388 LA VILLE LUMIERE
anciennement Quai des Théatins. En 1791, on lui donna le nom de Voltaire parce
que Voltaire était mort en 1778 dans l'ancien hôtel de Bragelonne, trésorier de
France sous Louis XIV, qui porte le numéro 27 du quai Voltaire et fait le coin de
la rue de Beaune. A deux reprises et chez deux hôtes différents, Voltaire avait
habité cette maison. On sait que, comme La Fontaine et quelques autres privi-
légiés, Voltaire eut cette grâce singulière de trouver toute sa vie le moyen d'être
hébergé, distrait et entretenu par de grands seigneurs et même par le roi de Prusse.
Il demeura longtemps au numéro 1, rue de Beaune, dans l'hôtel du Président
Bernières. Il devait soi-disant payer son loyer, mais en réalité « Madame la Pré-
sidente, son amie, s'arrangeait en sorte qu'on ne le lui réclamât pas ». Voltaire
cependant n'était pas toujours satisfait de ce logis, quoiqu'il ne lui coutât en somme
que le soin de plaire à la belle Présidente, et l'on peut s'étonner de le voir écrire
qu'il était malheureux dans « cette maudite maison d'où l'on a une belle vue,
mais où l'on sent le fumier comme dans une crèche, où les charrettes et les carrosses
font un bruit d'enfer, où pendant l'hiver il fait froid comme au pôle et où le
suisse fait de sa loge un méchant cabaret où il vend du mauvais vin à tous les
porteurs d'eau d'alentour. » En 1618, Voltaire trouva un nouvel amphitryon,
Mme de Fontaine-Martel, qui poussa la complaisance jusqu'à lui faire construire
un théâtre, pour qu'il pût y faire répéter ses tragédies. « J'ai perdu une bonne
maison dont j'étais le maître, dit-il lorsqu'elle mourut, et 40 000 francs de rente
qu'on dépensait à me divertir. » C'est alors qu'il habita pendant plus de quinze ans
chez sa divinité, la belle Mme du Châtelet, jusqu'à ce qu'il fût hébergé à la Cour
du Grand Frédéric, celui que familièrement il avait surnommé Luc ! Nous citons
ce surnom sans risquer un commentaire : il est des sujets sur lesquels il vaut
mieux ne pas insister.
Lorsque Voltaire revint à Paris après avoir séjourné en Prusse et à Ferney,
il revint dans la maison du Président Bernières qui nous occupe actuellement et
qui appartenait alors au marquis de Villette qui, de même que son prédécesseur,
fut trop heureux d'avoir l'honneur d'héberger jusqu'à sa mort le patriarche deFerney.
A la place des maisons qui occupent aujourd'hui les numéros 15 à 25 s'éle-
vait jadis le couvent des Théatins. Quelques-uns de ces religieux, fondés en Italie
en 1524 par l'archevêque de Théate, furent appelés à Paris par le cardinal Ma-
zarin. Il acheta pour les établir une maison située sur le quai Malaquais, qu'il fit
disposer pour une communauté religieuse où ils obtinrent la permission de s'ins-
taller en 1648. Mazarin leur avait légué 300 livres pour construire une église. Cet
argent ne leur suffit pas et le roi autorisa les Théatins à faire une loterie dont le
produit servirait à la continuation de l'église. La haine que le peuple portait à
Mazarin rejaillit sur les religieux qu'il avait fondés et ils eurent toujours l'opinion
publique contre eux. Leur couvent fut supprimé vers 1790 et, un peu plus tard,
le bâtiment de l'église fut disposé en salle de spectacle : on n'y donna jamais
d'ailleurs aucune représentation, mais on y organisa des bals et des fêtes et en 1815
on y établit le café des Muses qui disparut en 1822.
anciennement Quai des Théatins. En 1791, on lui donna le nom de Voltaire parce
que Voltaire était mort en 1778 dans l'ancien hôtel de Bragelonne, trésorier de
France sous Louis XIV, qui porte le numéro 27 du quai Voltaire et fait le coin de
la rue de Beaune. A deux reprises et chez deux hôtes différents, Voltaire avait
habité cette maison. On sait que, comme La Fontaine et quelques autres privi-
légiés, Voltaire eut cette grâce singulière de trouver toute sa vie le moyen d'être
hébergé, distrait et entretenu par de grands seigneurs et même par le roi de Prusse.
Il demeura longtemps au numéro 1, rue de Beaune, dans l'hôtel du Président
Bernières. Il devait soi-disant payer son loyer, mais en réalité « Madame la Pré-
sidente, son amie, s'arrangeait en sorte qu'on ne le lui réclamât pas ». Voltaire
cependant n'était pas toujours satisfait de ce logis, quoiqu'il ne lui coutât en somme
que le soin de plaire à la belle Présidente, et l'on peut s'étonner de le voir écrire
qu'il était malheureux dans « cette maudite maison d'où l'on a une belle vue,
mais où l'on sent le fumier comme dans une crèche, où les charrettes et les carrosses
font un bruit d'enfer, où pendant l'hiver il fait froid comme au pôle et où le
suisse fait de sa loge un méchant cabaret où il vend du mauvais vin à tous les
porteurs d'eau d'alentour. » En 1618, Voltaire trouva un nouvel amphitryon,
Mme de Fontaine-Martel, qui poussa la complaisance jusqu'à lui faire construire
un théâtre, pour qu'il pût y faire répéter ses tragédies. « J'ai perdu une bonne
maison dont j'étais le maître, dit-il lorsqu'elle mourut, et 40 000 francs de rente
qu'on dépensait à me divertir. » C'est alors qu'il habita pendant plus de quinze ans
chez sa divinité, la belle Mme du Châtelet, jusqu'à ce qu'il fût hébergé à la Cour
du Grand Frédéric, celui que familièrement il avait surnommé Luc ! Nous citons
ce surnom sans risquer un commentaire : il est des sujets sur lesquels il vaut
mieux ne pas insister.
Lorsque Voltaire revint à Paris après avoir séjourné en Prusse et à Ferney,
il revint dans la maison du Président Bernières qui nous occupe actuellement et
qui appartenait alors au marquis de Villette qui, de même que son prédécesseur,
fut trop heureux d'avoir l'honneur d'héberger jusqu'à sa mort le patriarche deFerney.
A la place des maisons qui occupent aujourd'hui les numéros 15 à 25 s'éle-
vait jadis le couvent des Théatins. Quelques-uns de ces religieux, fondés en Italie
en 1524 par l'archevêque de Théate, furent appelés à Paris par le cardinal Ma-
zarin. Il acheta pour les établir une maison située sur le quai Malaquais, qu'il fit
disposer pour une communauté religieuse où ils obtinrent la permission de s'ins-
taller en 1648. Mazarin leur avait légué 300 livres pour construire une église. Cet
argent ne leur suffit pas et le roi autorisa les Théatins à faire une loterie dont le
produit servirait à la continuation de l'église. La haine que le peuple portait à
Mazarin rejaillit sur les religieux qu'il avait fondés et ils eurent toujours l'opinion
publique contre eux. Leur couvent fut supprimé vers 1790 et, un peu plus tard,
le bâtiment de l'église fut disposé en salle de spectacle : on n'y donna jamais
d'ailleurs aucune représentation, mais on y organisa des bals et des fêtes et en 1815
on y établit le café des Muses qui disparut en 1822.
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