Titre : La Chronique des arts et de la curiosité : supplément à la Gazette des beaux-arts
Éditeur : Gazette des beaux-arts (Paris)
Date d'édition : 1907-06-01
Contributeur : Houssaye, Edouard (1829-18..?). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34421972m
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 20550 Nombre total de vues : 20550
Description : 01 juin 1907 01 juin 1907
Description : 1907/06/01 (A1907,N22). 1907/06/01 (A1907,N22).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k6344255x
Source : Bibliothèque nationale de France, département Littérature et art, V-11793
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 26/11/2012
200 LA CHRONIQUE DES ARTS
cales entre les artistes et les amateurs de France
et de l'étranger. Sa première exposition est, à
l'usage de la rive gauche, presque une réduction
du Salon de la Société Nationale. Les membres de
l'ex-Société Nouvelle y jouent un rôle prépondé-
rant. M. Besnard, qui applique, quand il veut, au
paysage ses facultés imaginatives et son entente
du décor, expose deux plages de Berck el deux vues
de Venise. Les envois de M. Coltet sont caracté-
ristiques et variés : un beau carton, étude de pas-
sants sur le quai d'un port, une impression d'Es-
pagne, fauve et noirr, et une belle esquisse de son
tableau : Gens d'Ouessant veillant un enfant mort.
Un modèle se rhabillant dans un intérieur fournit
à M. Prinet le thème d'une des meilleures toiles
qu'il ait récemment signées. En nous présentant,
l'un deux têtes de femmes et une rue de village
ensoleillée, l'autre une immensité marine épandue
sous le dais des grands nuages, M. Henri Martin
et M. René Ménard ont répondu généreusement à
l'appel qui leur fut adressé. M. Aman Jean et M.
Caro-Delvaille, M. Dauchez et M.Diriks, M. Gillot
et M. Ulmann, M. Lectiat et M"' Marguerite Dc-
lorme représentent aussi de précieux concours.
Des études diverses de Mlle Erna Hoppe, de M.
Victor Dupont, de M. Huyot j ustifient des sympa-
thies déjà avouées ou suggèrent des espérances.
Les sculpteurs ont M. Bartlett, M. Baffier, M. La-
gare. Enfin, dans des bijoux d'argent, des plats ou
des vases de métal, parmi lesquels on remarque la
grande amphore aux kanguroos, l'exotisme de
MUe Borghild Arnesen n'est pas sans saveur.
EXPOSITION CAMILLE PISSARRO
(Galerie Eugène Blot)
Aucune opportunité spéciale de l'heure présente
n'exigeait une manifestation en l'honneur de Pis-
sarro. Aîné par l'âge, cadet par le talent des Monet
et des Sisley, cet artiste, également amoureux de
la bonne nature et de? recherches techniques, n'est
ni méconnu, ni surfait. Il ne fut pas un novateur ;
mais il sut adapter aux besoins de sa sensibilité
personnelle des systèmes inventés par d'autres.
Parti de Corot, il vint logiquement à l'impression-
nisme, rendant visible ainsi le lien qui, dans la
suite historique de l'art français, rattache les maî-
tres de 1870 à ceux de 1830. Il alla même un mo-
ment jusqu'à emprunter le pointillisme de Seurat,
et il fut le maître de Gauguin. Il n'a pas la puis-
sance géniale de M. Monet, il n'a ni la vivacité de
-vision, ni la légèreté d'exécution de Sisley. Mais il
est plus varié que le peintre de Moret ; l'importance
accordée à la figure humaine, dans ses études de la
vie rustique, est un mérite que nous rappelle ici
l'excellent tableau de la Cueillette des pois (1894).
Une galerie nouvelle fait donc un heureux début
en rassemblant pour notre plaisir une vingtaine
de toiles, sans compter les. gouaches, intelligem-
ment choisies dans les diverses périodes de la car-
rière de Pissarro. C'est, de 1870, La Route, où
l'artiste se montre tout. imprégné encore des ensei-
gnements de Corot, et, de 1901, les pierres grises de
L'Église Saint-Jacques, à Dieppe ; parmi les meil-
leures œuvres comprises entre ces deux dates, la
qualité et l'harmonie des bleus et des verts dési-
gnent particulièrement Les Bords de l'Oise, de
1878, et Le Jardin potager, de 1879,
EXPOSITION L. JARRAUD
(Galerie des Artistes modernes)
Ce nom inconnu est celui d'un peintre qui eut la
magnifique et dangereuse modestie de quitter Paris
à l'âge où les Rastignac de l'art rêvent de le con-
quérir et qui, depuis trente ans, s'est retiré, oublié,
sauf de quelques amis fidèles, au milieu des
paysans charentais, dans son village natal. Et il
se trouve que cet exil rustique, la solitude, le si-
lence, le repliement sur soi-même, l'éloignement de
la mode, l'ignorance de nos variations esthétiques
ont favorisé chez un homme doué d'une vision dé-
licate et d'une instinctive philosophie un art à la
fois timide et exquis, frugal et raffiné, plus per-
sonnel et plus durable, sous ses apparences pres-
que effacées, que bien des truculences éphémères.
Après quelques hésitations, quelques regards jetés
du côté de Courbet (portrait de M. Injalbert), ses
premiers travaux nous le montrent, prenant pour
point d'appui ce réalisme par lequel Bastien-Lepage
voulut concilier une sorte d'idéal à la Holbein avec
le sens de la vie moderne. Il est sauvé de la sé-
cheresse par l'émotion qu'il éprouve devant le mo-
dèle humain comme devant le visage de la nature.
Il produit alors quelques petits portraits, qui rap-
pellent ceux que signait à la même époque M. Da-
gnan-Bouveret, mais avec plus de pénétration et
plus de charme, entre autres les délicates effigies au
pastel d'une jeune fille en rose et d'une jeune femme
au profil penché, vêlues toutes deux à la mode d'il y
a vingt-cinq ans (nos 93 et 94). Malgré son goût de la
précision la plus fouillée, il a le sens de l'enveloppe:
si son métier lui vient de Bastien-Lepage, ses
paysages et ses figures dans des intérieurs révèlent
une âme d'artiste éprise d'un tout autre rêve, et
font penser tantôt à un Carrière paysan, tantôt à
un Pointelin des campagnes plates. Avec une
science surprenante des valeurs dans les gris ar-
gentés, il rend, ainsi que le disent dans une géné-
reuse et juste préface MM. Jérôme et Jean Tha-
raud, cc l'atmosphère dont s'enveloppe un buisson,
un arbre en fleurs, une maison isolée, l'air d'in-
quiétude et d'apparition que prend dans la soli-
tude un homme, une femme, un enfant qui passe.
De petites toiles, comme Jour de neige (n° 34),
Chemin creux (n° 31), La Femme à l'escalier
(n° 35), sont des œuvres aussi précieuses par le
sentiment que par- l'exécution. Nous nous réser-
vons de les éludier plus à loisir dans la Gazette.
EXPOSITION WITOLD WOJTKIEWICZ
(Galerie Druet)
S'il est toujours difficile, sur une vingtaine
d'ouvrages, de juger le talent et de pronostiquer
l'avenir d'un jeune homme inconnu, cette difficulté
est doublement accrue quand le peintre est étran-
ger, et quand le thème principal dont il s'inspire
est, comme il arrive pour M. "NVitold Wojlkitwicz,
bizarre et macabre. On peuteraindie, en effet, que
l'exotisme et l'étrangeténe soient les sources pres-
que uniques de ce que nous prenons pour de
l'originalité. M. André Gide, qui, eu compagnie de
M. Maurice Denis, découvrit, il y a quelques mois,
ce jeune artiste polonais dans une exposition alle-
mande, nous dit que M. Wojtkiewicz n'avait alors
jamais quitté son pays. L'affinité de sentiment
et de vision qui le relie à des artistes de chez
nous, Toulouse-Lautrec et M. Bonnard, par exem-
cales entre les artistes et les amateurs de France
et de l'étranger. Sa première exposition est, à
l'usage de la rive gauche, presque une réduction
du Salon de la Société Nationale. Les membres de
l'ex-Société Nouvelle y jouent un rôle prépondé-
rant. M. Besnard, qui applique, quand il veut, au
paysage ses facultés imaginatives et son entente
du décor, expose deux plages de Berck el deux vues
de Venise. Les envois de M. Coltet sont caracté-
ristiques et variés : un beau carton, étude de pas-
sants sur le quai d'un port, une impression d'Es-
pagne, fauve et noirr, et une belle esquisse de son
tableau : Gens d'Ouessant veillant un enfant mort.
Un modèle se rhabillant dans un intérieur fournit
à M. Prinet le thème d'une des meilleures toiles
qu'il ait récemment signées. En nous présentant,
l'un deux têtes de femmes et une rue de village
ensoleillée, l'autre une immensité marine épandue
sous le dais des grands nuages, M. Henri Martin
et M. René Ménard ont répondu généreusement à
l'appel qui leur fut adressé. M. Aman Jean et M.
Caro-Delvaille, M. Dauchez et M.Diriks, M. Gillot
et M. Ulmann, M. Lectiat et M"' Marguerite Dc-
lorme représentent aussi de précieux concours.
Des études diverses de Mlle Erna Hoppe, de M.
Victor Dupont, de M. Huyot j ustifient des sympa-
thies déjà avouées ou suggèrent des espérances.
Les sculpteurs ont M. Bartlett, M. Baffier, M. La-
gare. Enfin, dans des bijoux d'argent, des plats ou
des vases de métal, parmi lesquels on remarque la
grande amphore aux kanguroos, l'exotisme de
MUe Borghild Arnesen n'est pas sans saveur.
EXPOSITION CAMILLE PISSARRO
(Galerie Eugène Blot)
Aucune opportunité spéciale de l'heure présente
n'exigeait une manifestation en l'honneur de Pis-
sarro. Aîné par l'âge, cadet par le talent des Monet
et des Sisley, cet artiste, également amoureux de
la bonne nature et de? recherches techniques, n'est
ni méconnu, ni surfait. Il ne fut pas un novateur ;
mais il sut adapter aux besoins de sa sensibilité
personnelle des systèmes inventés par d'autres.
Parti de Corot, il vint logiquement à l'impression-
nisme, rendant visible ainsi le lien qui, dans la
suite historique de l'art français, rattache les maî-
tres de 1870 à ceux de 1830. Il alla même un mo-
ment jusqu'à emprunter le pointillisme de Seurat,
et il fut le maître de Gauguin. Il n'a pas la puis-
sance géniale de M. Monet, il n'a ni la vivacité de
-vision, ni la légèreté d'exécution de Sisley. Mais il
est plus varié que le peintre de Moret ; l'importance
accordée à la figure humaine, dans ses études de la
vie rustique, est un mérite que nous rappelle ici
l'excellent tableau de la Cueillette des pois (1894).
Une galerie nouvelle fait donc un heureux début
en rassemblant pour notre plaisir une vingtaine
de toiles, sans compter les. gouaches, intelligem-
ment choisies dans les diverses périodes de la car-
rière de Pissarro. C'est, de 1870, La Route, où
l'artiste se montre tout. imprégné encore des ensei-
gnements de Corot, et, de 1901, les pierres grises de
L'Église Saint-Jacques, à Dieppe ; parmi les meil-
leures œuvres comprises entre ces deux dates, la
qualité et l'harmonie des bleus et des verts dési-
gnent particulièrement Les Bords de l'Oise, de
1878, et Le Jardin potager, de 1879,
EXPOSITION L. JARRAUD
(Galerie des Artistes modernes)
Ce nom inconnu est celui d'un peintre qui eut la
magnifique et dangereuse modestie de quitter Paris
à l'âge où les Rastignac de l'art rêvent de le con-
quérir et qui, depuis trente ans, s'est retiré, oublié,
sauf de quelques amis fidèles, au milieu des
paysans charentais, dans son village natal. Et il
se trouve que cet exil rustique, la solitude, le si-
lence, le repliement sur soi-même, l'éloignement de
la mode, l'ignorance de nos variations esthétiques
ont favorisé chez un homme doué d'une vision dé-
licate et d'une instinctive philosophie un art à la
fois timide et exquis, frugal et raffiné, plus per-
sonnel et plus durable, sous ses apparences pres-
que effacées, que bien des truculences éphémères.
Après quelques hésitations, quelques regards jetés
du côté de Courbet (portrait de M. Injalbert), ses
premiers travaux nous le montrent, prenant pour
point d'appui ce réalisme par lequel Bastien-Lepage
voulut concilier une sorte d'idéal à la Holbein avec
le sens de la vie moderne. Il est sauvé de la sé-
cheresse par l'émotion qu'il éprouve devant le mo-
dèle humain comme devant le visage de la nature.
Il produit alors quelques petits portraits, qui rap-
pellent ceux que signait à la même époque M. Da-
gnan-Bouveret, mais avec plus de pénétration et
plus de charme, entre autres les délicates effigies au
pastel d'une jeune fille en rose et d'une jeune femme
au profil penché, vêlues toutes deux à la mode d'il y
a vingt-cinq ans (nos 93 et 94). Malgré son goût de la
précision la plus fouillée, il a le sens de l'enveloppe:
si son métier lui vient de Bastien-Lepage, ses
paysages et ses figures dans des intérieurs révèlent
une âme d'artiste éprise d'un tout autre rêve, et
font penser tantôt à un Carrière paysan, tantôt à
un Pointelin des campagnes plates. Avec une
science surprenante des valeurs dans les gris ar-
gentés, il rend, ainsi que le disent dans une géné-
reuse et juste préface MM. Jérôme et Jean Tha-
raud, cc l'atmosphère dont s'enveloppe un buisson,
un arbre en fleurs, une maison isolée, l'air d'in-
quiétude et d'apparition que prend dans la soli-
tude un homme, une femme, un enfant qui passe.
De petites toiles, comme Jour de neige (n° 34),
Chemin creux (n° 31), La Femme à l'escalier
(n° 35), sont des œuvres aussi précieuses par le
sentiment que par- l'exécution. Nous nous réser-
vons de les éludier plus à loisir dans la Gazette.
EXPOSITION WITOLD WOJTKIEWICZ
(Galerie Druet)
S'il est toujours difficile, sur une vingtaine
d'ouvrages, de juger le talent et de pronostiquer
l'avenir d'un jeune homme inconnu, cette difficulté
est doublement accrue quand le peintre est étran-
ger, et quand le thème principal dont il s'inspire
est, comme il arrive pour M. "NVitold Wojlkitwicz,
bizarre et macabre. On peuteraindie, en effet, que
l'exotisme et l'étrangeténe soient les sources pres-
que uniques de ce que nous prenons pour de
l'originalité. M. André Gide, qui, eu compagnie de
M. Maurice Denis, découvrit, il y a quelques mois,
ce jeune artiste polonais dans une exposition alle-
mande, nous dit que M. Wojtkiewicz n'avait alors
jamais quitté son pays. L'affinité de sentiment
et de vision qui le relie à des artistes de chez
nous, Toulouse-Lautrec et M. Bonnard, par exem-
Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 99.96%.
En savoir plus sur l'OCR
En savoir plus sur l'OCR
Le texte affiché peut comporter un certain nombre d'erreurs. En effet, le mode texte de ce document a été généré de façon automatique par un programme de reconnaissance optique de caractères (OCR). Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 99.96%.
- Auteurs similaires Houssaye Edouard Houssaye Edouard /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=(dc.creator adj "Houssaye Edouard" or dc.contributor adj "Houssaye Edouard")
-
-
Page
chiffre de pagination vue 4/12
- Recherche dans le document Recherche dans le document https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/search/ark:/12148/bpt6k6344255x/f4.image ×
Recherche dans le document
- Partage et envoi par courriel Partage et envoi par courriel https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/share/ark:/12148/bpt6k6344255x/f4.image
- Téléchargement / impression Téléchargement / impression https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/download/ark:/12148/bpt6k6344255x/f4.image
- Mise en scène Mise en scène ×
Mise en scène
Créer facilement :
- Marque-page Marque-page https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/bookmark/ark:/12148/bpt6k6344255x/f4.image ×
Gérer son espace personnel
Ajouter ce document
Ajouter/Voir ses marque-pages
Mes sélections ()Titre - Acheter une reproduction Acheter une reproduction https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/pa-ecommerce/ark:/12148/bpt6k6344255x
- Acheter le livre complet Acheter le livre complet https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/indisponible/achat/ark:/12148/bpt6k6344255x
- Signalement d'anomalie Signalement d'anomalie https://sindbadbnf.libanswers.com/widget_standalone.php?la_widget_id=7142
- Aide Aide https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/aide/ark:/12148/bpt6k6344255x/f4.image × Aide
Facebook
Twitter
Pinterest