Titre : L'Européen : hebdomadaire économique, artistique et littéraire
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1933-08-25
Contributeur : Turot, Flory Henri. Directeur de publication
Contributeur : Lamandé, André (1886-1933). Éditeur scientifique
Contributeur : Fougère, Étienne (1871-1944). Éditeur scientifique
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32771325q
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 2665 Nombre total de vues : 2665
Description : 25 août 1933 25 août 1933
Description : 1933/08/25 (A5,N224). 1933/08/25 (A5,N224).
Description : Collection numérique : Arts de la marionnette Collection numérique : Arts de la marionnette
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k58245117
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JO-20616
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/12/2010
Ve Année. — N° 224.
LE NUMÉRO ♦ 50 CENTIMES
Vendredi 25 Août 1933,
REDACTION
ADMINISTRATION
PUBLICITE
£T SERVICES ECONOMIQUES
23. AVENUE DE MESSINE
PARIS (8e)
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Prière d'adresseï !a correspondance au
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Chèques costaux Pari» t337-7S
«rrn
Hebdomadaire économique,
Directeur-Fondateur: F. H.TU ROT
artistique et littéraire
Directeur Politique:ÉTÏENNE FOUGÈRE
SOMMAI! IÏ&E
Page 2: Hitler annexera-t-il l'Autri-
che? par A.-J. Dufour; La situa-
tion en Espagne, par Raymond
Henry.
Page 3: Qu'en dira-t-on? par Fran-
cis de Miomandre; Du côté de Ber-
lin, par Pierre Descaves.
Page 4: L'Europe intellectuelle, par
Pierre Audiat et André Delacour.
Page 5: L'Etablissement Thermal de
Vichy, par L. B.
Page 6: L'Economie et la Finance,
par F.-F. Legueu, Pierre Bénaërts
et Lucy Baur.
LÀ POLITIQUE
AMERICAINE
-par Louis VIGOUROUX
Si quelqu'un voulait écrire l'histoire
sincère de la nation américaine, à la
manière de M. Seignobos, il attacherait
.une importance considérable au peuple-
ment rapide des Etats-Unis. Des horri-
bles aventureux ont quitté les premiers
centres de colonisation fondés au nord-
est pour s'enfoncer toujours plus loin,
vers l'ouest et vers le sud, franchissant
les montagnes Apalachiennes, malgré
les-autorités, comme les . colons de la
Nouvelle-Galles du Sud ont franchi les:
Montagnes Bleues pour aller fonder
une autre colonie autour de Melbourne.
A la fin de la guerre de l'Indépendance,
les vieilles colonies se disputaient déjà
tout le territoire situé à l'est du Missi.s-
sipi et la rivalité entre le Nord et le
Sud pour fonder à l'ouest dé nouveaux
Etats précipita la guerre civile.
Les pionniers menaient une vie très
'dure, luttant contre les forces de la na-
ture et les Peaux-Rouges;- beaucoup
échouaient ; les. plus aptes survivaient ;
leurs conditions d'existence étaient les
mêmes ; ils avaient tous la même ori-
gine, un sentiment très vif d'indépen-
dance, de confiance en eux-mêmes et
d'égalité. Les Irlandais, les Allemands
et les Scandinaveg^ui les ont rejoints,
depuis une centai^d'années, ont adop-
té leurs moeurs et leurs habitudes.
Pour eux, tout homme, en vaut un autre ;
quand il faut agir en'-commun, la moi-
tié moins un doit absolument s'incliner
'devant la moitié plus\un et devant le
'chef élu pour accomplir une besogne
'déterminée ou exercer "certaines fonc-
tions pendant une période donnée. Ces
traits se retrouvent chez les colons de
l'Australie, de la Nouvelle-Zélande. et
de l'Ouest Canadien.
Il y a un siècle, quand le mouvement
'd'immigration européenne a commencé,
la population rurale représentait 75 pour
cent de la population totale des Etats-
Unis. Encore en 1920, plus de- la moi-
tié des Américains vivaient dans des
localités de moins de 2.500 habitants,
et le dernier recensement (1925) accu-
sait 9.456.000 personnes - employées
dans l'agriculture contre S.74S.000 dans
toutes les industries manufacturières.
Si l'on tient compte de l'importance
des industries alimentées par l'élevage,
le blé, la laine, le coton, le cuir, etc.,
on voit la prépondérance des intérêts
agricoles sur tous les autres. Chacun
, des 49 Etats élit 2 sénateurs, quelle que
soit sa population, et le Sénat a beau-
coup plus d'autorité que la Chambre
des Représentants. Tout cela assure
aux éléments ruraux, quand ils sont
unis, une influence écrasante. Au point
de vue politique, la haute banque, les
grands trusts et .la Fédération Améri-
caine du Travail ne pèsent pas lourd
'devant l5American Farm Bureau, établi
à Washington.
Dans les pa3-s neufs, la terre ne vaut
rien tant qu'elle n'a pas été mise en
valeur par le travail, appuyé sur les ca-
pitaux. Les agriculteurs ont besoin de
véhicules, d'outils, d'ustensiles et de
provisions qu'ils achètent à crédit dans
les centrés habités. Ils veulent de la
monnaie abondante et à bon marché,
tandis que le commerce et l'industrie
réclament une monnaie stable. Cette
opposition s'est manifestée pendant les
Crises depuis la révolte agraire suscitée
par Daniel Shays, en 17S6, dans le
Massachussetts, jusqu'à la violente
campagne menée par le président Jack-
son en 1S2S contre le pouvoir de l'ar-
gent et aux élections de 1S96, lorsque
Bryan faillit rétablir, la frappe libre de
l'argent-métal, « pour empêcher l'hu-
manité d'être crucifiée sur. une croix
d'or »,
*
* *
Aux dernières élections, les masses
rurales de i'Ouest ont fait balle avec
celles du sud. Leur pression sur les pou-
voirs publics demeurera irrésistible au
moins jusqu'à la fin de 19^4, quand la
1 Chambre des Représentants aura ter-
miné son mandat.
C'est pour cela que le premier soin
du président Roosevelt a été de faire
voter une loi de soulagement à l'agri-
culture (Farm Relief Act) dont il est
bon de rappeler le préambule puisqu'il
5' a encore, des écrivains qui se deman-
dent quel est le véritable objectif pour-
suivi par le président des Etats-Unis.
Ce préambule dit qu'il faut remédier
au déséquilibre entre les prix des pro-
duits - agricoles et ceux des autres pro-
duits et donner aux agriculteurs la pos-
sibilité d'acheter les-objets dont ils.ont
besoin sur la même base que d'août
3909 à juillet 1914, sans laisser les prix
de détail dépasser le niveau qui entrave-
rait les exportations.
Car il ne faut, pas oublier qu'avant
1?. crise, les ' Etats-Unis exportaient en-
viron la moitié de leurs produits agri-
coles, les plus importants. Mv Roosevelt
sait très bien que. la reprise des expor-
tations (dont la valeur dépassait en
192S-29 cinq milliards de dollars) né-
cessite le ' règlement des dettes, de
guerre et la coopération internationale
(ne fût-ce que pour obtenir une certaine
stabilité .entre les principales mon-
naies) mais il. s'est heurté jusqu'ici à
1E même incompréhension que M Hoo-
ver. Les observations présentées ré-
cemment, par son ministre- de l'Agri-
culture à une délégation du Mississipi
montrent qu'il,ne perd pas de vue cette
importante. question, la plus difficile
peut-être qu'il ait à résoudre.
**
En attendant, il se trouve aux prises
avec le redoutable' problème du chô-
mage, qui déborde les efforts de l'in-'lia-
tive privée et des municipalités. Le re-
boisement et les travaux .publies ne
peuvent occuper directement ou indirec-
tement qu'un faible pourcentage des
millions de sans-travail et le sentiment
américain est hostile au système anglais
d'allocations régulières aux chômeurs. <
C'est pourquoi M. Roosevelt a fait voter
la loi pour le redressement de .5'indus- '
trie (National Industrial Recovery
Act) en s'inspirant des idées émises,
en 1931, devant .un congrès industriel,
par M. Gérard Svope, président de la \
General. Electric Co , qui se préoccu- <
pait d'enrayer le chômage et d'ajuster 1
la production industrielle à la ..^-som-
mation. ' !
Les expressions outrancières de cer- '
tains journaux américains ont dénaturé
en Europe le | sens exact des pouvoirs
conférés pour' deux ■ ans au président
Roosevelt par un Congrès qui puif très
.oien défaire en janvier 1934 ce qu'il
a vot4"e.n uni K.'33.
j ""*
I ** r
Les Américains, et particulièrement
les ruraux, 'aiment les hommes qui ne
mâchent pasj les mots, qui ne craignent
pas les responsabilités et qui n'aésitent
pas ^à imposer leurs décisions. Cepen-
dant, M.- Roosevelt use le moins possi-
ble- de ses pouvoirs discrétionnaires et
quand la persuasion n'a pas suffi, il a
recours à des procédés qui nous choque-
raient mais qui sont d'un usage cou-
rant aux Etats-Unis.
Par exemple, il. autorise les indus-
triels et les commerçants qui se sont
concertés, conformément à la loi, à ven-
dre leurs marchandises, sous le couvert
de « l'aigle bleu », ce qui est une ma-
nière de provoquer le boycottage-des
autres, à l'instar de l'étiquette bleue
apposée' depuis longtemps sur les boî-
tes de cigares fabriquées exclusivement
par des ouvriers S3«ndiqués. - - . •
Il faut tenir, compte de ces cousidé- (
rations brièvement-esquissées..si: l'on !
veut interpréter sainement ce- qui se
passe aux Etats-Unis.
L. VIGOUROUX,
' •- ancien député.
NOTRE POINT DE VUE
LA QUESTION DANUBIENNE
La question danubienne risque, hélas!
de ressembler à la quadrature du cercle.
Y a-t-il recherche d'accord entre les
puissances directement intéressées? Des
entraves mystérieuses la paralysent, té-
moin le silence qui s'est fait sur les Con-
férences de Varsovie, Bucarest, Sofia, où
les pays danubiens avaient jeté les bases
d'une Convention économique et doua-
nière. .
La S. D. N. suscite-t-élle une initiative
où grandes puissances et pays danubiens
sont invités à trouver une formule d'en-
tente? Rien de pratique n'en sort par le
fait de l'indifférence ou de l'opposition
de tel ou tel groupe de nations : témoin
la Conférence de Stresa. .
'Aujourd'hui, une nouvelle difficulté
s'ajoute à celles des problèmes danu-
biens : la menace qui pèse sur l'indé-
pendance de l'Autriche. Avec une argu-
mentation souvent logique et avec des
procédés' toujours brutaux, l'Allemagne
veut la soudure des; pays de langue ger-
manique. Cela pourrait nous mener loin
et détruire bien vite toutes les précautions
territoriales du Traité de 1919. D'où pro-
testation d'ailleurs décousue des puis-
sances qui ont forgé les Traités et bien-
tôt nouvel imbroglio venant de la ten-
tative d'accord partiel de l'Autriche, de
la Hongrie et de l'Italie, accord auquel
seraient invitées à se joindre vraisembla-
blement la Grande-Bretagne et la France,
en vertu,du Pacte à Quatre.
Nous aimerions voir la France prendre,
à soii tour, quelques initiatives. Protec-
trice naturelle des puissances qui consti-
tuent la Petite-Entente, elle doit veiller
à la sauvegardé de leurs intérêts. Inclinée
vers une entente effective avec l'Italie,
elle doit travailler à- la concordance de
sa politique avec celle de Rome.'Rien
ne serait donc plus normal qu'elle entrât
dans le jeu diplomatique, étant donné
surtout son ardent désir de conciliation
et de paix-
Ici, nous avons toujours préconisé
Laide à donner aux puissances de l'Eu-
rope Centrale, lesquelles étant spécifi-
quement agricoles, souffrent, de l'impos-
sibilité d'écouler leurs produits. A main-
tes reprises, la diplomatie française a
préparé des interventions analogues à
celle que vient d'accomplir l'Italie dans
son accord récent avec la Hongrie : elle
a dû toujours reculer du fait de l'oppo-
sition venue des milieux agricoles fran-
çais. Pourtant l'avenir est dans cette voie.
La France verra son influence diminuer
dans l'Europe Centrale, malgré les sym-
pathies politiques et intellectuelles qui
vont vers elle, si elle garde une attitude
platonique dans la question d'écoule-
ment des produits agricoles danubiens.
Si modeste que soit le courant des expor-
tations de la France avec les pays danu-
biens, il porte exclusivement ' sur des
produits industriels. A force de fermer
tous les marchés extérieurs, les industries
françaises iront toutes à là ruine..Qu'ad-
viendra-t-il alors de la production agri-
cole et qui la consommera? Nous ne ces-
serons donc pas de rappeler que toutes
les productions sont solidaires les unes
des autres dans l'harmonieux pays de
France.
En tout cas, les problèmes danubiens
ne peuvent pas se régler sans l'interven-
tion active dé la France et celle-ci doit
être capable de donner pour conserver
ou pour recevoir.
Politique et intérêts économiques fran-
çais peuvent et doivent se concilier sur
les bords du Danube.
LA TOUR DE BABEL
Raison pure
De .M. Edouard Bénès, un de ses récents
biographes écrit qu'il bannit en général
l'émotion et que la raison froide l'emporte
toujours et partout.
Grand travailleur, grand lecteur, le mi-
nistre des Affaires étrangères de la Tchéco-
slovaquie est surtout un penseur.
— Certains chefs-d'oeuvre de la littéra-
ture m'émouvaient profondément autrefois,
a-t-il dit, ils ne m'intéressent plus qu'au
point de vue intellectuel.
Un de nos spirituels diplomates n'expri-
mait-il pas cette opinion concordante :
— Pour Bénès, la raison d'Etat n'existe
pas; seule compte la raison pure.
Pièces à l'appui
L'Allemand Habitch, ancien inspecteur
du parti national socialiste autrichien, et qui
de Munich mène une vive campagne radio-
phonique contre le gouvernement de Vien-
ne, peut se vanter d'être actuellement en
Europe l'homme le plus écouté. .
Sait-on que' le gouvernement de Vienne
a fait enregistrer sur disques, au fur et à
mesure qu ils étaient diffusés, les discours
agressifs de M. Habitch ? Précaution utile,
au cas où le conflit serait porté devant la
Société des Nations, dont les membres
pourraient éventuellement se prononcer
avec pièces à l'appui !
Milliardaire chinois
Le maréchal Tchang Sen Liang, qui
vient de faire un court séjour en France,
continue ses visites européennes; mais on ne
sait pas encore où il se fixera définitivement.
Il avait d'abord choisi l'Italie, mais il pa-
raît ne pas avoir donné suite à son projet.
' L'ex-maréchal est un des hommes les
plus riches du monde. On prétend que sur
ce terrain," il,est a l'égal » des milliardaires
américains. Mais il est resté'très simple
d'allure et de goûts:
— L'apprentissage de la fortune est le
plus'dure de tous, confiait-il récemment à
un de nos confrères anglais..
Sur l'eau
Pour activer le règlement amiable du
conflit de la batellerie, M. Joseph Paga-
non, ministre des Travaux publics, a inter-
rompu la cure qu'il effectuait dans une ville
d'eaux et a rallié Paris.
Avec son esprit réaliste, il a pris rapi-
dement les mesures qui s'imposaient.
— Décidément, constatait-il avec le sou-
rire, mes vacances sont vouées à l'eau.
La crémaillère
M. Jessie L. Strauss, le distingué am-
bassadeur des Etats-Unis à Paris, va pren-
dre incessamment possession du nouvel hô-
tel de l'ambassade, qui s'élève place de
la Concorde à côté de l'hôtel Grillon.
On sait qu'il s'agit, au point de vue ar-
chitectural, d'une réalisation des plus heu-
reuses, puisque le bâtiment est une réplique
de l'hôtel Saint-Florentin, oeuvre de Chal-
grin, qui, jadis, occupait, l'emplacement.
On ne croit pas, en raison de la crise, que
l'ambassadeur donnera une fête pour pen-
dre « la crémaillère ». ,
M. et Mme Strauss recevront seulement
quelques amis pour leur faire effectuer « le
tour du propriétaire ».
Affaires volantes
Après le retour triomphal des escadrilles
italiennes, les équipages ont reçu un congé
de deux mois. Mais le maréchal Balbo s'est
seulement octroyé personnellement deux
journées de repos. Il a repris son service
au ministère de l'Air pour expédier les af-
faires — non pas « courantes » —■ mais
« volantes ».
Ce prodigieux animateur fait quotidien- i
nement en effet des «raids.de travail » qui
laissent sur les dents ses collaborateurs. Il
reste. à - son bureau, couramment de huit à
dix heures par jour, examinant tous les dos-
siers et toutes les requêtes. Mais il n'aime
pas les audiences, qui sont réduites au strict
minimum.
— Je bavarderai, avoue-t-il souvent,
quand je serai bien .vieux !
L'ALLEMAGNE
PAYSANNE
par René LAyjgET
Berlin, 21-8-33.
Dans son dernier numéro, une de -nos
meilleures revues publiait uhe.^série de do-
cuments ' sur,de -.national-socialisme. Ces
documents, '-fort- intéressants,? s'efforcent
de dégager- le 'sens.'profond; du : mouve-
ment, hitlérien fet d'en''souligner'.'certains
aspects,, peut-être un peu négligés, no-
tamment le côté paysan, anti-citadin,
anri-ïndustriel de la révolution alle-
mande'.''CeÇaspect est-il primitif, ou de
date-relativement récente?- Ceux qui ont
collectionné, ces -documents nous rappel-
lent :que.-le premier.programme.du natio-:
nal-sociàiisme n'accorde pas une impor-
tance'particulière a" i'agriculture : c'est
M. Darré,'aujourd'hui ministre, qui a
préciséTa doctrine nationale-socialiste 'du
retour à "la terre dans deux ouvrages pa-
rus en 1929 et 1930.' Ingénieur agronome, 1
donc ;connaissant-,ài fond les'...qùestions
agricoles,. homme , jeune ;et 'actif, - il' .se
mit à la tête de la'propagande hitlérienne
dans les campagnes. -Effectivement, c'est
leur population qui a fourni au parti de
Hitler ses gros, bataillons, cela à une
date récente. Jusqu'en 1930 il. puisait
surtout.ses effectifs dans la petite bour-
geoisie, artisans, employés, petits com-
merçants et fonctionnaires. Les progrès
énormes qu'il réalisa aux élections de
1930.et 1932 dans les.régions du nord
et dé l'est, presque exclusivement agri-
coles, montrent que le parti national-so-
cialiste est devenu en grande partie, si-
non en majorité, un parti paysan.
On ..pourrait, remarquer que les théo-
ries de M. Darré sur l'attachement au
so 1, sur l'importance du paysan comme
cellule élémentaire de la nation, se trouve
déjà' esquissée dans l'ouvrage de -Hitler,
Mein Kamff, qui date de. 1924. Mais,
s'il n'en était pas ainsi, on pourrait com-
prendre .que le national-socialisme ait
adapte sa doctrine et son programme
aux exigences de la classe qui devenait
son principal soutien. Cette adaptation
serait simplement une preuve de la sou-
plesse de ses dirigeants et de leur oppor- .
tunisme. .
La doctrine de M. Darré, séduisante
à première vue, est un singulier mélange
de truismes et de contre-vérités. Lors-
qu'il déclare : le paysan constitue la ra-
cine et la souche du peuple allemand, la
désertion des campagnes a été néfaste
à la vie de la nation, l'industrialisation
à outrance constitue un péril des plus
graves, il formule des vérités universel-
lement admises. Il n'y a aucun mérite à
les répéter après beaucoup d'autres :.l'in-
téressant serait de trouver un remède à
des maux que.tout le monde a constatés,
sans pouvoir jusqu'à présent les guérir.
Pour soigner une maladie, il n'est pas
mauvais d'en connaître la cause. Or,
quelle est la cause de l'abandon des cam-
pagnes, de l'industrialisation, d'après
M. Darré? Pendant un siècle de libéra-
lisme, dit-il, nous avons déshabitué notre
os peuple de la terre et l'avons massé dans
. des villes. Nous avons fait le contraire
y de ce qu'il fallait faire. Il serait diffi-
nt cile d'imaginer une explication plus
,eJ inexacte. Qu'est-ce que le libéralisme a
s à faire là-dedans? M. Darré affecte d'ou-
blier que, dans la période où l'Allemagne
s'est industrialisée — la seconde moitié
e' ,du XIXe siècle — elle ne vivait nullement
^ scus un régime libéral : elle était gou-
t veinée par Bismarck et par Guillaume IL
,i Les seules causes de l'industrialisation
' . sont les progrès de la technique, l'abon-
l dance du charbon et du fer, et surtout
.t la croissance énorme de la population al-
lemande. Avant 1870, cette croissance
1 . était déjà sensible : elle obligea des mil-
' lions d'Allemands à s'expatrier, la terre
: ^allemande ne pouvant plus les nourrir.
' C'est de cette époque (le milieu du
< XIXe siècle) que date la grande,émigra-
:„' tion aux Etats-Unis. Entre lès deux
3t guerres. 1870 et. 1914, se place la grande
1 augmentation de la population du Reich:
elle passe de 40 à 68 millions Id'habi-
•t tants. Cependant l'émigration ::..%sse à
r_ peu près comjolètement : c'est que les
. millions de nouveaux arrivants sont ab-
sorbes par une industrie qui se déve-
i_ loppe à pas de'géant. L'industrialisation
rï de l'Allemagne — on l'oublie trop sou-
• vent — est fonction de son mouvement
démographique. Elle n'a été possible
que par l'appoint de ces 28 millions
d'hommes qui se sont ajoutés à sa po-
pulation en 44 ans. Sans l'industrie, ces
28 millions n'auraient pas pu vivre ils
auraient dû s'exiler, comme ceux des
générations précédentes. Il suffit de. rap-
peler des faits, connus de tout le monde,
pour voir que le point de départ de M.-
' Darré est une erreur flagrante. Il attri-
t bue. à la politique l'abandon des cam-
= ypagnes, pour: pouvoir prouver que la po-
^ litique y remédiera. L'erreur^sur.. la. cause,
n'ehtfàïhe-t-elle pas une erreur sur l'a''
conclusion?
D'abord, il n'y a pas eu, à propre-
ment parler, désertion des campagnes :
; le phénomène que l'on constate est plu-
: tôt une diminution relative de la popu-
- lation rurale par rapport à celle des
- villes, celles-ci se développant grâce à
L l'industrie. Le progrès des méthodes de
: culture, spécialement l'emploi des ma-
[ chines, permettait, du reste, de travail-
i 1er la terre avec un moins grand nombre
de bras. Ce qui prouve que la terre alle-
mande n'a jamais été vraiment désertée,
c'est que sa production s'est toujours
. accrue. Dans certaines périodes, pendant
la guerre et dans les deux dernières an-
nées, elle est arrivée à nourrir presque
entièrement l'énorme population du
Reich. Dans ces conditions, on ne peut
que poser à M. Darré les questions sui-
vantes :'si, avec la main-d'oeuvre ac-
tuelle, la terre allemande produit déjà la
nourriture de ses 65 millions d'habitants,
pourquoi, voulez-vous augmenter cette
main-d'oeuvre? Vous prétendez désindus-
1 trialiser l'Allemagne, réaliser une évo-
! lu tion en sens inverse de celle qui s'est
: produite- depuis un demi-siècle, ramener
! une partie de la population de la ville
' à la campagne : où mettrez-vous ces nou-
; veaux paysans, comment les occuperez-
1 vous? L'Allemagne a-t-elle en réserve des
terres pour 25 millions d'hommes, re-
présentant au moins 5 millions de fa-
milles ?
Les journaux nationaux-socialistes
nous apportent eux-mêmes la réponse à
ces questions. Ils proclamaient ces jours-
ci sur un ton triomphal que, d'après les
plans du gouvernement, la colonisation,
intérieure (Siedlung) s'étendrait l'an
prochain à 10.000 familles : ) 0.000 fer-
mes seront créées, et si cette moyenne
se maintien pendant dix ans, on aura
installé 100.000 familles paysannes, re-
présentant 500.000 personnes, si cha-
cune d'elle a une moyenne de trois en-
fants.
Le résultat ne serait pas négligeable.'
1 Mais dans l'économie générale de la na-
tion, dans la répartition de sa popula-'
| tion entre la. ville et la campagne, .son
i influence serait à peu près nulle. Ou'est-
1 ce qu'un demi-million sur 65 millions
I d'hommes? Encore ne.serait-il pas pris
l exclusivement sur les citadins : une
grande.partie des nouveaux paysans que
l'on installera seront des ouvriers agri-
coles.
Les théories de M. Darré, malgré la
part de vérité générale, et même banale
qu'elles contiennent, nous apparaissent"
comme un vaste bluff; les plans qui s'en
inspirent comme peu susceptibles de ré-
nover la vie allemande. Quoiqu'il en dise,
l'Allemagne est un grand pays indus-
triel et le restera (à moins que sa popu-
lation ne diminue, mais cela prendrait
plusieurs dizaines d'années). C'est là le
fait qui domine sa structure économique
et sociale. Si le national-socialisme ne
veut pas en tenir compte, il échouera. Il
ne lui servira de rien de proclamer la
primauté et la suprématie théoriques de
l'Allemagne paysanne.
RENE LAURET.
LE CHANCELIER L-OLL-t'uSS
qui viennent d'avoir, à Riccione,
d'importants entretiens.
LE NUMÉRO ♦ 50 CENTIMES
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AMERICAINE
-par Louis VIGOUROUX
Si quelqu'un voulait écrire l'histoire
sincère de la nation américaine, à la
manière de M. Seignobos, il attacherait
.une importance considérable au peuple-
ment rapide des Etats-Unis. Des horri-
bles aventureux ont quitté les premiers
centres de colonisation fondés au nord-
est pour s'enfoncer toujours plus loin,
vers l'ouest et vers le sud, franchissant
les montagnes Apalachiennes, malgré
les-autorités, comme les . colons de la
Nouvelle-Galles du Sud ont franchi les:
Montagnes Bleues pour aller fonder
une autre colonie autour de Melbourne.
A la fin de la guerre de l'Indépendance,
les vieilles colonies se disputaient déjà
tout le territoire situé à l'est du Missi.s-
sipi et la rivalité entre le Nord et le
Sud pour fonder à l'ouest dé nouveaux
Etats précipita la guerre civile.
Les pionniers menaient une vie très
'dure, luttant contre les forces de la na-
ture et les Peaux-Rouges;- beaucoup
échouaient ; les. plus aptes survivaient ;
leurs conditions d'existence étaient les
mêmes ; ils avaient tous la même ori-
gine, un sentiment très vif d'indépen-
dance, de confiance en eux-mêmes et
d'égalité. Les Irlandais, les Allemands
et les Scandinaveg^ui les ont rejoints,
depuis une centai^d'années, ont adop-
té leurs moeurs et leurs habitudes.
Pour eux, tout homme, en vaut un autre ;
quand il faut agir en'-commun, la moi-
tié moins un doit absolument s'incliner
'devant la moitié plus\un et devant le
'chef élu pour accomplir une besogne
'déterminée ou exercer "certaines fonc-
tions pendant une période donnée. Ces
traits se retrouvent chez les colons de
l'Australie, de la Nouvelle-Zélande. et
de l'Ouest Canadien.
Il y a un siècle, quand le mouvement
'd'immigration européenne a commencé,
la population rurale représentait 75 pour
cent de la population totale des Etats-
Unis. Encore en 1920, plus de- la moi-
tié des Américains vivaient dans des
localités de moins de 2.500 habitants,
et le dernier recensement (1925) accu-
sait 9.456.000 personnes - employées
dans l'agriculture contre S.74S.000 dans
toutes les industries manufacturières.
Si l'on tient compte de l'importance
des industries alimentées par l'élevage,
le blé, la laine, le coton, le cuir, etc.,
on voit la prépondérance des intérêts
agricoles sur tous les autres. Chacun
, des 49 Etats élit 2 sénateurs, quelle que
soit sa population, et le Sénat a beau-
coup plus d'autorité que la Chambre
des Représentants. Tout cela assure
aux éléments ruraux, quand ils sont
unis, une influence écrasante. Au point
de vue politique, la haute banque, les
grands trusts et .la Fédération Améri-
caine du Travail ne pèsent pas lourd
'devant l5American Farm Bureau, établi
à Washington.
Dans les pa3-s neufs, la terre ne vaut
rien tant qu'elle n'a pas été mise en
valeur par le travail, appuyé sur les ca-
pitaux. Les agriculteurs ont besoin de
véhicules, d'outils, d'ustensiles et de
provisions qu'ils achètent à crédit dans
les centrés habités. Ils veulent de la
monnaie abondante et à bon marché,
tandis que le commerce et l'industrie
réclament une monnaie stable. Cette
opposition s'est manifestée pendant les
Crises depuis la révolte agraire suscitée
par Daniel Shays, en 17S6, dans le
Massachussetts, jusqu'à la violente
campagne menée par le président Jack-
son en 1S2S contre le pouvoir de l'ar-
gent et aux élections de 1S96, lorsque
Bryan faillit rétablir, la frappe libre de
l'argent-métal, « pour empêcher l'hu-
manité d'être crucifiée sur. une croix
d'or »,
*
* *
Aux dernières élections, les masses
rurales de i'Ouest ont fait balle avec
celles du sud. Leur pression sur les pou-
voirs publics demeurera irrésistible au
moins jusqu'à la fin de 19^4, quand la
1 Chambre des Représentants aura ter-
miné son mandat.
C'est pour cela que le premier soin
du président Roosevelt a été de faire
voter une loi de soulagement à l'agri-
culture (Farm Relief Act) dont il est
bon de rappeler le préambule puisqu'il
5' a encore, des écrivains qui se deman-
dent quel est le véritable objectif pour-
suivi par le président des Etats-Unis.
Ce préambule dit qu'il faut remédier
au déséquilibre entre les prix des pro-
duits - agricoles et ceux des autres pro-
duits et donner aux agriculteurs la pos-
sibilité d'acheter les-objets dont ils.ont
besoin sur la même base que d'août
3909 à juillet 1914, sans laisser les prix
de détail dépasser le niveau qui entrave-
rait les exportations.
Car il ne faut, pas oublier qu'avant
1?. crise, les ' Etats-Unis exportaient en-
viron la moitié de leurs produits agri-
coles, les plus importants. Mv Roosevelt
sait très bien que. la reprise des expor-
tations (dont la valeur dépassait en
192S-29 cinq milliards de dollars) né-
cessite le ' règlement des dettes, de
guerre et la coopération internationale
(ne fût-ce que pour obtenir une certaine
stabilité .entre les principales mon-
naies) mais il. s'est heurté jusqu'ici à
1E même incompréhension que M Hoo-
ver. Les observations présentées ré-
cemment, par son ministre- de l'Agri-
culture à une délégation du Mississipi
montrent qu'il,ne perd pas de vue cette
importante. question, la plus difficile
peut-être qu'il ait à résoudre.
**
En attendant, il se trouve aux prises
avec le redoutable' problème du chô-
mage, qui déborde les efforts de l'in-'lia-
tive privée et des municipalités. Le re-
boisement et les travaux .publies ne
peuvent occuper directement ou indirec-
tement qu'un faible pourcentage des
millions de sans-travail et le sentiment
américain est hostile au système anglais
d'allocations régulières aux chômeurs. <
C'est pourquoi M. Roosevelt a fait voter
la loi pour le redressement de .5'indus- '
trie (National Industrial Recovery
Act) en s'inspirant des idées émises,
en 1931, devant .un congrès industriel,
par M. Gérard Svope, président de la \
General. Electric Co , qui se préoccu- <
pait d'enrayer le chômage et d'ajuster 1
la production industrielle à la ..^-som-
mation. ' !
Les expressions outrancières de cer- '
tains journaux américains ont dénaturé
en Europe le | sens exact des pouvoirs
conférés pour' deux ■ ans au président
Roosevelt par un Congrès qui puif très
.oien défaire en janvier 1934 ce qu'il
a vot4"e.n uni K.'33.
j ""*
I ** r
Les Américains, et particulièrement
les ruraux, 'aiment les hommes qui ne
mâchent pasj les mots, qui ne craignent
pas les responsabilités et qui n'aésitent
pas ^à imposer leurs décisions. Cepen-
dant, M.- Roosevelt use le moins possi-
ble- de ses pouvoirs discrétionnaires et
quand la persuasion n'a pas suffi, il a
recours à des procédés qui nous choque-
raient mais qui sont d'un usage cou-
rant aux Etats-Unis.
Par exemple, il. autorise les indus-
triels et les commerçants qui se sont
concertés, conformément à la loi, à ven-
dre leurs marchandises, sous le couvert
de « l'aigle bleu », ce qui est une ma-
nière de provoquer le boycottage-des
autres, à l'instar de l'étiquette bleue
apposée' depuis longtemps sur les boî-
tes de cigares fabriquées exclusivement
par des ouvriers S3«ndiqués. - - . •
Il faut tenir, compte de ces cousidé- (
rations brièvement-esquissées..si: l'on !
veut interpréter sainement ce- qui se
passe aux Etats-Unis.
L. VIGOUROUX,
' •- ancien député.
NOTRE POINT DE VUE
LA QUESTION DANUBIENNE
La question danubienne risque, hélas!
de ressembler à la quadrature du cercle.
Y a-t-il recherche d'accord entre les
puissances directement intéressées? Des
entraves mystérieuses la paralysent, té-
moin le silence qui s'est fait sur les Con-
férences de Varsovie, Bucarest, Sofia, où
les pays danubiens avaient jeté les bases
d'une Convention économique et doua-
nière. .
La S. D. N. suscite-t-élle une initiative
où grandes puissances et pays danubiens
sont invités à trouver une formule d'en-
tente? Rien de pratique n'en sort par le
fait de l'indifférence ou de l'opposition
de tel ou tel groupe de nations : témoin
la Conférence de Stresa. .
'Aujourd'hui, une nouvelle difficulté
s'ajoute à celles des problèmes danu-
biens : la menace qui pèse sur l'indé-
pendance de l'Autriche. Avec une argu-
mentation souvent logique et avec des
procédés' toujours brutaux, l'Allemagne
veut la soudure des; pays de langue ger-
manique. Cela pourrait nous mener loin
et détruire bien vite toutes les précautions
territoriales du Traité de 1919. D'où pro-
testation d'ailleurs décousue des puis-
sances qui ont forgé les Traités et bien-
tôt nouvel imbroglio venant de la ten-
tative d'accord partiel de l'Autriche, de
la Hongrie et de l'Italie, accord auquel
seraient invitées à se joindre vraisembla-
blement la Grande-Bretagne et la France,
en vertu,du Pacte à Quatre.
Nous aimerions voir la France prendre,
à soii tour, quelques initiatives. Protec-
trice naturelle des puissances qui consti-
tuent la Petite-Entente, elle doit veiller
à la sauvegardé de leurs intérêts. Inclinée
vers une entente effective avec l'Italie,
elle doit travailler à- la concordance de
sa politique avec celle de Rome.'Rien
ne serait donc plus normal qu'elle entrât
dans le jeu diplomatique, étant donné
surtout son ardent désir de conciliation
et de paix-
Ici, nous avons toujours préconisé
Laide à donner aux puissances de l'Eu-
rope Centrale, lesquelles étant spécifi-
quement agricoles, souffrent, de l'impos-
sibilité d'écouler leurs produits. A main-
tes reprises, la diplomatie française a
préparé des interventions analogues à
celle que vient d'accomplir l'Italie dans
son accord récent avec la Hongrie : elle
a dû toujours reculer du fait de l'oppo-
sition venue des milieux agricoles fran-
çais. Pourtant l'avenir est dans cette voie.
La France verra son influence diminuer
dans l'Europe Centrale, malgré les sym-
pathies politiques et intellectuelles qui
vont vers elle, si elle garde une attitude
platonique dans la question d'écoule-
ment des produits agricoles danubiens.
Si modeste que soit le courant des expor-
tations de la France avec les pays danu-
biens, il porte exclusivement ' sur des
produits industriels. A force de fermer
tous les marchés extérieurs, les industries
françaises iront toutes à là ruine..Qu'ad-
viendra-t-il alors de la production agri-
cole et qui la consommera? Nous ne ces-
serons donc pas de rappeler que toutes
les productions sont solidaires les unes
des autres dans l'harmonieux pays de
France.
En tout cas, les problèmes danubiens
ne peuvent pas se régler sans l'interven-
tion active dé la France et celle-ci doit
être capable de donner pour conserver
ou pour recevoir.
Politique et intérêts économiques fran-
çais peuvent et doivent se concilier sur
les bords du Danube.
LA TOUR DE BABEL
Raison pure
De .M. Edouard Bénès, un de ses récents
biographes écrit qu'il bannit en général
l'émotion et que la raison froide l'emporte
toujours et partout.
Grand travailleur, grand lecteur, le mi-
nistre des Affaires étrangères de la Tchéco-
slovaquie est surtout un penseur.
— Certains chefs-d'oeuvre de la littéra-
ture m'émouvaient profondément autrefois,
a-t-il dit, ils ne m'intéressent plus qu'au
point de vue intellectuel.
Un de nos spirituels diplomates n'expri-
mait-il pas cette opinion concordante :
— Pour Bénès, la raison d'Etat n'existe
pas; seule compte la raison pure.
Pièces à l'appui
L'Allemand Habitch, ancien inspecteur
du parti national socialiste autrichien, et qui
de Munich mène une vive campagne radio-
phonique contre le gouvernement de Vien-
ne, peut se vanter d'être actuellement en
Europe l'homme le plus écouté. .
Sait-on que' le gouvernement de Vienne
a fait enregistrer sur disques, au fur et à
mesure qu ils étaient diffusés, les discours
agressifs de M. Habitch ? Précaution utile,
au cas où le conflit serait porté devant la
Société des Nations, dont les membres
pourraient éventuellement se prononcer
avec pièces à l'appui !
Milliardaire chinois
Le maréchal Tchang Sen Liang, qui
vient de faire un court séjour en France,
continue ses visites européennes; mais on ne
sait pas encore où il se fixera définitivement.
Il avait d'abord choisi l'Italie, mais il pa-
raît ne pas avoir donné suite à son projet.
' L'ex-maréchal est un des hommes les
plus riches du monde. On prétend que sur
ce terrain," il,est a l'égal » des milliardaires
américains. Mais il est resté'très simple
d'allure et de goûts:
— L'apprentissage de la fortune est le
plus'dure de tous, confiait-il récemment à
un de nos confrères anglais..
Sur l'eau
Pour activer le règlement amiable du
conflit de la batellerie, M. Joseph Paga-
non, ministre des Travaux publics, a inter-
rompu la cure qu'il effectuait dans une ville
d'eaux et a rallié Paris.
Avec son esprit réaliste, il a pris rapi-
dement les mesures qui s'imposaient.
— Décidément, constatait-il avec le sou-
rire, mes vacances sont vouées à l'eau.
La crémaillère
M. Jessie L. Strauss, le distingué am-
bassadeur des Etats-Unis à Paris, va pren-
dre incessamment possession du nouvel hô-
tel de l'ambassade, qui s'élève place de
la Concorde à côté de l'hôtel Grillon.
On sait qu'il s'agit, au point de vue ar-
chitectural, d'une réalisation des plus heu-
reuses, puisque le bâtiment est une réplique
de l'hôtel Saint-Florentin, oeuvre de Chal-
grin, qui, jadis, occupait, l'emplacement.
On ne croit pas, en raison de la crise, que
l'ambassadeur donnera une fête pour pen-
dre « la crémaillère ». ,
M. et Mme Strauss recevront seulement
quelques amis pour leur faire effectuer « le
tour du propriétaire ».
Affaires volantes
Après le retour triomphal des escadrilles
italiennes, les équipages ont reçu un congé
de deux mois. Mais le maréchal Balbo s'est
seulement octroyé personnellement deux
journées de repos. Il a repris son service
au ministère de l'Air pour expédier les af-
faires — non pas « courantes » —■ mais
« volantes ».
Ce prodigieux animateur fait quotidien- i
nement en effet des «raids.de travail » qui
laissent sur les dents ses collaborateurs. Il
reste. à - son bureau, couramment de huit à
dix heures par jour, examinant tous les dos-
siers et toutes les requêtes. Mais il n'aime
pas les audiences, qui sont réduites au strict
minimum.
— Je bavarderai, avoue-t-il souvent,
quand je serai bien .vieux !
L'ALLEMAGNE
PAYSANNE
par René LAyjgET
Berlin, 21-8-33.
Dans son dernier numéro, une de -nos
meilleures revues publiait uhe.^série de do-
cuments ' sur,de -.national-socialisme. Ces
documents, '-fort- intéressants,? s'efforcent
de dégager- le 'sens.'profond; du : mouve-
ment, hitlérien fet d'en''souligner'.'certains
aspects,, peut-être un peu négligés, no-
tamment le côté paysan, anti-citadin,
anri-ïndustriel de la révolution alle-
mande'.''CeÇaspect est-il primitif, ou de
date-relativement récente?- Ceux qui ont
collectionné, ces -documents nous rappel-
lent :que.-le premier.programme.du natio-:
nal-sociàiisme n'accorde pas une impor-
tance'particulière a" i'agriculture : c'est
M. Darré,'aujourd'hui ministre, qui a
préciséTa doctrine nationale-socialiste 'du
retour à "la terre dans deux ouvrages pa-
rus en 1929 et 1930.' Ingénieur agronome, 1
donc ;connaissant-,ài fond les'...qùestions
agricoles,. homme , jeune ;et 'actif, - il' .se
mit à la tête de la'propagande hitlérienne
dans les campagnes. -Effectivement, c'est
leur population qui a fourni au parti de
Hitler ses gros, bataillons, cela à une
date récente. Jusqu'en 1930 il. puisait
surtout.ses effectifs dans la petite bour-
geoisie, artisans, employés, petits com-
merçants et fonctionnaires. Les progrès
énormes qu'il réalisa aux élections de
1930.et 1932 dans les.régions du nord
et dé l'est, presque exclusivement agri-
coles, montrent que le parti national-so-
cialiste est devenu en grande partie, si-
non en majorité, un parti paysan.
On ..pourrait, remarquer que les théo-
ries de M. Darré sur l'attachement au
so 1, sur l'importance du paysan comme
cellule élémentaire de la nation, se trouve
déjà' esquissée dans l'ouvrage de -Hitler,
Mein Kamff, qui date de. 1924. Mais,
s'il n'en était pas ainsi, on pourrait com-
prendre .que le national-socialisme ait
adapte sa doctrine et son programme
aux exigences de la classe qui devenait
son principal soutien. Cette adaptation
serait simplement une preuve de la sou-
plesse de ses dirigeants et de leur oppor- .
tunisme. .
La doctrine de M. Darré, séduisante
à première vue, est un singulier mélange
de truismes et de contre-vérités. Lors-
qu'il déclare : le paysan constitue la ra-
cine et la souche du peuple allemand, la
désertion des campagnes a été néfaste
à la vie de la nation, l'industrialisation
à outrance constitue un péril des plus
graves, il formule des vérités universel-
lement admises. Il n'y a aucun mérite à
les répéter après beaucoup d'autres :.l'in-
téressant serait de trouver un remède à
des maux que.tout le monde a constatés,
sans pouvoir jusqu'à présent les guérir.
Pour soigner une maladie, il n'est pas
mauvais d'en connaître la cause. Or,
quelle est la cause de l'abandon des cam-
pagnes, de l'industrialisation, d'après
M. Darré? Pendant un siècle de libéra-
lisme, dit-il, nous avons déshabitué notre
os peuple de la terre et l'avons massé dans
. des villes. Nous avons fait le contraire
y de ce qu'il fallait faire. Il serait diffi-
nt cile d'imaginer une explication plus
,eJ inexacte. Qu'est-ce que le libéralisme a
s à faire là-dedans? M. Darré affecte d'ou-
blier que, dans la période où l'Allemagne
s'est industrialisée — la seconde moitié
e' ,du XIXe siècle — elle ne vivait nullement
^ scus un régime libéral : elle était gou-
t veinée par Bismarck et par Guillaume IL
,i Les seules causes de l'industrialisation
' . sont les progrès de la technique, l'abon-
l dance du charbon et du fer, et surtout
.t la croissance énorme de la population al-
lemande. Avant 1870, cette croissance
1 . était déjà sensible : elle obligea des mil-
' lions d'Allemands à s'expatrier, la terre
: ^allemande ne pouvant plus les nourrir.
' C'est de cette époque (le milieu du
< XIXe siècle) que date la grande,émigra-
:„' tion aux Etats-Unis. Entre lès deux
3t guerres. 1870 et. 1914, se place la grande
1 augmentation de la population du Reich:
elle passe de 40 à 68 millions Id'habi-
•t tants. Cependant l'émigration ::..%sse à
r_ peu près comjolètement : c'est que les
. millions de nouveaux arrivants sont ab-
sorbes par une industrie qui se déve-
i_ loppe à pas de'géant. L'industrialisation
rï de l'Allemagne — on l'oublie trop sou-
• vent — est fonction de son mouvement
démographique. Elle n'a été possible
que par l'appoint de ces 28 millions
d'hommes qui se sont ajoutés à sa po-
pulation en 44 ans. Sans l'industrie, ces
28 millions n'auraient pas pu vivre ils
auraient dû s'exiler, comme ceux des
générations précédentes. Il suffit de. rap-
peler des faits, connus de tout le monde,
pour voir que le point de départ de M.-
' Darré est une erreur flagrante. Il attri-
t bue. à la politique l'abandon des cam-
= ypagnes, pour: pouvoir prouver que la po-
^ litique y remédiera. L'erreur^sur.. la. cause,
n'ehtfàïhe-t-elle pas une erreur sur l'a''
conclusion?
D'abord, il n'y a pas eu, à propre-
ment parler, désertion des campagnes :
; le phénomène que l'on constate est plu-
: tôt une diminution relative de la popu-
- lation rurale par rapport à celle des
- villes, celles-ci se développant grâce à
L l'industrie. Le progrès des méthodes de
: culture, spécialement l'emploi des ma-
[ chines, permettait, du reste, de travail-
i 1er la terre avec un moins grand nombre
de bras. Ce qui prouve que la terre alle-
mande n'a jamais été vraiment désertée,
c'est que sa production s'est toujours
. accrue. Dans certaines périodes, pendant
la guerre et dans les deux dernières an-
nées, elle est arrivée à nourrir presque
entièrement l'énorme population du
Reich. Dans ces conditions, on ne peut
que poser à M. Darré les questions sui-
vantes :'si, avec la main-d'oeuvre ac-
tuelle, la terre allemande produit déjà la
nourriture de ses 65 millions d'habitants,
pourquoi, voulez-vous augmenter cette
main-d'oeuvre? Vous prétendez désindus-
1 trialiser l'Allemagne, réaliser une évo-
! lu tion en sens inverse de celle qui s'est
: produite- depuis un demi-siècle, ramener
! une partie de la population de la ville
' à la campagne : où mettrez-vous ces nou-
; veaux paysans, comment les occuperez-
1 vous? L'Allemagne a-t-elle en réserve des
terres pour 25 millions d'hommes, re-
présentant au moins 5 millions de fa-
milles ?
Les journaux nationaux-socialistes
nous apportent eux-mêmes la réponse à
ces questions. Ils proclamaient ces jours-
ci sur un ton triomphal que, d'après les
plans du gouvernement, la colonisation,
intérieure (Siedlung) s'étendrait l'an
prochain à 10.000 familles : ) 0.000 fer-
mes seront créées, et si cette moyenne
se maintien pendant dix ans, on aura
installé 100.000 familles paysannes, re-
présentant 500.000 personnes, si cha-
cune d'elle a une moyenne de trois en-
fants.
Le résultat ne serait pas négligeable.'
1 Mais dans l'économie générale de la na-
tion, dans la répartition de sa popula-'
| tion entre la. ville et la campagne, .son
i influence serait à peu près nulle. Ou'est-
1 ce qu'un demi-million sur 65 millions
I d'hommes? Encore ne.serait-il pas pris
l exclusivement sur les citadins : une
grande.partie des nouveaux paysans que
l'on installera seront des ouvriers agri-
coles.
Les théories de M. Darré, malgré la
part de vérité générale, et même banale
qu'elles contiennent, nous apparaissent"
comme un vaste bluff; les plans qui s'en
inspirent comme peu susceptibles de ré-
nover la vie allemande. Quoiqu'il en dise,
l'Allemagne est un grand pays indus-
triel et le restera (à moins que sa popu-
lation ne diminue, mais cela prendrait
plusieurs dizaines d'années). C'est là le
fait qui domine sa structure économique
et sociale. Si le national-socialisme ne
veut pas en tenir compte, il échouera. Il
ne lui servira de rien de proclamer la
primauté et la suprématie théoriques de
l'Allemagne paysanne.
RENE LAURET.
LE CHANCELIER L-OLL-t'uSS
qui viennent d'avoir, à Riccione,
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