Titre : Revue contemporaine
Éditeur : [s.n.?] (Saint-Pétersbourg)
Date d'édition : 1913-06-22
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb328566919
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 10050 Nombre total de vues : 10050
Description : 22 juin 1913 22 juin 1913
Description : 1913/06/22 (A4,T11,N87). 1913/06/22 (A4,T11,N87).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k6248072r
Source : Bibliothèque nationale de France, département Littérature et art, 8-Z-18251
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 24/06/2013
REVUE
CONTEMPORAINE
PARAISSANT TOUS LES SAMEDIS
QUATRIÈME ANNÉE SAMEDI 22 JUIN 1913 M 87
Editorial
22 Juin igi3
Au moment où l'arbitrage russe commençait à
s'imposer, à Sofia et à Belgrade, comme l'unique
issue à la situation intolérable où se débattent les
alliés de la Confédération balkanique, le canon s'est
mis à tonner en Macédoine: deux armées dont une
gloire commune avait cimenté la fraternité sur les
champs de bataille ont entamé, à plusieurs reprises,
une lutte criminelle. Depuis, le gouvernement bulgare
comme le gouvernement serbe ne se lassent pas,
dans des notes diplomatiques, de rejeter l'un sur
l'autre la responsabilité odieuse du premier coup de
feu, et, sans doute, à Belgrade aussi bien qu'à Sofia,
on est de bonne foi pour écarter la pesante hantise
d'un remords historique. Le mal est ailleurs que dans
les chancelleries: il réside dans la présence de deux
armées surexcitées, grisées de politique, affolées de
chauvinisme myope, face à face, l'arme au pied,
prêtes à balayer, en un moment d'irréparable folie,
tous les souvenirs, toutes les traditions qui ont donné
aux pays balkaniques une fugitive conscience de leur
force solidaire. Lorsque les fusils demeurent trop
longtemps chargés et qu'ils sont maniés par des
mains trop nerveuses, la tentation est fatale. On ne
braque pas les canons sans être finalement tenaillé
par le désir hallucinant d'éprouver l'exactitude de
leur tir. On ne crispe pas impunément le poing sur
le pommeau de l'épée sans subir les séductions d'une
charge. Quelques kilomètres seulement séparent des
feux de bivouacs, des tranchées, des baïonnettes, des
mitrailleuses, des engins de guerre prêts à vomir le
fer et la souffrance, des troupes exaspérées par un
conflit qui se prolonge, intoxiquées de toutes les
haines que charrient les journaux des capitales bal-
kaniques: faut-il dès lors s'étonner que, dans des
conditions aussi anormales, les troupes, fourbues
d'une campagne meurtrière, familiarisées avec la
poudre et la mort, désirent, une fois pour toutes,
d'en finir avec les alliés d'hier, de résoudre par. un
corps-à-corps une querelle historique où s'épuise à
vide l'impuissance des diplomaties?
Les événements viennent de donner une sanglante
confirmation au bien-fondé des conseils dédaignés de
la Russie. Parallèlement à l'invitation de soumettre le
conflit à son arbitrage, la Russie n'a pas cessé de
préconiser, à titre de condition préjudicielle, la démo-
bilisation simultanée de la Bulgarie et de la Serbie.
L'adhésion sincère, sans arrière-pensée, à une liquida-
tion pacifique, impliquait naturellement un désarme-
ment intégral. Sinon l'exécution de la sentence arbi-
trale est livrée à tous les aléas, à tous les hasards,
à toutes les contingences que comporte une veillée d'ar-
mes trop prolongée. L'arbitre aussi bien que les par-
ties ne peuvent avoir l'assurance qu'une fusillade,
dégénérée en bataille générale, ne compromettra pas,
au moment d'aboutir, les résultats de leurs travaux.
Les inévitables mécontentements ne manqueront guère,
après le prononcé de la sentence, de se défendre d'un
appel à des forces toujours concentrées, toujours
fiévreuses, plus énervées que jamais. Il y a là, pour
exercer l'arbitrage, une ambiance singulièrement anor-
male. Le respect de la justice exige que les plaideurs
se présentent à la barre sans la latente menace de
vider ensuite, aux abords du Palais, leur querelle
révolver au poing. Un procès, dans ces conditions,
est inutile. La Russsie ne peut risquer son prestige
à voir sa sentence compromise par des canons qu'on
n'aura pas voulu décharger.
CONTEMPORAINE
PARAISSANT TOUS LES SAMEDIS
QUATRIÈME ANNÉE SAMEDI 22 JUIN 1913 M 87
Editorial
22 Juin igi3
Au moment où l'arbitrage russe commençait à
s'imposer, à Sofia et à Belgrade, comme l'unique
issue à la situation intolérable où se débattent les
alliés de la Confédération balkanique, le canon s'est
mis à tonner en Macédoine: deux armées dont une
gloire commune avait cimenté la fraternité sur les
champs de bataille ont entamé, à plusieurs reprises,
une lutte criminelle. Depuis, le gouvernement bulgare
comme le gouvernement serbe ne se lassent pas,
dans des notes diplomatiques, de rejeter l'un sur
l'autre la responsabilité odieuse du premier coup de
feu, et, sans doute, à Belgrade aussi bien qu'à Sofia,
on est de bonne foi pour écarter la pesante hantise
d'un remords historique. Le mal est ailleurs que dans
les chancelleries: il réside dans la présence de deux
armées surexcitées, grisées de politique, affolées de
chauvinisme myope, face à face, l'arme au pied,
prêtes à balayer, en un moment d'irréparable folie,
tous les souvenirs, toutes les traditions qui ont donné
aux pays balkaniques une fugitive conscience de leur
force solidaire. Lorsque les fusils demeurent trop
longtemps chargés et qu'ils sont maniés par des
mains trop nerveuses, la tentation est fatale. On ne
braque pas les canons sans être finalement tenaillé
par le désir hallucinant d'éprouver l'exactitude de
leur tir. On ne crispe pas impunément le poing sur
le pommeau de l'épée sans subir les séductions d'une
charge. Quelques kilomètres seulement séparent des
feux de bivouacs, des tranchées, des baïonnettes, des
mitrailleuses, des engins de guerre prêts à vomir le
fer et la souffrance, des troupes exaspérées par un
conflit qui se prolonge, intoxiquées de toutes les
haines que charrient les journaux des capitales bal-
kaniques: faut-il dès lors s'étonner que, dans des
conditions aussi anormales, les troupes, fourbues
d'une campagne meurtrière, familiarisées avec la
poudre et la mort, désirent, une fois pour toutes,
d'en finir avec les alliés d'hier, de résoudre par. un
corps-à-corps une querelle historique où s'épuise à
vide l'impuissance des diplomaties?
Les événements viennent de donner une sanglante
confirmation au bien-fondé des conseils dédaignés de
la Russie. Parallèlement à l'invitation de soumettre le
conflit à son arbitrage, la Russie n'a pas cessé de
préconiser, à titre de condition préjudicielle, la démo-
bilisation simultanée de la Bulgarie et de la Serbie.
L'adhésion sincère, sans arrière-pensée, à une liquida-
tion pacifique, impliquait naturellement un désarme-
ment intégral. Sinon l'exécution de la sentence arbi-
trale est livrée à tous les aléas, à tous les hasards,
à toutes les contingences que comporte une veillée d'ar-
mes trop prolongée. L'arbitre aussi bien que les par-
ties ne peuvent avoir l'assurance qu'une fusillade,
dégénérée en bataille générale, ne compromettra pas,
au moment d'aboutir, les résultats de leurs travaux.
Les inévitables mécontentements ne manqueront guère,
après le prononcé de la sentence, de se défendre d'un
appel à des forces toujours concentrées, toujours
fiévreuses, plus énervées que jamais. Il y a là, pour
exercer l'arbitrage, une ambiance singulièrement anor-
male. Le respect de la justice exige que les plaideurs
se présentent à la barre sans la latente menace de
vider ensuite, aux abords du Palais, leur querelle
révolver au poing. Un procès, dans ces conditions,
est inutile. La Russsie ne peut risquer son prestige
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