Titre : La Petite presse : journal quotidien... / [rédacteur en chef : Balathier Bragelonne]
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1869-12-22
Contributeur : Balathier Bragelonne, Adolphe de (1811-1888). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32837965d
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 22 décembre 1869 22 décembre 1869
Description : 1869/12/22 (A4,N1343). 1869/12/22 (A4,N1343).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k4718345v
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-190
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 07/11/2017
O^x-ci acc.'ur.'sviit et s't:o pressèrent -4e prévenir '
>iru»-iwi. de H'™ «vmcuraiii dans le quartier, Loquet
U"Ave'-11'l''auif>1' "des O uvriers t.ei'i'.t.ssiers, le corps pat
£tre retiré. il ôi:dl dans un clat de décomposition
avancée.. ,
La tôic. dcrnc»f«vit'ic!it t)J!ncn6c, avait des tons' ver-
ditres.
Les yeux sortaient de leur orbite. Quant aux cheveux,
ils ten;tiL'lll si pou. \!ll'liIlC partie tomba.
Le cadavre était assez bien vèjtu. Il portait un pan--
talon noir, une veste a boutons brillants. On lafouille,
et on ;t trouvé dans la poche de son gilet une pièce de
deux francs et quelques Ëùus.
Il y avr.il, aussi dans la poche de sa veste un porte-
fouine, mais personne n'en connait le contenu; — car,
nous a^sure-t-on, la police Fa pris aussitôt comme
pièce de conviction et comme pouvant servir à éclairer
la justice.
L'endroit oit est situé le puits se trouve, nous l'avons
déjà dit, près du nouveau chemin de fer. C'est une
propriété dont le locataire est un nommé M. Sevéra,
qui nous a paru très-connu dans le quartier.
Ce ! vn est assez agréable. Le puits est dans un
cha)i.r,,, ;l côté d'un chemin de traverse, bordé d'olt-
viers.
Si un crime s'est passe là, le cadre ne répond guère
à la scène.
Au moment où nous avons visité le théâtre de cet
Événement, des petites iilles jouaient et se roulaient
sur rbcrbe.
L'une d'elles nous a montré des empreintes noirâ-
tres laissées par le corps et des lambeaux de vête-
ments. A la place où la tête avait été déposée se trou-
vaient encore des plaques de cheveux.
Le corps de l'inconnu a été déposé à la Morgue le
soir même du jour où il a été retiré de l'eau.
NAUFRAGE DE SEINE-ET-TAMISE
Nous recevons de Fécamp de nouveaux détails
sur la pertte du vapeur Seinc-et-Tamise :
Ainsi que le Jonmal de Rouen l'a annoncé hier, un
sinistre maritime a eu lieu jeudi soir, vers cinq heu-
res, entre les jetées mêmes de Fécamp. Comme il l'a
dit, le vapeur Se!He" / Tamise n° 2 ne pouvant, par
suite rJ Il mauvais temps, tenir la mer, a tenté de ma-
rée basse l'entrée du port.
N'obéissant plus à son gouvernail, le navire est venu
donner contre l'estacade sud et a coulé en travers du
chenal, de telle façon que l'entrée et,la. sortie des na-
vires se trouvent momentanément interrompues.
Le pavillon rouge du mât de signaux a annoncé hier
aux navires de la rade l'interdiction du port qu'il va
falloir débarrasser au plus vite de cet obsta4c. Du j
reste, d'une façon où de l'autre, on le fera prompte- j
: ment disparaître.
; L'équipage, composé de dix hommes, a pu se sauver
sans accident grave; un seul des marins a eu quel-
ques contusions peu, sérieuses, assure-t-on. A l'heure
qu'it. est, l'avant-po-rt et la retenue des chasses sont
encombrés d'épaves provenant, soit du chargement,
bçdit du navire lui-même.
Ce vapeur venant de Paris était chargé pour Lon-
dres de sucre raffiné, bois à parquet, ornements d'é-
glise, instruments de musique, arbres de Noël, étoffes,
vins de Champagne, etc., le tout formant une valeur
considérahJe. On évalue, en ellet, la perte à plusieurs
centaines de mille francs.
Il ue paraît pas supposable qu'on puisse relever ce
navire dont la coque a déjà subi de graves avaries. Le
MtJ\'ctaRe, commencé dès que la marée l'a permis, va
s'eflectuer avec la plus grande célérité possible, M.
l'ingénieur des ponts et chaussées ayant mis tout son
personnel en œuvre.
Nos jetées ont présenté vendredi toute la journée un
aspect inaccoutumé.
Les curieux s'y sont portés en foule, avides pour la
plupart d'assister aux saisissantes péripéties d'un nau-
frage, drame d'autant plus émouvant qu'il s'accomplit
sans les yeux des spectateurs souvent intéressés à pa-
reil, sinon à plus triste dénoÙmellt.
I
LA MARATRE
Olk écrit de Belges, le 15 décembre, au Messa-
ger du Midi :
L'information à laquelle il a été procédé contre
la femme. Dherse ne laisse plus de doute : c'est
bien cette mère dénaturée qui a noyé sa petite
fille âgée de cinq ans. Voici les motifs qui ont été,
dit-on, révélés.
< Celte femme avait laissé sa fille chez sa mère i
nourricière, à laquelle elle avait été confiée dès j
sa naissance. Elle coûtait huit francs par mois. |
^ Désirant s'en débarrasser et cesser de payer j
une pension qui lui pesait, la femme Dherse rc- !
tira sa fille auprès d'elle à Toulouse, pui-s elle vint,)
à Besrféges rejoindre un ouvrier mineur, avec le- )
quel elle avait- lié des rapports intimes pendant !
qu'il était en garnison à Toulouse, l'été dernier, j
A Iksségci comme à Toulouse, cette mal-heu-
reusc enfam n'a cessé d'être en butte aux mau- j
vais traitements de sa mère, qui la battait à cha- ,
que instant et qui la privait de nourriture. !
La petite J.oséplmic était si soumise, si effrayée
par les menaces de sa mère, qui lui défendait
de jamais demander à manger à personne, qu'elle
n"osait pas pnfrdndrc l'ordre qui lui avait été
donné.
Elle ne demandait rien. mais, malgré elle, elle
trahissait sa faim. Des voisins s'en apercevaient
et on lui donnait à manger. C'est n'nsi qu'elle vi- !
ytlit le plus souvent. Elle trouvait aussi un défen- j
seur, paraît-il, dans l'amant de sa mère, qui n'a- '
vait pu rester indifférent, à la douceur et à la gcn- I
tulessft de cette enfant, bien qu'il n'en fût uas le
pé,re. ' .. I
Mais son sort était arrêté depuis longtemps, et le
9 décembre, vers six heures du soir, sa mure la
prit par !a main et la conduisit jusqu'au bord de
ia rivière, profitant de l'obscurité de la nuit, de la
pluie qui tombait, double cirr,ont;l,me qui pouvait
permettre de compter eur l'impurlaissant,
croire à un accident.
Cependant, une femme qui habite uuu loin du
u où le crime g été cognais, ente le cri que
poussai l'infortunée lorsqu'elle comprit ce qui al- j
lait se passer. Grâce aux indications fournies par
cette femme, la vue des lieux démontra qu'il n'é-
tait pas possible que Joséphine Dherse eût été
précipitée dans la rivière, sï ce n'est par sa mère,
qui, avait-elle fini par le confesser, s'était enfuie
sans savoir si sa victime se sauvait ou si elle suc-
combait.
Conduite hier malin par MM. les magistrats
d'Ala:is sur le théâtre du crime, au milieu d'une
foule énorme,, qui ne put maîtriser son indigna-
tion, elle dut avouer qu'elle avait renversé son
enfant dans la Cèze, et qu'elle l'avait tenue sous
l'eau jusqu'à ce qu'elle eût cessé de re-spirer et de
remuer; alors seulement elle l'abandonna.
UNE EXÉCUTION A NEWGATE
Lundi dernier a eu lieu, dans l'intérieur de la prison
de Newgate, à Londres, l'exécution du nommé Frédé-
ric Hinson, condamné récemment à la peine de mort
pour avoir tué, dans un accès de jalousie furieuse, la
femme Maria Death, avec laquelle il vivait maritale-
ment. et un voisin, William Boyd, qui avait noué des
relations intimes avec elle.
Hinson, qui habitait un cottage da la banlieue de
Londres, avait, un jour du mois .er iiir, surpris Ma-
ria Death à la station du chemin de fer, revenant de
la ville en compagnie de BOJd, contre lequel il nour-
rissait depuis quelque temps des soupçons qui n'étaient
que trop fondés. Ne doutant plus de l'infidélité de sa
maîtresse, Hinson l'avait saisie violemment par le
bras, et l'e'Rtralfmnt .à sa suite, s'était dirigé vers sa
demeure.
A peine arrivé, il s'était empare ,d'un fusil tout
chargé rt. avait fait feu snr la malheureuse, qui était
tombée à r-fs pieds foudroyée; puis, sans perdre de
temps, il s pteU: rendu au-domicile do Boyd, qu'il av.di
rencontré dans son jardin, • terras.-j el i.!.s'jOii::t!L' «
xoups de crosse.
Plusieurs personnes avaient été témoins de ce-M-
tragédie, mais de loin et sans oser intervenir.
« Depuis sa condamnation, lisons-nous dans une
correspondance, Hin?ot) avait vécu dans un pénible
état d'exaltation. Il revenait souvent sur son crime
pour le justifier. Il répétait à toute occasion que Maria
Dea.th étant légitime, bien que sa femme à lui vécût
encore, il avait en sa faveur l'excuse, sinon le droit,
du mari qui tue la femme adultère et son complice
pris en flagrant délit. Dans ses longues conversations,
ou plutôt controverses, avee M. Jonas, le chapelain de
la prison, il citait des textes-de la Bible pour montrer
que l'adultère mérite la mort.
« Un jour de la semaine dernière, sa belle-mère vint
l,) visiter dans sa prison et se mit, aussitôt son entrée,
à J.ui adresser de violents reproches au sujet de son
crime; le condamné répliqua iavec colère à cè langage
déplacé, et les gardiens coupèrent court à cette seïne
na.v-ra.nte, en faisant sortir cette femme.
« Le condamné laisse deux enfants, l'un de sa fem-
me légitime, l'autre de la maîtresse qu'il a tuée. Un
de ses voisins à Wood-Grean, qui lui portait beaucoup
d'intérêt, s'est chargé d'eux.
« Jusqu'au dernier jour, Hinson semble avoir espéré
que sa vie serait épargnée. On est venu l'e-veiHer hier
à six heures. Le chapelain est alors entré dans sa cel-
Iule et est resté avec lui jusqu'au moment suprême.
« Un peu avant neuf heures, les deux shériffs arri-
vèrent à la prison. Lorsque le bourreau entra dans la
cellule du condamné, celui-ci le salua d'un « bonjour,
monsieur. Calcraft. » Il demanda à serrer la main au
gouverneur et aux officiers de la prison.
« Lorsqu'il monta sur l'échafaud, il dit à voix basse :
« Nous voilà au grand mystère! » Là, son courage
l'abandonna, et il s'évanfmt à moitié ; il fallut le sou-
tenir pendant qu'on ajustait la corde à son cou et le
bonnet blanc sur sa tète, et ce lut une masse inerte
qui tomba lorsque la trappe s'ouvrit. La mort a paru
être instantanée.
« Au moment de la conclusion de ce drame à huis
clos, la cloche de Newgate a sonné le glas funèbre. Le
drapeau noir a été hissé sur la porte de la prison;
puis notice il été affichée au dehors d" l'oxértitiorn de'
la sentence.
« Les seules personnes admises it voir- l'exécution
or,.t été les shériffs, les employés de la prison et les re-
pt'cset.tô.ïiis de la presse. »
SOUVENIRS JUDICIAIRES
L'AFFAIRE LAVALETTE
II (suite)
L'évasion.
Au bout du couloir donnant entrée sur la salle
du greffe, était une porte basse, rendue plus
basse encore par un pas qu'il fallait gravir. C'est
là surtout qu'il était nécessaire de ne pas oublier
la recommandation de la comtesse. Lavalette se
trouvait en cet endroit dans l'obligation de lever
le pied, et en même temps de baisser la tète pour
éviter que les plumes du chapeau ne se heurtassent
à la traverse de la p.orte. Il se tira heureusement
de ce pas difficile : et en relevant la tête il se vit
dans une grande pièce où se tenaient cinq ou six
geôliers, les uns "assis, d'autres debout. A la vue
de la personne qu'ils prenaient pour la comtesse,
ces derniers^ vinrent se ranger' sur son passage,
les yeux fixés sur celle qui, dans leur pensée, se-
rait veuve le lendemain de par la loi.
Lavalette tenait son mouchoir sur ses yeux, at-
tendant que sa fille vint se placer à sa gauche,
suivant les instructions qu'elle avait reçues ; mais
l'enfant se trompa et vmt lui prendre le bras droit.
Madame de Lavalette avait devancé l'heure ha-
bituelle rïe sa sortie avec intention. Elle savait
que. d'ordinaire, c'était vers sept, heures que le
concierge était retiré dans sa chambre pour dî-
ner; et elle avait csD'érô qu'il ne serait pas dans le
greffe au moment du passage de son mari. Elle
avait compté sans la vigilance de 00 fonctionnaire
atil. ax%n~ entendu l& porte djj ,CQ#g.aï'QU2$û'»
descendit précipitamment l'escalier de sa chambre.
Or, cet esealier se trouvait placé à la gauche de
Lavalette, et, comme la jeune Joséphine s'était
trompée de côté en venant se ranger auprès de son
père, le concierge pût s'avancer sans obstacle jus-
qu'à lui.
Le moment était périlleux. Le concierge, posant
la main sur le bras de Lavalette, lui dit :
— Vous vous retirez de bonne heure, madame
la comtesse !
Un sanglot étouffé sous son mouchoir fut la
seule réponse de Lavalette, et le concierge, dont
la voix avait déjà laissé percer l'émotion, ne s'en
sentant plus maître en présence de celle qu'il
croyait être une malheureuse femme qui vient de
faire un éternel adieu à son mari, se détourna vi-
vement, dans la crainte que le trouble qu'il
éprouvait ne lad révélât la fatale nouvelle, qu'il ve-
nait d'apprendre de la bouche du procureur gé-
néral.
C'est à cette émotion' que Lavalette dut de ne
pas .être conduit par la main jusqu'à la sortie par
le concierge, ainsi que celui-ci avait coutume de
le faire pour la comtesse. Il s'avança donc sans
être accompagné jusqu'au bout de la salle du
greffe. Là se trouvent deux portes séparées par un
étroit espace dans lequel se tient jour et nuit,
assis dans un grand fauteuil, un geôlier qui peut
avoir ainsi ses deux mains placées sur la clef de
chacune des deux portes. La première de ces
portes, celle de l'intérieur, est à barreaux de fer ;
l'autre, la porte externe, en bois solide, garnie de
bandes de fer et de gros verrous, est ce qu'on
appelle le premier guichet.
Il fallait encore que ces deux portes s'ouvris-
sent devant Lavarlette. Le geôlier qui occupait le
po-ie étroit dont nous venons, de parler le regar-
«lîï't -ans ouvrir. A quoi pensait-il? Etait-ce la cu-
riosité seule qui le tenait immobile ? était-ce un
S" - Li!ço:i qui lui venait à l'esprit? Ce fut un mo-
:i;eut d'anxiété terrible pour Lavalette. Enfin,
n'y tenant plus, il passa la main droite à travers
les barreaux pour avertir le geôlier, qui, rappelé à
lui par cet avertissement, ouvrit d'abord la pre-
mière porte, puis la seconde. En cet endroit, l'en-
fant se trouvait bien placée à droite; elle était
aussi entre le geôlier et son père, dont elle déro-
bait en partie la vue au premier.
Voilà Lavalette hors de la prison; mais tout
n'est pas dit : il reste encore un obstacle redou-
table à franchir. Il faut monter un escalier de
;douze marches pour arriver à la cour, et au haut
de cet escalier est situé le corps de garde des gen-
darmes. L'officier et une vingtaine de soldats se,
sont groupés devant le poste pour voir sortir la
malheureuse comtesse ; ot il va falloir que Lava-
lette passe devant eux presqu'en les frôlant, tant
ils vont être rapprochés de lui.
Si, parmi les hommes de garde allait se trouver
un de ceux qui l'ont conduit à la cour d'assises?
S'il allait être reconnu et échouer de la sorte au
moment, de toucher le P()J't.? C'e.-,t, l'instant ou
jamais de presser son mouchoir sur. ses yeux. Le
voilà à la dernière marche; les gendarmes qui
chuchottaient entre, eux se taisent tout à coup. Le
respect, la pitié leur clouent la langue ; de cette
femme qu'ils ont devant les yeux, ils ne voient
que la douleur. Lavalette, passe ; il est passe.,
Il est dans Ja. cour, enfin!... La chaise est à
trois pas de lui, il y entre en mesurant ses mou-
vement-s, sans précipitation ; mais, en j entrant.,
il a pâli. D'un conp d'œil; it a remarqué l'aisenee
de son valet de chambre et des porteurs de la
chaise. Où sont-ils ? Terrible situat'on.! Joséphine
et la vieille bonne sont debout à côté de la chaise;
et, à quelques pas, la sentinelle immobile tient
les yeux fixés sur lui. Une violente agitation s'est
emparée de Lavalette, et mille pensées assaillent
son esprit. H.se voit découvert, et ses regards res-
tent attachés sur le Tnsil du factionnaire. Au pre-
mier mouvement qui. H' fait., au premier bruit
venu de la prison, il saute sur cette arme, il s'en
empare, et. vend chèrement sa vie. Deux minutes,
— un siècle ! — se passent dans cette cruelle per-
plexité ; enfin, Lavalette se sent soulevé. Bonne-
ville est revenu ; un des porteurs lui a fait faux
bond au dernier moment, et il lui a fallu s'en
procurer un autre. Il a pris le premier venu, une
espèce de charbonnier ; et la chaise à porteurs
s'éloigne lentement à travers la' grande cour.
Ici se présente pour nous un embarras. Sui-
vrons-nous immédiatement la chaise à porteurs, ou
resterons-nous à la Conciergerie pour voir ce qui
s'y passe après le départ de Lavalette ? Nous op-
tons pour ce dernier parti, sauf pour nous - à re-
Joindre le fugitif lorsqu'on se sera aperçu de son
évasion, et que, de tous côtés, on se sera lancé à
sa poursuite.
Madame de Lavalette est restée seule dans la
chambre, dont la porte s'est refermée sur elle. Tou-
jours cachée derrière le paravent, elle écoute, ha-
letante, les bruits"p'u dehors, dont le moindre de-
vient pour son inquiétude une rumeur qui lui
présente sa tentative avortée,et son mari retombant
aux mains du bourreau. Elle .compte les minutes
aux battements de son cœur. Cepèndant le temps
s'écoule : mais elle n'ose encore se flatter de la
réussite/Tout, à coup la serrure fait entendre son
double cri et la perte de la chambre est ouverte.
Grand Dieu ! c'est son mari qu'on ramène ! Tette
est sa première pensée ; mais aussitôt elle se ras-
sure. Lavalette l'a Dre venue que, chaque jour, après,
son départ à elle, Tê concierge venait dans la cham-
bre s'assurer de la présence de son prisonnier ; et
il lui a recommande de rester derrière le paravent
pour le moment de cette visite et d'y remuer
quelque meuble. De cette façon, j le concierge le
croirait là et se retirerait, lui laissant ainsi plus
dp temps pour s'éloigner du voisinage de la
prison.
En entendant ouvrir la porte, la comtesse se
rappelle tout à. coup . la recommandation et se'
garde bien d'y manquer. L'effet attendra est pro-
duit. Le concierge, croyant son prisonnier occupé
àçrrtère le paraît, se retiré sans lejjéranger.
Mais il ne l'a pas vu, et il faut qu'il le vole. Cinff '
minutes après, il revient. La chambre est encore
vide ; on remue toujours derrière le paravent»'
Cette fois, le concierge ne se contentera pas du>'
témoignage de ses oreilles, il lui faut celui de ses
yeux. Il s'avance vers le paravent, en écarte lune
feuille, et jette un cri à la vue de Mme de Lava-
lette. .4
— Miséricorde !... A moi! à moi !
(La suite à demain.)
E. NYON.
LE TRÉSOR DU FOYER
A TRAVERS LES HALLES.
# Ainsi que nous le disions dans nos derniers bulle-
tins, le prix des volailles augmente en ce moment
dans de 'grandes proportions. Cela tient à deux rai-
sons : la première, c'est que, la semai-ne de Noël, ainsi
que celle du jour de l'an, la consommation est très-
grande et les marchands profitent de cette vente près-'
que forcée pour tenir leur prix ; la seconde raison;
cest que l'Angleterre, depuis un mois environ, a-com-
mande à nos expéditeurs d immenses cargaisons de
volailles grasses, ce qui fait que, malgré la grande
quantité de marchandises qui arrivent de tous côtés, il
ne s'en trouve pas encore assez pour suffire aux de-
mandes.
Il ne faudrait pas croire, d'après cela, que la Halle
se trouve dépourvue de volailles. Il suffit, pour se con-
vaincre du contraire, d'aller à ce marché le matin, où
a !!eu, au milieu d'un encombrement général, le dé-
ballage de ces grandes mannes où se trouvent serrés
les oies, les dindes, les coqs, les faisans, etc.
Profitons de ce que les halles ont cette semaine'peu
de variété, sous le rapport des légumes et du poison,
pour donner quelques recettes à l'occasion des fètes de
Noël.
Disons d'abord que, pour rester dans. la iradnion,
tout bon dîner de Noël doit se composer Lie pieds trut-
fés et d'une bête l'0tl." dinde ou oie. Comme entremets,
beaucoup de maisons francaises ont ad®p.té h métho-
de anglaise et. servent, également !o f:mCl1x pllwl-plul-
ding, dont voici la recette :
On met dans une terrine une demi-livre de graissa
de bœuf bien pilée, une demi-livre de sucre râpé.
une demi-livre de raisin de Malaga, une demi-livre
de raisin de Corinthe, cinq œufs, bhmes et jaunes, un
litre de farine, une once d'écorce de citron couder .6,
une once d'écorce-d'orange, un verre d'ealHJc-yie et
nn demi-verre de rhum; on bat le tout pendant long-
temps. La bonté du pudding dépend de sa longue ma-
nipulation.
On place ensuite cette pâte dans un linge que l'on
lie fortement, et on la 'fait cuire au bain-rnario pendant
au moins six heures.
On place une soucoupe au fond de la marmite pour
empêcher que le_ linge et le pudding s'y attachern. Au
moment de servir, on place le pudding dans un grand
plat, on le saupoudre de sucre, on y verse de l'eau-de-
vie et on allume. Rien n'est plus appétissant que ce
pudding tout flamboyant apporté ainsi sur la table.
Depuis une quinzaine de jours,. les Ualles, du côté
de la rue de la Cossonncrie, sont encombrées de caisses
arrivant du Midi et contenant des oranges et des ci-
trons.
Il paraît que cette ,année les oranges seront assez
bon marché. C'est, dU- reste, un fruit fort agréable et
très-rafraîchissant.. L'orange est non-seulement em-
ployée dans l'économie domestique, mais aussi en mé-
decine. L'écorce entre dans la composition de poudres
cordiales et vermifuges. Les fleurs d'oranger ont des
propriétés anti-spasmodiques bien connues.
Quant au citron, c'est un excellent digestif ; on l'as-
socie à certains mets dont les principes sont gélati-
neux, comme les huîtres, le poisson, les volailles ;
dans ce cas, il sert non-seulement à relever la saveur
souvent fade, mais encore 'à faciliter Ja digestion. Il
est rafraîchissant et anti-putride. Dans les longs voya-
ges, on l'emploie avec succès pour prévenir le scorbut
et les nevres typhoïdes. —
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Le cadavre était assez bien vèjtu. Il portait un pan--
talon noir, une veste a boutons brillants. On lafouille,
et on ;t trouvé dans la poche de son gilet une pièce de
deux francs et quelques Ëùus.
Il y avr.il, aussi dans la poche de sa veste un porte-
fouine, mais personne n'en connait le contenu; — car,
nous a^sure-t-on, la police Fa pris aussitôt comme
pièce de conviction et comme pouvant servir à éclairer
la justice.
L'endroit oit est situé le puits se trouve, nous l'avons
déjà dit, près du nouveau chemin de fer. C'est une
propriété dont le locataire est un nommé M. Sevéra,
qui nous a paru très-connu dans le quartier.
Ce ! vn est assez agréable. Le puits est dans un
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Si un crime s'est passe là, le cadre ne répond guère
à la scène.
Au moment où nous avons visité le théâtre de cet
Événement, des petites iilles jouaient et se roulaient
sur rbcrbe.
L'une d'elles nous a montré des empreintes noirâ-
tres laissées par le corps et des lambeaux de vête-
ments. A la place où la tête avait été déposée se trou-
vaient encore des plaques de cheveux.
Le corps de l'inconnu a été déposé à la Morgue le
soir même du jour où il a été retiré de l'eau.
NAUFRAGE DE SEINE-ET-TAMISE
Nous recevons de Fécamp de nouveaux détails
sur la pertte du vapeur Seinc-et-Tamise :
Ainsi que le Jonmal de Rouen l'a annoncé hier, un
sinistre maritime a eu lieu jeudi soir, vers cinq heu-
res, entre les jetées mêmes de Fécamp. Comme il l'a
dit, le vapeur Se!He" / Tamise n° 2 ne pouvant, par
suite rJ Il mauvais temps, tenir la mer, a tenté de ma-
rée basse l'entrée du port.
N'obéissant plus à son gouvernail, le navire est venu
donner contre l'estacade sud et a coulé en travers du
chenal, de telle façon que l'entrée et,la. sortie des na-
vires se trouvent momentanément interrompues.
Le pavillon rouge du mât de signaux a annoncé hier
aux navires de la rade l'interdiction du port qu'il va
falloir débarrasser au plus vite de cet obsta4c. Du j
reste, d'une façon où de l'autre, on le fera prompte- j
: ment disparaître.
; L'équipage, composé de dix hommes, a pu se sauver
sans accident grave; un seul des marins a eu quel-
ques contusions peu, sérieuses, assure-t-on. A l'heure
qu'it. est, l'avant-po-rt et la retenue des chasses sont
encombrés d'épaves provenant, soit du chargement,
bçdit du navire lui-même.
Ce vapeur venant de Paris était chargé pour Lon-
dres de sucre raffiné, bois à parquet, ornements d'é-
glise, instruments de musique, arbres de Noël, étoffes,
vins de Champagne, etc., le tout formant une valeur
considérahJe. On évalue, en ellet, la perte à plusieurs
centaines de mille francs.
Il ue paraît pas supposable qu'on puisse relever ce
navire dont la coque a déjà subi de graves avaries. Le
MtJ\'ctaRe, commencé dès que la marée l'a permis, va
s'eflectuer avec la plus grande célérité possible, M.
l'ingénieur des ponts et chaussées ayant mis tout son
personnel en œuvre.
Nos jetées ont présenté vendredi toute la journée un
aspect inaccoutumé.
Les curieux s'y sont portés en foule, avides pour la
plupart d'assister aux saisissantes péripéties d'un nau-
frage, drame d'autant plus émouvant qu'il s'accomplit
sans les yeux des spectateurs souvent intéressés à pa-
reil, sinon à plus triste dénoÙmellt.
I
LA MARATRE
Olk écrit de Belges, le 15 décembre, au Messa-
ger du Midi :
L'information à laquelle il a été procédé contre
la femme. Dherse ne laisse plus de doute : c'est
bien cette mère dénaturée qui a noyé sa petite
fille âgée de cinq ans. Voici les motifs qui ont été,
dit-on, révélés.
< Celte femme avait laissé sa fille chez sa mère i
nourricière, à laquelle elle avait été confiée dès j
sa naissance. Elle coûtait huit francs par mois. |
^ Désirant s'en débarrasser et cesser de payer j
une pension qui lui pesait, la femme Dherse rc- !
tira sa fille auprès d'elle à Toulouse, pui-s elle vint,)
à Besrféges rejoindre un ouvrier mineur, avec le- )
quel elle avait- lié des rapports intimes pendant !
qu'il était en garnison à Toulouse, l'été dernier, j
A Iksségci comme à Toulouse, cette mal-heu-
reusc enfam n'a cessé d'être en butte aux mau- j
vais traitements de sa mère, qui la battait à cha- ,
que instant et qui la privait de nourriture. !
La petite J.oséplmic était si soumise, si effrayée
par les menaces de sa mère, qui lui défendait
de jamais demander à manger à personne, qu'elle
n"osait pas pnfrdndrc l'ordre qui lui avait été
donné.
Elle ne demandait rien. mais, malgré elle, elle
trahissait sa faim. Des voisins s'en apercevaient
et on lui donnait à manger. C'est n'nsi qu'elle vi- !
ytlit le plus souvent. Elle trouvait aussi un défen- j
seur, paraît-il, dans l'amant de sa mère, qui n'a- '
vait pu rester indifférent, à la douceur et à la gcn- I
tulessft de cette enfant, bien qu'il n'en fût uas le
pé,re. ' .. I
Mais son sort était arrêté depuis longtemps, et le
9 décembre, vers six heures du soir, sa mure la
prit par !a main et la conduisit jusqu'au bord de
ia rivière, profitant de l'obscurité de la nuit, de la
pluie qui tombait, double cirr,ont;l,me qui pouvait
permettre de compter eur l'impurlaissant,
croire à un accident.
Cependant, une femme qui habite uuu loin du
u où le crime g été cognais, ente le cri que
poussai l'infortunée lorsqu'elle comprit ce qui al- j
lait se passer. Grâce aux indications fournies par
cette femme, la vue des lieux démontra qu'il n'é-
tait pas possible que Joséphine Dherse eût été
précipitée dans la rivière, sï ce n'est par sa mère,
qui, avait-elle fini par le confesser, s'était enfuie
sans savoir si sa victime se sauvait ou si elle suc-
combait.
Conduite hier malin par MM. les magistrats
d'Ala:is sur le théâtre du crime, au milieu d'une
foule énorme,, qui ne put maîtriser son indigna-
tion, elle dut avouer qu'elle avait renversé son
enfant dans la Cèze, et qu'elle l'avait tenue sous
l'eau jusqu'à ce qu'elle eût cessé de re-spirer et de
remuer; alors seulement elle l'abandonna.
UNE EXÉCUTION A NEWGATE
Lundi dernier a eu lieu, dans l'intérieur de la prison
de Newgate, à Londres, l'exécution du nommé Frédé-
ric Hinson, condamné récemment à la peine de mort
pour avoir tué, dans un accès de jalousie furieuse, la
femme Maria Death, avec laquelle il vivait maritale-
ment. et un voisin, William Boyd, qui avait noué des
relations intimes avec elle.
Hinson, qui habitait un cottage da la banlieue de
Londres, avait, un jour du mois .er iiir, surpris Ma-
ria Death à la station du chemin de fer, revenant de
la ville en compagnie de BOJd, contre lequel il nour-
rissait depuis quelque temps des soupçons qui n'étaient
que trop fondés. Ne doutant plus de l'infidélité de sa
maîtresse, Hinson l'avait saisie violemment par le
bras, et l'e'Rtralfmnt .à sa suite, s'était dirigé vers sa
demeure.
A peine arrivé, il s'était empare ,d'un fusil tout
chargé rt. avait fait feu snr la malheureuse, qui était
tombée à r-fs pieds foudroyée; puis, sans perdre de
temps, il s pteU: rendu au-domicile do Boyd, qu'il av.di
rencontré dans son jardin, • terras.-j el i.!.s'jOii::t!L' «
xoups de crosse.
Plusieurs personnes avaient été témoins de ce-M-
tragédie, mais de loin et sans oser intervenir.
« Depuis sa condamnation, lisons-nous dans une
correspondance, Hin?ot) avait vécu dans un pénible
état d'exaltation. Il revenait souvent sur son crime
pour le justifier. Il répétait à toute occasion que Maria
Dea.th étant légitime, bien que sa femme à lui vécût
encore, il avait en sa faveur l'excuse, sinon le droit,
du mari qui tue la femme adultère et son complice
pris en flagrant délit. Dans ses longues conversations,
ou plutôt controverses, avee M. Jonas, le chapelain de
la prison, il citait des textes-de la Bible pour montrer
que l'adultère mérite la mort.
« Un jour de la semaine dernière, sa belle-mère vint
l,) visiter dans sa prison et se mit, aussitôt son entrée,
à J.ui adresser de violents reproches au sujet de son
crime; le condamné répliqua iavec colère à cè langage
déplacé, et les gardiens coupèrent court à cette seïne
na.v-ra.nte, en faisant sortir cette femme.
« Le condamné laisse deux enfants, l'un de sa fem-
me légitime, l'autre de la maîtresse qu'il a tuée. Un
de ses voisins à Wood-Grean, qui lui portait beaucoup
d'intérêt, s'est chargé d'eux.
« Jusqu'au dernier jour, Hinson semble avoir espéré
que sa vie serait épargnée. On est venu l'e-veiHer hier
à six heures. Le chapelain est alors entré dans sa cel-
Iule et est resté avec lui jusqu'au moment suprême.
« Un peu avant neuf heures, les deux shériffs arri-
vèrent à la prison. Lorsque le bourreau entra dans la
cellule du condamné, celui-ci le salua d'un « bonjour,
monsieur. Calcraft. » Il demanda à serrer la main au
gouverneur et aux officiers de la prison.
« Lorsqu'il monta sur l'échafaud, il dit à voix basse :
« Nous voilà au grand mystère! » Là, son courage
l'abandonna, et il s'évanfmt à moitié ; il fallut le sou-
tenir pendant qu'on ajustait la corde à son cou et le
bonnet blanc sur sa tète, et ce lut une masse inerte
qui tomba lorsque la trappe s'ouvrit. La mort a paru
être instantanée.
« Au moment de la conclusion de ce drame à huis
clos, la cloche de Newgate a sonné le glas funèbre. Le
drapeau noir a été hissé sur la porte de la prison;
puis notice il été affichée au dehors d" l'oxértitiorn de'
la sentence.
« Les seules personnes admises it voir- l'exécution
or,.t été les shériffs, les employés de la prison et les re-
pt'cset.tô.ïiis de la presse. »
SOUVENIRS JUDICIAIRES
L'AFFAIRE LAVALETTE
II (suite)
L'évasion.
Au bout du couloir donnant entrée sur la salle
du greffe, était une porte basse, rendue plus
basse encore par un pas qu'il fallait gravir. C'est
là surtout qu'il était nécessaire de ne pas oublier
la recommandation de la comtesse. Lavalette se
trouvait en cet endroit dans l'obligation de lever
le pied, et en même temps de baisser la tète pour
éviter que les plumes du chapeau ne se heurtassent
à la traverse de la p.orte. Il se tira heureusement
de ce pas difficile : et en relevant la tête il se vit
dans une grande pièce où se tenaient cinq ou six
geôliers, les uns "assis, d'autres debout. A la vue
de la personne qu'ils prenaient pour la comtesse,
ces derniers^ vinrent se ranger' sur son passage,
les yeux fixés sur celle qui, dans leur pensée, se-
rait veuve le lendemain de par la loi.
Lavalette tenait son mouchoir sur ses yeux, at-
tendant que sa fille vint se placer à sa gauche,
suivant les instructions qu'elle avait reçues ; mais
l'enfant se trompa et vmt lui prendre le bras droit.
Madame de Lavalette avait devancé l'heure ha-
bituelle rïe sa sortie avec intention. Elle savait
que. d'ordinaire, c'était vers sept, heures que le
concierge était retiré dans sa chambre pour dî-
ner; et elle avait csD'érô qu'il ne serait pas dans le
greffe au moment du passage de son mari. Elle
avait compté sans la vigilance de 00 fonctionnaire
atil. ax%n~ entendu l& porte djj ,CQ#g.aï'QU2$û'»
descendit précipitamment l'escalier de sa chambre.
Or, cet esealier se trouvait placé à la gauche de
Lavalette, et, comme la jeune Joséphine s'était
trompée de côté en venant se ranger auprès de son
père, le concierge pût s'avancer sans obstacle jus-
qu'à lui.
Le moment était périlleux. Le concierge, posant
la main sur le bras de Lavalette, lui dit :
— Vous vous retirez de bonne heure, madame
la comtesse !
Un sanglot étouffé sous son mouchoir fut la
seule réponse de Lavalette, et le concierge, dont
la voix avait déjà laissé percer l'émotion, ne s'en
sentant plus maître en présence de celle qu'il
croyait être une malheureuse femme qui vient de
faire un éternel adieu à son mari, se détourna vi-
vement, dans la crainte que le trouble qu'il
éprouvait ne lad révélât la fatale nouvelle, qu'il ve-
nait d'apprendre de la bouche du procureur gé-
néral.
C'est à cette émotion' que Lavalette dut de ne
pas .être conduit par la main jusqu'à la sortie par
le concierge, ainsi que celui-ci avait coutume de
le faire pour la comtesse. Il s'avança donc sans
être accompagné jusqu'au bout de la salle du
greffe. Là se trouvent deux portes séparées par un
étroit espace dans lequel se tient jour et nuit,
assis dans un grand fauteuil, un geôlier qui peut
avoir ainsi ses deux mains placées sur la clef de
chacune des deux portes. La première de ces
portes, celle de l'intérieur, est à barreaux de fer ;
l'autre, la porte externe, en bois solide, garnie de
bandes de fer et de gros verrous, est ce qu'on
appelle le premier guichet.
Il fallait encore que ces deux portes s'ouvris-
sent devant Lavarlette. Le geôlier qui occupait le
po-ie étroit dont nous venons, de parler le regar-
«lîï't -ans ouvrir. A quoi pensait-il? Etait-ce la cu-
riosité seule qui le tenait immobile ? était-ce un
S" - Li!ço:i qui lui venait à l'esprit? Ce fut un mo-
:i;eut d'anxiété terrible pour Lavalette. Enfin,
n'y tenant plus, il passa la main droite à travers
les barreaux pour avertir le geôlier, qui, rappelé à
lui par cet avertissement, ouvrit d'abord la pre-
mière porte, puis la seconde. En cet endroit, l'en-
fant se trouvait bien placée à droite; elle était
aussi entre le geôlier et son père, dont elle déro-
bait en partie la vue au premier.
Voilà Lavalette hors de la prison; mais tout
n'est pas dit : il reste encore un obstacle redou-
table à franchir. Il faut monter un escalier de
;douze marches pour arriver à la cour, et au haut
de cet escalier est situé le corps de garde des gen-
darmes. L'officier et une vingtaine de soldats se,
sont groupés devant le poste pour voir sortir la
malheureuse comtesse ; ot il va falloir que Lava-
lette passe devant eux presqu'en les frôlant, tant
ils vont être rapprochés de lui.
Si, parmi les hommes de garde allait se trouver
un de ceux qui l'ont conduit à la cour d'assises?
S'il allait être reconnu et échouer de la sorte au
moment, de toucher le P()J't.? C'e.-,t, l'instant ou
jamais de presser son mouchoir sur. ses yeux. Le
voilà à la dernière marche; les gendarmes qui
chuchottaient entre, eux se taisent tout à coup. Le
respect, la pitié leur clouent la langue ; de cette
femme qu'ils ont devant les yeux, ils ne voient
que la douleur. Lavalette, passe ; il est passe.,
Il est dans Ja. cour, enfin!... La chaise est à
trois pas de lui, il y entre en mesurant ses mou-
vement-s, sans précipitation ; mais, en j entrant.,
il a pâli. D'un conp d'œil; it a remarqué l'aisenee
de son valet de chambre et des porteurs de la
chaise. Où sont-ils ? Terrible situat'on.! Joséphine
et la vieille bonne sont debout à côté de la chaise;
et, à quelques pas, la sentinelle immobile tient
les yeux fixés sur lui. Une violente agitation s'est
emparée de Lavalette, et mille pensées assaillent
son esprit. H.se voit découvert, et ses regards res-
tent attachés sur le Tnsil du factionnaire. Au pre-
mier mouvement qui. H' fait., au premier bruit
venu de la prison, il saute sur cette arme, il s'en
empare, et. vend chèrement sa vie. Deux minutes,
— un siècle ! — se passent dans cette cruelle per-
plexité ; enfin, Lavalette se sent soulevé. Bonne-
ville est revenu ; un des porteurs lui a fait faux
bond au dernier moment, et il lui a fallu s'en
procurer un autre. Il a pris le premier venu, une
espèce de charbonnier ; et la chaise à porteurs
s'éloigne lentement à travers la' grande cour.
Ici se présente pour nous un embarras. Sui-
vrons-nous immédiatement la chaise à porteurs, ou
resterons-nous à la Conciergerie pour voir ce qui
s'y passe après le départ de Lavalette ? Nous op-
tons pour ce dernier parti, sauf pour nous - à re-
Joindre le fugitif lorsqu'on se sera aperçu de son
évasion, et que, de tous côtés, on se sera lancé à
sa poursuite.
Madame de Lavalette est restée seule dans la
chambre, dont la porte s'est refermée sur elle. Tou-
jours cachée derrière le paravent, elle écoute, ha-
letante, les bruits"p'u dehors, dont le moindre de-
vient pour son inquiétude une rumeur qui lui
présente sa tentative avortée,et son mari retombant
aux mains du bourreau. Elle .compte les minutes
aux battements de son cœur. Cepèndant le temps
s'écoule : mais elle n'ose encore se flatter de la
réussite/Tout, à coup la serrure fait entendre son
double cri et la perte de la chambre est ouverte.
Grand Dieu ! c'est son mari qu'on ramène ! Tette
est sa première pensée ; mais aussitôt elle se ras-
sure. Lavalette l'a Dre venue que, chaque jour, après,
son départ à elle, Tê concierge venait dans la cham-
bre s'assurer de la présence de son prisonnier ; et
il lui a recommande de rester derrière le paravent
pour le moment de cette visite et d'y remuer
quelque meuble. De cette façon, j le concierge le
croirait là et se retirerait, lui laissant ainsi plus
dp temps pour s'éloigner du voisinage de la
prison.
En entendant ouvrir la porte, la comtesse se
rappelle tout à. coup . la recommandation et se'
garde bien d'y manquer. L'effet attendra est pro-
duit. Le concierge, croyant son prisonnier occupé
àçrrtère le paraît, se retiré sans lejjéranger.
Mais il ne l'a pas vu, et il faut qu'il le vole. Cinff '
minutes après, il revient. La chambre est encore
vide ; on remue toujours derrière le paravent»'
Cette fois, le concierge ne se contentera pas du>'
témoignage de ses oreilles, il lui faut celui de ses
yeux. Il s'avance vers le paravent, en écarte lune
feuille, et jette un cri à la vue de Mme de Lava-
lette. .4
— Miséricorde !... A moi! à moi !
(La suite à demain.)
E. NYON.
LE TRÉSOR DU FOYER
A TRAVERS LES HALLES.
# Ainsi que nous le disions dans nos derniers bulle-
tins, le prix des volailles augmente en ce moment
dans de 'grandes proportions. Cela tient à deux rai-
sons : la première, c'est que, la semai-ne de Noël, ainsi
que celle du jour de l'an, la consommation est très-
grande et les marchands profitent de cette vente près-'
que forcée pour tenir leur prix ; la seconde raison;
cest que l'Angleterre, depuis un mois environ, a-com-
mande à nos expéditeurs d immenses cargaisons de
volailles grasses, ce qui fait que, malgré la grande
quantité de marchandises qui arrivent de tous côtés, il
ne s'en trouve pas encore assez pour suffire aux de-
mandes.
Il ne faudrait pas croire, d'après cela, que la Halle
se trouve dépourvue de volailles. Il suffit, pour se con-
vaincre du contraire, d'aller à ce marché le matin, où
a !!eu, au milieu d'un encombrement général, le dé-
ballage de ces grandes mannes où se trouvent serrés
les oies, les dindes, les coqs, les faisans, etc.
Profitons de ce que les halles ont cette semaine'peu
de variété, sous le rapport des légumes et du poison,
pour donner quelques recettes à l'occasion des fètes de
Noël.
Disons d'abord que, pour rester dans. la iradnion,
tout bon dîner de Noël doit se composer Lie pieds trut-
fés et d'une bête l'0tl." dinde ou oie. Comme entremets,
beaucoup de maisons francaises ont ad®p.té h métho-
de anglaise et. servent, également !o f:mCl1x pllwl-plul-
ding, dont voici la recette :
On met dans une terrine une demi-livre de graissa
de bœuf bien pilée, une demi-livre de sucre râpé.
une demi-livre de raisin de Malaga, une demi-livre
de raisin de Corinthe, cinq œufs, bhmes et jaunes, un
litre de farine, une once d'écorce de citron couder .6,
une once d'écorce-d'orange, un verre d'ealHJc-yie et
nn demi-verre de rhum; on bat le tout pendant long-
temps. La bonté du pudding dépend de sa longue ma-
nipulation.
On place ensuite cette pâte dans un linge que l'on
lie fortement, et on la 'fait cuire au bain-rnario pendant
au moins six heures.
On place une soucoupe au fond de la marmite pour
empêcher que le_ linge et le pudding s'y attachern. Au
moment de servir, on place le pudding dans un grand
plat, on le saupoudre de sucre, on y verse de l'eau-de-
vie et on allume. Rien n'est plus appétissant que ce
pudding tout flamboyant apporté ainsi sur la table.
Depuis une quinzaine de jours,. les Ualles, du côté
de la rue de la Cossonncrie, sont encombrées de caisses
arrivant du Midi et contenant des oranges et des ci-
trons.
Il paraît que cette ,année les oranges seront assez
bon marché. C'est, dU- reste, un fruit fort agréable et
très-rafraîchissant.. L'orange est non-seulement em-
ployée dans l'économie domestique, mais aussi en mé-
decine. L'écorce entre dans la composition de poudres
cordiales et vermifuges. Les fleurs d'oranger ont des
propriétés anti-spasmodiques bien connues.
Quant au citron, c'est un excellent digestif ; on l'as-
socie à certains mets dont les principes sont gélati-
neux, comme les huîtres, le poisson, les volailles ;
dans ce cas, il sert non-seulement à relever la saveur
souvent fade, mais encore 'à faciliter Ja digestion. Il
est rafraîchissant et anti-putride. Dans les longs voya-
ges, on l'emploie avec succès pour prévenir le scorbut
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