Titre : L'Ami de l'enfance : journal des salles d'asile
Éditeur : Hachette (Paris)
Date d'édition : 1887-07-01
Contributeur : Cochin, Jean Denis Marie (1789-1841). Éditeur scientifique
Contributeur : Battelle (chef de bureau à l Assistance publique). Éditeur scientifique
Contributeur : Hachette, Louis (1800-1864). Éditeur scientifique
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32691160x
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 4533 Nombre total de vues : 4533
Description : 01 juillet 1887 01 juillet 1887
Description : 1887/07/01 (A6,SER5,N19). 1887/07/01 (A6,SER5,N19).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k57531485
Source : Bibliothèque nationale de France, département Littérature et art, 8-Z-2016
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 27/12/2010
MÉTHODE FRANÇAISE D'ÉDUCATION MATERNELLE
306
faire plusieurs voyages pour remplir le baquet
de sa grand'maman. Mais la petite fille élait
courageuse, et chaque cruche à la fontaine la
rendait plus jolie, parce que ses joues deve-
naient plus roses et ses yeux bleus plus brillants.
Un matin, Jeanne — c'était son nom — vit eh
arrivant près de la fontaine une toute vieille
femme qui paraissait bien fatiguée. Il lui sembla
voir sa chère grand'maman encore plus vieille
el plus malade.
— Bonjour, madame, lui dit-elle de sa jolie
voix qui ressemblait à une délicieuse musique;
voulez-vous que je fasse quelque chose pour vous?
— J'ai soif, répondit la vieille femme, et puis
j'ai cassé ma canne et me trouve dans l'impos-
sibilité de continuer ma route.
Jeanne remplit sa cruche :—Buvez, dit-elle, el
appuyez-vous sur mon épaule pour vous relever.
— Merci, mignonne, dit la pauvre vieille quand
elle fut debout. Maintenant, en souvenir de notre
rencontre, je te fais un don; toutes les fois que
lu ouvriras la bouche pour parler, il en tombera
une rose, une branche de muguet ou un dia-
mant.
Car la vieille femme était une fée. »
Plus tard, les enfants comprendront que c'est
en soi-même que l'on trouve la récompense du
bienfait accompli et que notre conscience nous
paye en roses, en muguet, en diamants.
Ce qu'il nous faut, à l'école maternelle sur-
tout, parce que c'est à l'école maternelle que
l'on sème les germes, ce qu'il nous faut, c'est
la morale en actions el non çnsTimmovaUtë en
actions.
Mais on ne raconte pas la morale, sans y avoir
réfléchi, sans avoir fait des études sur soi-même
et sur l'enfant, sans avoir une méthode, car la
méthode est aussi nécessaire à l'éducation.mo-
rale qu'à l'éducation intellectuelle et à l'édu-
cation physique. Or la méthode consiste à
graduer les exercices à mesure que l'élève su
fortifie. Vous ne proposeriez pas un problème
d'arithmétique à un bébé qui ne sait ni composer
ni décomposer les nombres et vous ne lui feriez
pas faire les exercices gymnastiques de l'école
primaire pas plus qu'on ne mettrait sur la tête
d'un enfant de quinze ans le sac de blé que le
fort de la halle transporte avec tant, d'aisance.
Méthodiquement, ou cultive chez l'enfant l'ac-
tivité, l'obéissance, l'ordre, la sobriété, la géné-
rosité... et ce n'est que peu à peu, pas à pas,
qu'on arrive aux qualités qui exigent de la ré-
flexion, du jugement: la justice, la sincérité, la
patience, la modestie, etc.
11 ne faut pas nous le dissimuler, l'éducation esl
la science la plus difficile, la plus délicate, mais
aussi la plus attachante. Pour nous y attacher,
il faut la travailler.
Pauline KENGOMARD.
LES DISTRIBUTIONS DE PRIX
« Sont interdites les distributions de prix à
l'école maternelle 4. »
Si l'on osait, comme on rappellerait le vieux
dicton populaire: Dans les petites boîtes...
Sous celte apparente brièveté, en effet, que de
choses et des plus excellentes ! — Des plus
excellentes? Cet article 9 du règlement
défend quoi en somme ? Les fanfares triom-
phantes, les discours et les récitations en l'hon-
neur de l'école maternelle. Estrce si bon que
cela? A ce compte, il n'y aura donc plus un
seul beau jour pour les petits enfants, ou plutôt
le plus beau de leur jour disparaîtra dto calen-
drier.
Point du tout. Le bonheur des enfants n?est pas
intéressé le moins du.inonde à l'existence des
distributions de prix; on pourrait le prouver non
seulement pour les bambins, mais pour les
grands.
Cependant, c'est surtout a propos des premiers
que la chose est facile à démontrer. Voilà certes
longtemps que M. le maire, qui est un bon papa
comme un autre, à la veille de faire son allocu-
tion aux enfants: de l'école maternelle, se dit :
« Rien n'ennuie tant les miens qu'un-discours !
Et ceux-là, les pauvres petits! Mauvaise affaire!
J'aurais bien plutôt fait de leur dire : Allez-vous
amuser galopins! Et ils me comprendraient tous,
au moins! » La fanfare, elle aussi, est depuis
longtemps scandalisée de voir combien les mar-
mots l'écoutent peu; ils se bousculent et se
tiraillent, tant, qu'elle dure; même aux plus
beaux morceaux. Et l'a fanfare se dit :: « Coquins
d'enfants, il n'en serait pas ainsi, si c'était vous
qui les manoeuvriez, les trompettes et les tam-
bours, et les cimbales et le reste !»
Pour les intéressés-, qui ne savent pas qu'on
pense tout cela, ils prennent leur mal plus ou
moins en patience. La mise en scène les amuse,
d'unefaçongénérale, tout en les ennuyant en dé-
tails, et ils ont la bonté d'oublier toutesies larmes
qu'ont fait couler les préparatifs de la représen-
tation théâtrale, leur part dans la fête. «Gom-
ment, lu ne sais pas encore ta fable par coeur,
el loi, lu sautes des mots; et toi, tu chantes faux
dans tel passage ! Malheureux enfants, vous ne
pourrez pas être de la représentation ! »
Les petits coeurs se gonflent, les yeux se
mouillent, et après un bon désespoir qui ne
répare rien, il faut encore consacrer à la répé- •
tilion des morceaux un temps que l'on pourrait
employer à jouer.
Voilà pour les mystères des coulisses.
Tout s'oublie, il est vrai le grand jour. Mais de
tant de peine passée et de tant de gloire que
resle-l-il d'utile, de bon, et de solidement vrai?
Un livre qu'on ne peut souvent pas lire, ce
qui fait que ce n'est ni utile, ni bon. En outre
des satisfactions d'amour-propre, ce qui n'est ni
bon, ni vrai, ni solide; enfin j'allais parler de la
poussière, de la chaleur et de l'ennui, qui ne
sont heureusement pas solides non plus et c'est
leur grand mérite, car pour être lions...
Voilà donc la distribution des prix condamnée
par la municipalité,la fanfare et les enfants eux-
mêmes si on consulte leur sincère intérêt.
Reste le public; et comme le disait dans une
lettre récente une correspondante de M'nc Ker-
gomard, une correspondante si affligée de l'état
actuel, et si désireuse de le voir changer que
nous voudrions bien lui apporter ici unpetitbon
('l)Voy. l'A mi de l'Enfance du 15 juin, p. 2!)2.
306
faire plusieurs voyages pour remplir le baquet
de sa grand'maman. Mais la petite fille élait
courageuse, et chaque cruche à la fontaine la
rendait plus jolie, parce que ses joues deve-
naient plus roses et ses yeux bleus plus brillants.
Un matin, Jeanne — c'était son nom — vit eh
arrivant près de la fontaine une toute vieille
femme qui paraissait bien fatiguée. Il lui sembla
voir sa chère grand'maman encore plus vieille
el plus malade.
— Bonjour, madame, lui dit-elle de sa jolie
voix qui ressemblait à une délicieuse musique;
voulez-vous que je fasse quelque chose pour vous?
— J'ai soif, répondit la vieille femme, et puis
j'ai cassé ma canne et me trouve dans l'impos-
sibilité de continuer ma route.
Jeanne remplit sa cruche :—Buvez, dit-elle, el
appuyez-vous sur mon épaule pour vous relever.
— Merci, mignonne, dit la pauvre vieille quand
elle fut debout. Maintenant, en souvenir de notre
rencontre, je te fais un don; toutes les fois que
lu ouvriras la bouche pour parler, il en tombera
une rose, une branche de muguet ou un dia-
mant.
Car la vieille femme était une fée. »
Plus tard, les enfants comprendront que c'est
en soi-même que l'on trouve la récompense du
bienfait accompli et que notre conscience nous
paye en roses, en muguet, en diamants.
Ce qu'il nous faut, à l'école maternelle sur-
tout, parce que c'est à l'école maternelle que
l'on sème les germes, ce qu'il nous faut, c'est
la morale en actions el non çnsTimmovaUtë en
actions.
Mais on ne raconte pas la morale, sans y avoir
réfléchi, sans avoir fait des études sur soi-même
et sur l'enfant, sans avoir une méthode, car la
méthode est aussi nécessaire à l'éducation.mo-
rale qu'à l'éducation intellectuelle et à l'édu-
cation physique. Or la méthode consiste à
graduer les exercices à mesure que l'élève su
fortifie. Vous ne proposeriez pas un problème
d'arithmétique à un bébé qui ne sait ni composer
ni décomposer les nombres et vous ne lui feriez
pas faire les exercices gymnastiques de l'école
primaire pas plus qu'on ne mettrait sur la tête
d'un enfant de quinze ans le sac de blé que le
fort de la halle transporte avec tant, d'aisance.
Méthodiquement, ou cultive chez l'enfant l'ac-
tivité, l'obéissance, l'ordre, la sobriété, la géné-
rosité... et ce n'est que peu à peu, pas à pas,
qu'on arrive aux qualités qui exigent de la ré-
flexion, du jugement: la justice, la sincérité, la
patience, la modestie, etc.
11 ne faut pas nous le dissimuler, l'éducation esl
la science la plus difficile, la plus délicate, mais
aussi la plus attachante. Pour nous y attacher,
il faut la travailler.
Pauline KENGOMARD.
LES DISTRIBUTIONS DE PRIX
« Sont interdites les distributions de prix à
l'école maternelle 4. »
Si l'on osait, comme on rappellerait le vieux
dicton populaire: Dans les petites boîtes...
Sous celte apparente brièveté, en effet, que de
choses et des plus excellentes ! — Des plus
excellentes? Cet article 9 du règlement
défend quoi en somme ? Les fanfares triom-
phantes, les discours et les récitations en l'hon-
neur de l'école maternelle. Estrce si bon que
cela? A ce compte, il n'y aura donc plus un
seul beau jour pour les petits enfants, ou plutôt
le plus beau de leur jour disparaîtra dto calen-
drier.
Point du tout. Le bonheur des enfants n?est pas
intéressé le moins du.inonde à l'existence des
distributions de prix; on pourrait le prouver non
seulement pour les bambins, mais pour les
grands.
Cependant, c'est surtout a propos des premiers
que la chose est facile à démontrer. Voilà certes
longtemps que M. le maire, qui est un bon papa
comme un autre, à la veille de faire son allocu-
tion aux enfants: de l'école maternelle, se dit :
« Rien n'ennuie tant les miens qu'un-discours !
Et ceux-là, les pauvres petits! Mauvaise affaire!
J'aurais bien plutôt fait de leur dire : Allez-vous
amuser galopins! Et ils me comprendraient tous,
au moins! » La fanfare, elle aussi, est depuis
longtemps scandalisée de voir combien les mar-
mots l'écoutent peu; ils se bousculent et se
tiraillent, tant, qu'elle dure; même aux plus
beaux morceaux. Et l'a fanfare se dit :: « Coquins
d'enfants, il n'en serait pas ainsi, si c'était vous
qui les manoeuvriez, les trompettes et les tam-
bours, et les cimbales et le reste !»
Pour les intéressés-, qui ne savent pas qu'on
pense tout cela, ils prennent leur mal plus ou
moins en patience. La mise en scène les amuse,
d'unefaçongénérale, tout en les ennuyant en dé-
tails, et ils ont la bonté d'oublier toutesies larmes
qu'ont fait couler les préparatifs de la représen-
tation théâtrale, leur part dans la fête. «Gom-
ment, lu ne sais pas encore ta fable par coeur,
el loi, lu sautes des mots; et toi, tu chantes faux
dans tel passage ! Malheureux enfants, vous ne
pourrez pas être de la représentation ! »
Les petits coeurs se gonflent, les yeux se
mouillent, et après un bon désespoir qui ne
répare rien, il faut encore consacrer à la répé- •
tilion des morceaux un temps que l'on pourrait
employer à jouer.
Voilà pour les mystères des coulisses.
Tout s'oublie, il est vrai le grand jour. Mais de
tant de peine passée et de tant de gloire que
resle-l-il d'utile, de bon, et de solidement vrai?
Un livre qu'on ne peut souvent pas lire, ce
qui fait que ce n'est ni utile, ni bon. En outre
des satisfactions d'amour-propre, ce qui n'est ni
bon, ni vrai, ni solide; enfin j'allais parler de la
poussière, de la chaleur et de l'ennui, qui ne
sont heureusement pas solides non plus et c'est
leur grand mérite, car pour être lions...
Voilà donc la distribution des prix condamnée
par la municipalité,la fanfare et les enfants eux-
mêmes si on consulte leur sincère intérêt.
Reste le public; et comme le disait dans une
lettre récente une correspondante de M'nc Ker-
gomard, une correspondante si affligée de l'état
actuel, et si désireuse de le voir changer que
nous voudrions bien lui apporter ici unpetitbon
('l)Voy. l'A mi de l'Enfance du 15 juin, p. 2!)2.
Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 95.63%.
En savoir plus sur l'OCR
En savoir plus sur l'OCR
Le texte affiché peut comporter un certain nombre d'erreurs. En effet, le mode texte de ce document a été généré de façon automatique par un programme de reconnaissance optique de caractères (OCR). Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 95.63%.
- Auteurs similaires Arts de la marionnette Arts de la marionnette /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=colnum adj "Pam1"The Romanic review : a quarterly journal devoted to research, the publications of texts and documents, critical discussions, notes, news and comment, in the field of the romance languages and literatures / edited by Henry Alfred Todd and Raymond Weeks /ark:/12148/bpt6k119586.highres Bibliothèque de l'École des Chartes /ark:/12148/bpt6k12501c.highresFonds régional : Lorraine Fonds régional : Lorraine /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=colnum adj "Lorr1"
-
-
Page
chiffre de pagination vue 5/16
- Recherche dans le document Recherche dans le document https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/search/ark:/12148/bpt6k57531485/f5.image ×
Recherche dans le document
- Partage et envoi par courriel Partage et envoi par courriel https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/share/ark:/12148/bpt6k57531485/f5.image
- Téléchargement / impression Téléchargement / impression https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/download/ark:/12148/bpt6k57531485/f5.image
- Mise en scène Mise en scène ×
Mise en scène
Créer facilement :
- Marque-page Marque-page https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/bookmark/ark:/12148/bpt6k57531485/f5.image ×
Gérer son espace personnel
Ajouter ce document
Ajouter/Voir ses marque-pages
Mes sélections ()Titre - Acheter une reproduction Acheter une reproduction https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/pa-ecommerce/ark:/12148/bpt6k57531485
- Acheter le livre complet Acheter le livre complet https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/indisponible/achat/ark:/12148/bpt6k57531485
- Signalement d'anomalie Signalement d'anomalie https://sindbadbnf.libanswers.com/widget_standalone.php?la_widget_id=7142
- Aide Aide https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/aide/ark:/12148/bpt6k57531485/f5.image × Aide
Facebook
Twitter
Pinterest