Titre : Le Monde illustré
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1872-12-14
Contributeur : Yriarte, Charles (1833-1898). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32818319d
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 14 décembre 1872 14 décembre 1872
Description : 1872/12/14 (A16,N818). 1872/12/14 (A16,N818).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k63810347
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, FOL-LC2-2943
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 05/08/2013
366 ; LE MONDE ILLUSTRÉ
cée, les quais et les ponts sont devenus le rênd'ez-vôus
des promeneurs. C'est là qu'aux, rares moments d'é-
claircie les Parisiens vont flâner le plus volontiers çoùr
regarder le fleuve, se regarder entre eux, et faire ample
moisson d'incidents pittoresques.
Ici les pécheurs, incrustés sur les parapets, jettent
gravement leur ligne au fil du courant; plus loin, du
haut de l'esplanade Henri IV, les curieux plongent le
regard dans les jardins submergés du Vert-Galant, le
café-concert du pont Neuf; plus loin encore, dans les
Mots de la banlieue, c'est la chasse à coups de bâton
du gibier surpris par la crue.
Mème aux jours des plus maussades oridées, le spec-
tajcle< du Paris pluvieux a ses côtés divertissants. Nous
né disons pas cela, bien entendu, pour les malheureux
'entassés sur l'impériale des omnibus, — éternellement
complets ! - pour les piétons, obligés de lutter, para-
pluie au poing, contre un vent impitoyable, ni pour les
pauvres rongeurs, qui, échappés aux nécessités culinai-
res nées de l'investissement prussien, sont aujourd'hui
victimes de l'invasion des eaux.
——————— .,. - - — ——————
NAUFRAGE DE LA « MARGUERITTA »
(Voir page 364.)
Sahit-Pierrolcs-Calais, 8 décembre ISIS.
Monbieur le directeur du Monde illustré,
Je vous adresse un croquis du naufrage de la goëlette
hollandaise Margueritta, en vue des jetées de Calais. ;
Voici quelques détails sur ce terrible cinistre :
Le G décembre, vers onze heures du matin, le patron
du bateau de sauvetage et son second aperçurent du
haut de la jetée de l'Est un navire qui luttait contre le
vent. Ils allèrent aussitôt à sa rencontre, l'abordèrent
après de grands efforts et parvinrent à sauver les .cinq
hommes de l'équipage.
Mais ils ne purent arriver jusqu'à la cabine. Là se
trouvaient enfermés la femme du capitaine et ses deux
fils, dont l'aîné était âgé de trois ans. Les malheureux
ont été engloutis après une agonie dont vous pouvez
deviner toute l'horreur.
La Margueritta, partie de Stettin (Prusse), il y après
de six semaines, avec-un-chargement de bois dè chêne
à destination de Newport, avait été presque constam-
ment en butte aux bourrasques.
A plusieurs reprises, elle avait éprouvé des avaries
que les hommes du bord avaient successivement répa-
rées. Mais le 4 décembre, dès l'aube, elle a essuyé une
tempête du nord-eât plus impitoyable que la précé-
• dente. La mer était des plus mauvaises. La goélette
fut enfin poussée sur nos côtes, en face des bains.
Pendant deux heures d'angoisses, au bout desquelles
le navire se brisa, huit personnes luttèrent contre les
éléments en furie.
Hier, dans la journée, la mer a rejeté sur la plage
le corps de l'aîné des enfants. Quant à son petit Frère,
si jamais on le retrouve, ce sera en compagnie de sa
mère, car l'infortunée l'étreignait dans ses bras au mo-
ment suprême.
Pendant que nos intrépides pilotes tentaient le sau-
vetage de la Margueritta* le brick-goëlettc César, ca-
pitaine Ferray, chargé de goudron, venant.de Londres !
à destination de Dunkerque, était dans lu. situation la
plus critique et demandait du secours.
Un peu plus lard,1 nous avons, appris qu'il avait
échoué' à trois kilomètres du chenal 'de Gmvdhcs.
Cinq hommes sur six ont péri.
:
LE « CAT-O'-NINE-TAILS »
SUPPLICE D'UN hTRANGLEUR A LONDnKS
(Voir page 365) , *
Avant 1867, Londres était infesté de voleurs noctur-
nes. Les attaques et les violences contre les particu-
liers se multipliaient d'une façon vraiment terrifiante.
Rien ne pouvait arrêter l'audace des malfaiteurs, ni la
prison, ni ia déportation temporaire ou perpétuelle. La.
peine de mort, appliquée aux plus coupables, ne suffi-
sait même pas ! corriger les autres. -.
La redoutable association des ÉtranglcUrs (garotlers)
se montrait la plus réfractaire- à tout moyen de répres-
sion. En vain la justice anglaise sévissait contre elle
avoclâ dernière rigueur. Les piétons continuaient d'ê-
tre assaillts. Quiconque s'attardait la nuit dans les quar-
tiers déserts était à peu près certain d'être empoigné
par derrière/au détour de quelque rue, et de sentir un
bras "d'acierTétreindre à la. gorge et lui faire endurer
les. angoisêi s de la pendaison, jusqu'à ce que, vaincu
par là douleur, il consentit à se laisser dévaluer.
Pour purger Londres de ce fléau, il fallut, bon gré
mal gré, en venir aux moyens extrêmes. Le gouverne-
ment de la reine, ému des plaintes qu'il recevait de
tous côtés, se décida à intervenir, et, il y a cinq ans,
il présenta au Parlement un bill demandant l'applica-
tion aux étrangleurs de le peine du fouet.
Le projet fut adopté et mis immédiatement à exécu-
tion..
Depuis loi s, on a vu diminuer peu à peu les attaques
nocturnes. A l'heure qu'il est, elles sont aussi rares
qu'elles étaient fréquentes autrefois.
L'étrangleur condamné au supp ice en question est
amené dans la cour de la prison. En présence du shériff
et d'un médecin chargé de mesurer le nombre des
coups à l'énergie physique du patient, ce dernier est
fixé au poteau, et, le dos mis à nu, reçoit la correction
d'un fouet à neuf lanières manié par la main de Cal-
craft, le bourreau de Londres.
Ce fouet, c'est le terrible cat-o-iiine- tails (chat à neuf
queues), dont chaque tige de cuir, armée d'un triple
nœud, enlève en tombant sur l'épaule du condamné
des lambeaux d'épiderme et des gouttes de sang.
Rarement le nombre des coups s'élève à plus de
vingt; souvent, dès le dixième, le médeciu s'approche
du coupable, lui tâte le pouls et fait cesser la correc-
tion.
Certes, on ne peut s'empêcher de frémir en songeant
à l'horreur d'un tel châtiment. Toutefois, il ne faudrait
pas trop se hâter de taxer d'inhumaine et de barbare
une mesure qu'on n'a employée qu'à la dernière extré-
mité, contre des malfaiteurs incorrigibles dont l'œuvre
de terreur n'était pas entravée même par l'exemple du
gibet.
» -
L'ENTERREMENT PRÉMATURÉ
Il est certains sujets dont l'intérêt absorbe au su-
prême degré, mais qui sont réellement trop horri-
bles pour qu'on en tire les éléments de la fiction lé-
gitime. Le romancier doit les rejeter sous peine d'in-
spirer. l'horreur et le dégoût. On ne peut les traiter
qu'autant que la majestueuse sévéïité du vrai les
sanctifie et les soutienne.. Nous frémissons, par
exemple, d'une jouissance douloureuse des plus inten-
ses, en parcourant les relations du passage de lu Bé-
résina, du tremblement de tenc ue Lisbonne, de la
peste de Londres, du massacre de la Saint-Barthé-
lemy ou bien encore de l'étouffement de cent-
vingt-trois prisonniers dans le Trou-Noir de Cal-
cutta. Mais dans ces relations c'est le fait, c'est la
réalité, c'est l'histoire qui nous émeut. Quant à l'in-
vention, notre dégoût seul doit l'accueillir.
J'ai mentionné quelques-unes des plus grandes et
des plus augusles calamités de l'histoire; mais,
dans tout cela, c'est l'étendue, non moins que le
caractère de la calamité qui. impressionne si vive-
ment notre imagination. Point n'est besoin de rap-
peler au lecteur que, dans le long et pénible cata-
logue des misères humait es, j'aurais pu choisir
beaucoup d'exemples individuels plus caractérisés
par la souffrance essentielle qu'aucune de ces vastes
généralités du désastre..La vraie souffrance, le mal-
heur éventuel, est, ne l'oublions pas, personnel, et
non diffus. Les effrayantes extrémités de l'agonie
frappent l'unité et jamais la masse. Remercions-en
un Dieu miséricordLeux,
Être enterré vif est, sans contredit, le plus horri-
ble des accidents qui ont toujours affecté la morta-
lité commune. Que la chose soit arrivée fréquem-
ment, et même très-fréquemment, ne peut être nié
par un penseur quelconque. Les bornes qui sépa-
rent la vie de la mort sont, pour le moins, vagues
et indéfinIes. Qui pourrait dire où l'une commence
et où l'autre finit? Nous savons qu'il y a des mala-
dies dont les résultats provoquent une cessation to-
tale de toutes les fonctions apparentes de vitalité, -
et dont ces cessations ne sont, à proprement paner,
que des suspensions. Ce ne sont que des temps d a*,
r'èt dans la machine incompréhensible. Un certain
temps se passe, et un principe mystérieux et invi-
sible émeut de nouveau l'axe magique et la roue
merveilleuse. La corde d'argent n'était pas a Ja
mais détendue, ni la coupe d'or irréparablemen
brisée. Mais l'âme, où était-elle?
A part, cependant, l'inévitable conclusion-a priori
que les mêmes causes produisent les mêmes effets,
que l'existence bien reconnue de pareils cas d ani-
mation suspendue doivent naturellement donner
lieu, de temps en temps, à des enterrements, pré-
matures, à part ces conclusions, nous avons le té-
moignage direct de l'expérience médicale et ordi-
naire à l'appui d'un grand nombre d'accidents de
celte sorte. Je pourrais dès maintenant, au besoin,
citer une centaine de cas bien constatés. Il en est
un d'un caractère très-remarquable et dont les cir-
constances peuvent être encore présentes à l'esprit de
quelques lecteurs, qui arriva, il n'y a pas longtemps)
-.dans la ville de Baltimore, où le public en fut gran-
dement et péniblement ému. La femme d'un ci-
toyen des plus respectables, (un avoué distingué,
membre du congrès) fut prise d'une maladie sou-
daine et inexplicable, qui résista aux médications
les plus habiles. Après de longues souffrances, elle
mourut, ou plutôt on la crut morte. Personne ne
supposa, où n'eut quelque raison de supposer,
qu'elle n'était pas réellement trépassée. Elle pré-
sentait tous les symptômes ordinaires de la mort.
La face avait pris une forme creuse et longue. Les
lèvres étaient pâles, lés yeux ternes. Toute chaleur
avait disparu, le pouls ne battait plus. Durant trois
jours, le corps ne fut pas touché, et il acquit dans
cet intervalle la rigidité de la pierre. Pour tout
dire, l'enterrement fut hâté, à cause de ce qu'on
croyait être la décomposition.
La dame fut déposée dans son caveau de famille
lequel, pendant trois ans, ne fut pas dérangé. On
l'ouvrit enfin' pour y introduire un sarcophage;
mais, hélas! un coup terrible allait frapper le mari,
qui ouvrit lui-même la porte. Comme les battants
s'entr'ouvraient, un objet blanc tomba dans ses
bras avec un bruit sinistre. C'était le squelette de
sa femme drapé dans son linceul no.i encore en-
tamé.
Une enquête minutieuse, établit que la malheu-
reuse avait dû se réveiller deux jours après l'ense-
velissement; que ses efforts dans le cercueil L'a-
vaient fait tomber de la planche sur les dalles, où
le coffre s'était brisé pour permettre à la morte d'en
sortir. Une lampe pleine d'huile, laissée par hasard
dans la tombe, était vide, mais il est possible qu'elle
se soit épuisée par l'évaporation. On trouva un'gros
fragment du cercueil sur la dernière des marches
qui conduis dent à la funèbre chambre, et avec le-
quel elle avait probablement essayé d'éveiller l'at-
tention en frappant la porte de fer. C'est alors, sans
doute, qu'elle s'épanouit, ou peut-être expira de
terreur; et son linceul s'accrocha, dans sa chute, à
des barreaux qui projetaient intérieurement. C'est
ainsi qu'elle resta et qu'elle pourrit debout.
En l'année 1810, un cas d'inhumation prématurée
arriva en France, et fut accompagné de circonstan-
ces qui démontraient comme quoi la vérité est réel-
lement plus étrange que l'inventioir. L'héroïne de
l'histoire était une demoiselle Victorine Lafourcado,
jeune fille issue de famille illustre, riche et mer-
veilleusement belle. Parmi ses nombreux soupi-
rants se trouvait un certain Julien Bossuet, pauvre
littérateur de la capitale. Son talent et ses qualités
avaient été remarqués de. l'héritière dont il sem-
blait être réellement adoré; mais sa morgue nobi-
liaire la décida enfin à réconduire et à épouser un
M. Renelle, banquier et .diplomate de quelque re-
nom. Cependant, après le mariage, ce dernier la né-
gligea, et même la maltraita. Après quelques an-
nées pas-sées misérablement, elle mourut, — du
moins son état ressemblait tellement à là mort,
que tout le monde y fut trompé. Elle ne fut pas
enterrée dans un.caveau, mais dans une simple
tombe du cimetière de Sun village. L'amoureux sa-
crifié, déiespéré et encore tout entier au souvenir
d'une passion profonde, quitte la capitale et se di-
rige vers le département éloigné où se trouve le ha-
meau, avec l'intention de déterrer le corps et d'en
cée, les quais et les ponts sont devenus le rênd'ez-vôus
des promeneurs. C'est là qu'aux, rares moments d'é-
claircie les Parisiens vont flâner le plus volontiers çoùr
regarder le fleuve, se regarder entre eux, et faire ample
moisson d'incidents pittoresques.
Ici les pécheurs, incrustés sur les parapets, jettent
gravement leur ligne au fil du courant; plus loin, du
haut de l'esplanade Henri IV, les curieux plongent le
regard dans les jardins submergés du Vert-Galant, le
café-concert du pont Neuf; plus loin encore, dans les
Mots de la banlieue, c'est la chasse à coups de bâton
du gibier surpris par la crue.
Mème aux jours des plus maussades oridées, le spec-
tajcle< du Paris pluvieux a ses côtés divertissants. Nous
né disons pas cela, bien entendu, pour les malheureux
'entassés sur l'impériale des omnibus, — éternellement
complets ! - pour les piétons, obligés de lutter, para-
pluie au poing, contre un vent impitoyable, ni pour les
pauvres rongeurs, qui, échappés aux nécessités culinai-
res nées de l'investissement prussien, sont aujourd'hui
victimes de l'invasion des eaux.
——————— .,. - - — ——————
NAUFRAGE DE LA « MARGUERITTA »
(Voir page 364.)
Sahit-Pierrolcs-Calais, 8 décembre ISIS.
Monbieur le directeur du Monde illustré,
Je vous adresse un croquis du naufrage de la goëlette
hollandaise Margueritta, en vue des jetées de Calais. ;
Voici quelques détails sur ce terrible cinistre :
Le G décembre, vers onze heures du matin, le patron
du bateau de sauvetage et son second aperçurent du
haut de la jetée de l'Est un navire qui luttait contre le
vent. Ils allèrent aussitôt à sa rencontre, l'abordèrent
après de grands efforts et parvinrent à sauver les .cinq
hommes de l'équipage.
Mais ils ne purent arriver jusqu'à la cabine. Là se
trouvaient enfermés la femme du capitaine et ses deux
fils, dont l'aîné était âgé de trois ans. Les malheureux
ont été engloutis après une agonie dont vous pouvez
deviner toute l'horreur.
La Margueritta, partie de Stettin (Prusse), il y après
de six semaines, avec-un-chargement de bois dè chêne
à destination de Newport, avait été presque constam-
ment en butte aux bourrasques.
A plusieurs reprises, elle avait éprouvé des avaries
que les hommes du bord avaient successivement répa-
rées. Mais le 4 décembre, dès l'aube, elle a essuyé une
tempête du nord-eât plus impitoyable que la précé-
• dente. La mer était des plus mauvaises. La goélette
fut enfin poussée sur nos côtes, en face des bains.
Pendant deux heures d'angoisses, au bout desquelles
le navire se brisa, huit personnes luttèrent contre les
éléments en furie.
Hier, dans la journée, la mer a rejeté sur la plage
le corps de l'aîné des enfants. Quant à son petit Frère,
si jamais on le retrouve, ce sera en compagnie de sa
mère, car l'infortunée l'étreignait dans ses bras au mo-
ment suprême.
Pendant que nos intrépides pilotes tentaient le sau-
vetage de la Margueritta* le brick-goëlettc César, ca-
pitaine Ferray, chargé de goudron, venant.de Londres !
à destination de Dunkerque, était dans lu. situation la
plus critique et demandait du secours.
Un peu plus lard,1 nous avons, appris qu'il avait
échoué' à trois kilomètres du chenal 'de Gmvdhcs.
Cinq hommes sur six ont péri.
:
LE « CAT-O'-NINE-TAILS »
SUPPLICE D'UN hTRANGLEUR A LONDnKS
(Voir page 365) , *
Avant 1867, Londres était infesté de voleurs noctur-
nes. Les attaques et les violences contre les particu-
liers se multipliaient d'une façon vraiment terrifiante.
Rien ne pouvait arrêter l'audace des malfaiteurs, ni la
prison, ni ia déportation temporaire ou perpétuelle. La.
peine de mort, appliquée aux plus coupables, ne suffi-
sait même pas ! corriger les autres. -.
La redoutable association des ÉtranglcUrs (garotlers)
se montrait la plus réfractaire- à tout moyen de répres-
sion. En vain la justice anglaise sévissait contre elle
avoclâ dernière rigueur. Les piétons continuaient d'ê-
tre assaillts. Quiconque s'attardait la nuit dans les quar-
tiers déserts était à peu près certain d'être empoigné
par derrière/au détour de quelque rue, et de sentir un
bras "d'acierTétreindre à la. gorge et lui faire endurer
les. angoisêi s de la pendaison, jusqu'à ce que, vaincu
par là douleur, il consentit à se laisser dévaluer.
Pour purger Londres de ce fléau, il fallut, bon gré
mal gré, en venir aux moyens extrêmes. Le gouverne-
ment de la reine, ému des plaintes qu'il recevait de
tous côtés, se décida à intervenir, et, il y a cinq ans,
il présenta au Parlement un bill demandant l'applica-
tion aux étrangleurs de le peine du fouet.
Le projet fut adopté et mis immédiatement à exécu-
tion..
Depuis loi s, on a vu diminuer peu à peu les attaques
nocturnes. A l'heure qu'il est, elles sont aussi rares
qu'elles étaient fréquentes autrefois.
L'étrangleur condamné au supp ice en question est
amené dans la cour de la prison. En présence du shériff
et d'un médecin chargé de mesurer le nombre des
coups à l'énergie physique du patient, ce dernier est
fixé au poteau, et, le dos mis à nu, reçoit la correction
d'un fouet à neuf lanières manié par la main de Cal-
craft, le bourreau de Londres.
Ce fouet, c'est le terrible cat-o-iiine- tails (chat à neuf
queues), dont chaque tige de cuir, armée d'un triple
nœud, enlève en tombant sur l'épaule du condamné
des lambeaux d'épiderme et des gouttes de sang.
Rarement le nombre des coups s'élève à plus de
vingt; souvent, dès le dixième, le médeciu s'approche
du coupable, lui tâte le pouls et fait cesser la correc-
tion.
Certes, on ne peut s'empêcher de frémir en songeant
à l'horreur d'un tel châtiment. Toutefois, il ne faudrait
pas trop se hâter de taxer d'inhumaine et de barbare
une mesure qu'on n'a employée qu'à la dernière extré-
mité, contre des malfaiteurs incorrigibles dont l'œuvre
de terreur n'était pas entravée même par l'exemple du
gibet.
» -
L'ENTERREMENT PRÉMATURÉ
Il est certains sujets dont l'intérêt absorbe au su-
prême degré, mais qui sont réellement trop horri-
bles pour qu'on en tire les éléments de la fiction lé-
gitime. Le romancier doit les rejeter sous peine d'in-
spirer. l'horreur et le dégoût. On ne peut les traiter
qu'autant que la majestueuse sévéïité du vrai les
sanctifie et les soutienne.. Nous frémissons, par
exemple, d'une jouissance douloureuse des plus inten-
ses, en parcourant les relations du passage de lu Bé-
résina, du tremblement de tenc ue Lisbonne, de la
peste de Londres, du massacre de la Saint-Barthé-
lemy ou bien encore de l'étouffement de cent-
vingt-trois prisonniers dans le Trou-Noir de Cal-
cutta. Mais dans ces relations c'est le fait, c'est la
réalité, c'est l'histoire qui nous émeut. Quant à l'in-
vention, notre dégoût seul doit l'accueillir.
J'ai mentionné quelques-unes des plus grandes et
des plus augusles calamités de l'histoire; mais,
dans tout cela, c'est l'étendue, non moins que le
caractère de la calamité qui. impressionne si vive-
ment notre imagination. Point n'est besoin de rap-
peler au lecteur que, dans le long et pénible cata-
logue des misères humait es, j'aurais pu choisir
beaucoup d'exemples individuels plus caractérisés
par la souffrance essentielle qu'aucune de ces vastes
généralités du désastre..La vraie souffrance, le mal-
heur éventuel, est, ne l'oublions pas, personnel, et
non diffus. Les effrayantes extrémités de l'agonie
frappent l'unité et jamais la masse. Remercions-en
un Dieu miséricordLeux,
Être enterré vif est, sans contredit, le plus horri-
ble des accidents qui ont toujours affecté la morta-
lité commune. Que la chose soit arrivée fréquem-
ment, et même très-fréquemment, ne peut être nié
par un penseur quelconque. Les bornes qui sépa-
rent la vie de la mort sont, pour le moins, vagues
et indéfinIes. Qui pourrait dire où l'une commence
et où l'autre finit? Nous savons qu'il y a des mala-
dies dont les résultats provoquent une cessation to-
tale de toutes les fonctions apparentes de vitalité, -
et dont ces cessations ne sont, à proprement paner,
que des suspensions. Ce ne sont que des temps d a*,
r'èt dans la machine incompréhensible. Un certain
temps se passe, et un principe mystérieux et invi-
sible émeut de nouveau l'axe magique et la roue
merveilleuse. La corde d'argent n'était pas a Ja
mais détendue, ni la coupe d'or irréparablemen
brisée. Mais l'âme, où était-elle?
A part, cependant, l'inévitable conclusion-a priori
que les mêmes causes produisent les mêmes effets,
que l'existence bien reconnue de pareils cas d ani-
mation suspendue doivent naturellement donner
lieu, de temps en temps, à des enterrements, pré-
matures, à part ces conclusions, nous avons le té-
moignage direct de l'expérience médicale et ordi-
naire à l'appui d'un grand nombre d'accidents de
celte sorte. Je pourrais dès maintenant, au besoin,
citer une centaine de cas bien constatés. Il en est
un d'un caractère très-remarquable et dont les cir-
constances peuvent être encore présentes à l'esprit de
quelques lecteurs, qui arriva, il n'y a pas longtemps)
-.dans la ville de Baltimore, où le public en fut gran-
dement et péniblement ému. La femme d'un ci-
toyen des plus respectables, (un avoué distingué,
membre du congrès) fut prise d'une maladie sou-
daine et inexplicable, qui résista aux médications
les plus habiles. Après de longues souffrances, elle
mourut, ou plutôt on la crut morte. Personne ne
supposa, où n'eut quelque raison de supposer,
qu'elle n'était pas réellement trépassée. Elle pré-
sentait tous les symptômes ordinaires de la mort.
La face avait pris une forme creuse et longue. Les
lèvres étaient pâles, lés yeux ternes. Toute chaleur
avait disparu, le pouls ne battait plus. Durant trois
jours, le corps ne fut pas touché, et il acquit dans
cet intervalle la rigidité de la pierre. Pour tout
dire, l'enterrement fut hâté, à cause de ce qu'on
croyait être la décomposition.
La dame fut déposée dans son caveau de famille
lequel, pendant trois ans, ne fut pas dérangé. On
l'ouvrit enfin' pour y introduire un sarcophage;
mais, hélas! un coup terrible allait frapper le mari,
qui ouvrit lui-même la porte. Comme les battants
s'entr'ouvraient, un objet blanc tomba dans ses
bras avec un bruit sinistre. C'était le squelette de
sa femme drapé dans son linceul no.i encore en-
tamé.
Une enquête minutieuse, établit que la malheu-
reuse avait dû se réveiller deux jours après l'ense-
velissement; que ses efforts dans le cercueil L'a-
vaient fait tomber de la planche sur les dalles, où
le coffre s'était brisé pour permettre à la morte d'en
sortir. Une lampe pleine d'huile, laissée par hasard
dans la tombe, était vide, mais il est possible qu'elle
se soit épuisée par l'évaporation. On trouva un'gros
fragment du cercueil sur la dernière des marches
qui conduis dent à la funèbre chambre, et avec le-
quel elle avait probablement essayé d'éveiller l'at-
tention en frappant la porte de fer. C'est alors, sans
doute, qu'elle s'épanouit, ou peut-être expira de
terreur; et son linceul s'accrocha, dans sa chute, à
des barreaux qui projetaient intérieurement. C'est
ainsi qu'elle resta et qu'elle pourrit debout.
En l'année 1810, un cas d'inhumation prématurée
arriva en France, et fut accompagné de circonstan-
ces qui démontraient comme quoi la vérité est réel-
lement plus étrange que l'inventioir. L'héroïne de
l'histoire était une demoiselle Victorine Lafourcado,
jeune fille issue de famille illustre, riche et mer-
veilleusement belle. Parmi ses nombreux soupi-
rants se trouvait un certain Julien Bossuet, pauvre
littérateur de la capitale. Son talent et ses qualités
avaient été remarqués de. l'héritière dont il sem-
blait être réellement adoré; mais sa morgue nobi-
liaire la décida enfin à réconduire et à épouser un
M. Renelle, banquier et .diplomate de quelque re-
nom. Cependant, après le mariage, ce dernier la né-
gligea, et même la maltraita. Après quelques an-
nées pas-sées misérablement, elle mourut, — du
moins son état ressemblait tellement à là mort,
que tout le monde y fut trompé. Elle ne fut pas
enterrée dans un.caveau, mais dans une simple
tombe du cimetière de Sun village. L'amoureux sa-
crifié, déiespéré et encore tout entier au souvenir
d'une passion profonde, quitte la capitale et se di-
rige vers le département éloigné où se trouve le ha-
meau, avec l'intention de déterrer le corps et d'en
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