LA GÉOGRAPHIE SOCIALE DE LA FRANCE. 131
Châteaurenault, de Bimars, de Chancay, d'Amboise, de Montri-
chard, d'Aigues-Vives, de Bourgueuil, de Chinon, de Bellevau,
de Bort, de Chenevose, de Loches, de Preuilly, de Brionne, de
Bernhart, etc., etc. On saisit bien là la marche ininterrompue,
mais difficile et lente, du défrichement.
Et cependant, dans toute la région au Sud de la Loire, la
forêt a reculé plus rapidement que dans le Nord, parce que ces
populations à formation plus pastorale ont eu, comme auxiliaire
très puissant, la dent des animaux, qu'ils envoyaient pâturer
dans les forêts. Mais c'était là de la destruction et non du défri-
chement, ce qui n'est pas la même chose.
Que d'efforts il a fallu pour amener le sol de ces plateaux à
l'état de culture où nous le voyons! « On ne saurait douter, dit
Maury, que la Gaule, à l'époque de la conquête romaine, ne pré-
sentât encore, sur beaucoup de points, l'aspect d'une vaste forêt ;
elle devait offrir alors à peu près la même physionomie que l'Amé-
rique du Nord, il y a un siècle. Pomponius, qui écrivait au
commencement de notre ère, qualifie la Gaule, d'amoena lucis
immanibus, et tout ce que nous rapporte César, en ses Commen-
taires, est d'accord avec les paroles du géographe latin (1). »
On saisit très bien la marche du défrichement : des vallées,
d'abord mises en culture, il gagne peu à peu et progressivement
la lisière des forêts situées sur les plateaux. C'est ce que Maury
constate pour la Touraine : « Le grand développement que prit
de bonne heure la culture sur les bords de la Loire n'eut pas
cependant pour effet de faire disparaître les vastes forêts qui
recouvrirent, à l'époque gauloise, le territoire des Turones. Sans
doute, leur lisière s'écarta de plus en plus des rives du fleuve,
mais elles conservèrent pendant longtemps une extension re-
marquable, et, au siècle dernier, plusieurs des forêts de la Tou-
raine figuraient encore au nombre des grandes forêts de la
France (2). »
Pour pousser le défrichement au delà de la lisière, pour enta-
mer à fond ces grands massifs forestiers, surtout pour s'y ins-
(1) Les Forêts de la Gaule, p. 41.
(2) Iibid., p. 274.
