Titre : Le Gaulois : littéraire et politique
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1882-09-18
Contributeur : Pène, Henri de (1830-1888). Directeur de publication
Contributeur : Tarbé des Sablons, Edmond Joseph Louis (1838-1900). Directeur de publication
Contributeur : Meyer, Arthur (1844-1924). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 18 septembre 1882 18 septembre 1882
Description : 1882/09/18 (Numéro 64). 1882/09/18 (Numéro 64).
Description : Collection numérique : Arts de la marionnette Collection numérique : Arts de la marionnette
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k524365g
Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 22/02/2008
Lundi 18 Septembre 1888
Paris £ S» centimes. Départements ET Gares ï SJO centimes}
Seizième Xrinëè »̃* Troisième Série Numéro 64
̃ESC. DDE ^élTEl
Rédacteur en Chef
ANNONCES
MM. CH, LAGRANGE, CÈBJP O*
6, PLACE DE LA BOURSE, 6
;Et à l'Administration du Journal
ADMINISTRATION
DE DIX HEURES A CINQ HEUBES
», boulevard de* Italien», •
ABONNEMENTS, PETITES ANNONCÉS :]
RENSEIGNEMENTS
9, boulevard des Italien»', 0
Arthur meyer
Directeur
S* ABONNEMENT»
Paris Départements
Un mois 5 fr. Un mois. 6 fr.
Trois mois. 13 50 Trois mois. 16 fr.
Six mois 27 fr. Six mois 32 fr. ̃
Un an. 54 fr. Un an 84 fr. /^T
•̃"̃ Etranger -S'v-V
Etranger /
Trois moi* (Union postale) 18 fr :> i j
RÉDACTION *>
«, boulevard des Italien», 0
DK DEUX HEUEES A MINUIT
PARIS-JOI1RNAL
,• LE
MINISTBRB 1 «AI
Depuis quelques jours, on recom-
mence à agiter les destinées du cabinet
Duclerc. Au début, dans la première
joie des vacances, on ne s'occupait pas de
lui, on le laissait moisir tranquillement
dans son coin c'était ce qui pouvait lui
arriver de mieux. Malheureusement,
certains signes annoncent qu'on a cessé
de l'oublier toute la semaine passée, on
l'a mis en scène, on l'a fait parler, on a
discuté avec passion et avec subtilité sa
situation intérieure, ses intentions, ses
chances de durée c'est grave 1
Les conversations publiées par les re-
porters ont peu éclairé le public. Sur
Beaucoup de points, elles sont vagues
et même inintelligibles. M. Duclerc a-
t-il un programme? S'il en a un, quel
est-il? A-t-il réellement conçu le dessein
de se mesurer, dès la rentrée, avec la
Chambre, et de lui imposer ses vues, ou
de périr? A-t-il prononcé le mot de dis-
solution ? On a épilogue à perte de vue
sur ces diverses questions, sans parvenir
à les résoudre. Les uns vous représen-
tent le président du conseil comme un
parlementaire soumis qui attendra, pour
avoir une volonté, que la Chambre ait
exprimé la sienne les autres, comme
un chef résolu, mais déjà fatigué, qui
s'empressera de jouer la grande partie
"(c'est le mot qu'on lui prête), de provo-
quer hardiment la majorité en lui met-
tant le marché à la main, et qui, pour
éviter une humiliation, ira spontané-
ment à un désastre. Que conclure de
ces interprétations contradictoires, ex-
cessives, de ces bavardages invraisem-
blables et impossibles ?
'̃ '̃ "̃̃'̃•-•
Sans chercher midi à quatorze heures,
et sans tomber dans la politique de por-
tière, il suffit de rapprocher certains
aveux, certaines circonstances, et sur-
tout de se reporter aux origines du mi-
nistère, four apercevoir très clairement
dans quelle position il se trouve, àquel-
les conditions il peut vivre, de quelle
maladie il doit mourir. Sa formation et
sa composition en disent plus long sur
son état et sur son avenir qu'une mon-
tagne de commérages et une avalanche
de commentaires. Il était phtisique en
naissant, mais c'est quelquefois un avan-
tage que de savoir qu'on est né phtisi-
que on se soigne i
Le T août dernier, après treize ou
quatorze jours d'une gestation ministé-
rielle qui commençait à devenir ridi-
cule, on éprouvait un irrésistible besoin
d'accoucher. On voulait un ministère à
tout prix on l'aurait accepté, quelcon-
que de toute main. La chose tournait si
Sien à la bouffonnerie, qu'on s'étonnait
de ne pas voir offrir un portefeuille à
tous les grotesques de la Chambre. Les
mauvais plaisants parlaient d'un cabi-
net Arthur Picard. Devant la commis-
sion d'enquête sur le siège de Paris,
comme on demandait à Buvernois
pourquoi il avait acheté des fusils à des
marchands de pommes de terre, il ré
pondit spirituellement « J'en aurais
acheté à Cartouche » M. Grévy, as-
siégé" et bloqué, aurait certainement 't
accepté pour ministre le premier Bou-
deville venu. Le mot de la situation, sur
toutes les lèvres, était « II faut que ça
finisse! »
Or ça ne pouvait finir qu'à une con-
dition, c'est que le cabinet eût au moins
deux jours devant lui, qu'il ne fût pas
renversé, sur l'heure, par une interpel-
lation immédiate. Le point capital était
de gagner du temps, d'arracher à 1 im-
patience et à la lassitude de la Chambre
ce premier répit indispensable, et d a-
vQir les vacances pour se retourner. Un
ministère et les vacances après, on
verrait! 1
~#
•"̃Pour obtenir ce résultat modeste, il
fallut nécessairement prendre un peu
partout, contenter beaucoup de gens, en
froisser le moins possible. On fit le sal-
mis qu'on appela ministère. Jamais on
n'avait vu assemblage plus baroque. Ce
cabinet hétéroclite paraissait, à pre-
mière vue, extravagant, incroyable. On
ne lui donnait pas trois jours à vivre
après la rentrée. Les éléments de mé-
lange étaient si évidemment incompati-
bles et si réfractaires les uns aux>utires,
les personnages bombardés ministres
hurlaient si fort de se voir accouplés,
ffu'on se demandait par quel sortilège
M Grévy avait pu les mettre ensemble
sans faire éclater la chaudière ministé-
rielle. On expliquait ce miracle par 1 en-
vie naturelle que tout homme apporte
au monde en naissant d'être ministre,
ne fût-ce qu'une heure! Enfin, vaille
que vaille, on avait une manière de
Satimét. Seulement, c'était le lende-
main qu.'H fallait voir.
Le lendemain apparut assez claire-
ment, niême dans la fumée du début
M Gambetta faisait sa rentrée 1 Soit
que les circonstances eussent manœuvré
pour lui, on ne tarda pas à remarquer
nu'il avait trois ou quatre ministres à lui
dans le lot; que, les autres étant divisés
ou inoffensifs, la majorité du cabinet
devenait gambettiste, et que le cabinet
lui-même prenait une couleur gambet-
-tfsfe assez prononcée. Assurément ce
n'était pas la revanche complète du
Grand Ministère et du Grand Ministre,
mais ©'était un retour de fortune et un
avantage signalé, M. Gambetta faisait
brèche, encore une fois, dans le gouver-
nement. Le pouvoir occulte qu'il avait
exercé naguère, avant sa tentative di-
recte et personnelle, par son triumvirat
Farre Constans-Cazot, il devenait libre
de l'exercer de nouveau par d'autres
personnages et d'organiser un second
triumvirat Fallières-D'evès-Legrand. Les
députés qui ont une teinture littéraire
s'écrièrent de tous côtés « Bien joué,
Marguerite!
Marguerite avait été servie, dans l'es-
pèce, par l'embarras inextricable où
s'était trouvé M. Grèvy mais il demeure
incontestable que M. Gambetta sut pro-
fiter de.ce succès inespéré, le grossir et
le marquera son chiffre, afin de lui im-
primer un caractère définitif. Aussitôt
le ministère formé, il s'en déclara l'ami
et l'appui. Tous ses journaux prirent
envers le nouveau cabinet un certain
ton de bienveillance et d'encourage-
ment auquel ils n'ont pas encore re-
noncé. M. Gambetta était redevenu. le
Protecteur! 1.
**#
M. Duclerc, président du conseil, a
senti le péril. C'est un homme très
doux, et même un peu naïf (on vient
d'en avoir une nouvelle preuve), mais
qui n'aime pas à-être le protégé, c'est-à-
dire le serviteur de quelqu'un» et qui,
même dans sa modestie, a la prétention
de voler de ses propres ailes. Il a com-
pris la nécessité de secouer le joug, ou,
pour employer une expression plus
exacte, de détacher les lisières invisibles
dont on commençait à l'enlacer. De là
ses -essais tout récents, et tout timides,
pour s'affirmer, pour dégager sa per-
sonnalité propre, pour rester Duclerc
delà ses velléités d'explications et d'épi-
tres, ses confidences bizarres et ses ap-
pels compromettants, ses épanchements
moroses dans des seins inconnus.
Mais on ne sort pas, comme on veut, 1
de l'effacement obligatoire. Comment
être soi dans un pareil pêle-mêle ? Com-
ment se débrouiller au milieu d'une telle
confusion et d'un tel entourage ? M. Du-
clerc est prisonnier, et gardé à vue.
Aussitôt qu'il manifeste un semblant de
volonté ou d'indépendance, les compa-
gnons sont là, conseillés et stylés, qui le
remettent au pas. Devès crie, Legrand
se révolte, Fallières parle de s'en aller.
On voit cela d'ici, même pendant les va-
cances que sera-ce au retour, quand
députés et ministres se trouveront face
& face, et que le cabinet Duclerc devra
compter avec une Chambre ragaillar-
dis? q
̃̃̃. • -'̃̃'̃ •̃ # ̃
Que se passera-t-il ? Evidemment ce
malheureux cabinet va être attaqué sans
miséricorde, et sa nullité ne le sauvera
pas des assauts qu'on lui prépare tom-
bera-t-il au premier choc?
Il a pour lui le souvenir des difficultés
qui ont présidé à sa naissance, et de la
crise d'où il est sorti. Tout le monde a
pâti, dans cette affaire, et les républi-
cains reconnaissent eux-mêmes que la
république en a souffert un très sensible
discrédit. On aura peur de recommen-
cer trop tôt, on sentira le besoin d'être
sage pour échapper, à ce tragique fan-
tôme de la dissolution qui apparaît déjà,
comme une menace, à l'horizon parle-
mentaire. .;̃̃ ̃
Le cabinet a encore à son actif cette
protection de M. Gambetta. Elle le gêne,
elle le compromet; mais elle contribue,
dansune certaine mesure, à le soutenir.
Il en bénéficiera, coûte que coûte, aussi
longtemps qu'il durera, car il est clair
que M. Gambetta y trouve son compte.
M. Gambetta, entamé dans ces der-
niers temps, a un intérêt certain à ren-
trer doucement par cette porte, à ga-
gner du temps, à rétablir son influence
sous le couvert d'autrui, à restaurer,
avec un endosseur officiel, son gouver-
nement occulte. Il n'y manquera pas il
manifeste déjà, par tous ses journaux,
l'intention bien arrêtée de prolonger
autant que possible la fragile existence
du cabinet, et il se fâche quand le pré-
sident du conseil risque un mot ou un
geste qui pourrait en hâter la fin. Vous
avez vu avec quelle sollicitude les orga-
nes gambettistes ont travaillé, depuis
quelques jours, à pallier, à expliquer
les petites imprudences de M. Duclerc,
avec quel soin ils le sermonnent quand
il s'émancipe, et le ramènent quand il
s'égare Toute démarche, toute activité
un peu échauffante lui est défendue par
ordonnance. On dirait que M. Gambetta
est le médecin de M. Duclerc, et l'on de-
vine aisément qu'il tient à honneur de
prolonger son malade. Un gambettiste
me disait jeudi dernier que la devise du
cabinet devait être :« Je plie et né romps
pas 1 Et il ajoutait, en manière de plai-
santerie Nous avons été le ministère
du chêne; U faut que celui-ci soit le mi-
nistère du roseau..
Voilà donc deux atouts dans son jeu
la peur d'un nouveau gâchis, et la bien-
veillance intéressée de M. Gambetta.
Reste à savoir si un ministère peut vivre
par le tremblement d'une majorité et
dans la poche d'un homme. Tous ceux
qui, jusqu'à présent, ont essayé de ce
genre d'existence n'y ont pas longtemps
résisté. Ils ont été le jouet de l'imprévu
et du hasard; à la première surprise, ils
sont tombés. On se demande comment
un cabinet, même plus solide que le ca-
binet Duclerc, pourrait-supporter le choc
des forces contraires qui luttent autour
de lui et en lui. On l'a appelé le minis-
tère des vacances en tirant à outrance
sur la corde, on pourra peut-être le me-
ner jusqu'aux étrennes et l'appeler le
ministère des confiseurs; mais ce sera
le boutdu monde, et cet infortuné poitri-
naire ne verra pas. la grande session.
MYSTÈRE
Nos Echos
AUJOURD'HUI!
A 6 heures et demie, dinar au Orand-Hôtel
admission jusqu'à 7 heures.
Pendant la durée du dîner, l'orchestre de
M. Desgranges jouera dans la nouvelle salle de
musique.
MENU
Potage julienne au consomma
riors-d'œuvre
Poisson
Pommes de terre à l'anglaise
Aloyau aux racines
Riz de veau à la royale
̃ Faisans bardés
Salade
Petits pois à la française v >
Gâteau Richelieu
Glace ̃'̃
Dame blanche
Desserts M
rron»g««. fruits et patits-four»
Le salon des dames est ouvert aux Yoyageuri.
Piano, orgues, tables de jeux.– Dîner à la eartt
au restaurant. Billards au Café Divan.
Le programme du dîner-concert. (voir la
<• page.) ••̃'•
̃ ̃ ,7
Musée Gtrévin, 10, boulevard Montmartrt.
De onze heures du matin & oneo heures du mit*
~pc
Opéra, 7 h. 3/4. Les Huguenoti.j,
Français, 8 h. »/». Le Demi-Monde.
A l'Opéra-Comique. Les Diamants de la
Couronne.
LA POLITIO0B
L'Angleterre a battu Arabi sans nous;
reste à savoir si elle l'a battu contre
nous. Notre président du conseil a en-
voyé ses félicitations à M. Gladstone.
Peut-être a-t-il eu raison. Les intérêts
français peuvent bénéficier du succès
des armées anglaises; cela dépend de la
tournure que va prendre la campagne
diplomatique succédant à la campagne
militaire que les Anglais ont rondement
menée.
Est-ce la conférence de Constantino-
ple, ou bien est-ce un congrès européen
qui devra régler les questions soulevées
par la situation des affaires égyptiennes?
L'alternative n'est pas indifférente. Un
con grès nous paraît une porte ouverte sur
un inconnu redoutable. Si, comme il est
permis de le supposer, la rapidité avec
laquelle l'Angleterre vient de terrasser
Arabi est une déception pour la politique
de M. de Bismarck, un congrès ne lui of-
frirait-il pas une occasion trop facile de
greffer, comme il aîme à le faire, des
questions incidentes sur là question pri-
mitive, et de jeter des ferments de dis-
corde entre la France et l'Angleterre,
d'une part, entre la France et la Russie,
de l'autre, en vue d'éventualités qui
pourraient aboutir à tout autre chose
que la paix de l'Europe? `t
Si l'Angleterre veut user modérément
de la victoire, comme elle le promet en
ce moment, pourquoi les ambassadeurs
des puissances à Constantinople ne suf-
firaient-ils pas à la tâche d'organiser un
modus vivendi en Egypte ? Nous crain-
drions qu'un congrès ne fît intervenir
la question des frontières turco-grec-
ques, celle de Tunis, celle de l'Arménie,
et ne mit aux prises des prétentions ,qui
sont encore à fétat latent. L'Angleterre,
par sa victoire, est maîtresse de la mer
,ouge. Elle vient défaire en Egypte quel-
que chose d'analogue à ce que la France
de 1830 fit en Algérie. L'intérêt des deux
grandes puissances occidentales serai t
de s'entendre en Afrique, le plus promp-
tement et le plus simplement possible
le combat de Tel-el-Kébir, si l'Angle-
terre est modérée, si la France peut
faire, hélas autre chose que des sot-
tises, doit amener la paix dans la Médi-
terranée, par la conciliation bien enten-
due des intérêts des deux nations dont
le pavillon y joue le-plus grand rôle.
H. P.
L'élection sénatoriale de Mézières.
M Péronne, républicain, est élu en
remplacement de M. Toupet des Vignes,
décédé, par 306 voix contre 252 don-
nées à M. Simon.
LE MONDE ET LA VILLE
Les cendres de David, qui depuis le
7 janvier 1826, reposaient dans l'ancien
cimetière de Bruxelles; ont été trans-
férées dans le nouveau, hier matin, Sui-
vant la volonté de la famille, la céré-
monie a eu un caractère absolument
privé.
Un prêtre, qui assistait â la levée du
corps et àWnhumation.aditlesprières
des morts.
Etaient venus de Paris, tous les des-
cendants survivants du grand peintre
MM. Jules David, le peintre; baron
Jeannin, ses deuxfils et son gendre M.
Dugué de la Fauconnerie et le baron
Meunier, tous fils et arrière-petits -fils.
Un seul étranger, M. Lacroix, ami in-
time de la famille, assistait à cette trans-
lation.
Carnet de deuil »;
Une triste nouvelle nous arrive de
Charleville.. c.
Le grand manufacturier de Sedan,
M. de Montagnac, ancien député, offi-
cier de la Légion d'honneur, est mort
subitement hier, à la gare de Charleville,
au sortir de la réunion des actionnaires
du Courrier des Ardennes, qu'ii venait
de présider..
Le corps a été transporté par un train
spécial à Sedan, où son arrivée a pro-
duit la plus vive émotion. Le grand ca-
ractère et la profonde générosité de
M. de Montagnac lui avaient conquis
l'estime et l'affection de tous les hon-
nêtes gens; il était président des écoles
libres de la ville.
Hier ont eu lieu, à onze heures, les
obsèques de Mme Emile Fould, décédée
à Saint Germain en-Laye.
La cérémonie religieuse, présidée par
M. le grand-rabbin Isidor, a été' faite
dans un des salons de là maison mor-
tuaire, 24, rue Saint-Marc, tendu de
draperies noires, lamées d'argent, et
transformé en chapelle ardente à cet
effet.
Le deuil était conduit par MM. Paul et
Alphonse Fould, fils de la défunte. M.
Emile Fould père, alité en ce moment à
Saint-Germain, n'a pu assister aux obsè-
ques.
L'enterrement a eu lieu au cimetière
du Père-Lachaise.
Nous avons remarqué dans l'assis-
tance le comte Abraham de Camondo,
MM. Pereire; Stern, baron Horace de
Gunzburg, baron Weisweiler, Ellissen,
Ephrussi, etc., etc. •̃ i*
Nouvelles mondaines
Publications de bans
M. le comte Louis-François-Alfred de
Pontevès, propriétaire, et Mlle Marie-,
Louise-Esther de Lespinasse, fille du
baron Armand de Lespinasse, officier
général en retraite, grand-cordon de la
Légion d'honneur.
**# ̃ ̃. -i
S. A. Ismaïl-Pacha, actuellement en
villégiature à Courbevoie, s'est rendu à
Saint-Gratien, pour rendre .visite à
S. A. I. la princesse Mathilde.
Sa visite a été longue. Il a visité la
propriété dans les plus grands détails et
avec l'intérêt qu'il apporte à toutes les
belles choses.1
Ismaïl-Pacha ne vient en ce moment
qu'une heure par jour à Paris, pour don-
ner ses audiences au Grand-Hôtel.
̃ ̃'• ̃'̃•' ."•;
La jolie Mme Porgès vient de traver-
ser Paris, se rendant à Fontainebleau.
La grand'ville est en ce moment ré-
duite au rôle de passage y séjourner
serait un crime de lèse-chic. •
Le duel des compagnons Godar et
Crié a eu lieu hier matin, au bois de Bou-
logne. La gendarmerie est intervenue
deux fois; témoins et adversaires ont
dû pren dre la fuite pour chercher un
terrain plus propice.
Après trois reprises, qui ont duré
vingt-cinq minutes, le compagnon Go-
âar a été légèrement blessé au bras
droit, ce qui a mis fin au combat.
Le général Billot est attendu aujour^
d'hui à Arcachon, où il vient retrouver
sa famille.
Avis à Mme de Montifaud.
la préfecture de police va rappeler
au public les ordonnances qui interdi-
sent formellement aux femmes de se
montrer, hors le temps du carnaval,
en costume masculin, à moins d'une
autorisation du préfet.
Cette autorisation n'est délivrée que
sur le vu du certificat d'un officier de
santé, légalisé par le commissaire de po-
lice, lequel constate qu'il y a nécessité
du travestissement par raison de santé.
NOUVELLES A LA MAIN
La petite ville de Pontarcy, dont le
mouvement retarde de quelques an-
nées, s'est offert un Caveau à l'instar de
Paris.
Les chansonniers du cru s'y réunis-
sent une fois par semaine pour y passer
aux vers la chronique locale.
Dès qu'un Parisien apparaît dans la
région, l'habitant s'empresse de lui
faire les honneurs du petit local où l'on
chante.
Un de nos amis a été soumis récem
ment à cette cruelle épreuve.
Eh bien? lui demande son intro-
ducteur au sortir de la petite fête,
comment trouvez-vous notre Caveau de
Pontarcy.
Très réussi fait le boulevardier
c'est charmant et sans prétentions
un petit caveau de famille lv
Dans un restaurant de nuit.
Un client grincheux est attablé de-
vant quelques douzaines d'huîtres.
Il en goûte une, fait une horrible gri-
mace et, s'adressant au garçon
1 II y a longtemps qu'elles n'ont été
fraîches, vos huîtres ? 2
Le garçon, avec conviction
Oh monsieur, si on peut dire Elles
arrivent à l'instant de Marennes.
Ça, des marennes! Allons donc 1
dites des armoiricaines 1
UN DOMIHO,
•.• LE
FONDATEUR DU PUSEYISME
Le docteur Pusey, fondateur du pu-
seyisme, est mort hier en Angleterre, à
l'âge de quatre-vingt-deux ans.
Ministre de l'Eglise anglicane, profes-
seur de théologie à l'Université d'OX-
fofd, il groupa autour de lui un certain
nombre de professeurs et de pasteurs
lesdocteurs Wilberforce;Palmer, Ward,
Oakley, Wingfield, Manning (depuis
créé cardinal par Pie IX), Tnorndike,
Perceval, Koble, Newman (depuis créé
cardinal par Léon XIII), Bowden, etc.;
et, de concert avec eux, résolut d'appor-
ter des réformes dans l'Eglise angli-
cane, en réclamant la séparation du spi-
rituel et du temporel, en faisant revivre
à peu près tous les dogmes et toute la
discipline de l'Eglise romaine, et en rat-
tachant la confession ainsi réformée à
l'Eglise des premiers siècles, pour re-
nouer, comme il disait, la chaîne des
temps.
Cette doctrine reçut le nom depu-
seylsme, du nom de son fondateur. Dès
1833, elle devint l'objet de l'enseigne-
ment du docteur Pusey et de -fies amis,
qui la développèrent dans un sens où
elle devait aboutir au catholicisme.
C'est ainsi qu'ils professèrent le rés^-
pect de la succession apostolique, le
dogme de la justification, la nécessité
des sacrements, le dogme du purga-
toire, le culte de la sainte Vierge, le sa-
crifice, de la messe l'invocation des
saint?,, la liturgie romaine, la sainteté
du célibat, l'interdiction aux laïques
d'hiterpréter la Bible, etc.
Pour propager leurs idées, ils publiè-
rent un grand nombre de petits traités
théologiques, sous le titre de: Tracts for
the Urnes; ils multiplièrent les sermons,
les conférences, les discours. Bref, ils
se livrèrent à un véritable apostolat.
Comme on l'a vu par les noms des
cardinaux Mànning et Newman, plu-
sieurs furent amenés à se convertir au
catholicisme et c'est au puseyisme que
revient l'honneur du mouvement qui,
depuis un demi-siècle, porte l'Angle-
terre vers le catholicisme. Pendant cet
espace de temps, en effet, un vingtième
des Anglais et un dixième des Ecossais
se sont faits catholiques.
Le docteur Pusey n'a pas, pour sa
part, osé aller jusqu'au bout de la logi-
que de ce mouvement cependant. l'on
prétend que tout en restant extérieure-
ment fidèle à sa doctrine, ily aune quin-
zaine d'années qu'il a secrètement abjuré
entre les mains de l'Eglise romaine.
Son long apostolat a été traversé plus
d'une fois. En 1843 ayant prêché dans
un sermon le dogme de la transsubstan-
tiation, tel que l'entendent les catholi-
ques, il fut traduit devant une commis-
sion de l'Université d'Oxford, et privé
pour deux ans du droit 'de prêcher et
de professer dans le ressort universi-
taire.
EMILE HARDOUIN
U CÏG4LE ET LA FOURMI
Fable probablo
La République, ayant bien radoti •
Tout l'hiver et tout l'été,
Se trouva fort dépourvue
Quand l'Egypte fut vaincue.
Elle regarda le gâteau
Et, pour en avoir un morceau,
Elle alla crier famine, • î
Chez Albion, sa voisine,
Lui disant: >
Et maintenant
'̃> Part à deux, charmante enfant.
̃ '<̃̃' Albion n'est pas donneuse, ̃<
C'est là son moindre défaut.
J Que faisiez-vous, au temps chaud ? Q
Dit-elle à la solliciteuse,
Quand Arabi, plein de courroux,
Tenait tête à l'armée anglaise,
Et, quand nous la trouvions mauvaise^
Etiez-vous à côté de nous ? 9
Pendant ce temps, que faisiez-vous ? Y
Nuit et jour, à tout venant,
Je chantais la Marseillaise.
Vous chantiez ? J'en suis fort aise.
Brossez-vous le ventre à présent
LA Fontaine-Walla.ce.
« ̃̃
BLOC-HOTES PARISIEN
On annonce la très prochaine arrivée à
Paris d'une voyageuse célèbre, inédite ou
peu s'en faut, qui n'a pas fait moins de
huit mille lieues dans le centre de l'Afri-
que. à quatre pattes. Il s'agit delà chienne
Mabel, la compagne de l'illustre docteur
Livingstone.
A la mort de son maître, elle" fut achetée
par un riche négociant de Bombay, sir Sa^
muel Monroe, qui, après l'avoir promenée
aux Indes, va l'amener en France, où ses
intérêts le réclament.1
Mabel a environ dix ans. C'est un bull-
dog de haute taille, jaune, avec des taches
noires, aux jambes courtes, au museau
noir intérieurement etextérieurement,dont
la niâchoira inférieure dépasse d'un centi-
mètre la mâchoire supérieure.
Elle était âgée de troismois seulement
quand elle fut offerte à Livingstone par M.
Godfroy, chef de musique anxlife-guards.
Ce dernier l'avait appelée Mabel, du nom
d'une de ses plus célèbres valses.
A un an, Mabel a commencé ses péré-
grinations à travers l'Afrique, où elle eut
les aventures les plus extraordinaires qui
soient jamais arrivées à un chien. Elle a dé-
trôné un roi, fait dix lieues sur le dos d'une
autruche, et a été mise en gibelotte.
Voici ces trois anecdotes que je cite entre
tant d'autres:
En 1870, Livingstone, se trouvant dans
les environs du lac Nyanza, fut attaqué par
une tribu nègre. Livingstone était très cou-
rageux et payait souvent de sa personne,
si bien qu au plus fort de la mêlée il reçut
sur la tête un coup de massue, qui l'étendit
sur le sol sans connaissance. Quand il re-
prit ses sens, la première chose qui s'offrit
à sa vue fut Mabel en train de déjeuner,
de fort bon appétit, de l'épaule d'un sau-
vage, qui avait été sur le point de tuer son
maître, et qu'elle avait étranglé sommaire-
ment. Ce sauvage était le roi de la tribu.
Ce que voyant, les sujets- épouvantés s'é-
taient sauvés àtoutes jambes.
Bien qu'elle n'eût aucunement les appa-
rences d'un chien de chasse, Mabel était
réellement passionnée pour ce genre
d'exercice. Un jour, voyant passer une au-
truche, elle s'élança sur son dos, et s'y
installa solidement. L'oiseau prit la fuite,
et se mit à parcourir le désert, emportant
son tenace cavalier dans une course folle.
Parbonheur, la troupe de Livingstone était
fort bien montée. Après une poursuite qui
dura plus de deux heures, l'autruche fut
atteinte et percée de vingt balles.
A son arrivée sur le territoire des anthro-
pophages Niams-Niams, Livingstone fut
fort bien accueilli par le roi, qui lui pré-^
senta son cuisinier, un Européen d'ailleurs
comme le docteur. Il était originaire de
Naples et s'appelait Piétro Vicënzo c*é-
tait un luron qui avait fait des siennes dans
son pays natal, d'où il avait dû «'enfuir.
Le roi des Niams-Niams l'avait en grande
estime, à cause de son habileté à faire des
conserves de nègres dans de grands vases
de terré. Il crut bien faire en offrant à Li-
vingstone de ce plat fort recherché, mais le
docteur refusa avec dégoût.
Alors le cuisinier eut une idée et pro-
mit à Livingstone un gibier dont, disait-il,
il serait enchanté.
Au bout d'un quart d'heure, le docteur
entendit des cris s'échapper d'un four-
neau.
Horreur c'était Mabel qui cuisait.
Inutile d'ajouter que son maître se rua
sur l'infâme cuisinier et fut assez heureux
pour sauver la pauvre bête à demi morte.
# ̃
Paris, qui aime les étrangers de distinc-
tion, ne pouvait rester indifférent à l'arri-
vée de Mabel.
Nous sommes heureux d'être les pre-
miers à la saluer.
m TOUT-PARIS
PARIS
D'HIER ET D'AUJOURD'HUI
Je suis le plus vieil abonné de l'O-
péra laissez-moi me souvenir et regret-
ter.
Pauvre salle de la rue Le Peletier
Avec la fumée de l'incendie, se sont dis-
persées les dernières traditions d'un
monde dont l'Empire fut le dernier
représentant. Vous souvient-il, quand on
montait sur le théâtre, du beau suisse
vert et écarlate, tout brodé d'or, l'épée
au côté, le chapeau en bataille, les ar-
mes de l'Empereur sur la poitrine?
Comme il vous montrait que vous en-
triez dans une bonne maison, où la te-
nue était obligatoire 1
L'Opéraderrière la toile, était un salon
officiel, et, pour en passer la porte, il
fallait produire ses titres d'homme du
monde et de bonne compagnie.
Aujourd'hui,. tout abonné des trois
jours a ses entrées de droit; il suffit de
présenter à Louis une quittance en règle.
Je sais bien que le vieil Opéra n'était
pas aussi grand, aussi spacieux on n'y
voyait pas aussi clair, les couloirs n'é-
taient pas aussi larges mais que de jo-
lis coins, refuges de la chronique! Je me
rappelle un certain renfoncement, tout
près du foyer du chant, qui, les soirs
de représentations, ne chômait guère
c'était à qui arriverait le premier,
et dame celui qui le tenait ne le
cédait pas. Tout auprès était le fôyer
de la danse, peu luxueux, mais bien vi-
vant, bien gai et bien intime entouré
de simples banquettes en velours rouge
usé, orné de glaces encadrées dans une
boiserie jadis blanche et à baguettes
dorées. On n'y montait pas comme au
foyer actuel, on y descendait, et ses
quatre marches étaient toujours encom-
brées.
Là s'échangeaient des poignées de
main sans nombre, et les coryphées y
établissaient leur quartier général c'é-
taient les deux Fiocre, Montaubry, Hairi-
vaux, les Brache, les Volter, les Parent,
Sanlaville, Thibert, Saville et Villeroy.'
Tous ces beaux yeux formaient la haie
jusqu'à la porte, et il fallait savoir se
présenter sous peine d'être lardé d'épi
grammes et de mots d'esprit. J'en ai
connu de fort braves qui n'étaient ja-
mais rassurés au moment de cette ins-
pection.
L'intérieur du foyer pouvait lutter,
comme tenue, avec n'importe quel sa-
lon quand la princesse de Metternich
fut nommée ambassadrice à Paris, elle
s'y fit solennellement conduire au bras
du directeur, se fit présenter les plus
marquantes de ces dames, causa lon-
guement avec Mlle Fonta, et eut pour
chacune un mot gracieux et aimable.
Iï régnait alors une très grande inti-
mité entre les abonnés et les artistes de
tout rang et de tout âge. Je me sou-
viens de Charles Bocher, faisant asseoir
en rang toutes les petites, leur remet-
tant à chacune une brosse à dents, une
boîte de poudre dentifrice, plus un petit
discours sur la manière et la nécessitai
de s'en servir on pouvait alors offrir
des oranges, du sucre d'orge, que l'on
croquait avec de grands éclats de rire
dans certaines circonstances, les cadeaux
devenaient plus sérieux, et j'ai même
vu une distribution de petits sacs de ré-
pétitions et de nécessaires mais c'é-
taient là les grands jours. r
La tenue de ces dames se ressentait
de la tenue des hommes les familiarités
n'étaient pas de mise, témoin le vieux
docteur Pestr, qui reçut une gifle deve-
nue légendaire chez les anciens, pour
infraction au programme. Je ne dis pas
que dans les loges, il n'y eût parfois des
orages un jour dans le numéro 37,
Mlles Thiber et Louise Fiocre s'envoyè-
rent un quinquet â la tête, en l'honneur
du beau de C. mais ces querelles de
famille s'arrêtaient à la porte du foyer
et, si la main était vive, le cœur n'y
était pour rien. Quand Léontine Rous-
seau célébra la cinquantaine de son père,
ce fut une fête monstre, à laquelle fu-
rent conviés tous les abonnés, et pres-
que toute la danse. Ce soir-là, je l'avoue,
il y eut des potins, et Fiocre doit se sou-
venir d'une balançoire qui lui fut fatale;,
dit-on. Quels étaient alors les intimés de
la maison? Que sepassait-il sur ces ban-
quettes usées? Je vais essayer de m'en
souvenir. Fiocre II écoutait les saillies
du docteur Véron, Saville les conseils
du baron James de Rothschild â côté
de son amie Villeroy, Volter prenait
intérêt aux choses de Vauvineux, Thi-
ber faisait de la diplomatie avec Hatzr
féld,P. Daru conseillait à la foisRiancae
Alexandre, Marconnay et MeEuifir,i
M. de La Mare, avec son jono â pomma
Paris £ S» centimes. Départements ET Gares ï SJO centimes}
Seizième Xrinëè »̃* Troisième Série Numéro 64
̃ESC. DDE ^élTEl
Rédacteur en Chef
ANNONCES
MM. CH, LAGRANGE, CÈBJP O*
6, PLACE DE LA BOURSE, 6
;Et à l'Administration du Journal
ADMINISTRATION
DE DIX HEURES A CINQ HEUBES
», boulevard de* Italien», •
ABONNEMENTS, PETITES ANNONCÉS :]
RENSEIGNEMENTS
9, boulevard des Italien»', 0
Arthur meyer
Directeur
S* ABONNEMENT»
Paris Départements
Un mois 5 fr. Un mois. 6 fr.
Trois mois. 13 50 Trois mois. 16 fr.
Six mois 27 fr. Six mois 32 fr. ̃
Un an. 54 fr. Un an 84 fr. /^T
•̃"̃ Etranger -S'v-V
Etranger /
Trois moi* (Union postale) 18 fr :> i j
RÉDACTION *>
«, boulevard des Italien», 0
DK DEUX HEUEES A MINUIT
PARIS-JOI1RNAL
,• LE
MINISTBRB 1 «AI
Depuis quelques jours, on recom-
mence à agiter les destinées du cabinet
Duclerc. Au début, dans la première
joie des vacances, on ne s'occupait pas de
lui, on le laissait moisir tranquillement
dans son coin c'était ce qui pouvait lui
arriver de mieux. Malheureusement,
certains signes annoncent qu'on a cessé
de l'oublier toute la semaine passée, on
l'a mis en scène, on l'a fait parler, on a
discuté avec passion et avec subtilité sa
situation intérieure, ses intentions, ses
chances de durée c'est grave 1
Les conversations publiées par les re-
porters ont peu éclairé le public. Sur
Beaucoup de points, elles sont vagues
et même inintelligibles. M. Duclerc a-
t-il un programme? S'il en a un, quel
est-il? A-t-il réellement conçu le dessein
de se mesurer, dès la rentrée, avec la
Chambre, et de lui imposer ses vues, ou
de périr? A-t-il prononcé le mot de dis-
solution ? On a épilogue à perte de vue
sur ces diverses questions, sans parvenir
à les résoudre. Les uns vous représen-
tent le président du conseil comme un
parlementaire soumis qui attendra, pour
avoir une volonté, que la Chambre ait
exprimé la sienne les autres, comme
un chef résolu, mais déjà fatigué, qui
s'empressera de jouer la grande partie
"(c'est le mot qu'on lui prête), de provo-
quer hardiment la majorité en lui met-
tant le marché à la main, et qui, pour
éviter une humiliation, ira spontané-
ment à un désastre. Que conclure de
ces interprétations contradictoires, ex-
cessives, de ces bavardages invraisem-
blables et impossibles ?
'̃ '̃ "̃̃'̃•-•
Sans chercher midi à quatorze heures,
et sans tomber dans la politique de por-
tière, il suffit de rapprocher certains
aveux, certaines circonstances, et sur-
tout de se reporter aux origines du mi-
nistère, four apercevoir très clairement
dans quelle position il se trouve, àquel-
les conditions il peut vivre, de quelle
maladie il doit mourir. Sa formation et
sa composition en disent plus long sur
son état et sur son avenir qu'une mon-
tagne de commérages et une avalanche
de commentaires. Il était phtisique en
naissant, mais c'est quelquefois un avan-
tage que de savoir qu'on est né phtisi-
que on se soigne i
Le T août dernier, après treize ou
quatorze jours d'une gestation ministé-
rielle qui commençait à devenir ridi-
cule, on éprouvait un irrésistible besoin
d'accoucher. On voulait un ministère à
tout prix on l'aurait accepté, quelcon-
que de toute main. La chose tournait si
Sien à la bouffonnerie, qu'on s'étonnait
de ne pas voir offrir un portefeuille à
tous les grotesques de la Chambre. Les
mauvais plaisants parlaient d'un cabi-
net Arthur Picard. Devant la commis-
sion d'enquête sur le siège de Paris,
comme on demandait à Buvernois
pourquoi il avait acheté des fusils à des
marchands de pommes de terre, il ré
pondit spirituellement « J'en aurais
acheté à Cartouche » M. Grévy, as-
siégé" et bloqué, aurait certainement 't
accepté pour ministre le premier Bou-
deville venu. Le mot de la situation, sur
toutes les lèvres, était « II faut que ça
finisse! »
Or ça ne pouvait finir qu'à une con-
dition, c'est que le cabinet eût au moins
deux jours devant lui, qu'il ne fût pas
renversé, sur l'heure, par une interpel-
lation immédiate. Le point capital était
de gagner du temps, d'arracher à 1 im-
patience et à la lassitude de la Chambre
ce premier répit indispensable, et d a-
vQir les vacances pour se retourner. Un
ministère et les vacances après, on
verrait! 1
~#
•"̃Pour obtenir ce résultat modeste, il
fallut nécessairement prendre un peu
partout, contenter beaucoup de gens, en
froisser le moins possible. On fit le sal-
mis qu'on appela ministère. Jamais on
n'avait vu assemblage plus baroque. Ce
cabinet hétéroclite paraissait, à pre-
mière vue, extravagant, incroyable. On
ne lui donnait pas trois jours à vivre
après la rentrée. Les éléments de mé-
lange étaient si évidemment incompati-
bles et si réfractaires les uns aux>utires,
les personnages bombardés ministres
hurlaient si fort de se voir accouplés,
ffu'on se demandait par quel sortilège
M Grévy avait pu les mettre ensemble
sans faire éclater la chaudière ministé-
rielle. On expliquait ce miracle par 1 en-
vie naturelle que tout homme apporte
au monde en naissant d'être ministre,
ne fût-ce qu'une heure! Enfin, vaille
que vaille, on avait une manière de
Satimét. Seulement, c'était le lende-
main qu.'H fallait voir.
Le lendemain apparut assez claire-
ment, niême dans la fumée du début
M Gambetta faisait sa rentrée 1 Soit
pour lui, on ne tarda pas à remarquer
nu'il avait trois ou quatre ministres à lui
dans le lot; que, les autres étant divisés
ou inoffensifs, la majorité du cabinet
devenait gambettiste, et que le cabinet
lui-même prenait une couleur gambet-
-tfsfe assez prononcée. Assurément ce
n'était pas la revanche complète du
Grand Ministère et du Grand Ministre,
mais ©'était un retour de fortune et un
avantage signalé, M. Gambetta faisait
brèche, encore une fois, dans le gouver-
nement. Le pouvoir occulte qu'il avait
exercé naguère, avant sa tentative di-
recte et personnelle, par son triumvirat
Farre Constans-Cazot, il devenait libre
de l'exercer de nouveau par d'autres
personnages et d'organiser un second
triumvirat Fallières-D'evès-Legrand. Les
députés qui ont une teinture littéraire
s'écrièrent de tous côtés « Bien joué,
Marguerite!
Marguerite avait été servie, dans l'es-
pèce, par l'embarras inextricable où
s'était trouvé M. Grèvy mais il demeure
incontestable que M. Gambetta sut pro-
fiter de.ce succès inespéré, le grossir et
le marquera son chiffre, afin de lui im-
primer un caractère définitif. Aussitôt
le ministère formé, il s'en déclara l'ami
et l'appui. Tous ses journaux prirent
envers le nouveau cabinet un certain
ton de bienveillance et d'encourage-
ment auquel ils n'ont pas encore re-
noncé. M. Gambetta était redevenu. le
Protecteur! 1.
**#
M. Duclerc, président du conseil, a
senti le péril. C'est un homme très
doux, et même un peu naïf (on vient
d'en avoir une nouvelle preuve), mais
qui n'aime pas à-être le protégé, c'est-à-
dire le serviteur de quelqu'un» et qui,
même dans sa modestie, a la prétention
de voler de ses propres ailes. Il a com-
pris la nécessité de secouer le joug, ou,
pour employer une expression plus
exacte, de détacher les lisières invisibles
dont on commençait à l'enlacer. De là
ses -essais tout récents, et tout timides,
pour s'affirmer, pour dégager sa per-
sonnalité propre, pour rester Duclerc
delà ses velléités d'explications et d'épi-
tres, ses confidences bizarres et ses ap-
pels compromettants, ses épanchements
moroses dans des seins inconnus.
Mais on ne sort pas, comme on veut, 1
de l'effacement obligatoire. Comment
être soi dans un pareil pêle-mêle ? Com-
ment se débrouiller au milieu d'une telle
confusion et d'un tel entourage ? M. Du-
clerc est prisonnier, et gardé à vue.
Aussitôt qu'il manifeste un semblant de
volonté ou d'indépendance, les compa-
gnons sont là, conseillés et stylés, qui le
remettent au pas. Devès crie, Legrand
se révolte, Fallières parle de s'en aller.
On voit cela d'ici, même pendant les va-
cances que sera-ce au retour, quand
députés et ministres se trouveront face
& face, et que le cabinet Duclerc devra
compter avec une Chambre ragaillar-
dis? q
̃̃̃. • -'̃̃'̃ •̃ # ̃
Que se passera-t-il ? Evidemment ce
malheureux cabinet va être attaqué sans
miséricorde, et sa nullité ne le sauvera
pas des assauts qu'on lui prépare tom-
bera-t-il au premier choc?
Il a pour lui le souvenir des difficultés
qui ont présidé à sa naissance, et de la
crise d'où il est sorti. Tout le monde a
pâti, dans cette affaire, et les républi-
cains reconnaissent eux-mêmes que la
république en a souffert un très sensible
discrédit. On aura peur de recommen-
cer trop tôt, on sentira le besoin d'être
sage pour échapper, à ce tragique fan-
tôme de la dissolution qui apparaît déjà,
comme une menace, à l'horizon parle-
mentaire. .;̃̃ ̃
Le cabinet a encore à son actif cette
protection de M. Gambetta. Elle le gêne,
elle le compromet; mais elle contribue,
dansune certaine mesure, à le soutenir.
Il en bénéficiera, coûte que coûte, aussi
longtemps qu'il durera, car il est clair
que M. Gambetta y trouve son compte.
M. Gambetta, entamé dans ces der-
niers temps, a un intérêt certain à ren-
trer doucement par cette porte, à ga-
gner du temps, à rétablir son influence
sous le couvert d'autrui, à restaurer,
avec un endosseur officiel, son gouver-
nement occulte. Il n'y manquera pas il
manifeste déjà, par tous ses journaux,
l'intention bien arrêtée de prolonger
autant que possible la fragile existence
du cabinet, et il se fâche quand le pré-
sident du conseil risque un mot ou un
geste qui pourrait en hâter la fin. Vous
avez vu avec quelle sollicitude les orga-
nes gambettistes ont travaillé, depuis
quelques jours, à pallier, à expliquer
les petites imprudences de M. Duclerc,
avec quel soin ils le sermonnent quand
il s'émancipe, et le ramènent quand il
s'égare Toute démarche, toute activité
un peu échauffante lui est défendue par
ordonnance. On dirait que M. Gambetta
est le médecin de M. Duclerc, et l'on de-
vine aisément qu'il tient à honneur de
prolonger son malade. Un gambettiste
me disait jeudi dernier que la devise du
cabinet devait être :« Je plie et né romps
pas 1 Et il ajoutait, en manière de plai-
santerie Nous avons été le ministère
du chêne; U faut que celui-ci soit le mi-
nistère du roseau..
Voilà donc deux atouts dans son jeu
la peur d'un nouveau gâchis, et la bien-
veillance intéressée de M. Gambetta.
Reste à savoir si un ministère peut vivre
par le tremblement d'une majorité et
dans la poche d'un homme. Tous ceux
qui, jusqu'à présent, ont essayé de ce
genre d'existence n'y ont pas longtemps
résisté. Ils ont été le jouet de l'imprévu
et du hasard; à la première surprise, ils
sont tombés. On se demande comment
un cabinet, même plus solide que le ca-
binet Duclerc, pourrait-supporter le choc
des forces contraires qui luttent autour
de lui et en lui. On l'a appelé le minis-
tère des vacances en tirant à outrance
sur la corde, on pourra peut-être le me-
ner jusqu'aux étrennes et l'appeler le
ministère des confiseurs; mais ce sera
le boutdu monde, et cet infortuné poitri-
naire ne verra pas. la grande session.
MYSTÈRE
Nos Echos
AUJOURD'HUI!
A 6 heures et demie, dinar au Orand-Hôtel
admission jusqu'à 7 heures.
Pendant la durée du dîner, l'orchestre de
M. Desgranges jouera dans la nouvelle salle de
musique.
MENU
Potage julienne au consomma
riors-d'œuvre
Poisson
Pommes de terre à l'anglaise
Aloyau aux racines
Riz de veau à la royale
̃ Faisans bardés
Salade
Petits pois à la française v >
Gâteau Richelieu
Glace ̃'̃
Dame blanche
Desserts M
rron»g««. fruits et patits-four»
Le salon des dames est ouvert aux Yoyageuri.
Piano, orgues, tables de jeux.– Dîner à la eartt
au restaurant. Billards au Café Divan.
Le programme du dîner-concert. (voir la
<• page.) ••̃'•
̃ ̃ ,7
Musée Gtrévin, 10, boulevard Montmartrt.
De onze heures du matin & oneo heures du mit*
~pc
Opéra, 7 h. 3/4. Les Huguenoti.j,
Français, 8 h. »/». Le Demi-Monde.
A l'Opéra-Comique. Les Diamants de la
Couronne.
LA POLITIO0B
L'Angleterre a battu Arabi sans nous;
reste à savoir si elle l'a battu contre
nous. Notre président du conseil a en-
voyé ses félicitations à M. Gladstone.
Peut-être a-t-il eu raison. Les intérêts
français peuvent bénéficier du succès
des armées anglaises; cela dépend de la
tournure que va prendre la campagne
diplomatique succédant à la campagne
militaire que les Anglais ont rondement
menée.
Est-ce la conférence de Constantino-
ple, ou bien est-ce un congrès européen
qui devra régler les questions soulevées
par la situation des affaires égyptiennes?
L'alternative n'est pas indifférente. Un
con grès nous paraît une porte ouverte sur
un inconnu redoutable. Si, comme il est
permis de le supposer, la rapidité avec
laquelle l'Angleterre vient de terrasser
Arabi est une déception pour la politique
de M. de Bismarck, un congrès ne lui of-
frirait-il pas une occasion trop facile de
greffer, comme il aîme à le faire, des
questions incidentes sur là question pri-
mitive, et de jeter des ferments de dis-
corde entre la France et l'Angleterre,
d'une part, entre la France et la Russie,
de l'autre, en vue d'éventualités qui
pourraient aboutir à tout autre chose
que la paix de l'Europe? `t
Si l'Angleterre veut user modérément
de la victoire, comme elle le promet en
ce moment, pourquoi les ambassadeurs
des puissances à Constantinople ne suf-
firaient-ils pas à la tâche d'organiser un
modus vivendi en Egypte ? Nous crain-
drions qu'un congrès ne fît intervenir
la question des frontières turco-grec-
ques, celle de Tunis, celle de l'Arménie,
et ne mit aux prises des prétentions ,qui
sont encore à fétat latent. L'Angleterre,
par sa victoire, est maîtresse de la mer
,ouge. Elle vient défaire en Egypte quel-
que chose d'analogue à ce que la France
de 1830 fit en Algérie. L'intérêt des deux
grandes puissances occidentales serai t
de s'entendre en Afrique, le plus promp-
tement et le plus simplement possible
le combat de Tel-el-Kébir, si l'Angle-
terre est modérée, si la France peut
faire, hélas autre chose que des sot-
tises, doit amener la paix dans la Médi-
terranée, par la conciliation bien enten-
due des intérêts des deux nations dont
le pavillon y joue le-plus grand rôle.
H. P.
L'élection sénatoriale de Mézières.
M Péronne, républicain, est élu en
remplacement de M. Toupet des Vignes,
décédé, par 306 voix contre 252 don-
nées à M. Simon.
LE MONDE ET LA VILLE
Les cendres de David, qui depuis le
7 janvier 1826, reposaient dans l'ancien
cimetière de Bruxelles; ont été trans-
férées dans le nouveau, hier matin, Sui-
vant la volonté de la famille, la céré-
monie a eu un caractère absolument
privé.
Un prêtre, qui assistait â la levée du
corps et àWnhumation.aditlesprières
des morts.
Etaient venus de Paris, tous les des-
cendants survivants du grand peintre
MM. Jules David, le peintre; baron
Jeannin, ses deuxfils et son gendre M.
Dugué de la Fauconnerie et le baron
Meunier, tous fils et arrière-petits -fils.
Un seul étranger, M. Lacroix, ami in-
time de la famille, assistait à cette trans-
lation.
Carnet de deuil »;
Une triste nouvelle nous arrive de
Charleville.. c.
Le grand manufacturier de Sedan,
M. de Montagnac, ancien député, offi-
cier de la Légion d'honneur, est mort
subitement hier, à la gare de Charleville,
au sortir de la réunion des actionnaires
du Courrier des Ardennes, qu'ii venait
de présider..
Le corps a été transporté par un train
spécial à Sedan, où son arrivée a pro-
duit la plus vive émotion. Le grand ca-
ractère et la profonde générosité de
M. de Montagnac lui avaient conquis
l'estime et l'affection de tous les hon-
nêtes gens; il était président des écoles
libres de la ville.
Hier ont eu lieu, à onze heures, les
obsèques de Mme Emile Fould, décédée
à Saint Germain en-Laye.
La cérémonie religieuse, présidée par
M. le grand-rabbin Isidor, a été' faite
dans un des salons de là maison mor-
tuaire, 24, rue Saint-Marc, tendu de
draperies noires, lamées d'argent, et
transformé en chapelle ardente à cet
effet.
Le deuil était conduit par MM. Paul et
Alphonse Fould, fils de la défunte. M.
Emile Fould père, alité en ce moment à
Saint-Germain, n'a pu assister aux obsè-
ques.
L'enterrement a eu lieu au cimetière
du Père-Lachaise.
Nous avons remarqué dans l'assis-
tance le comte Abraham de Camondo,
MM. Pereire; Stern, baron Horace de
Gunzburg, baron Weisweiler, Ellissen,
Ephrussi, etc., etc. •̃ i*
Nouvelles mondaines
Publications de bans
M. le comte Louis-François-Alfred de
Pontevès, propriétaire, et Mlle Marie-,
Louise-Esther de Lespinasse, fille du
baron Armand de Lespinasse, officier
général en retraite, grand-cordon de la
Légion d'honneur.
**# ̃ ̃. -i
S. A. Ismaïl-Pacha, actuellement en
villégiature à Courbevoie, s'est rendu à
Saint-Gratien, pour rendre .visite à
S. A. I. la princesse Mathilde.
Sa visite a été longue. Il a visité la
propriété dans les plus grands détails et
avec l'intérêt qu'il apporte à toutes les
belles choses.1
Ismaïl-Pacha ne vient en ce moment
qu'une heure par jour à Paris, pour don-
ner ses audiences au Grand-Hôtel.
̃ ̃'• ̃'̃•' ."•;
La jolie Mme Porgès vient de traver-
ser Paris, se rendant à Fontainebleau.
La grand'ville est en ce moment ré-
duite au rôle de passage y séjourner
serait un crime de lèse-chic. •
Le duel des compagnons Godar et
Crié a eu lieu hier matin, au bois de Bou-
logne. La gendarmerie est intervenue
deux fois; témoins et adversaires ont
dû pren dre la fuite pour chercher un
terrain plus propice.
Après trois reprises, qui ont duré
vingt-cinq minutes, le compagnon Go-
âar a été légèrement blessé au bras
droit, ce qui a mis fin au combat.
Le général Billot est attendu aujour^
d'hui à Arcachon, où il vient retrouver
sa famille.
Avis à Mme de Montifaud.
la préfecture de police va rappeler
au public les ordonnances qui interdi-
sent formellement aux femmes de se
montrer, hors le temps du carnaval,
en costume masculin, à moins d'une
autorisation du préfet.
Cette autorisation n'est délivrée que
sur le vu du certificat d'un officier de
santé, légalisé par le commissaire de po-
lice, lequel constate qu'il y a nécessité
du travestissement par raison de santé.
NOUVELLES A LA MAIN
La petite ville de Pontarcy, dont le
mouvement retarde de quelques an-
nées, s'est offert un Caveau à l'instar de
Paris.
Les chansonniers du cru s'y réunis-
sent une fois par semaine pour y passer
aux vers la chronique locale.
Dès qu'un Parisien apparaît dans la
région, l'habitant s'empresse de lui
faire les honneurs du petit local où l'on
chante.
Un de nos amis a été soumis récem
ment à cette cruelle épreuve.
Eh bien? lui demande son intro-
ducteur au sortir de la petite fête,
comment trouvez-vous notre Caveau de
Pontarcy.
Très réussi fait le boulevardier
c'est charmant et sans prétentions
un petit caveau de famille lv
Dans un restaurant de nuit.
Un client grincheux est attablé de-
vant quelques douzaines d'huîtres.
Il en goûte une, fait une horrible gri-
mace et, s'adressant au garçon
1 II y a longtemps qu'elles n'ont été
fraîches, vos huîtres ? 2
Le garçon, avec conviction
Oh monsieur, si on peut dire Elles
arrivent à l'instant de Marennes.
Ça, des marennes! Allons donc 1
dites des armoiricaines 1
UN DOMIHO,
•.• LE
FONDATEUR DU PUSEYISME
Le docteur Pusey, fondateur du pu-
seyisme, est mort hier en Angleterre, à
l'âge de quatre-vingt-deux ans.
Ministre de l'Eglise anglicane, profes-
seur de théologie à l'Université d'OX-
fofd, il groupa autour de lui un certain
nombre de professeurs et de pasteurs
lesdocteurs Wilberforce;Palmer, Ward,
Oakley, Wingfield, Manning (depuis
créé cardinal par Pie IX), Tnorndike,
Perceval, Koble, Newman (depuis créé
cardinal par Léon XIII), Bowden, etc.;
et, de concert avec eux, résolut d'appor-
ter des réformes dans l'Eglise angli-
cane, en réclamant la séparation du spi-
rituel et du temporel, en faisant revivre
à peu près tous les dogmes et toute la
discipline de l'Eglise romaine, et en rat-
tachant la confession ainsi réformée à
l'Eglise des premiers siècles, pour re-
nouer, comme il disait, la chaîne des
temps.
Cette doctrine reçut le nom depu-
seylsme, du nom de son fondateur. Dès
1833, elle devint l'objet de l'enseigne-
ment du docteur Pusey et de -fies amis,
qui la développèrent dans un sens où
elle devait aboutir au catholicisme.
C'est ainsi qu'ils professèrent le rés^-
pect de la succession apostolique, le
dogme de la justification, la nécessité
des sacrements, le dogme du purga-
toire, le culte de la sainte Vierge, le sa-
crifice, de la messe l'invocation des
saint?,, la liturgie romaine, la sainteté
du célibat, l'interdiction aux laïques
d'hiterpréter la Bible, etc.
Pour propager leurs idées, ils publiè-
rent un grand nombre de petits traités
théologiques, sous le titre de: Tracts for
the Urnes; ils multiplièrent les sermons,
les conférences, les discours. Bref, ils
se livrèrent à un véritable apostolat.
Comme on l'a vu par les noms des
cardinaux Mànning et Newman, plu-
sieurs furent amenés à se convertir au
catholicisme et c'est au puseyisme que
revient l'honneur du mouvement qui,
depuis un demi-siècle, porte l'Angle-
terre vers le catholicisme. Pendant cet
espace de temps, en effet, un vingtième
des Anglais et un dixième des Ecossais
se sont faits catholiques.
Le docteur Pusey n'a pas, pour sa
part, osé aller jusqu'au bout de la logi-
que de ce mouvement cependant. l'on
prétend que tout en restant extérieure-
ment fidèle à sa doctrine, ily aune quin-
zaine d'années qu'il a secrètement abjuré
entre les mains de l'Eglise romaine.
Son long apostolat a été traversé plus
d'une fois. En 1843 ayant prêché dans
un sermon le dogme de la transsubstan-
tiation, tel que l'entendent les catholi-
ques, il fut traduit devant une commis-
sion de l'Université d'Oxford, et privé
pour deux ans du droit 'de prêcher et
de professer dans le ressort universi-
taire.
EMILE HARDOUIN
U CÏG4LE ET LA FOURMI
Fable probablo
La République, ayant bien radoti •
Tout l'hiver et tout l'été,
Se trouva fort dépourvue
Quand l'Egypte fut vaincue.
Elle regarda le gâteau
Et, pour en avoir un morceau,
Elle alla crier famine, • î
Chez Albion, sa voisine,
Lui disant: >
Et maintenant
'̃> Part à deux, charmante enfant.
̃ '<̃̃' Albion n'est pas donneuse, ̃<
C'est là son moindre défaut.
J Que faisiez-vous, au temps chaud ? Q
Dit-elle à la solliciteuse,
Quand Arabi, plein de courroux,
Tenait tête à l'armée anglaise,
Et, quand nous la trouvions mauvaise^
Etiez-vous à côté de nous ? 9
Pendant ce temps, que faisiez-vous ? Y
Nuit et jour, à tout venant,
Je chantais la Marseillaise.
Vous chantiez ? J'en suis fort aise.
Brossez-vous le ventre à présent
LA Fontaine-Walla.ce.
« ̃̃
BLOC-HOTES PARISIEN
On annonce la très prochaine arrivée à
Paris d'une voyageuse célèbre, inédite ou
peu s'en faut, qui n'a pas fait moins de
huit mille lieues dans le centre de l'Afri-
que. à quatre pattes. Il s'agit delà chienne
Mabel, la compagne de l'illustre docteur
Livingstone.
A la mort de son maître, elle" fut achetée
par un riche négociant de Bombay, sir Sa^
muel Monroe, qui, après l'avoir promenée
aux Indes, va l'amener en France, où ses
intérêts le réclament.1
Mabel a environ dix ans. C'est un bull-
dog de haute taille, jaune, avec des taches
noires, aux jambes courtes, au museau
noir intérieurement etextérieurement,dont
la niâchoira inférieure dépasse d'un centi-
mètre la mâchoire supérieure.
Elle était âgée de troismois seulement
quand elle fut offerte à Livingstone par M.
Godfroy, chef de musique anxlife-guards.
Ce dernier l'avait appelée Mabel, du nom
d'une de ses plus célèbres valses.
A un an, Mabel a commencé ses péré-
grinations à travers l'Afrique, où elle eut
les aventures les plus extraordinaires qui
soient jamais arrivées à un chien. Elle a dé-
trôné un roi, fait dix lieues sur le dos d'une
autruche, et a été mise en gibelotte.
Voici ces trois anecdotes que je cite entre
tant d'autres:
En 1870, Livingstone, se trouvant dans
les environs du lac Nyanza, fut attaqué par
une tribu nègre. Livingstone était très cou-
rageux et payait souvent de sa personne,
si bien qu au plus fort de la mêlée il reçut
sur la tête un coup de massue, qui l'étendit
sur le sol sans connaissance. Quand il re-
prit ses sens, la première chose qui s'offrit
à sa vue fut Mabel en train de déjeuner,
de fort bon appétit, de l'épaule d'un sau-
vage, qui avait été sur le point de tuer son
maître, et qu'elle avait étranglé sommaire-
ment. Ce sauvage était le roi de la tribu.
Ce que voyant, les sujets- épouvantés s'é-
taient sauvés àtoutes jambes.
Bien qu'elle n'eût aucunement les appa-
rences d'un chien de chasse, Mabel était
réellement passionnée pour ce genre
d'exercice. Un jour, voyant passer une au-
truche, elle s'élança sur son dos, et s'y
installa solidement. L'oiseau prit la fuite,
et se mit à parcourir le désert, emportant
son tenace cavalier dans une course folle.
Parbonheur, la troupe de Livingstone était
fort bien montée. Après une poursuite qui
dura plus de deux heures, l'autruche fut
atteinte et percée de vingt balles.
A son arrivée sur le territoire des anthro-
pophages Niams-Niams, Livingstone fut
fort bien accueilli par le roi, qui lui pré-^
senta son cuisinier, un Européen d'ailleurs
comme le docteur. Il était originaire de
Naples et s'appelait Piétro Vicënzo c*é-
tait un luron qui avait fait des siennes dans
son pays natal, d'où il avait dû «'enfuir.
Le roi des Niams-Niams l'avait en grande
estime, à cause de son habileté à faire des
conserves de nègres dans de grands vases
de terré. Il crut bien faire en offrant à Li-
vingstone de ce plat fort recherché, mais le
docteur refusa avec dégoût.
Alors le cuisinier eut une idée et pro-
mit à Livingstone un gibier dont, disait-il,
il serait enchanté.
Au bout d'un quart d'heure, le docteur
entendit des cris s'échapper d'un four-
neau.
Horreur c'était Mabel qui cuisait.
Inutile d'ajouter que son maître se rua
sur l'infâme cuisinier et fut assez heureux
pour sauver la pauvre bête à demi morte.
# ̃
Paris, qui aime les étrangers de distinc-
tion, ne pouvait rester indifférent à l'arri-
vée de Mabel.
Nous sommes heureux d'être les pre-
miers à la saluer.
m TOUT-PARIS
PARIS
D'HIER ET D'AUJOURD'HUI
Je suis le plus vieil abonné de l'O-
péra laissez-moi me souvenir et regret-
ter.
Pauvre salle de la rue Le Peletier
Avec la fumée de l'incendie, se sont dis-
persées les dernières traditions d'un
monde dont l'Empire fut le dernier
représentant. Vous souvient-il, quand on
montait sur le théâtre, du beau suisse
vert et écarlate, tout brodé d'or, l'épée
au côté, le chapeau en bataille, les ar-
mes de l'Empereur sur la poitrine?
Comme il vous montrait que vous en-
triez dans une bonne maison, où la te-
nue était obligatoire 1
L'Opéraderrière la toile, était un salon
officiel, et, pour en passer la porte, il
fallait produire ses titres d'homme du
monde et de bonne compagnie.
Aujourd'hui,. tout abonné des trois
jours a ses entrées de droit; il suffit de
présenter à Louis une quittance en règle.
Je sais bien que le vieil Opéra n'était
pas aussi grand, aussi spacieux on n'y
voyait pas aussi clair, les couloirs n'é-
taient pas aussi larges mais que de jo-
lis coins, refuges de la chronique! Je me
rappelle un certain renfoncement, tout
près du foyer du chant, qui, les soirs
de représentations, ne chômait guère
c'était à qui arriverait le premier,
et dame celui qui le tenait ne le
cédait pas. Tout auprès était le fôyer
de la danse, peu luxueux, mais bien vi-
vant, bien gai et bien intime entouré
de simples banquettes en velours rouge
usé, orné de glaces encadrées dans une
boiserie jadis blanche et à baguettes
dorées. On n'y montait pas comme au
foyer actuel, on y descendait, et ses
quatre marches étaient toujours encom-
brées.
Là s'échangeaient des poignées de
main sans nombre, et les coryphées y
établissaient leur quartier général c'é-
taient les deux Fiocre, Montaubry, Hairi-
vaux, les Brache, les Volter, les Parent,
Sanlaville, Thibert, Saville et Villeroy.'
Tous ces beaux yeux formaient la haie
jusqu'à la porte, et il fallait savoir se
présenter sous peine d'être lardé d'épi
grammes et de mots d'esprit. J'en ai
connu de fort braves qui n'étaient ja-
mais rassurés au moment de cette ins-
pection.
L'intérieur du foyer pouvait lutter,
comme tenue, avec n'importe quel sa-
lon quand la princesse de Metternich
fut nommée ambassadrice à Paris, elle
s'y fit solennellement conduire au bras
du directeur, se fit présenter les plus
marquantes de ces dames, causa lon-
guement avec Mlle Fonta, et eut pour
chacune un mot gracieux et aimable.
Iï régnait alors une très grande inti-
mité entre les abonnés et les artistes de
tout rang et de tout âge. Je me sou-
viens de Charles Bocher, faisant asseoir
en rang toutes les petites, leur remet-
tant à chacune une brosse à dents, une
boîte de poudre dentifrice, plus un petit
discours sur la manière et la nécessitai
de s'en servir on pouvait alors offrir
des oranges, du sucre d'orge, que l'on
croquait avec de grands éclats de rire
dans certaines circonstances, les cadeaux
devenaient plus sérieux, et j'ai même
vu une distribution de petits sacs de ré-
pétitions et de nécessaires mais c'é-
taient là les grands jours. r
La tenue de ces dames se ressentait
de la tenue des hommes les familiarités
n'étaient pas de mise, témoin le vieux
docteur Pestr, qui reçut une gifle deve-
nue légendaire chez les anciens, pour
infraction au programme. Je ne dis pas
que dans les loges, il n'y eût parfois des
orages un jour dans le numéro 37,
Mlles Thiber et Louise Fiocre s'envoyè-
rent un quinquet â la tête, en l'honneur
du beau de C. mais ces querelles de
famille s'arrêtaient à la porte du foyer
et, si la main était vive, le cœur n'y
était pour rien. Quand Léontine Rous-
seau célébra la cinquantaine de son père,
ce fut une fête monstre, à laquelle fu-
rent conviés tous les abonnés, et pres-
que toute la danse. Ce soir-là, je l'avoue,
il y eut des potins, et Fiocre doit se sou-
venir d'une balançoire qui lui fut fatale;,
dit-on. Quels étaient alors les intimés de
la maison? Que sepassait-il sur ces ban-
quettes usées? Je vais essayer de m'en
souvenir. Fiocre II écoutait les saillies
du docteur Véron, Saville les conseils
du baron James de Rothschild â côté
de son amie Villeroy, Volter prenait
intérêt aux choses de Vauvineux, Thi-
ber faisait de la diplomatie avec Hatzr
féld,P. Daru conseillait à la foisRiancae
Alexandre, Marconnay et MeEuifir,i
M. de La Mare, avec son jono â pomma
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