Titre : Journal officiel de l'Empire français
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1870-08-02
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32802031s
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 02 août 1870 02 août 1870
Description : 1870/08/02 (A2,N210). 1870/08/02 (A2,N210).
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, 2010-217349
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 07/03/2014
JOURNAL
OFFICIEL
DE L'EMPIRE - FRANÇAIS
2me Année — N° 210
IMPRIMERIE — ABONNEMENT
A Paris, Quai Voltaire, 31 — Affranchir
AGENCE SPÉCIALE DES ANNONCES
S'adresser quai Voltaire, 31
Un an, 40 fr. — Six mois, 20 fr. — Trois mois, 10 fr.
Paris et Départements — Envoyer un mandai sur la poste — Affranchir
On s'abonne dans tous les bureaux de poste
Mardi 2 Août 1870
DIRECTION - RÉDACTÏOF
A Paris, Quai Voltaire, si — Affranchit
POUR LES RÉCLAMATIONS
S'adresser franco à F Imprimeur-Géran*
Les abonnements partent des te. et i6 de chaque mois
Joindre aux renouvellements et réclamations la dernière bande — Affranchir
Les manuscrits non insérés ne sont pas rendue
Le Journal officiel commencera prochai-
nement la publication du dernier roman
inédit de GHARLES DÏCKENS :
LE MYSTERE D'EDWIN DROOD
Traduit par M. Ch. Bernard-Derosne
SOMMAIRE
PARTIE NON OFFICIELI,E.- Bulletin.
Correspondance de Londres.
Nouvelles étrangères.
Offrandes nationales.
Sénat.
Faita divers.
Bourses et marchés.
Académie des sciences, par M.HENRI DE PARVILLE.
FEUILLETON. - Salon de 1870, par M. THÉO-
PHILE GAUTIER.
PARTIE NON OFFICIELLE
Paris, le fer Août.
BULLETIIS
Hier, la municipalité de Londres a of-
fert le droit de cité à M. de Lesseps, qui a
accepté cet honneur en invoquant l'amitié
sincère de la France pour l'Angleterre.
M. de Lesseps a dit que la France est une
des avant-gardes de la civilisation et de la
liberté dans la paix comme dans la guerre,
et que le sang versé dans le conflit actuel
servira la cause de la civilisation et de la
liberté.
Le «Board of Trade» vient de publier à
Londres le relevé officiel du commerce el
de la navigation du Royaume-Uni, pour
les quatre premiers mois de l'exercice
courant.
Il résulte de ce document que la prospé-
rité du commerce britannique, pendant
cette période, ne s'est pas un instant ra-
lentie. Les principaux articles d'exportation
accusent une valeur supérieure à celle
qu'ils avaient atteinte l'année précédente,
ot dans tous les centres de consommation,
les produits de l'Angleterre ont été l'objet
de nombreuses et importantes demandes.
Envisagées au point de vue de la demande
des divers marchés de l'étranger, les ex-
portations britanniques accusent égale-
ment une augmentation considérable. Pour
en connaître l'importance, il suffira de
comparer leur valeur durant le premier
trimestre des deux dernières années : 1869,
1,070,090,125 fr.; 1870, 1,141,969,350 fr.
Différence en plus, 71,879,225 fr.
Dans cette valeur totale, les exportations
à destination des pays étrangers en général
s'élèvent de 824,275,800 fr. à 866,659,075
fr., et celles à destination des colonies an-
glaises de 245,814,325 fr. à 275,360,275fr.,
soit une augmentation respective de
42,345,775 fr. et de 29,545,950 fr.
Des informations de Bruxelles font con-
naître que le camp de Beverloo a été levé,
et que le quartier général de la cavalerie
est porté à Liège.
La Gazette de Vienne publie un rescrit
impérial prononçant la dissolution de la
diète de Ëohéme, et ordonnant la convo-
cation immédiate des électeurs. Un autre
rescrit impérial convoque la diète de Bo-
hème pour le 27 août, celle de Trieste pour
le 2 septembre, les autres diètes pour le
20 août, et le reichsratli pour le 5 septem-
bre .JPOaJappûtt du président du conseil
des ministres à l'empereur François-Jo-
seph motive la dissolution de la diète de
Bohême par l'opportunité d'ouvrir à la po-
pulation de ce pays la possibilité d'envoyer
au reichsrath un nombre complet de re-
présentants.
La chambre des députés de Pestli vient
d'adopter en lecture définitive les projets
de loi relatifs à l'allocation d'un crédit sup-
plémentaire de 5 millions de florins au
ministère pour la défense du pays, et l'au-
torisation d'appeler éventuellement sous
les drapeaux avant le mois d'octobre les
conscrits de la classe de 1870.
En réponse à M. La Porta qui, dans la
dernière séance de la chambre des dé-
putés d'Italie, a demandé la dénoncia-
tion de la convention de septembre, le
président du conseil a déclaré qu'il trouvait
étrange que la gauche provoquât une dis-
cussion sur cette matière dans le moment
actuel. Une pareille politique, selon M.
Lanza, empêcherait l'évacuation de Rome,
et serait indigne de l'Italie, puisqu'elle
créerait des embarras à la France au mo-
ment où cette puissance est engagée dans
une guerre. Le gouvernement saura sau-
vegarder les intérêts et la dignité du pays
au milieu des difficultés présentes. Il ne
redoute pas les menaces de troubles, qui
seront réprimés, de quelque part qu'ils
viennent. La chambre a pris acte des dé-
clarations du ministère et a passé à l'ordre
du jour.
On mande de Madrid, à la date du
1er août, que la commission permanente
des cortès, qui devait se réunir la veiile
pour statuer sur la convocation de la re-
présentation nationale, s'est ajournée à au-
jourd'hui. Le maréchal Serrano est arrivé
hier à Madrid ; il a présidé le conseil des
ministres, qui a décidé à l'unanimité de
faire savoir à la commission permanente
qu'il ne croyait pas opportun de réunir les
cortès en ce moment.
Les cortès espagnoles ont voté, pendant
leur session dernière, et le régent a pro-
mulgué, à la date du 2 de ce mois, une
loi qui autorise le gouvernement à mettre
en adjudication la concession de diverses
lignes de chemins de fer qui y sont spéci-
fiées. Cette loi accorde une subvention à
la ligne de Lerida à Reus, à qui il reste à
construire 49 kilomètres qui séparent Le-
rida de Vindoli, où la voie s'arrête en ce
moment.
Le gouvernement se réserve de pré-
senter ultérieurement aux cortès un nou-
veau projet de loi relatif à la concession de
la voie ferrée qui devra pénétrer en France
par les Pyrénées centrales.
En vertu d'une disposition additionnelle
due à l'initiative parlementaire, la loi ac-
corde également une subvention, fixée à
quarante centièmes de son devis, à la com-
pagnie de Barcelone à la frontière françai-
se, afin qu'elle puisse prolonger sa voie
depuis Girone, où elle s'arrête actuelle-
ment, jusqu'au col de Balitre, où elle devra
se raccorder avec notre ligne du Midi.
Un télégramme privé, reçu à Vienne et
transîhis de Saint-Pétersbourg, en date du
31 juillet, annonce qu'un ukase impérial
interdit aux sujets russes d'entrer comme
volontaires dans l'armée prussienne et
dans les autres armées belligérantes. tes
personnes qui contreviendraient à cette
disposition se rendraient coupables d'une
violation de la neutralité stricte décrétée
par le czar.
La fièvre jaune a complètement disparu
à Buenos Ayres. Le dernier décès constaté
remonte au 20 mai. Le consul de France
dans cette ville, après avoir consulté les
membres du conseil hygiénique, a décidé
de délivrer des patentes de santé nettes
aux capitaines de navires se rendant dans
nos ports.
— ♦
MINISTÈRE DES FINANCES
La loi du 21 juillet 1870 a autorisé
l'émission de 500 millions de bons du tré-
sor, pour faire face aux dépenses de la
guerre.
En exécution de cette loi, et par déci-
sion du ministre des finances, l'intérêt des
bons du trésor, à partir du 28 juillet, a été
fixé comme il suit :
A 3 1/2 0/0 par an, pour les bons de
trois à cinq mois ; *
A 4 1/2 0/o par an, pour les bons de
six a onze mois ;
A 5 0/o par an, pour les bons à un
an.
Indépendamment de ces bons, émis aux
conditions d'échéance ordinaires, il est
tenu à la disposition du public de nou-
veaux bons qui sont à l'échéance de dix
ans et que le trésor aura la faculté de rem-
bourser :
Les uns (bons 2-10), à partir de l'expi-
ration de la deuxième année ;
Les autres (bons 3-10), à partir de l'ex-
piration de la troisième année.
Ces bons porteront un intérêt de 5 0/Q
l'an, payable semestriellement le 1er sep-
tembre et lé 1er mars.
L'émission de ces bons se fait à Paris
et dans le département de la Seine, à la
caisse centrale du trésor et aux bureaux
du receveur central et des receveurs-per-
cepteurs; dans les départements, aux
caisses de toutes les trésoreries générales
et recettes particulières des finances.
—— ■ ■ - ■—— —
C()l{HbSPUL\!JlNLE ETRANGERE
On écrit de Londres, le 51 juiHet :
Je suis heureux d'avoir à vous signaler
les dispositions de plus en plus favorables
de l'Angleterre à l'égard de la France. Les
efforts exagérés de M. de Bismark pour
attirer à lui les sympathies anglaises
échouent devant notre bon sens. Le mi-
nistre prussien a déjà eu sous ce rapport
des déceptions très-vives, et les déclama-
tions des journaux allemands contre l'An-
gleterre ne sont que l'écho du dépit de
l'homme d'Etat de Berlin. Il s'était ima-
giné que le cabinet de Londres serait sa
dupe et l'aiderait à soutenir des thèses in-
justifiables; mais il s'est complètement
trompé.
Le dernier «bluebook» présenté aux deux
chambres du parlement est la meilleure
preuve de l'erreur du comte de Bismark,
et rien n'établit mieux les relations cor-
diales qui existent eube votre gouverne-
ment et le nôtre.
Plusieurs de nos journaux continuent à
faire, il est vrai, des articles qui ne vous
sont pas favorables, mais vous savez que
d'après les traditions de notre presse, on
y trouve toujours le pour et le contre.
Nous voulons que les différentes thèses
soient exposées d'une manière complète,
afin que le public puisse se prononcer en
connaissance de cause. Il ne doit ignorer
aucun des arguments qui sont invoqués,
soit à Paris, soit à Berlin ; c'est pour cela
que plusieurs des partisans de M. de Bis-
mark ont accès dans nos journaux, et il
en sera certainement ainsi jusqu'à la fin
de la guerre. Mais ce que je puis vous af-
firmer, c'est que les théories prussiennes
deviennent chez nous de plus en plus im-
populaires, et que l'on sent très-bien que
la France, en tirant son épée, agit en fa-
veur de l'équilibre européen. Les invec-
tives que la presse allemande fulmine
contre l'Angleterre et les Anglais ont ici
un succès de ridicule. La Gazelle de la
Croix a beau nous dire, avec son outre-
cuidance habituelle, que nous allons nous
mettre sur les bras une autre affaire de
YAlabama, cette menace grotesque nous
fait sourire. La marine prussienne, cette
marine de l'avenir, comme on dit à Berlin,
a-t-elle la prétention d'intimider les flottes
britanniques ?
Savez-vous bien la cause de toutes ces
colères prussiennes? C'est qu'on est fu-
rieux de voir qu'au moment où notre com-
merce avec la Prusse se trouve complète-
ment interrompu, notre commerce avec la
France va devenir plus important et plus
actif que jamais. Grâce au traité de 1860,
le marché commercial de la France et celui
de l'Angleterre ne forment pour ainsi dire
qu'un seul marché. Les relations journa-
lières que nous avous avec vous resser-
rent les liens d'amitié qui existent entre
les deux gouvernements, et les intérêts
économiques sont tellement confondus,
qu'il y a maintenant une solidarité vérita-
ble entre les deux nations qui marchent à
la tête de la civilisation et du progrès.
L'Empereur Napoléon recueille mainte-
nant les fruits de la politique si noble, si
loyale, si courtoise qu'il a toujours suivie
à l'égard de l'Angleterre. La Prusse doit
en prendre son parti. Jamais l'entente cor-
diale n'a été plus réelle.
Je vous signalerai aussi un courant très-
remarqué, qui se manifeste dans l'opinion
publique en faveur du roi de Hanovre et
du Danemark. Vous savez combien la
cause hanovrienne est populaire parmi
nous, et vous n ignorez pas la juste sévé-
rité avec laquelle nous avons apprécié les
procédés inqualifiables de la Prusse contre
le roi Georges; nous venons d'apprendre
que M. de Bismark emploie à soudoyer des
journalistes les revenus provenant de la
fortune privée du souverain dépossédé.
C'est là une nouvelle iniquité, un nouveau
rapt qui excite parmi nous une indigna'-
tion générale. Quant* au Danemark, vous
savez qu'il n'y a pas un seul Anglais de
bonne foi qui hésite à donner raison à ce
brave petit peuple si indignement écrasé.
Nous faisons tous des vœux en sa faveur.
L'apparition de votre flotte dans la mer du
Nord et dans la Baltique n'a rien qui puisse
nous alarmer. Vous êtes les amis de la na-
tionalité hanovrienne et de la nationalité
danoise, et nous n'étions pas intéressés
plus que vous-mêmes à l'établissement
d'une marine prussienne, qui aurait détruit
l'équilibre du Nord.
Quant à la Belgique, les assurances si
formelles que le Gouvernement impérial a
données au sujet du maintien de la neutra-
lité belge vous ont complétement satis-
faits, et le soi-disant traité mis en avant par
M. de Bismark s'est retourné contre ce mi-
nistre. Tout le monde reconnaît maintenant
que si la Belgique a un ennemi, c'est
l'homme d'Etat de Berlin. Telle est la con-
elu-qioff et-la moralité de l'incident.
———————— -Q»
NOUVELLES ÉTRANGÈRES
ANGLETERRE
On écrit de Londres, le 31 juillet :
Les esprits les plus difficiles doivent être satis-
faits. Le gouvernement a rempli la promesse qu'il
avait faite de donner au parlement et au pays
toutes les informations désirables à l'endroit du
prétendu traité franco-prussien. La position faite
au cabinet anglais ne lui permettait ni l'éloge ni
le blâme. Les faits présentés, sans commentaires,
parlent assez d'eux-mêmes et inspirent à tout
homme d'honneur le dégoût et le mépris.
Les journaux de toute nuance ont flétri la poli-
tique de l'homme d'Etat imprudent qui voit écla-
ter entre ses mains l'arme qu'il dirigeait contre
son ennemi. (Correspondallcc liavas.)
BELGIQUE
FRONTIÈRE PRUSSO-BELGE, 30 juillel.-Oll s'ap-
prète en Prusse à soutenir un rude choc dans les
provinces rhénanes, et cela vers le nord. Ce qui le
prouve, c'est que l'administration du jardin zoolo-
gique de Cologne, le plus beau de toute l'Allema-
gne, a fait transporter les animaux de cet établis-
sement à Anvers et dans d'autres villes. Les bâti-
ments, arbres ët dépendances, ainsi que les cons-
tructions voisines ont été rasés. Ce seul fait prouve
clairement combien on est peu sùr dans les Etats
du roi Guillaume de pouvoir marcher sans encom-
bre sur Paris, comme toute la presse prusso-alle-
mande l'annonce.
Néanmoins, un Westphalien, habitant Paris,
(ce monsieur ne donne ni sa rue, ni son numéro)
fait publier dans tous les journaux prussiens qu'il
se charge contre une faible rétribution de retenir
des appartements aux officiers de l'armée libéra-
trice allemande !
Le grand-duc de Bade a fait transporter à Berlin
tous les objets de prix qui appartiennent à lui ou
à l'Etat.
La première surprise causée par les prétendues
révélations du Tinws, dont on pouvait tout d'abord
reconnaître le vrai mobile, est complètement pas-
sée en Belgiqne. Malgré les efforts des agents
prussiens répétant sur tous les tons que la France
est insatiable dans son ambition, la nation belge
n'a de sympathies que pour la France. (Correspon-
dance du Nord-Esl.)
DANEMARK
36 juillet. — L'opinion publiqua s'échauffe de
jour en jour. Hier, le Fœdrelandel s'est joint au
IltjmdaLpour encourager le peuple et lui démon-
trer la nécessité absolue de notre participation à
la guerre, aussitôt que le moment propice sera
venu. Il en est de même du Follcels Avis (Gazelle
du peuple), organe très-répandu parmi les classes.
moyennes de la bourgeoisie.
De toutes les parties du pays nous arrivent des
lettres inspirées par les mêmes sentiments. La
jeunesse des campagnes, elle aussi, est en mouve-
ment, ce qui est un signe fort bon, car il in-
dique que, si la guerre éclate, il se présentera un
grand nombre de volontaires. Le corps de volon-
taires de Copenhague s'accroit tous les jours,
malgré les chaleurs, qui rendent les exercices
très-fatigants.
La Prusse vient de commettre une nouvelle in-
fraction au traité de Vienne de 1861. Bien que l'arti-
cle 19 de ce traité assure aux habitants du Slesvig
la liberté d'émigrer en Danemark, jusqu'au 16 no-
vembre 1870, toute émigration a été défendue; et
les jeunes gens qui, ayant émigré pendant les der-
nières années, sont maintenant sujets danois,
mais qui au moment actuel se trouvent dans le
Slesvig pour assister leurs, familles, ont été saisis
et revêtus de l'uniforme prussien.
Vous savez par le télégraphe que M. Kryger
a été arrêté. Le prétexte de cette arrestation est
qu'il a demandé que le conseil cantonal dont il est
membre fût, aux termes de la loi, consulté avant
toute réquisition mise sur les chevaux. La cause
véritable est naturellement le désir qu'on éprouve
à Berlin de se venger des vérités dures qu'il a fait
entendre au roi et aux chambres prussiennes, et
de priver les Danois du Slesvig de leur chef princi-
pal. (Correspondance du Nord-Esl.)
PRUSSE
BERLIN, 28 juillet. — La déclaration du Gouver-
nement français, en vertu de laquelle le charbon
de terre n'est pas considéré comme contrebande
de guerre, exaspère les Prussiens ; ils sont furieux
de voir que les Anglais vont fournir du charbon à
la flotte française de la Baltique.
Les finances prussiennes ne sont décidément
pas en aussi bon état qu'on l'a toujours dit. Les
banquiers ne se sont pas montrés très-disposés à
se charger de la totalité du nouvel emprunt, et le
ministre a dû recourir, ce qui n'avait jamais en
lieu jusqu'à présent, à une souscription publique
qui sera ouverte le 3 aoùt et portera sur 1 milliard
de rente à 5 O/o- La clause qui obligeait le gou-
vernement, dans tous les emprunts antérieurs, a
amortir tous les ans une certaine somme, ne se
retrouve plus dans celui-ci. Cette fois encore,
comme pour l'emprunt de la marine, c'est la Con-
fédération et non la Prusse qui emprunte. Etrange
garantie : un Etat qui ne possède qu'une maison à
Berlin, et qui V:l, avoir 2o0 millions de thalers
(1 milliard) de dettes! (Idem.)
— Le duc Adolphe de Nassau, loin de se join-
dre à l'armée prussienne, comme on l'a prétendu,
vient de se rendre au château de Hohenbourg,
dans les montagnes de la Bavière. (Idem.)
-Les Prussiens accusent l'Angleterre de par-
tialité pour la France. Des plaintes violentes s'é-
lèvent à ce sujet dans la presse de Berlin et dans
le public.
La Gazelle de la Croix dit que lord Loftus s'est
retiré à Potsdam pour éviter des explications em-
barrassantes sur la manière étrange dont l'Angle-
terre pratique la neutralité, particulièrement en
ce qui concerne le charbon. (Idem.)
SUISSE
BERNE, 31 juillet. — On annonce de Vienne
que le ministère de la guerre vient d'ordonner
l'achat de 40,000 chevaux pour l'artillerie, dont les
attelages sont incomplets.
La Suisse a demandé la permission d'acheter ea
Hongrie 1,000 chevaux; on la lui a refusée.
Le gouvernement bavarois a révoqué la défense
d'exporter la farine et le blé, mais seulement à la
suite d'une remontrance très-prèssantô da la v",-rt
du gouvernement austro-hongrois. (Idem.)
AUTRICHE-HONGRIE
On écrit de Vienne, le 28 juillet :
Il est question ici d'un emprunt de 12 millions
de florins, destinés à l'achat de chevaux et de
chaussures pour l'armée. Cette somme doit être
avancée à l'Etat par un petit nombre des princi-
pales banques de la ville. L'emprunt sera contracté
solidairement : la Hongrie y participera pour
3,600,000 florins, et la Cisleithanie pour 8,400,000
florins. Lès délégations et les représentants des
deux parties de l'empire auront à fournir la cou-
verture de ce crédit et à voter les moyens de rem-
boursement. Les négociations sont dirigées par le
nouveau ministre des finances, M. Louyay. Cor-
respondance Ilavas.)
«
VIENNE, 31 juillet. — Les renseignements offi-
ciels reçus ici portent que l'accueil fait à Munich
au prince royal de Prusse dans les hautes régions
a été froid.
Le comte Bray, président du conseil bavarois;
a essayé de toucher la question des garanties pour
l'indépendance et l'intégrité de la Bavière. La
prince a brusquement rompu l'entretien. (Corres-
pondance du Nord-Est.)
VIENNE, 30 juillet, soir. — Les prétendues ré-
vélations du Times et de la Correspondance de Ber-
lin n'influeront pas sur les décisions du cabinet de
Vienne, qui sait bien comment les choses se sont
réellement passées.
A ses yeux, ces .révélatious compromettent sur-,
tout la Prusse qui, en 1866 et même avant^pnj-»
mettait à la France de luitcéder des partie du ter-
ritoire allemand pour obtenir qu'elle coopérât à
son agrandissement.
L'Autriche mettra sa politique d'accord avec .les
intérêts que le triomphe de la Prusse ruinerait ;
elle marchera avec la France, si les -événements
l'exigent, et jamais avec la Prusse. (Idem.)
ITALIE
CHAMBRE DES DÉPUTÉS, — Séance du 30 juillet.
Le comité discute le projet de crédit extraordi-
naire de 16 millions.
FEUILLETON DU JOURNAL OFFICIEL
DU MARDI 2 AOUT 1870
SALON DE 1870
rx
MM. jalasert, carolus durait, Mlle XÉLIE
JACQUEMART, mm. BONNËGRAGE, PÉRI-
GNON, COROT, ADOLPHE GUILLON, KARL
BODMEH, BELLET, PAUL FLANDRIN, HAR-
PIGXIES, ÉMILE BRETON, UHEVANDIER
DE VALDROME, GUIAUD, BERNIER, DAU-
BIGNY.
Nous voici arrivé aux portraitistes. Ils
sont nombreux et remarquables. Il faudrait
plus de place que nous n'en avons à notre
disposition pour leur rendre justice à tous.
En outre, ce n'est pas chose aisée de don-
ner Fid e d'un. portrait en peu de mots.
Quelques lignes suffisent pour indiquer
sommaireaieot le sujet et l'ordonnance
d'un tableau; il n'en est pas de même pour
une figure unique, sans action, dont la
physionomie particulière ne peut se rendre
que par des nuances multipliées et un long
détail. Mais ne perdons pas en considéra-
tions l'espace qui nous est réservé. Que
ceux dont nous ne parlons pas ne nous
en sachent pas mauvais gré, ce n'est pas
notre faute.
M. Jalabert à exposé le portrait de S. A.
I. Madame la grande-duchesse Marie-Nico-
laewna, où cet artiste d'un talent si sûr
et si délicat semble s'êtré surpassé. La
grande-duchesse est représentée debout,
lé corps presque de profil, la te te tournée
vers le public, les' bras croisés, vêtue de
satin blanc, une pèlerine de dentelles sur
les épaules, un collier de perlés fines au
col. Elle est coiffée d'une espèce de bonnet
en guipure blanche qui lui cache presque les
cheveux. La tète, dont lés traits purs et ré-
guliers rappellent ceux de l'empereur Ni-
colas; a un grand air de distinction .'Les yeux
bleus, par leur expression douce et rêveuse,
tempèrent la majesté un peu sévère du
masque. La figure se détache en clair d'un
fond gris-marron. Il est difficile d'être à la
fois plus simple et plus noble. Le livret ne
porterait aucune indication, que personne
n'hésiterait à reconnaître la haute qualité
du modèle.
Comme pour se dédommager dë l'espèce
de contrainte respectueuse qu'impose tou-
jours, même aux plus habiles, un portrait
d'apparat, M. Jalabert a fait de Mme G. un
portrait où la fantaisie se mèle à la ressem-
blance eL qu'il intitule : « Souvenir d'un
a1 costumé. » C'est une peinture char-
mante, gracieuse comme un Longlii, spi-
rituelle comme un Tiepolo, et qui fait pen-
ser aii carnaval de Venise du temps de
Gozzi. La damé est debout, vêtue de satin
rouge avec guipures blanches, les mains
dans un manchon rouge garni de fourrures
noires. Sur sa tête est planté crânement un
petit tricorne noir, dont la voilette retombe
par derrière. Un masque rouge, repoussé
entre l'oreille et les cheveux, laisse voir
une physionomie gaie et souriante qu'il
eùt été fâcheux de cacher sous un morceau
de carton, il nous semble, en regardant
cette figure, nous promener sous les Pro-
curaties, et voir Casanova entrer dans
une redoute pour jouer le pharaon avec
quelque descendant des doges, pendant
que les masques nouent des intrigues et
font des pantalonnades sur la place Saint-
Marc, a travers les vols de pigeons effa-
rouchés.
On se souvient de ce beau portrait de
femme de M. Carolus Duran, si sobre, si
chaste et si élégant dans sa discrétion
d effet et de toilette. Cette année, pour
prouver là souplesse de son talent, it nous
montré une beauté d'une nature toute dif-
férente, enj pleine fleur de jeunesse et de
lumière, au milieu d'un éblouissement de
satin lançant les éclairs de ses cassures,
peinte dans la pâte avec une robustesse
délicate et une fine brutalité réaliste d'un
effet très-neuf et très-piquant. Mme ***,
soulevant de la main un rideau de velours
vert, a l'air de faire son entrée dans l'ate-
lier du peintre et de s'arrêter dans une
pose saisie par l'artiste disant : « Vous êtes
bien ainsi. » Elle a une robe de satin
mauve très-clair, décolletée, laissant voir
les bras nus, et bouffant à demi-relevée sur
une jupe de taffetas bleu de ciel. L'autre
main tenant un éventail pend avec négli-
gence au bout d'un beau bras rond, potelée,
blanche, veinée de bleu, chargée de bagues
et moins petite, il nous semble, sur le ta-
bleau que chez le modèle. La tète, souriante,
éclate de vie et se détache de la toile avec
le plus audacieux bonheur de relief. Les
satins ont un éclat surprenant et une am-
pleur de plis tout à fait vénitienne. Peut-
être reprocherions-nous à l'artiste l'abus
du blanc dans les lumières, bien qu'il ne
soit guère possible de rendre les jours fri-
sants d'une autre manière, quoiqu'il eût
été plus sage de les éviter. Quoi qu'il en
soit, ce portrait est une œuvre magistrale,
d'une originalité profonde, et qui dénote
chez le peintre un véritable tempérament
de coloriste, mais de coloriste ayant souci
de la forme, comme Titien ou Velasquez.
Tout le monde s'arrête longtemps devant
ce portrait, qui est en même temps un ta-
bleau, et regarde avec plaisir cette char-
mante femme, aux pieds de laquelle jappe
un king-charles de la plus pure race. -
Le portrait de Marguerite est une déli-
cieuse tète d'enfant, qui rappelle sans dé-
savantage la petite infante espagnole du
Musée.
Avec le portrait de M. Duruy, M"e Nélie
Jacquemart avait obtenu un de ces succès
qui, remportés au début d'une carrière, nui-
sent quelquefois à l'artiste au lieu de
le servir. Il est si commode, tout en ayant
l'air équitable, d'éreinter le second ouvrage
avec le premier et de créer un antago-
nisme entre le passé et le présent de l'au-
teur ou du peintre, de façon à le détruire
par lui-même. Ce malheur n'est pas arrivé
à M,leNélie Jacquemart, pour laquelle nous
craignons que le remarquable portrait de
M. le ministre de l'instruction publique
(il l'était alors) ne devint ce qu'on appelle
en argot d'atelier une scie.
Son portrait du maréchal Canrobert est
très-beau et très-ressemblant. Le maré-
chal, vêtu en bourgeois, est représenté de-
bout, le pouce de la main droite entré
dans la poche de son pantalon, la main
gauche tenant des gants, le bras appuyé
sur un bahut de chêne; la tête est portée
haute, un peu renversée en arrière, par
habitude martiale. C'est une peinture éner-
gique - et solide, telle que peu d'hommes
seraient en état de la faire.
Mme Nélie Jacquemart a exposé aussi un
gracieux portrait de femme, celui de Mme
la baronne GasLon de M. La baronne,
habillée de brun rouge, décolletée, le
corps de profil et la tète, tournée vers le
spectateur, appuie la main gauche sur une
console où sont un éventail et des gants.
L'artiste a rendu avec beaucoup de charme
cette physionomie une et spirituelle, en-
cadrée de cheveux châtains.
On sait avec quelle vigueur M. Bonne-
grâce peint les portraits d'homme, quelle
solidité d'empâtement et quelle. puissance,
de relief il y apporte. Mais son succès
même, dans ce genre, fait croire qu'il réus-
sirait moins aisément à rendre les délica-
tesses de. la femme et les grâces da. l'en-
fant. C'est una erreur, et, pour s'en con-
vaincre, il suffit de regarder le portrait du
jeune Georges F., traité dans une manière
suave et fondue, qui n'enlève.rien àla cha-
leur du ton. GeorgesF., garçon de sept ou-
huit ans, beau comme le jeune Lambton, de
Lawrence, est vu de face, debout, le coude
appuyé sur une table et tenant une rose de
la main gauche. Ses cheveux blonds, très-
longs par derrière, sont coupés ras sur le
front comme ceux démentants d'Edouard,
dans le tableau de Paul Delavoche. Ilporte
un costume m velours, noir avec -une large
ceinturé bleue., des b&sbleuset une^randa
collerette de guipure blanche tombant sur
les épaules. Le tapis de la table est rouge,
OFFICIEL
DE L'EMPIRE - FRANÇAIS
2me Année — N° 210
IMPRIMERIE — ABONNEMENT
A Paris, Quai Voltaire, 31 — Affranchir
AGENCE SPÉCIALE DES ANNONCES
S'adresser quai Voltaire, 31
Un an, 40 fr. — Six mois, 20 fr. — Trois mois, 10 fr.
Paris et Départements — Envoyer un mandai sur la poste — Affranchir
On s'abonne dans tous les bureaux de poste
Mardi 2 Août 1870
DIRECTION - RÉDACTÏOF
A Paris, Quai Voltaire, si — Affranchit
POUR LES RÉCLAMATIONS
S'adresser franco à F Imprimeur-Géran*
Les abonnements partent des te. et i6 de chaque mois
Joindre aux renouvellements et réclamations la dernière bande — Affranchir
Les manuscrits non insérés ne sont pas rendue
Le Journal officiel commencera prochai-
nement la publication du dernier roman
inédit de GHARLES DÏCKENS :
LE MYSTERE D'EDWIN DROOD
Traduit par M. Ch. Bernard-Derosne
SOMMAIRE
PARTIE NON OFFICIELI,E.- Bulletin.
Correspondance de Londres.
Nouvelles étrangères.
Offrandes nationales.
Sénat.
Faita divers.
Bourses et marchés.
Académie des sciences, par M.HENRI DE PARVILLE.
FEUILLETON. - Salon de 1870, par M. THÉO-
PHILE GAUTIER.
PARTIE NON OFFICIELLE
Paris, le fer Août.
BULLETIIS
Hier, la municipalité de Londres a of-
fert le droit de cité à M. de Lesseps, qui a
accepté cet honneur en invoquant l'amitié
sincère de la France pour l'Angleterre.
M. de Lesseps a dit que la France est une
des avant-gardes de la civilisation et de la
liberté dans la paix comme dans la guerre,
et que le sang versé dans le conflit actuel
servira la cause de la civilisation et de la
liberté.
Le «Board of Trade» vient de publier à
Londres le relevé officiel du commerce el
de la navigation du Royaume-Uni, pour
les quatre premiers mois de l'exercice
courant.
Il résulte de ce document que la prospé-
rité du commerce britannique, pendant
cette période, ne s'est pas un instant ra-
lentie. Les principaux articles d'exportation
accusent une valeur supérieure à celle
qu'ils avaient atteinte l'année précédente,
ot dans tous les centres de consommation,
les produits de l'Angleterre ont été l'objet
de nombreuses et importantes demandes.
Envisagées au point de vue de la demande
des divers marchés de l'étranger, les ex-
portations britanniques accusent égale-
ment une augmentation considérable. Pour
en connaître l'importance, il suffira de
comparer leur valeur durant le premier
trimestre des deux dernières années : 1869,
1,070,090,125 fr.; 1870, 1,141,969,350 fr.
Différence en plus, 71,879,225 fr.
Dans cette valeur totale, les exportations
à destination des pays étrangers en général
s'élèvent de 824,275,800 fr. à 866,659,075
fr., et celles à destination des colonies an-
glaises de 245,814,325 fr. à 275,360,275fr.,
soit une augmentation respective de
42,345,775 fr. et de 29,545,950 fr.
Des informations de Bruxelles font con-
naître que le camp de Beverloo a été levé,
et que le quartier général de la cavalerie
est porté à Liège.
La Gazette de Vienne publie un rescrit
impérial prononçant la dissolution de la
diète de Ëohéme, et ordonnant la convo-
cation immédiate des électeurs. Un autre
rescrit impérial convoque la diète de Bo-
hème pour le 27 août, celle de Trieste pour
le 2 septembre, les autres diètes pour le
20 août, et le reichsratli pour le 5 septem-
bre .JPOaJappûtt du président du conseil
des ministres à l'empereur François-Jo-
seph motive la dissolution de la diète de
Bohême par l'opportunité d'ouvrir à la po-
pulation de ce pays la possibilité d'envoyer
au reichsrath un nombre complet de re-
présentants.
La chambre des députés de Pestli vient
d'adopter en lecture définitive les projets
de loi relatifs à l'allocation d'un crédit sup-
plémentaire de 5 millions de florins au
ministère pour la défense du pays, et l'au-
torisation d'appeler éventuellement sous
les drapeaux avant le mois d'octobre les
conscrits de la classe de 1870.
En réponse à M. La Porta qui, dans la
dernière séance de la chambre des dé-
putés d'Italie, a demandé la dénoncia-
tion de la convention de septembre, le
président du conseil a déclaré qu'il trouvait
étrange que la gauche provoquât une dis-
cussion sur cette matière dans le moment
actuel. Une pareille politique, selon M.
Lanza, empêcherait l'évacuation de Rome,
et serait indigne de l'Italie, puisqu'elle
créerait des embarras à la France au mo-
ment où cette puissance est engagée dans
une guerre. Le gouvernement saura sau-
vegarder les intérêts et la dignité du pays
au milieu des difficultés présentes. Il ne
redoute pas les menaces de troubles, qui
seront réprimés, de quelque part qu'ils
viennent. La chambre a pris acte des dé-
clarations du ministère et a passé à l'ordre
du jour.
On mande de Madrid, à la date du
1er août, que la commission permanente
des cortès, qui devait se réunir la veiile
pour statuer sur la convocation de la re-
présentation nationale, s'est ajournée à au-
jourd'hui. Le maréchal Serrano est arrivé
hier à Madrid ; il a présidé le conseil des
ministres, qui a décidé à l'unanimité de
faire savoir à la commission permanente
qu'il ne croyait pas opportun de réunir les
cortès en ce moment.
Les cortès espagnoles ont voté, pendant
leur session dernière, et le régent a pro-
mulgué, à la date du 2 de ce mois, une
loi qui autorise le gouvernement à mettre
en adjudication la concession de diverses
lignes de chemins de fer qui y sont spéci-
fiées. Cette loi accorde une subvention à
la ligne de Lerida à Reus, à qui il reste à
construire 49 kilomètres qui séparent Le-
rida de Vindoli, où la voie s'arrête en ce
moment.
Le gouvernement se réserve de pré-
senter ultérieurement aux cortès un nou-
veau projet de loi relatif à la concession de
la voie ferrée qui devra pénétrer en France
par les Pyrénées centrales.
En vertu d'une disposition additionnelle
due à l'initiative parlementaire, la loi ac-
corde également une subvention, fixée à
quarante centièmes de son devis, à la com-
pagnie de Barcelone à la frontière françai-
se, afin qu'elle puisse prolonger sa voie
depuis Girone, où elle s'arrête actuelle-
ment, jusqu'au col de Balitre, où elle devra
se raccorder avec notre ligne du Midi.
Un télégramme privé, reçu à Vienne et
transîhis de Saint-Pétersbourg, en date du
31 juillet, annonce qu'un ukase impérial
interdit aux sujets russes d'entrer comme
volontaires dans l'armée prussienne et
dans les autres armées belligérantes. tes
personnes qui contreviendraient à cette
disposition se rendraient coupables d'une
violation de la neutralité stricte décrétée
par le czar.
La fièvre jaune a complètement disparu
à Buenos Ayres. Le dernier décès constaté
remonte au 20 mai. Le consul de France
dans cette ville, après avoir consulté les
membres du conseil hygiénique, a décidé
de délivrer des patentes de santé nettes
aux capitaines de navires se rendant dans
nos ports.
— ♦
MINISTÈRE DES FINANCES
La loi du 21 juillet 1870 a autorisé
l'émission de 500 millions de bons du tré-
sor, pour faire face aux dépenses de la
guerre.
En exécution de cette loi, et par déci-
sion du ministre des finances, l'intérêt des
bons du trésor, à partir du 28 juillet, a été
fixé comme il suit :
A 3 1/2 0/0 par an, pour les bons de
trois à cinq mois ; *
A 4 1/2 0/o par an, pour les bons de
six a onze mois ;
A 5 0/o par an, pour les bons à un
an.
Indépendamment de ces bons, émis aux
conditions d'échéance ordinaires, il est
tenu à la disposition du public de nou-
veaux bons qui sont à l'échéance de dix
ans et que le trésor aura la faculté de rem-
bourser :
Les uns (bons 2-10), à partir de l'expi-
ration de la deuxième année ;
Les autres (bons 3-10), à partir de l'ex-
piration de la troisième année.
Ces bons porteront un intérêt de 5 0/Q
l'an, payable semestriellement le 1er sep-
tembre et lé 1er mars.
L'émission de ces bons se fait à Paris
et dans le département de la Seine, à la
caisse centrale du trésor et aux bureaux
du receveur central et des receveurs-per-
cepteurs; dans les départements, aux
caisses de toutes les trésoreries générales
et recettes particulières des finances.
—— ■ ■ - ■—— —
C()l{HbSPUL\!JlNLE ETRANGERE
On écrit de Londres, le 51 juiHet :
Je suis heureux d'avoir à vous signaler
les dispositions de plus en plus favorables
de l'Angleterre à l'égard de la France. Les
efforts exagérés de M. de Bismark pour
attirer à lui les sympathies anglaises
échouent devant notre bon sens. Le mi-
nistre prussien a déjà eu sous ce rapport
des déceptions très-vives, et les déclama-
tions des journaux allemands contre l'An-
gleterre ne sont que l'écho du dépit de
l'homme d'Etat de Berlin. Il s'était ima-
giné que le cabinet de Londres serait sa
dupe et l'aiderait à soutenir des thèses in-
justifiables; mais il s'est complètement
trompé.
Le dernier «bluebook» présenté aux deux
chambres du parlement est la meilleure
preuve de l'erreur du comte de Bismark,
et rien n'établit mieux les relations cor-
diales qui existent eube votre gouverne-
ment et le nôtre.
Plusieurs de nos journaux continuent à
faire, il est vrai, des articles qui ne vous
sont pas favorables, mais vous savez que
d'après les traditions de notre presse, on
y trouve toujours le pour et le contre.
Nous voulons que les différentes thèses
soient exposées d'une manière complète,
afin que le public puisse se prononcer en
connaissance de cause. Il ne doit ignorer
aucun des arguments qui sont invoqués,
soit à Paris, soit à Berlin ; c'est pour cela
que plusieurs des partisans de M. de Bis-
mark ont accès dans nos journaux, et il
en sera certainement ainsi jusqu'à la fin
de la guerre. Mais ce que je puis vous af-
firmer, c'est que les théories prussiennes
deviennent chez nous de plus en plus im-
populaires, et que l'on sent très-bien que
la France, en tirant son épée, agit en fa-
veur de l'équilibre européen. Les invec-
tives que la presse allemande fulmine
contre l'Angleterre et les Anglais ont ici
un succès de ridicule. La Gazelle de la
Croix a beau nous dire, avec son outre-
cuidance habituelle, que nous allons nous
mettre sur les bras une autre affaire de
YAlabama, cette menace grotesque nous
fait sourire. La marine prussienne, cette
marine de l'avenir, comme on dit à Berlin,
a-t-elle la prétention d'intimider les flottes
britanniques ?
Savez-vous bien la cause de toutes ces
colères prussiennes? C'est qu'on est fu-
rieux de voir qu'au moment où notre com-
merce avec la Prusse se trouve complète-
ment interrompu, notre commerce avec la
France va devenir plus important et plus
actif que jamais. Grâce au traité de 1860,
le marché commercial de la France et celui
de l'Angleterre ne forment pour ainsi dire
qu'un seul marché. Les relations journa-
lières que nous avous avec vous resser-
rent les liens d'amitié qui existent entre
les deux gouvernements, et les intérêts
économiques sont tellement confondus,
qu'il y a maintenant une solidarité vérita-
ble entre les deux nations qui marchent à
la tête de la civilisation et du progrès.
L'Empereur Napoléon recueille mainte-
nant les fruits de la politique si noble, si
loyale, si courtoise qu'il a toujours suivie
à l'égard de l'Angleterre. La Prusse doit
en prendre son parti. Jamais l'entente cor-
diale n'a été plus réelle.
Je vous signalerai aussi un courant très-
remarqué, qui se manifeste dans l'opinion
publique en faveur du roi de Hanovre et
du Danemark. Vous savez combien la
cause hanovrienne est populaire parmi
nous, et vous n ignorez pas la juste sévé-
rité avec laquelle nous avons apprécié les
procédés inqualifiables de la Prusse contre
le roi Georges; nous venons d'apprendre
que M. de Bismark emploie à soudoyer des
journalistes les revenus provenant de la
fortune privée du souverain dépossédé.
C'est là une nouvelle iniquité, un nouveau
rapt qui excite parmi nous une indigna'-
tion générale. Quant* au Danemark, vous
savez qu'il n'y a pas un seul Anglais de
bonne foi qui hésite à donner raison à ce
brave petit peuple si indignement écrasé.
Nous faisons tous des vœux en sa faveur.
L'apparition de votre flotte dans la mer du
Nord et dans la Baltique n'a rien qui puisse
nous alarmer. Vous êtes les amis de la na-
tionalité hanovrienne et de la nationalité
danoise, et nous n'étions pas intéressés
plus que vous-mêmes à l'établissement
d'une marine prussienne, qui aurait détruit
l'équilibre du Nord.
Quant à la Belgique, les assurances si
formelles que le Gouvernement impérial a
données au sujet du maintien de la neutra-
lité belge vous ont complétement satis-
faits, et le soi-disant traité mis en avant par
M. de Bismark s'est retourné contre ce mi-
nistre. Tout le monde reconnaît maintenant
que si la Belgique a un ennemi, c'est
l'homme d'Etat de Berlin. Telle est la con-
elu-qioff et-la moralité de l'incident.
———————— -Q»
NOUVELLES ÉTRANGÈRES
ANGLETERRE
On écrit de Londres, le 31 juillet :
Les esprits les plus difficiles doivent être satis-
faits. Le gouvernement a rempli la promesse qu'il
avait faite de donner au parlement et au pays
toutes les informations désirables à l'endroit du
prétendu traité franco-prussien. La position faite
au cabinet anglais ne lui permettait ni l'éloge ni
le blâme. Les faits présentés, sans commentaires,
parlent assez d'eux-mêmes et inspirent à tout
homme d'honneur le dégoût et le mépris.
Les journaux de toute nuance ont flétri la poli-
tique de l'homme d'Etat imprudent qui voit écla-
ter entre ses mains l'arme qu'il dirigeait contre
son ennemi. (Correspondallcc liavas.)
BELGIQUE
FRONTIÈRE PRUSSO-BELGE, 30 juillel.-Oll s'ap-
prète en Prusse à soutenir un rude choc dans les
provinces rhénanes, et cela vers le nord. Ce qui le
prouve, c'est que l'administration du jardin zoolo-
gique de Cologne, le plus beau de toute l'Allema-
gne, a fait transporter les animaux de cet établis-
sement à Anvers et dans d'autres villes. Les bâti-
ments, arbres ët dépendances, ainsi que les cons-
tructions voisines ont été rasés. Ce seul fait prouve
clairement combien on est peu sùr dans les Etats
du roi Guillaume de pouvoir marcher sans encom-
bre sur Paris, comme toute la presse prusso-alle-
mande l'annonce.
Néanmoins, un Westphalien, habitant Paris,
(ce monsieur ne donne ni sa rue, ni son numéro)
fait publier dans tous les journaux prussiens qu'il
se charge contre une faible rétribution de retenir
des appartements aux officiers de l'armée libéra-
trice allemande !
Le grand-duc de Bade a fait transporter à Berlin
tous les objets de prix qui appartiennent à lui ou
à l'Etat.
La première surprise causée par les prétendues
révélations du Tinws, dont on pouvait tout d'abord
reconnaître le vrai mobile, est complètement pas-
sée en Belgiqne. Malgré les efforts des agents
prussiens répétant sur tous les tons que la France
est insatiable dans son ambition, la nation belge
n'a de sympathies que pour la France. (Correspon-
dance du Nord-Esl.)
DANEMARK
36 juillet. — L'opinion publiqua s'échauffe de
jour en jour. Hier, le Fœdrelandel s'est joint au
IltjmdaLpour encourager le peuple et lui démon-
trer la nécessité absolue de notre participation à
la guerre, aussitôt que le moment propice sera
venu. Il en est de même du Follcels Avis (Gazelle
du peuple), organe très-répandu parmi les classes.
moyennes de la bourgeoisie.
De toutes les parties du pays nous arrivent des
lettres inspirées par les mêmes sentiments. La
jeunesse des campagnes, elle aussi, est en mouve-
ment, ce qui est un signe fort bon, car il in-
dique que, si la guerre éclate, il se présentera un
grand nombre de volontaires. Le corps de volon-
taires de Copenhague s'accroit tous les jours,
malgré les chaleurs, qui rendent les exercices
très-fatigants.
La Prusse vient de commettre une nouvelle in-
fraction au traité de Vienne de 1861. Bien que l'arti-
cle 19 de ce traité assure aux habitants du Slesvig
la liberté d'émigrer en Danemark, jusqu'au 16 no-
vembre 1870, toute émigration a été défendue; et
les jeunes gens qui, ayant émigré pendant les der-
nières années, sont maintenant sujets danois,
mais qui au moment actuel se trouvent dans le
Slesvig pour assister leurs, familles, ont été saisis
et revêtus de l'uniforme prussien.
Vous savez par le télégraphe que M. Kryger
a été arrêté. Le prétexte de cette arrestation est
qu'il a demandé que le conseil cantonal dont il est
membre fût, aux termes de la loi, consulté avant
toute réquisition mise sur les chevaux. La cause
véritable est naturellement le désir qu'on éprouve
à Berlin de se venger des vérités dures qu'il a fait
entendre au roi et aux chambres prussiennes, et
de priver les Danois du Slesvig de leur chef princi-
pal. (Correspondance du Nord-Esl.)
PRUSSE
BERLIN, 28 juillet. — La déclaration du Gouver-
nement français, en vertu de laquelle le charbon
de terre n'est pas considéré comme contrebande
de guerre, exaspère les Prussiens ; ils sont furieux
de voir que les Anglais vont fournir du charbon à
la flotte française de la Baltique.
Les finances prussiennes ne sont décidément
pas en aussi bon état qu'on l'a toujours dit. Les
banquiers ne se sont pas montrés très-disposés à
se charger de la totalité du nouvel emprunt, et le
ministre a dû recourir, ce qui n'avait jamais en
lieu jusqu'à présent, à une souscription publique
qui sera ouverte le 3 aoùt et portera sur 1 milliard
de rente à 5 O/o- La clause qui obligeait le gou-
vernement, dans tous les emprunts antérieurs, a
amortir tous les ans une certaine somme, ne se
retrouve plus dans celui-ci. Cette fois encore,
comme pour l'emprunt de la marine, c'est la Con-
fédération et non la Prusse qui emprunte. Etrange
garantie : un Etat qui ne possède qu'une maison à
Berlin, et qui V:l, avoir 2o0 millions de thalers
(1 milliard) de dettes! (Idem.)
— Le duc Adolphe de Nassau, loin de se join-
dre à l'armée prussienne, comme on l'a prétendu,
vient de se rendre au château de Hohenbourg,
dans les montagnes de la Bavière. (Idem.)
-Les Prussiens accusent l'Angleterre de par-
tialité pour la France. Des plaintes violentes s'é-
lèvent à ce sujet dans la presse de Berlin et dans
le public.
La Gazelle de la Croix dit que lord Loftus s'est
retiré à Potsdam pour éviter des explications em-
barrassantes sur la manière étrange dont l'Angle-
terre pratique la neutralité, particulièrement en
ce qui concerne le charbon. (Idem.)
SUISSE
BERNE, 31 juillet. — On annonce de Vienne
que le ministère de la guerre vient d'ordonner
l'achat de 40,000 chevaux pour l'artillerie, dont les
attelages sont incomplets.
La Suisse a demandé la permission d'acheter ea
Hongrie 1,000 chevaux; on la lui a refusée.
Le gouvernement bavarois a révoqué la défense
d'exporter la farine et le blé, mais seulement à la
suite d'une remontrance très-prèssantô da la v",-rt
du gouvernement austro-hongrois. (Idem.)
AUTRICHE-HONGRIE
On écrit de Vienne, le 28 juillet :
Il est question ici d'un emprunt de 12 millions
de florins, destinés à l'achat de chevaux et de
chaussures pour l'armée. Cette somme doit être
avancée à l'Etat par un petit nombre des princi-
pales banques de la ville. L'emprunt sera contracté
solidairement : la Hongrie y participera pour
3,600,000 florins, et la Cisleithanie pour 8,400,000
florins. Lès délégations et les représentants des
deux parties de l'empire auront à fournir la cou-
verture de ce crédit et à voter les moyens de rem-
boursement. Les négociations sont dirigées par le
nouveau ministre des finances, M. Louyay. Cor-
respondance Ilavas.)
«
VIENNE, 31 juillet. — Les renseignements offi-
ciels reçus ici portent que l'accueil fait à Munich
au prince royal de Prusse dans les hautes régions
a été froid.
Le comte Bray, président du conseil bavarois;
a essayé de toucher la question des garanties pour
l'indépendance et l'intégrité de la Bavière. La
prince a brusquement rompu l'entretien. (Corres-
pondance du Nord-Est.)
VIENNE, 30 juillet, soir. — Les prétendues ré-
vélations du Times et de la Correspondance de Ber-
lin n'influeront pas sur les décisions du cabinet de
Vienne, qui sait bien comment les choses se sont
réellement passées.
A ses yeux, ces .révélatious compromettent sur-,
tout la Prusse qui, en 1866 et même avant^pnj-»
mettait à la France de luitcéder des partie du ter-
ritoire allemand pour obtenir qu'elle coopérât à
son agrandissement.
L'Autriche mettra sa politique d'accord avec .les
intérêts que le triomphe de la Prusse ruinerait ;
elle marchera avec la France, si les -événements
l'exigent, et jamais avec la Prusse. (Idem.)
ITALIE
CHAMBRE DES DÉPUTÉS, — Séance du 30 juillet.
Le comité discute le projet de crédit extraordi-
naire de 16 millions.
FEUILLETON DU JOURNAL OFFICIEL
DU MARDI 2 AOUT 1870
SALON DE 1870
rx
MM. jalasert, carolus durait, Mlle XÉLIE
JACQUEMART, mm. BONNËGRAGE, PÉRI-
GNON, COROT, ADOLPHE GUILLON, KARL
BODMEH, BELLET, PAUL FLANDRIN, HAR-
PIGXIES, ÉMILE BRETON, UHEVANDIER
DE VALDROME, GUIAUD, BERNIER, DAU-
BIGNY.
Nous voici arrivé aux portraitistes. Ils
sont nombreux et remarquables. Il faudrait
plus de place que nous n'en avons à notre
disposition pour leur rendre justice à tous.
En outre, ce n'est pas chose aisée de don-
ner Fid e d'un. portrait en peu de mots.
Quelques lignes suffisent pour indiquer
sommaireaieot le sujet et l'ordonnance
d'un tableau; il n'en est pas de même pour
une figure unique, sans action, dont la
physionomie particulière ne peut se rendre
que par des nuances multipliées et un long
détail. Mais ne perdons pas en considéra-
tions l'espace qui nous est réservé. Que
ceux dont nous ne parlons pas ne nous
en sachent pas mauvais gré, ce n'est pas
notre faute.
M. Jalabert à exposé le portrait de S. A.
I. Madame la grande-duchesse Marie-Nico-
laewna, où cet artiste d'un talent si sûr
et si délicat semble s'êtré surpassé. La
grande-duchesse est représentée debout,
lé corps presque de profil, la te te tournée
vers le public, les' bras croisés, vêtue de
satin blanc, une pèlerine de dentelles sur
les épaules, un collier de perlés fines au
col. Elle est coiffée d'une espèce de bonnet
en guipure blanche qui lui cache presque les
cheveux. La tète, dont lés traits purs et ré-
guliers rappellent ceux de l'empereur Ni-
colas; a un grand air de distinction .'Les yeux
bleus, par leur expression douce et rêveuse,
tempèrent la majesté un peu sévère du
masque. La figure se détache en clair d'un
fond gris-marron. Il est difficile d'être à la
fois plus simple et plus noble. Le livret ne
porterait aucune indication, que personne
n'hésiterait à reconnaître la haute qualité
du modèle.
Comme pour se dédommager dë l'espèce
de contrainte respectueuse qu'impose tou-
jours, même aux plus habiles, un portrait
d'apparat, M. Jalabert a fait de Mme G. un
portrait où la fantaisie se mèle à la ressem-
blance eL qu'il intitule : « Souvenir d'un
a1 costumé. » C'est une peinture char-
mante, gracieuse comme un Longlii, spi-
rituelle comme un Tiepolo, et qui fait pen-
ser aii carnaval de Venise du temps de
Gozzi. La damé est debout, vêtue de satin
rouge avec guipures blanches, les mains
dans un manchon rouge garni de fourrures
noires. Sur sa tête est planté crânement un
petit tricorne noir, dont la voilette retombe
par derrière. Un masque rouge, repoussé
entre l'oreille et les cheveux, laisse voir
une physionomie gaie et souriante qu'il
eùt été fâcheux de cacher sous un morceau
de carton, il nous semble, en regardant
cette figure, nous promener sous les Pro-
curaties, et voir Casanova entrer dans
une redoute pour jouer le pharaon avec
quelque descendant des doges, pendant
que les masques nouent des intrigues et
font des pantalonnades sur la place Saint-
Marc, a travers les vols de pigeons effa-
rouchés.
On se souvient de ce beau portrait de
femme de M. Carolus Duran, si sobre, si
chaste et si élégant dans sa discrétion
d effet et de toilette. Cette année, pour
prouver là souplesse de son talent, it nous
montré une beauté d'une nature toute dif-
férente, enj pleine fleur de jeunesse et de
lumière, au milieu d'un éblouissement de
satin lançant les éclairs de ses cassures,
peinte dans la pâte avec une robustesse
délicate et une fine brutalité réaliste d'un
effet très-neuf et très-piquant. Mme ***,
soulevant de la main un rideau de velours
vert, a l'air de faire son entrée dans l'ate-
lier du peintre et de s'arrêter dans une
pose saisie par l'artiste disant : « Vous êtes
bien ainsi. » Elle a une robe de satin
mauve très-clair, décolletée, laissant voir
les bras nus, et bouffant à demi-relevée sur
une jupe de taffetas bleu de ciel. L'autre
main tenant un éventail pend avec négli-
gence au bout d'un beau bras rond, potelée,
blanche, veinée de bleu, chargée de bagues
et moins petite, il nous semble, sur le ta-
bleau que chez le modèle. La tète, souriante,
éclate de vie et se détache de la toile avec
le plus audacieux bonheur de relief. Les
satins ont un éclat surprenant et une am-
pleur de plis tout à fait vénitienne. Peut-
être reprocherions-nous à l'artiste l'abus
du blanc dans les lumières, bien qu'il ne
soit guère possible de rendre les jours fri-
sants d'une autre manière, quoiqu'il eût
été plus sage de les éviter. Quoi qu'il en
soit, ce portrait est une œuvre magistrale,
d'une originalité profonde, et qui dénote
chez le peintre un véritable tempérament
de coloriste, mais de coloriste ayant souci
de la forme, comme Titien ou Velasquez.
Tout le monde s'arrête longtemps devant
ce portrait, qui est en même temps un ta-
bleau, et regarde avec plaisir cette char-
mante femme, aux pieds de laquelle jappe
un king-charles de la plus pure race. -
Le portrait de Marguerite est une déli-
cieuse tète d'enfant, qui rappelle sans dé-
savantage la petite infante espagnole du
Musée.
Avec le portrait de M. Duruy, M"e Nélie
Jacquemart avait obtenu un de ces succès
qui, remportés au début d'une carrière, nui-
sent quelquefois à l'artiste au lieu de
le servir. Il est si commode, tout en ayant
l'air équitable, d'éreinter le second ouvrage
avec le premier et de créer un antago-
nisme entre le passé et le présent de l'au-
teur ou du peintre, de façon à le détruire
par lui-même. Ce malheur n'est pas arrivé
à M,leNélie Jacquemart, pour laquelle nous
craignons que le remarquable portrait de
M. le ministre de l'instruction publique
(il l'était alors) ne devint ce qu'on appelle
en argot d'atelier une scie.
Son portrait du maréchal Canrobert est
très-beau et très-ressemblant. Le maré-
chal, vêtu en bourgeois, est représenté de-
bout, le pouce de la main droite entré
dans la poche de son pantalon, la main
gauche tenant des gants, le bras appuyé
sur un bahut de chêne; la tête est portée
haute, un peu renversée en arrière, par
habitude martiale. C'est une peinture éner-
gique - et solide, telle que peu d'hommes
seraient en état de la faire.
Mme Nélie Jacquemart a exposé aussi un
gracieux portrait de femme, celui de Mme
la baronne GasLon de M. La baronne,
habillée de brun rouge, décolletée, le
corps de profil et la tète, tournée vers le
spectateur, appuie la main gauche sur une
console où sont un éventail et des gants.
L'artiste a rendu avec beaucoup de charme
cette physionomie une et spirituelle, en-
cadrée de cheveux châtains.
On sait avec quelle vigueur M. Bonne-
grâce peint les portraits d'homme, quelle
solidité d'empâtement et quelle. puissance,
de relief il y apporte. Mais son succès
même, dans ce genre, fait croire qu'il réus-
sirait moins aisément à rendre les délica-
tesses de. la femme et les grâces da. l'en-
fant. C'est una erreur, et, pour s'en con-
vaincre, il suffit de regarder le portrait du
jeune Georges F., traité dans une manière
suave et fondue, qui n'enlève.rien àla cha-
leur du ton. GeorgesF., garçon de sept ou-
huit ans, beau comme le jeune Lambton, de
Lawrence, est vu de face, debout, le coude
appuyé sur une table et tenant une rose de
la main gauche. Ses cheveux blonds, très-
longs par derrière, sont coupés ras sur le
front comme ceux démentants d'Edouard,
dans le tableau de Paul Delavoche. Ilporte
un costume m velours, noir avec -une large
ceinturé bleue., des b&sbleuset une^randa
collerette de guipure blanche tombant sur
les épaules. Le tapis de la table est rouge,
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