Titre : La Sylphide : journal de modes, de littérature, de théâtres et de musique / directeur : de Villemessant
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1855-03-20
Contributeur : Villemessant, Hippolyte de (1810-1879). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34444962f
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 20 mars 1855 20 mars 1855
Description : 1855/03/20 (A16,VOL1). 1855/03/20 (A16,VOL1).
Description : Note : GRAV. Note : GRAV.
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k6109820r
Source : Bibliothèque nationale de France, département Littérature et art, Z-4145-4208
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 01/12/2010
XVIe ANNÉE.
8* LIVRAISON.
20 MARS 1855;
UNE GALÈRE EN EAU DOUCE
i
\ T je me disais : Une vie
» sobre, ingénieusement
partagée entre le travail
et le loisir, une vie d'af-
fections pures sagement
ménagées, donnera en-
|fln la paix à mon coeur.
^Quoique jeune encore,
j'ai les sens amortis, et je puis, en me bornant à
l'amitié, ne plus éprouver de ces déceptions amè-
res qui ont fait de ma jeunesse une succession de
naufrages. Un homme de quarante ans bientôt
n'est plus, de toute nécessité, l'amant des dames
qu'il fréquente, et, s'il est décent et discret, le
père de famille lui donne volontiers ses filles à
chaperonner dans une course au Bois.
Car je ' choisirai de préférence la campagne
pour retraite. Le voisinage d'une ville est une
ressource, mais il faut qu'une certaine distance
affranchisse l'homme indépendant de caractère
de la servitude sociale et des médisances, qui
altèrent la sérénité de son humeur. Si vous venez
en ville, nul ne sait pourquoi vous avez quitté
votre ermitage, sinon pour le motif de revoir des
humains. Vous restez chez vous : c'est apparem-
ment parce qu'il pleut et que la route est défon-
cée, ou bien parce que vous avez pris une en-
torse. On vous questionne, et vous répondez ce
que vous voulez.
Par les soirs d'été, quand l'air est lourd et le
ciel chargé de nuages, j'aime a sonner de la
trompe. En toute saison, quand il fait sec, j'aime
à sortir en pantoufles. Comment se livrer impu-
nément en ville àses goûts les plus innocents? Le
moyen de faire le moindre bruit, sans que tout
le quartier en soit informé I Le moyen de sortir
de chez un ami en pantoufles, sans que sa femme
soit calomniée! Il n'y a de vie privée qu'à la cam-
pagne.
Voilà, mon ami, l'un des mille raisonnements
qui m'ont conduit à l'endroit d'où je vous écris
cette lettre. Vous espérez, en me lisant, que des
raisons plus sérieuses ont déterminé ma volonté.
Vous faites mentalement honte à mon âge de ce
que vous appelez mes enfantillages. Imaginez, si
vous le voulez, que mes motifs ont été de la plus
haute importance, et que je vous les cache : vous
en saurez tout autant.
J'ai choisi mon habitation au levant. J'aime à
être visité dans mon lit par le soleil du matin.
Réveillé par lui, je me pénètre de ses rayons
comme la pierre de Bologne, et mon insolation
dure le reste du jour. Au contraire, la défection
de la lumière m'attriste. Si je ne la voyais entrer
chez moi dans sa force que pour la voir bientôt
pâlir et s'éteindre, cela raccourcirait ma vie de
toutes les matinées. Si cette aversion du cou-
chant vous paraît encore puérile, je vous parlerai
de mes hôtes, et vous me saurez gré de les avoir
choisis paisibles et douXé
J'ai trouvé l'hospitalité dans une famille hono-
rable composée de sept personnes. Je paie une
modique pension qui me permet de consacrer â
mes petits extras la moitié de mon revenu. Je
compte dans le superflu ce qui m'est le plus né-
cessaire : de beau linge, des habits fréquemment
renouvelés, beaucoup de livres, d'excellent tabac
que je paie fort cher, ayant horreur de la con-
trebande, par suite de mon respect inné, plus-
machinal que raisonné, pour les lois.
Vous savez que je trouve du bien-être à les
observer. Ce n'est pas à dire pour cela que je les
eusse faites. Je ne reconnais qu'une loi souve-
raine... J'ai cru que j'allais en trouver la formule
sous le bec de ma plume; mais je m'aperçois que
je suis dans une impossibilité absolue d'achever.
8* LIVRAISON.
20 MARS 1855;
UNE GALÈRE EN EAU DOUCE
i
\ T je me disais : Une vie
» sobre, ingénieusement
partagée entre le travail
et le loisir, une vie d'af-
fections pures sagement
ménagées, donnera en-
|fln la paix à mon coeur.
^Quoique jeune encore,
j'ai les sens amortis, et je puis, en me bornant à
l'amitié, ne plus éprouver de ces déceptions amè-
res qui ont fait de ma jeunesse une succession de
naufrages. Un homme de quarante ans bientôt
n'est plus, de toute nécessité, l'amant des dames
qu'il fréquente, et, s'il est décent et discret, le
père de famille lui donne volontiers ses filles à
chaperonner dans une course au Bois.
Car je ' choisirai de préférence la campagne
pour retraite. Le voisinage d'une ville est une
ressource, mais il faut qu'une certaine distance
affranchisse l'homme indépendant de caractère
de la servitude sociale et des médisances, qui
altèrent la sérénité de son humeur. Si vous venez
en ville, nul ne sait pourquoi vous avez quitté
votre ermitage, sinon pour le motif de revoir des
humains. Vous restez chez vous : c'est apparem-
ment parce qu'il pleut et que la route est défon-
cée, ou bien parce que vous avez pris une en-
torse. On vous questionne, et vous répondez ce
que vous voulez.
Par les soirs d'été, quand l'air est lourd et le
ciel chargé de nuages, j'aime a sonner de la
trompe. En toute saison, quand il fait sec, j'aime
à sortir en pantoufles. Comment se livrer impu-
nément en ville àses goûts les plus innocents? Le
moyen de faire le moindre bruit, sans que tout
le quartier en soit informé I Le moyen de sortir
de chez un ami en pantoufles, sans que sa femme
soit calomniée! Il n'y a de vie privée qu'à la cam-
pagne.
Voilà, mon ami, l'un des mille raisonnements
qui m'ont conduit à l'endroit d'où je vous écris
cette lettre. Vous espérez, en me lisant, que des
raisons plus sérieuses ont déterminé ma volonté.
Vous faites mentalement honte à mon âge de ce
que vous appelez mes enfantillages. Imaginez, si
vous le voulez, que mes motifs ont été de la plus
haute importance, et que je vous les cache : vous
en saurez tout autant.
J'ai choisi mon habitation au levant. J'aime à
être visité dans mon lit par le soleil du matin.
Réveillé par lui, je me pénètre de ses rayons
comme la pierre de Bologne, et mon insolation
dure le reste du jour. Au contraire, la défection
de la lumière m'attriste. Si je ne la voyais entrer
chez moi dans sa force que pour la voir bientôt
pâlir et s'éteindre, cela raccourcirait ma vie de
toutes les matinées. Si cette aversion du cou-
chant vous paraît encore puérile, je vous parlerai
de mes hôtes, et vous me saurez gré de les avoir
choisis paisibles et douXé
J'ai trouvé l'hospitalité dans une famille hono-
rable composée de sept personnes. Je paie une
modique pension qui me permet de consacrer â
mes petits extras la moitié de mon revenu. Je
compte dans le superflu ce qui m'est le plus né-
cessaire : de beau linge, des habits fréquemment
renouvelés, beaucoup de livres, d'excellent tabac
que je paie fort cher, ayant horreur de la con-
trebande, par suite de mon respect inné, plus-
machinal que raisonné, pour les lois.
Vous savez que je trouve du bien-être à les
observer. Ce n'est pas à dire pour cela que je les
eusse faites. Je ne reconnais qu'une loi souve-
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