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BIBLIOGRAPHIE DES CHEMINS DE FER
de classement suivant la capacité. Aussi, depuis la
création cle ce nouveau ministère, n'avons-nous fait
que marcher cle crises en crises vers des catastro-
phes industrielles toujours plus terribles. C'était
pourtant une belle mission que de relever notre
industrie languissante et découragée, nos manufac-
tures écrasées par suite de la concurrence étran-
gère. Cette mission, l'administration de M. d'Argout
ne pouvait pas la comprendre. Par son indécision,
par son défaut de principes fixes et arrêtés, par sa
fatale indifférence, elle a aggravé le mal qu'elle
devait détruire, et découragé tous ceux qui sollici-
taient comme une faveur d'employer à de grands
travaux leur fortune et leurs talents. Telle a même
été son impuissance ou plutôt sa maladresse, qu'a-
lors qu'elle a voulu faire quelques tentatives, elle a
semblé prendre ses précautions pour qu'elles restas-
sent sans résultat, comme si une fatalité présidHt à
tous ses actes. En voici quelques exemples entre
raille : Le canal des Pyrénées exige des dépenses
énormes de construction que les produits ne pour-
ront jamais couvrir. Le ministère ne manque pas
d'appuyer de toute sa sollicitude cette entreprise, la
plus mauvaise peut-être de toutes celles qui sont
projetées, et d'en provoquer la concession par une
loi. Mais l'opération eût-elle été excellente, les con-
ditions imposées au concessionnaire en eussent rendu
la réalisation impossible. Une première adjudication
d'un chemin de fer de Toulouse à Montauban est
restée sans résultat, par suite des clauses inexécuta-
bles du cahier des.charges. Alors l'administration
s'empresse d'accorder cette entreprise sans nou-
velle adjudication, sans concurrence, et piar
simple ordonnance royale; son imprévoyance est
si grande qu'elle ne fixe aucun délai pour le verse-
ment du cautionnement ; en sorte qu'elle ne s'est
réservé aucun moyen d'exiger l'exécution de cette
entreprise. Le pont de la rue des Saints-Pères de-
vait nécessairement être un pont fixe, l'opinion
publique et le conseil des ponts et chaussées s'étaient
formellement prononcés ; mais ni le public ni le
conseil n'ont été écoutés, et le ministère a adjugé
un pont suspendu. Enfin, forcé de céder à l'opinion
générale, il a rompu cette adjudication et accordé
un pont fixe sans notivelle adjudication et sans
concurrence, à la compagnie qui le construit en ce
moment. Pendant ce temps, l'hiver, qui n'obéit pas
aux caprices ministériels, est arrivé, et le pont ne
sera pas fait cette année. Un procès a été intenté
par le premier adjudicataire. Un grand nombre de
compagnies avaient proposé un chemin de fer de
Paris à Orléans ; ballottées pendant deux ans au gré
de l'incertitude ministérielle, elles ont fini par se
désorganiser. Le ministre n'a pas manqué de saisir
ce moment pour ordonner une adjudication publi-
que. Faut-il s'étonner qu'elle soit restée sans résultat?
Au commencement de 1831, une compagnie soumit
le projet et les plans d'un chemin de fer de Paris à
Pontoise, avec prolongement jusqu'à la mer; et c'est
seulement le 10 octobre suivant que le ministère se
décide à adjuger simplement un chemin de fer de
Paris à Pontoise. Deux compagnies étaient en con-
currence ; l'une et l'autre annoncèrent dans les jour-
naux que le chemin borné à la partie de Pontoise,
ne pouvant offrir d'avantages ni au public ni aux
capitaiistes, et que ie cahier des charges contenant
des clauses inexécutables, elles ne se présenteraient,
pas à l'adjudication qui, effectivement, eut lieu sans
résultat. Le ministre supprime alors les clauses
vicieuses, ajoute la faculté de prolonger le chemin
jusqu'à la mer dans le délai d'un an, et fixe au
5 novembre une adjudication publique sur les bases
nouvelles. Une seule compagnie se présente et est
déclarée adjudicataire; puis, lorsque cette compa-
gnie a fait des dépenses considérables, que les
maîtres de forges et les entrepreneurs de tout genre
se sont entendus avec elle, le ministre, tout surpris
d'avoir fait quelque chose, en éprouve bientôt des
remords. Pour fixer ses incertitudes, il s'adresse au
conseil d'Etat, qui, en semblable matière, est par sa
composition et son inexpérience un fort mauvais
juge. Sur son avis, donné à une majorité de qua-
torze voix contre onze, et sous l'influence d'intérêts
particuliers très actifs et qui ont su s'y faire jour, le
ministre annule l'adjudication. Des milliers d'ou-
vriers qui allaient avoir des travaux cet hiver, sont
sans pain et Son Excellence répond froidement : Il
se présentera d'autres compagnies. Enfin, un
Américain, constructeur aux Etats-Unis d'un chemin
cle fer dont les actions ont doublé de valeur, est
venu offrir au ministre piusieurs milfions et ses
talents, en sollicitant son appui pour plusieurs
grands travaux qu'il offrait d'exécuter en France.
N'ayant pu se faire comprendre, il est rétourné re-
porter dans sa patrie son industrie et ses capitaux.
Nous devons le dire en nôtre âme et conscience, si
l'administration de M. Becquey se montra somno-
lente, jamais elle ne fit preuve d'une telle incapa-
cité. En suivant de pareils errements, on ne fera que
compromettre de plus en plus la fortune et, par
conséquent, la tranquillité publiques. Il n'est personne
qui ne souffre de l'état de choses actuel. Le gouver-
nement sera-t-il longtemps encore à comprendre que
la première chose à faire pour améliorer notre com-
merce et notre industrie, consiste à mettre à la tète
des affaires des hommes qui savent ce que c'est que
ie commerce et l'industrie ? Les avertissements du
passé seront-ils toujours perdus pour lui, et i'audra-
t-il, pour le faire sortir cle sa funeste léthargie, lui
répéter encore : Bristol, Lyon ? »
205. — REVUE BRITANNIQUE. — Moyen de ménager
le combustible des machines à vapeur (mars).— Pro-
duit du chemin de fer de Manchester à Liverpool
(octobre et décembre 1833).
206. — REVUE ENCYCLOPÉDIQUE. — Article signe
LIST sur les avantages d'une route à ornières du
Havre à Strasbourg, par Paris (avril).
207. — BULLETIN DES SCIENCES TECHNOLOGIQUES : cin-
quième section du Bulletin universel des sciences
et de l'industrie, publié sous la direction du baron
de Férussae.— Les chemins de fer, par Wood ; — les
chemins de fer, par Goste et Perdonnet ; — nouveau
BIBLIOGRAPHIE DES CHEMINS DE FER
de classement suivant la capacité. Aussi, depuis la
création cle ce nouveau ministère, n'avons-nous fait
que marcher cle crises en crises vers des catastro-
phes industrielles toujours plus terribles. C'était
pourtant une belle mission que de relever notre
industrie languissante et découragée, nos manufac-
tures écrasées par suite de la concurrence étran-
gère. Cette mission, l'administration de M. d'Argout
ne pouvait pas la comprendre. Par son indécision,
par son défaut de principes fixes et arrêtés, par sa
fatale indifférence, elle a aggravé le mal qu'elle
devait détruire, et découragé tous ceux qui sollici-
taient comme une faveur d'employer à de grands
travaux leur fortune et leurs talents. Telle a même
été son impuissance ou plutôt sa maladresse, qu'a-
lors qu'elle a voulu faire quelques tentatives, elle a
semblé prendre ses précautions pour qu'elles restas-
sent sans résultat, comme si une fatalité présidHt à
tous ses actes. En voici quelques exemples entre
raille : Le canal des Pyrénées exige des dépenses
énormes de construction que les produits ne pour-
ront jamais couvrir. Le ministère ne manque pas
d'appuyer de toute sa sollicitude cette entreprise, la
plus mauvaise peut-être de toutes celles qui sont
projetées, et d'en provoquer la concession par une
loi. Mais l'opération eût-elle été excellente, les con-
ditions imposées au concessionnaire en eussent rendu
la réalisation impossible. Une première adjudication
d'un chemin de fer de Toulouse à Montauban est
restée sans résultat, par suite des clauses inexécuta-
bles du cahier des.charges. Alors l'administration
s'empresse d'accorder cette entreprise sans nou-
velle adjudication, sans concurrence, et piar
simple ordonnance royale; son imprévoyance est
si grande qu'elle ne fixe aucun délai pour le verse-
ment du cautionnement ; en sorte qu'elle ne s'est
réservé aucun moyen d'exiger l'exécution de cette
entreprise. Le pont de la rue des Saints-Pères de-
vait nécessairement être un pont fixe, l'opinion
publique et le conseil des ponts et chaussées s'étaient
formellement prononcés ; mais ni le public ni le
conseil n'ont été écoutés, et le ministère a adjugé
un pont suspendu. Enfin, forcé de céder à l'opinion
générale, il a rompu cette adjudication et accordé
un pont fixe sans notivelle adjudication et sans
concurrence, à la compagnie qui le construit en ce
moment. Pendant ce temps, l'hiver, qui n'obéit pas
aux caprices ministériels, est arrivé, et le pont ne
sera pas fait cette année. Un procès a été intenté
par le premier adjudicataire. Un grand nombre de
compagnies avaient proposé un chemin de fer de
Paris à Orléans ; ballottées pendant deux ans au gré
de l'incertitude ministérielle, elles ont fini par se
désorganiser. Le ministre n'a pas manqué de saisir
ce moment pour ordonner une adjudication publi-
que. Faut-il s'étonner qu'elle soit restée sans résultat?
Au commencement de 1831, une compagnie soumit
le projet et les plans d'un chemin de fer de Paris à
Pontoise, avec prolongement jusqu'à la mer; et c'est
seulement le 10 octobre suivant que le ministère se
décide à adjuger simplement un chemin de fer de
Paris à Pontoise. Deux compagnies étaient en con-
currence ; l'une et l'autre annoncèrent dans les jour-
naux que le chemin borné à la partie de Pontoise,
ne pouvant offrir d'avantages ni au public ni aux
capitaiistes, et que ie cahier des charges contenant
des clauses inexécutables, elles ne se présenteraient,
pas à l'adjudication qui, effectivement, eut lieu sans
résultat. Le ministre supprime alors les clauses
vicieuses, ajoute la faculté de prolonger le chemin
jusqu'à la mer dans le délai d'un an, et fixe au
5 novembre une adjudication publique sur les bases
nouvelles. Une seule compagnie se présente et est
déclarée adjudicataire; puis, lorsque cette compa-
gnie a fait des dépenses considérables, que les
maîtres de forges et les entrepreneurs de tout genre
se sont entendus avec elle, le ministre, tout surpris
d'avoir fait quelque chose, en éprouve bientôt des
remords. Pour fixer ses incertitudes, il s'adresse au
conseil d'Etat, qui, en semblable matière, est par sa
composition et son inexpérience un fort mauvais
juge. Sur son avis, donné à une majorité de qua-
torze voix contre onze, et sous l'influence d'intérêts
particuliers très actifs et qui ont su s'y faire jour, le
ministre annule l'adjudication. Des milliers d'ou-
vriers qui allaient avoir des travaux cet hiver, sont
sans pain et Son Excellence répond froidement : Il
se présentera d'autres compagnies. Enfin, un
Américain, constructeur aux Etats-Unis d'un chemin
cle fer dont les actions ont doublé de valeur, est
venu offrir au ministre piusieurs milfions et ses
talents, en sollicitant son appui pour plusieurs
grands travaux qu'il offrait d'exécuter en France.
N'ayant pu se faire comprendre, il est rétourné re-
porter dans sa patrie son industrie et ses capitaux.
Nous devons le dire en nôtre âme et conscience, si
l'administration de M. Becquey se montra somno-
lente, jamais elle ne fit preuve d'une telle incapa-
cité. En suivant de pareils errements, on ne fera que
compromettre de plus en plus la fortune et, par
conséquent, la tranquillité publiques. Il n'est personne
qui ne souffre de l'état de choses actuel. Le gouver-
nement sera-t-il longtemps encore à comprendre que
la première chose à faire pour améliorer notre com-
merce et notre industrie, consiste à mettre à la tète
des affaires des hommes qui savent ce que c'est que
ie commerce et l'industrie ? Les avertissements du
passé seront-ils toujours perdus pour lui, et i'audra-
t-il, pour le faire sortir cle sa funeste léthargie, lui
répéter encore : Bristol, Lyon ? »
205. — REVUE BRITANNIQUE. — Moyen de ménager
le combustible des machines à vapeur (mars).— Pro-
duit du chemin de fer de Manchester à Liverpool
(octobre et décembre 1833).
206. — REVUE ENCYCLOPÉDIQUE. — Article signe
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Havre à Strasbourg, par Paris (avril).
207. — BULLETIN DES SCIENCES TECHNOLOGIQUES : cin-
quième section du Bulletin universel des sciences
et de l'industrie, publié sous la direction du baron
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