Titre : Bulletin de la Société historique d'Auteuil et de Passy
Auteur : Société historique d'Auteuil et de Passy. Auteur du texte
Éditeur : Société historique d'Auteuil et de Passy (Paris)
Date d'édition : 1907-04-01
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34424416g
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 3717 Nombre total de vues : 3717
Description : 01 avril 1907 01 avril 1907
Description : 1907/04/01 (A1907,N2,T6)-1907/09/30 (A1907,N3,T6). 1907/04/01 (A1907,N2,T6)-1907/09/30 (A1907,N3,T6).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k6509792v
Source : Société historique d'Auteuil et de Passy, 2012-362885
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 11/11/2013
7o ÉDOUARD FOURNIER, QUILLET ET LE TROUBADOUR CATELAN
Edouard Fournier, Quillet
et le Troubadour Catelan (1)
Les légendes sont les fleurs de l'histoire; à mon sens,
c'est avec discrétion qu'il convient d'y toucher. Il m'est
pénible de voir détruire, sans nécessité, une jolie légende
souvent, il y a là une véritable tradition. Sans fondements
apparents, parce que le tassement des siècles les a fait dis-
paraître, une légende se fait parfois reconnaître pour une
vérité ; en archéologie, en préhistoire, des légendes, des
traditions ont servi à découvrir des antiquités dont l'his-
toire avait perdu toute trace, et dont nulle apparence ne
se révélait.
Ces réflexions me viennent, à propos de la poétique et
dramatique légende du troubadour Catelan ou Catalan, traî-
treusement assassiné, raconte-t-on, dans la forêt de Rou-
vray. Des critiques contestent sa triste fin et veulent en
abolir le souvenir dans notre histoire locale ; on a cité, à
ce sujet, Édouard Fournier se gaussant de Quillet. Ren-
dons-nous compte, d'abord, de la personnalité et des tra-
vaux de ces deux écrivains.
Quillet (Pierre-Nicolas), né à Paris en 1760, mourut à
Passy en 1837. Entré dans l'administration de la Guerre,
où il devint sous-intendant militaire, il y publia un ouvrage
important et apprécié : État actuel de la législation sur
radministration des troupes. Membre de plusieurs sociétés
savantes et littéraires, il consacra les dernières années de
sa vie à écrire l'histoire de Passy (2), où il avait été adjoint
au maire, et de la région voisine, qu'il connaissait fort bien.
Nombre d'écrivains, notamment dans notre Société ont
puisé dans son livre, divisé en deux parties, imprimé en
1836. Assurément, il s'est livré à beaucoup de recherches.
Son style est d'ailleurs empreint, comme le comporte
l'époque, de sensiblerie, de goût pour les anecdotes, sur-
tout du genre léger, pour les développements imaginatifs ;
mais rien ne permet de suspecter sa sincérité.
Édouard Fournier, d'uneautre époque, né en 1819, mort
en 1880, fut littérateur, auteur dramatique, bibliothécaire du
ministre de l'intérieur, ami particulier de M. Eugène Ma-
nuel, notre si regretté président, fureteur et amateur de
reconstitutions anciennes et de critiques. Son livre des
Énigmes des rues de Paris (3), plein d'érudition et d'inté-
quise de Monconseil. Dans le Catalogue de la Bibliothèque de
M. Victor Bouvrain (vente des 6, 7 et 8 mai 1907. Salles
Silvestre), on trouve à l'article 427, mention d'un manuscrit
in-8 de MM. Favart et de Santerre : Fête donnée à Mgr le
Maréchal Duc de Richelieu, par Mme la Marquise de Mon-
conseil, à Bagatelle, le. août 1762. Ce manuscrit contenait
une pièce dramatique : l'Amour naïf, parodie d'Annette et
Lubin par Favart et de Sauterre, qui ne se trouve pas im-
primée dans le Théâtre de Favart. (Note de M. r.h!lnnphf'\ic •,
( 1 ) V. Bulletin : t. I, 18, 160, 200 ; t. II, 60 : t III ')() > r
(2) Chroniques de Passy, Paris. Delaunay, 2 vol. in-8 'i83fi
(3) Il est aussi l'auteur de : Paris démoli, Paris capitale,
Promenade historique dans Paris, Chroniques et légendes
des rues de Paris, etc.
rèt, imprimé pour la première fois en 1859, réimprimé en
1892, n'est point exempt, parfois, de quelque légèreté et de
jugements prompts.
Donc, Quillet, dans la deuxième partie de ses Chroniques
de Passy (p. 184 à 190), sous les titres de : Pyramide ou
Croix de Catalans. — Le Troubadour, rapporte la lé-
gende qui nous occupe, en prenant la précaution d'écrire :
« Il y a plusieurs versions sur l'origine de cette croix. Si
celle que nous allons raconter n'est pas la plus vraie, c'est
au moins la plus vraisemblable. »
Plus loin, il précise certains points : « Cette pyramide,
qui maintenant est minée par le temps et ne présente plus
qu'une masse assez informe, était, en effet, surmontée
d'une croix. Sur l'une des faces latérales étaient gravées
les armes de Provence, et sur l'autre celles de Mo-
naco (1), maison dont était issu Catalans. »
Voici maintenant comment Édouard Fournier traite
notre historien local, à propos de la légende ou tradition
dont il s'occupe (2) :
« On vous a parlé d'un troubadour, nommé Catelan ou
Catalan, qui revenant d'Espagne ou de Provence, je ne
sais trop au juste, aurait été tué par des voleurs, dans le
bois de Boulogne, tout près du lieu où fut élevée la croix
de pierre dont on voit encore un tronçon. Il n'avait, dit-
on, sur lui que des fioles pleines de liqueurs rares et quel-
ques plantes parfumées. Ç'aurait donc été un crime tout
gratuit, dont le nom d'une allée voisine, le Chemin des
voleurs, et une longue inscription en mauvais latin auraient
consacré le souvenir sinistre. Telle est, en peu de mots,
la légende.
« Ceux qui la donnent pour vraie invoquent des chro-
niques à l'appui de leur dire, et vous y montrent pour
preuve le texte même de l'inscription ; mais quelles sont
ces chroniques invoquées ? Ce sont les Chroniques. de
Passy, par M. Quillet, livre curieux, d'ailleurs, qui date
de trente ans au plus, et qui ne tire le plus souvent ses
preuves que de lui-même. L'histoire ne se contente pas de
si peu, même pour le cas futile et mondain qui nous oc-
cupe.
« A présent que vous savez le faux, voici ce qui semble
être le vrai :
« Au XVIIe siècle, le bois de Boulogne était, depuis
longtemps déjà, un domaine royal, entouré de longues
allées ayant toutes leur nom comme les rues de Paris.
Aux carrefours, que formaient ces avenues, s'élevaient des
croix, qu'on désignait aussi chacune par un nom particu-
lier, dû tantôt à quelque capitaine des chasses, tantôt à
quelque propriétaire d'un domaine voisin.
« Je pourrais vous citer ainsi, d'après le plan de La Grive
(1730) que j'ai sous les yeux : les croix de Beauvais, de Saint-
Ange, de Marcilly, celle des Laleu. Nous ne devons nous
occuper que de la Croix Catelan (3). Ce qui précède servira
toutefois à vous prouver qu'elle n'était pas une exception
dans le bois, et que le nom qu'elle portait pouvait bien
lui venir, non de quelque malheureux tué sur ce terrain,
mais tout bonnement d'un propriétaire, ou d'un capitaine
des chasses. C'est ce qui restait à trouver. »
(1) L'Armoriai général de Rietstap mentionne trois mai-
sons de Monaco (toutes d'origine italienne).
(2) Énigmes des rues de Paris. Nouvelle édition, p. 326 à
328.
(3) Bull. t. III, p. 8. Voir aussi : le Bois de Boulogne, plan
par N. de Fer (1705). Bull. t. 1, p. 9.
Edouard Fournier, Quillet
et le Troubadour Catelan (1)
Les légendes sont les fleurs de l'histoire; à mon sens,
c'est avec discrétion qu'il convient d'y toucher. Il m'est
pénible de voir détruire, sans nécessité, une jolie légende
souvent, il y a là une véritable tradition. Sans fondements
apparents, parce que le tassement des siècles les a fait dis-
paraître, une légende se fait parfois reconnaître pour une
vérité ; en archéologie, en préhistoire, des légendes, des
traditions ont servi à découvrir des antiquités dont l'his-
toire avait perdu toute trace, et dont nulle apparence ne
se révélait.
Ces réflexions me viennent, à propos de la poétique et
dramatique légende du troubadour Catelan ou Catalan, traî-
treusement assassiné, raconte-t-on, dans la forêt de Rou-
vray. Des critiques contestent sa triste fin et veulent en
abolir le souvenir dans notre histoire locale ; on a cité, à
ce sujet, Édouard Fournier se gaussant de Quillet. Ren-
dons-nous compte, d'abord, de la personnalité et des tra-
vaux de ces deux écrivains.
Quillet (Pierre-Nicolas), né à Paris en 1760, mourut à
Passy en 1837. Entré dans l'administration de la Guerre,
où il devint sous-intendant militaire, il y publia un ouvrage
important et apprécié : État actuel de la législation sur
radministration des troupes. Membre de plusieurs sociétés
savantes et littéraires, il consacra les dernières années de
sa vie à écrire l'histoire de Passy (2), où il avait été adjoint
au maire, et de la région voisine, qu'il connaissait fort bien.
Nombre d'écrivains, notamment dans notre Société ont
puisé dans son livre, divisé en deux parties, imprimé en
1836. Assurément, il s'est livré à beaucoup de recherches.
Son style est d'ailleurs empreint, comme le comporte
l'époque, de sensiblerie, de goût pour les anecdotes, sur-
tout du genre léger, pour les développements imaginatifs ;
mais rien ne permet de suspecter sa sincérité.
Édouard Fournier, d'uneautre époque, né en 1819, mort
en 1880, fut littérateur, auteur dramatique, bibliothécaire du
ministre de l'intérieur, ami particulier de M. Eugène Ma-
nuel, notre si regretté président, fureteur et amateur de
reconstitutions anciennes et de critiques. Son livre des
Énigmes des rues de Paris (3), plein d'érudition et d'inté-
quise de Monconseil. Dans le Catalogue de la Bibliothèque de
M. Victor Bouvrain (vente des 6, 7 et 8 mai 1907. Salles
Silvestre), on trouve à l'article 427, mention d'un manuscrit
in-8 de MM. Favart et de Santerre : Fête donnée à Mgr le
Maréchal Duc de Richelieu, par Mme la Marquise de Mon-
conseil, à Bagatelle, le. août 1762. Ce manuscrit contenait
une pièce dramatique : l'Amour naïf, parodie d'Annette et
Lubin par Favart et de Sauterre, qui ne se trouve pas im-
primée dans le Théâtre de Favart. (Note de M. r.h!lnnphf'\ic •,
( 1 ) V. Bulletin : t. I, 18, 160, 200 ; t. II, 60 : t III ')() > r
(2) Chroniques de Passy, Paris. Delaunay, 2 vol. in-8 'i83fi
(3) Il est aussi l'auteur de : Paris démoli, Paris capitale,
Promenade historique dans Paris, Chroniques et légendes
des rues de Paris, etc.
rèt, imprimé pour la première fois en 1859, réimprimé en
1892, n'est point exempt, parfois, de quelque légèreté et de
jugements prompts.
Donc, Quillet, dans la deuxième partie de ses Chroniques
de Passy (p. 184 à 190), sous les titres de : Pyramide ou
Croix de Catalans. — Le Troubadour, rapporte la lé-
gende qui nous occupe, en prenant la précaution d'écrire :
« Il y a plusieurs versions sur l'origine de cette croix. Si
celle que nous allons raconter n'est pas la plus vraie, c'est
au moins la plus vraisemblable. »
Plus loin, il précise certains points : « Cette pyramide,
qui maintenant est minée par le temps et ne présente plus
qu'une masse assez informe, était, en effet, surmontée
d'une croix. Sur l'une des faces latérales étaient gravées
les armes de Provence, et sur l'autre celles de Mo-
naco (1), maison dont était issu Catalans. »
Voici maintenant comment Édouard Fournier traite
notre historien local, à propos de la légende ou tradition
dont il s'occupe (2) :
« On vous a parlé d'un troubadour, nommé Catelan ou
Catalan, qui revenant d'Espagne ou de Provence, je ne
sais trop au juste, aurait été tué par des voleurs, dans le
bois de Boulogne, tout près du lieu où fut élevée la croix
de pierre dont on voit encore un tronçon. Il n'avait, dit-
on, sur lui que des fioles pleines de liqueurs rares et quel-
ques plantes parfumées. Ç'aurait donc été un crime tout
gratuit, dont le nom d'une allée voisine, le Chemin des
voleurs, et une longue inscription en mauvais latin auraient
consacré le souvenir sinistre. Telle est, en peu de mots,
la légende.
« Ceux qui la donnent pour vraie invoquent des chro-
niques à l'appui de leur dire, et vous y montrent pour
preuve le texte même de l'inscription ; mais quelles sont
ces chroniques invoquées ? Ce sont les Chroniques. de
Passy, par M. Quillet, livre curieux, d'ailleurs, qui date
de trente ans au plus, et qui ne tire le plus souvent ses
preuves que de lui-même. L'histoire ne se contente pas de
si peu, même pour le cas futile et mondain qui nous oc-
cupe.
« A présent que vous savez le faux, voici ce qui semble
être le vrai :
« Au XVIIe siècle, le bois de Boulogne était, depuis
longtemps déjà, un domaine royal, entouré de longues
allées ayant toutes leur nom comme les rues de Paris.
Aux carrefours, que formaient ces avenues, s'élevaient des
croix, qu'on désignait aussi chacune par un nom particu-
lier, dû tantôt à quelque capitaine des chasses, tantôt à
quelque propriétaire d'un domaine voisin.
« Je pourrais vous citer ainsi, d'après le plan de La Grive
(1730) que j'ai sous les yeux : les croix de Beauvais, de Saint-
Ange, de Marcilly, celle des Laleu. Nous ne devons nous
occuper que de la Croix Catelan (3). Ce qui précède servira
toutefois à vous prouver qu'elle n'était pas une exception
dans le bois, et que le nom qu'elle portait pouvait bien
lui venir, non de quelque malheureux tué sur ce terrain,
mais tout bonnement d'un propriétaire, ou d'un capitaine
des chasses. C'est ce qui restait à trouver. »
(1) L'Armoriai général de Rietstap mentionne trois mai-
sons de Monaco (toutes d'origine italienne).
(2) Énigmes des rues de Paris. Nouvelle édition, p. 326 à
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(3) Bull. t. III, p. 8. Voir aussi : le Bois de Boulogne, plan
par N. de Fer (1705). Bull. t. 1, p. 9.
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