Titre : Le Petit journal
Auteur : Parti social français. Auteur du texte
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Éditeur : [s.n.][s.n.] (Clermont-Ferrand)
Éditeur : [s.n.][s.n.] (Pau)
Date d'édition : 1868-06-24
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32895690j
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 146118 Nombre total de vues : 146118
Description : 24 juin 1868 24 juin 1868
Description : 1868/06/24 (Numéro 2001). 1868/06/24 (Numéro 2001).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Description : Collection numérique : BIPFPIG63 Collection numérique : BIPFPIG63
Description : Collection numérique : BIPFPIG64 Collection numérique : BIPFPIG64
Description : Collection numérique : Grande collecte... Collection numérique : Grande collecte d'archives. Femmes au travail
Description : Collection numérique : La Grande Collecte Collection numérique : La Grande Collecte
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k5900518
Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 18/07/2008
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UN AN. 24 FR
Sixième Aasés K°
Mercredi U Juin Wk
Il s'est paséé;Tiiejrè-l'iadémïe des
'•Sciences une scèri'è foriioifchante.
D'ordinaire, les séances de la docte
compagnie sont orageuses
C'est la lutie entre M. Leverrier et ses
est l'antagonisme des divers systèmes
qui se produit.
C'est, dit-on, du choc de deux cailloux
que naît l'étincelle.
Voilà une vérité qu'aucun physicien
ne saurait combattre.
Mais à quoi bon se chamailler quand
on est membre de l'Institut, savant, éru-
» dit reconnu?
« ̃ E>u choc de deux diamants, aucune lu-
mière ne. se peut produire.
Avant de vous parler de la cérémonie
qui a eu lieu hier à l'Académie des Scien-
ces, voulez-vous me permettre quelques
mots sur son institution.
Par la loi du 3 brumaire, an iv, l'objet
et les attributions de l'Académie des
Sciences avaient été fixés dans les termes
f « Perfectionner les sciences et les arts
par des recherches non interrompues, par
la publication des découvertes, par la cor-
respondance avec les sociétés savants et
étrangères; suivre les travaux scientifi-
ques qui auraient pour objet l'utilité gé-
nérale et la gloire de la République. »
Et pour remplir ce programme qui, bien
que modifié souvent, n'en est pas moins
la mission principale de l'Académie des
sciences, on a appelé successivement dans
son sein tous les savants de chaque épo-
que.
Toutefois, la jeunesse est un obstacle
pour entrer, dans ce cénacle.
M. Berthelot, dans le Paris-Guide, nous
apprend que les jeunes académiciens sont
devenus rares..
Au dix-huitième siècle, dit-il, on ren-
contre une multitude d'académiciens nom-
jnés avant 1 âge de trente ans ainsi Buffon
Ifiit nommé à vingt-sept ans, Laplace à
vinbt-quatre ans, Clairaut même avant
vingt ans, Bernard de Jussieu à vingt-
Six, Antoine de Jussieu à vingt-quatre,
Lavoisier à vingt-cinq, Vicq d'Azyr à
vingt-six; le dernier des Cassini, dont la
'carrière presque centenaire s'est prolon-
Feuilleton du U Juin 1868
MONSIEUR LECOQ
1 PREMIÈRE PARTIE
Le Meurtre
XXIX
>fce directeur du dépôt, ce fonctionnaire à
.qui vingt ans de pratique des prisons et des
détenus donnait une autorité d'oracle, cet
observateur si difficile à surprendre, avait
écrit au.juge d'instruction
« Entourez-vous de précautions, avant d'in-
terroger le prévenu Mai. »
Pas du tout au lieu du dangereux malfai-
teur dont l'annonce seule avait fait pâlir le
greffier, on trouvait une manière de philo-
.8ophe pratique inoffensif et jovial, vaniteux
et beau parleur, un homme à boniments, un
pitre, enfin!
La déconvenue était étrange.
Voir le Petit Jottroal depuis le 27 mai.
Reproduction et traduction interdites.
gée jusqu'en 1845, était entré à l'Acadé-
mie à vingt-deux ans. L'introduction
d'hommes aussi jeunes donne à un corps
une énergie, une vitalité singulières, et
une initiative qui se pondère avec avan-
tage par l'âge et la gravité des vénérables
vétérans delà science.
'Dans la nouvelle Académie, de tels
choix sont devenus de plus en plus rares:
depuis 1850, on n'a pas nommé un seul
académicien qui eût moins de trente ans.
En 1815, l'Académie comptait huit mem-
bres au-dessous de quarante ans en 1835,
elle en comptait sept. Mais eu 1850, ce
chiffre était tombé à quatre. Enfin, dans
la présente année 1868, il n'y a point d'a-
cadémicien qui soit âgé de moins de qua-
rante-cinq ans.
Il fut un temps où l'on prenait les can-
didats fort jeunes; si cette tolérance n'a-
vait point existé, l'Académie des sciences
n'aurait pas pu célébrer la petite fête
d'hier, qui' sort tout à fait de ses graves
habitudes, et crée un précédent fort tou-
chant qui restera dans ses archives à l'é-
tat de tradition.
Je l'ai dit, on ne s'est pas'disputé hier
sur les comètes, sur la formation du dia-
mant, sur le coloris des épreuves photo-
graphiques.
On ne s'est même pas occupé de la dis-
tribution du prix Monthyon our la statis-
tique, la physiologie expérimentale, la
mécanique ou la chirurgie; pas même du
prix Lalande, pour l'astronomie, ou du
prix Bréant pour la solution des questions
touchant le choléra-morbus.
On ne s'est même pas occupé du legs
Trempnt, par lequel on vient en aide aux
travaux d'un jeune savant sans fortune,
ou de la fondation Birot de Molrogues,
prix quinquennal décerné alternativement
par l'Académie des sciences et par l'Aca-
démie des sciences morales et politiques
à l'ouvrage qui aura fait faire le plus de
progrès à l'Agriculture.
son, on avait d'autres soucis.
On célébrait une cinquantaine
Faire la cinquantaine, d'après les habi-
tudes villageoises, c'est célébrer le cin-
quantième anniversaire d'un mariage
heureux.
Cela suppose, chez les époux, une dou-
ceur et un charme à se rappeler le temps
déjà bien éloigné où ils ont contracté leur
union.
La cinquantaine conjugale est un reste
des mœurs patriarcales.
Et je ne connais pas de cérémonie plus
Cependant, loin de souffler à M. Segmul-
ler la tentation de renoncer au point de dé-
part de Lecoq, elle enfonça plus profondé-
ment dans son esprit le système du jeune
policier.
S'il restait silencieux, les coudes sur la
tablette de son bureau, les mains croisées sur
les yeux, c'est que dans cette position, rien
qu'en écartant les doigts, il pouvait, à loisir,
étudier son homme.
L'attitude de ce meurtrier était inconce-
vable.
Son « compliment » anglais terminé, il
restait au milieu du cabinet, la physionomie
étonnée, moitié content, moitié inquiet,
mais aussi à l'aise que s'il eût été sur les
tréteaux où il disait avoir passé la moitié de
sa vie.
Et, réunissant tout ce qu'il avait d'intelli-
gence et de pénétration, le juge s'efforçait de
saisir quelque chose, un indice, un tressail-
lement d'espoir, une contraction d'angoisse,
sur ce masque plus énigmatique eu sa mo-
bilité crue la face de bronze des sphynx.
Jusqu'alors, M. Segmuller avait le des-
sous.
Il est vrai qu'il n'avait point encore attaqué
sérieusement. Il n'avait utilisé aucune des
armes que lui avait forgées Lecoq.
Mais le dépit le gagnait, il fut aisé de le
voir, la façon brusque dont il releva la tête
touchante que cette réjouissance dans
laquelle les chansons, les violons, les gais
quadrilles, les toasts sans prétention, font
fête à deux époux qui ont passé un
demi-siècle. unis comme Philémon et
Baucis.
D'ailleurs, qu'est-ce que cinquante ans
.pour M. Flourens et même pour Béranger.
;'+-N'est-ce pas ce doux poëte qui a dit
pour consoler les cinquantenaires
Eh quoi c'est vous! ma jeunes amie,
Sœur de charité des amours!
Vous tirez mon âme endormie
Du cauchemar des mauvais jours.
Semant les roses de votre âge
Partout, comme fait le printemps.
Parfumez les rêves d'un sage.
Hélas! hélas! j'ai cinquante ans.
Cinquante ans d'âge, c'est déjà un bre-
vet de gravité. quand on est arrivé à
cinquante ans, on a effeuillé assez de mar-
guerites afin de savoir si l'on est encore
aimé, pour en couvrir le dernier sol à par-
courir. comme d'un blanc tapis.
Mais cinquante ans d'Académie des
Sciences, cela est certainement plus im-
posant encore.
Et c'est la cinquantaine de deux de
ses membres que l'Académie des sciences
célébrait dans la séance à laquelle je fais
allusion.
L'un des membres fêtés se nomme
Claude-Louis Mathieu.
Il est né à Mâcon, le 25 novembre 1783;
il est le fils d'un simple meunier.
Il suivit, en 1801, à Paris, les cours de
Lacroix et de Delambre; entra à l'Ecole
polytechnique en 1803, à l'Ecole des
ponts-et-chaussées en 1805, et fut nommé
peu après secrétaire du Bureau des Lon-
gitudes.
En 1808, il fut adjoint.à M. Biot, pour
les expériences du pendule à secondes sur
la Méditerranée.
A son retour en France, il fut attaché
comme astronome à l'Observatoire.
Il a été nommé membre de l'Académie
des sciences en 1817, en remplacement de
Meissier.
Il y a de cela cinquante et un ans.
Le second académicien dont on a célé-
bré la cinquantaine se nomme M. le baron
François-rierre-Charles Dupin.
Il est né à Varzy (Nièvre), le 6 octobre
1784.
Il a été admis le premier à l'Ecole poly-
technique, en 1801, et en sortit le premier
en 1803.
M. Charles Dupin, dont tout le monde
connaît les, ouvrages de Statistique Uni-
au bout d'un moment.
Je le reconnais, dit-il au prévenu, vous
parlez couramment les trois grandes langues
de l'Europe. C'est un rare talent.
Le meurtrier s'inclina, un sourire orgueil-
leux aux lèvres.
Mais cela n'établit pas votre identité,
continua le juge. Avez-vous des répondants
à Paris?. Pouvez-vous indiquer une per-
sonne honorable qui garantisse votre indivi-
dualité ?.
Eh monsieur, il y a seize ans que
j'ai quitté la France et que je vis sur les
grands chemins et dans les foires.
N'insistez pas, la prévention ne saurait
se contenter de ces raisons. Il serait trop aisé
d'échapper aux conséquences de ses antécé-
dents. Parlez-moi de votre dernier patron,
M. Simpson. Quel est ce personnage?
M. Simpson est un homme riche, ré-
pondit le prévenu d'un ton froissé, riche à
plus de deux cent mille francs, et honnête.
En Allemagne, il travaille avec un théâtre
de marionnettes; en'Angleterre, il fait voir
des phénomènes, selon le goût des pays.
Eiibien! ce millionnaire peut té-
moigner en votre faveur; il doit être facile
de le retrouver.
En ce moment, Lecoq n'avait plus un brin
de fil sec sur lui; il l'a avoué depuis. En dix
paroles, le prévenu allait confirmer ou ré-
verselle, est entré à l'Académie des Scien-
ces en 1818, en remplacement de Perler,
Ainsi M. Mathieu fut reçu de l'Acadé-
mie des Sciences à trente-quatre ans,
Et M. Charles Dupin n'était pas plus
vieux lorsqu'il fut appelé à siéger dans
l'illustre compagnie.
J'applaudis des deux mains quand
cadémie des sciences appelle dans son
sein M. Nélaton.
Mais ce n'est pas un jeune homme, cg
chirurgien célèbre.
Il a dépassé depuis plus d'un jourles cin-
quante ans qne chantait Béranger..
Puisse-t-il vivre longtemps, ce savant qui
fait vivre les autres.
Les centenaires sont rares, mêmes parv
mi les médecins.
Et je voudrais voir souvent se renovt-'
veler les fêtes de cinquantaine. senf*
blables à la solennité d'hier.
Rien n'est saisissant comme un compta
rendu sténographié.
Mon savant confrère, M. de Parville a
pris à la volée le passage concernant cette
charmante innovation académique. Je le
copie dans le Constitutionnel de ce matin
M. LE PRÉSIDENT DELAUNAY. NOUS avons la;
bonheur de posséder parmi nous deux confrères
qui sont' membres de cette Académie depuis cirw
quante ans M. Mathieu, nommé en 1817, et M.
le baron Dupin, nommé en 1818. Nous avons
tous désiré célébrer leur cinquantaine. Une sous-
cription.a été ouverte d'un commun accord pour
leur offrir -une médaille commémorative. L'Empe-i
reur à voulu s'associer à la souscription de l'Aca-
démie je suis heureux d'avoir été charge parrnea
collègues de remettre la médaille à MM. Mathieu
et Dupin. On comprendra mon émotjton et mon)
bonheur quand j'aurai dit que je dois à M. Ma*
thieu ce que je suis; il m'a guidé, au sortir dcs
bancs et j'ai parcouru ma carrière scientifique en-»,
touré de ses bienveillants et préc,ieux conseils.
(Bruyants applaudissements.)
M. Delaunay descend du bureau et remet
M. Mathieu la médaille qui a été frappée à son
intention.
Les applaudissements redoublent; c'est la pre-
mière fois que nous les entendons à l'Académie.
nI. Mathieu, très ému. Je suis très recon-,
naissant et profondément touché de tant de té-
moignages d'intérêt; j'ai cherché, dans toutes les
occasions où je me suis trouvé, à n'obéir qu'à
mon devoir et à ma conscience; j'ai agi, j'espère,
toujours religieusement et consciencieusement.
Cette médaille est pour moi une bien douce ré-
compense des labeurs de ma carrière je la re-
çois avec une bien vive gratitude des mains de
mon ami et savant confrère.
aI. delaunay. En remettant la seconde mé-
daille à M. Dupin, je n'ai qu'un souhait à faire,
c'est de voir nos honorables doyens prendre part
encore longtemps aux travaux de l'Académie.
m. LE baron DUPM. Laissez-moi remercie.
duire en poudre les affirmations de l'en-
Certes, répondit-il avec emphase, M.
Simpson ne peut dire que du bien de moi.
Il est assez connu pour qu'on le retrouve,
seulement cela demandera du temps.
Pourquoi?.
̃ Parce que, à l'heure qu'il est, il doit
être en route pour l'Amérique. C'est même
ce voyage qui m'a fait le quitter. je crains
la mer.
Les angoisses dont les griffes aiguës dé-
chiraient le cœur de Lecoq s'envolèrent. Il
respira.
Ah! fit le juge sur trois tons diffe-;
ren'ts, ah! ah!
Quand je dis qu'il est en route, reprit
vivement le prévenu, il se peut que je me
trompe, et qu'il ne soit pas encore parti. Ce
qui est sûr, c'est qu'il avait arrangé toutes
ses affaires pour s'embarquer quand nous
nous sommes séparés.
Sur quel navire devait-il prendre'pas-
Il ne me l'a pas dit,
Où vous êtes vous quittés? <
A Leipzig, en Saxe.
Quand ?
Vendredi dernier.
M. Segmuller haussa dédaigneusement les-,
épaules.
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Il s'est paséé;Tiiejrè-l'iadémïe des
'•Sciences une scèri'è foriioifchante.
D'ordinaire, les séances de la docte
compagnie sont orageuses
C'est la lutie entre M. Leverrier et ses
est l'antagonisme des divers systèmes
qui se produit.
C'est, dit-on, du choc de deux cailloux
que naît l'étincelle.
Voilà une vérité qu'aucun physicien
ne saurait combattre.
Mais à quoi bon se chamailler quand
on est membre de l'Institut, savant, éru-
» dit reconnu?
« ̃ E>u choc de deux diamants, aucune lu-
mière ne. se peut produire.
Avant de vous parler de la cérémonie
qui a eu lieu hier à l'Académie des Scien-
ces, voulez-vous me permettre quelques
mots sur son institution.
Par la loi du 3 brumaire, an iv, l'objet
et les attributions de l'Académie des
Sciences avaient été fixés dans les termes
f « Perfectionner les sciences et les arts
par des recherches non interrompues, par
la publication des découvertes, par la cor-
respondance avec les sociétés savants et
étrangères; suivre les travaux scientifi-
ques qui auraient pour objet l'utilité gé-
nérale et la gloire de la République. »
Et pour remplir ce programme qui, bien
que modifié souvent, n'en est pas moins
la mission principale de l'Académie des
sciences, on a appelé successivement dans
son sein tous les savants de chaque épo-
que.
Toutefois, la jeunesse est un obstacle
pour entrer, dans ce cénacle.
M. Berthelot, dans le Paris-Guide, nous
apprend que les jeunes académiciens sont
devenus rares..
Au dix-huitième siècle, dit-il, on ren-
contre une multitude d'académiciens nom-
jnés avant 1 âge de trente ans ainsi Buffon
Ifiit nommé à vingt-sept ans, Laplace à
vinbt-quatre ans, Clairaut même avant
vingt ans, Bernard de Jussieu à vingt-
Six, Antoine de Jussieu à vingt-quatre,
Lavoisier à vingt-cinq, Vicq d'Azyr à
vingt-six; le dernier des Cassini, dont la
'carrière presque centenaire s'est prolon-
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MONSIEUR LECOQ
1 PREMIÈRE PARTIE
Le Meurtre
XXIX
>fce directeur du dépôt, ce fonctionnaire à
.qui vingt ans de pratique des prisons et des
détenus donnait une autorité d'oracle, cet
observateur si difficile à surprendre, avait
écrit au.juge d'instruction
« Entourez-vous de précautions, avant d'in-
terroger le prévenu Mai. »
Pas du tout au lieu du dangereux malfai-
teur dont l'annonce seule avait fait pâlir le
greffier, on trouvait une manière de philo-
.8ophe pratique inoffensif et jovial, vaniteux
et beau parleur, un homme à boniments, un
pitre, enfin!
La déconvenue était étrange.
Voir le Petit Jottroal depuis le 27 mai.
Reproduction et traduction interdites.
gée jusqu'en 1845, était entré à l'Acadé-
mie à vingt-deux ans. L'introduction
d'hommes aussi jeunes donne à un corps
une énergie, une vitalité singulières, et
une initiative qui se pondère avec avan-
tage par l'âge et la gravité des vénérables
vétérans delà science.
'Dans la nouvelle Académie, de tels
choix sont devenus de plus en plus rares:
depuis 1850, on n'a pas nommé un seul
académicien qui eût moins de trente ans.
En 1815, l'Académie comptait huit mem-
bres au-dessous de quarante ans en 1835,
elle en comptait sept. Mais eu 1850, ce
chiffre était tombé à quatre. Enfin, dans
la présente année 1868, il n'y a point d'a-
cadémicien qui soit âgé de moins de qua-
rante-cinq ans.
Il fut un temps où l'on prenait les can-
didats fort jeunes; si cette tolérance n'a-
vait point existé, l'Académie des sciences
n'aurait pas pu célébrer la petite fête
d'hier, qui' sort tout à fait de ses graves
habitudes, et crée un précédent fort tou-
chant qui restera dans ses archives à l'é-
tat de tradition.
Je l'ai dit, on ne s'est pas'disputé hier
sur les comètes, sur la formation du dia-
mant, sur le coloris des épreuves photo-
graphiques.
On ne s'est même pas occupé de la dis-
tribution du prix Monthyon our la statis-
tique, la physiologie expérimentale, la
mécanique ou la chirurgie; pas même du
prix Lalande, pour l'astronomie, ou du
prix Bréant pour la solution des questions
touchant le choléra-morbus.
On ne s'est même pas occupé du legs
Trempnt, par lequel on vient en aide aux
travaux d'un jeune savant sans fortune,
ou de la fondation Birot de Molrogues,
prix quinquennal décerné alternativement
par l'Académie des sciences et par l'Aca-
démie des sciences morales et politiques
à l'ouvrage qui aura fait faire le plus de
progrès à l'Agriculture.
son, on avait d'autres soucis.
On célébrait une cinquantaine
Faire la cinquantaine, d'après les habi-
tudes villageoises, c'est célébrer le cin-
quantième anniversaire d'un mariage
heureux.
Cela suppose, chez les époux, une dou-
ceur et un charme à se rappeler le temps
déjà bien éloigné où ils ont contracté leur
union.
La cinquantaine conjugale est un reste
des mœurs patriarcales.
Et je ne connais pas de cérémonie plus
Cependant, loin de souffler à M. Segmul-
ler la tentation de renoncer au point de dé-
part de Lecoq, elle enfonça plus profondé-
ment dans son esprit le système du jeune
policier.
S'il restait silencieux, les coudes sur la
tablette de son bureau, les mains croisées sur
les yeux, c'est que dans cette position, rien
qu'en écartant les doigts, il pouvait, à loisir,
étudier son homme.
L'attitude de ce meurtrier était inconce-
vable.
Son « compliment » anglais terminé, il
restait au milieu du cabinet, la physionomie
étonnée, moitié content, moitié inquiet,
mais aussi à l'aise que s'il eût été sur les
tréteaux où il disait avoir passé la moitié de
sa vie.
Et, réunissant tout ce qu'il avait d'intelli-
gence et de pénétration, le juge s'efforçait de
saisir quelque chose, un indice, un tressail-
lement d'espoir, une contraction d'angoisse,
sur ce masque plus énigmatique eu sa mo-
bilité crue la face de bronze des sphynx.
Jusqu'alors, M. Segmuller avait le des-
sous.
Il est vrai qu'il n'avait point encore attaqué
sérieusement. Il n'avait utilisé aucune des
armes que lui avait forgées Lecoq.
Mais le dépit le gagnait, il fut aisé de le
voir, la façon brusque dont il releva la tête
touchante que cette réjouissance dans
laquelle les chansons, les violons, les gais
quadrilles, les toasts sans prétention, font
fête à deux époux qui ont passé un
demi-siècle. unis comme Philémon et
Baucis.
D'ailleurs, qu'est-ce que cinquante ans
.pour M. Flourens et même pour Béranger.
;'+-N'est-ce pas ce doux poëte qui a dit
pour consoler les cinquantenaires
Eh quoi c'est vous! ma jeunes amie,
Sœur de charité des amours!
Vous tirez mon âme endormie
Du cauchemar des mauvais jours.
Semant les roses de votre âge
Partout, comme fait le printemps.
Parfumez les rêves d'un sage.
Hélas! hélas! j'ai cinquante ans.
Cinquante ans d'âge, c'est déjà un bre-
vet de gravité. quand on est arrivé à
cinquante ans, on a effeuillé assez de mar-
guerites afin de savoir si l'on est encore
aimé, pour en couvrir le dernier sol à par-
courir. comme d'un blanc tapis.
Mais cinquante ans d'Académie des
Sciences, cela est certainement plus im-
posant encore.
Et c'est la cinquantaine de deux de
ses membres que l'Académie des sciences
célébrait dans la séance à laquelle je fais
allusion.
L'un des membres fêtés se nomme
Claude-Louis Mathieu.
Il est né à Mâcon, le 25 novembre 1783;
il est le fils d'un simple meunier.
Il suivit, en 1801, à Paris, les cours de
Lacroix et de Delambre; entra à l'Ecole
polytechnique en 1803, à l'Ecole des
ponts-et-chaussées en 1805, et fut nommé
peu après secrétaire du Bureau des Lon-
gitudes.
En 1808, il fut adjoint.à M. Biot, pour
les expériences du pendule à secondes sur
la Méditerranée.
A son retour en France, il fut attaché
comme astronome à l'Observatoire.
Il a été nommé membre de l'Académie
des sciences en 1817, en remplacement de
Meissier.
Il y a de cela cinquante et un ans.
Le second académicien dont on a célé-
bré la cinquantaine se nomme M. le baron
François-rierre-Charles Dupin.
Il est né à Varzy (Nièvre), le 6 octobre
1784.
Il a été admis le premier à l'Ecole poly-
technique, en 1801, et en sortit le premier
en 1803.
M. Charles Dupin, dont tout le monde
connaît les, ouvrages de Statistique Uni-
au bout d'un moment.
Je le reconnais, dit-il au prévenu, vous
parlez couramment les trois grandes langues
de l'Europe. C'est un rare talent.
Le meurtrier s'inclina, un sourire orgueil-
leux aux lèvres.
Mais cela n'établit pas votre identité,
continua le juge. Avez-vous des répondants
à Paris?. Pouvez-vous indiquer une per-
sonne honorable qui garantisse votre indivi-
dualité ?.
Eh monsieur, il y a seize ans que
j'ai quitté la France et que je vis sur les
grands chemins et dans les foires.
N'insistez pas, la prévention ne saurait
se contenter de ces raisons. Il serait trop aisé
d'échapper aux conséquences de ses antécé-
dents. Parlez-moi de votre dernier patron,
M. Simpson. Quel est ce personnage?
M. Simpson est un homme riche, ré-
pondit le prévenu d'un ton froissé, riche à
plus de deux cent mille francs, et honnête.
En Allemagne, il travaille avec un théâtre
de marionnettes; en'Angleterre, il fait voir
des phénomènes, selon le goût des pays.
Eiibien! ce millionnaire peut té-
moigner en votre faveur; il doit être facile
de le retrouver.
En ce moment, Lecoq n'avait plus un brin
de fil sec sur lui; il l'a avoué depuis. En dix
paroles, le prévenu allait confirmer ou ré-
verselle, est entré à l'Académie des Scien-
ces en 1818, en remplacement de Perler,
Ainsi M. Mathieu fut reçu de l'Acadé-
mie des Sciences à trente-quatre ans,
Et M. Charles Dupin n'était pas plus
vieux lorsqu'il fut appelé à siéger dans
l'illustre compagnie.
J'applaudis des deux mains quand
cadémie des sciences appelle dans son
sein M. Nélaton.
Mais ce n'est pas un jeune homme, cg
chirurgien célèbre.
Il a dépassé depuis plus d'un jourles cin-
quante ans qne chantait Béranger..
Puisse-t-il vivre longtemps, ce savant qui
fait vivre les autres.
Les centenaires sont rares, mêmes parv
mi les médecins.
Et je voudrais voir souvent se renovt-'
veler les fêtes de cinquantaine. senf*
blables à la solennité d'hier.
Rien n'est saisissant comme un compta
rendu sténographié.
Mon savant confrère, M. de Parville a
pris à la volée le passage concernant cette
charmante innovation académique. Je le
copie dans le Constitutionnel de ce matin
M. LE PRÉSIDENT DELAUNAY. NOUS avons la;
bonheur de posséder parmi nous deux confrères
qui sont' membres de cette Académie depuis cirw
quante ans M. Mathieu, nommé en 1817, et M.
le baron Dupin, nommé en 1818. Nous avons
tous désiré célébrer leur cinquantaine. Une sous-
cription.a été ouverte d'un commun accord pour
leur offrir -une médaille commémorative. L'Empe-i
reur à voulu s'associer à la souscription de l'Aca-
démie je suis heureux d'avoir été charge parrnea
collègues de remettre la médaille à MM. Mathieu
et Dupin. On comprendra mon émotjton et mon)
bonheur quand j'aurai dit que je dois à M. Ma*
thieu ce que je suis; il m'a guidé, au sortir dcs
bancs et j'ai parcouru ma carrière scientifique en-»,
touré de ses bienveillants et préc,ieux conseils.
(Bruyants applaudissements.)
M. Delaunay descend du bureau et remet
M. Mathieu la médaille qui a été frappée à son
intention.
Les applaudissements redoublent; c'est la pre-
mière fois que nous les entendons à l'Académie.
nI. Mathieu, très ému. Je suis très recon-,
naissant et profondément touché de tant de té-
moignages d'intérêt; j'ai cherché, dans toutes les
occasions où je me suis trouvé, à n'obéir qu'à
mon devoir et à ma conscience; j'ai agi, j'espère,
toujours religieusement et consciencieusement.
Cette médaille est pour moi une bien douce ré-
compense des labeurs de ma carrière je la re-
çois avec une bien vive gratitude des mains de
mon ami et savant confrère.
aI. delaunay. En remettant la seconde mé-
daille à M. Dupin, je n'ai qu'un souhait à faire,
c'est de voir nos honorables doyens prendre part
encore longtemps aux travaux de l'Académie.
m. LE baron DUPM. Laissez-moi remercie.
duire en poudre les affirmations de l'en-
Certes, répondit-il avec emphase, M.
Simpson ne peut dire que du bien de moi.
Il est assez connu pour qu'on le retrouve,
seulement cela demandera du temps.
Pourquoi?.
̃ Parce que, à l'heure qu'il est, il doit
être en route pour l'Amérique. C'est même
ce voyage qui m'a fait le quitter. je crains
la mer.
Les angoisses dont les griffes aiguës dé-
chiraient le cœur de Lecoq s'envolèrent. Il
respira.
Ah! fit le juge sur trois tons diffe-;
ren'ts, ah! ah!
Quand je dis qu'il est en route, reprit
vivement le prévenu, il se peut que je me
trompe, et qu'il ne soit pas encore parti. Ce
qui est sûr, c'est qu'il avait arrangé toutes
ses affaires pour s'embarquer quand nous
nous sommes séparés.
Sur quel navire devait-il prendre'pas-
Il ne me l'a pas dit,
Où vous êtes vous quittés? <
A Leipzig, en Saxe.
Quand ?
Vendredi dernier.
M. Segmuller haussa dédaigneusement les-,
épaules.
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