Titre : Le Petit Parisien : journal quotidien du soir
Éditeur : Le Petit Parisien (Paris)
Date d'édition : 1915-09-07
Contributeur : Roujon, Jacques (1884-1971). Directeur de publication
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Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 07 septembre 1915 07 septembre 1915
Description : 1915/09/07 (Numéro 14192). 1915/09/07 (Numéro 14192).
Description : Note : Ed. de Paris. Note : Ed. de Paris.
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
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Source : Bibliothèque nationale de France, Gr Fol-Lc2-3850
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 31/07/2008
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Mardi 7 Septembre 1915.
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Le général Joffre
en Italie
Le roi Victor-Emmanuel lui remet la
grand'croix de l'Ordre militaire
de Savoie
Rome, 6 septembre.
Le général Joffre est arrivé, ces jours
derniers, au grand quartier général ita-
lien, où il a été présenté au roi Victor-
Emmanuel. Le roi d'Italie a reçu le gé-
néralissime français avec beaucoup de
cordialité et lui a remis la grand'croix
de l'Ordre militaire de Savoie.
Le générale Joffre est reSté deux jours
au grand quartier général et a visité, en
compagnie du dénéralissime Cadorna,
les positions italiennes sur la frontière.
(Officiel)
Il était attendu à Turin
par le général Porro
Rome, ti septembre.
Du Giornale d'Itaiia
« Le général Joffre est arrivé à Turin ven-
dredi dernier; il a été reçu à la gare de
Turin par le général Porro, sous-chef d'état-
major géuéral, qui l'attendait en grand uni-
forme.
Des l'arrivée du train qui amenait le gé-
néral Joffre et sa suite, le général Porro est
monté dans le train et a reçu du. général
Joffre un cordial accueil.
Le train est ensuite allé jusqu'à Milan, où
le général Joffre et le général Porro sont
descendus pour se rendre ensemble au com-
mandement suprême. »
Il fut reçu à Tldine
par le général Cadorna
(De notre correspondant particulier/
Milan, 6 septembre.
Bien avant que l'arrivée du général Joffre
eût été annoncée officiellement, la nouvelle
s'en était répandue dans les milieux de la
presse, où elle fut accueillie avec une sin-
cère satisfaction.
Le passage du généralissime français
avait été signalé, le 3 septembre au soir, à
Ha gare de Trévise, qu'il avait traversée à
l'heure où il dînait en wagon-restaurant,
dans le train spécial, en compagnie du
sous-chef d'état-major italien, général Porro.
Les personnes qui se trouvaient dans la
gare, l'ayant reconnu, lui firent une ovation.
A son arrivée à Udine, le général Joffre
fut reçu avec une affectueuse cordialité par
le général Cadorna et présenté ensuite au
roi.
Durant sa courte présence, il a visité les
parties fies plus intéressantes du front ita-
lien il fut partout l'objet de manifestations
enthousiastes et exprima sa sincère satis-
faction et son admiration en constatant les
excellents résultats acquis en dépit des for-
midables difficultés du terrain et de la lon-
gue préparation de l'ennemi.
Le cordial salut de là presse italienne
Rome, 6 septembre.
Les journaux remarquent que le gouver-
nement français, en envoyant le général
Joffre en Italie, a répondu ainsi à la visite
faite par le général Porro en France, mais
ils ajoutent que l'autorité et la situation du
général Joffre prêtent à sa visite un carac-
tère qui dépasse celui d'un simple acte de
politesse.
Comme le fait remarquer le Giornale d'Ita-
lia. le général Porro jouit de toute la consi-
dération qui est attachée au général Cador-
na, mais il possède un grade inférieur à ce-
lui du général Joffre s'il s'était agi d'un
simple échange de compliments, la visite
aurait pu être rendue par un des généraux
qui entourent le commandant suprême fran-
çais.
Au contraire, bien que sa présence fût
toujours nécessaire et précieuse, le général
Joffre a voulu non seulement affirmer la fra-
ternité des armes latine% mais très proba-
blement déterminer d'accord avec le com-
mandement italien, les moyens d'une com-
mune conduite de la guerre.
Les autres journaux italiens mettent éga-
lement en relief l'importance militaire de la
visite.
Le Giornale d'Italia conclut;
« Nous saluons le valeureux chef de l'ar-
mée française, non seulement avec le res-
pect dû au vainqueur de la bataille de la
Marne, mais encore avec l'espérance et la
confiance que les armées qui combattent
pour la liberté de l'Europe ne manqueront
pas de la cohésion, qui est la garantie du
triomphe final.
L'Idea Nazionale fait remarquer que la
venue du général Joffre est saluée par l'Ita-
lie avec un vif plaisir
« Par sa haute valeur militaire, dit ce
journal, et sa probité, le général Joffre a su
faire de l'armée française un instrument de
défense et de victoire contre la plus formida-
ble des invasions.
n Par sa foi dans les destinées finales de
la guerre, le vainqueur de la Marne doit être
salué par nous comme l'un des représen-
tants les plus qualifiés de la nouvelle France
guerrière »
La Tribuna constate que la presse salue
avec empressement l'illustre chef de l'armée
française et tire de cette visite l'espoir du
triomphe des armées alliées qui se révèlent
toujours plus unies dans la coopération et la
fraternité des armes. (Havas.)
Une lettre du généralissime
IL EST CONFIANT PLUS QUE JAMAIS
r DANS lA VICTOIRE FINALE.
Dans sa séance du août, à l'occasion de
l'anniversaire de la déclaration de guerre, le con-
seil municipal du Vésinet avait envoyé au géné-
ral Joffre et aux armées françaises, au nom des
habitants de la commune, une adresse de félici-
tations.
Le généralissime a répondu par la lettre sui-
vante adressée à M. Gustave Bouvier, maire du
Vésinet
Au grand quartier général, le 19 août 1915.
Monsieur le maire,
J'ai bien reçu l'adresse que le conseil mu-
nicipal du Vésinet '1 votée et que vos admi-
nistrés ont bien voulu signer à l'occasion de
Fanciversaire de la déclaration de guerre.
Je vous remercie, au nom de l'armée, de
ce témoignage de confiance, dont ''honneur
revient pour la plua grande partie à nos vail-
lants soldats.
Confiant plus que jamais dans la victoire
finale, je vous prie d'agréer, monsieur le
maire, l'assurance de ma parfaite considéra-
tion.
Le commandant en chef
J. JOFFRE.
COMMUNIQUÉS OFFICIELS
3 HEURES.
Au cours de la nuit, bombardement violent, de part et d'autre, par
l'artillerie de tous calibres, au nord et au sud d'Arras, de Roclincourt
à Brétencourt.
En Champagne, dans la région d'Aubérive, canonnade assez vive.
En Argonne, lutte de mines aux Courtes-Chausses.
Les combats d'artillerie se poursuivent sur tout le front.
Dans le secteur au nord d'Arras, nos batteries ont causé de gros
dommages aux tranchées allemandes.
Daris la région de Roye, en Champagne sur le front Perthes-Beauséjour,
en forêt d'Apremont et au nord de Cirey, le duel d'araillerie a été particuliè-
rement vif.
Dans les Vosges, au Schratzmaennele et à l'Hartmannswillerkopf, lutte
à coups de grosses bombes.
QUARANTE DE NOS AVIONS BOMBARDENT SARREBRUCK
Le 1er septembre, comme nous l'avons annoncé le jour même dans le
communiqué de it heures, quatre avions allemands étaient venus bombarder
Lunéville, ville ouverte, où il n'y a absolument aucune installation militaire
à détruire nos ennemis avaient poussé .le raffinement jusqu'à viser nettement
les quartiers populeux et jusqu'à choisir, pour effectuer leurs opérations, le
jour et l'heure du marché aussi les victimes, malheureusement trop nom-
breuses, furent-elles surtout des femmes et des enfants.
Par mesure de représailles, quarante de nos avions ont bombardé, ce ma-
tin, la gare, les usines et les établissements militaire* de Sarrebruck les
aviateurs ont pu apprécier que les résultats produits étaient considérables.
Nos avions ont bombardé les casernes de Dieuze et de Morhange.
Un avion allemand a été obligé d'atterrir à Calais les aviateurs sont
prisonniers.
Des avions ennemis ont lancé sur Saint-Dié quelques bombes, sans
causer ni pertes, ni dégâts.
COUP D'ŒIL
SUR L'AVENIR
La situation en Russie paraît un peu
moins bonne aujourd'hui qu'hier. Je
veux dire que le communiqué du 6 ne
vaut pas tout à fait celui du 5, car il
s'agit d'événements ayant précédé de
deux ou trois jours au moins la date que
porte chaque papier officiel.
Nos alliés ayant dû évacuer la rive
gauche de la basse Dwina et Friedrichs-
tadt étant pris, il est probable que Riga
ne pourra tenir longtemps encore, et que
l'offensive annoncée entre Wilia et
Swenta devra être interrompue. Mais du
moins, le temps qu'a fait gagner celle-ci
est acquis et, pour le moment, il n'est
pas encore question ni en Courlande ni
en basse Lithuanie, de recul véritable-
ment accentué.
Plus complexe et aussi plus obscur est
l'état des choses dans la région de Grod-
no. L'attaque allemande a dû, de ce côté,
être très vive, car on nous laisse enten-
dre d'abord que les troupes qui avaient
dessiné sur la ville même un retour of-
fensif ont failli se faire prendre enco-
re est-ce là l'interprétation la plus favo-
rable d'une phrase quelque peu énigma-
tique ensuite que l'ennemi a pu pous-
ser, vers le sud, jusqu'à Volkovysk, pres-
que sur les derrières des positions russes
du Niemen moyen. Cet incident aura be-
soin d'être éclairci.
Il ne se rapporte, toutefois, qu'à des
affaires d'arrière gardes, ce qui en dimi-
nue la valeur, quelque chose de plus im-
portant est l'offensive générale que les
Austro-Allemands omt prise sur tout le
front qui s'étend entre le chemin de fer
Kovel-Rodno et le Dniester. Elle ne pa-
raît avoir donné nulle part, jusqu'ici. de
résultats appréciables. Mais elle mérite
d'attirer l'attention parce qu'elle concor-
de avec la nouvelle, venue de Genève,
que les Tudesques auraient reporté vers
le sud le centre de gravité de leurs atta-
ques, voulant à tout prix s'ouvrir la rou-
On parle d'une masse de 1.500.000
hommes, qui aurait été concentrée en Ga-
licie, après prélèvement sur les armées
du Centre. Ce fait n'a rien d'impossible,
pour cette double raison qu'entre Bielos-
tok et le Pripet, les difficultés de terrain
sont presque insurmontables et que les
plantureuses contrées de la Russie méri-
dionale doivent fatalement attirer des ar-
mées qui ont maintenant beaucoup de
peine à subsister. Je ne parle que pour
mémoire des projets plus ou moins fan-
taisistes et plus ou moins réels, qu'a-
vait formés le kaiser d'aller, par Odes-
sa, donner la main aux Turcs.
Les Russes seront-ils en état de briser
ce nouvel assaut, si vraiment il doit se
produire? Je n'en sais rien. Mais ils peu-
vent très certainement, en restant fidèles
à leur méthode habituelle, l'empêcher
d'être foudroyant, et, bien que la défense
pied à pied soit plus difficile en Podolie
que dans les massifs dé la forêt de Bie-
loviéje ou les marécages de Pinsk, retar-
il HEURES.
der assez l'avance allemande pour que
celle-ci n'ait pas atteint son but avant les
frimas. Nos amis ont su précédemment
échapper à des dangers bien autrement
sérieux que celui-là.
Quant au kaiser, je me demande s'il
a eu connaissance des. apophtegmes que
von der Goltz pacha, le pontife, l'oracle,
le voyant, comme l'appellent ses disci-
ples, a déversés dans les colonnes d'une
revue que cite littéralement l'Informa-
lion. Ils. ont dû, dans ce cas, lui faire
l'effet d'une douche, car il n'en est pas
un qui ne se retourne contre les empires
actuellement soumis à son impériale vo-
lonté.
En voici quelques-uns qui suffiront à
montrer le peu de confiance que le fa-
meux muchir garde dans l'avenir
1° Celui des belligérants qui pourra
soutenir le plus longtemps la lutte aura
un incontestable avantage, même si une
grande partie de son territoire est occu-
pée
2° Les Etats homogènes, à population
peu dense, comme la Russie, souffrent
beaucoup moins des conséquences de la
guerre que ceux qui, moins étendus, com-
portent des nationalités diverses, et sont,
pour l'alimentation, tributaires de l'é-
tranger
3° La maîtrise de la mer est le facteur
le plus essentiel du suc$ès final.
Nous savions tout cela, et que, sous le
triple rapport envisagé, Ifes nations aux-
quelles nous faisons la guerre étaient les
moins bien partagées. Mais il n'est pas
mauvais qu'un Allemand le reconnaisse,
et que cet Allemand s'appelle von der
Goltz.
Lieutenant-colonel ROUSSET.
IL Y AJUJV ATM
CAPITULATION DE MAUBEUGE
7 seftembre 1914. Malgré des contre-atta-
ques ennemies continuelles, auxquelles pren-
nent part d'importantes forces de réserve, la
armée progresse. Au cours de la journée, par
suite de l'initiative du général Galliéni, la plus
grande partie de la 7° division est transportée à
Nanteuil dans des taxi-autos réquisitionnés à
Paris. Les rapports recueillis de divers côtés
signalent un commencement de repli des trou-
pes allemandes. L'offensive française est géné-
rale depuis l'Ourcq jusqu'à Verdun.
Le soldat Guillemard, du d'infanterie,
s'empare du drapeau du 361 régiment d'infan-
terie de Magdebourg, décoré de la croix de fer
en après avoir transpercé de sa baïon-
nette le porte-drapeau. Il reçoit la médaille mi-
litaire et la croix d'honneur est conférée au
drapeau du 2980.
Maubeuge capitule après douze jours de
bombardement. Tous les forts ont été détruits.
Deux seulement étaient munis de coupoles, que
les projectiles de 42o réduisirent vite en pous-
sière. Deux mille hommes de la garnison envi-
ron parvinrent à s'échapper, à travers les li-
gnes allemandes.
Près de Lemberg, les Russes détruisent deux
divisions autrichiennes, anéantissent une au-
tre armée près de Lublin, occupent Nicolaieff,
dont ils avaient pris les fortifications précédem-
ment, font des prisonniers en grand nombre et
s'emparent d'un matériel de guerre considé-
rable. ;̃ !̃; r
CE QUE RUDYARD KIPLING
le grand écrivain anglais
a vu en France
jDs notre correspondant particulier)
Londres, 6 septembre.
On sait que Rudyard Kipling, le célèbre
romancier et poète anglais, s'est dernière-
ment rendu en France où, grâce à l'ama-
bilité des autorités militaires, il a pu visi-
ter à son gré tout le front de bataille occi-
dentale, qui s'étend de la mer aux Vosges.
Le Daily Telegraph publie aujourd'hui la
première partie du récit des impressions que
l'illustré écrivain a rapportées de son court
séjour dans notre pays. Nous allons en don-
ner quelques extraits. Parlant de la visite
faite à un cantonnement de l'arrière,
Rudyard Kipling fait l'éloge de la facilité
avec laquelle le soldat français sait se dé-
brouiller » et tirer le meilleur parti de tout
ce qu'il a à sa disposition..
« Les troupes que nous voyions, dit-il,
étaient au repos dans une ligne d'excava-
tion qui, apçès avoir été des carrières,
avaient été aménagées par l'armée pour ses
propres besoins. Il s'y trouvait des corri-
dors, des antichambres, des rotondes et des
tuyaux de ventilation, le tout souterrain et
merveilleusement éclairé, de sorte que,
où tous les regards se portassent, on
croyait voir des hommes d'armes comme
ceux figurant sur les tableaux de Goya. La
mort et les blessures viennent d'elles-mê-
mes mais, s'agit-il de se coucher sur quel-
que chose de sec, de dormir confortable-
ment et de se tenir propre, tout cela consti-
tue un art et, en toutes choses, le Français
est un artiste dans toute la force du mot.
Il faut dire aussi que les officiers français
traitent leurs hommes fraternellement, et
ceux-ci se montrent un peu comme des frè-
res à leur égard. Et ces soldats, ainsi que
les soldats anglais, sont depuis des mois
dans une fournaise. Un officier m'a dit « La
moitié de nos ordres n'ont point besoin d'ê-
tre donnés, l'expérience nous fuit avoir la
même pensée. » Ce qui m'a le plus impres-
sionné dans les soldats français, c'est leur
brillante santé, leur vitalité et la qualité de
leur éducation.
On continue à travailler dans les champs
Nous voulions voir une ville qui vécut
sous les obus. La route ordinaire qui con-
duit à une localité de ce genre était, nous
dit-on, peu favorable à la santé mais les
femmes et les enfants semblaient ne s'en
soucier nullement. Nous prîmes des che-
mins de traverse. Des trous creusés' par
les shrapnels y étaient assez nombreux
mais les femmes, les enfants et les vieil-
lards continuaient à s'occuper du bétail et
des récoltes. Et dire qu'à une certaine épo-
que j'avais l'habitude de médire de la jeu-
nesse française sous prétexte qu'elle es-
sayait de se suicider sous les roues de
mon automobile, des vieilles femmes parce
qu'elles traversaient les routes sans tenir
compte de mon voisinage et des vieillards
sSurds parce qu'ils dormaient tranquille-
ment dans des charrettes tenant le mauvais
côté du chemin 1 Maintenant, je saluerais
bien bas chacune de ces personnes, mais on
ne peut guère traverser nu-tête tout un
pays.
Dans une ville détruite
Un quart de la place a été bombardé et
détruit, à tel point que les débris en jon-
chent le sol les façades des maisons sont
dépourvues de toit, de porte, de fenêtres,
ressemblant à des décors de théâtre. C'était
près de la cathédrale, sur laquelle les enne-
mis s'acharnent avec une particulière féro-
cité. Tout à coup, je crus entendre un
chant, ce chant que l'on entend dans les
villes-cauchemars, chant de voix provenant
de sous la terre
Dans la cathédrale
Cest absurde, me dit un officier. Pour-
quoi chanterait-on ici ?
Nous refîmes le tour de la cathédrale.
Eh bien on chantait réellement derrière
une petite porte située sur un des côtés de
l'édifice. Nous jetâmes un coup d'oeil der-
rière cette porte et nous vlmcs une centaine
de personnes, des femmes pour la plupart,
agenouillées devant l'autel d'une chapelle
à peu près intacte. Nous quittâmes lente-
ment le saint lieu, et les yeux des officiers
français ne furent pas les seuls à se rem-
plir de larmes.
Devant sa vieille mère
Voici une délicieuse et touchante histoire,
qui ressemble à un joli conte, 'mais dont
nous pouvons garantir l'authenticité.
Le général. (ne le nommons pas, ce se-
rait trop grave 1) devait remettre la croix
d'honneur à quelques-uns de ses valeureux
soldats. Parmi eux se trouvait un adjudant
qui, à la suite de ses blessures, avait été
amputé,d'un bras.
Lorsqu'il apprit que sa décoration lui se-
rait remise par le général de. ah pardon,
nous allions dire le nom devant toutes
les troupes du cantonnement, le brave
soldat s'écria
Ah si ma pauvre vieille mère pouvait
voir ça!
Quelqu'un se trouvait là qui entendit l'ad-
judant exprimer ce souhait et qui s'en fit
l'écho près du général. Le général ne bron-
cha pas. Il 3st de ces tendres qui ont le mas-
que froid. Mais quand vint le grand jour, la
bonne vieille maman, grâce à lui, était là,
dissimulée derrière le porte-drapeau, mas-
quée par quelques officiers, et quand, après
avoir attaché la croix d'honneur sur la poi-
trine du vaillant sous-officier, le général
l'embrassa, le drapeau s'écarta et la mère,
fière et sanglotante, ouvrit ses bras pour
serrer son fils sur son cœur.
Ce fut une minute de magnifique émotion
les larmes coulaient sur les visages de ces
hommes habitués à braver tous les dan-
Le général. (Chut!) est adoré d'eux: il
leur demande parfois des efforts surhu-
mains mais il n'en est aucun qui ne se fe-
rait tuer pour recueillir le regard approba-
teur de celui qui sait leur parler, les com-
mander, leur faire plaisir et partager leurs
périls, leurs peines et leurs joies.
Le nouvel ambassadeur du Japon
On sait que le baron Ishii, ambassadeur
du Japon en France, est parti pour Tokio,
car il est le ministre des Affaires étrangères
du nouveau cabinet.
Nous croyons savoir que son successeur
à Paris sera NI. Matsui, ancien conseiller de
l'ambassade japonaise en France, et actuel-
lement secrétaire général du ministère des
Affaires étrangères
RETOUR D'ALLEMAGNE
hES IMPRESSIONS
de Mme Carton de Wiart
(DE NOTRE ENVOYÉ SPÉCIAL)
Bale, 6 septembre,.
J'ai l'honneur d'avoir été l'un des premiers
à souhaiter la bienvenue à Mme Carton de
Wiart à son arrivée en Suisse, après la dure
captivité que les Allemands avaient infligée
à cette héroïque et admirable femme.
Ignorant par quelle gare sa femme entre-
rait en Suisse, M. Carton de Wiart s'était
décidé à l'attendre à Baie mais, en réalité,
Mme Carton de Wiart avait été conduite à
la frontière suisse, à Siiigen, par les offi-
ciers allemands qui lui avaient été donnés
comme escorte. De Singen à Schaffouse,
Mme Carton de Wiart prit le train pour Baie,
où elle arrivait dimanche après midi. Elle a
eu la joie d'y retrouver, outre son mari, sa
fille aînée, la seule de ses cinq enfants qui
ait quitté Bruxelles.
C est donc au milieu de la plus touchante
et la plus heureuse réunion de famille que
je suis arrivé ce matin.
Les lecteurs du Petit Parisien connaissent
le ministre belge de la Justice. Ils connais-
sent moins Mme Carton dç Wiart. On est
immédiatement conquis par son naturel,
pa vivacité, la résolution qui se dégage
de toute sa personne, plutôt menue, mais
qui donne cependant une impression de
vigueur et de santé. Des yeux gris très
francs, une physionomie enjouée, une façon
de venir au-devant de vous qui est la sim-
plicité même et qui vous met à l'aise.
M™1 Carton de Wiart
n'a été l'objet d'aucune faveur
Je lui dis immédiatement toute l'admira-
tion que les femmes du monde entier ont
pour elle, pour la façon dont elle a accom-
pli son devoir et dont elle a supporté de si
multiples tortures morales
Mais il n'y a rien eu là d'étonnant, me
rfvoijd-tilc. loul ceci est très simple.
Voyez-vous, ce qui importe, ce n'est pus la
manière dont on vit, mais de savoir pour-
quoi on vit. Quand on sait pourquoi on vit,
tout le reste n'est rien.
Ce que j'ai fait, je ne pouvais pag le faire
autrement, et les Allemands l'ont bien com-
pris, car si j'étais retournée à Bruxelles,
ma vie n'eùt été modifiée en rien. J'aurais
repris mon activité comme par le passé.
bfais vous sarez, à c? propos, que c'est une
véritable peine de bannissement qui a été
prononcez contre moi, et cela par simple
décision administrative, sans aucun juge-
ment.
Et M. Carton de Viart me donne quel-
ques détails qui précisent tout l'odieux de la
nouvelle mesure prise contre Mme Carton
de Wiart.
-Très chevalerasquement, l'ambassadeur
d'Espagne qui s'est chargé des intérêts des
Belges en Allemagne, est intervenu à plu-
sieurs reprises pour obtenir une améliora-
tion du sort de Mme Carton de Wiart, mais
en réalité ce n'est qu'à l'expiration de la
peine prononcée à Bruxelles contre elle,
qu'elle a été libérée, soit le 3 septembre. Il
n'y a donc eu aucun acte de courtoisie spé-
ciale du gouvernement allemand à son
égard, au contraire celui-ci a singulièrement
aggravé la situation de Mme Carton de
Wiart en décidant qu'elle ne pouvait pas ren-
trer en Belgique. C'est, en effet, le bannis-
sement, ni plus ni moins; et cela, rien ne
pouvait le justifier.
En prison
Mme Carton de Wiart passa en jugement
et fut condamnée, comme vous ne l'ignorez
pas, à trois mois et demi de prison. Elle
fut assimilée aux prisonniers de droit com-
mun, avec le régime strictement alimentaire,
et cela dans une prison ordinaire. Pour se
promener, elle n'avait qu'un préau extrême-
ment exigu comme régime alimentaire,
celui des prisons, des soupes surtout, appor-
tées dans un ustensile quelconque, une sou-
pière de terre.
Par contre, les Allemands ne manquè-
rent pas de donner son titre d'Excellence à
Mme Carton de Wiart c'était Son Excel-
lence » par-ci, « Son Excellence » par-la.
C'est maintenant Mme de Wiart qui nous
donne des détails sur son internement
J'ai passé à peu près tout mon temps
à écrire. J'ai fait des traductions de l'an-
glais afj'ai écrit de plus, j'ai pu emporter
tout mon travail.
Avez-vous été au moins autorisés à re-
cevoir des visites ?
Je n'ai reçu que-celle de l'ambassadeur
d'Espagne, mais la conversation n'avait lieu
qu'en présence d'officiers allemands.
Et queUe impression rapportez-vous
de l'Allemagne ?
J'ai été tenue au secret, il me serait
donc difficile de vous fin dire quelque chose.
Telle est la réponse de Mme Carton de
Wiart., mais M. Carton de Wiart insiste tout
particulièrement sur l'attitude des officiers
allemands qui ont accompagné Mme Carton
de Wiart jusqu'à la frontière suisse.
Ils ne cessaient, me dit-il, de. faire va-
(loir la puissance de l'Allemagne, sa force,
combien elle était redoutable, mais c'était
pour insinuer aussitôt que le moment serait.
bon pour les alliés de faire la paix. L'Alle-
magne me rappelle ce soldat qui criait à
son général « Mon général j'ai fait deux
prisonniers. Et bien, amenez-les-moi
Je ne puis, mon général, ils ne me baissent
pas avancer.
Les alliés tiennent l'Allemagne celle-ci
ne demanderait pas mieux que de faire la
paix. On peut constater ces sentiments-là
dans tout le pays, mais ce sont les alliés
qui ne veulent pas de la paix ils ne sau-
raient la faire actuellement. »
Les derniers mots de Mme Carton de
Wiart sont pour remercier la Suisse des
égarjs qu'elle a eus pour elle depuis son
entrée sur le territoire helvétique.
BAUTY.
GODENT FURENT SAPÉS
les passagers Je^r«Hesperian»
LE BATIMENT A COULÉ
(De notre correspondanl particulicr)
Londres, 6 septembre.
Le paquebot Hesperian, qu'on avait es-
péré sauver, est perdu. Il a coulé ce matin,,
à 6 heures 47, tandis que des remorqueurs
le ramenaient lentement vers Queenstown,
pour le remettre en cale sèche, où il eût ré-
paré ses avaries. Tous les efforts faits par
le capitaine et par une partie de l'équipage
restée à bord pour empêcher l'eau de ga-
gner ont été vains. La déchirure provoquée
à l'avant du navire était trop importante.,
Quand la catastrophe lui parut inévitable,
le capitaine Maine prévint les remorqueurs
qui recueillirent les marins demeures sur
l'épave. 'Le capitaine, dont le calme et la
présence d'esprit tirent l'admiration géné-
rate, quitta Y Hesperian le dernier.
On a dit que personne n'avait vu le sous-
marin qui torpilla le paquebot. C'est là une
assertion inexacte. Le pirate fut aperçu à
une certaine distance, malgré l'obscurité,
par l'homme de vigie qui, aussitôt, en in-
forma le captaine. Celui-ci était à son poste
sur la dunette. Il était malheureusement
trop lard et, avant qu'aucune manœuvre
eût pu être tentée, la torpille atteignait le
navire.
L'absence de victimes est due unique-
ment au fait que le commandant du sous-
marin calcula mal la vitesse de Y Hesperian
et que la torpille, au lieu de frapper en
plein milieu le bateau, l'atteignit à l'avant,
n'endommageant pas la chambre des ma-
chines, ce qui permit de conserver de la
lumière à bord et d'envoyer tous les signaux
de détresse. Sans cette heureuse circons-
tance, le navire eût coulé aussi rapidement
que le Lusitania et Y Arabie, avant que les
secours eussent pu arriver.
L' Hesperian avait à bord trois mille sacs
de dépêches qui ont coulé avec lui.
Y AVAIT-IL DES AMÉRICAINS A BORD ?
Londres, 6 septembre.
Les journaux de ce matin ne sont pas
d'accord sur le nombre des passagers et des
marins de Y Hesperian.
Les uns portent il ̃£& le nombre des pre-
miers et à 300 celui des seconds, tandis que,
d'après d'autres, les voyageurs n'auraient
été qu'au nombre d'environ 300 et que l'é-
quipage n'aurait, pas atteint le chiffre indi-
qué plus haut.
Le même désaccord règne sur la question
de savoir si Y Hesperian avait des Améri-
cains à bord. Le Times prétend que l'équi-
page comprenait deux citoyens américains,'
dont i1 donne les noms d'un autre côté, le
consulat d'Amérique à Queenstown annonce
qu'il n'a pas trouvé trace d'Américains par-
mi les passagers.
L'EXPLICATION INSIDIEUSE
DE L'AMBASSADE ALLEMANDE
Washington, 6 septembre.
Un attaché de l'ambassade d'Allemagne,
dans le but d'excussrje torpillage de l' Hes-
penan, suggère avec impujence'que le com-
mandant du sous-marin ignorait la nouvelle
politique allemande, pas été en
mesure de communiquer avec l'Amirauté.
(Information.)
l'EMBARRAS DE BERLIN
Amsterdam, 6 septembre.
Un télégramme officieux de Berlin déclare,
au sujet de la destruction de Y Hesperian,
que l'on doit. attendre des détails pour sa-
voir si vraiment le paquebot -a été torpillé
et, si oui, des détails sur les circonstances
qui ont pu conduire à cette action.
UN DUEL
à 3.000 mètres,
(DE N'OTRE ENVOYÉ SPÉCIAL)
Front central italien, septembre.
J'ai pu assister à un des épisodes les plus
intéressants, les plus instructifs aussi de la
guerre de montagnes.
Avec deux de mes confrères, j'avais
atteint, au bout de trois heures de marche
dans le massif de la un campement
d'infanterie et d'artillerie, à seize cents
mètres d'altitude. Nous déjeunions avec les
officiers, lorsqu'on vint dire quelques morts
à l'oreille du colonel commandant le déta-
chement Il donna rapidement, à mi-voix,
quelques ordres, puis, se retournant vers
nous
Messieurs, fit-il, si vous ne craignez
pas d'ajouter à votre fatigue de ce matin
trois nouvelles heures de montée, sous le
soleiL je crois qu'un spectacle curieux vous
attendra sur nos hautes positiona
Il nous expliqua que les batteries autri-
chiennes situées sur une cime voisine avaient
bombardé les tranchées que ses soldats
étaient en train de creuser à trois cents
mètres de l'ennemi, sous les mitrailleuses
de celui-ci qu'on le prévenait qu'il y avait
deux blessés et que, pour permettre aux
brancardiers d'aller les chercher, il faisait
ouvrir le feu sur les positions occupées par
l'adversaire. Celui-ci ne manquerait pas de
riposter et ainsi nous pourrions voir ce que
les communiqués appellent « un duel d'ar-
tillerie u.
De plus, ajouta-t-il, on m'a signalé sur
un point l'existence d'une nouvelle batterie
ennemie. Elle me paraît exactement repérée.
Nous allons essaver de la démolir.
Vous devinez notre impatience. Dix minu-
tes après, nous commencions à gravir les
rudes pentes de la montagne. C'était dur,
surtout après un bon déjeuner mais un
encouragement nous vint, presque tout de
suite. Une sourde détonation s'entendit au
loin. Un sifflement bizarre traversa l'espace
et, dans un fracas de pierres éboulées, un
obus, passant sur nos têtes, frappa le rocher
en face de nous.
A la bonne heure fit gaiement notre
guide, le charmant capitaine X. Ils tirent
sur nous. Ne craignez rien, d'ailleurs Ces
gens-là sont d'une maladresse Et puis,
tenez, nous répondons.
En effet, un « pan » formidable éclatait
à nos pieds, sur la droite. Le duel s'enga-
geait. Si escarpé que fût le sentier, tour à
tour friable et caillouteux, nous commen.
cions à être pris par le spectacle. D'ailleurs,
cette grimpée sous les obus s'annonçait si
originale Des deux côtés, les coups main-
tenant se succédaient comme les réponses
d'un dialogue tragique. Un « boôme »
accompagnait le départ du projectile autri-
chien. Son bzz. bzz. bzz. déchirait
l'air, et un « clac », suivi d'un nuage de
fumée, indiquait l'endroit frappé. Le bruit
Seine et seine-et-01»
Taon Mois i tr.
Sa Mo». tir.
Dm a*. ti fr.
Départements et Caloalea
flou Mon. • m
Six M"" i i 11 fr.
non Mtti • tr.
Six M"m « A*.
un fb
5 «tins Le plus fort tirage des journaux du monde entier 5 centra»
Mardi 7 Septembre 1915.
IS-18. raa
= à L'orna D'ANifONaa a
M, plu» de Y Boum, 10, Pnii CM
•ti.tr mon* «stimiu i OM
Le général Joffre
en Italie
Le roi Victor-Emmanuel lui remet la
grand'croix de l'Ordre militaire
de Savoie
Rome, 6 septembre.
Le général Joffre est arrivé, ces jours
derniers, au grand quartier général ita-
lien, où il a été présenté au roi Victor-
Emmanuel. Le roi d'Italie a reçu le gé-
néralissime français avec beaucoup de
cordialité et lui a remis la grand'croix
de l'Ordre militaire de Savoie.
Le générale Joffre est reSté deux jours
au grand quartier général et a visité, en
compagnie du dénéralissime Cadorna,
les positions italiennes sur la frontière.
(Officiel)
Il était attendu à Turin
par le général Porro
Rome, ti septembre.
Du Giornale d'Itaiia
« Le général Joffre est arrivé à Turin ven-
dredi dernier; il a été reçu à la gare de
Turin par le général Porro, sous-chef d'état-
major géuéral, qui l'attendait en grand uni-
forme.
Des l'arrivée du train qui amenait le gé-
néral Joffre et sa suite, le général Porro est
monté dans le train et a reçu du. général
Joffre un cordial accueil.
Le train est ensuite allé jusqu'à Milan, où
le général Joffre et le général Porro sont
descendus pour se rendre ensemble au com-
mandement suprême. »
Il fut reçu à Tldine
par le général Cadorna
(De notre correspondant particulier/
Milan, 6 septembre.
Bien avant que l'arrivée du général Joffre
eût été annoncée officiellement, la nouvelle
s'en était répandue dans les milieux de la
presse, où elle fut accueillie avec une sin-
cère satisfaction.
Le passage du généralissime français
avait été signalé, le 3 septembre au soir, à
Ha gare de Trévise, qu'il avait traversée à
l'heure où il dînait en wagon-restaurant,
dans le train spécial, en compagnie du
sous-chef d'état-major italien, général Porro.
Les personnes qui se trouvaient dans la
gare, l'ayant reconnu, lui firent une ovation.
A son arrivée à Udine, le général Joffre
fut reçu avec une affectueuse cordialité par
le général Cadorna et présenté ensuite au
roi.
Durant sa courte présence, il a visité les
parties fies plus intéressantes du front ita-
lien il fut partout l'objet de manifestations
enthousiastes et exprima sa sincère satis-
faction et son admiration en constatant les
excellents résultats acquis en dépit des for-
midables difficultés du terrain et de la lon-
gue préparation de l'ennemi.
Le cordial salut de là presse italienne
Rome, 6 septembre.
Les journaux remarquent que le gouver-
nement français, en envoyant le général
Joffre en Italie, a répondu ainsi à la visite
faite par le général Porro en France, mais
ils ajoutent que l'autorité et la situation du
général Joffre prêtent à sa visite un carac-
tère qui dépasse celui d'un simple acte de
politesse.
Comme le fait remarquer le Giornale d'Ita-
lia. le général Porro jouit de toute la consi-
dération qui est attachée au général Cador-
na, mais il possède un grade inférieur à ce-
lui du général Joffre s'il s'était agi d'un
simple échange de compliments, la visite
aurait pu être rendue par un des généraux
qui entourent le commandant suprême fran-
çais.
Au contraire, bien que sa présence fût
toujours nécessaire et précieuse, le général
Joffre a voulu non seulement affirmer la fra-
ternité des armes latine% mais très proba-
blement déterminer d'accord avec le com-
mandement italien, les moyens d'une com-
mune conduite de la guerre.
Les autres journaux italiens mettent éga-
lement en relief l'importance militaire de la
visite.
Le Giornale d'Italia conclut;
« Nous saluons le valeureux chef de l'ar-
mée française, non seulement avec le res-
pect dû au vainqueur de la bataille de la
Marne, mais encore avec l'espérance et la
confiance que les armées qui combattent
pour la liberté de l'Europe ne manqueront
pas de la cohésion, qui est la garantie du
triomphe final.
L'Idea Nazionale fait remarquer que la
venue du général Joffre est saluée par l'Ita-
lie avec un vif plaisir
« Par sa haute valeur militaire, dit ce
journal, et sa probité, le général Joffre a su
faire de l'armée française un instrument de
défense et de victoire contre la plus formida-
ble des invasions.
n Par sa foi dans les destinées finales de
la guerre, le vainqueur de la Marne doit être
salué par nous comme l'un des représen-
tants les plus qualifiés de la nouvelle France
guerrière »
La Tribuna constate que la presse salue
avec empressement l'illustre chef de l'armée
française et tire de cette visite l'espoir du
triomphe des armées alliées qui se révèlent
toujours plus unies dans la coopération et la
fraternité des armes. (Havas.)
Une lettre du généralissime
IL EST CONFIANT PLUS QUE JAMAIS
r DANS lA VICTOIRE FINALE.
Dans sa séance du août, à l'occasion de
l'anniversaire de la déclaration de guerre, le con-
seil municipal du Vésinet avait envoyé au géné-
ral Joffre et aux armées françaises, au nom des
habitants de la commune, une adresse de félici-
tations.
Le généralissime a répondu par la lettre sui-
vante adressée à M. Gustave Bouvier, maire du
Vésinet
Au grand quartier général, le 19 août 1915.
Monsieur le maire,
J'ai bien reçu l'adresse que le conseil mu-
nicipal du Vésinet '1 votée et que vos admi-
nistrés ont bien voulu signer à l'occasion de
Fanciversaire de la déclaration de guerre.
Je vous remercie, au nom de l'armée, de
ce témoignage de confiance, dont ''honneur
revient pour la plua grande partie à nos vail-
lants soldats.
Confiant plus que jamais dans la victoire
finale, je vous prie d'agréer, monsieur le
maire, l'assurance de ma parfaite considéra-
tion.
Le commandant en chef
J. JOFFRE.
COMMUNIQUÉS OFFICIELS
3 HEURES.
Au cours de la nuit, bombardement violent, de part et d'autre, par
l'artillerie de tous calibres, au nord et au sud d'Arras, de Roclincourt
à Brétencourt.
En Champagne, dans la région d'Aubérive, canonnade assez vive.
En Argonne, lutte de mines aux Courtes-Chausses.
Les combats d'artillerie se poursuivent sur tout le front.
Dans le secteur au nord d'Arras, nos batteries ont causé de gros
dommages aux tranchées allemandes.
Daris la région de Roye, en Champagne sur le front Perthes-Beauséjour,
en forêt d'Apremont et au nord de Cirey, le duel d'araillerie a été particuliè-
rement vif.
Dans les Vosges, au Schratzmaennele et à l'Hartmannswillerkopf, lutte
à coups de grosses bombes.
QUARANTE DE NOS AVIONS BOMBARDENT SARREBRUCK
Le 1er septembre, comme nous l'avons annoncé le jour même dans le
communiqué de it heures, quatre avions allemands étaient venus bombarder
Lunéville, ville ouverte, où il n'y a absolument aucune installation militaire
à détruire nos ennemis avaient poussé .le raffinement jusqu'à viser nettement
les quartiers populeux et jusqu'à choisir, pour effectuer leurs opérations, le
jour et l'heure du marché aussi les victimes, malheureusement trop nom-
breuses, furent-elles surtout des femmes et des enfants.
Par mesure de représailles, quarante de nos avions ont bombardé, ce ma-
tin, la gare, les usines et les établissements militaire* de Sarrebruck les
aviateurs ont pu apprécier que les résultats produits étaient considérables.
Nos avions ont bombardé les casernes de Dieuze et de Morhange.
Un avion allemand a été obligé d'atterrir à Calais les aviateurs sont
prisonniers.
Des avions ennemis ont lancé sur Saint-Dié quelques bombes, sans
causer ni pertes, ni dégâts.
COUP D'ŒIL
SUR L'AVENIR
La situation en Russie paraît un peu
moins bonne aujourd'hui qu'hier. Je
veux dire que le communiqué du 6 ne
vaut pas tout à fait celui du 5, car il
s'agit d'événements ayant précédé de
deux ou trois jours au moins la date que
porte chaque papier officiel.
Nos alliés ayant dû évacuer la rive
gauche de la basse Dwina et Friedrichs-
tadt étant pris, il est probable que Riga
ne pourra tenir longtemps encore, et que
l'offensive annoncée entre Wilia et
Swenta devra être interrompue. Mais du
moins, le temps qu'a fait gagner celle-ci
est acquis et, pour le moment, il n'est
pas encore question ni en Courlande ni
en basse Lithuanie, de recul véritable-
ment accentué.
Plus complexe et aussi plus obscur est
l'état des choses dans la région de Grod-
no. L'attaque allemande a dû, de ce côté,
être très vive, car on nous laisse enten-
dre d'abord que les troupes qui avaient
dessiné sur la ville même un retour of-
fensif ont failli se faire prendre enco-
re est-ce là l'interprétation la plus favo-
rable d'une phrase quelque peu énigma-
tique ensuite que l'ennemi a pu pous-
ser, vers le sud, jusqu'à Volkovysk, pres-
que sur les derrières des positions russes
du Niemen moyen. Cet incident aura be-
soin d'être éclairci.
Il ne se rapporte, toutefois, qu'à des
affaires d'arrière gardes, ce qui en dimi-
nue la valeur, quelque chose de plus im-
portant est l'offensive générale que les
Austro-Allemands omt prise sur tout le
front qui s'étend entre le chemin de fer
Kovel-Rodno et le Dniester. Elle ne pa-
raît avoir donné nulle part, jusqu'ici. de
résultats appréciables. Mais elle mérite
d'attirer l'attention parce qu'elle concor-
de avec la nouvelle, venue de Genève,
que les Tudesques auraient reporté vers
le sud le centre de gravité de leurs atta-
ques, voulant à tout prix s'ouvrir la rou-
On parle d'une masse de 1.500.000
hommes, qui aurait été concentrée en Ga-
licie, après prélèvement sur les armées
du Centre. Ce fait n'a rien d'impossible,
pour cette double raison qu'entre Bielos-
tok et le Pripet, les difficultés de terrain
sont presque insurmontables et que les
plantureuses contrées de la Russie méri-
dionale doivent fatalement attirer des ar-
mées qui ont maintenant beaucoup de
peine à subsister. Je ne parle que pour
mémoire des projets plus ou moins fan-
taisistes et plus ou moins réels, qu'a-
vait formés le kaiser d'aller, par Odes-
sa, donner la main aux Turcs.
Les Russes seront-ils en état de briser
ce nouvel assaut, si vraiment il doit se
produire? Je n'en sais rien. Mais ils peu-
vent très certainement, en restant fidèles
à leur méthode habituelle, l'empêcher
d'être foudroyant, et, bien que la défense
pied à pied soit plus difficile en Podolie
que dans les massifs dé la forêt de Bie-
loviéje ou les marécages de Pinsk, retar-
il HEURES.
der assez l'avance allemande pour que
celle-ci n'ait pas atteint son but avant les
frimas. Nos amis ont su précédemment
échapper à des dangers bien autrement
sérieux que celui-là.
Quant au kaiser, je me demande s'il
a eu connaissance des. apophtegmes que
von der Goltz pacha, le pontife, l'oracle,
le voyant, comme l'appellent ses disci-
ples, a déversés dans les colonnes d'une
revue que cite littéralement l'Informa-
lion. Ils. ont dû, dans ce cas, lui faire
l'effet d'une douche, car il n'en est pas
un qui ne se retourne contre les empires
actuellement soumis à son impériale vo-
lonté.
En voici quelques-uns qui suffiront à
montrer le peu de confiance que le fa-
meux muchir garde dans l'avenir
1° Celui des belligérants qui pourra
soutenir le plus longtemps la lutte aura
un incontestable avantage, même si une
grande partie de son territoire est occu-
pée
2° Les Etats homogènes, à population
peu dense, comme la Russie, souffrent
beaucoup moins des conséquences de la
guerre que ceux qui, moins étendus, com-
portent des nationalités diverses, et sont,
pour l'alimentation, tributaires de l'é-
tranger
3° La maîtrise de la mer est le facteur
le plus essentiel du suc$ès final.
Nous savions tout cela, et que, sous le
triple rapport envisagé, Ifes nations aux-
quelles nous faisons la guerre étaient les
moins bien partagées. Mais il n'est pas
mauvais qu'un Allemand le reconnaisse,
et que cet Allemand s'appelle von der
Goltz.
Lieutenant-colonel ROUSSET.
IL Y AJUJV ATM
CAPITULATION DE MAUBEUGE
7 seftembre 1914. Malgré des contre-atta-
ques ennemies continuelles, auxquelles pren-
nent part d'importantes forces de réserve, la
armée progresse. Au cours de la journée, par
suite de l'initiative du général Galliéni, la plus
grande partie de la 7° division est transportée à
Nanteuil dans des taxi-autos réquisitionnés à
Paris. Les rapports recueillis de divers côtés
signalent un commencement de repli des trou-
pes allemandes. L'offensive française est géné-
rale depuis l'Ourcq jusqu'à Verdun.
Le soldat Guillemard, du d'infanterie,
s'empare du drapeau du 361 régiment d'infan-
terie de Magdebourg, décoré de la croix de fer
en après avoir transpercé de sa baïon-
nette le porte-drapeau. Il reçoit la médaille mi-
litaire et la croix d'honneur est conférée au
drapeau du 2980.
Maubeuge capitule après douze jours de
bombardement. Tous les forts ont été détruits.
Deux seulement étaient munis de coupoles, que
les projectiles de 42o réduisirent vite en pous-
sière. Deux mille hommes de la garnison envi-
ron parvinrent à s'échapper, à travers les li-
gnes allemandes.
Près de Lemberg, les Russes détruisent deux
divisions autrichiennes, anéantissent une au-
tre armée près de Lublin, occupent Nicolaieff,
dont ils avaient pris les fortifications précédem-
ment, font des prisonniers en grand nombre et
s'emparent d'un matériel de guerre considé-
rable. ;̃ !̃; r
CE QUE RUDYARD KIPLING
le grand écrivain anglais
a vu en France
jDs notre correspondant particulier)
Londres, 6 septembre.
On sait que Rudyard Kipling, le célèbre
romancier et poète anglais, s'est dernière-
ment rendu en France où, grâce à l'ama-
bilité des autorités militaires, il a pu visi-
ter à son gré tout le front de bataille occi-
dentale, qui s'étend de la mer aux Vosges.
Le Daily Telegraph publie aujourd'hui la
première partie du récit des impressions que
l'illustré écrivain a rapportées de son court
séjour dans notre pays. Nous allons en don-
ner quelques extraits. Parlant de la visite
faite à un cantonnement de l'arrière,
Rudyard Kipling fait l'éloge de la facilité
avec laquelle le soldat français sait se dé-
brouiller » et tirer le meilleur parti de tout
ce qu'il a à sa disposition..
« Les troupes que nous voyions, dit-il,
étaient au repos dans une ligne d'excava-
tion qui, apçès avoir été des carrières,
avaient été aménagées par l'armée pour ses
propres besoins. Il s'y trouvait des corri-
dors, des antichambres, des rotondes et des
tuyaux de ventilation, le tout souterrain et
merveilleusement éclairé, de sorte que,
où tous les regards se portassent, on
croyait voir des hommes d'armes comme
ceux figurant sur les tableaux de Goya. La
mort et les blessures viennent d'elles-mê-
mes mais, s'agit-il de se coucher sur quel-
que chose de sec, de dormir confortable-
ment et de se tenir propre, tout cela consti-
tue un art et, en toutes choses, le Français
est un artiste dans toute la force du mot.
Il faut dire aussi que les officiers français
traitent leurs hommes fraternellement, et
ceux-ci se montrent un peu comme des frè-
res à leur égard. Et ces soldats, ainsi que
les soldats anglais, sont depuis des mois
dans une fournaise. Un officier m'a dit « La
moitié de nos ordres n'ont point besoin d'ê-
tre donnés, l'expérience nous fuit avoir la
même pensée. » Ce qui m'a le plus impres-
sionné dans les soldats français, c'est leur
brillante santé, leur vitalité et la qualité de
leur éducation.
On continue à travailler dans les champs
Nous voulions voir une ville qui vécut
sous les obus. La route ordinaire qui con-
duit à une localité de ce genre était, nous
dit-on, peu favorable à la santé mais les
femmes et les enfants semblaient ne s'en
soucier nullement. Nous prîmes des che-
mins de traverse. Des trous creusés' par
les shrapnels y étaient assez nombreux
mais les femmes, les enfants et les vieil-
lards continuaient à s'occuper du bétail et
des récoltes. Et dire qu'à une certaine épo-
que j'avais l'habitude de médire de la jeu-
nesse française sous prétexte qu'elle es-
sayait de se suicider sous les roues de
mon automobile, des vieilles femmes parce
qu'elles traversaient les routes sans tenir
compte de mon voisinage et des vieillards
sSurds parce qu'ils dormaient tranquille-
ment dans des charrettes tenant le mauvais
côté du chemin 1 Maintenant, je saluerais
bien bas chacune de ces personnes, mais on
ne peut guère traverser nu-tête tout un
pays.
Dans une ville détruite
Un quart de la place a été bombardé et
détruit, à tel point que les débris en jon-
chent le sol les façades des maisons sont
dépourvues de toit, de porte, de fenêtres,
ressemblant à des décors de théâtre. C'était
près de la cathédrale, sur laquelle les enne-
mis s'acharnent avec une particulière féro-
cité. Tout à coup, je crus entendre un
chant, ce chant que l'on entend dans les
villes-cauchemars, chant de voix provenant
de sous la terre
Dans la cathédrale
Cest absurde, me dit un officier. Pour-
quoi chanterait-on ici ?
Nous refîmes le tour de la cathédrale.
Eh bien on chantait réellement derrière
une petite porte située sur un des côtés de
l'édifice. Nous jetâmes un coup d'oeil der-
rière cette porte et nous vlmcs une centaine
de personnes, des femmes pour la plupart,
agenouillées devant l'autel d'une chapelle
à peu près intacte. Nous quittâmes lente-
ment le saint lieu, et les yeux des officiers
français ne furent pas les seuls à se rem-
plir de larmes.
Devant sa vieille mère
Voici une délicieuse et touchante histoire,
qui ressemble à un joli conte, 'mais dont
nous pouvons garantir l'authenticité.
Le général. (ne le nommons pas, ce se-
rait trop grave 1) devait remettre la croix
d'honneur à quelques-uns de ses valeureux
soldats. Parmi eux se trouvait un adjudant
qui, à la suite de ses blessures, avait été
amputé,d'un bras.
Lorsqu'il apprit que sa décoration lui se-
rait remise par le général de. ah pardon,
nous allions dire le nom devant toutes
les troupes du cantonnement, le brave
soldat s'écria
Ah si ma pauvre vieille mère pouvait
voir ça!
Quelqu'un se trouvait là qui entendit l'ad-
judant exprimer ce souhait et qui s'en fit
l'écho près du général. Le général ne bron-
cha pas. Il 3st de ces tendres qui ont le mas-
que froid. Mais quand vint le grand jour, la
bonne vieille maman, grâce à lui, était là,
dissimulée derrière le porte-drapeau, mas-
quée par quelques officiers, et quand, après
avoir attaché la croix d'honneur sur la poi-
trine du vaillant sous-officier, le général
l'embrassa, le drapeau s'écarta et la mère,
fière et sanglotante, ouvrit ses bras pour
serrer son fils sur son cœur.
Ce fut une minute de magnifique émotion
les larmes coulaient sur les visages de ces
hommes habitués à braver tous les dan-
Le général. (Chut!) est adoré d'eux: il
leur demande parfois des efforts surhu-
mains mais il n'en est aucun qui ne se fe-
rait tuer pour recueillir le regard approba-
teur de celui qui sait leur parler, les com-
mander, leur faire plaisir et partager leurs
périls, leurs peines et leurs joies.
Le nouvel ambassadeur du Japon
On sait que le baron Ishii, ambassadeur
du Japon en France, est parti pour Tokio,
car il est le ministre des Affaires étrangères
du nouveau cabinet.
Nous croyons savoir que son successeur
à Paris sera NI. Matsui, ancien conseiller de
l'ambassade japonaise en France, et actuel-
lement secrétaire général du ministère des
Affaires étrangères
RETOUR D'ALLEMAGNE
hES IMPRESSIONS
de Mme Carton de Wiart
(DE NOTRE ENVOYÉ SPÉCIAL)
Bale, 6 septembre,.
J'ai l'honneur d'avoir été l'un des premiers
à souhaiter la bienvenue à Mme Carton de
Wiart à son arrivée en Suisse, après la dure
captivité que les Allemands avaient infligée
à cette héroïque et admirable femme.
Ignorant par quelle gare sa femme entre-
rait en Suisse, M. Carton de Wiart s'était
décidé à l'attendre à Baie mais, en réalité,
Mme Carton de Wiart avait été conduite à
la frontière suisse, à Siiigen, par les offi-
ciers allemands qui lui avaient été donnés
comme escorte. De Singen à Schaffouse,
Mme Carton de Wiart prit le train pour Baie,
où elle arrivait dimanche après midi. Elle a
eu la joie d'y retrouver, outre son mari, sa
fille aînée, la seule de ses cinq enfants qui
ait quitté Bruxelles.
C est donc au milieu de la plus touchante
et la plus heureuse réunion de famille que
je suis arrivé ce matin.
Les lecteurs du Petit Parisien connaissent
le ministre belge de la Justice. Ils connais-
sent moins Mme Carton dç Wiart. On est
immédiatement conquis par son naturel,
pa vivacité, la résolution qui se dégage
de toute sa personne, plutôt menue, mais
qui donne cependant une impression de
vigueur et de santé. Des yeux gris très
francs, une physionomie enjouée, une façon
de venir au-devant de vous qui est la sim-
plicité même et qui vous met à l'aise.
M™1 Carton de Wiart
n'a été l'objet d'aucune faveur
Je lui dis immédiatement toute l'admira-
tion que les femmes du monde entier ont
pour elle, pour la façon dont elle a accom-
pli son devoir et dont elle a supporté de si
multiples tortures morales
Mais il n'y a rien eu là d'étonnant, me
rfvoijd-tilc. loul ceci est très simple.
Voyez-vous, ce qui importe, ce n'est pus la
manière dont on vit, mais de savoir pour-
quoi on vit. Quand on sait pourquoi on vit,
tout le reste n'est rien.
Ce que j'ai fait, je ne pouvais pag le faire
autrement, et les Allemands l'ont bien com-
pris, car si j'étais retournée à Bruxelles,
ma vie n'eùt été modifiée en rien. J'aurais
repris mon activité comme par le passé.
bfais vous sarez, à c? propos, que c'est une
véritable peine de bannissement qui a été
prononcez contre moi, et cela par simple
décision administrative, sans aucun juge-
ment.
Et M. Carton de Viart me donne quel-
ques détails qui précisent tout l'odieux de la
nouvelle mesure prise contre Mme Carton
de Wiart.
-Très chevalerasquement, l'ambassadeur
d'Espagne qui s'est chargé des intérêts des
Belges en Allemagne, est intervenu à plu-
sieurs reprises pour obtenir une améliora-
tion du sort de Mme Carton de Wiart, mais
en réalité ce n'est qu'à l'expiration de la
peine prononcée à Bruxelles contre elle,
qu'elle a été libérée, soit le 3 septembre. Il
n'y a donc eu aucun acte de courtoisie spé-
ciale du gouvernement allemand à son
égard, au contraire celui-ci a singulièrement
aggravé la situation de Mme Carton de
Wiart en décidant qu'elle ne pouvait pas ren-
trer en Belgique. C'est, en effet, le bannis-
sement, ni plus ni moins; et cela, rien ne
pouvait le justifier.
En prison
Mme Carton de Wiart passa en jugement
et fut condamnée, comme vous ne l'ignorez
pas, à trois mois et demi de prison. Elle
fut assimilée aux prisonniers de droit com-
mun, avec le régime strictement alimentaire,
et cela dans une prison ordinaire. Pour se
promener, elle n'avait qu'un préau extrême-
ment exigu comme régime alimentaire,
celui des prisons, des soupes surtout, appor-
tées dans un ustensile quelconque, une sou-
pière de terre.
Par contre, les Allemands ne manquè-
rent pas de donner son titre d'Excellence à
Mme Carton de Wiart c'était Son Excel-
lence » par-ci, « Son Excellence » par-la.
C'est maintenant Mme de Wiart qui nous
donne des détails sur son internement
J'ai passé à peu près tout mon temps
à écrire. J'ai fait des traductions de l'an-
glais afj'ai écrit de plus, j'ai pu emporter
tout mon travail.
Avez-vous été au moins autorisés à re-
cevoir des visites ?
Je n'ai reçu que-celle de l'ambassadeur
d'Espagne, mais la conversation n'avait lieu
qu'en présence d'officiers allemands.
Et queUe impression rapportez-vous
de l'Allemagne ?
J'ai été tenue au secret, il me serait
donc difficile de vous fin dire quelque chose.
Telle est la réponse de Mme Carton de
Wiart., mais M. Carton de Wiart insiste tout
particulièrement sur l'attitude des officiers
allemands qui ont accompagné Mme Carton
de Wiart jusqu'à la frontière suisse.
Ils ne cessaient, me dit-il, de. faire va-
(loir la puissance de l'Allemagne, sa force,
combien elle était redoutable, mais c'était
pour insinuer aussitôt que le moment serait.
bon pour les alliés de faire la paix. L'Alle-
magne me rappelle ce soldat qui criait à
son général « Mon général j'ai fait deux
prisonniers. Et bien, amenez-les-moi
Je ne puis, mon général, ils ne me baissent
pas avancer.
Les alliés tiennent l'Allemagne celle-ci
ne demanderait pas mieux que de faire la
paix. On peut constater ces sentiments-là
dans tout le pays, mais ce sont les alliés
qui ne veulent pas de la paix ils ne sau-
raient la faire actuellement. »
Les derniers mots de Mme Carton de
Wiart sont pour remercier la Suisse des
égarjs qu'elle a eus pour elle depuis son
entrée sur le territoire helvétique.
BAUTY.
GODENT FURENT SAPÉS
les passagers Je^r«Hesperian»
LE BATIMENT A COULÉ
(De notre correspondanl particulicr)
Londres, 6 septembre.
Le paquebot Hesperian, qu'on avait es-
péré sauver, est perdu. Il a coulé ce matin,,
à 6 heures 47, tandis que des remorqueurs
le ramenaient lentement vers Queenstown,
pour le remettre en cale sèche, où il eût ré-
paré ses avaries. Tous les efforts faits par
le capitaine et par une partie de l'équipage
restée à bord pour empêcher l'eau de ga-
gner ont été vains. La déchirure provoquée
à l'avant du navire était trop importante.,
Quand la catastrophe lui parut inévitable,
le capitaine Maine prévint les remorqueurs
qui recueillirent les marins demeures sur
l'épave. 'Le capitaine, dont le calme et la
présence d'esprit tirent l'admiration géné-
rate, quitta Y Hesperian le dernier.
On a dit que personne n'avait vu le sous-
marin qui torpilla le paquebot. C'est là une
assertion inexacte. Le pirate fut aperçu à
une certaine distance, malgré l'obscurité,
par l'homme de vigie qui, aussitôt, en in-
forma le captaine. Celui-ci était à son poste
sur la dunette. Il était malheureusement
trop lard et, avant qu'aucune manœuvre
eût pu être tentée, la torpille atteignait le
navire.
L'absence de victimes est due unique-
ment au fait que le commandant du sous-
marin calcula mal la vitesse de Y Hesperian
et que la torpille, au lieu de frapper en
plein milieu le bateau, l'atteignit à l'avant,
n'endommageant pas la chambre des ma-
chines, ce qui permit de conserver de la
lumière à bord et d'envoyer tous les signaux
de détresse. Sans cette heureuse circons-
tance, le navire eût coulé aussi rapidement
que le Lusitania et Y Arabie, avant que les
secours eussent pu arriver.
L' Hesperian avait à bord trois mille sacs
de dépêches qui ont coulé avec lui.
Y AVAIT-IL DES AMÉRICAINS A BORD ?
Londres, 6 septembre.
Les journaux de ce matin ne sont pas
d'accord sur le nombre des passagers et des
marins de Y Hesperian.
Les uns portent il ̃£& le nombre des pre-
miers et à 300 celui des seconds, tandis que,
d'après d'autres, les voyageurs n'auraient
été qu'au nombre d'environ 300 et que l'é-
quipage n'aurait, pas atteint le chiffre indi-
qué plus haut.
Le même désaccord règne sur la question
de savoir si Y Hesperian avait des Améri-
cains à bord. Le Times prétend que l'équi-
page comprenait deux citoyens américains,'
dont i1 donne les noms d'un autre côté, le
consulat d'Amérique à Queenstown annonce
qu'il n'a pas trouvé trace d'Américains par-
mi les passagers.
L'EXPLICATION INSIDIEUSE
DE L'AMBASSADE ALLEMANDE
Washington, 6 septembre.
Un attaché de l'ambassade d'Allemagne,
dans le but d'excussrje torpillage de l' Hes-
penan, suggère avec impujence'que le com-
mandant du sous-marin ignorait la nouvelle
politique allemande, pas été en
mesure de communiquer avec l'Amirauté.
(Information.)
l'EMBARRAS DE BERLIN
Amsterdam, 6 septembre.
Un télégramme officieux de Berlin déclare,
au sujet de la destruction de Y Hesperian,
que l'on doit. attendre des détails pour sa-
voir si vraiment le paquebot -a été torpillé
et, si oui, des détails sur les circonstances
qui ont pu conduire à cette action.
UN DUEL
à 3.000 mètres,
(DE N'OTRE ENVOYÉ SPÉCIAL)
Front central italien, septembre.
J'ai pu assister à un des épisodes les plus
intéressants, les plus instructifs aussi de la
guerre de montagnes.
Avec deux de mes confrères, j'avais
atteint, au bout de trois heures de marche
dans le massif de la un campement
d'infanterie et d'artillerie, à seize cents
mètres d'altitude. Nous déjeunions avec les
officiers, lorsqu'on vint dire quelques morts
à l'oreille du colonel commandant le déta-
chement Il donna rapidement, à mi-voix,
quelques ordres, puis, se retournant vers
nous
Messieurs, fit-il, si vous ne craignez
pas d'ajouter à votre fatigue de ce matin
trois nouvelles heures de montée, sous le
soleiL je crois qu'un spectacle curieux vous
attendra sur nos hautes positiona
Il nous expliqua que les batteries autri-
chiennes situées sur une cime voisine avaient
bombardé les tranchées que ses soldats
étaient en train de creuser à trois cents
mètres de l'ennemi, sous les mitrailleuses
de celui-ci qu'on le prévenait qu'il y avait
deux blessés et que, pour permettre aux
brancardiers d'aller les chercher, il faisait
ouvrir le feu sur les positions occupées par
l'adversaire. Celui-ci ne manquerait pas de
riposter et ainsi nous pourrions voir ce que
les communiqués appellent « un duel d'ar-
tillerie u.
De plus, ajouta-t-il, on m'a signalé sur
un point l'existence d'une nouvelle batterie
ennemie. Elle me paraît exactement repérée.
Nous allons essaver de la démolir.
Vous devinez notre impatience. Dix minu-
tes après, nous commencions à gravir les
rudes pentes de la montagne. C'était dur,
surtout après un bon déjeuner mais un
encouragement nous vint, presque tout de
suite. Une sourde détonation s'entendit au
loin. Un sifflement bizarre traversa l'espace
et, dans un fracas de pierres éboulées, un
obus, passant sur nos têtes, frappa le rocher
en face de nous.
A la bonne heure fit gaiement notre
guide, le charmant capitaine X. Ils tirent
sur nous. Ne craignez rien, d'ailleurs Ces
gens-là sont d'une maladresse Et puis,
tenez, nous répondons.
En effet, un « pan » formidable éclatait
à nos pieds, sur la droite. Le duel s'enga-
geait. Si escarpé que fût le sentier, tour à
tour friable et caillouteux, nous commen.
cions à être pris par le spectacle. D'ailleurs,
cette grimpée sous les obus s'annonçait si
originale Des deux côtés, les coups main-
tenant se succédaient comme les réponses
d'un dialogue tragique. Un « boôme »
accompagnait le départ du projectile autri-
chien. Son bzz. bzz. bzz. déchirait
l'air, et un « clac », suivi d'un nuage de
fumée, indiquait l'endroit frappé. Le bruit
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