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A PARIS
On Nçàt aussi les Morns-rue toage-BateKère, 15
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' ABONNEMENTS PARIS
TROIS MOIS 5 FR.
SIX «OIS 9 FR.
UN AN 18 FR.
UN NUM ÉRO : 5 C ENTIMES
Tous les vendredis
LE SUPPLÉMENT ILLUSTRÉ : S CÉNTINIES
1 ABONNEMENTS DEPARTEMENTS
TROIS MOIS......... 6 FR..
SIX MOIS 12 FR.
UN AN 24 FR.
MERCREDI 4 MARS 1891
302~—SAINT CASIMIR—:—63
Numéro 10295
VINGT-NEUVIÈME ANNÉE
DERNIERE ÉDITION
Le refus de l'impôt
Une vieille demoiselle de T'oïii's a jugé à
propos de jouer un tour de vieille demoiselle
à son percepteur. Elle a. obstinément refusé
de payer sa cote de "contributions pour l'an
née 1890. Si obstinément refusé que, tous les
délais et répits d'usage étant écoulés et épui-
■sés, le fonctionnaire a dû faire saisir la,contri
buable récalcitrante.. La traditionnelle galan
terie française en a gémi, sans doute, et la
vieille demoiselle a jeté les hauts cris. Mais
l'administration qui se soucie de galanterie,
et souvent même de politesse, autant qu'un
poisson d'une pomme, a passé outre.: Et la
citoyenne révoltée de Tours, nonobstant sa
résistance endiablée, a fini, grâce à la vente
de son mobilier, par solder quand même ses
impositions, augmentées des frais.
C'est du reste toujours ainsi que les choses
Se terminent en matière de refus d'impôt.
Quand il y a un mobilier, toutefois; car, il
est bien évident que là où il-n'y a rien le roi
Eerd ses droits. Or, un percepteur de la Répu-
lique ne saurait être plus royaliste que
le roi.
C'est ainsi que les choses se terminent, en
tendons-nous, lorsqu'il s'agit de refus indivi
duels de payer l'impôt. Le cas isolé, exception
nel, ne saurait évidemment' empêcher la
machine de fonctionner, et toutes ces résis
tances partielles sont brisées comme le fétu
de bois par les roues do la locomotive.
Un train, lancé à toute vapeur, ne déraille
•pas pour si peu, et quand il s agit de toucher
de 1 argent, nos excellents collecteurs, d'im
pôts sont dans le train. Ils le toucheraient
plutôt deux .fois qu'une.
***
Mais il n'y a pas toujours eu que des refus
individuels d'impôts. L'histoire de l'Europe
moderne est, au contraire, remplie de faits où
l'on voit un peuple refuser en masse l'impôt
soit à un souverain, soit à un autre peuple.
La guerre de l'indépendance de l'Amérique
n'a pas" commencé autrement. Jonathan s'est
révolté contre John Bull à cause d'un droit
de trois pence par livre de thé. L'Angleterre
prétendait tirer des ressources spéciales des
marchandises provenant de sa colonie amé
ricaine. On a tort d'être trop gourmand. Elle
tua la poule aux œufs d'or, et à ce jeu-là per-
. dit l'Amérique elle-même. Et voilà comme
quoi les Etats-Unis sont sortis d'une théière.
Pascal avait raison. Rien de tel que les pô-
. tites causes pour produire de grands effets.
Toujours la longueur du nez de Cléopâtre. et
la présence d'un grain de sable dans la vessie
. de Cronrwell, qui changent la face et les des
tinées du monde. " .
A propos de Cromwell, la révolution d'An
gleterre n'a-t-elle pas débuté, elle aussi, par
une révolte populaire contre l'impôt 1 Plutôt,
que de. se résigner à payer les taxes qu'on
exigeait d'eux, les Anglais de ce temps-là
. préféraient s'expatrier. Le mouvement d émi
gration devint même tel que le gouvernement
de Charles I«r s'en inquiéta et s opposa à tout
embarquement de cette nature. Une légende,
affirme même que ce fut ainsi, au nom du roi,
que les constables d'alors empêchèrent Crom
well de monter sur un vaisseau faisant voile
pour l'Amérique.
Avouez qu'il fallait vraiment que ce pau
vre Charles Stuart eût déjà perdu la tête I
Cromwell, parti librement, eût peut-être fait
fortune dans un commerce quelconque, et
Charles I er serait tranquillement décédé sur
le trône, ce qui vaut toujours un peu mieux
que de mourir sur l'échafaud. Iîétas 1 le fa
talisme des Orientaux» raison. Cela est ar
rivé parce que cela devait arriver. Et l'on
est souvent soi-même, sans s'en douter, l'ar
tisan de s'a fâcheuse destinée.
Nous n'insisterons pas sur la rupture du
Brésil avec le Portugal, survenue, elle aussi,
à la suite d'une question de refus d'impôt.
Ni sur l'union plus ou moins tiraillée,' de" la
Suède et delà Norvège, un mariage fondé sur
le régime de la séparation de biens,, lequel,
plus d'une fois, a failli tourner à la séparation
de corps et même au divorce, toujours à pro
pos de taxes et de contributions.
. Quand il n'y a plus de foin au râtelier, les
ânes se battent, dit un proverbe. Un Etat
dont la caisse est toujours vide s'efforce de
la remplir, c'est tout naturel. Mais comme il
ne peut la remplir qu'aux dépens des contri
buables, ceux-ci se fâchent quelquefois; c'est
encore plus naturel.Et cette fâcherie, commen
cée en simple émeute,, peut se terminer par
une belle et bonne révolution. Dame 1 les
peuples à qui l'on demande sans, cesse la
bourse ou la .vie en arrivent aisément à expo
ser leur vie pour sauver leur bourse;
N'est-ce pas la menace du refus collectif de
l'impôt qui, chez nous, après la réélection des
363, triompha des. dernières velléités de ré
sistance du gouvernement dit de l'ordre mo
ral? Cette mena.ee n'était pas une plaisan
terie, les ministres le savaient bien. La
France entière aurait, donné comme un seul
homme en ne donnant pas. Tous les percep
teurs, en même temps, seraient revenus bre
douilles de leur chasse aux gros sous.
Et cette absence totale d'argent, plus sûre
ment encore qu'une pluie de plomb, aurait
frappé au cœur lo gouvernement. L'ordre mo
ral la pressentit, n'insista plus, se retira; et
fit bien.
*** . .
Nous voici revenus à. notre point de dé
part : les refus individuels de l'impôt. D'im
portance nulle, au point de vue historique, ils
présentent parfois un intérêt anecdotique. Je
voudrais, dans le tas, vous en citer quelques-
uns.
Nous avons d'abord Jean-Jacques Rousseau,
citoyen de Genève, refusant de payer jé ne
sais quelle taxe aux gens du roi Louis XV,
qui opéraient pour le compte d'un fermier
général quelconque. L'auteur de la Nouvelle
Hèloïse habitait alors à Paris la rue Plâtrière
qui, depuis, a pris son nom. Rousseau, furieux
de voir jouer un peu partout son opéra-comi
que, le Devin de Village, sans que cela lui
rapportât rien (la Société des auteurs drama
tiques n'était pas encore ïondée)ne voulut en
tendre parler d'aucun impôt.
— « Puisqu'on m'oppose, disait-il avec assez
de raison, ma situation d'étranger quand je
demande la juste rétribution de mon travail,
je me retrancherai derrière cette même qua
lité d'étranger quand on me réclamera quoi
que ce soit. Si 1 on ne me doit rien, je ne dois
rien non plus. ».
Le lise s'ëntêta. Le philosophe aussi. L'a
venture allait empirer lorsque des amis de
celui-ci s'interposèrent. Ils payèrent d'abord
pour lui, puis arrangèrent définitivement les
choses. Qui sait, Rousseau leur'dut peut-être
non seulement .de conserver les quelques meu
bles de son galetas; mais encore de ne pas
faire connaissance avec la Bastille ?
***
Longtemps a prés l'histoire de Jean-Jacques
Rousseau, nous avons eu celle de Ferdi
nand Qambon, l'homme à la vache. Cette
vache est devenue célèbre et a rendu son pro
priétaire immortel. ; Est-il utile . de rappeler
ici que Gambon était un ennemi irréconcilia
ble de l'Empire ; que, vers 1869, il prêcha le
refus de "l'impôt, et que, pour donner l'exem
ple, il laissa saisir et vendre sa vache plutôt
que de régler de bonne volonté la petite note
du percepteur?
La bête paya pour l'homme qui, du coup, en
devint populaire et en redevint député. 11 est
vrai qu'il l'avait déjà été, député, ce qui faci
litait la chose. Qui a bu boira. Il est -sans
doute difficile d'être élu, mais il l'est beaucoup
moins d'être réélu.
Plus récemment, et pendant plusieurs an
nées de suite, Paris a assisté aux démêlés ho
mériques de Mlle Hubertine Auclert avec le
percepteur de son quartier. Chaque fois, l'in-
aomptable amazone, à cheval sur les princi
pes, laissait s'accumuler chez sa concierge
les petits papiers jaunes, verts, bleus, aver
tissements avec ou sans frais, tout un arc-en-
ciel, mais un arc-en-ciel annonçant la tempê te
et non le calme.
Elle résistait jusqu'au bout, laissait saisir
son mobilier, le laissait vendre, quitte à le
racheter elle-même. Et la petite fête recom
mençait l'année suivante, avec le même pro
gramme.
Mlle Auclert basait son refus absolu de payer
l'impôt sur ce fait que la femme, n'ayant au
cun des droits du citoyen, ne devait en accep
ter aucun devoir, ni en assumer aucune des
charges. C'était un peu, comme vous le voyez,
la théorie de Jean-Jacques, au fond de la
quelle il y a incontestablement du vrai, beau
coup de vrai.
Mlle Hubertine Auclert aurait peut-être
triomphé, un jour ou l'autre, sa cause étant
bonne, après tout. Mais elle déserta la lutte.
Elle abdiqua cette fière indépendance pour
épouser un galant homme. Et, maintenant,
je suis sûr qu'elle donne l'exemple de la ré
gularité dans le paiement dos impôts à tous
les. contribuables qui sont un peu ses admi
nistrés, puisque son mari, si je ne me trompe,
est fonctionnaire quelque part, en Algérie.
Il n'y a donc pas que les gloires du monde
qui passent. Les révoltes s'apaisent aussi. Et
les plus violentes sont rarement les plus du
rables. Un brave paysan de mon pays, qui
s'était fourré dans le crâne de ne point payer
de cote personnelle, fut bien forcé, lui aussi;
de mettre les pouces, sous peine de se voir
.mettre les poucettes. Voici dans quelles cir
constances :
Notre paysan, assez riche, avait un' bien
situé sur les confins de deux communes, Mens
et Cornillon (Isère). Sa maison était bâtie sur
la limite même, et il avait installé sa cham
bre à coucher de telle façon que la moitié de
cette chambre était sur le territoire de Cor
nillon, quand l'autre moitié dépendait, de la
commune de Mens.
Le rusé Dauphinois usa et abusa de la cir
constance. Le percepteur de Cornillon se pré
sentait-il, vite notre homme transportait ses
nippes du côté de Mens, et affirmait qu'il ne
devait rien à Cornillon. Quand il fallait répon
dre au percepteur de Mens, le contribuable
passait avec armes et bagages du côté de Cor
nillon. Le tour était joué, et le fisc aussi. C'é
tait simple comme bonsoir.
Mais cette grosse malice cousue de fil blanc
ne réussit pas longtemps au pauvre homme.
Un beau matin, les deux percepteurs se pré
sentèrent en même temps, et le vieux renard,
pris au piège, dans son gîte même, dut payer
deux cotes personnelles au lieu d'une.
•. Ce sera, si vous le voulez bien, la moralité
de cet article. Le refus individuel de l'impôt
ne saurait aboutir à autre chose. Le récalci
trant finit toujours par payer double.
Thomas Grimm.
AUJOURD'HUI MERCREDI
■ demandez partout
LE '
SUPPLÉMENT ILLUSTRÉ
EN COULEURS
dû Petit Journal
LE NUMÉRO : S CENTIMES
SOMMAIRE DU QUINZIÈME NUMÉRO: ,
La Semaine. Simon L eviui
Misère............r................. ' Paul Sébillot
La recherche de l'inconnu Ernest d 'H ervillt
Grandeur, lies petites choses Alphonse K arr
Le voyage de noce Nath. IU wthornb
Versez-moi du vin bleu! Alexis Bouvier
L'employé qui ne'veut pas aller à son
bureau. ■.. ■ Georges C ourtelinb
Course de taureau en chambre....;. Jules M oinaux
- FEUILLETON :
La Peau du mort Camille D eians
A r os
gravures — Bulletin orphàonique
Choses et autres
Mots pour rire — La Question des placements
Memenlo du capitaliste, etc., etc.
Gravures en couleurs :
L'ARMÉE COLONIALE
Officier de tirailleurs sénégalais
Spahi sénégalais — Cipahis des Indes — Tirailleur algérien
Légion étrangère —Tirailleur annamite
Spahi algérien — Tirailleur de Madagascar
Une Surprise
(Tableau de Lobriclura)
Eolios de ] psurtout
M. Armand Béhic, ancien ministre, ancien
sénateur, président du conseil d'administra
tion de la Compagnie des Messageries mari
times et de la Société des forges et chantiers
de la Méditerranée, grand-croix delà Légion
d'honneur, est mort avant-hier, à Paris, en son
domicile de la rue Volney, à l'âge de quatre-
Yingt-trois ans.
M. Béhic qui était né à Paris en 1809 avait
commencé sa carrière dans l'administration
des finances. Ses débuts dans la vie politique
datent de 1846, époque àjaquelie il fut nommé
député d'Avesnes. '
En 1863, il reçut le portefeuille de l'agricul
ture, du commerce et des travaux publics, et. le
conserva jusqu'en 1867.
Au mpment de la chute de l'Empire, M. Béhic
était sénateur. En 1876, il reparut au Sénat et
y représenta le département de la Gironde
jusqu'en 1879.
Depuis ce moment M. Béhic était rentré défi
nitivement dans la vie privée. Quoique atteint
depuis ces dernières années d'une surdité pres
que complète, il était toujours très répandu
dans la haute société parisienne.
A Bordeaux, à Marseille et à La Ciotat, les
navires de la Compagnie des Messageries
Maritimes ont mis leurs pavillons en berne, dès
hier matin, en signe de deuil.
Les obsèques de M. Béhic auront lieu ven
dredi matin à dix heures et demie à l'église de
la Madeleine.
Le président du Sénat a donné hier, au pa
lais du Petit-Luxembourg, un grand dîner au
corps diplomatique accrédité è Paris. Soixante
convives en tout.
Une réception a suivi le dînor, au cours de
laquelle tous les membres du corps diploma
tique ont défilé dans les salons du Petit-Luxem
bourg; on a remarqué également de nom
breux sénateurs et députés venus pour pré
senter leurs hommages à M. Le Royer.
• Les petits Salons.
Hier s'est ouverte, au Cercle artistique et
littéraire de la rue Volney, une très inté
ressante exposition d'aquarelles et de dessins.
Citons parmi les envois les plus remarqués,
ceux de MM. Allongé, de Bellée, Franc Lamy,
Fréd. Regamey, Trouville, etc. ,
A signaler particulièrement ■ les dessins
fort curieux de M. Lobrichon qui a exposé
une série d'études- représentant les petits pen
sionnaires de l'Hospice des Enfants assistés.
Cet artiste s'est fait une spécialité de peindre
les enfants , et il excelle dans ce-genre. Nos
lecteurs pourront d'ailleurs en juger-par eux-
mêmes, le Supplément illustré du Petit
Journal, quipâraît aujourd'hui, contient pré
cisément la reproduction en couleurs d'un dé
licieux tableau de M. Lobriehon.
MM. Louis Peyramont et Gustave Marait,
lés deux jeunes gens qui ont èntrepris de se
rendre à pied de Paris à ; Moscou, nous ont'
télégraphié hier soir, dé Givet, leur arrivée à
la frontière belge.
Tous deux étaient en excellente santé et ne
doutaient pas de réussir à renouveler le tour
de force du lieutenant Winter.
Nous avons publié, il y a quelques mois, la
notice que l'Association Valentin Haïiy fait
distribuer aux mères de famille et qui indi
que les soins à donner aux enfants nouveau-
nés pour les sauvegarder contre l'ophtalmie,
cause principale delà plupart des cas de cécité.
M. le D r Dehenne a, dans un mémoire très
complet qu'il a lu samedi dernier à l'Académie
de médecine, développé les points généraux
traités dans cette notice.
Il a démontré que sur cent aveugles, cin
quante au moins le sont par le fait de l'oph
talmie des nouveau-nés, et a en même temps
prouvé que cette maladie, bien soignée, pou-;
vait presque'toujours être guérie.
Le Dr Dehenne a donc demandé, avec in
sistance, que les employés des mairies remet
tent à toute personne venant déclarer une
naissance la notice qui indique la gravité de
l'ophtalmie des nouveau-nés et les soins à
donner à l'enfant lorsque ce mal s'est dé
claré.
La première assemblée générale de l'Asso
ciation des anciens élèves du lycée Janson de
Sailly dont nous avons annoncé la création a
eu lieu dimanche dernier. Après avoir voté
les statuts l'assemblée a procédé à la nomi
nation de son comité et du bureau qui est
ainsi constitué pour l'année 1891 : Président,
M. Le Dantec; vice-président, M. Marcel Roger;
secrétaire, M. de Lavenay; trésorier, M. Le-
febvre.
Le premier banquet annuel de l'Association
sera donné prochainement.
La Reine des Reines
LA REINE DES BLANCHISSEUSES
. La subvention de 1,000 fr. votée avant-hier
par le conseil municipal en faveur des vain
queurs du grand tournoi de chars de la
Mi-Carême a été fort bien accueillie par les
organisateurs. Elle va leur permettre d'aug
menter l'importance des prix attribués aux
chars les mieux ornés et leur amener de nou
veaux concours.
Dès maintenant, l'adhésion de plus de qua-
rant«»lavoirs a été recueillie et le cartège qui
se formera demain à deux heures et demie
place de la Madeleine promet d'être fort
curieux. ' ■
Au premier rang sera « la Reine des Reines »,
Mlle Louise Sicard, qui a. été nommée la
reine des quarante reines
élues par les lavoirs concur
rents. Mlle Louise Sicard a
vingt-six ans.; C'est une
brune dont la tête rap-
Eelle celle do la Répu-
lique du sculpteur Gau-
therin.
Très simple et très mo
deste, Mlle Sicàrd ne paraît
guère émue de l'honneur
qui lui est fait. Il est vrai
de dire qu'elle esKhabituée
déjà à la royauté, car à
deux reprises le lavoir
Milton, où elle est ouvrière blanchisseuse, l'a
choisie comme sa rêine. ♦
Tout Paris demain pourra l'admirer sur
son char.
LA QUESTION DES COURSES
- Le vote de la Chambre qui a interdit le jeu
aux-courses a produit une certaine émotion
et l'on discute sur la situation qulil crée. -
On sait comment' se présente là question.
■Les'courses et les paris qui en sont le complé
ment ont pris dans ' ces derniers temps une
importance de .plus.en plus considérable.
Frappé des développements de cette institu
tion qui touchait à des intérêts nombreux
et divers et mettait en mouvement' des som
mes considérables, M. Constans résolut de
légaliser une entreprise qui ne l'avait pas été
jusqu'alors. ,
Sa détermination se justifiait par plusieurs
raisons également importantes.
: D'une part, on faisait remarquer en ce qui
concerne le pari mutuel qu'il était douteux
qu'on pût l'assimiler à une loterie. La loi de
1836, sur les loteries, stipule en effet que les
loteries sont celles dont l'ensemble des fonds
— moins le prélèvement des fra'a — est des
tiné à une œuvre d'art ou de bienfaisance.
Or, dans le pari mutuel, 2 0/0 seulement sont
affectés à des œuvres de bienfaisance. En
outre, si le pari mutuel pouvait être assimilé
à une loterie, les conseils judiciaires du gou
vernement estimaient qu'il fallait une autori
sation spéciale pour chaque course. Mais là
encore M. Constans se trouvait en face de
difficultés matérielles inextricables. Donner
une autorisation par course, passe encore.
Mais lorsqu'on, autorise une loterie, on en
connaît le capital; ce n'est pas le cas.
, D'autre part, M. Floquet s'était engagé à
ne pas permettre de loterie au-dessus de
350,000 fr. sans l'autorisation de la Chambre.
Enfin, et pour terminer avec le pari mutuel,
restait la question de l'emploi des fonds. Le
ministre de l'intérieur était obligé d'en tenir
une comptabilité qui, ne rentrant pas dans la
BCSDHSf ff
»—81— FEUILLETON DU 4 MARS 1891
0)
TROIS MILLIONS DE DOT
PRBM2ÂH& PARTIS
LE CRIME DE JULIEN CLAUDE
LXX (Suite)
Monsieur le comte a-t-il, ce soir, besoin
de. més services ?
* — Non, vous pouvez vous retirer.
— J'ai l'honneur de saluer monsieur le
comte.
Et Jean Dufour, après s'être incliné profon
dément, quitta la chambre.
— Un vrai type, ce bonhomme ! — se dit
en riant'Jules.resté seul. — Roué comme po
tence et capable de tout, absolument de tout ;
il peut, à un moment donné, devenir très utile.
— Je le laisserai pêcher en eau trouble à
son aise, et comme il aura tout intérêt à me
bien servir, il me servira bien !
Le lendemain du jour où nous avons vu
Madeleine Gallier prendre possession du pe
tit hôtel de la rue de la Faisanderie dans les
conditions qui nous- sont connues, Célestin
de Valandelle vint déjeuner avec la jeune
femme et en sortant de table lui dit :
— Quoique vous n'ayez pas encore les toi
lettes du grand couturier qui feront de vous
la plus élégant^/ des Parisiennes, dont vous
êtes déjà la plu3 jolie, nous allons sortir en
semble cette après-midi, ma chère enfant...
— Nous irons au Bois en voiture découverte,
et ce soir au spectacle... — C'est en sortant
beaucoup, en voyant beaucoup de monde, que
Vous aurez chance de rencontrer le misérable
qui tous a fait tant de mal et dont vous vou-
X 1 ) t >jS\wUo» «t «production interdite». «
lez si justement vous, venger... — Autant et
plus que vous j'ai intérêt à votre vengeance
puisque vous avez promis de m'aimer peut-
être quand cette vengeance serait accomplie...
— Nous sortirons quand vous voudrez,
mon ami.. . — répondit Madeleine.
L'apparition de la jeune femme dans une:
Victoria bien attelée, à côté de Célestin de
Valandelle, fit sensation deux heures après au
bois de Boulogne, ou pour mieux dire révolu^
tionna le-clan des viveurs et des horizontales
de haute marque pour qui le lever d'une étoile
nouvelle à l'horizon du monde galant est un
événement.
La débutante étonnait par sa beauté chaste,
par la grâce décente de son attitude. — Elle
avait 1 air et la tournure d'une femme hon
nête, d'une femme du monde. — On se deman
dait où Valandelle avait trouvé cette mer
veille inédite, et naturellement personne ne
pouvait répondre à cette question.
Avenue des Acacias la voiture de Made
leine croisa celle de Gabri.
Madeleine reconnut Vex-Oseille.
De son côté, celle-ci devina la rivale heu
reuse et triomphante qui venait de la sup
planter,— la présence de Célestin ne pouvait
à ce sujet lui laisser l'ombre d'un doute.
Gabri devint très pâle et croisa avec le re
gard indifférent de Madeleine un regard
chargé de colère et de haine.
Célestin surprit ce coup d'œil et il en
comprit le sens menaçant.
— Diable I — pensa-t-il — voilà qui pré
sage une haine corse M — Heureusement
Gabri n'est pas très dangereuse et je veillerai
sur Madeleine!...
Le soir, au théâtre, le succès de la jeune
femme ne fut pas moindre qu'à l'allée des
Acacias, et toutes les jumelles braquées sur
l'inconnue chatouillèrent délicieusement l'a?
mour-propre de Valandelle» - - .y .
Au Bois, Madeleine avait passé en revue
chacun des promeneurs et les cavaliers.
Au spectacle, elle regarda un à un tous les
hommes assis soit à l'orchestre, soit au bal
con, soit dans les loges.
Il nous paraît superflu d'ajouter que pas
plus au théâtre qu'au Bois, elle n'aperçut ce
lui qu'elle cherchait,— Jules Mercier, l'assas
sin de son enfant.
LXXI
Nous avons quitté le baxon de Vervey et le
vicomte de Saint-Roman au moment où ils
allaient monter à chêval pour aller faire un
tour au bois, après avoir "promis , à Jules de
Lucenay d'être ses témoins le jour* de son ma
riage. — Naturellement/ à tous les amis qu'ils
rencontrèrent ils firent part du retour- inat
tendu de leur ancien compagnon de fête,
qui à la suite d'une éclipse de deux années
allait reparaître plus brillant que jamais.
Les deux jeunes gens étaient invités ce soir-
là à un souper réunissant la fine fleur de la
haute gomme.
Gabri faisait partie des convives féminins
de ce souper. : -
Depuis qu'elle avait été quittée par Célestin
de Valandelle, l 'ex-Oseille se multipliait pour
retrouver une situation équivalant à celle
qu'elle venait de perdre.
Elle se montrait partout, elle était de toutes
les fêtes.
Très lancée; très à la modé, les adorateurs
sérieux ne lui manquaient pas. — Beaucoup
se mettaient sur les rangs pour remplacer le
déserteur* mais le train de maison de Gabri,
ses goûts dispendieux, et , enfin son idée fixe
de se retirer des affaires à un moment donné
après fortune faite, ne lui permettaient pas
de se contenter d'un simple millionnaire.
Célestin de Valandelle était l'oiseau rare: »
On. ne trouve pas tous les jours de bons
jeunes gens naïts^ à la têtedequatreou cinq
cent mille livres de rentes, et prodiguant les
billets bleus sans compter.
Au souper Gabri se trouva placée à côté du
baron de Vervey.
Très ennuyée et très inquiète de voir l'in
terrègne se prolonger, elle n'avait plus cet
entrain bruyant, cette gaieté turbulente et
communicative, qui la distinguaient autrefois
et faisaient d'elle une soupeuse accomplie.
Elle était silencieuse, presque sombre.
— Savez-vous bien, ma chère belle, que je
ne vous reconnais pas!— lui ditën riant son
voisin de table. — Est-ce que vous allez pas
ser votre vie à broyer du noir en pensant à
Célestin?...
Gabri haussa les épaules en répliquant :
— Je me soucie de Célestin comme d'une
guigne, mais l'idée qu'on me l'a pris, qu'on
me l'a volé, m'énerve et me crispe... Je m'en
nuie...
— Il faut vous distraire...
— Comment?
— Choisissez parmi ceux qui vous font la
cour.
— Tous me déplaisent... .
— Vous êtes difficile ! -
— C'est possible!... parlons d'autre chose.
— Qu'est-ce que c'est donc que ce comte de
Lucenay dont j'entendais prononcer le nom
tout à l'heurè pour la première, fois.
— Lucenay.;'. C'est vrai, vous ne l'avez pas
connu... Vous n'êtes entrée dans le monde
qu'après sa'fugue* . . — Eh bien ! -c'est un
charmant garçon qui après avoir croqué rapi
dement une assez grosse fortune en' toutes
sortes de folies aimables; est parti pour-l'A-
rique... ■
— Décavé ?
- — Aussi complètement décavé qu'on le
puisse être... - • '
Alors par quel hasard s"occupe-t-oa de
lui? - -. - - . - +
— Parce qu'il vient de revenir,..
— Toujours décavé?
— Rapportant quelques millions... et ces
millions il va les doubler, les tripler, par son
mariage avec la fille unique de l'un des plus
riches banquiers de Paris... Ce qui lui per
mettra de mener de nouveau la grande vie...
la vie joyeuse... et je vous garantis qu'il n'y
manquera pas !...
— Vous êtes lié avec lui ? ■
( — Intimement. ;. — Il est venu me voir ce
matinpourme prierd'être, de demainen huit,
un de ses témoins. .. J'ai accepté, et Saint-
Roman sera l'autre témoin...
— De demain en huit ?
—Oui.
- — Où se fera le mariage ?
— A l'église de Chennevières...
— Pourquoi Chennevières?
— Parce que les parents de la future com
tesse de Lucenay y possèdent une admirable
villa... la villa des Platanes. .
— Nopces et festins, alors, et tout le tralala
de rigueur ?....
— Simple déjeuner de famille avec les té
moins et, le soir ou le lendemain, départ des
mariés pour l'Italie où ils passeront quelque»
mois.
— Dans quelle partie de l'Italie?
— Je l'ignore.
— Mais vous pouvez le savoir?
i— Sans doute. . .
—Eh bien,sachez-le... vous m'obligerez...
■M. de Vervey, très étonné, regarda Gabri.
— Qu'est-ce que ça peut vous faire?—de-
mandà-t-il.
— Une idée à-moi... <
—; Dites-la-moi,^ cette idée...
:—Pas maintenant.. .
— Une énigme, alors ?
» XAVIER DE MONTEPIS.
•'■ ifa suite à domain). ■
61, ru.e Lafkyette, 61
A PARIS
On Nçàt aussi les Morns-rue toage-BateKère, 15
tgs
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TROIS MOIS 5 FR.
SIX «OIS 9 FR.
UN AN 18 FR.
UN NUM ÉRO : 5 C ENTIMES
Tous les vendredis
LE SUPPLÉMENT ILLUSTRÉ : S CÉNTINIES
1 ABONNEMENTS DEPARTEMENTS
TROIS MOIS......... 6 FR..
SIX MOIS 12 FR.
UN AN 24 FR.
MERCREDI 4 MARS 1891
302~—SAINT CASIMIR—:—63
Numéro 10295
VINGT-NEUVIÈME ANNÉE
DERNIERE ÉDITION
Le refus de l'impôt
Une vieille demoiselle de T'oïii's a jugé à
propos de jouer un tour de vieille demoiselle
à son percepteur. Elle a. obstinément refusé
de payer sa cote de "contributions pour l'an
née 1890. Si obstinément refusé que, tous les
délais et répits d'usage étant écoulés et épui-
■sés, le fonctionnaire a dû faire saisir la,contri
buable récalcitrante.. La traditionnelle galan
terie française en a gémi, sans doute, et la
vieille demoiselle a jeté les hauts cris. Mais
l'administration qui se soucie de galanterie,
et souvent même de politesse, autant qu'un
poisson d'une pomme, a passé outre.: Et la
citoyenne révoltée de Tours, nonobstant sa
résistance endiablée, a fini, grâce à la vente
de son mobilier, par solder quand même ses
impositions, augmentées des frais.
C'est du reste toujours ainsi que les choses
Se terminent en matière de refus d'impôt.
Quand il y a un mobilier, toutefois; car, il
est bien évident que là où il-n'y a rien le roi
Eerd ses droits. Or, un percepteur de la Répu-
lique ne saurait être plus royaliste que
le roi.
C'est ainsi que les choses se terminent, en
tendons-nous, lorsqu'il s'agit de refus indivi
duels de payer l'impôt. Le cas isolé, exception
nel, ne saurait évidemment' empêcher la
machine de fonctionner, et toutes ces résis
tances partielles sont brisées comme le fétu
de bois par les roues do la locomotive.
Un train, lancé à toute vapeur, ne déraille
•pas pour si peu, et quand il s agit de toucher
de 1 argent, nos excellents collecteurs, d'im
pôts sont dans le train. Ils le toucheraient
plutôt deux .fois qu'une.
***
Mais il n'y a pas toujours eu que des refus
individuels d'impôts. L'histoire de l'Europe
moderne est, au contraire, remplie de faits où
l'on voit un peuple refuser en masse l'impôt
soit à un souverain, soit à un autre peuple.
La guerre de l'indépendance de l'Amérique
n'a pas" commencé autrement. Jonathan s'est
révolté contre John Bull à cause d'un droit
de trois pence par livre de thé. L'Angleterre
prétendait tirer des ressources spéciales des
marchandises provenant de sa colonie amé
ricaine. On a tort d'être trop gourmand. Elle
tua la poule aux œufs d'or, et à ce jeu-là per-
. dit l'Amérique elle-même. Et voilà comme
quoi les Etats-Unis sont sortis d'une théière.
Pascal avait raison. Rien de tel que les pô-
. tites causes pour produire de grands effets.
Toujours la longueur du nez de Cléopâtre. et
la présence d'un grain de sable dans la vessie
. de Cronrwell, qui changent la face et les des
tinées du monde. " .
A propos de Cromwell, la révolution d'An
gleterre n'a-t-elle pas débuté, elle aussi, par
une révolte populaire contre l'impôt 1 Plutôt,
que de. se résigner à payer les taxes qu'on
exigeait d'eux, les Anglais de ce temps-là
. préféraient s'expatrier. Le mouvement d émi
gration devint même tel que le gouvernement
de Charles I«r s'en inquiéta et s opposa à tout
embarquement de cette nature. Une légende,
affirme même que ce fut ainsi, au nom du roi,
que les constables d'alors empêchèrent Crom
well de monter sur un vaisseau faisant voile
pour l'Amérique.
Avouez qu'il fallait vraiment que ce pau
vre Charles Stuart eût déjà perdu la tête I
Cromwell, parti librement, eût peut-être fait
fortune dans un commerce quelconque, et
Charles I er serait tranquillement décédé sur
le trône, ce qui vaut toujours un peu mieux
que de mourir sur l'échafaud. Iîétas 1 le fa
talisme des Orientaux» raison. Cela est ar
rivé parce que cela devait arriver. Et l'on
est souvent soi-même, sans s'en douter, l'ar
tisan de s'a fâcheuse destinée.
Nous n'insisterons pas sur la rupture du
Brésil avec le Portugal, survenue, elle aussi,
à la suite d'une question de refus d'impôt.
Ni sur l'union plus ou moins tiraillée,' de" la
Suède et delà Norvège, un mariage fondé sur
le régime de la séparation de biens,, lequel,
plus d'une fois, a failli tourner à la séparation
de corps et même au divorce, toujours à pro
pos de taxes et de contributions.
. Quand il n'y a plus de foin au râtelier, les
ânes se battent, dit un proverbe. Un Etat
dont la caisse est toujours vide s'efforce de
la remplir, c'est tout naturel. Mais comme il
ne peut la remplir qu'aux dépens des contri
buables, ceux-ci se fâchent quelquefois; c'est
encore plus naturel.Et cette fâcherie, commen
cée en simple émeute,, peut se terminer par
une belle et bonne révolution. Dame 1 les
peuples à qui l'on demande sans, cesse la
bourse ou la .vie en arrivent aisément à expo
ser leur vie pour sauver leur bourse;
N'est-ce pas la menace du refus collectif de
l'impôt qui, chez nous, après la réélection des
363, triompha des. dernières velléités de ré
sistance du gouvernement dit de l'ordre mo
ral? Cette mena.ee n'était pas une plaisan
terie, les ministres le savaient bien. La
France entière aurait, donné comme un seul
homme en ne donnant pas. Tous les percep
teurs, en même temps, seraient revenus bre
douilles de leur chasse aux gros sous.
Et cette absence totale d'argent, plus sûre
ment encore qu'une pluie de plomb, aurait
frappé au cœur lo gouvernement. L'ordre mo
ral la pressentit, n'insista plus, se retira; et
fit bien.
*** . .
Nous voici revenus à. notre point de dé
part : les refus individuels de l'impôt. D'im
portance nulle, au point de vue historique, ils
présentent parfois un intérêt anecdotique. Je
voudrais, dans le tas, vous en citer quelques-
uns.
Nous avons d'abord Jean-Jacques Rousseau,
citoyen de Genève, refusant de payer jé ne
sais quelle taxe aux gens du roi Louis XV,
qui opéraient pour le compte d'un fermier
général quelconque. L'auteur de la Nouvelle
Hèloïse habitait alors à Paris la rue Plâtrière
qui, depuis, a pris son nom. Rousseau, furieux
de voir jouer un peu partout son opéra-comi
que, le Devin de Village, sans que cela lui
rapportât rien (la Société des auteurs drama
tiques n'était pas encore ïondée)ne voulut en
tendre parler d'aucun impôt.
— « Puisqu'on m'oppose, disait-il avec assez
de raison, ma situation d'étranger quand je
demande la juste rétribution de mon travail,
je me retrancherai derrière cette même qua
lité d'étranger quand on me réclamera quoi
que ce soit. Si 1 on ne me doit rien, je ne dois
rien non plus. ».
Le lise s'ëntêta. Le philosophe aussi. L'a
venture allait empirer lorsque des amis de
celui-ci s'interposèrent. Ils payèrent d'abord
pour lui, puis arrangèrent définitivement les
choses. Qui sait, Rousseau leur'dut peut-être
non seulement .de conserver les quelques meu
bles de son galetas; mais encore de ne pas
faire connaissance avec la Bastille ?
***
Longtemps a prés l'histoire de Jean-Jacques
Rousseau, nous avons eu celle de Ferdi
nand Qambon, l'homme à la vache. Cette
vache est devenue célèbre et a rendu son pro
priétaire immortel. ; Est-il utile . de rappeler
ici que Gambon était un ennemi irréconcilia
ble de l'Empire ; que, vers 1869, il prêcha le
refus de "l'impôt, et que, pour donner l'exem
ple, il laissa saisir et vendre sa vache plutôt
que de régler de bonne volonté la petite note
du percepteur?
La bête paya pour l'homme qui, du coup, en
devint populaire et en redevint député. 11 est
vrai qu'il l'avait déjà été, député, ce qui faci
litait la chose. Qui a bu boira. Il est -sans
doute difficile d'être élu, mais il l'est beaucoup
moins d'être réélu.
Plus récemment, et pendant plusieurs an
nées de suite, Paris a assisté aux démêlés ho
mériques de Mlle Hubertine Auclert avec le
percepteur de son quartier. Chaque fois, l'in-
aomptable amazone, à cheval sur les princi
pes, laissait s'accumuler chez sa concierge
les petits papiers jaunes, verts, bleus, aver
tissements avec ou sans frais, tout un arc-en-
ciel, mais un arc-en-ciel annonçant la tempê te
et non le calme.
Elle résistait jusqu'au bout, laissait saisir
son mobilier, le laissait vendre, quitte à le
racheter elle-même. Et la petite fête recom
mençait l'année suivante, avec le même pro
gramme.
Mlle Auclert basait son refus absolu de payer
l'impôt sur ce fait que la femme, n'ayant au
cun des droits du citoyen, ne devait en accep
ter aucun devoir, ni en assumer aucune des
charges. C'était un peu, comme vous le voyez,
la théorie de Jean-Jacques, au fond de la
quelle il y a incontestablement du vrai, beau
coup de vrai.
Mlle Hubertine Auclert aurait peut-être
triomphé, un jour ou l'autre, sa cause étant
bonne, après tout. Mais elle déserta la lutte.
Elle abdiqua cette fière indépendance pour
épouser un galant homme. Et, maintenant,
je suis sûr qu'elle donne l'exemple de la ré
gularité dans le paiement dos impôts à tous
les. contribuables qui sont un peu ses admi
nistrés, puisque son mari, si je ne me trompe,
est fonctionnaire quelque part, en Algérie.
Il n'y a donc pas que les gloires du monde
qui passent. Les révoltes s'apaisent aussi. Et
les plus violentes sont rarement les plus du
rables. Un brave paysan de mon pays, qui
s'était fourré dans le crâne de ne point payer
de cote personnelle, fut bien forcé, lui aussi;
de mettre les pouces, sous peine de se voir
.mettre les poucettes. Voici dans quelles cir
constances :
Notre paysan, assez riche, avait un' bien
situé sur les confins de deux communes, Mens
et Cornillon (Isère). Sa maison était bâtie sur
la limite même, et il avait installé sa cham
bre à coucher de telle façon que la moitié de
cette chambre était sur le territoire de Cor
nillon, quand l'autre moitié dépendait, de la
commune de Mens.
Le rusé Dauphinois usa et abusa de la cir
constance. Le percepteur de Cornillon se pré
sentait-il, vite notre homme transportait ses
nippes du côté de Mens, et affirmait qu'il ne
devait rien à Cornillon. Quand il fallait répon
dre au percepteur de Mens, le contribuable
passait avec armes et bagages du côté de Cor
nillon. Le tour était joué, et le fisc aussi. C'é
tait simple comme bonsoir.
Mais cette grosse malice cousue de fil blanc
ne réussit pas longtemps au pauvre homme.
Un beau matin, les deux percepteurs se pré
sentèrent en même temps, et le vieux renard,
pris au piège, dans son gîte même, dut payer
deux cotes personnelles au lieu d'une.
•. Ce sera, si vous le voulez bien, la moralité
de cet article. Le refus individuel de l'impôt
ne saurait aboutir à autre chose. Le récalci
trant finit toujours par payer double.
Thomas Grimm.
AUJOURD'HUI MERCREDI
■ demandez partout
LE '
SUPPLÉMENT ILLUSTRÉ
EN COULEURS
dû Petit Journal
LE NUMÉRO : S CENTIMES
SOMMAIRE DU QUINZIÈME NUMÉRO: ,
La Semaine. Simon L eviui
Misère............r................. ' Paul Sébillot
La recherche de l'inconnu Ernest d 'H ervillt
Grandeur, lies petites choses Alphonse K arr
Le voyage de noce Nath. IU wthornb
Versez-moi du vin bleu! Alexis Bouvier
L'employé qui ne'veut pas aller à son
bureau. ■.. ■ Georges C ourtelinb
Course de taureau en chambre....;. Jules M oinaux
- FEUILLETON :
La Peau du mort Camille D eians
A r os
gravures — Bulletin orphàonique
Choses et autres
Mots pour rire — La Question des placements
Memenlo du capitaliste, etc., etc.
Gravures en couleurs :
L'ARMÉE COLONIALE
Officier de tirailleurs sénégalais
Spahi sénégalais — Cipahis des Indes — Tirailleur algérien
Légion étrangère —Tirailleur annamite
Spahi algérien — Tirailleur de Madagascar
Une Surprise
(Tableau de Lobriclura)
Eolios de ] psurtout
M. Armand Béhic, ancien ministre, ancien
sénateur, président du conseil d'administra
tion de la Compagnie des Messageries mari
times et de la Société des forges et chantiers
de la Méditerranée, grand-croix delà Légion
d'honneur, est mort avant-hier, à Paris, en son
domicile de la rue Volney, à l'âge de quatre-
Yingt-trois ans.
M. Béhic qui était né à Paris en 1809 avait
commencé sa carrière dans l'administration
des finances. Ses débuts dans la vie politique
datent de 1846, époque àjaquelie il fut nommé
député d'Avesnes. '
En 1863, il reçut le portefeuille de l'agricul
ture, du commerce et des travaux publics, et. le
conserva jusqu'en 1867.
Au mpment de la chute de l'Empire, M. Béhic
était sénateur. En 1876, il reparut au Sénat et
y représenta le département de la Gironde
jusqu'en 1879.
Depuis ce moment M. Béhic était rentré défi
nitivement dans la vie privée. Quoique atteint
depuis ces dernières années d'une surdité pres
que complète, il était toujours très répandu
dans la haute société parisienne.
A Bordeaux, à Marseille et à La Ciotat, les
navires de la Compagnie des Messageries
Maritimes ont mis leurs pavillons en berne, dès
hier matin, en signe de deuil.
Les obsèques de M. Béhic auront lieu ven
dredi matin à dix heures et demie à l'église de
la Madeleine.
Le président du Sénat a donné hier, au pa
lais du Petit-Luxembourg, un grand dîner au
corps diplomatique accrédité è Paris. Soixante
convives en tout.
Une réception a suivi le dînor, au cours de
laquelle tous les membres du corps diploma
tique ont défilé dans les salons du Petit-Luxem
bourg; on a remarqué également de nom
breux sénateurs et députés venus pour pré
senter leurs hommages à M. Le Royer.
• Les petits Salons.
Hier s'est ouverte, au Cercle artistique et
littéraire de la rue Volney, une très inté
ressante exposition d'aquarelles et de dessins.
Citons parmi les envois les plus remarqués,
ceux de MM. Allongé, de Bellée, Franc Lamy,
Fréd. Regamey, Trouville, etc. ,
A signaler particulièrement ■ les dessins
fort curieux de M. Lobrichon qui a exposé
une série d'études- représentant les petits pen
sionnaires de l'Hospice des Enfants assistés.
Cet artiste s'est fait une spécialité de peindre
les enfants , et il excelle dans ce-genre. Nos
lecteurs pourront d'ailleurs en juger-par eux-
mêmes, le Supplément illustré du Petit
Journal, quipâraît aujourd'hui, contient pré
cisément la reproduction en couleurs d'un dé
licieux tableau de M. Lobriehon.
MM. Louis Peyramont et Gustave Marait,
lés deux jeunes gens qui ont èntrepris de se
rendre à pied de Paris à ; Moscou, nous ont'
télégraphié hier soir, dé Givet, leur arrivée à
la frontière belge.
Tous deux étaient en excellente santé et ne
doutaient pas de réussir à renouveler le tour
de force du lieutenant Winter.
Nous avons publié, il y a quelques mois, la
notice que l'Association Valentin Haïiy fait
distribuer aux mères de famille et qui indi
que les soins à donner aux enfants nouveau-
nés pour les sauvegarder contre l'ophtalmie,
cause principale delà plupart des cas de cécité.
M. le D r Dehenne a, dans un mémoire très
complet qu'il a lu samedi dernier à l'Académie
de médecine, développé les points généraux
traités dans cette notice.
Il a démontré que sur cent aveugles, cin
quante au moins le sont par le fait de l'oph
talmie des nouveau-nés, et a en même temps
prouvé que cette maladie, bien soignée, pou-;
vait presque'toujours être guérie.
Le Dr Dehenne a donc demandé, avec in
sistance, que les employés des mairies remet
tent à toute personne venant déclarer une
naissance la notice qui indique la gravité de
l'ophtalmie des nouveau-nés et les soins à
donner à l'enfant lorsque ce mal s'est dé
claré.
La première assemblée générale de l'Asso
ciation des anciens élèves du lycée Janson de
Sailly dont nous avons annoncé la création a
eu lieu dimanche dernier. Après avoir voté
les statuts l'assemblée a procédé à la nomi
nation de son comité et du bureau qui est
ainsi constitué pour l'année 1891 : Président,
M. Le Dantec; vice-président, M. Marcel Roger;
secrétaire, M. de Lavenay; trésorier, M. Le-
febvre.
Le premier banquet annuel de l'Association
sera donné prochainement.
La Reine des Reines
LA REINE DES BLANCHISSEUSES
. La subvention de 1,000 fr. votée avant-hier
par le conseil municipal en faveur des vain
queurs du grand tournoi de chars de la
Mi-Carême a été fort bien accueillie par les
organisateurs. Elle va leur permettre d'aug
menter l'importance des prix attribués aux
chars les mieux ornés et leur amener de nou
veaux concours.
Dès maintenant, l'adhésion de plus de qua-
rant«»lavoirs a été recueillie et le cartège qui
se formera demain à deux heures et demie
place de la Madeleine promet d'être fort
curieux. ' ■
Au premier rang sera « la Reine des Reines »,
Mlle Louise Sicard, qui a. été nommée la
reine des quarante reines
élues par les lavoirs concur
rents. Mlle Louise Sicard a
vingt-six ans.; C'est une
brune dont la tête rap-
Eelle celle do la Répu-
lique du sculpteur Gau-
therin.
Très simple et très mo
deste, Mlle Sicàrd ne paraît
guère émue de l'honneur
qui lui est fait. Il est vrai
de dire qu'elle esKhabituée
déjà à la royauté, car à
deux reprises le lavoir
Milton, où elle est ouvrière blanchisseuse, l'a
choisie comme sa rêine. ♦
Tout Paris demain pourra l'admirer sur
son char.
LA QUESTION DES COURSES
- Le vote de la Chambre qui a interdit le jeu
aux-courses a produit une certaine émotion
et l'on discute sur la situation qulil crée. -
On sait comment' se présente là question.
■Les'courses et les paris qui en sont le complé
ment ont pris dans ' ces derniers temps une
importance de .plus.en plus considérable.
Frappé des développements de cette institu
tion qui touchait à des intérêts nombreux
et divers et mettait en mouvement' des som
mes considérables, M. Constans résolut de
légaliser une entreprise qui ne l'avait pas été
jusqu'alors. ,
Sa détermination se justifiait par plusieurs
raisons également importantes.
: D'une part, on faisait remarquer en ce qui
concerne le pari mutuel qu'il était douteux
qu'on pût l'assimiler à une loterie. La loi de
1836, sur les loteries, stipule en effet que les
loteries sont celles dont l'ensemble des fonds
— moins le prélèvement des fra'a — est des
tiné à une œuvre d'art ou de bienfaisance.
Or, dans le pari mutuel, 2 0/0 seulement sont
affectés à des œuvres de bienfaisance. En
outre, si le pari mutuel pouvait être assimilé
à une loterie, les conseils judiciaires du gou
vernement estimaient qu'il fallait une autori
sation spéciale pour chaque course. Mais là
encore M. Constans se trouvait en face de
difficultés matérielles inextricables. Donner
une autorisation par course, passe encore.
Mais lorsqu'on, autorise une loterie, on en
connaît le capital; ce n'est pas le cas.
, D'autre part, M. Floquet s'était engagé à
ne pas permettre de loterie au-dessus de
350,000 fr. sans l'autorisation de la Chambre.
Enfin, et pour terminer avec le pari mutuel,
restait la question de l'emploi des fonds. Le
ministre de l'intérieur était obligé d'en tenir
une comptabilité qui, ne rentrant pas dans la
BCSDHSf ff
»—81— FEUILLETON DU 4 MARS 1891
0)
TROIS MILLIONS DE DOT
PRBM2ÂH& PARTIS
LE CRIME DE JULIEN CLAUDE
LXX (Suite)
Monsieur le comte a-t-il, ce soir, besoin
de. més services ?
* — Non, vous pouvez vous retirer.
— J'ai l'honneur de saluer monsieur le
comte.
Et Jean Dufour, après s'être incliné profon
dément, quitta la chambre.
— Un vrai type, ce bonhomme ! — se dit
en riant'Jules.resté seul. — Roué comme po
tence et capable de tout, absolument de tout ;
il peut, à un moment donné, devenir très utile.
— Je le laisserai pêcher en eau trouble à
son aise, et comme il aura tout intérêt à me
bien servir, il me servira bien !
Le lendemain du jour où nous avons vu
Madeleine Gallier prendre possession du pe
tit hôtel de la rue de la Faisanderie dans les
conditions qui nous- sont connues, Célestin
de Valandelle vint déjeuner avec la jeune
femme et en sortant de table lui dit :
— Quoique vous n'ayez pas encore les toi
lettes du grand couturier qui feront de vous
la plus élégant^/ des Parisiennes, dont vous
êtes déjà la plu3 jolie, nous allons sortir en
semble cette après-midi, ma chère enfant...
— Nous irons au Bois en voiture découverte,
et ce soir au spectacle... — C'est en sortant
beaucoup, en voyant beaucoup de monde, que
Vous aurez chance de rencontrer le misérable
qui tous a fait tant de mal et dont vous vou-
X 1 ) t >jS\wUo» «t «production interdite». «
lez si justement vous, venger... — Autant et
plus que vous j'ai intérêt à votre vengeance
puisque vous avez promis de m'aimer peut-
être quand cette vengeance serait accomplie...
— Nous sortirons quand vous voudrez,
mon ami.. . — répondit Madeleine.
L'apparition de la jeune femme dans une:
Victoria bien attelée, à côté de Célestin de
Valandelle, fit sensation deux heures après au
bois de Boulogne, ou pour mieux dire révolu^
tionna le-clan des viveurs et des horizontales
de haute marque pour qui le lever d'une étoile
nouvelle à l'horizon du monde galant est un
événement.
La débutante étonnait par sa beauté chaste,
par la grâce décente de son attitude. — Elle
avait 1 air et la tournure d'une femme hon
nête, d'une femme du monde. — On se deman
dait où Valandelle avait trouvé cette mer
veille inédite, et naturellement personne ne
pouvait répondre à cette question.
Avenue des Acacias la voiture de Made
leine croisa celle de Gabri.
Madeleine reconnut Vex-Oseille.
De son côté, celle-ci devina la rivale heu
reuse et triomphante qui venait de la sup
planter,— la présence de Célestin ne pouvait
à ce sujet lui laisser l'ombre d'un doute.
Gabri devint très pâle et croisa avec le re
gard indifférent de Madeleine un regard
chargé de colère et de haine.
Célestin surprit ce coup d'œil et il en
comprit le sens menaçant.
— Diable I — pensa-t-il — voilà qui pré
sage une haine corse M — Heureusement
Gabri n'est pas très dangereuse et je veillerai
sur Madeleine!...
Le soir, au théâtre, le succès de la jeune
femme ne fut pas moindre qu'à l'allée des
Acacias, et toutes les jumelles braquées sur
l'inconnue chatouillèrent délicieusement l'a?
mour-propre de Valandelle» - - .y .
Au Bois, Madeleine avait passé en revue
chacun des promeneurs et les cavaliers.
Au spectacle, elle regarda un à un tous les
hommes assis soit à l'orchestre, soit au bal
con, soit dans les loges.
Il nous paraît superflu d'ajouter que pas
plus au théâtre qu'au Bois, elle n'aperçut ce
lui qu'elle cherchait,— Jules Mercier, l'assas
sin de son enfant.
LXXI
Nous avons quitté le baxon de Vervey et le
vicomte de Saint-Roman au moment où ils
allaient monter à chêval pour aller faire un
tour au bois, après avoir "promis , à Jules de
Lucenay d'être ses témoins le jour* de son ma
riage. — Naturellement/ à tous les amis qu'ils
rencontrèrent ils firent part du retour- inat
tendu de leur ancien compagnon de fête,
qui à la suite d'une éclipse de deux années
allait reparaître plus brillant que jamais.
Les deux jeunes gens étaient invités ce soir-
là à un souper réunissant la fine fleur de la
haute gomme.
Gabri faisait partie des convives féminins
de ce souper. : -
Depuis qu'elle avait été quittée par Célestin
de Valandelle, l 'ex-Oseille se multipliait pour
retrouver une situation équivalant à celle
qu'elle venait de perdre.
Elle se montrait partout, elle était de toutes
les fêtes.
Très lancée; très à la modé, les adorateurs
sérieux ne lui manquaient pas. — Beaucoup
se mettaient sur les rangs pour remplacer le
déserteur* mais le train de maison de Gabri,
ses goûts dispendieux, et , enfin son idée fixe
de se retirer des affaires à un moment donné
après fortune faite, ne lui permettaient pas
de se contenter d'un simple millionnaire.
Célestin de Valandelle était l'oiseau rare: »
On. ne trouve pas tous les jours de bons
jeunes gens naïts^ à la têtedequatreou cinq
cent mille livres de rentes, et prodiguant les
billets bleus sans compter.
Au souper Gabri se trouva placée à côté du
baron de Vervey.
Très ennuyée et très inquiète de voir l'in
terrègne se prolonger, elle n'avait plus cet
entrain bruyant, cette gaieté turbulente et
communicative, qui la distinguaient autrefois
et faisaient d'elle une soupeuse accomplie.
Elle était silencieuse, presque sombre.
— Savez-vous bien, ma chère belle, que je
ne vous reconnais pas!— lui ditën riant son
voisin de table. — Est-ce que vous allez pas
ser votre vie à broyer du noir en pensant à
Célestin?...
Gabri haussa les épaules en répliquant :
— Je me soucie de Célestin comme d'une
guigne, mais l'idée qu'on me l'a pris, qu'on
me l'a volé, m'énerve et me crispe... Je m'en
nuie...
— Il faut vous distraire...
— Comment?
— Choisissez parmi ceux qui vous font la
cour.
— Tous me déplaisent... .
— Vous êtes difficile ! -
— C'est possible!... parlons d'autre chose.
— Qu'est-ce que c'est donc que ce comte de
Lucenay dont j'entendais prononcer le nom
tout à l'heurè pour la première, fois.
— Lucenay.;'. C'est vrai, vous ne l'avez pas
connu... Vous n'êtes entrée dans le monde
qu'après sa'fugue* . . — Eh bien ! -c'est un
charmant garçon qui après avoir croqué rapi
dement une assez grosse fortune en' toutes
sortes de folies aimables; est parti pour-l'A-
rique... ■
— Décavé ?
- — Aussi complètement décavé qu'on le
puisse être... - • '
Alors par quel hasard s"occupe-t-oa de
lui? - -. - - . - +
— Parce qu'il vient de revenir,..
— Toujours décavé?
— Rapportant quelques millions... et ces
millions il va les doubler, les tripler, par son
mariage avec la fille unique de l'un des plus
riches banquiers de Paris... Ce qui lui per
mettra de mener de nouveau la grande vie...
la vie joyeuse... et je vous garantis qu'il n'y
manquera pas !...
— Vous êtes lié avec lui ? ■
( — Intimement. ;. — Il est venu me voir ce
matinpourme prierd'être, de demainen huit,
un de ses témoins. .. J'ai accepté, et Saint-
Roman sera l'autre témoin...
— De demain en huit ?
—Oui.
- — Où se fera le mariage ?
— A l'église de Chennevières...
— Pourquoi Chennevières?
— Parce que les parents de la future com
tesse de Lucenay y possèdent une admirable
villa... la villa des Platanes. .
— Nopces et festins, alors, et tout le tralala
de rigueur ?....
— Simple déjeuner de famille avec les té
moins et, le soir ou le lendemain, départ des
mariés pour l'Italie où ils passeront quelque»
mois.
— Dans quelle partie de l'Italie?
— Je l'ignore.
— Mais vous pouvez le savoir?
i— Sans doute. . .
—Eh bien,sachez-le... vous m'obligerez...
■M. de Vervey, très étonné, regarda Gabri.
— Qu'est-ce que ça peut vous faire?—de-
mandà-t-il.
— Une idée à-moi... <
—; Dites-la-moi,^ cette idée...
:—Pas maintenant.. .
— Une énigme, alors ?
» XAVIER DE MONTEPIS.
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