Titre : Les Annales politiques et littéraires : revue populaire paraissant le dimanche / dir. Adolphe Brisson
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1907-07-14
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34429261z
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 42932 Nombre total de vues : 42932
Description : 14 juillet 1907 14 juillet 1907
Description : 1907/07/14 (A25,N1255,T49). 1907/07/14 (A25,N1255,T49).
Description : Collection numérique : Arts de la marionnette Collection numérique : Arts de la marionnette
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k5721921t
Source : Bibliothèque nationale de France, département Collections numérisées, 2009-34518
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 01/12/2010
N° 1255
LES ANNALES
35
peur partant pour Milarro de prendre à son
bord M. Paul Parfait, qui porte une dépêche
très pressée au général Garibaldi.
» Je lui présente d'avance tous mes remer-
ciements.
» ALEXANDRE DUMAS. »
N'est-ce pas amusant de voir ce bon Du-
mas jouer au général d'armée, faire son petit
Carnot, « organisateur de la victoire »?
Paul Parfait retrouva là-bas, autour de Ga-
ribaldi, un certain nombre de Parisiens :
Edouard Lockroy d'abord, puis Henry Fou-
quier, tous deux jeunes et pleins d'ardeur,
Maxime Du Camp, Ulrich de Fonvielle, Cer-
nuschi. Dumas père suivait à bord de sa goé-
lette l'Emma. Ce furent des journées inou-
bliables. Quand M. Lockroy en évoque le
souvenir, ses yeux s'animent, sa verve s'éveille.
Je lui ai entendu conter une aventure extraor-
dinaire qui clôturera ce petit chapitre d'his-
toire anecdotique. J'écris sous sa dictée :
« Nous marchions sur Palerme et Garibaldi
ne savait pas du tout si les populations se
soulèveraient sur son passage.
» Il avait contre lui le haut clergé, tandis
que le bas clergé lui était plutôt favorable.
Vous savez quelles étaient les opinions re-
ligieuses de Garibaldi; mais, avoir pour lui
le petit clergé, c'était un atout de plus dans
son jeu. C'était un homme supérieur qui ne
négligeait rien et se servait de tout pour arriver
au but.
» Sur notre route, se trouvait un village
très important... Nous approchons, personne
dans les rues, les maisons fermées. Les ha-
bitants étaient tous dans l'église. L'arrivée
de Garibaldi, cependant, se sut immédiatement,
et, quand nous passâmes devant l'église, tous
les assistants étaient sous le porche et le
curé se tenait à la tête de ses fidèles.
» Dès qu'il aperçut Garibaldi, ce bon curé
l'apostropha :
» — Descends de ton cheval!
» Garibaldi descendit.
» — Approche, maintenant, reprit le curé.
» Et, saisissant un immense crucifix, il
ajouta :
» — Incline-toi!
Garibaldi obéit.
» — Regardez, s'écria le curé, celui qui mar-
che de succès en succès, qui gagne batailles
sur batailles, vient de se courber devant celui
qui donne la victoire!
» Et, crucifix sur l'épaule, il se mêla à
notre troupe, suivi de tous ses fidèles. Il
se battit comme un lion, à Palerme, ce bon
curé, frappant avec son crucifix, et couchant
plus d'un ennemi à terre.
» — Je les assomme, répétait-il, parce que
ma religion me défend de verser du sang! »
Tel est le récit de M. Lockroy. Il y man-
que le geste, l'accent, la physionomie spi-
rituelle du narrateur. Et cela, malheureuse-
ment, je ne puis le reproduire.
ADOLPHE BRISSON.
MON PÈRE ET MA MÈRE
Mon père, Dominique Garibaldi, né à Chia-
vari, était fils de marin et marin lui-même;
ses yeux, en s'ouvrant, virent la mer, sur
laquelle il devait passer à peu près toute sa
vie.
Que l'on n'aille pas croire que mon éduca-
tion fut le moins du monde aristocratique.
Non, mon père ne me fit apprendre ni la
gymnastique, ni les armes, ni l'équitation.
Quant à ma mère, Rosa Ragiundo, je le
déclare avec orgueil, c'était le modèle des
femmes. S'il y a quelque bon sentiment dans
mon âme, j'avoue hautement que c'est d'elle
que je le tiens.
Son angélique caractère ne pouvait faire au-
trement que d'avoir son reflet en moi. N'est ce
pas à sa pitié pour le malheur, à sa compas-
sion pour les souffrances, que je dois ce grand
amour, je dirai plus, cette profonde charité
pour la patrie; charité qui m'a valu l'affec-
tion et la sympathie de mes malheureux con-
citoyens? Je ne suis certes pas superstitieux;
cependant, j'affirmerai ceci, c'est que, dans
les circonstances les plus terribles de ma vie,
quand l'Océan rugissait sous la carène et
contre les flancs de mon vaisseau qu'il sou-
levait comme un liège; quand les boulets
sifflaient à mes oreilles comme le vent de
la tempête; quand les balles pleuvaient autour
de moi comme la grêle, je la voyais constam-
ment agenouillée, ensevelie dans sa prière,
courbée aux pieds du Très-Haut, et moi, ce
qui me donnait ce courage dont on s'est étonné
parfois, c'est la conviction qu'il ne pouvait
m'arriver aucun malheur, quand une si sainte
femme, quand un pareil ange priait pour moi.
JOSEPH GARIBALDI.
Monument national à Garibaldi, dans l'île de Caprera.
Palerme. — Pavillon du Palais royal,
habité par Garibaldi en 1860.
Alexandre Dumas père
Cabinet de travail de Dumas,
à Chiatamone.
LES ANNALES
35
peur partant pour Milarro de prendre à son
bord M. Paul Parfait, qui porte une dépêche
très pressée au général Garibaldi.
» Je lui présente d'avance tous mes remer-
ciements.
» ALEXANDRE DUMAS. »
N'est-ce pas amusant de voir ce bon Du-
mas jouer au général d'armée, faire son petit
Carnot, « organisateur de la victoire »?
Paul Parfait retrouva là-bas, autour de Ga-
ribaldi, un certain nombre de Parisiens :
Edouard Lockroy d'abord, puis Henry Fou-
quier, tous deux jeunes et pleins d'ardeur,
Maxime Du Camp, Ulrich de Fonvielle, Cer-
nuschi. Dumas père suivait à bord de sa goé-
lette l'Emma. Ce furent des journées inou-
bliables. Quand M. Lockroy en évoque le
souvenir, ses yeux s'animent, sa verve s'éveille.
Je lui ai entendu conter une aventure extraor-
dinaire qui clôturera ce petit chapitre d'his-
toire anecdotique. J'écris sous sa dictée :
« Nous marchions sur Palerme et Garibaldi
ne savait pas du tout si les populations se
soulèveraient sur son passage.
» Il avait contre lui le haut clergé, tandis
que le bas clergé lui était plutôt favorable.
Vous savez quelles étaient les opinions re-
ligieuses de Garibaldi; mais, avoir pour lui
le petit clergé, c'était un atout de plus dans
son jeu. C'était un homme supérieur qui ne
négligeait rien et se servait de tout pour arriver
au but.
» Sur notre route, se trouvait un village
très important... Nous approchons, personne
dans les rues, les maisons fermées. Les ha-
bitants étaient tous dans l'église. L'arrivée
de Garibaldi, cependant, se sut immédiatement,
et, quand nous passâmes devant l'église, tous
les assistants étaient sous le porche et le
curé se tenait à la tête de ses fidèles.
» Dès qu'il aperçut Garibaldi, ce bon curé
l'apostropha :
» — Descends de ton cheval!
» Garibaldi descendit.
» — Approche, maintenant, reprit le curé.
» Et, saisissant un immense crucifix, il
ajouta :
» — Incline-toi!
Garibaldi obéit.
» — Regardez, s'écria le curé, celui qui mar-
che de succès en succès, qui gagne batailles
sur batailles, vient de se courber devant celui
qui donne la victoire!
» Et, crucifix sur l'épaule, il se mêla à
notre troupe, suivi de tous ses fidèles. Il
se battit comme un lion, à Palerme, ce bon
curé, frappant avec son crucifix, et couchant
plus d'un ennemi à terre.
» — Je les assomme, répétait-il, parce que
ma religion me défend de verser du sang! »
Tel est le récit de M. Lockroy. Il y man-
que le geste, l'accent, la physionomie spi-
rituelle du narrateur. Et cela, malheureuse-
ment, je ne puis le reproduire.
ADOLPHE BRISSON.
MON PÈRE ET MA MÈRE
Mon père, Dominique Garibaldi, né à Chia-
vari, était fils de marin et marin lui-même;
ses yeux, en s'ouvrant, virent la mer, sur
laquelle il devait passer à peu près toute sa
vie.
Que l'on n'aille pas croire que mon éduca-
tion fut le moins du monde aristocratique.
Non, mon père ne me fit apprendre ni la
gymnastique, ni les armes, ni l'équitation.
Quant à ma mère, Rosa Ragiundo, je le
déclare avec orgueil, c'était le modèle des
femmes. S'il y a quelque bon sentiment dans
mon âme, j'avoue hautement que c'est d'elle
que je le tiens.
Son angélique caractère ne pouvait faire au-
trement que d'avoir son reflet en moi. N'est ce
pas à sa pitié pour le malheur, à sa compas-
sion pour les souffrances, que je dois ce grand
amour, je dirai plus, cette profonde charité
pour la patrie; charité qui m'a valu l'affec-
tion et la sympathie de mes malheureux con-
citoyens? Je ne suis certes pas superstitieux;
cependant, j'affirmerai ceci, c'est que, dans
les circonstances les plus terribles de ma vie,
quand l'Océan rugissait sous la carène et
contre les flancs de mon vaisseau qu'il sou-
levait comme un liège; quand les boulets
sifflaient à mes oreilles comme le vent de
la tempête; quand les balles pleuvaient autour
de moi comme la grêle, je la voyais constam-
ment agenouillée, ensevelie dans sa prière,
courbée aux pieds du Très-Haut, et moi, ce
qui me donnait ce courage dont on s'est étonné
parfois, c'est la conviction qu'il ne pouvait
m'arriver aucun malheur, quand une si sainte
femme, quand un pareil ange priait pour moi.
JOSEPH GARIBALDI.
Monument national à Garibaldi, dans l'île de Caprera.
Palerme. — Pavillon du Palais royal,
habité par Garibaldi en 1860.
Alexandre Dumas père
Cabinet de travail de Dumas,
à Chiatamone.
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