Presse et revues
16 pages
Titre : Le Monde artiste : théâtre, musique, beaux-arts, littérature
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1906-03-11
Contributeur : Lemoine, Achille (1813-1895). Directeur de publication
Contributeur : Gourdon de Genouillac, Henri (1826-1898). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32818188p
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 19764 Nombre total de vues : 19764
Description : 11 mars 1906 11 mars 1906
Description : 1906/03/11 (A46,N10). 1906/03/11 (A46,N10).
Description : Collection numérique : Arts de la marionnette Collection numérique : Arts de la marionnette
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k5459091z
Source : Bibliothèque nationale de France, département Littérature et art, Z-1096
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 30/11/2010
LE MONDE ARTISTE
46e ANNÉE
N° 10
DIRECTEUR : PAUL MILLIET
Dimanche
11 Mars 1906
LA SEMAINE THEATRALE
Opéra. — Lundi, le Prophète; mercredi, le Freyschütz,
la Ronde des Saisons; vendredi, Aïda ; samedi,
l'Etranger, Coppelia.
Opéra-Comiqne. — Dimanche, Louise; lundi, soirée
populaire, Mireille ; mardi, Carmen ; mercredi, le Bar-
bier de Séville, le Chalet ; jeudi, Werther ; vendredi,
le Jongleur de Notre-Dame, Cavalleria Rusticana ; sa-
medi, la Vie de Bohème.
Comédie-Française. — Dimanche, le Marquis de Vil-
lemer; lundi, le Fils de Giboyer; mardi, jeudi, soirée,
le Bourgeois gentilhomme; mercredi, samedi, les Ca-
prices de Marianne, le Réveil; jeudi, matinée, les
Phéniciennes, les Romanesques ; vendredi, En Visite,
le Duel.
Odéon. — Dimanche, mardi (100e), mercredi, Jeunesse;
lundi, Monsieur de Pourceaugnac, les Folies amou-
reuses ; jeudi, matinée, conférence de M. Léopold La-
cour, la Souris; soirée, vendredi, le Panache; samedi,
5 h., causerie de M. E. Rageot sur la Gloire; soirée,
l'Arlésienne.
Théâtre-Antoine. — Dimanche, lundi, mardi, mer-
credi, jeudi, matinée et soirée, vendredi, samedi,
le Vieil Heidelberg.
Gymnase. — Sacha, comédie en trois actes de Mme Ré-
gine Martial; Le Coeur d'Angélique, comédie en un
acte, de M. Edmond Guiraud.
Ambigu. — Pour sa Patrie ! pièce en cinq actes, de
M. le marquis de Castellane.
Nouveautés. — Irrésistible, pièce en quatre actes, de
M. Auguste Germain.
Capucines. — Pâris ou le Bon Juge, opérette en deux
actes, de MM. Robert de Fiers et G.-A. de Caillavet.
Ce n'est pas un début. L'esprit de Mme Régine
Martial, mordant et incisif à la ville, s'exerça déjà
en un acte « A Saint-Lazare » qu'elle interpréta
elle-même au Grand Guignol.
Cette fois nous n'assistons plus à une pochade
réaliste, mais à une comédie de moeurs, à une
étude de caractère, qui, tout en haussant la ma-
nière de l'auteur, paraît quelque peu la gêner.
Mme Régine Martial a tenté d'analyser l'amour ma-
ternel jusqu'en ses exagérations, quitte à le pousser
jusqu'à la cruauté, au crime. Malgré une louable
tenue d'ensemble, une évidente préoccupation de
psychologie et d'écriture, elle n'a qu'à moitié réussi.
Hélène de Villiers a un fils de vingt-cinq ans,
Alexandre, qu'on appelle Sacha dans l'intimité. Elle
le surprend baisant ardemment au passage la main
d'une amie, Mania Lüdorf, jeune Russe romanesque
mariée à un vieillard. Elle constate avec chagrin
cette intrigue, faite pour éveiller sa jalousie de mère
et cependant ferme les yeux, jusqu'au jour où elle
décide de marier ce fils à une jeune fille sentimen-
tale... et riche, Jeanne Duclos.
Mais Sacha refuse. Il adore Mania devenue sa
maîtresse qui, pour échapper à la tyrannie, à la
vengeance de son mari, consent à s'enfuir avec lui.
Hélène survient, s'oppose à cet enlèvement qui la
priverait de son enfant adoré, dont Mania Lüdorf,
par son amour, compromet et détruit l'avenir. Exas-
pérée, elle n'hésite pas à tuer d'un coup de re-
volver celle qui s'est substituée à elle dans le coeur
de Sacha et qu'elle hait.
Ceci est un geste d'amante ; venant d'une mère il
a paru exagéré. Ou bien, si l'auteur a voulu prouver
que dans un coeur de mère, il peut se glisser parfois
un sentiment de femme, il manque à ce dénouement
les préparations nécessaires. L'analyse eût été cu-
rieuse d'une réelle jalousie inconsciente ; elle reste
à faire.
Cette comédie terne a été jouée gris. MM. Arvel,
Alerme, Rameil, Rouvenat, Chauveau, tous plus ou
moins connus, n'ont pas encore pris suffisamment
l'air du Gymnase. M. Alerme (Sacha) parle à la fois
comme MM. Le Bargy et Tréville.
Mme Andrée Mégard est nerveuse, passionnée et
tragique à souhait, et Mme Suzanne Munte fut une
mère terrible et déséquilibrée. Louons la résignation
très douce de Mlle Camille Licenay.
Le Coeur d'Angélique est un extrait concentré
d'une bouffonnerie en trois actes représentée, voici
deux ans, à Trianon : M. Andregor y avait été fort
amusant. En un acte, la donnée nous a plus davan-
tage, et nous avons applaudi franchement au para-
doxe de ce mari apprenant qu'il est trompé, hési-
tant à sévir contre l'amant, et cherchant mille
prétextes pour pouvoir, sans déchéance, l'accueillir
chez lui. C'est un ménage à trois de plus, qui a le
mérite de la joie.
M. Numès, parfait à son habitude, M. Pierre
Achard distingué, Mlle Preyle, comiquement cynique
et Mlle Marguerite Lavigne, en bonne entretenue
par son maître, conduisirent ce très moderne vau-
deville au succès.
M. de Castellane fit déjà représenter au théâtre
Sarah-Bernhardt, — avant Pour sa Patrie ! à l'Am-
bigu, — un acte historique, le Festin de la mort, où
il eût l'honneur d'être interprété par notre grande
trugédienne. Cet acte se passait à l'époque de la
Terreur, à la prison « Lazare » : on y voyait M. et
Mme Maujourdain à la minute même où on les ap-
pelait à la guillotine, pris de fou rire en voyant en-
trer un prisonnier en caleçon, cherchant précipi-
tamment un « petit endroit » dont nul ne saurait se
passer, même en prison...
Ce rire malencontreux semble avoir poursuivi
M. de Castellane jusqu'à l'Ambigu, où le public pa-
raît avoir écouté trop joyeusement les tristes aven-
tures de Marie Walenska, dont l'amour touchant et
pur accompagna Napoléon, de Bronic à Sainte-Hé-
lène.
La formule du drame historique exige une habi-
leté, un tact que l'auteur de Pour sa patrie ! ignore
complètement. Il ne suffit pas de récolter les mots
ou les citations dans les mémoires du temps : il
46e ANNÉE
N° 10
DIRECTEUR : PAUL MILLIET
Dimanche
11 Mars 1906
LA SEMAINE THEATRALE
Opéra. — Lundi, le Prophète; mercredi, le Freyschütz,
la Ronde des Saisons; vendredi, Aïda ; samedi,
l'Etranger, Coppelia.
Opéra-Comiqne. — Dimanche, Louise; lundi, soirée
populaire, Mireille ; mardi, Carmen ; mercredi, le Bar-
bier de Séville, le Chalet ; jeudi, Werther ; vendredi,
le Jongleur de Notre-Dame, Cavalleria Rusticana ; sa-
medi, la Vie de Bohème.
Comédie-Française. — Dimanche, le Marquis de Vil-
lemer; lundi, le Fils de Giboyer; mardi, jeudi, soirée,
le Bourgeois gentilhomme; mercredi, samedi, les Ca-
prices de Marianne, le Réveil; jeudi, matinée, les
Phéniciennes, les Romanesques ; vendredi, En Visite,
le Duel.
Odéon. — Dimanche, mardi (100e), mercredi, Jeunesse;
lundi, Monsieur de Pourceaugnac, les Folies amou-
reuses ; jeudi, matinée, conférence de M. Léopold La-
cour, la Souris; soirée, vendredi, le Panache; samedi,
5 h., causerie de M. E. Rageot sur la Gloire; soirée,
l'Arlésienne.
Théâtre-Antoine. — Dimanche, lundi, mardi, mer-
credi, jeudi, matinée et soirée, vendredi, samedi,
le Vieil Heidelberg.
Gymnase. — Sacha, comédie en trois actes de Mme Ré-
gine Martial; Le Coeur d'Angélique, comédie en un
acte, de M. Edmond Guiraud.
Ambigu. — Pour sa Patrie ! pièce en cinq actes, de
M. le marquis de Castellane.
Nouveautés. — Irrésistible, pièce en quatre actes, de
M. Auguste Germain.
Capucines. — Pâris ou le Bon Juge, opérette en deux
actes, de MM. Robert de Fiers et G.-A. de Caillavet.
Ce n'est pas un début. L'esprit de Mme Régine
Martial, mordant et incisif à la ville, s'exerça déjà
en un acte « A Saint-Lazare » qu'elle interpréta
elle-même au Grand Guignol.
Cette fois nous n'assistons plus à une pochade
réaliste, mais à une comédie de moeurs, à une
étude de caractère, qui, tout en haussant la ma-
nière de l'auteur, paraît quelque peu la gêner.
Mme Régine Martial a tenté d'analyser l'amour ma-
ternel jusqu'en ses exagérations, quitte à le pousser
jusqu'à la cruauté, au crime. Malgré une louable
tenue d'ensemble, une évidente préoccupation de
psychologie et d'écriture, elle n'a qu'à moitié réussi.
Hélène de Villiers a un fils de vingt-cinq ans,
Alexandre, qu'on appelle Sacha dans l'intimité. Elle
le surprend baisant ardemment au passage la main
d'une amie, Mania Lüdorf, jeune Russe romanesque
mariée à un vieillard. Elle constate avec chagrin
cette intrigue, faite pour éveiller sa jalousie de mère
et cependant ferme les yeux, jusqu'au jour où elle
décide de marier ce fils à une jeune fille sentimen-
tale... et riche, Jeanne Duclos.
Mais Sacha refuse. Il adore Mania devenue sa
maîtresse qui, pour échapper à la tyrannie, à la
vengeance de son mari, consent à s'enfuir avec lui.
Hélène survient, s'oppose à cet enlèvement qui la
priverait de son enfant adoré, dont Mania Lüdorf,
par son amour, compromet et détruit l'avenir. Exas-
pérée, elle n'hésite pas à tuer d'un coup de re-
volver celle qui s'est substituée à elle dans le coeur
de Sacha et qu'elle hait.
Ceci est un geste d'amante ; venant d'une mère il
a paru exagéré. Ou bien, si l'auteur a voulu prouver
que dans un coeur de mère, il peut se glisser parfois
un sentiment de femme, il manque à ce dénouement
les préparations nécessaires. L'analyse eût été cu-
rieuse d'une réelle jalousie inconsciente ; elle reste
à faire.
Cette comédie terne a été jouée gris. MM. Arvel,
Alerme, Rameil, Rouvenat, Chauveau, tous plus ou
moins connus, n'ont pas encore pris suffisamment
l'air du Gymnase. M. Alerme (Sacha) parle à la fois
comme MM. Le Bargy et Tréville.
Mme Andrée Mégard est nerveuse, passionnée et
tragique à souhait, et Mme Suzanne Munte fut une
mère terrible et déséquilibrée. Louons la résignation
très douce de Mlle Camille Licenay.
Le Coeur d'Angélique est un extrait concentré
d'une bouffonnerie en trois actes représentée, voici
deux ans, à Trianon : M. Andregor y avait été fort
amusant. En un acte, la donnée nous a plus davan-
tage, et nous avons applaudi franchement au para-
doxe de ce mari apprenant qu'il est trompé, hési-
tant à sévir contre l'amant, et cherchant mille
prétextes pour pouvoir, sans déchéance, l'accueillir
chez lui. C'est un ménage à trois de plus, qui a le
mérite de la joie.
M. Numès, parfait à son habitude, M. Pierre
Achard distingué, Mlle Preyle, comiquement cynique
et Mlle Marguerite Lavigne, en bonne entretenue
par son maître, conduisirent ce très moderne vau-
deville au succès.
M. de Castellane fit déjà représenter au théâtre
Sarah-Bernhardt, — avant Pour sa Patrie ! à l'Am-
bigu, — un acte historique, le Festin de la mort, où
il eût l'honneur d'être interprété par notre grande
trugédienne. Cet acte se passait à l'époque de la
Terreur, à la prison « Lazare » : on y voyait M. et
Mme Maujourdain à la minute même où on les ap-
pelait à la guillotine, pris de fou rire en voyant en-
trer un prisonnier en caleçon, cherchant précipi-
tamment un « petit endroit » dont nul ne saurait se
passer, même en prison...
Ce rire malencontreux semble avoir poursuivi
M. de Castellane jusqu'à l'Ambigu, où le public pa-
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pur accompagna Napoléon, de Bronic à Sainte-Hé-
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