire pai^
le-système cellulaire ou la réforme péniten.-.^
tiaire par la déportation. Leâ frais qù'entraî-
në l'encellulement des détenus est énorme.
Le rapport fait par M. Bérenger, en 1847, ;
devant la cour des pairs, constate que le taux
des frais de première mise pour l'édification
descellules s'élève au moins à trois mille francs
par chaque'détenu. C'est par conséquent une
dépense de plus de 52 millions pour jnettre
■simplement en - cellule le personnel des ba
gnes et des maisons centrales. Or, tandis que,
dans la .cellule, le détenu se livre à des tra
vaux à peu près stériles pour ltii et pour l'Etat,
et tombe peu à peu dans l'àffaissement moral
et dans la décrépitude physique, le condam
né, habitant des colonies pénitentiaires; crée
par ses labeurs une richesse-agricole, entre
lient et exerce les forces de soù corps et de
son ame, et se retrempe dans le travail et
dans la discipline. L'économie sera considé
rable, l'Etat y gagnera des colonies, le con
damné des moyens de réhabilitation et vin
avenir meilleur. La. réforme'.pénitentiaire
par la déportation, èst donc pour-le trésor,
une bonne action et une bonne affaire. \
Dans le cours de ses explorations, M: Peiy
trot a pu étudier un grand nombre d'établis-,
semens, dont l'existence peut fournir, des v
documens ufîlêy à Ta" colonisation péîiixen-
tiaire. Deux d'entre eux surtout, lui ont
paru avec raison prouver ce que le travail et
la discipli ne ont de puissance et d'efficacité.
II s'agit du monastère des trappistes à ëtaoue-
li 'et de l'orphelinat du père Brumault à Ben-
Aknoun. ,
Les trappistes se sont établis à Staoueli vers
1845. Leur concession se composait de ter
rains en friche,, placés dans des conditions
fort médiocres de salubrité. La mise en cul
ture du sol a infligé, comme loujours, de
douloureux sacrifices à ces pieux agricul
teurs. Beaucoup -de ces-religieux reposent
maintenant dans ces sillons, qu'ils ont fé-
. condés. Le résultat a été magnifique; Ces ter»
rains, désormais assainis, sont maintenant
couverts de riches cultures et d'habitations!
rurales. C'est un des plus beaux établisse
mens agricoles de l'Algérie;
A la tête de l'orphelinat de Ben-Aknoun se
trouve lepère Brumault, qui en est Je fonda
teur. Le père Brumault est uu de ces hom
mes, comme en forment les ordres religieux;
plein de zèle et de dévoûment, et doué
au plus haut degré du talent de l'administra
tion. Sa colonie, qui occupe une concession
importante- -«ax^rmrons--d ? Aîgme-317 orphelins, tous soumis à L'éducation
^agricole. Elle a été créée aussi en 1845;.
Là santé de ces jeunes colons est ad mi -
raW'év Bien nourris , bien logés , travail
lant huit heures par jour, consacrant lç «ur-
;plus deleur temps à l'instruction, à l'exèr-,
cice et auirepos, les orphelins de Ben-Aknoun
présentent l'une des plus belles créations
dont puisse s'enorgueillir la charité chré
tienne;
Sans doute, on ne peut attendre dos -ré
sultats aussi prompts; aussi avantageux avec
les élémens de population-auxquels doit s'ap
pliquer la dèportatipneffective. Seulement on
peut raisunnablément€spèrer.;què> dan»' un
petit' nombre d'années, dès horûnies robus
tes, soumis aux lois salutaires de l'obéis
sance , transformeront des. p'ays -ipenttes
en colonies florissantes,- tandis-que les hô
tes de nos prisons, sous le régime-actuel,
ne sont bons qu'à fournir des chiffres déso-
lansà la statistique des récidives, et qu'à
être, pour la société, une cause pérmanente
de désordre et de démoralisation; ;
HESBY CACVAIN.
f adresser, francoy poùrtaàvii[
«nboftees «ont reçues attturea* ^a'jonnua ;
r * i» i ï *•:
àistratùm, i M. ÛtHxm, directeur!
6fcflbe*M. PAlQS.,rig^sQ« t lft, plaça de 1$
Ori répand de nouïeau.d£s liruits dç chan
gement dë ministère. Ces. bruits n'ont pas
le moindre fondement. « (Communiqué.) r
i .-*'•* '"' r l 1 .' ^ -
v^ La liste «ivile du Présidâii.
' que sera de 12 millions.. . '•
Le Moniteur publie aujourd'hui le procès-
verbal suivant de la prestation de serment
des membres - dij conseil d'Etat :
« Aujourd'hui- 1" avril 1852, à une.heure, le
prince-Président de la République, accompagné de
ses ministres, à l'exception de M. Le Hoy de Saint-
Arnaud, ministre "de la guerre,' et de M. Bineau,"
ministre des finances, retenus r au sénat par leurs
fonctions, s'est rendu au palais du corps législatif,
où il a-été reçu par, M. le .-vice-président au con
seil d'Etat et les présidens "des sections.
. » lia été introduit dans la salle des séances, et
a pris p'ace, sur une estrade, au fauteuil du pré
sident.
» Les membres-du conseil d'Etat étaient, debout
et découve rts.
» Le prince-Présidentsuivant (nous l'avons pûtilié). •
» Après ce discours, le^ ministre d'Etat a pris les
ordres du prince-Président, et a averti les me m- -
bres du coméil d'Etat qu'ils allaient prêter, entre
les mains du prince-President, le seraient prescrit
par l'art. 14 de la Constitution.
-■ » Le ministrea donné lecturedu serment en ces
termes;
« Je jure obéissance ,à la Constitution et fidélité
» au Président de la République. »
. » Il a fait ensuite l'appel nominal. Chacun des
membres du conseil d'Etat, le vice-président ex-;
cepté, qui avait déjà prêté serment aux Tuileries;
avant la cérémonie,du 29, a,levé la main et a dit:
« Je le jure. » •
. j> Lç$ Seuls quiin'aient pas .répondu à' l'appeLont'
' été lil. Quentin Baucliard, conseiller d'Etat, qui est
en mission extraordinaire; M. Legrand, dont la
nomination n'a été'publiée qu'au Moniteur de ce
jour, et M. Lemarié, auditeur de seconde classe,
qui est absent pour cause légitime. . -
. » Le prince-Président s'est levé en disant que son
intention était de venir assister souvent aux séan
ces du conseil d'Etat. f
» M. le vice-président, au nom du conseil, lui a
adressé des remercimens respectueux.
» Le prince-Président s'est retiré avec ,ses mi
nistres. » t ■ .
Nous avons dit qu'à Bordeaux et à Mar
seille, ordre avait été donné de suspendre le
départ des prisonniers qui devaient être en
voyés en Algérie. v
La mesure n'est point particulière à ces
deux ports- Nous apprenons qu'une dépêche
télégraphique, en date du 25 mars, a pres
crit aux généraux commandant les divisions
éfc subdivisions militaires de suspendre tout
mouvement de transportation sur l'Algérie et de
faire arrêter la marche des prisonniers qui
déjà seraient en route, r
Cet ordre ne. concernait en rien les con
damnés envoyés à Cayenne.
INDES-ORIENTALES.
Nous avons parlé des nouvelles hostilités
s ; que les Anglais airaient engager dans l'Inde.
K; ordres-dflngtJtiyeriieur-
généràl sont arrivés de Bombay, prescrivant
renvoi de tous les bateaux à vapeur dispo
nibles coùtre Rangoun; on a-mis à exécuter
ces ordres une telle activité, que, le 24, deux
vapeurs, chacun de 500 chevaux, et un au-'
tre de 200 chevaux, sont partis de la baie dé
Bengale avec un- transport, également à va-
peur, pour toucher a Madras et y prendre
des troupes.
Ces bateaux seront suivis de trois autres
et l'on en tenait cinq en réserve à Calcutta.
Les troupes qui seront envoyées contre les
Birmans se composeront de quatre ou cinq
régimens indigènes, avec un bataillon d'ar
tillerie d'Europe, en tout à peu près 8,000
hommes.
Le Bombay Times, du 3 mars, donne sur
cette reprise d'hostilités les explications sui
vantes :
«Nous ayons.mentionné dans no'.re dernier nu
méro l'extrême désir qu'éprouvait le gouverneur
général d'éviter un conflit et d'accepter un ar
rangement quelconque de nature à ne pas iiuire
à notre,dignité ni à.notre sûreté, tout en rétablis
sant les relations amicales avec les Birmans. On dit
au'il a désapprouvé la confiscation du vaisseau
, ae guerre birman par le ' eommodore Lambert^ et
qu'il a offert de le rendre ; mais qu'il ! a demandé
que justice soit faite à nos négociâtes'injuriés.
Cette proposition a été reçue avec insolence, et il
.y a été fe}t répoj)se ; par^up simpU travailleur; il
«tait clair : que,tqut cela était fajt en vuçde gagner
]du temps. Le soùvèraiii,birman" n'avait aucune
jiritpntionM'accorder satisfàctlon aHx dém'àndes du
gouverneur. Celui ordonna que nos frontières les-
Iptosxprodiesrdés Birmans Tussent gardéé»et- qu'on
•fit des préparatifs contre toute ;agr «!Ssion..
Pendant que nos forces se disposaient ^ mar-
icbér contre les BLcmans, -dépêches furent en
voyées de ]pur capitale, exprimant- le désir de la
•paix. La première condition était que nou3 chan -
gérions le moyen dé communication en nommant
commissaire le major Bagle au lieu du commo-
'doré Lambert. Cette condition, blessante pour
.notre amour propre," ne devait pas avoir 3e ré
sultat, et indiquait d'ailleurs suffisamment les
; dispositions du mo'narqraennemi. Aussi, continuâ
mes-nous nos préparatifs. Notre escadre se diri
gea immédiatement sar. Rangoun et sur Marta-
ban, deux- cités établies sur la rivière, et comp-
tarn . 30,000 et 10,000 habitans ; elles seront
détruites , et étant presque entièrement cons
truites en bois, nos premiers feux, les met
tront en flammes.Nous n'avons pas letempsde faire
une campagne régulière, et si les différends ne:
sont pas complètement terminés vers le milieu de
,mai, nos forces, après avoir fait tout le mal qu'el
les auront pu, retourneront àBombay et àCalcutta
pour recommencer leurs opérations au mois d'octo
bre. Quelques-uns disent que les bateaux à vapeur
, remonteront les rivières aussi loin que l'eau leleur
permettra, et, s'il est nécessaire, ,continu«ront la
guerre sans interruption. La flotte restant dispo
nible pendant le tGmps des pluies, le gouverne
ment birman sera obligé d'indemniser les négo-
cians anglais des pertes qw'il: leur a occasionées,
de payer toutes les dépenses de la guerre, et d'ad
mettre dorénavant dans le pays un plénipotentiaire
anglais. L'indemnité exigée sera probablement une.
portion de territoire, et si là résistance se prolon
ge, il n'est pas improbable que nous n'en venions
à annexer à nos possessions celles de leurs pro
vinces qui sont à notre convenance. Ainsi com
mencera . probablement ; l'acquisition entière de
cette,' ma^nifiqiie^péninsule. Du reste,-dan^ toute,
cette affaire,- nous pourrons dire que la justice «t
le droit sont de notre côté et que nous avons agi
avec une grande modération. » >.
Voici maintenant un extrait d'une lettre
écrite par un officier anglais, à bord da
Fire-Quten, dans la rivière de Rangoun :
« Les Birmans n'ont pdint perdu de temps pour
se préparer à toute éventualité. De notre position
présente, nous avons vue sur le théâtre des évè •
nemens. La scène est entièrement changée ,- la
ville de Rangoun est détruite', les villages près de
la pagode ont disparu et nous voyons parfaite
ment le Dagon et toutes les plus petites pagodes.
Ils ont élevé maintenant" des barricades qui en
apparence entourent toute la ville neuve, et mê
me la pagode ; ils construisent d'autres barricades
le long de la rivière, près de l'emplacement de la
vieille ville, et ijs ont fait du quai principal une
batterie qu'ils_ considèrent comme très foruii la
bié, l'ayant CQnsfruffe et renforcée avec une quan
tité de grands morceaux de bois, mais nos vais
seaux démonteront bien vite tous leurs canons. »
On sait qu'il s'est fondé sur la côte d'A
frique un Etat indépendant, qui a pris Je
nom de Libérie. Le. Colonisation-Herald, de
Philadelphie, donne les informations sui
vantes au sujet du nouvel Etat :
« Le président Roberts a reçu du ministre de
Prusse à Londres, une dépêche contenant une re
connaissance formelle de la Libérie par son gou
vernement. La Libérie s'est proclamée république
indépendante en .1817. Sa souveraineté a, depuis^
été fecontlue'pa'FTa Grande-Bretagne, la France et
la Belgique ; elle vient de l'être par 'là Prusse.
Les autorités d'Angleterre ont contracté avec elle
un traité d'amitié et de commerce. Pourquoi notre
gouvernement n'en a—t—il pas fait autant? Le .lettres
ae la république de'Libérie sont des plus satisfai
santes. La législature a. commencé sa session le 1"
décembre; le 3, MM. Joseph Roberts et Anthony
D. Williaxs ont été proclamés, le premier, pré
sident, le second, vice-président, pourdeuxans. Le
même jour, les deux chambres se sont réunies pour
entendre le discours du président, qui a aussi prêté
germen t. Pour cette cérémonie importante, le pré
sident a pris la Bible et les assistans se sont levés.
Le message a ensuite été lu.»-
CHEMIN DE FER DU HAVRE.
ASSEMBLÉE DES ACTIONNAIRES.
La compagnie du Havre vient de réunir ?es ac
tionnaires en assemblée générale pour leur sou
mettre les comptes de l'exploitation pendant le se
mestre clos le 29 février dernier.
Le rapport lu au nom du conseil d'administra
tion, par M. Ad. Thibaudeau, secrétaire général
de la compagnie, constate'que les recettes se -sont
élevées^ pendant le semestre d'hiver, à 1,721,210 34
; Les dépensés à . 1,520,990 31
• Ce qui a laissé un bénéfice net de 1 200,220 03
Aucun prélèvement n?étant à effectuer, sur les
bénéfices, soit pour la réserve,-soit pour l'amor
tissement des actions avant que-celles-ci touchent
un intérêt de 5 0/0, / la répartitioo! du solde
dessus a été faita intégralement entre -tqut$s ie& -
ce qni a donne p>oar ch^une un ctividen- •
de de S fr., semblabletÀ, v Àdui< du ^eme&tre.cotm--
pootfant de l'année dersière. j -o -
} -Ce dividende sera paye'à k'caisse d& la Gcrapa.-
^Hie à pirtirdta 1" avnl 1Ç52. . - > ' ' >
! Aucune«b»ei^ationà 5 fi été faiteîsarles comptes,
qui ont été approuvés sans dçbat. Quelques explica- <
tions ont été seulement échangées entre les aetian- ;
naires et le président de l'assemblée au sujet delà gsn ■
rantie de 40/Od'ântérêt promise parlavilledu Havre, ;
à un; certain nombre d'actions souscrites .dans
cette localité et mises depuis en circulation, et ■
aussi relativement aux résultats des démarches .
faites par le conseil d'administration pour obtenir ,
du gouvernement une compensation aux sacrifices
imposés'à la compagnie par les erreurs commises >;
dans les calculs qui ont servi de base à.la conces- i
sion du chemin au Havre; :
: Quant au premier point,'il a été répondu que le i
procès intenté à la ville du Havrë, procès qui n'in- >
téresse pas la compagnie, mais seulement un cer
tain nombre de ses actionnaires, serait probabler
ment plaidé d'ici à deux mois. . : j
Pour ce qui est des démarches faites par le con
seil auprès du ministre des travaux publics pour •
obtenir une révision du contrat de concession, elles -
ont été jusqu'ici sans résultat; toutefois, on ne
désespère pas de réussir, et l'on recherchera les ••
moyens d'engager la ville >du Havre à appuyer: ces ■
démarches dont le succès l'intéresse, puisqu'il
pourrait élever les revenus des actions au moins
au taux d'intérêt qu'elle a garanti. •
s Un actionnaire a demandé s'il ne serait pas con
venable d'opérer entre la compagnie du Havre et
celle de Rouen une fusion analogue à celle qui
vient d'être autorisée entre les chemins-d'Orléans, >
du Centre, de Bordeaux et de Nantes. ?
Le président s fait obsèrver,.qu'une fusion sem- -
Mable était impossible en ce moment,- en raison de
l'état d'incertitude dans lequel on se trouvait rela
tivement à l'issue des négociations entamées au- :
près du ministre et par suite à la valeur réelle des <
aetions du Havre, qui vaudront plus;.ou moins •
suivant que les demandes de ' la- compagnie seront
accueillies ou repoussées.
La séance a été levée sans autre débat après
cette conversation.
ARGENT MAL EMPLOYÉ.
Le parlement anglais, il faut l'avouer, a une
chance bien malheureuse en tout ce qui con
cerne- la disposition, l'arrangement, l'appro- .
priation de son palais officiel. Les nouvelles
chambres du parlement, construites à si grands
frais,- nécessitent sans cesse des .remàniemens
et des amendemens nouveaux ; la salle des com
munes surtout provoque des plaintes amères, ca'r il
parait que les nobles lords s'accommodent assez
bien de la leur. C'est pitié de voir se reproduire'-
périodiquement, soit dans des articles de jour
naux, soit même dans cette enceinte législative, si
mal bâtie, la mauvaise humeur des représentans
torturés par le froid, par le chaud, par le vent,
«te., etc., grâcçà, toutes les malencontreuses com
binaisons que l'architecte semble avoir accumulées
comme,à- plaisir. La chambre des communes vient
de retentir, encore une fois de ces plaintes,. que les?
journaux, dans leur : compte-rendu, ^enregistrent
sous ce lamentable titre : "Souffrances des honora-
bles membres. • . v
Voici d'abord -lord Grosvenor qui, craignant
d'avoir des susceptibilités tout individuelles et
exceptionnelles, s'est adressé à plusieurs de ses
collègues et voisins, leur a demandé ce qu'ils
éprouvaient, et s'ils étaient affectés aussi péni
blement que lui-même. La réponse ne s'est pas.
fait attendre. Tous ces Messieurs, à peine sur
leurs sièges, ont senti un feu subit qui leur mon- -
tait à la tète; ils ont éprouvé aux tempes un
battement, douloureux; une sorte.de fievre ner
veuse s'emparait d'eux et venait les surexci-,
ter d'une façon intolérable ; ou bien ils n'a-;
vaient que la désagréable alternative de tom
ber dans la torpeur d'un sommeil apoplectique ; et
tout cela parce que la capricieuse ventilation ' or-
ganisée par l'architecte,M. Barrv, jettait dans tout
leur système vital une: horrible perturbation.
Et comme quelques membres plus jeunes, moins
attaqués par la ventilation de M. Barry, se per--
mettaient de rife, vous pouvez trouver cela plaisant,
leur a dit en toussant le' respectable lord, mais
pour mes amis et pour moi c'est chose-fjjrt sé J
rieuse.
Lord Grosvenor a, en effet,, de bonnes raisons-
d'être mécontent et de ne,pas trop compter sur deç
améliorations dans l'avenir. Les chambres neuves da,
p >rlementont déjà été bien des fois l'objet de répa
rations et de changement mais le mal n'a fait que
se,transformer,-se déplacer; il n'a pas disparu;
Tout d'abord ,la nouvelle chambre, des communes
présenta cette particularité, que; la voix-humaine
y montait avec la plus grande facilité vers les" tri
bunes supérieures, mais qu'elle n'était saisissable
pour personne sur les bancs législatifs. Si vouâ
parliez à votre voisin, il ne vous entendait pas;
Epais la galerie d'en haut pouvait recueillir toute?
vos paroles. Il fallut donc faire quelques correc
tions au premier plan. Il en résulta cet effet ca
ractéristique : deux membres assis à côté l'un de
l'autre pouvaient- -parvenir à- se parler et. à.s'eni-
tendre; mais quand un représentant s'adressait à
TED1LLET0D PU CONSTITlîTIONm, 3 AVRIL
LA VIE A REBOURS;
FREIQIER yOLQUXE. -
XI.'
UNE FACHÇUSE AFFAIBE.
Lorsqu'Armand et ses amis arrivèrent au
Ràhelagh, la fête était dans tout son éclat, la
danse dans - toutes ses ardeurs. Les jardins,
les salles cou vertes,'la pelouse regorgeaient
de curieux j il y èn avait aux jeux de bagues,
au tir à l'oiseau, dans les kiosques; au fond
des bosquets. On eût dit que la société élé
gante s'était entendue pour y venir ce soir-
là, f-t aux salùts qui s'échangeaient il était
faciie de deviner qu'on s'y trouvait en pays
de connaissances. .
Les hommes y dominaient; c'était dans 1
l'ordre et dans les habitudes du lieu ; quel
ques femmesdu monde, plus intrépides que.
les autres, avaient seules pénétré jusqu'à une^
galerie supérieure d'où l'on embrassait l'en
semble de la salle et les quadrilles des dan
seurs. Elles s'y trouvaient à l'abri des ondu- v
lations de la fonle et sous la conduite de
leurs cavaliers. Leur but était de vofr cette
Tronquette dont on leur parlait si souvent,
et de connaître le genre de mérite qui lui
avait valu en si peu de temps une notoriété
si universelle. Entre une femme qui se res
pecte, et une femme qui ne se respecte pas,;
* La reproduction est interdite.
il né saurait naître de jalousie; mais il'y rè
gne parfois un sentiment de curiosité qui
s'en rapproche par quelques points. On ne
voudrait pas imiter ces créatures ni user des
moyens qu'elles-emploient; mais on n'est
pas .fâché de savoir comment elles plaisent,
comment elles réussissent, comment elles
régnent.
La soirée suivit son cours ordinaire jus
qu'au moment où l'esclandre arriva. Tron
quette et Brindejonc venaient d'épuiser leur
répertoire et d'y ajouter un balancé, avec
des dessins entièrement inédits. C'était le
bouquet; la galerie battit efes mains ; ii ne
restait plus qu'à laisser tomber le ri'deau et
à eteindre les verres "de couleur. Déjà on y
procédait, lorsqu'un cri extraordinaire frappa
les voûtes de l'établissement. Il n'y avait pas
à s'y méprendre : Tronquette seule pouvait
en pousser de pareils ; .elle s'y était' exercée-
de bonne heure et sous la main de son père
le savetièr. Pourquoi jetail-ellë ce cri de
paon ï Elle ne s'expliqua jamais là-dessus i
avec une clarté suffisante. Il paraît néan
moins que, dans le feu du triomphe et
pressée de toute part, elle essuya un hom
mage si passionné, qu'elle crut devoir en.
prendre l'alarme. De qui venait l'insulte?
Elle p'en sut rien ou feignit de n'en rien sa
voir. Toujours esfcil qu!il s'en suivit unes
scène aflreuse. Les détails étaient bien les,
mêmes que dans la versien du docteur Raoul.
Au cri de Tronquette, Brindejonc était ac
couru; un bond l'avait porté près de sa prin
cesse. Non moins prompt, Armand survint
à son tour, et voyant cet homme en feu près
de cette femme etfarouchée, il lui avait ad-!
ministré, de confiance, un avertissement si -i
gnificatif. De là un vrai combat, une tuerie.
Brindejonc rugissait, Armand soufflait du
feu ; les amis s'engageaient des deux parts j-
on eût dit une bataille d'Homère; puis des
mots voltigeaient'^ et là :
Ah ! coquin'f — Ah 1 maroufle !— Manant!
— Manant toi-même ! —r Tiens, drôle ! —
Attrape, pjtèhard!. .
Et vingt autres aménités qu'appuyait un
vigoureux coup de poing ou un sonore.coup
de canne. Les horions et les gros mots sè se-,
raient succédé indéfiniment, si la gardlfn'é-
tait intervenue. On sépara les deux princi
paux champions ; les autres n'y mettaient
plus d'acharnements Cependant, au moment
de quitter le bal, Brindejonc échappa à ses
amis et rejoignit Courtenav : il avait pris un
air-tragique et approprié à la circonstance;
— Voici ma carte, Monsieur, lui dit-il en
lui tendant l'objet indiqué. La vôtre, s'il
vous plaît!
— Ma carte, à vous? s'écria Armand en se
contenant avec peine. A vous 'l et pourquoi?
Cela s'explique tout seul, Monsieur.
D'ailleurs, il est tard; : nous verrons demain.
Il me suffit de savoir à qui j'ai affaire.
— Vous êtes bien curieux, Monsieur Brin
dejonc; et si je refusais?
Je le saurais par d'autres, Monsieur.
— C'est juste, Monsieur Çrindejonc; eh
bien ! je vais m'exécuter de plein gré. Je me
nomme Armand Courtenay, et je n'ai que
faire devos provocations. Maintenant, passez
votre chemin. '
— Oui, Monsieur Courtenav; mais je veux
que vous sachiez bien, avant de quitter d'ici,
que j'exige une réparation; et- que si vous
me la refusiez, je saurais trouver le moyen
de vous y contraindre.
Drôle!- s'écria Armand, en levant la'
canne de nouveau.
Ses amis le continrent, et lui-même se
sentit désarmé par une réflexion '•
— Cet homme a buj dit-il»
Il ne vint pas à la pensée de notre héros
. -qu'il pût être question sérieusement d'uù
duel entre lui et M. Brindejonc. Se commet
tre avec un coryphée des bals publics, fi
donc! le suivre sur'le terrain* quelle raille
rie ! Vis-à-vis de lelles gens, le -bâtôn était
. seul de bon goût; il allait bien à leurs épau-
• les : on pouvait les rouer ou en être roué ;
ils n'étaient pas dignes de plus nobles ar
mes. Ainsi pensait- Courtenay,.et il persistait
à croire que les fumées du viiï avaient seules
inspiré à cet homme les témérités de son dé
fi. Après un sommeil de quelques heures, il
ne s'en souviendrait plus.
Cependant, le lendemain, il fallut se ren
dre à l'évidence ; deux témoins vinrent ap
porter à Armand, un cartel dans toutes les
règles de l'art. Ces*témoins avaient été choi
sis par Brindejonc avec un 'soin infini ; ils
ne devaient pas reculer d'une semelle. C'é
taient deux prévôts de salle vieillis dans l'em
ploi, et ;de beaucoup plus habiles dans le
^ maniement des armes que dans celui de la L
paxfile. Leurs commentaires furent courts ; j
"totit ce qu'ils désiraïent, c'est que l'affaire?
se vidât dans la journée mênje. Ils avaient;
des fleurets démouchetés ou des épéesdo
cotnbatj au choix des champions; en cas ( de
dissentiment, le sort en déciderait. Comme
pièces àl'apfui, l'un d'eux montra, sous sa
polonaise à brandebourgs , les armes desti-
.nées à cette rencontre ; il les garantissait éga
les de trempe et parfaites à l'emploi. ■
Armand eût voloûtiers jeté ces envoyés
par lafenêtre; cependant, ilparvint à se maî
triser. Il répondit qu'il allait mettre l'afiîtire
entre les mains de deux amis, et qu'il en agi-r;
"rait suivant leurs conseils. Il ajouta que ces
amis s'aboucheraient avec ceux de Brinde
jonc, et que, s'il y avait lieu, on passerait
au ch«ix des-armes; que, dans tous les cas',
la difficulté ne pouvait pas être vidée sur-le-
champ; et s'adressant au témoin à-lapolor
naise, il l'engagea à allèr rétablir ses engins de
guerre dans leur arsenal; ils y feraient meil
leur effet, et ne craindraient rien de la rouille.
Après ce discours, les témoins n'avaient plus
à insister; ils sortirent en témoignant de
nouveau le regret qu'on n'en pût pas décou
dre sur-le-champ; ils promirent de revenir
et de pousser de leur côté les choses avec la
plus grande vigueur.
Il fallait prendre un parti ; impossible de
se renfermer dans le dédain. Armand alla
chez le vicomte Gaston ; . le prince Wladimir
s'offrit de lui-même. A eux deux ils se char
gèrent d'éclaircir les faitSj de voir l'offensé,
de s'aboucher avec les témoins et d'arrêter
un "plan de Conduite. Jamais négociation ne
fut plus pénible ; elle se prolongea pendant
trois jours et au milieu des incident les pliis
fâcheux. En premier lieuj et avant toute
chose, il était essentiel de savoir ce que pou
vait être ce Brindejonc. Ce futsur l'oncle Sé-
verin que ce soin .retomba. Il était homme
public ef accrédité par conséquent à la pré
fecture de police; il pouvait y examiner les
dossiers et y puiser des renseignemens. On
sut ainsi que cet individu n'était pas une
fleur de 1 pfobité, on emt des ' détails sur les
carrières équivoques où il s'était'engagé dans
ses jeunes ans; on apprit qu'il avait été pré
vôt de salle d'armes avant d'être l'une des co
lonnes de la danse ehâmpêtre, on connut en-,
fin presque jour 'par jour cette existence
pleine de vicissitudes et de fluctuations. Dis
tout cela, les deux amis et l'ohcle Séverin
conclurent à l'unanimité qu'à-tout prix il
fallaitnéviter une rencontre; et s'arranger
dé telle sorte que l'affaire n'allât pas plus
loin.
Ils comptaient en cela sans jîrindejonç : ;
l'enfant de Paris se. montra intraitable. Aux
ouvertures qui lui furent faites,, il répondit
en raffiné à cheval sur. le point: d'honneur.
Son droit était formel,- entier, absolu; il était
écrit dans les livres spéciaux, et mieux encore
dans la conscience des. gèns de cœur ; la tra
dition le consacrait-aussi bien que l'expérien
ce. En effet,; quoi de plus simple ?,H avait été
offensé, on ne le niait pas. Un epup de canne
lui avait meurtri les épaules; c'était hors,doute. Les faits étaient positifs, avérés, cops-
tans. Eh bien ! comme, insulté, il demandait
une réparation et se réservait le choix des ar
mes.' Qui oserait lui contester ces deux points?
Il n'y avait pas vingt manières d'envisager la
question ; il n'y» en avait qu'une et c'était la
sienne ; tous les auteurs lui donnaient gain
de cause ; tous les hommes du métier seraient
pour lui. M. Courtenay n'avait .qu'à les coxir
sulter, Brindejonc s'en référerait à leur avist.
Ainsi tout était bien posé, bien compris,
bien en règle ;'comme offensé, il exigeait une ; *
réparation, on ne pouvait pas la lui refuser
sans lâcheté. ^
A ces motifs, qui n'étaient pas dépourvus
de solidité, Brindejonc -en ajoutait d'autres
qui étaient de la pure fanfaronnade. Pourquoi
M. Courtenay lui refuserait-il cette satisfac
tion? était-ce à cause da la différence des
rangs, du nom etde lg for tune f Mais d'abord
quand on a pwor de se commettre,, on ; n'in
sulte pas; pui^,t à y regarder de près, sa si
tuation, à lui y Brindejonc; n'était pas de cel
les qu'on pût traiter avec dédain,* elle avait sa
grandeur, son intérêt, sa noblesse, etj posé
comme il l'était, un gentilhomme pouvait s'a;
V Pne de f r àt&ia pPalals^Ûoj'ttl), n. 10,
1852. - SAMEDI 3 AVRIL.
PRIX B6 JVABONHIWMrf
mis J3 F, PAS nmpsTBf;
PÉPARTEMENS. 16 F. . —
•'"BU NUMÉRO : S
■a jtâbjeauqui serapïibMdâûslS jouraaV
Imûo. et t& de chaque pais.
Lit abotpmnens datçnidet 1 er et ta
• • 'de chaque mot*.
JOURNAL POUTIQIJI* LITTERAIRE,
S'adresser } franco, pour ia rédaction^ à.M. GtiCHEVAirClAïiiGNY, rédacteur tn chef,
; Les articles déposés na sobt'pw ïSfcdiuU .
On ïafotme, dans-Jet
PARIS, 2 AVR1L.
i dép jrtenuns, aux Messageries et ma Oireçtùm* de pistel-^-A Londres, eïftç
■ — A Strasbourgïchez M.' ftuâijlDHi, four l'AîlemaaM.. ; o. )
1 J " j U "'g' ' l 1 '"'. • , "'- J > f, - ■' ' - ' • - TV
Delà déportation des Conda&ûfts. :
' v i.. . ' • . >
Parmi les mesures quWbpt été prises, par
Louis-Napoléon esn vertu de 'sesïpoyyoir ex
traordinaires, il en est une qui a été accueil
lie par l'approbation da tous les partis : c'est
celle qui a appliqué aux habitans des bagnes
la„déportaùûn effective. Cetteréformë, depuis
si long-temps réclamée par l'opinion publi
que, eût été peut-rêtre indéfiniment ajournée
sans l'initiative puissante du Président de
la République, qui a pu faire par un dé
cret ce que tant de législatures successives
n'avaient su menpr à fin. On sait, d'ailleurs,
avec quelle prudence k gouvernement a pro
cédé. Pour ne pas donner à la peinenouvelle
un effet rétroactif, on a fait appel à la bonne
volonté des condamnés eux-mêmes. Des re
gistres .ont été ouverts pour recueillir l'adhé
sion de ceux qui consentent à entrer dans les
cadres de la colonisation pénitentiaire. En
quelques jours ces registres ont-été couverts
de si gnatures. L'administratiSn peut donc,
dès à présent, essayer sur une large échelle
1^ réforme décrétée par- le Président de la
République. Plusieurs milliers de forçats se
sent mis volontairement à sa disposition.
v Voilà pour le passé. Quant à l'avenir, une
loi sera proposée très incessamment au corps
législatif. - Si-nous, se nous trompons .,
cette loi se contente de décider que doréna
vant, les condamnés aux travaux forcés subi
ront leur peine dans des établissemens pé
nitenciers, sans toucher à l'économie géné
rale du Code, et en laissant au gouvernement
le soin de déterminer le lieu de la déporta
tion, et de faise les règlemens nécessaires.
La loi en outre dispense, dit-on, de la dé
portation effective les condamnés parve
nus à l'âge de soixante ans. On a pensé qu'à
cet âge l'acclimatement leur serait difficile,
et qu'ils ne pourraient être employés avec
fruit à des travaux agricoles. Cette loi d'ail
leurs ne constituera, qu'un état transitoire,
qui cessera quand la réforme pénitentiaire
aura pris tous les développemens qu'elle
comporte et qui sont en germe dans le dé
cret de Louis-Napoléon.
. En-effet, pour quel'amélioration soit com- ■
plète; il faut que non-seulement les con
damnés aux travaux forcés^ mais encore les
réclusionnaires, et, s'il est possiblé d'aller
jusque-là, les récidivistes,soient atteints par
la déportation/C'est le seul moyen de pur
ger la société d'élémens iinpurs qui y entre
tiennent le trouble et le désordre, de rom
pre les redoutables associations des malfai-
"teurs, tout en ouvrant aux condamnés une
porte vers une meilleure existence. Nous sa
vons que k gouvernement est résolu à aller
jusqu'au bout dans celte voie excellente^ il a
déjà -décidé que de» établissemens corree-
tionhèls seraient fondés prochainement'en
Algérie, pour soustraire à la contagion du
mal la population des jeunes-détenus, parmi
lesquels se recrutent si souvent, dans l'état
actuel des choses, les criminels les plus dan
gereux et les plus endurcis.. ,,
Cette situation donne beaucoup d'à-propos
à tous les travaux qui se rattachent à la ré
forme pénitentiaire. A ce titre, nous avons
lu avec intérêt et avec fruit, le rapport que
M. Louis Perrot, inspecteur général des pri
sons, vient d'adresser à M. le ministre de
l'intérieur; M. Loui9.Perrot avait- reçu, avant
le 2 décembre, la mission 'de se gendre en
• Corse et en Algérie, pour y étudier les di
verses questions relatives au transfèrement
dans ces deux contrées - des condamnés cri
minels et correctionnels. Une -double rai
son motivait cette mission. D'une part',
la proposition de MM. Boinvilliers et
Dunetit - Thouars avait posé devant l'As
semblée législative la.question de la tr^ns-
porlalion effective. De-l'autre, un- rapport
de la commisèip»-d'assistance ^ publique, '
qui, jplus tard, est devenu la loi du 5 août
-1851, relative à l'éducation, et ^\t patronage
4es jeunes détenus^ avaitposé en_prtacipe
ja formation en'Algérie et en- Corse d'éta-
blissemeqs correctionnels.' H était des'lors
utile
tiaires , à quelles dépenses • elles entraî
neraient ,■ de quels élémens devait se com
poser leur personnel
Le premier fait à connaître, c'est le nom
bre des condamnés transportables.'Il est cer
tain d'abord que la déportation effective de
vra surtout s'appliquer £ux détenus du sexe
masculin. Onpourra sans doute,si l'on veut,
•employer un certain nombre de femmes
condamnées dans les fermes pénitentiaires,
si l'on vient à en créer. Mais de prime abord
on ne comprend guère,commele ditM. PerrQt,
dans * son rapport, qu'on pû organiser des
pénitenciers agricoles de femmes. ,1\ serait
plus facile de les fonder en France qu'ail
leurs. C'est donc dans les bagnes,et plus tard
dans les maisons centrales, qu'il faut cher-,
cher les«moyeni d« peupler les établisse
mens pénitentiaires.
; Or, d'après les statistiques de la marine
pour 1847, les bagnes renfermaient en 1847
7,953 condamnés. Les forçats, comme on
sait, ne travaillent que jusqu'à soixante-dix
ans. Passé xet âge ils sonttkyisférés dansles
maisons centrales. D'ailleurs, après l'âge de
soixante ans, il est impossible de songer à
appliquer à un homme la mesure de la dé
portation. Les différentes défalcations des
hommes non valides, des sexagénaires, etc.,'
réduisent le personnel des bagnes à 7,530 in
dividus, parmi lesquels on compte 4,611
condamnés, nés dans les campagnes, et par
conséquent éminemment propres aux tra
vaux agricoles. Voilà de quels élémens se
composeront les premiers établissemens péni
tenciers, avec cette réserve, toutefois, que le
consentement des forçats est nécessaire pour
que la mesure de la transportation leur soit
appliquée. Lorsqu'on voudra étgndre cette
mesure aux réclusionnaires, on se trouvera
en fece d'un personnel beaucoup moins nom
breux. D'après, M. Per/ot, on compte -3,306
individus disponibles pour les étaWissemens
pénitenciers. Enfin, les condamnés correc
tionnels valides sont au nombre de 9,070. :
On sait que la Guyane française a été dési
gnée pour la déportation des forçais. Quant
aux établissemens correctionnels qui vont
s'élever en Algérie^ les emplacemens ont été
déjà désignés par l'administration. Nous
croyons qu'il en est de même en Corse, où
l'agriculture doit prendre^ "phw^grandff
extension, dès que des bras suffisans pour
ront cultiver ce sol magnifique. M. Perrot
s'est livré.à l'examen minutieux des dépenses
qu'entraînerait le transport des forçats, des
réclusionnaires et des condamnés correction
nels en Algérie et en Corse. Les bases de ces
évaluations se trouvent nécessairement mo
difiées, puisque les principaux établissemens
pénitenciers doivent être créés dans la Guya
ne française, et que le calcul des dépenses,
soit- pour le transport, soit pour les cons
tructions nécessaires, soit pour l'entretien
des condamnés, ne saurait être le même.
Néanmoins des faits très concluans résul
tent des. études de M. Perrot. Il est cer
tain d'abord que le travail des . forçats
est onéreux à l'Etat. On estime que l f em-
pl*i d'ouvriers libres, au lieu des con
damnés au bagne, économiserait à l'ad
ministration plus d'un million par an. L'en
tretien des forçats coûte fort cher, puisqu'il.;
faut l'évaluer à près d'un franc par jour et
par homme. Cet entretien serait moins coû
teux dans des établissemens coloniaux. Et*
4à du moins le travail des condamnés aurait
I ! Jl*;. >'«,
p6up résultat " de léguer au puys, ay bout
fl'unf certain laps de temps, "des colonies*
finissantes, ; - • ? «»
! Celte ''considération sera» bien plus puis- r
santé,encore^ si i'ori ; coprpare les dépense$ s .
qu'oebasionérait ,là*éforme péhjtgçtiaire pai^
le-système cellulaire ou la réforme péniten.-.^
tiaire par la déportation. Leâ frais qù'entraî-
në l'encellulement des détenus est énorme.
Le rapport fait par M. Bérenger, en 1847, ;
devant la cour des pairs, constate que le taux
des frais de première mise pour l'édification
descellules s'élève au moins à trois mille francs
par chaque'détenu. C'est par conséquent une
dépense de plus de 52 millions pour jnettre
■simplement en - cellule le personnel des ba
gnes et des maisons centrales. Or, tandis que,
dans la .cellule, le détenu se livre à des tra
vaux à peu près stériles pour ltii et pour l'Etat,
et tombe peu à peu dans l'àffaissement moral
et dans la décrépitude physique, le condam
né, habitant des colonies pénitentiaires; crée
par ses labeurs une richesse-agricole, entre
lient et exerce les forces de soù corps et de
son ame, et se retrempe dans le travail et
dans la discipline. L'économie sera considé
rable, l'Etat y gagnera des colonies, le con
damné des moyens de réhabilitation et vin
avenir meilleur. La. réforme'.pénitentiaire
par la déportation, èst donc pour-le trésor,
une bonne action et une bonne affaire. \
Dans le cours de ses explorations, M: Peiy
trot a pu étudier un grand nombre d'établis-,
semens, dont l'existence peut fournir, des v
documens ufîlêy à Ta" colonisation péîiixen-
tiaire. Deux d'entre eux surtout, lui ont
paru avec raison prouver ce que le travail et
la discipli ne ont de puissance et d'efficacité.
II s'agit du monastère des trappistes à ëtaoue-
li 'et de l'orphelinat du père Brumault à Ben-
Aknoun. ,
Les trappistes se sont établis à Staoueli vers
1845. Leur concession se composait de ter
rains en friche,, placés dans des conditions
fort médiocres de salubrité. La mise en cul
ture du sol a infligé, comme loujours, de
douloureux sacrifices à ces pieux agricul
teurs. Beaucoup -de ces-religieux reposent
maintenant dans ces sillons, qu'ils ont fé-
. condés. Le résultat a été magnifique; Ces ter»
rains, désormais assainis, sont maintenant
couverts de riches cultures et d'habitations!
rurales. C'est un des plus beaux établisse
mens agricoles de l'Algérie;
A la tête de l'orphelinat de Ben-Aknoun se
trouve lepère Brumault, qui en est Je fonda
teur. Le père Brumault est uu de ces hom
mes, comme en forment les ordres religieux;
plein de zèle et de dévoûment, et doué
au plus haut degré du talent de l'administra
tion. Sa colonie, qui occupe une concession
importante- -«ax^rmrons--d ? Aîg
^agricole. Elle a été créée aussi en 1845;.
Là santé de ces jeunes colons est ad mi -
raW'év Bien nourris , bien logés , travail
lant huit heures par jour, consacrant lç «ur-
;plus deleur temps à l'instruction, à l'exèr-,
cice et auirepos, les orphelins de Ben-Aknoun
présentent l'une des plus belles créations
dont puisse s'enorgueillir la charité chré
tienne;
Sans doute, on ne peut attendre dos -ré
sultats aussi prompts; aussi avantageux avec
les élémens de population-auxquels doit s'ap
pliquer la dèportatipneffective. Seulement on
peut raisunnablément€spèrer.;què> dan»' un
petit' nombre d'années, dès horûnies robus
tes, soumis aux lois salutaires de l'obéis
sance , transformeront des. p'ays -ipenttes
en colonies florissantes,- tandis-que les hô
tes de nos prisons, sous le régime-actuel,
ne sont bons qu'à fournir des chiffres déso-
lansà la statistique des récidives, et qu'à
être, pour la société, une cause pérmanente
de désordre et de démoralisation; ;
HESBY CACVAIN.
f adresser, francoy poùrtaàvii[
«nboftees «ont reçues attturea* ^a'jonnua ;
r * i» i ï *•:
àistratùm, i M. ÛtHxm, directeur!
6fcflbe*M. PAlQS.,rig^sQ« t lft, plaça de 1$
Ori répand de nouïeau.d£s liruits dç chan
gement dë ministère. Ces. bruits n'ont pas
le moindre fondement. « (Communiqué.) r
i .-*'•* '"' r l 1 .' ^ -
v^ La liste «ivile du Présidâii.
' que sera de 12 millions.. . '•
Le Moniteur publie aujourd'hui le procès-
verbal suivant de la prestation de serment
des membres - dij conseil d'Etat :
« Aujourd'hui- 1" avril 1852, à une.heure, le
prince-Président de la République, accompagné de
ses ministres, à l'exception de M. Le Hoy de Saint-
Arnaud, ministre "de la guerre,' et de M. Bineau,"
ministre des finances, retenus r au sénat par leurs
fonctions, s'est rendu au palais du corps législatif,
où il a-été reçu par, M. le .-vice-président au con
seil d'Etat et les présidens "des sections.
. » lia été introduit dans la salle des séances, et
a pris p'ace, sur une estrade, au fauteuil du pré
sident.
» Les membres-du conseil d'Etat étaient, debout
et découve rts.
» Le prince-Président
» Après ce discours, le^ ministre d'Etat a pris les
ordres du prince-Président, et a averti les me m- -
bres du coméil d'Etat qu'ils allaient prêter, entre
les mains du prince-President, le seraient prescrit
par l'art. 14 de la Constitution.
-■ » Le ministrea donné lecturedu serment en ces
termes;
« Je jure obéissance ,à la Constitution et fidélité
» au Président de la République. »
. » Il a fait ensuite l'appel nominal. Chacun des
membres du conseil d'Etat, le vice-président ex-;
cepté, qui avait déjà prêté serment aux Tuileries;
avant la cérémonie,du 29, a,levé la main et a dit:
« Je le jure. » •
. j> Lç$ Seuls quiin'aient pas .répondu à' l'appeLont'
' été lil. Quentin Baucliard, conseiller d'Etat, qui est
en mission extraordinaire; M. Legrand, dont la
nomination n'a été'publiée qu'au Moniteur de ce
jour, et M. Lemarié, auditeur de seconde classe,
qui est absent pour cause légitime. . -
. » Le prince-Président s'est levé en disant que son
intention était de venir assister souvent aux séan
ces du conseil d'Etat. f
» M. le vice-président, au nom du conseil, lui a
adressé des remercimens respectueux.
» Le prince-Président s'est retiré avec ,ses mi
nistres. » t ■ .
Nous avons dit qu'à Bordeaux et à Mar
seille, ordre avait été donné de suspendre le
départ des prisonniers qui devaient être en
voyés en Algérie. v
La mesure n'est point particulière à ces
deux ports- Nous apprenons qu'une dépêche
télégraphique, en date du 25 mars, a pres
crit aux généraux commandant les divisions
éfc subdivisions militaires de suspendre tout
mouvement de transportation sur l'Algérie et de
faire arrêter la marche des prisonniers qui
déjà seraient en route, r
Cet ordre ne. concernait en rien les con
damnés envoyés à Cayenne.
INDES-ORIENTALES.
Nous avons parlé des nouvelles hostilités
s ; que les Anglais airaient engager dans l'Inde.
K; ordres-dflngtJtiyeriieur-
généràl sont arrivés de Bombay, prescrivant
renvoi de tous les bateaux à vapeur dispo
nibles coùtre Rangoun; on a-mis à exécuter
ces ordres une telle activité, que, le 24, deux
vapeurs, chacun de 500 chevaux, et un au-'
tre de 200 chevaux, sont partis de la baie dé
Bengale avec un- transport, également à va-
peur, pour toucher a Madras et y prendre
des troupes.
Ces bateaux seront suivis de trois autres
et l'on en tenait cinq en réserve à Calcutta.
Les troupes qui seront envoyées contre les
Birmans se composeront de quatre ou cinq
régimens indigènes, avec un bataillon d'ar
tillerie d'Europe, en tout à peu près 8,000
hommes.
Le Bombay Times, du 3 mars, donne sur
cette reprise d'hostilités les explications sui
vantes :
«Nous ayons.mentionné dans no'.re dernier nu
méro l'extrême désir qu'éprouvait le gouverneur
général d'éviter un conflit et d'accepter un ar
rangement quelconque de nature à ne pas iiuire
à notre,dignité ni à.notre sûreté, tout en rétablis
sant les relations amicales avec les Birmans. On dit
au'il a désapprouvé la confiscation du vaisseau
, ae guerre birman par le ' eommodore Lambert^ et
qu'il a offert de le rendre ; mais qu'il ! a demandé
que justice soit faite à nos négociâtes'injuriés.
Cette proposition a été reçue avec insolence, et il
.y a été fe}t répoj)se ; par^up simpU travailleur; il
«tait clair : que,tqut cela était fajt en vuçde gagner
]du temps. Le soùvèraiii,birman" n'avait aucune
jiritpntionM'accorder satisfàctlon aHx dém'àndes du
gouverneur. Celui ordonna que nos frontières les-
Iptosxprodiesrdés Birmans Tussent gardéé»et- qu'on
•fit des préparatifs contre toute ;agr «!Ssion..
Pendant que nos forces se disposaient ^ mar-
icbér contre les BLcmans, -dépêches furent en
voyées de ]pur capitale, exprimant- le désir de la
•paix. La première condition était que nou3 chan -
gérions le moyen dé communication en nommant
commissaire le major Bagle au lieu du commo-
'doré Lambert. Cette condition, blessante pour
.notre amour propre," ne devait pas avoir 3e ré
sultat, et indiquait d'ailleurs suffisamment les
; dispositions du mo'narqraennemi. Aussi, continuâ
mes-nous nos préparatifs. Notre escadre se diri
gea immédiatement sar. Rangoun et sur Marta-
ban, deux- cités établies sur la rivière, et comp-
tarn . 30,000 et 10,000 habitans ; elles seront
détruites , et étant presque entièrement cons
truites en bois, nos premiers feux, les met
tront en flammes.Nous n'avons pas letempsde faire
une campagne régulière, et si les différends ne:
sont pas complètement terminés vers le milieu de
,mai, nos forces, après avoir fait tout le mal qu'el
les auront pu, retourneront àBombay et àCalcutta
pour recommencer leurs opérations au mois d'octo
bre. Quelques-uns disent que les bateaux à vapeur
, remonteront les rivières aussi loin que l'eau leleur
permettra, et, s'il est nécessaire, ,continu«ront la
guerre sans interruption. La flotte restant dispo
nible pendant le tGmps des pluies, le gouverne
ment birman sera obligé d'indemniser les négo-
cians anglais des pertes qw'il: leur a occasionées,
de payer toutes les dépenses de la guerre, et d'ad
mettre dorénavant dans le pays un plénipotentiaire
anglais. L'indemnité exigée sera probablement une.
portion de territoire, et si là résistance se prolon
ge, il n'est pas improbable que nous n'en venions
à annexer à nos possessions celles de leurs pro
vinces qui sont à notre convenance. Ainsi com
mencera . probablement ; l'acquisition entière de
cette,' ma^nifiqiie^péninsule. Du reste,-dan^ toute,
cette affaire,- nous pourrons dire que la justice «t
le droit sont de notre côté et que nous avons agi
avec une grande modération. » >.
Voici maintenant un extrait d'une lettre
écrite par un officier anglais, à bord da
Fire-Quten, dans la rivière de Rangoun :
« Les Birmans n'ont pdint perdu de temps pour
se préparer à toute éventualité. De notre position
présente, nous avons vue sur le théâtre des évè •
nemens. La scène est entièrement changée ,- la
ville de Rangoun est détruite', les villages près de
la pagode ont disparu et nous voyons parfaite
ment le Dagon et toutes les plus petites pagodes.
Ils ont élevé maintenant" des barricades qui en
apparence entourent toute la ville neuve, et mê
me la pagode ; ils construisent d'autres barricades
le long de la rivière, près de l'emplacement de la
vieille ville, et ijs ont fait du quai principal une
batterie qu'ils_ considèrent comme très foruii la
bié, l'ayant CQnsfruffe et renforcée avec une quan
tité de grands morceaux de bois, mais nos vais
seaux démonteront bien vite tous leurs canons. »
On sait qu'il s'est fondé sur la côte d'A
frique un Etat indépendant, qui a pris Je
nom de Libérie. Le. Colonisation-Herald, de
Philadelphie, donne les informations sui
vantes au sujet du nouvel Etat :
« Le président Roberts a reçu du ministre de
Prusse à Londres, une dépêche contenant une re
connaissance formelle de la Libérie par son gou
vernement. La Libérie s'est proclamée république
indépendante en .1817. Sa souveraineté a, depuis^
été fecontlue'pa'FTa Grande-Bretagne, la France et
la Belgique ; elle vient de l'être par 'là Prusse.
Les autorités d'Angleterre ont contracté avec elle
un traité d'amitié et de commerce. Pourquoi notre
gouvernement n'en a—t—il pas fait autant? Le .lettres
ae la république de'Libérie sont des plus satisfai
santes. La législature a. commencé sa session le 1"
décembre; le 3, MM. Joseph Roberts et Anthony
D. Williaxs ont été proclamés, le premier, pré
sident, le second, vice-président, pourdeuxans. Le
même jour, les deux chambres se sont réunies pour
entendre le discours du président, qui a aussi prêté
germen t. Pour cette cérémonie importante, le pré
sident a pris la Bible et les assistans se sont levés.
Le message a ensuite été lu.»-
CHEMIN DE FER DU HAVRE.
ASSEMBLÉE DES ACTIONNAIRES.
La compagnie du Havre vient de réunir ?es ac
tionnaires en assemblée générale pour leur sou
mettre les comptes de l'exploitation pendant le se
mestre clos le 29 février dernier.
Le rapport lu au nom du conseil d'administra
tion, par M. Ad. Thibaudeau, secrétaire général
de la compagnie, constate'que les recettes se -sont
élevées^ pendant le semestre d'hiver, à 1,721,210 34
; Les dépensés à . 1,520,990 31
• Ce qui a laissé un bénéfice net de 1 200,220 03
Aucun prélèvement n?étant à effectuer, sur les
bénéfices, soit pour la réserve,-soit pour l'amor
tissement des actions avant que-celles-ci touchent
un intérêt de 5 0/0, / la répartitioo! du solde
dessus a été faita intégralement entre -tqut$s ie& -
ce qni a donne p>oar ch^une un ctividen- •
de de S fr., semblabletÀ, v Àdui< du ^eme&tre.cotm--
pootfant de l'année dersière. j -o -
} -Ce dividende sera paye'à k'caisse d& la Gcrapa.-
^Hie à pirtirdta 1" avnl 1Ç52. . - > ' ' >
! Aucune«b»ei^ationà 5 fi été faiteîsarles comptes,
qui ont été approuvés sans dçbat. Quelques explica- <
tions ont été seulement échangées entre les aetian- ;
naires et le président de l'assemblée au sujet delà gsn ■
rantie de 40/Od'ântérêt promise parlavilledu Havre, ;
à un; certain nombre d'actions souscrites .dans
cette localité et mises depuis en circulation, et ■
aussi relativement aux résultats des démarches .
faites par le conseil d'administration pour obtenir ,
du gouvernement une compensation aux sacrifices
imposés'à la compagnie par les erreurs commises >;
dans les calculs qui ont servi de base à.la conces- i
sion du chemin au Havre; :
: Quant au premier point,'il a été répondu que le i
procès intenté à la ville du Havrë, procès qui n'in- >
téresse pas la compagnie, mais seulement un cer
tain nombre de ses actionnaires, serait probabler
ment plaidé d'ici à deux mois. . : j
Pour ce qui est des démarches faites par le con
seil auprès du ministre des travaux publics pour •
obtenir une révision du contrat de concession, elles -
ont été jusqu'ici sans résultat; toutefois, on ne
désespère pas de réussir, et l'on recherchera les ••
moyens d'engager la ville >du Havre à appuyer: ces ■
démarches dont le succès l'intéresse, puisqu'il
pourrait élever les revenus des actions au moins
au taux d'intérêt qu'elle a garanti. •
s Un actionnaire a demandé s'il ne serait pas con
venable d'opérer entre la compagnie du Havre et
celle de Rouen une fusion analogue à celle qui
vient d'être autorisée entre les chemins-d'Orléans, >
du Centre, de Bordeaux et de Nantes. ?
Le président s fait obsèrver,.qu'une fusion sem- -
Mable était impossible en ce moment,- en raison de
l'état d'incertitude dans lequel on se trouvait rela
tivement à l'issue des négociations entamées au- :
près du ministre et par suite à la valeur réelle des <
aetions du Havre, qui vaudront plus;.ou moins •
suivant que les demandes de ' la- compagnie seront
accueillies ou repoussées.
La séance a été levée sans autre débat après
cette conversation.
ARGENT MAL EMPLOYÉ.
Le parlement anglais, il faut l'avouer, a une
chance bien malheureuse en tout ce qui con
cerne- la disposition, l'arrangement, l'appro- .
priation de son palais officiel. Les nouvelles
chambres du parlement, construites à si grands
frais,- nécessitent sans cesse des .remàniemens
et des amendemens nouveaux ; la salle des com
munes surtout provoque des plaintes amères, ca'r il
parait que les nobles lords s'accommodent assez
bien de la leur. C'est pitié de voir se reproduire'-
périodiquement, soit dans des articles de jour
naux, soit même dans cette enceinte législative, si
mal bâtie, la mauvaise humeur des représentans
torturés par le froid, par le chaud, par le vent,
«te., etc., grâcçà, toutes les malencontreuses com
binaisons que l'architecte semble avoir accumulées
comme,à- plaisir. La chambre des communes vient
de retentir, encore une fois de ces plaintes,. que les?
journaux, dans leur : compte-rendu, ^enregistrent
sous ce lamentable titre : "Souffrances des honora-
bles membres. • . v
Voici d'abord -lord Grosvenor qui, craignant
d'avoir des susceptibilités tout individuelles et
exceptionnelles, s'est adressé à plusieurs de ses
collègues et voisins, leur a demandé ce qu'ils
éprouvaient, et s'ils étaient affectés aussi péni
blement que lui-même. La réponse ne s'est pas.
fait attendre. Tous ces Messieurs, à peine sur
leurs sièges, ont senti un feu subit qui leur mon- -
tait à la tète; ils ont éprouvé aux tempes un
battement, douloureux; une sorte.de fievre ner
veuse s'emparait d'eux et venait les surexci-,
ter d'une façon intolérable ; ou bien ils n'a-;
vaient que la désagréable alternative de tom
ber dans la torpeur d'un sommeil apoplectique ; et
tout cela parce que la capricieuse ventilation ' or-
ganisée par l'architecte,M. Barrv, jettait dans tout
leur système vital une: horrible perturbation.
Et comme quelques membres plus jeunes, moins
attaqués par la ventilation de M. Barry, se per--
mettaient de rife, vous pouvez trouver cela plaisant,
leur a dit en toussant le' respectable lord, mais
pour mes amis et pour moi c'est chose-fjjrt sé J
rieuse.
Lord Grosvenor a, en effet,, de bonnes raisons-
d'être mécontent et de ne,pas trop compter sur deç
améliorations dans l'avenir. Les chambres neuves da,
p >rlementont déjà été bien des fois l'objet de répa
rations et de changement mais le mal n'a fait que
se,transformer,-se déplacer; il n'a pas disparu;
Tout d'abord ,la nouvelle chambre, des communes
présenta cette particularité, que; la voix-humaine
y montait avec la plus grande facilité vers les" tri
bunes supérieures, mais qu'elle n'était saisissable
pour personne sur les bancs législatifs. Si vouâ
parliez à votre voisin, il ne vous entendait pas;
Epais la galerie d'en haut pouvait recueillir toute?
vos paroles. Il fallut donc faire quelques correc
tions au premier plan. Il en résulta cet effet ca
ractéristique : deux membres assis à côté l'un de
l'autre pouvaient- -parvenir à- se parler et. à.s'eni-
tendre; mais quand un représentant s'adressait à
TED1LLET0D PU CONSTITlîTIONm, 3 AVRIL
LA VIE A REBOURS;
FREIQIER yOLQUXE. -
XI.'
UNE FACHÇUSE AFFAIBE.
Lorsqu'Armand et ses amis arrivèrent au
Ràhelagh, la fête était dans tout son éclat, la
danse dans - toutes ses ardeurs. Les jardins,
les salles cou vertes,'la pelouse regorgeaient
de curieux j il y èn avait aux jeux de bagues,
au tir à l'oiseau, dans les kiosques; au fond
des bosquets. On eût dit que la société élé
gante s'était entendue pour y venir ce soir-
là, f-t aux salùts qui s'échangeaient il était
faciie de deviner qu'on s'y trouvait en pays
de connaissances. .
Les hommes y dominaient; c'était dans 1
l'ordre et dans les habitudes du lieu ; quel
ques femmesdu monde, plus intrépides que.
les autres, avaient seules pénétré jusqu'à une^
galerie supérieure d'où l'on embrassait l'en
semble de la salle et les quadrilles des dan
seurs. Elles s'y trouvaient à l'abri des ondu- v
lations de la fonle et sous la conduite de
leurs cavaliers. Leur but était de vofr cette
Tronquette dont on leur parlait si souvent,
et de connaître le genre de mérite qui lui
avait valu en si peu de temps une notoriété
si universelle. Entre une femme qui se res
pecte, et une femme qui ne se respecte pas,;
* La reproduction est interdite.
il né saurait naître de jalousie; mais il'y rè
gne parfois un sentiment de curiosité qui
s'en rapproche par quelques points. On ne
voudrait pas imiter ces créatures ni user des
moyens qu'elles-emploient; mais on n'est
pas .fâché de savoir comment elles plaisent,
comment elles réussissent, comment elles
régnent.
La soirée suivit son cours ordinaire jus
qu'au moment où l'esclandre arriva. Tron
quette et Brindejonc venaient d'épuiser leur
répertoire et d'y ajouter un balancé, avec
des dessins entièrement inédits. C'était le
bouquet; la galerie battit efes mains ; ii ne
restait plus qu'à laisser tomber le ri'deau et
à eteindre les verres "de couleur. Déjà on y
procédait, lorsqu'un cri extraordinaire frappa
les voûtes de l'établissement. Il n'y avait pas
à s'y méprendre : Tronquette seule pouvait
en pousser de pareils ; .elle s'y était' exercée-
de bonne heure et sous la main de son père
le savetièr. Pourquoi jetail-ellë ce cri de
paon ï Elle ne s'expliqua jamais là-dessus i
avec une clarté suffisante. Il paraît néan
moins que, dans le feu du triomphe et
pressée de toute part, elle essuya un hom
mage si passionné, qu'elle crut devoir en.
prendre l'alarme. De qui venait l'insulte?
Elle p'en sut rien ou feignit de n'en rien sa
voir. Toujours esfcil qu!il s'en suivit unes
scène aflreuse. Les détails étaient bien les,
mêmes que dans la versien du docteur Raoul.
Au cri de Tronquette, Brindejonc était ac
couru; un bond l'avait porté près de sa prin
cesse. Non moins prompt, Armand survint
à son tour, et voyant cet homme en feu près
de cette femme etfarouchée, il lui avait ad-!
ministré, de confiance, un avertissement si -i
gnificatif. De là un vrai combat, une tuerie.
Brindejonc rugissait, Armand soufflait du
feu ; les amis s'engageaient des deux parts j-
on eût dit une bataille d'Homère; puis des
mots voltigeaient'^ et là :
Ah ! coquin'f — Ah 1 maroufle !— Manant!
— Manant toi-même ! —r Tiens, drôle ! —
Attrape, pjtèhard!. .
Et vingt autres aménités qu'appuyait un
vigoureux coup de poing ou un sonore.coup
de canne. Les horions et les gros mots sè se-,
raient succédé indéfiniment, si la gardlfn'é-
tait intervenue. On sépara les deux princi
paux champions ; les autres n'y mettaient
plus d'acharnements Cependant, au moment
de quitter le bal, Brindejonc échappa à ses
amis et rejoignit Courtenav : il avait pris un
air-tragique et approprié à la circonstance;
— Voici ma carte, Monsieur, lui dit-il en
lui tendant l'objet indiqué. La vôtre, s'il
vous plaît!
— Ma carte, à vous? s'écria Armand en se
contenant avec peine. A vous 'l et pourquoi?
Cela s'explique tout seul, Monsieur.
D'ailleurs, il est tard; : nous verrons demain.
Il me suffit de savoir à qui j'ai affaire.
— Vous êtes bien curieux, Monsieur Brin
dejonc; et si je refusais?
Je le saurais par d'autres, Monsieur.
— C'est juste, Monsieur Çrindejonc; eh
bien ! je vais m'exécuter de plein gré. Je me
nomme Armand Courtenay, et je n'ai que
faire devos provocations. Maintenant, passez
votre chemin. '
— Oui, Monsieur Courtenav; mais je veux
que vous sachiez bien, avant de quitter d'ici,
que j'exige une réparation; et- que si vous
me la refusiez, je saurais trouver le moyen
de vous y contraindre.
Drôle!- s'écria Armand, en levant la'
canne de nouveau.
Ses amis le continrent, et lui-même se
sentit désarmé par une réflexion '•
— Cet homme a buj dit-il»
Il ne vint pas à la pensée de notre héros
. -qu'il pût être question sérieusement d'uù
duel entre lui et M. Brindejonc. Se commet
tre avec un coryphée des bals publics, fi
donc! le suivre sur'le terrain* quelle raille
rie ! Vis-à-vis de lelles gens, le -bâtôn était
. seul de bon goût; il allait bien à leurs épau-
• les : on pouvait les rouer ou en être roué ;
ils n'étaient pas dignes de plus nobles ar
mes. Ainsi pensait- Courtenay,.et il persistait
à croire que les fumées du viiï avaient seules
inspiré à cet homme les témérités de son dé
fi. Après un sommeil de quelques heures, il
ne s'en souviendrait plus.
Cependant, le lendemain, il fallut se ren
dre à l'évidence ; deux témoins vinrent ap
porter à Armand, un cartel dans toutes les
règles de l'art. Ces*témoins avaient été choi
sis par Brindejonc avec un 'soin infini ; ils
ne devaient pas reculer d'une semelle. C'é
taient deux prévôts de salle vieillis dans l'em
ploi, et ;de beaucoup plus habiles dans le
^ maniement des armes que dans celui de la L
paxfile. Leurs commentaires furent courts ; j
"totit ce qu'ils désiraïent, c'est que l'affaire?
se vidât dans la journée mênje. Ils avaient;
des fleurets démouchetés ou des épéesdo
cotnbatj au choix des champions; en cas ( de
dissentiment, le sort en déciderait. Comme
pièces àl'apfui, l'un d'eux montra, sous sa
polonaise à brandebourgs , les armes desti-
.nées à cette rencontre ; il les garantissait éga
les de trempe et parfaites à l'emploi. ■
Armand eût voloûtiers jeté ces envoyés
par lafenêtre; cependant, ilparvint à se maî
triser. Il répondit qu'il allait mettre l'afiîtire
entre les mains de deux amis, et qu'il en agi-r;
"rait suivant leurs conseils. Il ajouta que ces
amis s'aboucheraient avec ceux de Brinde
jonc, et que, s'il y avait lieu, on passerait
au ch«ix des-armes; que, dans tous les cas',
la difficulté ne pouvait pas être vidée sur-le-
champ; et s'adressant au témoin à-lapolor
naise, il l'engagea à allèr rétablir ses engins de
guerre dans leur arsenal; ils y feraient meil
leur effet, et ne craindraient rien de la rouille.
Après ce discours, les témoins n'avaient plus
à insister; ils sortirent en témoignant de
nouveau le regret qu'on n'en pût pas décou
dre sur-le-champ; ils promirent de revenir
et de pousser de leur côté les choses avec la
plus grande vigueur.
Il fallait prendre un parti ; impossible de
se renfermer dans le dédain. Armand alla
chez le vicomte Gaston ; . le prince Wladimir
s'offrit de lui-même. A eux deux ils se char
gèrent d'éclaircir les faitSj de voir l'offensé,
de s'aboucher avec les témoins et d'arrêter
un "plan de Conduite. Jamais négociation ne
fut plus pénible ; elle se prolongea pendant
trois jours et au milieu des incident les pliis
fâcheux. En premier lieuj et avant toute
chose, il était essentiel de savoir ce que pou
vait être ce Brindejonc. Ce futsur l'oncle Sé-
verin que ce soin .retomba. Il était homme
public ef accrédité par conséquent à la pré
fecture de police; il pouvait y examiner les
dossiers et y puiser des renseignemens. On
sut ainsi que cet individu n'était pas une
fleur de 1 pfobité, on emt des ' détails sur les
carrières équivoques où il s'était'engagé dans
ses jeunes ans; on apprit qu'il avait été pré
vôt de salle d'armes avant d'être l'une des co
lonnes de la danse ehâmpêtre, on connut en-,
fin presque jour 'par jour cette existence
pleine de vicissitudes et de fluctuations. Dis
tout cela, les deux amis et l'ohcle Séverin
conclurent à l'unanimité qu'à-tout prix il
fallaitnéviter une rencontre; et s'arranger
dé telle sorte que l'affaire n'allât pas plus
loin.
Ils comptaient en cela sans jîrindejonç : ;
l'enfant de Paris se. montra intraitable. Aux
ouvertures qui lui furent faites,, il répondit
en raffiné à cheval sur. le point: d'honneur.
Son droit était formel,- entier, absolu; il était
écrit dans les livres spéciaux, et mieux encore
dans la conscience des. gèns de cœur ; la tra
dition le consacrait-aussi bien que l'expérien
ce. En effet,; quoi de plus simple ?,H avait été
offensé, on ne le niait pas. Un epup de canne
lui avait meurtri les épaules; c'était hors,
tans. Eh bien ! comme, insulté, il demandait
une réparation et se réservait le choix des ar
mes.' Qui oserait lui contester ces deux points?
Il n'y avait pas vingt manières d'envisager la
question ; il n'y» en avait qu'une et c'était la
sienne ; tous les auteurs lui donnaient gain
de cause ; tous les hommes du métier seraient
pour lui. M. Courtenay n'avait .qu'à les coxir
sulter, Brindejonc s'en référerait à leur avist.
Ainsi tout était bien posé, bien compris,
bien en règle ;'comme offensé, il exigeait une ; *
réparation, on ne pouvait pas la lui refuser
sans lâcheté. ^
A ces motifs, qui n'étaient pas dépourvus
de solidité, Brindejonc -en ajoutait d'autres
qui étaient de la pure fanfaronnade. Pourquoi
M. Courtenay lui refuserait-il cette satisfac
tion? était-ce à cause da la différence des
rangs, du nom etde lg for tune f Mais d'abord
quand on a pwor de se commettre,, on ; n'in
sulte pas; pui^,t à y regarder de près, sa si
tuation, à lui y Brindejonc; n'était pas de cel
les qu'on pût traiter avec dédain,* elle avait sa
grandeur, son intérêt, sa noblesse, etj posé
comme il l'était, un gentilhomme pouvait s'a;
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