Titre : Le Constitutionnel : journal du commerce, politique et littéraire
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1844-12-14
Contributeur : Véron, Louis (1798-1867). Rédacteur
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 14 décembre 1844 14 décembre 1844
Description : 1844/12/14 (Numéro 349). 1844/12/14 (Numéro 349).
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Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/02/2011
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US CONSTITUTIONNEL, SAMEDI 14 DECEMBKE
teuses pour les porter sur on autre continent,-où nof besoin^, d'Eu
rope les appellent et les exilent à tout jamais, on tourne dans un
cercle vicieux dont l'abolition de (a traite semblait àvoirfait sortir
les nations européennes,ies Ajaglfij? à leuyêté. •? J | j
»> Ces ruses, ces promesseSvmensbngères soht^elles vraiment
nîises en usagé paries recruteurs de travailleurs libres?
» N'avaient-elles pu l'être pour le recrutement du Saint-Cnrts-
tophe tout particulièrement? . . . ; -
» x Pourquoi ensuite ces graves irrégularités sur le rôle, qui ne
peut prouver la. présence à bord d'une cinquantaine de noirs, et
l 'absence dé plusieurs autres personnes qui y sont portées nomi
nativement^^, . •< ' •. .'
4 » Irrégularités assez graves pour motiver unë arrestation de
piraterie, la loi à la main. »
• En terminant* et pour adoucir la crudité de ces justes remon
trances, le capitaine Bouet ajoutait.;
; « Veuillez croire, Monsieur le gouverneur, que de tout ceci
je ne conserve que le souvenir du ÏÏoa accueil que vous avez fait
au capitaine ; ainsi que je l'ai écrit au gouverneur de la Gambie,
mon plus vif désir est que les deux colonies imitent leurs chefs,
leur donnant l'exemple d'une communauté parfaite de senti-
mens d'estime et d'affection. »
• Le gouverneur du Sénégal en fut pour ses avances. Le fonction
naire, anglais répondit à sa lettre avec la politesse hautaine de sa
nation, par un simple accusé dé réception. Lord Aberdeen fut
moins réservé ; il engagea nettement le gouvernement français à
inviter le capitaine Bouet à réserver ses observations pour son
gouvernement. Fallait-il donc se mettre ainsi en irais d'amitié
pour né faire que des ingrats f
Voici quelques passages de la lettre du comte d'Aberdeen. 11
annonçait que des instructions avaient été adressées à M. Macdo
nald pour d'engager à se conformer à l'avenir aux traités de 4831
et 483a; puis il ajoutait :
. « Le soussigné, en envoyant ces instructions, n'a pas cru néces
saire decensurer la conduite que le gouverneur de Sierra-Leone a
tenue dans l'affaire du Saint-Christophe. Le gouvernement de Sa
Majesté pense que les circonstances particulières dé mette affaire,
aussi bien que les motifs qui ont dirigé la conduite du gouverneur.
Macdonald sont de nature à,l'excuser en grande partie dç s'être
écarté des strictes règles de son devoir. Le gouvernement anglais
«ait d'ailleurs que la cause de la justice n'a rien perdu à la sollici
tude que M.Macdonald a montrée pour les intérêts des capteurs du
navire anglais:
- » En même temps, s'il était nécessaire de démontrer l'inconvé
nient d'adopterdans un cas pareil toute autre ligne de conduite
que celle déterminée par la loi et les traités, cette preuve serait
fournie par la lettre même du capitaine Bouet au gouverneur de
Sierra-Leone, lettre'dontle soussigné a l'honneur d envoyer ci-in
clus une copie au comte de Rohan-Cbabot.
.* » Le gouverneur Macdonald a très sagement fait, d'après l'avis
du soussigné, dene répondre à cette lettre que par tin simple ac
cusé de réception, et le soussigné prend la liberté de faire obser
ver aucomte deRohan-Chabot qu'il serait peut-êtredésirable d'in->
viter le capitaine Bouet à laisser à son gouvernement .le soin de
faire au gouvernement deS. M. britannique, des communications
de la nature gouverneur Macdonald, et d'engager cet officier à se borner, dans
ses relations officielles avec les autorités des établissemens an
glais, aux matières que les intérêts de la colonie confiée à ses soins
loi feront une nécessité de discuter directement avec ces mêmes
autorités. » ,
• Ainsi le gouverneur Macdonald a fait la faute, et le gouverneur
Bouet est blâmé. Voilà à quoi s'expose une diplomatie qiii a pris
la faiblesse pour devise, et un gouvernement qui ne sait pas se
faire respecterdansla personne de ses agens.
AFFAIRES DE SUISSE.
. (J , y , Berne, le 40 décembre 1844,
< Les nouvelles de Lucerne dece matin portent que la ville se
remplit de troupes appelées par le gouvernement, et que les arr
restations continuent. Les jésuites triomphent dans toute l'éten
due du mot, grâce à tous les moyens de séduction qu'ils ont em
ployés. Lé docteur Steiger, un des chefs du parti libéral, qui paie
dans les, prisons son opposition aux jésuites , est un homme de
moyens et d'énergie, et qui seul pouvait rallier le parti libéral de la
campagne qui se trouve sans chefs. Le colonel Guggenbuhler, un
autre chef au parti libéral, est parvenu à gagner le territoire ber
nois. Beaucoup de Lucernois fugitifs ont pu également passer la
frontière ; ils pressent les troupes bernoises de franchir la fron
tière ; mais quoique notre gouvernement sente bien de quel inté-
rêtîilserait d arrêter la réaction, cependant il y regardera à deux
fois avant de faire une démonstration qui serait le signal d'une
lutte générale ën Suisse. Cependant les populations,'qui neregar-,
dent pas de si près au pacte fédéral, sont mécontentes de la tié
deur quUl montre-n-, •—i r-- >, »«»
i Ui■. volontaire arfeofien qui'a fait partie dé l'expédition contre
Lucerne, écrit d'Arauj à la date d'hier au soir, que presque tous
les volontaires, àu nombre de 800, sont de retour, harasses dis fa
tigue, et mécontëns de n'avoir presquerencoritré aucun appui au
milieu des populations qu'ils ontparcour(ies,U y a eu, en effet, v un
engagemenUérieuxau pontdel'Emn# à unedemi-lieue de Lucer
ne, et, départ et d'autre, plusieurs tués et blessés; les volontai
res auraient pu forcer le passage, mais ne voyant aucune troupe
lucernoisè se joindre à eux, ils së sont retirés et ont manqué être
coupés par un bataillon de Sarsee. •
Le gouvernement de Berne a fait publier le bulletin ci-après :
« Le dimanche 8 décembre, au matin , il a éclaté en effet des troubles
dans la Tille de Lucerne. Toutefois, après une courte mêlée, les troupes
du gouvernement ont eu le dessus, et différentes arrestations ont eu lieu.
Le gouvernement de Lucerne , par une circulaire du 8 de ce mois, in
forme tous les états confédérés de ces événemens, en leur annonçant que
dans le but de tranquilliser entièrement les habitans du canton, il a ap
pelé .sous les armes la totalité de-son contingent fédéral, et invité les can
tons de Zurich, Uri, Schwyz, Untenvald et Zug à mettre des troupes sur
pied.
j » Dans, cas circonstances, le conseil exécutif n'a pas cru devoir, pour le
moment, faire aucun changement aux dispositions militaires communi
quées par le bulletin en date d'hier. Il s'est borné à donner l'ordre au
commandant en chef de veiller au maintien d'une sévère discipline et
d'empêcher toute violation des frontières.
» Berne, le 9 décembre 1844.
» Far ordre dn conseil exécutif : Chancellerie d'état. »
Indépendamment des nouvelles que nous transmet notre corres
pondance de Suisse, nous avons sous les yeux plusieurs journaux
de ce pays ; mais ils ne renferment que des détails contradictoires.
Ainsi, d'après les uns, il y aurait eu un seul homme tué dans le
combat dont Lucerne a été le théâtre. D'après les autres, tant dans
cette affaire que dans la rencontre à Emenfeld , lé nombre des
'morts s'élèverait à 30; une autre version réduit ce nombre à
45. C'est toujours trop de sang répandu. >
De tous côtés, on prenait, comme à Berne, des mesures militai
res qne la prompte issue de la guerre civile dans le canton de Lu
cerne fera sans doute révoquer. Il n'est pas inutile cependant de
connaître comment ces faits sont envisagés à Zurich ; car Zurich
deviendra canton directeur en janvier, à la place de Lucerne. Voici
donc ce que nous lisons dans la nouvelle Gazette de Zurich du 40
de ce mois ; cette déclaration, très modérée, n'en 1 est pas moins
défavorable aux jésuites.
« Hier soir, le conseil exécutif s'est réuni. Le secrétaire du conseil
a donné lecture de plusieurs rapports, desquels il résulte que le gouver
nement de Lucerne, étant parvenu à dominer le mouvement des factieux,
a renoncé aux secours qui étaient sollicités des cantons. En conséquence,
le conseil exécutif, qui avait convoqué pour demain le grand conseil, a
envoyé contre-ordre. Quant aux troupes qui doivent arriver aujourd'hui,
il a été impossible d'expédier un contre-ordre. Ainsi elles arriveront, mais
elles ne feront pas un long séjour dans notre ville. En ce qui concerne les
troupes qui devaient arriver demain, des courriers sont partis pour leur
donner contre-ordre.
» Le bourguemestre et le conseil exécutif ont adressé aux habitans de la
ville une proclamation pour les informer officiellement du rétablissement
de l'ordre et de la tranquillité à Lucerne. Dans cette proclamation, il est
dit que Zurich avait appelé l'attentien du gouvernement de Lucerne sur
les conséquences fâcheuses que pourrait entraîner l'admission des jésuites,
et qu'il est d regretter que ses avis n'aient pas été suivis ; mais, d'un au
tre côté, Zurich proteste é'nergiquement contre toute tentative d'interven
tion violente dans les affaires de l'état, et demande que les voies légales
soient employées pour obtenir le redressement des griefs s'il y en a qui
soient fondés. » !
Nous recevons ce soir, par voie extraordinaire, des nouvelles de
Madrid du 8. Les chambres n'avaient pas siégé. Le sénat attend
le rapport sur le projet de réforme de la constitution qui sera fort
probablement adopté par cette chambre .sans amendement. La
chambre des députés, qui vient de donner au gouvernement l'au
torisation déjà obtenue du sénat pour la réglementation par or
donnance de l'administration civile et municipale du pays, va
s'occuper de lois de finance et de la dotation du clergé.
Cette dernière question préoccupe vivement les esprits ; elle est
l'Objet de toutes, les conversations, ainsi que les nouvelles condam
nations à mort prononcées par le conseil de guerre contre le colo
nel Don Mariano Rengifo, Don Pedro Garcia, ex-capitaine au
provincial de Saragosse, et le chirurgien Manuel Arilla : tous trois
présens., La même peine a été prononcée contre Don Santiago-
Alonzo Cordero , et contre M. Alonso Gullon. M. Cordero, ancien
député auxçortès, est l'un des grands capitalistes de Madrid. Les
autres accusés ont été condamnés à des peines qui varient entre
deux et dix années de présides. On disait le 8, à Madrid , que le
colonel Rengifo serait exécuté le lendemain.
Nous apprenons en outre que deux jeunes gens arrêtés lors des
derniers troubles du Haut-Aragon, ont été fusillés à Huesca. On
ne dit pas qu'ils aient passé devant un conseil de guerre. Le ca
pitaine Morata et le sous-lieutenant Morali viennent d'être fusillés
à Valence, en vertu d'un jugement delà commission militaire.
eux. .Alors, elle éteignit sa bougie et courut à la fenêtre du cabinet.
Il était environ une heure après minuit : la lune montrait son mince
croissant à travers les nuages , et projetait de timides rayons , dont la
•clarté s'éteignait dans les sombres masses de verdure qui couvraient le
jkrdin. Pourtant Félicie aperçut ïieh tôt, à la faveur de ce dôuteux cré
puscule, deux ombres qui se détachaient sur la façade grisâtre de l'hô
tel d'Atbys: EHe n'eut plus de doute alors ; c'était bien là que demeu
rait sop voisin inconnu ! C'était là que venait de se passer la scène dont
élle avait été l'invisible témoin. Elle ne pouvait distinguer les deux fi
gurés" qui se mouvaient dans l'obscurité,- et elle se dit qu'assurément il
lui serait impossible dé les reconnaître, si jamais elle les revoyait au
grand jour. Cependant éllé discernait tous leurs mouvemens ; après
avoir, franohi- lè perron , elles glissèrent rapidement le long d'une des
COntre-allêes du jardin, «tdisparurent sous un massif.d'arbres qui tou-
ébait au mur ,de clôture. Quelques minutes plus tard, le jeune homme
révihtseûl, à pas lents, et après s'être arrêté un moment comme pour
respirer et se repiettre , il remonta chez lui.
jeuneVéu"rô se laissa tomber sur le divan, 'et appuya sur ses mains
jointes son frontbrûlant et fatigué.Tout ce qu'elle venait d'en tendre l'avait
nappée comme ùfiie révélation terrible; tout un monde d'idées et de sen-
timens venait de se découvrir à' ses regards effrayés;; elle avait com
pris' l'accent d'espassibnsyelle avait senti résonner au fond de son pro
pre cœur comme un écho de ces voix tumultueuses, et, pensive, étonnée,
dite commençait à être atteinte de la curiosité fatale qui poussa la pre
mière femme à gbùtëraUx fruits amers et dorés de l'arbre de science:
;I1 y avait long-temps déjà qu'elle était abîmée dans Ses réflexions,
lorsqu'un incident nouveau réveilla scn attention et raviva ses anxié
tés : on venait d'entrer à petit bruit dans cette pièce, où, depuis une
heure, il n'y avait plus personne. C'était le confident qui revenait avec"
tin autre personnage.
— Oh ! oh ! fit-il à demi-voix, et avec un accent plein d'étonnement
et de dépit; voilà qui est particulier1 tu ne les entendais, plus, Etienne?
Je le crois parbleu bien I ils ont disparu!.. Qu'est-ce que cela veut donc
dire?, ns f ■■■' , • . , : •
< C'est inconcevable! murmura le valet ; personne n'est sorti pour?
tant!
—Est-ceque Lucién ne serait qu'un vaurien comme moi! reprit l'au
tre ; en ce cas je me serais joué à moi-même un drôle de tour ! Etienne,"
mon garçon, tâche de t'assurer s'il est dans sa chambre, s'il y est seul.
— Sa porte est fertriée ; je ri'ose entrer sans qu'il me sonne...
— Eh! que crains-tu, bêlitre? qu'il te chasse? que t'importe, puisque
je te prends à mon service?..
; —Ce n'est pas cela qui m'inquiète ; mais enfin je voudrais savoir...
; Jusqu'ici j'ai obéi exactement àux instructions-de Monsieur, je l'ai intro~
duit ici avec la jeune dame... Mais, quoi qu'il arrive maintenant., il me
semble que cela ne peut tourner selon ses vues, et qu'il n'est pas à la
veille, comme il le pense, d'épouser miss Diana Névil.
— Parle plus franchement, maraud! la chose te paraît impossible, et
tu voudrais savoir quel coup de main je médite pour en venir à bout!
— Je ne me permettrais pas la moindre question, répondit le valet
d'un ton respectueusement ironique; mais j'ai déjà servi, Monsieur; je
sais qu'il est d'une audace dans ses entreprises qui peut nous mener
loin, et j'ai'peur en effet...
— Je vais te rassurer eri deux mots, répliqua le confident de miss
Diana avec une franchise cynique ; la personne que j'ai conduite ici ce
soir est sortie dans une voiture de place, sans avertir les gens de sa
' maison. Nul ne sait où elle est.;. Je dois la ramener... Eh bien! elle ne
rentrera pas chez elle cette noit../ C'est chez moi dans mon petit loge
ment, près de la barrière, qu'elle restera jusqu'à demain, et, je le jure,
tout Paris le saura si, pour éviter ce scandale, elle ne consent à m'épou-
ser dans le plus bref délai possible.
—Ça peut manquer, observa le valet; mais, en effet, Monsieur ne ris
que rien dans cette entreprise. Je vais tenter de savoir ce qui se passe
chez M. le comte.
— Va donc ! le temps passe ! murmura le roué avec une sourde im
patience.
Le valet revint un moment après.
— C'est une chose tout a fait incompréhensible? dit-il. M. le comte
est seul dans sa chambre, absolument seul... .
— En es-tu bien sûr? interrompit l'autre personnage, d'un ton agité.
Parfaitement sûr. J'ai regardé à travers la serrure, et j'ai vu M. le
comte, a&sis devant la taMe qui est en (ace de la porte, et occupé à mçt-
1044. .
A La aer^iêrè Séance d«| coàseil municipal d'Angers a révélé une
circonstance curieuse de l'avènement de M. Augustin Giraud. Au
milieu des plus vive! discussions et au moment où M. le maire
cherchait E se justifier àëë reproches que lui adressait M. Freslon,
secrétaire du conseil, M. Drouard, membre de la majorité, s'ex-
prime en ces termes :
« Il y a trop long-temps que tout ceci dure : la situation est telle, que
j'ai besoin et devoir de dire ënfin au conseil nn fait qui m'est personnel
On verra après sur qui doit ici pèier la responsabilité. C'était en 1843.
» Quelque temps avant son mairat, M. Giraud alors $ Paris,. t me fit
proposer d'être son adjoint; je refusai — De retour, M. Giraud'réitéra
son offre; je refusai, et je refusai en prenant soin de lui dire comment
il n'aurait pas la majorité dans le conseil, quelles difficulté» il allait sou
lever, quels embarras provoquerait sa nomination.
- » Eh bien! Messieurs, quelle fut la réponse de M. Giraud? Mot pour
mot, la voici : ,
«Je m'en f..., j'ai la parole de m. Dcchatel. »
» Nous ne sauripns rendre, dit le Précurseur de l'Ouest, l'effet que ces,
paroles produisent au sein du conseil. M. Giraud vent balbutier quelque»
paroles indécises; mais M. Drouart reprend avec un acoent d'honnête hom
me qui ne comporte ni doute ni réplique :
« Voilà ce que vous m'avez dit, et je vous défie de le nier. »
En effet, M.. Giraud n'ose pas nier, et il reste établi qu'il a pro
noncé ces paroles qui ne font pas ordinairement partie au vocabu
laire administratif. Ainsi, le candidat ministériel, aussi bien que '
le ministre, prévoyaient toutes les oppositions, toutes les résistan
ces qui naîtraient de cette déplorable nomination, et ils n'ont pas
reculé devant une mesure qui a porté la désorganisation dans l'ad
ministration d'une des principales villes de France. r
Cette séance a du reste offert d'autres particularités qui prou
vent de nouveau avec quelle facilité M. Giraud viole les prescrip
tions légales. Ainsi, M. le maire donne lecture d'une lettre de M.
le préfet qui annonce au conseil que le budget ordinaire est or
donnancé. Or, en vertu de l'article 39 de la loi municipale, le
projet de budgetdevait être soumis préalablement au conseil. Au
milieu dece déplorable conflit, M. Giraud est tour-à-tour burles
que et pathétique, et il a terminé la séance du 40 décembre par
une lamentation sur les intérêts qui étaient en souffrance , accu-^
saut le mauvais vouloir de l'opposition et vantant son propre pa^
triotisme ! .. ; • ■
La Gazette des Tribunaux publie ce matin quelques détails sur les me
sures prises par M. le préfet de police, afin de pourvoir à ce qu'avait
d'insuffisant le service de nuit dans la capitale. Plus de cinq cents gar
des municipaux, ont été appelés extraorainairement à concourir au ser
vice des rondes, organisé désormais sur une plus grande échelle, et le
nombre des patrouilles fournies par ce seul corps s'élève à 4 76, savoir i
patrouilles régulières, 55 patrouilles faites sans fusils, avec la redin
gote d'ordonnance et le sabre, et 45.patrouilles de cavalerie. La troupe
ae ligne, de son côté, fournit 55 patrouilles d'infanterie et 5 de cavalerie.
A cela il faut ajouter 28 patrouilles de garde nationale, et surtout 48 pa
trouilles d'agens dU service municipal. En résumé, le nouveau service dé
surveillance de nuit dans Paris emploie activement 1,031 hommes, qui
font, sans discontinuer, près de300 patrouilles.
Une amélioration notable dans l'organisation de ce service est celle qui
consiste à affecter plus spécialement les patrouilles à un même quartier
qu'elles parcourent constamment dans tous les sens, en demeurant prê-»
tes toutefois à se porter sur tous les points hors de leur circonscription
où leur secours serait nécessaire. De telles mesures, que le conseil mu-?
nicipal permettra de rendre plus complètes encore par les allocations
de fonds nécessaires à une augmentation de personnel, sont, quant à
présent, dit ce journal, dénaturé à rassurer la population.
Intérieur. ^
PARIS, 43 DÉCEMBRE.
le roi et la reine des Belges sont arrivés à Paris aujourd'hui darist
l'après midi.
Vers cinq heures et demie, le duc et la duchesse d'Aumale sont éga
lement arrivés. Le R«i et la Heine sont descendus jusqu'au bas du:
grand escalier pour recevoir leur nouvelle belle-fille. Toute la famille
royale se trouve ainsi réunie en ce moment aux Tuileries.
Il y a eu grand dîner ce soir dans la galerie de Diane.
— M. le baron Deffaudis est de retour à Paris de son voyage en Bel
gique. Son séjour à Bruxelles a duré cinq jours.
— M. de Réniusat est arrivé à Paris.
— On écrit d'Arras que M. le cardinal de Latour-d'Auvergne, évêqua,
de cette ville, devait en partir le 26 pour Paris. Le Progrès rappelle, à
cette occasion, qu'il avait été question de le nommer à la dignité de pri-
micier de Saint-Denis.
— M. Soultrait, receveur général de la Loire, est nommé receveur!
général des Vosges, en remplacement de M. Saint-Martin, démission-'
naire.
— Le Progressif fait remarquer qu'une sorte d'hérédité s'établit en
Corsé dans les fonctions publiques.. Lors du décès de M. le soUs-préfet
de Sartène, son fils fut appelé à le remplacer. Depuis, il prit fantaisie à!
M. le sous-préfet de Bastia de jouir des douceurs de la vie privéej et la-
place qu'il laissait ainsi disponible fut immédiatement donnée au pluà
jeune de ses enfans. Plus tard, cq fut M. Multedo (Joseph) qui hérita de
tre en ordre des papiers. Il a l'air fort triste, et l'on dirait qu'il ne pense
pas à se coucher cette nuit. Quant à la jeune dame, il n'y en a pas trace;
elle s'est évanouie dans les airs comme une. fumée.
— Tandis que je fafeais le*pied de grue là-bas, iM'a emmenée par la
porte cochére ! s'écria le confident avec rage.
— Impossible, dit vivement le valet, j'étais aux aguets dans la cour,
Monsieur le sait !..-.
- Alors, elle s'est échappée par la petite porte du jardin ! interrom
pit-il avec fureur; oui, elle a pu sortir ainsi sans être vue... Mais pour
quoi n'est-elle pas venue me retrouver comme nous en étions convenus?
Aurait-elle conçu quelque défiance, quelque soupçon?... C'est impossi
ble... Quel était donc son dessein?... Dans quel but s'est^elle ainsi dé-:
barrassée de moi?...
Puis, comme frappé d'une idée subite, il ajouta d'un ton qui fit fré
mir Félicie :
—Elle est capable d'avoir pris quelque résolution s.nistre!... Eh! eh ! je
la connais! Etienne, remarque bien ce que je vaiste dire : Demain/il se»
pourrait qu'on la retrouvât... à la Morgue!... - ■ -v
— On ira voir; répondit le valet avec un horrible sang-froid ; mais en'
attendant, Monsieur ferait bien de se retirer; d'un moment à l'autre, M.:"
le comte peut avoir l'idée d'entrer ici, et alors il ne ferait pas bon pour
nous...
— AllonsKla partie est perdue! murmura l'infâme personnage ; ces
choses-là n'arrivent qu'à moi ! .
Félicie les entendit s'éloigner. Alors, tremblante, consternée, elle re
gagna sa chambre d'un pas chancelant et tomba épuisée, sur un fauteuil,
en murmurant : — Que de perfidies ! que de trahisons ! que de fautes I
que de malheurs!.. Mon Dieu! c'ést donc là le monde!..
M me CHARLES RETBA.UD.
[Le 9' chapitre à imain.]
US CONSTITUTIONNEL, SAMEDI 14 DECEMBKE
teuses pour les porter sur on autre continent,-où nof besoin^, d'Eu
rope les appellent et les exilent à tout jamais, on tourne dans un
cercle vicieux dont l'abolition de (a traite semblait àvoirfait sortir
les nations européennes,ies Ajaglfij? à leuyêté. •? J | j
»> Ces ruses, ces promesseSvmensbngères soht^elles vraiment
nîises en usagé paries recruteurs de travailleurs libres?
» N'avaient-elles pu l'être pour le recrutement du Saint-Cnrts-
tophe tout particulièrement? . . . ; -
» x Pourquoi ensuite ces graves irrégularités sur le rôle, qui ne
peut prouver la. présence à bord d'une cinquantaine de noirs, et
l 'absence dé plusieurs autres personnes qui y sont portées nomi
nativement^^, . •< ' •. .'
4 » Irrégularités assez graves pour motiver unë arrestation de
piraterie, la loi à la main. »
• En terminant* et pour adoucir la crudité de ces justes remon
trances, le capitaine Bouet ajoutait.;
; « Veuillez croire, Monsieur le gouverneur, que de tout ceci
je ne conserve que le souvenir du ÏÏoa accueil que vous avez fait
au capitaine ; ainsi que je l'ai écrit au gouverneur de la Gambie,
mon plus vif désir est que les deux colonies imitent leurs chefs,
leur donnant l'exemple d'une communauté parfaite de senti-
mens d'estime et d'affection. »
• Le gouverneur du Sénégal en fut pour ses avances. Le fonction
naire, anglais répondit à sa lettre avec la politesse hautaine de sa
nation, par un simple accusé dé réception. Lord Aberdeen fut
moins réservé ; il engagea nettement le gouvernement français à
inviter le capitaine Bouet à réserver ses observations pour son
gouvernement. Fallait-il donc se mettre ainsi en irais d'amitié
pour né faire que des ingrats f
Voici quelques passages de la lettre du comte d'Aberdeen. 11
annonçait que des instructions avaient été adressées à M. Macdo
nald pour d'engager à se conformer à l'avenir aux traités de 4831
et 483a; puis il ajoutait :
. « Le soussigné, en envoyant ces instructions, n'a pas cru néces
saire decensurer la conduite que le gouverneur de Sierra-Leone a
tenue dans l'affaire du Saint-Christophe. Le gouvernement de Sa
Majesté pense que les circonstances particulières dé mette affaire,
aussi bien que les motifs qui ont dirigé la conduite du gouverneur.
Macdonald sont de nature à,l'excuser en grande partie dç s'être
écarté des strictes règles de son devoir. Le gouvernement anglais
«ait d'ailleurs que la cause de la justice n'a rien perdu à la sollici
tude que M.Macdonald a montrée pour les intérêts des capteurs du
navire anglais:
- » En même temps, s'il était nécessaire de démontrer l'inconvé
nient d'adopterdans un cas pareil toute autre ligne de conduite
que celle déterminée par la loi et les traités, cette preuve serait
fournie par la lettre même du capitaine Bouet au gouverneur de
Sierra-Leone, lettre'dontle soussigné a l'honneur d envoyer ci-in
clus une copie au comte de Rohan-Cbabot.
.* » Le gouverneur Macdonald a très sagement fait, d'après l'avis
du soussigné, dene répondre à cette lettre que par tin simple ac
cusé de réception, et le soussigné prend la liberté de faire obser
ver aucomte deRohan-Chabot qu'il serait peut-êtredésirable d'in->
viter le capitaine Bouet à laisser à son gouvernement .le soin de
faire au gouvernement deS. M. britannique, des communications
de la nature
ses relations officielles avec les autorités des établissemens an
glais, aux matières que les intérêts de la colonie confiée à ses soins
loi feront une nécessité de discuter directement avec ces mêmes
autorités. » ,
• Ainsi le gouverneur Macdonald a fait la faute, et le gouverneur
Bouet est blâmé. Voilà à quoi s'expose une diplomatie qiii a pris
la faiblesse pour devise, et un gouvernement qui ne sait pas se
faire respecterdansla personne de ses agens.
AFFAIRES DE SUISSE.
. (J , y , Berne, le 40 décembre 1844,
< Les nouvelles de Lucerne dece matin portent que la ville se
remplit de troupes appelées par le gouvernement, et que les arr
restations continuent. Les jésuites triomphent dans toute l'éten
due du mot, grâce à tous les moyens de séduction qu'ils ont em
ployés. Lé docteur Steiger, un des chefs du parti libéral, qui paie
dans les, prisons son opposition aux jésuites , est un homme de
moyens et d'énergie, et qui seul pouvait rallier le parti libéral de la
campagne qui se trouve sans chefs. Le colonel Guggenbuhler, un
autre chef au parti libéral, est parvenu à gagner le territoire ber
nois. Beaucoup de Lucernois fugitifs ont pu également passer la
frontière ; ils pressent les troupes bernoises de franchir la fron
tière ; mais quoique notre gouvernement sente bien de quel inté-
rêtîilserait d arrêter la réaction, cependant il y regardera à deux
fois avant de faire une démonstration qui serait le signal d'une
lutte générale ën Suisse. Cependant les populations,'qui neregar-,
dent pas de si près au pacte fédéral, sont mécontentes de la tié
deur quUl montre-n-, •—i r-- >, »«»
i Ui■. volontaire arfeofien qui'a fait partie dé l'expédition contre
Lucerne, écrit d'Arauj à la date d'hier au soir, que presque tous
les volontaires, àu nombre de 800, sont de retour, harasses dis fa
tigue, et mécontëns de n'avoir presquerencoritré aucun appui au
milieu des populations qu'ils ontparcour(ies,U y a eu, en effet, v un
engagemenUérieuxau pontdel'Emn# à unedemi-lieue de Lucer
ne, et, départ et d'autre, plusieurs tués et blessés; les volontai
res auraient pu forcer le passage, mais ne voyant aucune troupe
lucernoisè se joindre à eux, ils së sont retirés et ont manqué être
coupés par un bataillon de Sarsee. •
Le gouvernement de Berne a fait publier le bulletin ci-après :
« Le dimanche 8 décembre, au matin , il a éclaté en effet des troubles
dans la Tille de Lucerne. Toutefois, après une courte mêlée, les troupes
du gouvernement ont eu le dessus, et différentes arrestations ont eu lieu.
Le gouvernement de Lucerne , par une circulaire du 8 de ce mois, in
forme tous les états confédérés de ces événemens, en leur annonçant que
dans le but de tranquilliser entièrement les habitans du canton, il a ap
pelé .sous les armes la totalité de-son contingent fédéral, et invité les can
tons de Zurich, Uri, Schwyz, Untenvald et Zug à mettre des troupes sur
pied.
j » Dans, cas circonstances, le conseil exécutif n'a pas cru devoir, pour le
moment, faire aucun changement aux dispositions militaires communi
quées par le bulletin en date d'hier. Il s'est borné à donner l'ordre au
commandant en chef de veiller au maintien d'une sévère discipline et
d'empêcher toute violation des frontières.
» Berne, le 9 décembre 1844.
» Far ordre dn conseil exécutif : Chancellerie d'état. »
Indépendamment des nouvelles que nous transmet notre corres
pondance de Suisse, nous avons sous les yeux plusieurs journaux
de ce pays ; mais ils ne renferment que des détails contradictoires.
Ainsi, d'après les uns, il y aurait eu un seul homme tué dans le
combat dont Lucerne a été le théâtre. D'après les autres, tant dans
cette affaire que dans la rencontre à Emenfeld , lé nombre des
'morts s'élèverait à 30; une autre version réduit ce nombre à
45. C'est toujours trop de sang répandu. >
De tous côtés, on prenait, comme à Berne, des mesures militai
res qne la prompte issue de la guerre civile dans le canton de Lu
cerne fera sans doute révoquer. Il n'est pas inutile cependant de
connaître comment ces faits sont envisagés à Zurich ; car Zurich
deviendra canton directeur en janvier, à la place de Lucerne. Voici
donc ce que nous lisons dans la nouvelle Gazette de Zurich du 40
de ce mois ; cette déclaration, très modérée, n'en 1 est pas moins
défavorable aux jésuites.
« Hier soir, le conseil exécutif s'est réuni. Le secrétaire du conseil
a donné lecture de plusieurs rapports, desquels il résulte que le gouver
nement de Lucerne, étant parvenu à dominer le mouvement des factieux,
a renoncé aux secours qui étaient sollicités des cantons. En conséquence,
le conseil exécutif, qui avait convoqué pour demain le grand conseil, a
envoyé contre-ordre. Quant aux troupes qui doivent arriver aujourd'hui,
il a été impossible d'expédier un contre-ordre. Ainsi elles arriveront, mais
elles ne feront pas un long séjour dans notre ville. En ce qui concerne les
troupes qui devaient arriver demain, des courriers sont partis pour leur
donner contre-ordre.
» Le bourguemestre et le conseil exécutif ont adressé aux habitans de la
ville une proclamation pour les informer officiellement du rétablissement
de l'ordre et de la tranquillité à Lucerne. Dans cette proclamation, il est
dit que Zurich avait appelé l'attentien du gouvernement de Lucerne sur
les conséquences fâcheuses que pourrait entraîner l'admission des jésuites,
et qu'il est d regretter que ses avis n'aient pas été suivis ; mais, d'un au
tre côté, Zurich proteste é'nergiquement contre toute tentative d'interven
tion violente dans les affaires de l'état, et demande que les voies légales
soient employées pour obtenir le redressement des griefs s'il y en a qui
soient fondés. » !
Nous recevons ce soir, par voie extraordinaire, des nouvelles de
Madrid du 8. Les chambres n'avaient pas siégé. Le sénat attend
le rapport sur le projet de réforme de la constitution qui sera fort
probablement adopté par cette chambre .sans amendement. La
chambre des députés, qui vient de donner au gouvernement l'au
torisation déjà obtenue du sénat pour la réglementation par or
donnance de l'administration civile et municipale du pays, va
s'occuper de lois de finance et de la dotation du clergé.
Cette dernière question préoccupe vivement les esprits ; elle est
l'Objet de toutes, les conversations, ainsi que les nouvelles condam
nations à mort prononcées par le conseil de guerre contre le colo
nel Don Mariano Rengifo, Don Pedro Garcia, ex-capitaine au
provincial de Saragosse, et le chirurgien Manuel Arilla : tous trois
présens., La même peine a été prononcée contre Don Santiago-
Alonzo Cordero , et contre M. Alonso Gullon. M. Cordero, ancien
député auxçortès, est l'un des grands capitalistes de Madrid. Les
autres accusés ont été condamnés à des peines qui varient entre
deux et dix années de présides. On disait le 8, à Madrid , que le
colonel Rengifo serait exécuté le lendemain.
Nous apprenons en outre que deux jeunes gens arrêtés lors des
derniers troubles du Haut-Aragon, ont été fusillés à Huesca. On
ne dit pas qu'ils aient passé devant un conseil de guerre. Le ca
pitaine Morata et le sous-lieutenant Morali viennent d'être fusillés
à Valence, en vertu d'un jugement delà commission militaire.
eux. .Alors, elle éteignit sa bougie et courut à la fenêtre du cabinet.
Il était environ une heure après minuit : la lune montrait son mince
croissant à travers les nuages , et projetait de timides rayons , dont la
•clarté s'éteignait dans les sombres masses de verdure qui couvraient le
jkrdin. Pourtant Félicie aperçut ïieh tôt, à la faveur de ce dôuteux cré
puscule, deux ombres qui se détachaient sur la façade grisâtre de l'hô
tel d'Atbys: EHe n'eut plus de doute alors ; c'était bien là que demeu
rait sop voisin inconnu ! C'était là que venait de se passer la scène dont
élle avait été l'invisible témoin. Elle ne pouvait distinguer les deux fi
gurés" qui se mouvaient dans l'obscurité,- et elle se dit qu'assurément il
lui serait impossible dé les reconnaître, si jamais elle les revoyait au
grand jour. Cependant éllé discernait tous leurs mouvemens ; après
avoir, franohi- lè perron , elles glissèrent rapidement le long d'une des
COntre-allêes du jardin, «tdisparurent sous un massif.d'arbres qui tou-
ébait au mur ,de clôture. Quelques minutes plus tard, le jeune homme
révihtseûl, à pas lents, et après s'être arrêté un moment comme pour
respirer et se repiettre , il remonta chez lui.
jeuneVéu"rô se laissa tomber sur le divan, 'et appuya sur ses mains
jointes son frontbrûlant et fatigué.Tout ce qu'elle venait d'en tendre l'avait
nappée comme ùfiie révélation terrible; tout un monde d'idées et de sen-
timens venait de se découvrir à' ses regards effrayés;; elle avait com
pris' l'accent d'espassibnsyelle avait senti résonner au fond de son pro
pre cœur comme un écho de ces voix tumultueuses, et, pensive, étonnée,
dite commençait à être atteinte de la curiosité fatale qui poussa la pre
mière femme à gbùtëraUx fruits amers et dorés de l'arbre de science:
;I1 y avait long-temps déjà qu'elle était abîmée dans Ses réflexions,
lorsqu'un incident nouveau réveilla scn attention et raviva ses anxié
tés : on venait d'entrer à petit bruit dans cette pièce, où, depuis une
heure, il n'y avait plus personne. C'était le confident qui revenait avec"
tin autre personnage.
— Oh ! oh ! fit-il à demi-voix, et avec un accent plein d'étonnement
et de dépit; voilà qui est particulier1 tu ne les entendais, plus, Etienne?
Je le crois parbleu bien I ils ont disparu!.. Qu'est-ce que cela veut donc
dire?, ns f ■■■' , • . , : •
< C'est inconcevable! murmura le valet ; personne n'est sorti pour?
tant!
—Est-ceque Lucién ne serait qu'un vaurien comme moi! reprit l'au
tre ; en ce cas je me serais joué à moi-même un drôle de tour ! Etienne,"
mon garçon, tâche de t'assurer s'il est dans sa chambre, s'il y est seul.
— Sa porte est fertriée ; je ri'ose entrer sans qu'il me sonne...
— Eh! que crains-tu, bêlitre? qu'il te chasse? que t'importe, puisque
je te prends à mon service?..
; —Ce n'est pas cela qui m'inquiète ; mais enfin je voudrais savoir...
; Jusqu'ici j'ai obéi exactement àux instructions-de Monsieur, je l'ai intro~
duit ici avec la jeune dame... Mais, quoi qu'il arrive maintenant., il me
semble que cela ne peut tourner selon ses vues, et qu'il n'est pas à la
veille, comme il le pense, d'épouser miss Diana Névil.
— Parle plus franchement, maraud! la chose te paraît impossible, et
tu voudrais savoir quel coup de main je médite pour en venir à bout!
— Je ne me permettrais pas la moindre question, répondit le valet
d'un ton respectueusement ironique; mais j'ai déjà servi, Monsieur; je
sais qu'il est d'une audace dans ses entreprises qui peut nous mener
loin, et j'ai'peur en effet...
— Je vais te rassurer eri deux mots, répliqua le confident de miss
Diana avec une franchise cynique ; la personne que j'ai conduite ici ce
soir est sortie dans une voiture de place, sans avertir les gens de sa
' maison. Nul ne sait où elle est.;. Je dois la ramener... Eh bien! elle ne
rentrera pas chez elle cette noit../ C'est chez moi dans mon petit loge
ment, près de la barrière, qu'elle restera jusqu'à demain, et, je le jure,
tout Paris le saura si, pour éviter ce scandale, elle ne consent à m'épou-
ser dans le plus bref délai possible.
—Ça peut manquer, observa le valet; mais, en effet, Monsieur ne ris
que rien dans cette entreprise. Je vais tenter de savoir ce qui se passe
chez M. le comte.
— Va donc ! le temps passe ! murmura le roué avec une sourde im
patience.
Le valet revint un moment après.
— C'est une chose tout a fait incompréhensible? dit-il. M. le comte
est seul dans sa chambre, absolument seul... .
— En es-tu bien sûr? interrompit l'autre personnage, d'un ton agité.
Parfaitement sûr. J'ai regardé à travers la serrure, et j'ai vu M. le
comte, a&sis devant la taMe qui est en (ace de la porte, et occupé à mçt-
1044. .
A La aer^iêrè Séance d«| coàseil municipal d'Angers a révélé une
circonstance curieuse de l'avènement de M. Augustin Giraud. Au
milieu des plus vive! discussions et au moment où M. le maire
cherchait E se justifier àëë reproches que lui adressait M. Freslon,
secrétaire du conseil, M. Drouard, membre de la majorité, s'ex-
prime en ces termes :
« Il y a trop long-temps que tout ceci dure : la situation est telle, que
j'ai besoin et devoir de dire ënfin au conseil nn fait qui m'est personnel
On verra après sur qui doit ici pèier la responsabilité. C'était en 1843.
» Quelque temps avant son mairat, M. Giraud alors $ Paris,. t me fit
proposer d'être son adjoint; je refusai — De retour, M. Giraud'réitéra
son offre; je refusai, et je refusai en prenant soin de lui dire comment
il n'aurait pas la majorité dans le conseil, quelles difficulté» il allait sou
lever, quels embarras provoquerait sa nomination.
- » Eh bien! Messieurs, quelle fut la réponse de M. Giraud? Mot pour
mot, la voici : ,
«Je m'en f..., j'ai la parole de m. Dcchatel. »
» Nous ne sauripns rendre, dit le Précurseur de l'Ouest, l'effet que ces,
paroles produisent au sein du conseil. M. Giraud vent balbutier quelque»
paroles indécises; mais M. Drouart reprend avec un acoent d'honnête hom
me qui ne comporte ni doute ni réplique :
« Voilà ce que vous m'avez dit, et je vous défie de le nier. »
En effet, M.. Giraud n'ose pas nier, et il reste établi qu'il a pro
noncé ces paroles qui ne font pas ordinairement partie au vocabu
laire administratif. Ainsi, le candidat ministériel, aussi bien que '
le ministre, prévoyaient toutes les oppositions, toutes les résistan
ces qui naîtraient de cette déplorable nomination, et ils n'ont pas
reculé devant une mesure qui a porté la désorganisation dans l'ad
ministration d'une des principales villes de France. r
Cette séance a du reste offert d'autres particularités qui prou
vent de nouveau avec quelle facilité M. Giraud viole les prescrip
tions légales. Ainsi, M. le maire donne lecture d'une lettre de M.
le préfet qui annonce au conseil que le budget ordinaire est or
donnancé. Or, en vertu de l'article 39 de la loi municipale, le
projet de budgetdevait être soumis préalablement au conseil. Au
milieu dece déplorable conflit, M. Giraud est tour-à-tour burles
que et pathétique, et il a terminé la séance du 40 décembre par
une lamentation sur les intérêts qui étaient en souffrance , accu-^
saut le mauvais vouloir de l'opposition et vantant son propre pa^
triotisme ! .. ; • ■
La Gazette des Tribunaux publie ce matin quelques détails sur les me
sures prises par M. le préfet de police, afin de pourvoir à ce qu'avait
d'insuffisant le service de nuit dans la capitale. Plus de cinq cents gar
des municipaux, ont été appelés extraorainairement à concourir au ser
vice des rondes, organisé désormais sur une plus grande échelle, et le
nombre des patrouilles fournies par ce seul corps s'élève à 4 76, savoir i
patrouilles régulières, 55 patrouilles faites sans fusils, avec la redin
gote d'ordonnance et le sabre, et 45.patrouilles de cavalerie. La troupe
ae ligne, de son côté, fournit 55 patrouilles d'infanterie et 5 de cavalerie.
A cela il faut ajouter 28 patrouilles de garde nationale, et surtout 48 pa
trouilles d'agens dU service municipal. En résumé, le nouveau service dé
surveillance de nuit dans Paris emploie activement 1,031 hommes, qui
font, sans discontinuer, près de300 patrouilles.
Une amélioration notable dans l'organisation de ce service est celle qui
consiste à affecter plus spécialement les patrouilles à un même quartier
qu'elles parcourent constamment dans tous les sens, en demeurant prê-»
tes toutefois à se porter sur tous les points hors de leur circonscription
où leur secours serait nécessaire. De telles mesures, que le conseil mu-?
nicipal permettra de rendre plus complètes encore par les allocations
de fonds nécessaires à une augmentation de personnel, sont, quant à
présent, dit ce journal, dénaturé à rassurer la population.
Intérieur. ^
PARIS, 43 DÉCEMBRE.
le roi et la reine des Belges sont arrivés à Paris aujourd'hui darist
l'après midi.
Vers cinq heures et demie, le duc et la duchesse d'Aumale sont éga
lement arrivés. Le R«i et la Heine sont descendus jusqu'au bas du:
grand escalier pour recevoir leur nouvelle belle-fille. Toute la famille
royale se trouve ainsi réunie en ce moment aux Tuileries.
Il y a eu grand dîner ce soir dans la galerie de Diane.
— M. le baron Deffaudis est de retour à Paris de son voyage en Bel
gique. Son séjour à Bruxelles a duré cinq jours.
— M. de Réniusat est arrivé à Paris.
— On écrit d'Arras que M. le cardinal de Latour-d'Auvergne, évêqua,
de cette ville, devait en partir le 26 pour Paris. Le Progrès rappelle, à
cette occasion, qu'il avait été question de le nommer à la dignité de pri-
micier de Saint-Denis.
— M. Soultrait, receveur général de la Loire, est nommé receveur!
général des Vosges, en remplacement de M. Saint-Martin, démission-'
naire.
— Le Progressif fait remarquer qu'une sorte d'hérédité s'établit en
Corsé dans les fonctions publiques.. Lors du décès de M. le soUs-préfet
de Sartène, son fils fut appelé à le remplacer. Depuis, il prit fantaisie à!
M. le sous-préfet de Bastia de jouir des douceurs de la vie privéej et la-
place qu'il laissait ainsi disponible fut immédiatement donnée au pluà
jeune de ses enfans. Plus tard, cq fut M. Multedo (Joseph) qui hérita de
tre en ordre des papiers. Il a l'air fort triste, et l'on dirait qu'il ne pense
pas à se coucher cette nuit. Quant à la jeune dame, il n'y en a pas trace;
elle s'est évanouie dans les airs comme une. fumée.
— Tandis que je fafeais le*pied de grue là-bas, iM'a emmenée par la
porte cochére ! s'écria le confident avec rage.
— Impossible, dit vivement le valet, j'étais aux aguets dans la cour,
Monsieur le sait !..-.
- Alors, elle s'est échappée par la petite porte du jardin ! interrom
pit-il avec fureur; oui, elle a pu sortir ainsi sans être vue... Mais pour
quoi n'est-elle pas venue me retrouver comme nous en étions convenus?
Aurait-elle conçu quelque défiance, quelque soupçon?... C'est impossi
ble... Quel était donc son dessein?... Dans quel but s'est^elle ainsi dé-:
barrassée de moi?...
Puis, comme frappé d'une idée subite, il ajouta d'un ton qui fit fré
mir Félicie :
—Elle est capable d'avoir pris quelque résolution s.nistre!... Eh! eh ! je
la connais! Etienne, remarque bien ce que je vaiste dire : Demain/il se»
pourrait qu'on la retrouvât... à la Morgue!... - ■ -v
— On ira voir; répondit le valet avec un horrible sang-froid ; mais en'
attendant, Monsieur ferait bien de se retirer; d'un moment à l'autre, M.:"
le comte peut avoir l'idée d'entrer ici, et alors il ne ferait pas bon pour
nous...
— AllonsKla partie est perdue! murmura l'infâme personnage ; ces
choses-là n'arrivent qu'à moi ! .
Félicie les entendit s'éloigner. Alors, tremblante, consternée, elle re
gagna sa chambre d'un pas chancelant et tomba épuisée, sur un fauteuil,
en murmurant : — Que de perfidies ! que de trahisons ! que de fautes I
que de malheurs!.. Mon Dieu! c'ést donc là le monde!..
M me CHARLES RETBA.UD.
[Le 9' chapitre à imain.]
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