Presse et revues
716 pages
Titre : La Tribune dramatique : revue théâtrale, artistique, littéraire et des modes
Éditeur : aux bureaux de la Tribune dramatique (Paris)
Date d'édition : 1841-10-10
Contributeur : Arago, Jacques (1790-1855). Directeur de publication
Contributeur : Gonzalès, Emmanuel (1815-1887). Directeur de publication
Contributeur : La Fizelière, Albert de (1819-1878). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32881231r
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 3621 Nombre total de vues : 3621
Description : 10 octobre 1841 10 octobre 1841
Description : 1841/10/10 (A1,T1,LIVR1)-1842/08/07... 1841/10/10 (A1,T1,LIVR1)-1842/08/07 (A2,T1,LIVR43).
Description : Collection numérique : Arts de la marionnette Collection numérique : Arts de la marionnette
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k54480209
Source : Bibliothèque nationale de France, département Littérature et art, Z-10172-10179
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 14/10/2008
_— loi ____ ,
lÏBIMAWÏJEl.-liASSBER'F THEAUJLOW.
Je ne dirai pas combien celui que je pleure a écrit de volumes, combien
il a fait de pièces, combien il a rimé de couplets, d'ariettes, de duos, de
morceaux d'ensemble, combien il a rempli de pages de journaux d'art ou
de feuilles politiques; d'autres vous parleront de son activité de jeune
homme, de sa facilité prodigieuse; il vous apprendront qu'à lui seul, je
crois, il est arrivé d'avoir trois pièces importantes jouées pour la première
fois le même jour ; moi qui suis frappé de sa mort comme de celle d'un
ami, d'un frère, moi qui ne l'ai pas quitté depuis mon enfance, si ce n'est
pour mes lointains pèlerinages, moi qui ai partagé ses jeux de collège et
reçu les premières confidences d'un coeur ouvert peut-être trop tôt aux
douces émotions de l'âme, moi dont il a guidé les premiers pas dans la car-
rière dramatique, j'oublierai l'écrivain facile, spirituel, amusant, lepu-
bliciste, le poète, pour ne vous parler que de cette âme exquise, de ce
caractère bon, confiant, bienveillant jusqu'à la faiblesse, qui le rendait si
cher à nous tous. Je vous le présenterai tendant une main amie à toutes
ces jeunes intelligences pour qui les portes des théâtres sont de si difficile
accès, les protégeant de sa voix, de sa plume, de son goût, de son expé-
rience, les relevant alors qu'ils étaient tombés, ou les arrêtant au moment
de la chute.
Théaulon n'était parfaitement heureux que par le bonheur des autres.
Point jaioux, point envieux de ses confrères, on le voyait, aux premières
représentations, battre des mains quand l'ouvrage trébuchait et se réjouir
d'une palme conquise, comme s'il lui en revenait une part de gloire.
Pauvre ami, dont les dernières années ont été si amères ! Les douleurs
physiques ont fait de lui un martyr ; et, de crainte de nous affliger, alors
que sa vie errante était arrivée à son dernier râle, il nous disait que sa
santé reprenait le dessus, il nous parlait de son avenir, comme s'il ne sa-
vait pas aussi bien que nous que son avenir était un jour, une heure,
quelques instants.
Théaulon est mort sans fortune, lui qui était si secourable aux théâtres ;
c'est donc aux théâtres qu'il appartient de donner à celle qui le pleure avec
tant de larmes, qui lui a prodigué tous ses soins, toute sa tendresse, une
part des bénéfices qu'ils lui doivent. — Les théâtres entendront notre voix.
Quant à nous, tes amis, nous voulons pour toi une tombe où nous puis-
sions aller te dire souvent combien nous t'avons aimé, combien ta mémoire
nous est chère.
Tu auras cette tombe, cette pieuse croix, cette pierre sacrée.
Les hommes comme toi ne peuvent pas mourir oubliés, les coeurs comme
le tien laissent après eux des coeurs ouverts au culte du souvenir.
J. À.
lÏBIMAWÏJEl.-liASSBER'F THEAUJLOW.
Je ne dirai pas combien celui que je pleure a écrit de volumes, combien
il a fait de pièces, combien il a rimé de couplets, d'ariettes, de duos, de
morceaux d'ensemble, combien il a rempli de pages de journaux d'art ou
de feuilles politiques; d'autres vous parleront de son activité de jeune
homme, de sa facilité prodigieuse; il vous apprendront qu'à lui seul, je
crois, il est arrivé d'avoir trois pièces importantes jouées pour la première
fois le même jour ; moi qui suis frappé de sa mort comme de celle d'un
ami, d'un frère, moi qui ne l'ai pas quitté depuis mon enfance, si ce n'est
pour mes lointains pèlerinages, moi qui ai partagé ses jeux de collège et
reçu les premières confidences d'un coeur ouvert peut-être trop tôt aux
douces émotions de l'âme, moi dont il a guidé les premiers pas dans la car-
rière dramatique, j'oublierai l'écrivain facile, spirituel, amusant, lepu-
bliciste, le poète, pour ne vous parler que de cette âme exquise, de ce
caractère bon, confiant, bienveillant jusqu'à la faiblesse, qui le rendait si
cher à nous tous. Je vous le présenterai tendant une main amie à toutes
ces jeunes intelligences pour qui les portes des théâtres sont de si difficile
accès, les protégeant de sa voix, de sa plume, de son goût, de son expé-
rience, les relevant alors qu'ils étaient tombés, ou les arrêtant au moment
de la chute.
Théaulon n'était parfaitement heureux que par le bonheur des autres.
Point jaioux, point envieux de ses confrères, on le voyait, aux premières
représentations, battre des mains quand l'ouvrage trébuchait et se réjouir
d'une palme conquise, comme s'il lui en revenait une part de gloire.
Pauvre ami, dont les dernières années ont été si amères ! Les douleurs
physiques ont fait de lui un martyr ; et, de crainte de nous affliger, alors
que sa vie errante était arrivée à son dernier râle, il nous disait que sa
santé reprenait le dessus, il nous parlait de son avenir, comme s'il ne sa-
vait pas aussi bien que nous que son avenir était un jour, une heure,
quelques instants.
Théaulon est mort sans fortune, lui qui était si secourable aux théâtres ;
c'est donc aux théâtres qu'il appartient de donner à celle qui le pleure avec
tant de larmes, qui lui a prodigué tous ses soins, toute sa tendresse, une
part des bénéfices qu'ils lui doivent. — Les théâtres entendront notre voix.
Quant à nous, tes amis, nous voulons pour toi une tombe où nous puis-
sions aller te dire souvent combien nous t'avons aimé, combien ta mémoire
nous est chère.
Tu auras cette tombe, cette pieuse croix, cette pierre sacrée.
Les hommes comme toi ne peuvent pas mourir oubliés, les coeurs comme
le tien laissent après eux des coeurs ouverts au culte du souvenir.
J. À.
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