politique locale et davantage à la vie du parti radical, qu'il contribue à restruc- turer dans cette période difficile, et pour lequel l'image du « bon docteur » constitue de surcroît un atout électoral certain. Revenu « aux affaires » en juillet 1948 dans le cabinet André Marie, avant de diriger son propre cabinet de septembre 1948 jusqu'en octobre 1949, devenu un « sage » de la République (les « premiers rôles » de la IIIe ne sont pas si nombreux à poursuivre leur car- rière sous la IVe), Henri Queuille doit affronter une situation économique et sociale particulièrement délicate, menacée encore par l'extension des grèves menées depuis l'année précédente. Le redressement budgétaire et monétaire opéré durant son premier cabinet n'en est que plus méritoire, même si l'appli- cation du plan Marshall n'y est sans doute pas étrangère. Sauveur de la Répu- blique, d'une certaine idée de la République, à travers une Constitution qu'il n'avait pas lui-même contribué à élaborer et qu'il qualifiait volontiers de « mons- tre », Henri Queuille l'est également durant son troisième cabinet en 1951 (le second est mort-né en 1950), sur un plan plus politique cette fois. Face à la double opposition du R.P.F. et du Parti communiste, la « loi des apparentements » adoptée pour les élections de juin apparaît comme l'unique solution contre le blocage du régime et offre une dynamique possible à une « Troisième force » jusqu'alors peu consistante. On est bien loin de 1' « immobilisme » supposé.
Le colloque de 1984 a regroupé ces perspectives variées en quatre grands thèmes, repris pour la publication des actes : La République (rapport de Gilles Le Béguec) ; La France rurale (rapport d'Isabel Boussard) ; La Guerre, la Résistance, le Gaullisme (rapport d'Eric de Filquemont) ; La reconstruction de l'État républicain (rapport de Jean-Paul Cointet)). Chaque partie comprenant un rapport introductif, complété voire nuancé par de nombreux témoignages, souvent inédits et intéressants (ainsi sur la position d'Henri Queuille face au Front Populaire), malgré quelques imprécisions (J. Bichelonne — p. 275 — était bien en 1937 un « futur ministre » des Travaux Publics mais... de Pétain). Signalons par ailleurs l'heureuse initiative d'un large choix iconographique, en particulier une quinzaine de caricatures dues à Henri Queuille lui-même, qui croqua dans l'entre-deux-guerres les hommes politiques qu'il côtoyait, ainsi que de documents d'archives. Parer aux oublis et aux préjugés qui s'attachent à l'oeuvre d'Henri Queuille : le colloque a sans aucun doute rempli la mission que ses organisateurs lui avaient assignée. La richesse des réflexions et des témoignages suscités lui donne les moyens d'une ambition supplémentaire, didactique cette fois ; l'absence d'index et de chronologie détaillée pour la période 1943-1958 n'en est que plus regrettable. Il reste que ces actes parviennent à dresser une figure à la fois vivante et précise de l'homme politique, qui sut allier la discrétion à l'efficacité et les qualités humaines à la compétence administrative. On savait déjà que les Républicains modérés n'étaient pas modérément républi- cains ; on saura désormais que compromis n'est pas compromission, pas plus que réalisme et sans-froid ne sont synonymes d'immobilisme.
Hervé BASITEN
Vichy 1940-1944. Quaderni e document! inediti di Angelo Tasca. Archives de guerre d'Angelo Tasca, a cura di Denis PeschansW, Paris-Milan, Fondazione Giangia- como Feltrinelli. Éditions du CNRS, 1986, 751 p.
Les Archives de guerre d'Angelo Tasca, d'où est tiré cet ouvrage, sont conservées à la Fondation Feltrinelli de Milan, un des fonds privés les plus importants sur la France des années de guerre. Saluons l'initiative d'une Fondation italienne qui a eu la hardiesse de publier un ensemble dont les textes sont pour l'essentiel écrits en français et la « première » que constitue cette fructueuse coopération franco-italienne entre la Fondation Feltrinelli et le CNRS. Dès l'abord
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