Titre : Le Gaulois : littéraire et politique
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1894-04-27
Contributeur : Pène, Henri de (1830-1888). Directeur de publication
Contributeur : Tarbé des Sablons, Edmond Joseph Louis (1838-1900). Directeur de publication
Contributeur : Meyer, Arthur (1844-1924). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 27 avril 1894 27 avril 1894
Description : 1894/04/27 (Numéro 5158). 1894/04/27 (Numéro 5158).
Description : Collection numérique : Arts de la marionnette Collection numérique : Arts de la marionnette
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine commune
Description : Collection numérique : La Commune de Paris Collection numérique : La Commune de Paris
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 05/03/2008
VENDREDI 27 AVRIL 1894
PARTS AS eE~'nMT~ –DÉPARTKN~TS ET GARES ~0 CKNTtMiN
ARTHUR MEYER
DM'ce
RÉDACTION
2,moDroupt
tS.Cgte dea boutevards Montmartre et dee KtCeMS
ABONNEMENTS
Parif Départements
Pnmoia. Str. Unmoia. 6&.
Trois mois. 13 80 Trois mois. i6 6-.
Sixmtiis. Z7&. Sixmois. 32ir.
Unan. 64fr. Un an. 64&.
· Etranger
Trois mois (Union postalej. 18 fr.
ARTHUR MEYER
JDt'fec
ADMINISTRATION'
RENSEIGNEMENTS
ABONNEMENTS, PETITES ANNONCES
2,rueDrouot,3
(A!)gte dés boutevard? ~ontmMtre ot des !tati6t!~
ANNONCES
MM:. CH. I..AGrRANGrB, CIBlUF
6. PLACE DE LA BOURSE, 6
JE< fa~MttnMtfattOM du JoMfM
LE THEATRE
<3n sait le mot plaisant d'an homme
d'esprit qui, sous le premier Empire, di-
sait « Je viens délire les journaux étran-
gers j'ai des nouvelles de France, w Nous
sommes loin d'en être là ) On nous ra-
conte tout, et ce qui mérite d'être su et.
f*e qui devrait rester ignoré. Il n'en est
pas moins bon, cependant, de lire les ga-
zettes de l'étranger et de savoir ce qu on
y dit de nous. Il y a profit a entendre
même des choses un peu désagréables.
C'est ainsi que je trouve, dans la
~aMA/M~er-Z'ë~MK~une tort longue
étude sur-l'état du théâtre en France,
étude qui est, pour le moins, d'une sévé-
rité outrée. « La saison théâtrale qui tou-
che à-sa un, dit le journal allemand, est
la plus mauvaise que Paris ait eue depuis
longtemps. Elle marque un arrêt com-
plet dans la production française. Il
n'y a plus d'auteurs, il n'y a plus de
directeurs: il reste seulement de bons
acteurs. La plupart des directeurs pari-
siens sont des hommes d'affaires, incapa-
bles de juger des mérites d'une pièce.
Les seules belles soirées de l'année, ajoute
l'organe d'outre-Rhin, doivent être por-
tées au compte des auteurs étrangers, Ib-
sen, Bjornson, etc., etc. Les écrivains
français n'ont donné aucun ouvrage de
valeur. Rien, rien, rien ) ? » Et nous voilà
bien arrangés 1
On pourrait répondre bien des choses
à cette appréciation dont la malveillance
est poussee à l'injustice. Ce « rien a dont
parle le critique allemand est encore quel-
que chose, puisque les vaudevilles qu'il
honnit et les opérettes qu'il foudroie sont
joués partout à l'étranger, souvent avec
succès, en Amérique, en Russie, en Au-
triche, en Italie, en Allemagne même.
Je ne sais même pas si, en tournant la
page du journal iranciortois et enlisant
le programme des spectacles, on n'v trou-
verait pas quelque œuvre française Dans
les pièces même qui nous viennent de
l'étranger et auxquelles nous faisons un
si bon accueil, accueil où la liberté d'es-
prit s'allie à un certain snobisme, il n'est
pas rare de retrouver la trace de quelque
imitation du théâtre de France. Ceci a été
très marqué, par exemple, pour une des
dernières pièces de M. Bjornson. Je sais
que je m'expose aux derniers anathèmest 1
Mais il y avait là des morceaux de Scribe
très bien imités.
Néanmoins, sans insister là-dessus,
sans faire des rapprochements et des
comparaisons qui pourraient encore ne
pas être sans satisfactions pour nous, il
convient de prendre la part de vérité que
renferment les attaques du journal étran-
ger. On peut très bien accorder que la
saison qui vient de finir n'a pas été très
bonne. Encore faudrait-il mettre à part
trois ou quatre théâtres qui, dans des
genres divers, ont obtenu de vifs succès
ou ont offert au public de très intéressan-
tes tentatives. Mais l'ensemble de la pro-
duction a faibli, et on peut en dire les
.raisons.
Tout d'abord, au moment où ûeuritia
concurrence redoutable des cafés-con-
certs, pectes que j'éprouve un véritable chagrin
à voir encourager de haut, au moment où
l'abaissement du niveau du-goût intellec-
tuel, qui est le propre des démocraties,~se
manifeste par le plaisir qu'on trouve à
des spectacles licencieux ou bas, le théâ-
tre est devenu trop cher pour le public.
Aussi tout le monde veut y aller gratis.
Cette cherté des distractions théâtrales
est, d'ailleurs, expliquée par l'augmenta-
tion des dépenses que doivent subir les
directeurs. Qu'il s'agisse dé ténors, de
premiers sujets ou d'étoiles féminines,
les acteurs demandent des traitements
d'ambassadeurs.
De plus, les exigences de la mise en
scène vont grandissant tous les jours. Le
théâtre est un plaisir qui se matérialise
de plus en plus. Les yeux se tout plus
exigeants que les cerveaux. Les direc-
teurs sont obligés de suivre ce mouve-
ment. Il se peut que quelques-uns d'entre
eux ne soient que des « hommes d'af-
faires )). Comme tels, ils cherchent à
réussir en abondant dans le sens du goût
du public. Mais j'ai bon espoir que, ne
fût-ce que comme « hommes d'aSaires a,
il se trouvera des directeurs qui, au lieu
de suivre trop docilement le goût du pu-
blic, réagiront contre lui. Les entreprises
théàtrales seraient exposées à moins de
déboires si on revenaitàla. méthode d'au-
trefois, consistant à monter les pièces
dans des conditions telles qu'il n'était pas
nécessaire de faire cinquante fois le
~a-T~MM~ pour rentrer dans les irais des
décors et de la mise en scène. Et la foule,
si on lui donnait de bonnes pièces, arri-
verait assez tôt à se contenter d'un plaisir
au l'intelligence reprendrait la plus large
part.
Ces bonnes pièces, on les trouverait,
soyez-en certains. En littérature comme
en politique, on finit toujours par sortir
des crises et l'accommodement néces-
saire à la vie se fait. La production dra-
matique nécessaire peut subir une crise,
dont le public se trouve désorienté. Mais
c'est là une sorte de maladie qui, dans
l'ordre intellectuel comme dans l'ordre
physique, accompagne les évolutions de
l'être. Le théâtre, en France, a, depuis le
Commencement du siècle, produit des
chefs-d'œuvre en tous les genres, de Vic-
tor Hugo à « monsieur Scribe )), de Labi-
che et Meithac à Augier, à Dumas, à Sar-
dou, à PaiIIeron. Les chefs-d'œuvre, c'est
gênant. Quand on ne peut pas en pren-
dre l'inspiration et le génie, on en imite
ia formule et la formule s'use.
Que nous en soyons là, je le pense. Le
besoin d'originalité et de nouveauté est
très réel, très sensible. Seulement, l'er-
reur a été de chercher à le satisfaire avec
des œuvres violentes, excentriques, répu-
gnantes parfois, et de vouloir, au lieu des
réiormes nécessaires, une révolution sa.ns
ctiiité comme sans lendemain. On s'est
plu à nous donner, comme des modèles
qui devaient être vénérés, non étudiés et
discutés, fût-ce pour y prendre ce qu'ils
avaient de bon, des œuvres obscures,
composées au mépris de toutes les condi-
tions essentielles de l'art dramatique et
imprégnées d'une philosophie qui est la
négation même de l'esprit de notre race.
A ce qui était démodé, on a eppcsé une
mode qui choque notre goût, et à la tradi-
tion épuisée, on a voulu faire succéder
un art incohérent et sans règles.
Il s'est trouvé des critiques qui, de très
bonne foi, je n'en puis douter, ont ren-
versa les idoles pour les remplacer par
des fétiches.De là, l'hésitation bien sen-
sible, presque douloureuse du public, et
la difnculté devant laquelle se heurtent
les directeurs de théâtres voulant essayer
de choses nouvelles et y trouvant le pu-
blic hostile. Car, sans faire de l'argent
le Criterium unique, le théâtre ne peut
se passer de succès. Il iaut qu'il vive
avant de philosopher. Le problème est
justement d'y apporter une philosophie,
un art, une doctrine tels que le public s'y
attache. Est-ce donc si difncile ? 2
La critique pourrait, ce me semble,
louer un rôle utile dans le moment, que
nous traversons. Trop souvent, devenue
pessimiste, cherchant à se montrer nova-
trice et originale, elle se laisse trop aller
a parler de nous-mêmes comme en parle
le gazetier d'outre-Rhin. Elle condamne
en bloc, elle exalte en tas; ce sont de
vraies vêpres siciliennes, à ceci près que,
pour être épargné, il faut avoir l'accent
étranger) Je ne vois vraiment de salut
que dans des compromis, que dans un
eclectisme qui, loin d'être banal, plat et
infécond, peut, au contraire, aider puis-
samment à l'évolution théâtrale que l'u-
sure des formules consacrées a rendue
nécessaire. Mais il ne iaut pas s'y trom-
per. Si les formules passent, si les « gau-
friers a s'usent, les lois demeurent.
La première de toutes, c'est de ne pas
caresser cette chimère qu'on pourra faire
accepter au théâtre, c'est-à-dire là où
l'esprit d'une race se manifeste de la plus
vive façon, des œuvres incompatibles avec
cet esprit même. Le théâtre obscur, sans
action, sans clarté, le « théâtre de rêve )),
ne sera jamais le théâtre français. Nous
pouvons emprunter au Nord, mais à con-
dition de modifier, de rendre l'emprunt
assimilable. Tant que cette assimilation
ne sera pas faite, la crise durera. Mais si
fâcheuse qu'elle soit., il ne faut pas, ce-
pendant, en exagérer la gravité. Quelque
méprisante que soit l'opinion de la criti-
que allemande, elle ne fait pas loi, en
Allemagne même, et la plus médiocre de
nos années de production dramatique est
encore assez féconde pour que le rayon-
nement et la chaleur de l'esprit français
attirent et réjouissent encore les foules
de tous les pays 1
HENRY FOUQU~ER
Ce qui se passe
C~ULO!S-GUtDE
AMjoMrd'/<.Mt
Au Sénat, discussion de la proposition de M.
Joseph Fabre, en faveur de l'institution d'une
fête nationale de Jeanne d'Arc.
Courses à Maisons-Laffitte.
Au Nouveau-Cirque, première représentation
de le A~ou/H
Au théâtre de la République, première re-
présentation à ce théâtre de la CAar<'oMM!re.
LA POHT!QUE
Comme ce roi de féerie qui s'écrie
« Allons bon t encore une étoile dans mon
assiettes, le bourgeois de 1894 sera pro-
digieusement étonné en apprenant ce ma-
tin qu'on a arrêté un anarchiste au minis-
tère de la guerre, car s'il est un endroit
qui semblerait peu propice au dévelop-
pement de l'anarchie, c'est bien l'immeu-
ble de la rue Saint-Dominique.
Il convient de le rassurer en lui faisant
remarquer que l'anarchiste arrêté est un
poète décadent qui avait débuté par l'a-
narchie littéraire avant d'arriver à l'a-
narchie sociale, et qui ne faisait point
partie intégrante de l'armée.
Néanmoins, cette réserve faite, il y a
lieu de s'étonner que cette brebis galeuse
n'ait point été éventée plus tôt, et que
dans les sphères administratives on se
montre à la fois si tolérant pour les ai-
mables jeunes gens qui veulent tout faire
sauter, et si sévère pour les garçons de
bureau qui envoient leurs enfants aux
écoles congréganistes.
Les ministres devraient mieux faire la
police autour d'eux, car, s'il se glisse des
anarchistes dans leurs bureaux, il n'y a
rien d'étonnant à ce qu'on en trouve dans
les faubourgs, où la surveillance est in-
contestablement plus difficile. J. C.
ÉCHOS DE PARIS
S.A.R.Ie prince de Galles, accompa-
gné du général Ellis, son aide de camp, a
déjeuné, hier, chez le baron et la baronne
de Hirsch.
Les convives invités a rencontrer
Son Altesse Royale étaient: S. A. R.
Mgr le duc de Chartres, le duc et la du-
chesse de Luynes, la comtesse de Pourta-
lès, le comte et la comtesse Jacques de
Pourtalès, lady Alington, le vicomte et la
vicomtesse Charles de La Rocheioucauld,
Mme Hartmann, le colonel l'honorable
Reginald Talbot, Mme Talbot et l'hono-
rable H. Stonor.
En quittant l'hôtel de la rue de l'Elysée,
le prince de Galles, accompagné du mar-
quis de Breteuil, s'est rendu à l'hippo-
drome d'Auteuil pour assister aux -cour-
ses de la journée.
fous les membres de la colonie russe
suivent, depuis hier, les mystères de la
Passion en l'église de la rue Daru.
Hier jeudi saint, il y a eu un double
service, à onze heures du matin et à huit
heures du soir.
Aujourd'hui, les cérémonies du ven-
dredi saint seront célébrées à onze heures
du matin, à trois heures et à huit heures
du soir.
Demain, service à dix heures du ma-
tin, pour l'adoration de la croix, et à mi-
nuit, messe de la Résurrection, à laquelle
assisteront le baron de Mohrenheim et
tous les membres de l'ambassade et du
consulat russe.
Après ce service, qui se terminera vers
deux heures, on ira rompre le ieûne chez
le baron et la baronne de Mohrenheim, à
l'hôtel de l'ambassade.
Séance fort importante, hier, à l'Aca-
démie française, sous la présidence de M.
Ludovic Halévy, directeur, assisté de M.
Challemel-Lacour, chancelier, et M. Ca-
mille Doucet, secrétaire perpétuel.
Il a été donné lecture
1° D'une lettre par laquelle M. Edmond
Cramaussel, élève de l'Ecole normale su-
périeure, informe l'Académie qu'il ea.
Fauteur du manuscrit sur George Sand
portant Ien° 33, auquel une mention ho-
norable a été accordée dans la séance du
19 avril dernier.
2° D'une lettre par laquelle M. Bonnat,
membre de l'Institut, président de la So-
ciété des artistes français, iniorme la
Compagnie que, comme les années précé-
dentes, tous ses membres pourront en-
trer au Salon de 1894 dès le lundi 30
courant, jour du vernissage, sur la pré-
sentation de leurs médailles ou insi-
gnes et pendant toute la durée du Salon.
3" D'un décret autorisant l'Académie à
accepter la donation à elle faite par Mme
veuve Le Villain, d'une somme de 5,000 w
francs qui devra servir à décerner cinq
prix de vertu de 1,000 francs chacun,
l'année qui suivra la délivrance de cette
donation.
4° Enfin, d'une lettre par laquelle M.
Henry Houssaye se présente comme can-
didat au fauteuil devenu vacant par la
mort de~M. Maxime du Camp.
L'Académie, après avoir entendu les
rapports de M. Legouvé, a décerné à l'u-
nanimité le prix Jean Reynaud, d'une va-
leur de 10,000 francs, à M. Paul Dérou-
lède, et elle partage ainsi le prixVitet,
dont la valeur est de 5,400 francs 3,000
francs à Mme Arvëde Barine et à M. Bel-
laigue un prix de 3,400 francs.
Enfin, M. le duc de Broglie a lu son
rapport sur les concours Gobert et Thé-
rouanne le vote aura lieu dans une séance
prochaine. ·
Comme on le voit, le prix décerné à M.
Paul Déroulëde a été voté aussi bien par
Mgr le duc d'Aumale que par M. Chalie-
mel-Lacour. C'est un joli succès.
Le gouvernement français vient d'éle-
ver, à la dignité de grand-officier de la
Légion d'honneur, le prince R de Liech-
tenstein, major général, grand-écuyer de
l'empereur d'Autriche, et le comte Pacer,
général de cavalerie, chambellan et aide
de camp général, qui accompagnaient Sa
Majesté Impériale pendant son séjour e~
France.
Ces distinctions honorifiques ont été
conférées en échange de celles-que l'em-
pereur François-Joseph a octroyées der-
nièrement, et dont nous avons déjà fait
mention.
Nous avons, les premiers, annoncé, le
3 mars dernier, la conférence-lecture que
M. Emile Zola devait faire, hier, au Tro-
cadéro.
Il s'agissait, on se le rappelle, de don-
ner connaissance au public de quelques
extraits de Lo~r~e~. le roman de M. Zola
en cours de publication.
M. Emile Zola avait choisi la partie
encore inédite de « la première journée a,
et qui a trait aux visions de Bernadette.
Il y a là un souffle religieux vraiment
exquis et qui sera pour les lecteurs de
Lourdes ce qu'il a été, hier, pour les
auditeurs de M. Zola, une manière de ré-
vélation mêlée de surprise.
Le public, exceptionnellement nom-
breux et choisi, a beaucoup goûté les
descriptiohs que M. Emile Zola fait de la
grotte célèbre où « la dame )) apparut à
Bernadette. La pauvre enfant, éblouie
par la blancheur de cette gracieuse
image, nous est montrée tombant à ge-
noux et priant, et cela est d'un mysti-
cisme très simple et délicieux.
M. Zola y parle, en' termes d'une
haute élévation, de la Vierge: «Je suis
l'Immaculée-Conception », et on ne sait
ce qui est le plus émouvant de la figure
de Bernadette, longuement décrite, ou de
l'apparition elle-même.
Les chapitres qui suivront ressemble-
ront-ils à celui-là? S'il en était ainsi,
M. Emile Zola aurait décidément réussi
à se faire pardonner bien des choses et
.LoMrdM serait demain dans les mains
les plus pieuses.
Le public le lui a bien montré en l'ap-
plaudissant chaleureusement et en le
rappelant à trois reprises. Un coup de
sifflet parti des galeries supérieures a
valu à M. Emile Zola une nouvelle ova-
tion.
Cette conférence-lecture était encadrée
dans un concert fort brillant, auquel le
poète Jean Rameau prêtait son concours.
On sait depuis longtemps quel joli di-
seur est M. Rameau. Il a été applaudi
avec beaucoup de vigueur, et, après les
C7«~~ps et .Re-Me~&~Mce, il a dû dire
une troisième pièce, d'ailleurs très belle
et déjà célèbre les DeMd? F!e:~es.
On a également fait fête à Mmes Bar-
tet, Ludwig et Bertiny, de la Comédie-
Française à Mlle Vuillaume, de rOpéra-
Comique, et à Mlle Subra, de l'Opéra.
Résultat 6,000 francs de bénéfices
pour la Caisse des retraites de la Société
des gens de lettres.
A l'occasion do centenaire de l'Ecole
polytechnique et sur l'initiative prise par
un groupe important d'anciens élèves, un
service religieux pour les membres dé-
funts de la grande famille polytechni-
cienne sera célébré, le jeudi 17 mai, à
neuf heures du matin, en l'église de
Saint-Etienne-du-Mont.
Les officiants seront choisis parmi les
anciens élèves entrés dans les ordres.
PARADOXES ET VÉRITÉS
En retardant l'accomplissement d'un devoir
facile, on trouve le moyen d'en faire une
corvée. \\=
Louis AisoiN.
L'égoïsmo est l'amour du sacrince. des
autres.
Henri LucENAY.
~e ne sais pas si l'esprit court les rues, je
ne l'ai jamais rencontré. Combien qui s'es-
soufuent pour l'atteindre et qui ne saisiss ent
que la bêtise, faute de partir à. temps t
Arsène HoussAYE.
On sait que M.Joseph Fabre, un des
plus fidèles admirate urs de Jeanne d'Arc,
a émis, auprès de M. le directeur général
des postes, le vœu qu'on ornât de figures
françaises nos timbres français et qu'on
y remplaçât Minerve et Mercure par
Jeanne d'Arc et Hoche, par exemple.
Aux yeu's de M. Joseph Fabre et pour
rappeler le lien entréTancienne France
et la Fr&nce nouvelle, il serait bon d'asso
cier à l'image de Jeanne d'Arc une ima
ge de la Révolution.
M. de Selves vientde répondre &M. Jo-
seph Fabre que, tout en appréciant per-
sonnellement le sentiment de patriotisme
élevé qui a inspiré son vœu, il devait lui
faire connaître que toute latitude étant
laissée aux concurrents dans le choix des
compositions et des couleurs, son idée ne
pouvait être susceptible d'être réalisée
qu'autant qu'un ou plusieurs sujets s'en
inspirant seraient présentés et choisis
parle jury chargé d'examiner le con-
tours.
Ajoutons que le délai extrême accordé
pour le dépôt des projets expire le 5 mai
prochain.
Les concurrents auront-ils, jusqu'à~
cette date rapprochée, le temps d'étudier
le projet de M. Joseph Fabre? 2
De notre correspondant de Lyon
Mgr Coullié est toujours dans la Loire;
il n'a vu personne et n'a fait aucune dé-
claration. A Lyon, le mécontentement
s'accentue en présence des hésitations à
réparer l'injustice commise.
Envois au Salon des Champs-Elysées.
M. A. Steinheil, élève et neveu de Meis-
sonier deux tableaux, « le Point d'or-
gue a et « A travers champs B.
M. Léon Herbo, de Bruxelles deux
portraits de vieillards.
Mme Le Roy de Présalé buste de Mlle
Deina.
Entré hier au Salon du Champ de
Mars. On s'arrête devant les envois de
M. G. Courtois, bien marqués au coin du
talent de l'artiste, talent a la fois très
précis et très simple. La .R~pe~e, la
COM~ewp~KW et les deux beaux por-
traits exposés par M. Courtois relèvent
d'un-art calme et sûr, en pleine posses-
sion de soi-même.
A travers les livres
Dans son nouveau roman Ce qu'elles
peMue~, Mlle Jeanne Schultz, l'auteur de
la JVeM drames si douloureux et le plus souvent
ignorés de tous qui ont pour théâtre in-
time le cœur d'une jeune fille.
MOUVELLES A LA MAIN
Un peintre dont le tableau a été reiusé
au Salon des Champs-Elysées rencontre
un ami qu'il n'a pas vu depuis un certain
temps.
Eh bien 1 mon cher, qu'exposes-tu,
cette année ? q
L'artiste, d'un ton amer
Ma déconvenue t.
Les revendications sociales des fem-
mes continuent à se produire avec une
inten&ité croissante.
Elles ont pourtant bien tort de se
plaindre, dit M. à ce propos. Il me
semble que depuis l'origine du monde
elles ont déjà fait joliment de chemin.
Ah voua trouvez ? q
Sans doute. Elles n'étaient tout d'a-
bord qu'une septième côte de l'homme,
et bientôt elles devenaient sa moitié.
UN DOM)NO
Bbc-Notes Parisien
L'tNARCmSTE DU m!N)STÈRE DE m GUERRE
Avant-hier, vers cinq heures, les employés
du ministère de la guerre quittaient feurs bu-
reaux, quand t'un d'eux, un commis principal,
fut appréhendé par des agents de police et aus-
sitôt emmené au Dépôt. Cet employé, M. Fé-
lix Fénéon, était arrêté à titre d'anarchiste. On
lira plus loin tes détails de cette arrestation.
M. Félix Fénéon, un grand jeune homme
de trente-trois ans, est très connu parmi la
jeune génération d'artistes. H a même joué,
dans t'évoiution littéraire et artistique d'avant-
garde, un rôle assez important. Car il fut, non
pas précisément un écrivain, mais un metteur
en œuvre adroit, actif et très ardent. Il a dirigé
plusieurs revues de jeunes gens, où se sont
essayés à peu près tous ies jeunes\ écrivains
qu'on appela successivement décadents, sym-
bolistes, etc.
Vers i883 parut,dans les environs det'Odéon,
une petite revue mensuelle, la Revue zn~~eK-
dante. Le rédacteur en chef s'appelait Félix
Fénéon. Alors on vit apparaître, dans les céna-
cles du quartier Latin, un bizarre personnage.
Sur un long corps anguleux, une longue tête
mince, dont le propriétaire accentuait encore le
caractère d'acuité par des cheveux relevés haut
sur le front et par une barbe en fer à cheva),
longue et rare. Les yeux extrêmement scruta-
teurs, dans un masque votontairementimpassi-
ble. Un type de Yankee, qu'on sentait soigneu-
sement composé, un Yankee d'après Edgar
Poe.
Dans les milieux d'artistes, gens d'ordinaire
très en dehors, très communicatifs, Félix Fé-
néon parut un étrange compagnon. Par esprit
de réaction contre le débraillé de l'attitude,
on affichait dans les cercles d'alors, une poli-
tesse cérémonieuse et froide. Fénéon affectait
une froideur et une politesse extrêmes. II par-
lait très peu. Les rares mots qu'il jetait dans la
conversation étaient toujours secs et tran-
chants, toujours justes. Le geste, très rare, très
réservé, était acutangle et comme d'un auto-
mate.
On sentait que, dans l'attitude de Félix Fé-
néon, tout-~tait voulu, étudié, compassé. H y
avait une volonté évidente d'entourer sa per-
sonnalité d'un certain mystère.
–-Un fumiste t disaient les uns.
Fumiste, c'est l'étiquette vite collée, sur des
types compliqués, par ceux qui ne s'attardent
pas aux patientes psychologies démontant
pièce à pièce les caractères. Ceux-ci ne se dou-
tent pas que le fumiste, le mystificateur, est
toujours un sensitif qui se dérobe.
H y avait en Félix Fénéon un mystificateur,
mais pour une très petite part. Assurément, il
cédait volontiers au secret plaisir d' « épater le
bourgeois
Très tettré, possédant une culture scienti-
fique assez développée, il n'écrivait guère que
des notules sur les expositions des nouvelles
écoles de peinture. Sa seute œuvre est une bro-
chure sur tes peintres pointillistes. H fut le
critique, le porte-parole de t'écote pointilliste.
Le maître en était George Seurat, qui mourut
tout jeune, derrière qui marchaient Paul Si-
gnac, Luce, Dubois-Pillet, mort aussi, qui
était capitaine de la garde républicaine et gen-
dre de l'expert bien connu Ch. Pillet. Félix Fé-
néon fut à ce groupece que Théophile Silvestre
fut au groupe des peintres romantiques ou ce
que Castagnary fut a l'école de Courbet.
La RefM<° Fénéon, fut d'abord naturaliste; car, il y a dix
ans, c'était les derniers beaux jours du natura-
lisme. Puis, c'est là que se dessina te mouve-
ment symboliste. Là vinrent bientôt Faut Ver-
laine, Stéphane MaHarmé, J.-K. Huysmans,
qui y fit sa conversion et y brùta ce qu'il avait
adoré; Emile Hennequin, un critique suisse,
mort jeune Edouard Rod, toujours Suisse
Moréas, toujours Grec Laurent Tailhade,
Maurice Barrés, et bien d'autres.
Cette revue, de petit format, à couverture
saumonée, est aujourd'hui fort recherchée des
amateurs.
Vers 1886, parut un petit volume anonyme
intitulé Petit Bottin des /e~rrM et f~M or~, qui
Ht quelque bruit. Bon nombre de personna!itës
y étaient dépeintes, en trois lignes, avec une
verve gamine aussi mordante que spirituelle.
On y reconnut aussitôt te stvte acidulé de Félix
Fénéon.
Cependant, la ~erxc :KNf~eH~nfe, qu'on
avait crue morte, ressuscita sous les auspices
de Félix Fénéon et d'Edouard Dujardin, ce
fantaisiste auteur qui trouva le moyen de fas-
ciner la badauderie parisienne avec sa trilogie
d'.4~<(MM. Verlaine et Mattarmê, adorés d'un
peut nombre de sectateurs, s'élancèrent de là
vers leur célébrité.
Le symbolisme prenait l'essor à la même
époque que le boulangisme. C'est dans cette
petite revue que Maurice Barres 6t une adhésion
solennette au mouvement boutangiste, au
grand scandale de tous les collaborateurs, «es-
thètes méprisant la politique ».
Félix Fénéon écrivait peu dans la revue. Il
n'y faisait guère que des échos d'un comique
pince-sans-rire, car il eût été certainement un
échotierautempsoù l'on faisait des échos un
peu méchants.
Il se contenta de faire de brefs articles sur
les peintres pointillistes, et de les déposer dans
la Vb~MC, de M. Gustave Kahn dans )'En~e-
hors, le journal d'anarchisme littéraire que di-
rigeait Zo d'Axa.
Chez ce mystificateur à froid, l'anarchisme,
s'i) y en a, doit être teinté d'une forte d~se de
mystification. Car beaucoup d'entre ceux qui
connaissent Félix Fénéon se demandèrent
souvent s'il n'était pas simplement un élève
très compliqué de Sapeck. Son arrestation
surprendra tous ceux qui pensaient que l'anar-
chie dans la couleur devait lui suffire.
Paul Verlaine tançait volontiers sa verve ga-
mine sur les chaussés de ce singulier person-
nage, dont la silhouette immobile t'ëtonnait.
!) est rigoiot disait Verlaine.
Et quelques-uns le disaient sorti d'un conte
d'Honmann.
TOUT-t'Mtttt
r
NOTRE SUPPLEMENT
DE DtMANCHE
Sous ce titre « ApRÊs LE CONCOURS
HippiQUE )), le che matin, un SMp~M~e~~ ~MS~ où ses
abonnés et son élégante clientèle sportive
trouveront réunies toutes les opérations
du concours hippique qui vient de finir.
Outre la partie hippique, ils trouveront
également, dans ce supplément spécial,
une revue des toilettes les plus remar-
quées~-ces réunions printanières.
Ce supplément, dont les dessins sont
dus au crayon d'un jeune dessinateur
de talent, aura seize pages de texte et sera
encarté dans une élégante couverture.
Le numéro 4e dimanche, avec le sup-
plément, sera vendu 20 centimes à Paris
et dans les départements.
LA PRÊS!DENCE
L I EC
DE
LA RÉPUBLIQUE
Avec la nomination de la commission
du budget s'est ouverte, hier, en réalité,
la campagne qui doit aboutir à l'élection
présidentielle de novembre prochain.
C'est, à proprement parler. 1~ première
fois, depuis la constitution de la républi-
que, que le renouvellement ou la trans-
mission des pouvoirs présidentiels s'opé-
rera à la date normale et dans des condi-
tions régulières.
L'Assemblée nationale, qui était souve-
raine, remplaça M. Thiers par le maré-
chal de Mac-Mahon par un vote ordi-
naire.
Le Congrès pi évu par la Constitution
dut se réunir inopinément, lors de la dé-
mission du maréchal de Mac-Mahon.
A la vérité, M. Grévy vit renouveler ses
pouvoirs en 1885, mais il n'avait pas de
concurrents; Gambetta était mort, M.
Ferry était à terre, M. de Freycinet pas-
sait pour un dauphin.
Dans ces conditions, le Congrès de Ver-
sailles fut une simple formalité, les répu-
blicains n'ayant pas encore mesuré les
inconvénients d'une présidence renouve-
lée pour sept nouvelles années.
Le cabinet Rouvier, qui dut faire pro-
céder a la succession de M. Grévy, n'a-
vait pas été choisi dans ce but sa tâche
était tout autre.
Seul, M. Casimir-Perier, en acceptant le
pouvoir, a pris l'engagement implicite, vis-
a-vis du parti républicain, d'assurer la
transmission des pouvoirs présidentiels.
Il l'a si bien compris, du reste, qu'il
s'en est expliqué avec M. Carnot, lorsque
celui-ci l'appela en décembre dernier à
l'Elysée.
M. Casimir-Perier déclara formelle-
ment à M. Carnot qu'il ne serait pas son
compétiteur à la présidence de la répu-
blique, s'il se représentait. Depuis, M.
Casimir-Perier a renouvelé cette assu-
rance aux divers personnages politiques
qui l'ont interrogé sur ce point délicat.
De telle sorte qu'en dehors des surpri-
ses qui font que tout ministère risque
chaque jour d'être fusillé au coin d un
fourré parlementaire, l'existence du cabi-
net actuel dépend uniquement de la dé-
cision de M. Carnot.
En effet, si M. Casimir-Perier ne bri-
gue pas la présidence de la république,
ses adversaires le laisseront peut-être vi-
vre si, au contraire, on sait d'une façon
positive que M. Carnot se retire, M. Ca-
simir-Perier aura contre lui un syndicat
composé des éléments les plus divers
d'opposition, qui n'épargneront rien pour
provoquer sa chute dans des conditions
telles qu'il n'aura pas le temps de se
remettre en selle pour le mois de no-
vembre.
Ce syndicat comprend des radicaux,
des socialistes et des membres du centre
qui ont des rancunes à satisfaire ou des
revanches à prendre.
M. Cavaignac est un des plus acharnés;
il en veut d'abord à M. Casimir Perier
de ne lui avoir pas oNert de porteteuille
il lui en veut surtout de faire partie de la
MoMesse fepM&Mca~e. M. Cavaignac avait
espéré que le nom de son père lui servi-
rait, comme celui de Carnot, au président
actuel.
Il s'insurge contre la troisième dynas-
tie des Perier.
Qui marche avec M. Cavaignac ?
M. Bourgeois à la Chambre et M. Pey-
tral au Sénat, où l'ancien ministre des
nnances est entré à l'instigation de M.
Carnot qui en ferait volontiers, le cas
échéant, un nouveau Tirard.
M. Cavaignac n'a pas, d'ailleurs, tout
le centre droit avec lui; M. Léon Say,
par exemple, s'est prononcé dans son in-
timité et publiquement en faveur du bud-
get Burdeau; aussi, pour se rapprocher
des radicaux, l'ancien ministre de la ma-
rine s'est-il tout à coup montré partisan
de l'impôt sur le revenu ) Notons, en
passant, que M. Léon Say n'a pas été
élu, hier, membre de la commission dm
budget.
La lutte qui va s'engager aujourd'hui
pour la désignation du président de la
commission du budget est donc fort inté-
ressante elle est circonscrite entre MM.
Rouvier et Gavai gnac. Si M. Cavaignao
l'emporte, c'est le triomphe du S!/MSi M. Rouvier est élu, la. discussion du
budget lui promet de l'agrément," ainsi
qu'au cabinet Perier.
XX.
LA COLLABORATION
AU
TU EA~TT~JB
Lettres de M!M. François <3Atphomse JD&mdet
MM. François Coppée et Alphonse Daudet
nous adressent, sur la question de ia colla-
boration au théâtre, les deux jolies lettres
suivantes, que nous joignons a celle que nous
ont écrites MM. Alexandre Dumas fils, Hen-
ry Meilhac, Ludovic Halévy, Victorien Sar-
dou, Adolphe d'Ennery, Emile Zola, Jules
Claretie et Jules Lomaître
M. F~a~po:~ Coppée
Mon cher confrère,
Je devrais me récuser, car j'ai fait seu-
lement et dans ma jeunesse, du temps
que j'étais paresseux deux ouvrages
en société avec mon ami Armand d'Ar-
tois.
Le premier, un drame en prose, inti-
tulé le Petit- Ma~M~s où il y avait
pourtant un sujet de pièce terriblement
corsé fut très houspillé, le soir de la
« première », à l'Odéon, et nous ne par-
vînmes même pas à faire jouer l'autre, un
grand drame en vers, la ~?M.
Ce n'était pas encourageant, je renon-
çai aux collaborations. Mais j'ai conservé
un souvenir charmé de mes séances de
travail avec d'Artois. Rien n'est plus
amusant que cette excitation réciproque
de deux esprits.
Maintenant a-t-on plus de chance de
produire une belle chose en travaillant
seul ou avec l'aide d'un compagnon ? Qui
le sait ? Il semble bien qu'un nls ne de-
vrait avoir qu'un père. Cependant ils sont
deux, les auteurs du Gendre de Af..Pot-
rier.
La vérité, c'est qu'il n'y a pas de recette
pour les cheis-d'œuvre et celui qui est
en train d'en écrire un ne s'en doute même
pas.
Sentiments cordiaux,
François CoppÉE.
M. ~t~oMM Daudet
Mon cher confrère,
Le vieux Lebrun, recevant Emile Att-
gier à l'Académie, disait ceci
« Quand je vois un ouvrage écrit pM
deux auteurs, je suis tenté de ne pas le
prendre pour une œuvre d'art, mais pouf
un travail facile dont le but est moins lt
gloire que le succès. »
Je suis de son avis.
Alphonse DATJDET.
«low 1
LES ANARCHISTES
Arrestation d'mm emptoye dm minta~
tëre de ta~ guerre
Nous avions annoncé, hier matin,
qu'une arrestation mystérieuse avait été
faite, la veille au soir, par M. Clément.
Il s'agissait, disions-nous, d'un compa-
gnon ami de Matha, le coin'eur arrêté, le
matin même, chez un sieur Bossaud, 15,
rue de la Tour-d'Auvergne.
Ce coiReur, qui avait fondé, a Londres,
l'M~tOM<~ Toilette C~, était arrivé
depuis quinze jours à Paris. Grand ami
d'Emile Henry et d'Ortiz, il avait été lié
avec tous les individus soupçonnés depuis
deux mois.
Or, dans les papiers de Matha, M. Clé-
ment avait trouvé des lettres compromet-
tantes d'un employé du ministère de la
guerre, M. Féhx Fénéon.
L'arrestation fut décidée immédiate-
ment, et M. Clément l'opérait, à six heu-
res, au ministère de la guerre.
On lira plus loin, d'après le récit même
de Mme Fénéon, mère de l'anarchiste,
comment cette arrestation a été iaite.
Ajoutons que Louis-Félix-Alexandre
Fénéon est né à Turin, en 1861, de père
et de mère trançais. ·
Félix Fénéon était entré au ministère e
de la guerre, il y a dix ans, où il était de-
venu assez rapidement commis principal.
à 4,000 ir.
Il était employé au bureau du recrute-
ment.
CHEZ M~ FÉNÉON
Le récit de t'a~rreat&titm
4, passage Tourlaque, entre la rue Dam-
rémont et la rue de Maistre, à Montmar-
tre. Un logement au quatrième étage. Aux
murs, des toiles d6 peintres impression-,
nistes Seurat, Signac, Lucé, Maurin
Louis Hayet.Pissaro, tous amis inLimes de
Félix Fénéon; des bas-reliefs de Charpen-
tier, une pâte de verre d'Henri Ct'os en
un mot, un intérieur d'artiste et d'homme
de lettres très lancé dans le mouvement
jeune.
Nous trouvons Mme Fénéon étendue
sur un canapé près d'elle, un le repas in-
achevé, Dans le petit salon va et vient
sans cesse une jeune ûlle d'une dizaine
d'années, sa nièce, qui est .a sa charge.
Si je vous ai ouvert, nous dit-elle, et
si je consens à vous recevoir, alors que
j'ai fermé systématiquement ma porte à
tous vos confrères, c'est uniquement
parce que vous êtes venu à moi porteur
de la recommandation d'un ami de mon
ûls. s.
» Que vous dirai-je que cet ami ne vous
ait dit ? Vous connaissez l'arrestation de
Félix et l'horrible et l'accusation qui pèse
sur lui ? x~
Et, comme nous demandons à Mma
Fénéon de surmonter l'émotion qui l'é-
treint et de nous faire le récit de cette
arrestation, elle nous répond en pleu-
rant
–Je tâcherai, monsieur. Mms~issez--
PARTS AS eE~'nMT~ –DÉPARTKN~TS ET GARES ~0 CKNTtMiN
ARTHUR MEYER
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MM:. CH. I..AGrRANGrB, CIBlUF
6. PLACE DE LA BOURSE, 6
JE< fa~MttnMtfattOM du JoMfM
LE THEATRE
<3n sait le mot plaisant d'an homme
d'esprit qui, sous le premier Empire, di-
sait « Je viens délire les journaux étran-
gers j'ai des nouvelles de France, w Nous
sommes loin d'en être là ) On nous ra-
conte tout, et ce qui mérite d'être su et.
f*e qui devrait rester ignoré. Il n'en est
pas moins bon, cependant, de lire les ga-
zettes de l'étranger et de savoir ce qu on
y dit de nous. Il y a profit a entendre
même des choses un peu désagréables.
C'est ainsi que je trouve, dans la
~aMA/M~er-Z'ë~MK~une tort longue
étude sur-l'état du théâtre en France,
étude qui est, pour le moins, d'une sévé-
rité outrée. « La saison théâtrale qui tou-
che à-sa un, dit le journal allemand, est
la plus mauvaise que Paris ait eue depuis
longtemps. Elle marque un arrêt com-
plet dans la production française. Il
n'y a plus d'auteurs, il n'y a plus de
directeurs: il reste seulement de bons
acteurs. La plupart des directeurs pari-
siens sont des hommes d'affaires, incapa-
bles de juger des mérites d'une pièce.
Les seules belles soirées de l'année, ajoute
l'organe d'outre-Rhin, doivent être por-
tées au compte des auteurs étrangers, Ib-
sen, Bjornson, etc., etc. Les écrivains
français n'ont donné aucun ouvrage de
valeur. Rien, rien, rien ) ? » Et nous voilà
bien arrangés 1
On pourrait répondre bien des choses
à cette appréciation dont la malveillance
est poussee à l'injustice. Ce « rien a dont
parle le critique allemand est encore quel-
que chose, puisque les vaudevilles qu'il
honnit et les opérettes qu'il foudroie sont
joués partout à l'étranger, souvent avec
succès, en Amérique, en Russie, en Au-
triche, en Italie, en Allemagne même.
Je ne sais même pas si, en tournant la
page du journal iranciortois et enlisant
le programme des spectacles, on n'v trou-
verait pas quelque œuvre française Dans
les pièces même qui nous viennent de
l'étranger et auxquelles nous faisons un
si bon accueil, accueil où la liberté d'es-
prit s'allie à un certain snobisme, il n'est
pas rare de retrouver la trace de quelque
imitation du théâtre de France. Ceci a été
très marqué, par exemple, pour une des
dernières pièces de M. Bjornson. Je sais
que je m'expose aux derniers anathèmest 1
Mais il y avait là des morceaux de Scribe
très bien imités.
Néanmoins, sans insister là-dessus,
sans faire des rapprochements et des
comparaisons qui pourraient encore ne
pas être sans satisfactions pour nous, il
convient de prendre la part de vérité que
renferment les attaques du journal étran-
ger. On peut très bien accorder que la
saison qui vient de finir n'a pas été très
bonne. Encore faudrait-il mettre à part
trois ou quatre théâtres qui, dans des
genres divers, ont obtenu de vifs succès
ou ont offert au public de très intéressan-
tes tentatives. Mais l'ensemble de la pro-
duction a faibli, et on peut en dire les
.raisons.
Tout d'abord, au moment où ûeuritia
concurrence redoutable des cafés-con-
certs,
à voir encourager de haut, au moment où
l'abaissement du niveau du-goût intellec-
tuel, qui est le propre des démocraties,~se
manifeste par le plaisir qu'on trouve à
des spectacles licencieux ou bas, le théâ-
tre est devenu trop cher pour le public.
Aussi tout le monde veut y aller gratis.
Cette cherté des distractions théâtrales
est, d'ailleurs, expliquée par l'augmenta-
tion des dépenses que doivent subir les
directeurs. Qu'il s'agisse dé ténors, de
premiers sujets ou d'étoiles féminines,
les acteurs demandent des traitements
d'ambassadeurs.
De plus, les exigences de la mise en
scène vont grandissant tous les jours. Le
théâtre est un plaisir qui se matérialise
de plus en plus. Les yeux se tout plus
exigeants que les cerveaux. Les direc-
teurs sont obligés de suivre ce mouve-
ment. Il se peut que quelques-uns d'entre
eux ne soient que des « hommes d'af-
faires )). Comme tels, ils cherchent à
réussir en abondant dans le sens du goût
du public. Mais j'ai bon espoir que, ne
fût-ce que comme « hommes d'aSaires a,
il se trouvera des directeurs qui, au lieu
de suivre trop docilement le goût du pu-
blic, réagiront contre lui. Les entreprises
théàtrales seraient exposées à moins de
déboires si on revenaitàla. méthode d'au-
trefois, consistant à monter les pièces
dans des conditions telles qu'il n'était pas
nécessaire de faire cinquante fois le
~a-T~MM~ pour rentrer dans les irais des
décors et de la mise en scène. Et la foule,
si on lui donnait de bonnes pièces, arri-
verait assez tôt à se contenter d'un plaisir
au l'intelligence reprendrait la plus large
part.
Ces bonnes pièces, on les trouverait,
soyez-en certains. En littérature comme
en politique, on finit toujours par sortir
des crises et l'accommodement néces-
saire à la vie se fait. La production dra-
matique nécessaire peut subir une crise,
dont le public se trouve désorienté. Mais
c'est là une sorte de maladie qui, dans
l'ordre intellectuel comme dans l'ordre
physique, accompagne les évolutions de
l'être. Le théâtre, en France, a, depuis le
Commencement du siècle, produit des
chefs-d'œuvre en tous les genres, de Vic-
tor Hugo à « monsieur Scribe )), de Labi-
che et Meithac à Augier, à Dumas, à Sar-
dou, à PaiIIeron. Les chefs-d'œuvre, c'est
gênant. Quand on ne peut pas en pren-
dre l'inspiration et le génie, on en imite
ia formule et la formule s'use.
Que nous en soyons là, je le pense. Le
besoin d'originalité et de nouveauté est
très réel, très sensible. Seulement, l'er-
reur a été de chercher à le satisfaire avec
des œuvres violentes, excentriques, répu-
gnantes parfois, et de vouloir, au lieu des
réiormes nécessaires, une révolution sa.ns
ctiiité comme sans lendemain. On s'est
plu à nous donner, comme des modèles
qui devaient être vénérés, non étudiés et
discutés, fût-ce pour y prendre ce qu'ils
avaient de bon, des œuvres obscures,
composées au mépris de toutes les condi-
tions essentielles de l'art dramatique et
imprégnées d'une philosophie qui est la
négation même de l'esprit de notre race.
A ce qui était démodé, on a eppcsé une
mode qui choque notre goût, et à la tradi-
tion épuisée, on a voulu faire succéder
un art incohérent et sans règles.
Il s'est trouvé des critiques qui, de très
bonne foi, je n'en puis douter, ont ren-
versa les idoles pour les remplacer par
des fétiches.De là, l'hésitation bien sen-
sible, presque douloureuse du public, et
la difnculté devant laquelle se heurtent
les directeurs de théâtres voulant essayer
de choses nouvelles et y trouvant le pu-
blic hostile. Car, sans faire de l'argent
le Criterium unique, le théâtre ne peut
se passer de succès. Il iaut qu'il vive
avant de philosopher. Le problème est
justement d'y apporter une philosophie,
un art, une doctrine tels que le public s'y
attache. Est-ce donc si difncile ? 2
La critique pourrait, ce me semble,
louer un rôle utile dans le moment, que
nous traversons. Trop souvent, devenue
pessimiste, cherchant à se montrer nova-
trice et originale, elle se laisse trop aller
a parler de nous-mêmes comme en parle
le gazetier d'outre-Rhin. Elle condamne
en bloc, elle exalte en tas; ce sont de
vraies vêpres siciliennes, à ceci près que,
pour être épargné, il faut avoir l'accent
étranger) Je ne vois vraiment de salut
que dans des compromis, que dans un
eclectisme qui, loin d'être banal, plat et
infécond, peut, au contraire, aider puis-
samment à l'évolution théâtrale que l'u-
sure des formules consacrées a rendue
nécessaire. Mais il ne iaut pas s'y trom-
per. Si les formules passent, si les « gau-
friers a s'usent, les lois demeurent.
La première de toutes, c'est de ne pas
caresser cette chimère qu'on pourra faire
accepter au théâtre, c'est-à-dire là où
l'esprit d'une race se manifeste de la plus
vive façon, des œuvres incompatibles avec
cet esprit même. Le théâtre obscur, sans
action, sans clarté, le « théâtre de rêve )),
ne sera jamais le théâtre français. Nous
pouvons emprunter au Nord, mais à con-
dition de modifier, de rendre l'emprunt
assimilable. Tant que cette assimilation
ne sera pas faite, la crise durera. Mais si
fâcheuse qu'elle soit., il ne faut pas, ce-
pendant, en exagérer la gravité. Quelque
méprisante que soit l'opinion de la criti-
que allemande, elle ne fait pas loi, en
Allemagne même, et la plus médiocre de
nos années de production dramatique est
encore assez féconde pour que le rayon-
nement et la chaleur de l'esprit français
attirent et réjouissent encore les foules
de tous les pays 1
HENRY FOUQU~ER
Ce qui se passe
C~ULO!S-GUtDE
AMjoMrd'/<.Mt
Au Sénat, discussion de la proposition de M.
Joseph Fabre, en faveur de l'institution d'une
fête nationale de Jeanne d'Arc.
Courses à Maisons-Laffitte.
Au Nouveau-Cirque, première représentation
de le A~ou/H
Au théâtre de la République, première re-
présentation à ce théâtre de la CAar<'oMM!re.
LA POHT!QUE
Comme ce roi de féerie qui s'écrie
« Allons bon t encore une étoile dans mon
assiettes, le bourgeois de 1894 sera pro-
digieusement étonné en apprenant ce ma-
tin qu'on a arrêté un anarchiste au minis-
tère de la guerre, car s'il est un endroit
qui semblerait peu propice au dévelop-
pement de l'anarchie, c'est bien l'immeu-
ble de la rue Saint-Dominique.
Il convient de le rassurer en lui faisant
remarquer que l'anarchiste arrêté est un
poète décadent qui avait débuté par l'a-
narchie littéraire avant d'arriver à l'a-
narchie sociale, et qui ne faisait point
partie intégrante de l'armée.
Néanmoins, cette réserve faite, il y a
lieu de s'étonner que cette brebis galeuse
n'ait point été éventée plus tôt, et que
dans les sphères administratives on se
montre à la fois si tolérant pour les ai-
mables jeunes gens qui veulent tout faire
sauter, et si sévère pour les garçons de
bureau qui envoient leurs enfants aux
écoles congréganistes.
Les ministres devraient mieux faire la
police autour d'eux, car, s'il se glisse des
anarchistes dans leurs bureaux, il n'y a
rien d'étonnant à ce qu'on en trouve dans
les faubourgs, où la surveillance est in-
contestablement plus difficile. J. C.
ÉCHOS DE PARIS
S.A.R.Ie prince de Galles, accompa-
gné du général Ellis, son aide de camp, a
déjeuné, hier, chez le baron et la baronne
de Hirsch.
Les convives invités a rencontrer
Son Altesse Royale étaient: S. A. R.
Mgr le duc de Chartres, le duc et la du-
chesse de Luynes, la comtesse de Pourta-
lès, le comte et la comtesse Jacques de
Pourtalès, lady Alington, le vicomte et la
vicomtesse Charles de La Rocheioucauld,
Mme Hartmann, le colonel l'honorable
Reginald Talbot, Mme Talbot et l'hono-
rable H. Stonor.
En quittant l'hôtel de la rue de l'Elysée,
le prince de Galles, accompagné du mar-
quis de Breteuil, s'est rendu à l'hippo-
drome d'Auteuil pour assister aux -cour-
ses de la journée.
fous les membres de la colonie russe
suivent, depuis hier, les mystères de la
Passion en l'église de la rue Daru.
Hier jeudi saint, il y a eu un double
service, à onze heures du matin et à huit
heures du soir.
Aujourd'hui, les cérémonies du ven-
dredi saint seront célébrées à onze heures
du matin, à trois heures et à huit heures
du soir.
Demain, service à dix heures du ma-
tin, pour l'adoration de la croix, et à mi-
nuit, messe de la Résurrection, à laquelle
assisteront le baron de Mohrenheim et
tous les membres de l'ambassade et du
consulat russe.
Après ce service, qui se terminera vers
deux heures, on ira rompre le ieûne chez
le baron et la baronne de Mohrenheim, à
l'hôtel de l'ambassade.
Séance fort importante, hier, à l'Aca-
démie française, sous la présidence de M.
Ludovic Halévy, directeur, assisté de M.
Challemel-Lacour, chancelier, et M. Ca-
mille Doucet, secrétaire perpétuel.
Il a été donné lecture
1° D'une lettre par laquelle M. Edmond
Cramaussel, élève de l'Ecole normale su-
périeure, informe l'Académie qu'il ea.
Fauteur du manuscrit sur George Sand
portant Ien° 33, auquel une mention ho-
norable a été accordée dans la séance du
19 avril dernier.
2° D'une lettre par laquelle M. Bonnat,
membre de l'Institut, président de la So-
ciété des artistes français, iniorme la
Compagnie que, comme les années précé-
dentes, tous ses membres pourront en-
trer au Salon de 1894 dès le lundi 30
courant, jour du vernissage, sur la pré-
sentation de leurs médailles ou insi-
gnes et pendant toute la durée du Salon.
3" D'un décret autorisant l'Académie à
accepter la donation à elle faite par Mme
veuve Le Villain, d'une somme de 5,000 w
francs qui devra servir à décerner cinq
prix de vertu de 1,000 francs chacun,
l'année qui suivra la délivrance de cette
donation.
4° Enfin, d'une lettre par laquelle M.
Henry Houssaye se présente comme can-
didat au fauteuil devenu vacant par la
mort de~M. Maxime du Camp.
L'Académie, après avoir entendu les
rapports de M. Legouvé, a décerné à l'u-
nanimité le prix Jean Reynaud, d'une va-
leur de 10,000 francs, à M. Paul Dérou-
lède, et elle partage ainsi le prixVitet,
dont la valeur est de 5,400 francs 3,000
francs à Mme Arvëde Barine et à M. Bel-
laigue un prix de 3,400 francs.
Enfin, M. le duc de Broglie a lu son
rapport sur les concours Gobert et Thé-
rouanne le vote aura lieu dans une séance
prochaine. ·
Comme on le voit, le prix décerné à M.
Paul Déroulëde a été voté aussi bien par
Mgr le duc d'Aumale que par M. Chalie-
mel-Lacour. C'est un joli succès.
Le gouvernement français vient d'éle-
ver, à la dignité de grand-officier de la
Légion d'honneur, le prince R de Liech-
tenstein, major général, grand-écuyer de
l'empereur d'Autriche, et le comte Pacer,
général de cavalerie, chambellan et aide
de camp général, qui accompagnaient Sa
Majesté Impériale pendant son séjour e~
France.
Ces distinctions honorifiques ont été
conférées en échange de celles-que l'em-
pereur François-Joseph a octroyées der-
nièrement, et dont nous avons déjà fait
mention.
Nous avons, les premiers, annoncé, le
3 mars dernier, la conférence-lecture que
M. Emile Zola devait faire, hier, au Tro-
cadéro.
Il s'agissait, on se le rappelle, de don-
ner connaissance au public de quelques
extraits de Lo~r~e~. le roman de M. Zola
en cours de publication.
M. Emile Zola avait choisi la partie
encore inédite de « la première journée a,
et qui a trait aux visions de Bernadette.
Il y a là un souffle religieux vraiment
exquis et qui sera pour les lecteurs de
Lourdes ce qu'il a été, hier, pour les
auditeurs de M. Zola, une manière de ré-
vélation mêlée de surprise.
Le public, exceptionnellement nom-
breux et choisi, a beaucoup goûté les
descriptiohs que M. Emile Zola fait de la
grotte célèbre où « la dame )) apparut à
Bernadette. La pauvre enfant, éblouie
par la blancheur de cette gracieuse
image, nous est montrée tombant à ge-
noux et priant, et cela est d'un mysti-
cisme très simple et délicieux.
M. Zola y parle, en' termes d'une
haute élévation, de la Vierge: «Je suis
l'Immaculée-Conception », et on ne sait
ce qui est le plus émouvant de la figure
de Bernadette, longuement décrite, ou de
l'apparition elle-même.
Les chapitres qui suivront ressemble-
ront-ils à celui-là? S'il en était ainsi,
M. Emile Zola aurait décidément réussi
à se faire pardonner bien des choses et
.LoMrdM serait demain dans les mains
les plus pieuses.
Le public le lui a bien montré en l'ap-
plaudissant chaleureusement et en le
rappelant à trois reprises. Un coup de
sifflet parti des galeries supérieures a
valu à M. Emile Zola une nouvelle ova-
tion.
Cette conférence-lecture était encadrée
dans un concert fort brillant, auquel le
poète Jean Rameau prêtait son concours.
On sait depuis longtemps quel joli di-
seur est M. Rameau. Il a été applaudi
avec beaucoup de vigueur, et, après les
C7«~~ps et .Re-Me~&~Mce, il a dû dire
une troisième pièce, d'ailleurs très belle
et déjà célèbre les DeMd? F!e:~es.
On a également fait fête à Mmes Bar-
tet, Ludwig et Bertiny, de la Comédie-
Française à Mlle Vuillaume, de rOpéra-
Comique, et à Mlle Subra, de l'Opéra.
Résultat 6,000 francs de bénéfices
pour la Caisse des retraites de la Société
des gens de lettres.
A l'occasion do centenaire de l'Ecole
polytechnique et sur l'initiative prise par
un groupe important d'anciens élèves, un
service religieux pour les membres dé-
funts de la grande famille polytechni-
cienne sera célébré, le jeudi 17 mai, à
neuf heures du matin, en l'église de
Saint-Etienne-du-Mont.
Les officiants seront choisis parmi les
anciens élèves entrés dans les ordres.
PARADOXES ET VÉRITÉS
En retardant l'accomplissement d'un devoir
facile, on trouve le moyen d'en faire une
corvée. \\=
Louis AisoiN.
L'égoïsmo est l'amour du sacrince. des
autres.
Henri LucENAY.
~e ne sais pas si l'esprit court les rues, je
ne l'ai jamais rencontré. Combien qui s'es-
soufuent pour l'atteindre et qui ne saisiss ent
que la bêtise, faute de partir à. temps t
Arsène HoussAYE.
On sait que M.Joseph Fabre, un des
plus fidèles admirate urs de Jeanne d'Arc,
a émis, auprès de M. le directeur général
des postes, le vœu qu'on ornât de figures
françaises nos timbres français et qu'on
y remplaçât Minerve et Mercure par
Jeanne d'Arc et Hoche, par exemple.
Aux yeu's de M. Joseph Fabre et pour
rappeler le lien entréTancienne France
et la Fr&nce nouvelle, il serait bon d'asso
cier à l'image de Jeanne d'Arc une ima
ge de la Révolution.
M. de Selves vientde répondre &M. Jo-
seph Fabre que, tout en appréciant per-
sonnellement le sentiment de patriotisme
élevé qui a inspiré son vœu, il devait lui
faire connaître que toute latitude étant
laissée aux concurrents dans le choix des
compositions et des couleurs, son idée ne
pouvait être susceptible d'être réalisée
qu'autant qu'un ou plusieurs sujets s'en
inspirant seraient présentés et choisis
parle jury chargé d'examiner le con-
tours.
Ajoutons que le délai extrême accordé
pour le dépôt des projets expire le 5 mai
prochain.
Les concurrents auront-ils, jusqu'à~
cette date rapprochée, le temps d'étudier
le projet de M. Joseph Fabre? 2
De notre correspondant de Lyon
Mgr Coullié est toujours dans la Loire;
il n'a vu personne et n'a fait aucune dé-
claration. A Lyon, le mécontentement
s'accentue en présence des hésitations à
réparer l'injustice commise.
Envois au Salon des Champs-Elysées.
M. A. Steinheil, élève et neveu de Meis-
sonier deux tableaux, « le Point d'or-
gue a et « A travers champs B.
M. Léon Herbo, de Bruxelles deux
portraits de vieillards.
Mme Le Roy de Présalé buste de Mlle
Deina.
Entré hier au Salon du Champ de
Mars. On s'arrête devant les envois de
M. G. Courtois, bien marqués au coin du
talent de l'artiste, talent a la fois très
précis et très simple. La .R~pe~e, la
COM~ewp~KW et les deux beaux por-
traits exposés par M. Courtois relèvent
d'un-art calme et sûr, en pleine posses-
sion de soi-même.
A travers les livres
Dans son nouveau roman Ce qu'elles
peMue~, Mlle Jeanne Schultz, l'auteur de
la JVeM
ignorés de tous qui ont pour théâtre in-
time le cœur d'une jeune fille.
MOUVELLES A LA MAIN
Un peintre dont le tableau a été reiusé
au Salon des Champs-Elysées rencontre
un ami qu'il n'a pas vu depuis un certain
temps.
Eh bien 1 mon cher, qu'exposes-tu,
cette année ? q
L'artiste, d'un ton amer
Ma déconvenue t.
Les revendications sociales des fem-
mes continuent à se produire avec une
inten&ité croissante.
Elles ont pourtant bien tort de se
plaindre, dit M. à ce propos. Il me
semble que depuis l'origine du monde
elles ont déjà fait joliment de chemin.
Ah voua trouvez ? q
Sans doute. Elles n'étaient tout d'a-
bord qu'une septième côte de l'homme,
et bientôt elles devenaient sa moitié.
UN DOM)NO
Bbc-Notes Parisien
L'tNARCmSTE DU m!N)STÈRE DE m GUERRE
Avant-hier, vers cinq heures, les employés
du ministère de la guerre quittaient feurs bu-
reaux, quand t'un d'eux, un commis principal,
fut appréhendé par des agents de police et aus-
sitôt emmené au Dépôt. Cet employé, M. Fé-
lix Fénéon, était arrêté à titre d'anarchiste. On
lira plus loin tes détails de cette arrestation.
M. Félix Fénéon, un grand jeune homme
de trente-trois ans, est très connu parmi la
jeune génération d'artistes. H a même joué,
dans t'évoiution littéraire et artistique d'avant-
garde, un rôle assez important. Car il fut, non
pas précisément un écrivain, mais un metteur
en œuvre adroit, actif et très ardent. Il a dirigé
plusieurs revues de jeunes gens, où se sont
essayés à peu près tous ies jeunes\ écrivains
qu'on appela successivement décadents, sym-
bolistes, etc.
Vers i883 parut,dans les environs det'Odéon,
une petite revue mensuelle, la Revue zn~~eK-
dante. Le rédacteur en chef s'appelait Félix
Fénéon. Alors on vit apparaître, dans les céna-
cles du quartier Latin, un bizarre personnage.
Sur un long corps anguleux, une longue tête
mince, dont le propriétaire accentuait encore le
caractère d'acuité par des cheveux relevés haut
sur le front et par une barbe en fer à cheva),
longue et rare. Les yeux extrêmement scruta-
teurs, dans un masque votontairementimpassi-
ble. Un type de Yankee, qu'on sentait soigneu-
sement composé, un Yankee d'après Edgar
Poe.
Dans les milieux d'artistes, gens d'ordinaire
très en dehors, très communicatifs, Félix Fé-
néon parut un étrange compagnon. Par esprit
de réaction contre le débraillé de l'attitude,
on affichait dans les cercles d'alors, une poli-
tesse cérémonieuse et froide. Fénéon affectait
une froideur et une politesse extrêmes. II par-
lait très peu. Les rares mots qu'il jetait dans la
conversation étaient toujours secs et tran-
chants, toujours justes. Le geste, très rare, très
réservé, était acutangle et comme d'un auto-
mate.
On sentait que, dans l'attitude de Félix Fé-
néon, tout-~tait voulu, étudié, compassé. H y
avait une volonté évidente d'entourer sa per-
sonnalité d'un certain mystère.
–-Un fumiste t disaient les uns.
Fumiste, c'est l'étiquette vite collée, sur des
types compliqués, par ceux qui ne s'attardent
pas aux patientes psychologies démontant
pièce à pièce les caractères. Ceux-ci ne se dou-
tent pas que le fumiste, le mystificateur, est
toujours un sensitif qui se dérobe.
H y avait en Félix Fénéon un mystificateur,
mais pour une très petite part. Assurément, il
cédait volontiers au secret plaisir d' « épater le
bourgeois
Très tettré, possédant une culture scienti-
fique assez développée, il n'écrivait guère que
des notules sur les expositions des nouvelles
écoles de peinture. Sa seute œuvre est une bro-
chure sur tes peintres pointillistes. H fut le
critique, le porte-parole de t'écote pointilliste.
Le maître en était George Seurat, qui mourut
tout jeune, derrière qui marchaient Paul Si-
gnac, Luce, Dubois-Pillet, mort aussi, qui
était capitaine de la garde républicaine et gen-
dre de l'expert bien connu Ch. Pillet. Félix Fé-
néon fut à ce groupece que Théophile Silvestre
fut au groupe des peintres romantiques ou ce
que Castagnary fut a l'école de Courbet.
La RefM<° Fénéon, fut d'abord naturaliste; car, il y a dix
ans, c'était les derniers beaux jours du natura-
lisme. Puis, c'est là que se dessina te mouve-
ment symboliste. Là vinrent bientôt Faut Ver-
laine, Stéphane MaHarmé, J.-K. Huysmans,
qui y fit sa conversion et y brùta ce qu'il avait
adoré; Emile Hennequin, un critique suisse,
mort jeune Edouard Rod, toujours Suisse
Moréas, toujours Grec Laurent Tailhade,
Maurice Barrés, et bien d'autres.
Cette revue, de petit format, à couverture
saumonée, est aujourd'hui fort recherchée des
amateurs.
Vers 1886, parut un petit volume anonyme
intitulé Petit Bottin des /e~rrM et f~M or~, qui
Ht quelque bruit. Bon nombre de personna!itës
y étaient dépeintes, en trois lignes, avec une
verve gamine aussi mordante que spirituelle.
On y reconnut aussitôt te stvte acidulé de Félix
Fénéon.
Cependant, la ~erxc :KNf~eH~nfe, qu'on
avait crue morte, ressuscita sous les auspices
de Félix Fénéon et d'Edouard Dujardin, ce
fantaisiste auteur qui trouva le moyen de fas-
ciner la badauderie parisienne avec sa trilogie
d'.4~<(MM. Verlaine et Mattarmê, adorés d'un
peut nombre de sectateurs, s'élancèrent de là
vers leur célébrité.
Le symbolisme prenait l'essor à la même
époque que le boulangisme. C'est dans cette
petite revue que Maurice Barres 6t une adhésion
solennette au mouvement boutangiste, au
grand scandale de tous les collaborateurs, «es-
thètes méprisant la politique ».
Félix Fénéon écrivait peu dans la revue. Il
n'y faisait guère que des échos d'un comique
pince-sans-rire, car il eût été certainement un
échotierautempsoù l'on faisait des échos un
peu méchants.
Il se contenta de faire de brefs articles sur
les peintres pointillistes, et de les déposer dans
la Vb~MC, de M. Gustave Kahn dans )'En~e-
hors, le journal d'anarchisme littéraire que di-
rigeait Zo d'Axa.
Chez ce mystificateur à froid, l'anarchisme,
s'i) y en a, doit être teinté d'une forte d~se de
mystification. Car beaucoup d'entre ceux qui
connaissent Félix Fénéon se demandèrent
souvent s'il n'était pas simplement un élève
très compliqué de Sapeck. Son arrestation
surprendra tous ceux qui pensaient que l'anar-
chie dans la couleur devait lui suffire.
Paul Verlaine tançait volontiers sa verve ga-
mine sur les chaussés de ce singulier person-
nage, dont la silhouette immobile t'ëtonnait.
!) est rigoiot disait Verlaine.
Et quelques-uns le disaient sorti d'un conte
d'Honmann.
TOUT-t'Mtttt
r
NOTRE SUPPLEMENT
DE DtMANCHE
Sous ce titre « ApRÊs LE CONCOURS
HippiQUE )), le che matin, un SMp~M~e~~ ~MS~ où ses
abonnés et son élégante clientèle sportive
trouveront réunies toutes les opérations
du concours hippique qui vient de finir.
Outre la partie hippique, ils trouveront
également, dans ce supplément spécial,
une revue des toilettes les plus remar-
quées~-ces réunions printanières.
Ce supplément, dont les dessins sont
dus au crayon d'un jeune dessinateur
de talent, aura seize pages de texte et sera
encarté dans une élégante couverture.
Le numéro 4e dimanche, avec le sup-
plément, sera vendu 20 centimes à Paris
et dans les départements.
LA PRÊS!DENCE
L I EC
DE
LA RÉPUBLIQUE
Avec la nomination de la commission
du budget s'est ouverte, hier, en réalité,
la campagne qui doit aboutir à l'élection
présidentielle de novembre prochain.
C'est, à proprement parler. 1~ première
fois, depuis la constitution de la républi-
que, que le renouvellement ou la trans-
mission des pouvoirs présidentiels s'opé-
rera à la date normale et dans des condi-
tions régulières.
L'Assemblée nationale, qui était souve-
raine, remplaça M. Thiers par le maré-
chal de Mac-Mahon par un vote ordi-
naire.
Le Congrès pi évu par la Constitution
dut se réunir inopinément, lors de la dé-
mission du maréchal de Mac-Mahon.
A la vérité, M. Grévy vit renouveler ses
pouvoirs en 1885, mais il n'avait pas de
concurrents; Gambetta était mort, M.
Ferry était à terre, M. de Freycinet pas-
sait pour un dauphin.
Dans ces conditions, le Congrès de Ver-
sailles fut une simple formalité, les répu-
blicains n'ayant pas encore mesuré les
inconvénients d'une présidence renouve-
lée pour sept nouvelles années.
Le cabinet Rouvier, qui dut faire pro-
céder a la succession de M. Grévy, n'a-
vait pas été choisi dans ce but sa tâche
était tout autre.
Seul, M. Casimir-Perier, en acceptant le
pouvoir, a pris l'engagement implicite, vis-
a-vis du parti républicain, d'assurer la
transmission des pouvoirs présidentiels.
Il l'a si bien compris, du reste, qu'il
s'en est expliqué avec M. Carnot, lorsque
celui-ci l'appela en décembre dernier à
l'Elysée.
M. Casimir-Perier déclara formelle-
ment à M. Carnot qu'il ne serait pas son
compétiteur à la présidence de la répu-
blique, s'il se représentait. Depuis, M.
Casimir-Perier a renouvelé cette assu-
rance aux divers personnages politiques
qui l'ont interrogé sur ce point délicat.
De telle sorte qu'en dehors des surpri-
ses qui font que tout ministère risque
chaque jour d'être fusillé au coin d un
fourré parlementaire, l'existence du cabi-
net actuel dépend uniquement de la dé-
cision de M. Carnot.
En effet, si M. Casimir-Perier ne bri-
gue pas la présidence de la république,
ses adversaires le laisseront peut-être vi-
vre si, au contraire, on sait d'une façon
positive que M. Carnot se retire, M. Ca-
simir-Perier aura contre lui un syndicat
composé des éléments les plus divers
d'opposition, qui n'épargneront rien pour
provoquer sa chute dans des conditions
telles qu'il n'aura pas le temps de se
remettre en selle pour le mois de no-
vembre.
Ce syndicat comprend des radicaux,
des socialistes et des membres du centre
qui ont des rancunes à satisfaire ou des
revanches à prendre.
M. Cavaignac est un des plus acharnés;
il en veut d'abord à M. Casimir Perier
de ne lui avoir pas oNert de porteteuille
il lui en veut surtout de faire partie de la
MoMesse fepM&Mca~e. M. Cavaignac avait
espéré que le nom de son père lui servi-
rait, comme celui de Carnot, au président
actuel.
Il s'insurge contre la troisième dynas-
tie des Perier.
Qui marche avec M. Cavaignac ?
M. Bourgeois à la Chambre et M. Pey-
tral au Sénat, où l'ancien ministre des
nnances est entré à l'instigation de M.
Carnot qui en ferait volontiers, le cas
échéant, un nouveau Tirard.
M. Cavaignac n'a pas, d'ailleurs, tout
le centre droit avec lui; M. Léon Say,
par exemple, s'est prononcé dans son in-
timité et publiquement en faveur du bud-
get Burdeau; aussi, pour se rapprocher
des radicaux, l'ancien ministre de la ma-
rine s'est-il tout à coup montré partisan
de l'impôt sur le revenu ) Notons, en
passant, que M. Léon Say n'a pas été
élu, hier, membre de la commission dm
budget.
La lutte qui va s'engager aujourd'hui
pour la désignation du président de la
commission du budget est donc fort inté-
ressante elle est circonscrite entre MM.
Rouvier et Gavai gnac. Si M. Cavaignao
l'emporte, c'est le triomphe du S!/M
budget lui promet de l'agrément," ainsi
qu'au cabinet Perier.
XX.
LA COLLABORATION
AU
TU EA~TT~JB
Lettres de M!M. François <3
MM. François Coppée et Alphonse Daudet
nous adressent, sur la question de ia colla-
boration au théâtre, les deux jolies lettres
suivantes, que nous joignons a celle que nous
ont écrites MM. Alexandre Dumas fils, Hen-
ry Meilhac, Ludovic Halévy, Victorien Sar-
dou, Adolphe d'Ennery, Emile Zola, Jules
Claretie et Jules Lomaître
M. F~a~po:~ Coppée
Mon cher confrère,
Je devrais me récuser, car j'ai fait seu-
lement et dans ma jeunesse, du temps
que j'étais paresseux deux ouvrages
en société avec mon ami Armand d'Ar-
tois.
Le premier, un drame en prose, inti-
tulé le Petit- Ma~M~s où il y avait
pourtant un sujet de pièce terriblement
corsé fut très houspillé, le soir de la
« première », à l'Odéon, et nous ne par-
vînmes même pas à faire jouer l'autre, un
grand drame en vers, la ~?M.
Ce n'était pas encourageant, je renon-
çai aux collaborations. Mais j'ai conservé
un souvenir charmé de mes séances de
travail avec d'Artois. Rien n'est plus
amusant que cette excitation réciproque
de deux esprits.
Maintenant a-t-on plus de chance de
produire une belle chose en travaillant
seul ou avec l'aide d'un compagnon ? Qui
le sait ? Il semble bien qu'un nls ne de-
vrait avoir qu'un père. Cependant ils sont
deux, les auteurs du Gendre de Af..Pot-
rier.
La vérité, c'est qu'il n'y a pas de recette
pour les cheis-d'œuvre et celui qui est
en train d'en écrire un ne s'en doute même
pas.
Sentiments cordiaux,
François CoppÉE.
M. ~t~oMM Daudet
Mon cher confrère,
Le vieux Lebrun, recevant Emile Att-
gier à l'Académie, disait ceci
« Quand je vois un ouvrage écrit pM
deux auteurs, je suis tenté de ne pas le
prendre pour une œuvre d'art, mais pouf
un travail facile dont le but est moins lt
gloire que le succès. »
Je suis de son avis.
Alphonse DATJDET.
«low 1
LES ANARCHISTES
Arrestation d'mm emptoye dm minta~
tëre de ta~ guerre
Nous avions annoncé, hier matin,
qu'une arrestation mystérieuse avait été
faite, la veille au soir, par M. Clément.
Il s'agissait, disions-nous, d'un compa-
gnon ami de Matha, le coin'eur arrêté, le
matin même, chez un sieur Bossaud, 15,
rue de la Tour-d'Auvergne.
Ce coiReur, qui avait fondé, a Londres,
l'M~tOM<~ Toilette C~, était arrivé
depuis quinze jours à Paris. Grand ami
d'Emile Henry et d'Ortiz, il avait été lié
avec tous les individus soupçonnés depuis
deux mois.
Or, dans les papiers de Matha, M. Clé-
ment avait trouvé des lettres compromet-
tantes d'un employé du ministère de la
guerre, M. Féhx Fénéon.
L'arrestation fut décidée immédiate-
ment, et M. Clément l'opérait, à six heu-
res, au ministère de la guerre.
On lira plus loin, d'après le récit même
de Mme Fénéon, mère de l'anarchiste,
comment cette arrestation a été iaite.
Ajoutons que Louis-Félix-Alexandre
Fénéon est né à Turin, en 1861, de père
et de mère trançais. ·
Félix Fénéon était entré au ministère e
de la guerre, il y a dix ans, où il était de-
venu assez rapidement commis principal.
à 4,000 ir.
Il était employé au bureau du recrute-
ment.
CHEZ M~ FÉNÉON
Le récit de t'a~rreat&titm
4, passage Tourlaque, entre la rue Dam-
rémont et la rue de Maistre, à Montmar-
tre. Un logement au quatrième étage. Aux
murs, des toiles d6 peintres impression-,
nistes Seurat, Signac, Lucé, Maurin
Louis Hayet.Pissaro, tous amis inLimes de
Félix Fénéon; des bas-reliefs de Charpen-
tier, une pâte de verre d'Henri Ct'os en
un mot, un intérieur d'artiste et d'homme
de lettres très lancé dans le mouvement
jeune.
Nous trouvons Mme Fénéon étendue
sur un canapé près d'elle, un le repas in-
achevé, Dans le petit salon va et vient
sans cesse une jeune ûlle d'une dizaine
d'années, sa nièce, qui est .a sa charge.
Si je vous ai ouvert, nous dit-elle, et
si je consens à vous recevoir, alors que
j'ai fermé systématiquement ma porte à
tous vos confrères, c'est uniquement
parce que vous êtes venu à moi porteur
de la recommandation d'un ami de mon
ûls. s.
» Que vous dirai-je que cet ami ne vous
ait dit ? Vous connaissez l'arrestation de
Félix et l'horrible et l'accusation qui pèse
sur lui ? x~
Et, comme nous demandons à Mma
Fénéon de surmonter l'émotion qui l'é-
treint et de nous faire le récit de cette
arrestation, elle nous répond en pleu-
rant
–Je tâcherai, monsieur. Mms~issez--
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