Titre : La Petite presse : journal quotidien... / [rédacteur en chef : Balathier Bragelonne]
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1869-01-05
Contributeur : Balathier Bragelonne, Adolphe de (1811-1888). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32837965d
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 05 janvier 1869 05 janvier 1869
Description : 1869/01/05 (A4,N992). 1869/01/05 (A4,N992).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k47179943
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-190
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 07/11/2017
FAITS DIVERS
PARIS
Le premier bal des Tuileries a lieu aujourd'hui
fundi, 4 janvier,
On dit qua l'impératrice y veut inaugurer-des
grosses couronnes rondes, qu'on avait déjà es-
sayé de porter l'année dernière. Il faut se savoir
. bien jolie pour oser porter ce lourd échafaudage
' de fleurs.
; Les demi-beautés n'auront pas le courage de
l'accepter.
On s'entretient de l'inquiétude, malheureusement
trop bien justifiée, d'une honorable famille. Un
membre distingué de l'Académie des sciences, pro-
fesseur au Muséum, M. le vicomte d'Archiac, a
disparu de sa demeure, en laissant une lettre par
laquelle il avertissait qu'on ne devait point l'at-
tendre. Depuis lors, M. d'Archiac n'a pas re-
paru. (Paris.)
Hier matin, a eu lieu simultanément, au Pan-
théon et à Saint-Etienne-du-Mont, l'ouverture de
la neuvaine de Sainte-Geneviève, avec la pompe
ordinaire et une affluence de pèlerins.
Saint-Etienne et le Panthéon sont richement dé-
corés. La foule est si grande autour des deux
châsses qu'on n'en peut approcher.
Les parvis sont occupés par une foire aux objets
de religion.
Depuis le 11, janvier huit postes de police ont
été transférés d'une rue dans une autre. Nous
croyons rendre service à'nos lecteurs en indiquant
ces divers changements, afin de leur éviter, le cas
échéant, des courses inutiles.
Le poste de police de la rue Saint-Jacques a été
transféré rue des Feuillantines, 11; '.
Celui de la rue de Reuilly, boulevard de Reuil-
ly, 22;
Celui de la rue de Joinville rXIXe , arrondisse- {
ment), rue de Tanger, 9 ;
Calui de la rue de la Glacière rue de la Butte- (
aux-Cailles, 37 et 39; t
Celui de la rue de Varennes, rue de l'Ouest, 56 ]
(XIVe arrondissement) ; c
Enfin celui de la route d'Orléans, rue Boulard, c
2, bis.
Voulez-vous savoir combien il a paru de nou- r
v''aux journaux; à Paris seulement, pendant l'année r
qui vient de s'écouler? Il en a paru 139 ! '
On peut les classer de la manière suivante : 101
littéraires et artistiques; 14 traitant de matières
politiques, dont 6 paraissant tous les jours; 12 con-
sacrés aux arts industriels et à la science; 1 pour d
le magnétisme; 1 pour les gardes-champêtres; 1 n
pour les cafés-concerls; 1 pour la navigation aé-' ?
rienne ; 1 pour les gares ; 1 pour les concierges. ' je
A l'époque de l'apparition de la Lanterne, 33 jour- v
naux ont imité le format et le genre de ce journal •
de toutes ces publications, 2 seulement continuent 9
à paraître. P
Parmi les titres les plus excentriques, mention-
nons le Caméléon, le Balayeur d'ânerie, la Charrue
le Lumignon, le Concierge et les Punaises dans le. d,
beurTe. V
Une de nos grandes demoiselles qui a souvent... ?
failli devenir madame, a reçu un joli cadeau d'é- "7
trennes : Un boîtier d'écaillé incrusté d'or, et dans
le boîtier, les clefs d'un charmant petit hôtel des
Champs-Elysées.
M
M. de la R... traversait avant-hier, vers six heu- cè
T'CS du soir, la place de la Concorde, lorsqu'on arri- cc
vaut à la hauteur de l'obélisque, il aperçut un cc
homme étendu sans mouvement sur le sol ; il s'en
approcha, rendit le faible souffle de sa respira- r,.
tlOn et l'aida aussitôt a se relever. etpl
En interrogeant 'cet homme, M. de la R.., apprit n<
de lui qu'il se nommait Jean-François M...,'âgé de d'
quatre-vingts ans, pensionnaire de l'hospice de
l'hospice de Hicêlre. Il donna alors le bisas au pauvre
vieillard et le conduisit au Cercle de la rue Royale,
où des soins de toute sorte lui furent prodigués.
Après lui avoir fait prendre un potage et des ali-
ments qui le ranimèrent — car le pauvre homme -
était tombé de faiblesse, — M. de la R... fit appro-
cher une voiture de place et paya généreusement le
cocher qu'il chargea de reconduire le vieillard à son
hospice. — B.
Hier, à dix heures du soir, les passants s'arrêtaient '
rue Notre-Dame-de-Lorette pour regarder les
lueurs rougeâtre s'élevant vers le ciel.
Un incendie venait d'éclater dans un chantier de
planches de sapin, à Batignolles, rue des Moines,
rio 100.
Le feu avait pris dans une échoppe de cordon-
nier, située derrière le magasin et s'était bien vite
communiqué au bois d'une nature résineuse.
^ Malgré les secours les plus actifs dans ce quar- '
tier populeux, les planches entassées sous le han-
gar furent bientôt la proie des flammes qui, s'éle-
vant à une grande hauteur, jetèrent l'épouvante et
l'effroi dans le voisinage.
A Parriv'-e des pompiers, les secours furent or-
ganisés promptement et l'incendie, attaqué vigou-
reusement, fut arrêté dans ses ranidés progrès.
A onze heures, on était maitre du jeu. Unegrande
partie du bois a été dévorée par les flammes. Le
propriétaire était assuré. Malheureusement, le cor-
donnier n'était point assuré pour ses meubles,dont
une partie a été brûlée, ainsi que le linge de corps
et son petit matériel.
Ce matin la fumée s'échappait encore des démon-
tions; mais tout danger avait disparu. — F.
DÉPARTEMENTS ET COLONIES
Les dépêches de Nice, 2 janvier, soir, nous
annoncent que le prince et la princesse Charles
de Prusse sont arrivés à Nice avec une suite de
25 personnes.
D'autres dépêches de Calais, 3 janvier, disent
que l'ambassade chinoise, venant de Londres,
est débarquée à Calais, et est repartie pour
Paris sans s'arrêter. Le personnel et la :suite
de l'ambassade se composent de'quarante per-
sonnes environ.
M. de Villemessant, qu'on avait dit. grave-
ment malade à Nice, écrit lui-même pour dé-
mentir cette sinistre nouvelle et réduire sa pré-
tendue apoplexie à une simple indisposition.
Berlioz-Arthaud, condamné à mort par la cour
d'assises du Rhône, le 27 novembre dernier, et dont
nous avions annoncé la commutation de peine en
celle des travaux forcés il perpétuité, a été extrait
jeudi dernier de la maison d'arrêt, et conduit de-
vant la cour impériale, pour entendre la lecture des
lettres de grâce. Pendant la lecture faite par le
greffier, la figure de Berlioz exprimait la plus com-
plète indifférence.
Voici un fait unique, sans doute, dans l'histoire
de nos gardes-jurés et raconté par l'Union des Deux-
Villes, journal de Saint-Malo :
« En novembre dernier, M. William Dowding, de
Dinan, chassait dans le canton de Plélan-le-Petit.
Avisant un laboureur qui travaillait dans un champ
il lui demanda si ses terres n'étaient point gardées.
— Non, monsieur; vous pouvez chasser partout-là,
lui fut-il répondu. — Quelques instants après,
M. Dowding, vit arriver à lui un individu avec cos-
tume de garde et sa plaque, lequel lui déclara pro-
cès-verbal. Le chasseur n'eut pas de peine à re-
connaître le même homme qui venait de lui indiquer
ces terrains comme libres, et il lui témoigna son
étonnement; mais qu'importe? Il fallait subir le
procès-verbal, ou transiger. D0 8 fr. offerts d'abord,
et non acceptés, le chasseur se vit obligé d'en don-
ner 15. Cette escroquerie ayant été découverte, vient
d'être qualifiée et jugée par le tribunal de Dinan,
Î qui a condamné le sieur Pierre Samson (c'est le nom
; de ce singulier garde) à un an et un jour de prison,
, 59 fr. d'amende, et à la privation de ses droits ciyi- .
. ques pendant cinq ans. L'inculpé s'était fait uu
- système de ces coupables spéculations. »
Un assassinat a eu lieu, dans la nuit du 1er au
2 janvier, aux Brotteaux.
Victor Micoud, âgé de 27 ans, né à Fitillieu
(Isère), homme de peine à Lyon, avait soupé avec
.son père et. son frère. Tous trois étaient rentrés se
1 ctmeher, sur les minuit.
Vers trois h&ures du matin, Micoud, à demi-
éveillé, aperçut vaguement un individu emportant
un paquet de vêtements. Il se lève et se mit à la
poursuite du malfaiteur qui, sur le point d'être at-
teint, se retourne et lui porta cinq coups de cou-
teau.
Victor Micoud a été relevé sanglant et évanoui.
Deux de ses blessures sont très-graves : l'une a
'failli trancher l'artère carotide, l'autre a perforé
l'intestin.
On nous assure que l'assassin est arrêté.
La soixante-quatrième victime de l'explosion de
la cartoucherie de l'arsenal de Metz est morte à
l'hôpital Bon-Secours. C'était une jeune fille de
seize ans, nommée C. Gaspard.
On lit dans le Mémorial de Lille :
Lundi matin l'alarme était au camp d'Hetfaut. Le
camp brûlait!
Bientôt la nouvelle en fut répandue dans notre
ville, et chacun, à voir le vent violent qu'il faisait
se figurait un véritable océan de flammes envelop-
pant toutes les baraques construites sur le plateau
d'Elfaut.
La nouvelle n'était que trop fondée.
Le feu avait pris au grand pavillon de l'Em-'
pereur, et peu s'en était fallu qu'un des officiers
logés dans cette baraque ne périt dans les flammes.
Heureusement, les secours arrivèrent promptement
de tous les côtés à la fois, et le désastre s'est borné •
à deux baraques et à leurs mobiliers entièrement
consumés.
ÉTRANGER
Un don de la plus magnifique élégance et ri-
chesse vient d'être otTert à SM Sainteté par l'em-
pereur d'Autriche. C'est un missel expressément
exécuté pour le Saint-Père, auquel ont travaillé
dix-neuf artistes pendant dix ans. Il aété exposé
ces jours-ci dans les salles de la bibliothèque
vacicane, et l'op s'est étonne de sa beauté unique.
Le volume est en parchemin, tout entier ma-
nuscrit dans le style calligraphique antérieur à
à l'usage de l'imprimerie. D'un bout à l'autre,
il est enrichi de miniatures du goût le plus ex-
quis. C'est un vrai chef-d'œuvre en son genre,
et l'on pourrait dire qu'il est un anachronisme.
Un de nos amis qui arrive de Devonshire, dit
le journal de Paris, nous raconte un épisode très-
dramatique de la vie englaise :
Il y a trois ou quatre ans, une riche veuve an-
glaise et sa fille unique, admirablement belle, pas-
sèrent la saison d été'à Trauville. Un jeune homme
allié aux meilleures familles de la finance et de l'a-
ristocratie parisienne, s'éprit de la jeuno fille. Il
était sans fortune, mais aimable et empressé. Quel-
ques mois après il épousait la blonde miss et allait
avec elle et sa mère vivre dans leurs terres du
Devonshire.
Tout récemment, sous prélexte de se tenir en
garde contre les fénians, le jeune mari acheta un
revolver et entra dans la chambre de sa femme.
Cinq minutes après, on entendait une violente dé-
tonation; les gens de la maison accouraient et trou-
vaient la jeune femme étendue sans mouvement au
pied di-) son lit. Une balle lui avait brisé le crâne.
Pour les faits, le secrétaire de la rédaction,
ÉMILE HÉMERY.
L'AMOUR D'UN FORÇAT
Nous empruntons le dramatique épisode qu"ql'
va lire à 1 Histoire illustrée des bagnes, depuis leut:
leur création jusqu'à nos jours , écrite par un ro.-
mancier d'un grand talent, M. Pierre Zaccone, et
publiée par l'éditeur Bunel.
C était en 1838. Il y avait alors au bagne de,
Brest, un forçat que l'on appelait Joseph BOf"
delet.
C'était un tout jeune homme. Il n'avait pas
vingt-cinq ans !...
Figure souriante, cheveux hlonds,dents saines,
œil profond et vif.
En moins d une année, il conquit les sympa-
thies de tous, et le commissaire du bagne n'hé..
si ta pas, en raison de sa bonne conduite, à
l'atelier au service de l'hôpital'de la marine.
i! a\as. la des fonctions fort douces, et qui
convenaient particulièrement à son caractère. r
11 était ssrvant de la tabloïdes officiers.
Toujours d'humeur égale, e.mpressé et poli
envers chacun, il s'était si bien distingué des
autres forçats, que l'on avait fini par le traiter
comme on eût traité un malelot honnête et
probe.
Cela dura un an... Au bout de ce temps, et
sans que rien ne pût expliquer un changement
si brusque, Joseph devint tout à coup taciturne
et sombre.
On lui portait un intérêt réel; on le pressa da
questions... mais il éluda toujours d'y répondre.
Une fois cependant, un chirurgien de marine,
plus jeune que les autres — ou plus indiscret,
fit approcher Bordelet de la table, et là, devant
dix convives aussi sérieux que lui :
Messieurs, dit-il d'un ton enjoué, voulez-
• vous que je vous fasse connaître PQurquoi, de-
puis quelque temps, notre servant a perdu sa
gaieté et sa belle humeur?
— Dites ! dites ! firent plusieurs voix en
même temps.
— Eh bien... C'est qu'il est amoureux...
— Lui !
— Je l'affirme.
— Et de qui ?...
— Faut-il vous le confier?...
;—Le nom ? le nom?...
La regard du forçat venait de s'éclairer d'uni
flamme inattendue.
Dans l'expression de ce regard, il y avait da
la fureur et de la haine, mélées à je ne sais
quel sentiment étrange et indéfinissable .. Ce
fut un éclair. Mais si rapide qu'il eùt été, il.
frappa également tous les assistants. On fit si-
lence.
Un silence embarrassé, plein d'étonnement
et peut-être d'épouvante.
Pour la première fois, depuis qu'il était au
bagne, Joseph s'était oublié. L'assassin avait
percé sous l'infirmier!...
Toutefois, cetLe'scène n'avait eu pour témoins
que des jeunes gens auxquels la vie ménageait
chaque jour des distractions nouvelles. Les uns
s'embarquèrent à quelque temps de là, d'autres
quittèrent l'hôpital, la plupart oublièrent, si
bien que l'incident ne laissa de trace durabla
dans l'esprit de personne.
Ce ne fut que longtemps après, et quand sur-
vint la catastrophe dont nous avons à parler,
que !e souvenir put en ê.re évoqué par quel-
ques-uns.
Vers cette même époque, était entrée à , l'hô-
pital de la Marine une de ces saintes femmes
qui, poussées par un dévouement sublime, con-
sacrent leur vie à la dure mission de soigner les
malades et consoler les mourants.
LA
SECONDE JEUNESSE
DU
ROI HENRI
PAR
PONSON DU TERRAIL
TROISIÈME PARTIE
LA TRAHISON DE LAFFIN
XIII
9i
dâl1s son cabinet, avec M. de
bully. u ri8 M. d'Epernon et la reine.
Lu roi était sombre, taciturne, et ne répon-
ûah ^ pas à la question que M. de Sully ©»ait
faite trois lois déjà et qui était cetle-ct :
— Que compte faim Votre Majesté?
Enfin le roi releva la tête et dit :
— Attendons le retour de Galaor.
V oi,r IfS Imm01'OS parus depuis le 27 septembre
iusqa au 18 novembre» |
La reine secoua la tète : •
-Sire, dit-elle, M. Galaor reviendra seul.
— Qui sait? fit le roi.
— Je suis de l'avis de Sa Majesté, la reine, re
prit Sully.
— Ah 1 dit le roi.
Et il attacha un froid regard sur son ministre.
— M. de Biron ne viendra pas, répéta Sully
avec conviction.
— Je suis sûr qu'il, viendra, moi.
Puis, se tournant vers d'Epernon.
— Qu'en pensez-vous \naréehal ?
D 'Epernon baissa la tète e't ne répondit pas.
Alors le roi se leva et se mit à se promener
d'un pas inégal et brusque.
Puis, s'arrêtant tout à coup :
— Rien de tout cela n'est prouvé, dit-il.
— Quelle preuve désire donc Votre Majesté?
demanda Sully d'une voix ironique.
— Oh ! je sais bien, reprit Henri de Bourbon,
que pour qui ne conn ,iît pas Biron comme moi,
il est coupable.
— Sire, dit la reine. Votre Majesté ne' pour-
rait nier les pourparlers de M. de Biron avec le
duc de Savoie.
— Non, dit le roi. Je sais qu'il devait le ser-
vir. Mais 1 a-t-il servi? Vous ne vous souvenez
dor'c pas de Moritmei'ian, Sully ?
— Parfaitement, sire.
— Et, bien ! m'a-t-il trahi à Montmeillam ?
— Non.
— Vous voyez bien.. '
— Sire, reprit gravement Sully, si M. de - Bi-
f'pu était, tenu, à ses intelligences avec le
dise Savoie, je suis de ''avis de Votre Ma-
teasé.
■ — Eh bien ?
— Mais M. de Biron a fait un traité avac
l'Espagne. *
— Voilà précisément, dit le roi, ce dont nous,
n'avons aucune preuve.
— Mais,slre, j'ai mis une copie du traité sous
les yeux de Votre Majesté.
— Ce n'est qu'une copie. Où est la signature
du maréchal?
— Sur l'original, sire.
— Et qui vous dit que cet original existe?
-Oh! sire.
— Biron a des ennemis comme vou-, d'Eper-
non, comme toi,Sully. comme nous tous. Ce pa-
pier, qu'un inconnu remit en s'esquivant, est-ce
une preuve?
— Hélas! dit la reine, Votre Majesté aime si
fort l'homme qui a juré sa perte, qu'elle le veut
innocenter quand même.
— Eh bienl dit le roi, qu'on me montre le
nom de Biron écrit de sa main au bas d'une
lettre adressée au roi d Espagne et je croirai à
sa trahison.
En parlant ainsi, le roi regardait Sully.
Sully ne se déconcerta point.
- Sire, dit-il, ce matin même un homme
m'est venu trouver.
— Quel est cet homme ?
— Attendez, sire. Cel homme a en mains de
quoi faire tomber six fois la tète du maréchal.
— Eh bien ! qu'il m'apporte les preuves?
— Sire, il ne le fera que si Votre Majesté lui
donne des garanties.
— Il veut de l'argent?
— Non, sire.
— Que veut-il alorsf
— Ses lettres d'abolition d'abord.
— Et puis?
— Et puis il veut que Votre Majesté le prenne
sous sa protection.
— Un pareil misérable! fit le roi, avec dé-
dain.
— M. de Biron a des parents, et des amisi
puissants qui tueront cet homme s'il dévoila;
S'es trahisons. 11 veut que Votre Majesté lui i
donne une escurte de trente hommes.
— Et il m'apportera la ureuve que Biron ia,*a :
trahi? * j
— Oui, sire. -
— Sire, dit la reine, songez au trônes de:
France qui est le vôtre et sur lequel le roi d."Es-|
pagne se veut asseoi-r. j
Le roi n'y tint plus.
— Eh * bien! s'écria-t-il, Sully, diter- à cet
homme, quel qu'il soit, que je lui aeeai'de ca
qu'il demande. "
— Il aura ses lettres d'abolition?
— Oui.
— Et les trente hommes d'escorte?
— Oui, fit le roi.
— Alors, dit M. de Sully, je vais aller vous
quérir, sire, la preuve que M. le maréchal de
Biron est un traître et qu'il conspire avec l'Es-
pagne contre le trône de Votre Majesté.
Et Sully sortit triomphant, tandis qua le roi
retombait accablé dans son fauteuil et, couvrait
son front de ses deux mains. -A
PONSON DU TERRAIL.
1 . (La suiU au vrochain^ numérot)
PARIS
Le premier bal des Tuileries a lieu aujourd'hui
fundi, 4 janvier,
On dit qua l'impératrice y veut inaugurer-des
grosses couronnes rondes, qu'on avait déjà es-
sayé de porter l'année dernière. Il faut se savoir
. bien jolie pour oser porter ce lourd échafaudage
' de fleurs.
; Les demi-beautés n'auront pas le courage de
l'accepter.
On s'entretient de l'inquiétude, malheureusement
trop bien justifiée, d'une honorable famille. Un
membre distingué de l'Académie des sciences, pro-
fesseur au Muséum, M. le vicomte d'Archiac, a
disparu de sa demeure, en laissant une lettre par
laquelle il avertissait qu'on ne devait point l'at-
tendre. Depuis lors, M. d'Archiac n'a pas re-
paru. (Paris.)
Hier matin, a eu lieu simultanément, au Pan-
théon et à Saint-Etienne-du-Mont, l'ouverture de
la neuvaine de Sainte-Geneviève, avec la pompe
ordinaire et une affluence de pèlerins.
Saint-Etienne et le Panthéon sont richement dé-
corés. La foule est si grande autour des deux
châsses qu'on n'en peut approcher.
Les parvis sont occupés par une foire aux objets
de religion.
Depuis le 11, janvier huit postes de police ont
été transférés d'une rue dans une autre. Nous
croyons rendre service à'nos lecteurs en indiquant
ces divers changements, afin de leur éviter, le cas
échéant, des courses inutiles.
Le poste de police de la rue Saint-Jacques a été
transféré rue des Feuillantines, 11; '.
Celui de la rue de Reuilly, boulevard de Reuil-
ly, 22;
Celui de la rue de Joinville rXIXe , arrondisse- {
ment), rue de Tanger, 9 ;
Calui de la rue de la Glacière rue de la Butte- (
aux-Cailles, 37 et 39; t
Celui de la rue de Varennes, rue de l'Ouest, 56 ]
(XIVe arrondissement) ; c
Enfin celui de la route d'Orléans, rue Boulard, c
2, bis.
Voulez-vous savoir combien il a paru de nou- r
v''aux journaux; à Paris seulement, pendant l'année r
qui vient de s'écouler? Il en a paru 139 ! '
On peut les classer de la manière suivante : 101
littéraires et artistiques; 14 traitant de matières
politiques, dont 6 paraissant tous les jours; 12 con-
sacrés aux arts industriels et à la science; 1 pour d
le magnétisme; 1 pour les gardes-champêtres; 1 n
pour les cafés-concerls; 1 pour la navigation aé-' ?
rienne ; 1 pour les gares ; 1 pour les concierges. ' je
A l'époque de l'apparition de la Lanterne, 33 jour- v
naux ont imité le format et le genre de ce journal •
de toutes ces publications, 2 seulement continuent 9
à paraître. P
Parmi les titres les plus excentriques, mention-
nons le Caméléon, le Balayeur d'ânerie, la Charrue
le Lumignon, le Concierge et les Punaises dans le. d,
beurTe. V
Une de nos grandes demoiselles qui a souvent... ?
failli devenir madame, a reçu un joli cadeau d'é- "7
trennes : Un boîtier d'écaillé incrusté d'or, et dans
le boîtier, les clefs d'un charmant petit hôtel des
Champs-Elysées.
M
M. de la R... traversait avant-hier, vers six heu- cè
T'CS du soir, la place de la Concorde, lorsqu'on arri- cc
vaut à la hauteur de l'obélisque, il aperçut un cc
homme étendu sans mouvement sur le sol ; il s'en
approcha, rendit le faible souffle de sa respira- r,.
tlOn et l'aida aussitôt a se relever. etpl
En interrogeant 'cet homme, M. de la R.., apprit n<
de lui qu'il se nommait Jean-François M...,'âgé de d'
quatre-vingts ans, pensionnaire de l'hospice de
l'hospice de Hicêlre. Il donna alors le bisas au pauvre
vieillard et le conduisit au Cercle de la rue Royale,
où des soins de toute sorte lui furent prodigués.
Après lui avoir fait prendre un potage et des ali-
ments qui le ranimèrent — car le pauvre homme -
était tombé de faiblesse, — M. de la R... fit appro-
cher une voiture de place et paya généreusement le
cocher qu'il chargea de reconduire le vieillard à son
hospice. — B.
Hier, à dix heures du soir, les passants s'arrêtaient '
rue Notre-Dame-de-Lorette pour regarder les
lueurs rougeâtre s'élevant vers le ciel.
Un incendie venait d'éclater dans un chantier de
planches de sapin, à Batignolles, rue des Moines,
rio 100.
Le feu avait pris dans une échoppe de cordon-
nier, située derrière le magasin et s'était bien vite
communiqué au bois d'une nature résineuse.
^ Malgré les secours les plus actifs dans ce quar- '
tier populeux, les planches entassées sous le han-
gar furent bientôt la proie des flammes qui, s'éle-
vant à une grande hauteur, jetèrent l'épouvante et
l'effroi dans le voisinage.
A Parriv'-e des pompiers, les secours furent or-
ganisés promptement et l'incendie, attaqué vigou-
reusement, fut arrêté dans ses ranidés progrès.
A onze heures, on était maitre du jeu. Unegrande
partie du bois a été dévorée par les flammes. Le
propriétaire était assuré. Malheureusement, le cor-
donnier n'était point assuré pour ses meubles,dont
une partie a été brûlée, ainsi que le linge de corps
et son petit matériel.
Ce matin la fumée s'échappait encore des démon-
tions; mais tout danger avait disparu. — F.
DÉPARTEMENTS ET COLONIES
Les dépêches de Nice, 2 janvier, soir, nous
annoncent que le prince et la princesse Charles
de Prusse sont arrivés à Nice avec une suite de
25 personnes.
D'autres dépêches de Calais, 3 janvier, disent
que l'ambassade chinoise, venant de Londres,
est débarquée à Calais, et est repartie pour
Paris sans s'arrêter. Le personnel et la :suite
de l'ambassade se composent de'quarante per-
sonnes environ.
M. de Villemessant, qu'on avait dit. grave-
ment malade à Nice, écrit lui-même pour dé-
mentir cette sinistre nouvelle et réduire sa pré-
tendue apoplexie à une simple indisposition.
Berlioz-Arthaud, condamné à mort par la cour
d'assises du Rhône, le 27 novembre dernier, et dont
nous avions annoncé la commutation de peine en
celle des travaux forcés il perpétuité, a été extrait
jeudi dernier de la maison d'arrêt, et conduit de-
vant la cour impériale, pour entendre la lecture des
lettres de grâce. Pendant la lecture faite par le
greffier, la figure de Berlioz exprimait la plus com-
plète indifférence.
Voici un fait unique, sans doute, dans l'histoire
de nos gardes-jurés et raconté par l'Union des Deux-
Villes, journal de Saint-Malo :
« En novembre dernier, M. William Dowding, de
Dinan, chassait dans le canton de Plélan-le-Petit.
Avisant un laboureur qui travaillait dans un champ
il lui demanda si ses terres n'étaient point gardées.
— Non, monsieur; vous pouvez chasser partout-là,
lui fut-il répondu. — Quelques instants après,
M. Dowding, vit arriver à lui un individu avec cos-
tume de garde et sa plaque, lequel lui déclara pro-
cès-verbal. Le chasseur n'eut pas de peine à re-
connaître le même homme qui venait de lui indiquer
ces terrains comme libres, et il lui témoigna son
étonnement; mais qu'importe? Il fallait subir le
procès-verbal, ou transiger. D0 8 fr. offerts d'abord,
et non acceptés, le chasseur se vit obligé d'en don-
ner 15. Cette escroquerie ayant été découverte, vient
d'être qualifiée et jugée par le tribunal de Dinan,
Î qui a condamné le sieur Pierre Samson (c'est le nom
; de ce singulier garde) à un an et un jour de prison,
, 59 fr. d'amende, et à la privation de ses droits ciyi- .
. ques pendant cinq ans. L'inculpé s'était fait uu
- système de ces coupables spéculations. »
Un assassinat a eu lieu, dans la nuit du 1er au
2 janvier, aux Brotteaux.
Victor Micoud, âgé de 27 ans, né à Fitillieu
(Isère), homme de peine à Lyon, avait soupé avec
.son père et. son frère. Tous trois étaient rentrés se
1 ctmeher, sur les minuit.
Vers trois h&ures du matin, Micoud, à demi-
éveillé, aperçut vaguement un individu emportant
un paquet de vêtements. Il se lève et se mit à la
poursuite du malfaiteur qui, sur le point d'être at-
teint, se retourne et lui porta cinq coups de cou-
teau.
Victor Micoud a été relevé sanglant et évanoui.
Deux de ses blessures sont très-graves : l'une a
'failli trancher l'artère carotide, l'autre a perforé
l'intestin.
On nous assure que l'assassin est arrêté.
La soixante-quatrième victime de l'explosion de
la cartoucherie de l'arsenal de Metz est morte à
l'hôpital Bon-Secours. C'était une jeune fille de
seize ans, nommée C. Gaspard.
On lit dans le Mémorial de Lille :
Lundi matin l'alarme était au camp d'Hetfaut. Le
camp brûlait!
Bientôt la nouvelle en fut répandue dans notre
ville, et chacun, à voir le vent violent qu'il faisait
se figurait un véritable océan de flammes envelop-
pant toutes les baraques construites sur le plateau
d'Elfaut.
La nouvelle n'était que trop fondée.
Le feu avait pris au grand pavillon de l'Em-'
pereur, et peu s'en était fallu qu'un des officiers
logés dans cette baraque ne périt dans les flammes.
Heureusement, les secours arrivèrent promptement
de tous les côtés à la fois, et le désastre s'est borné •
à deux baraques et à leurs mobiliers entièrement
consumés.
ÉTRANGER
Un don de la plus magnifique élégance et ri-
chesse vient d'être otTert à SM Sainteté par l'em-
pereur d'Autriche. C'est un missel expressément
exécuté pour le Saint-Père, auquel ont travaillé
dix-neuf artistes pendant dix ans. Il aété exposé
ces jours-ci dans les salles de la bibliothèque
vacicane, et l'op s'est étonne de sa beauté unique.
Le volume est en parchemin, tout entier ma-
nuscrit dans le style calligraphique antérieur à
à l'usage de l'imprimerie. D'un bout à l'autre,
il est enrichi de miniatures du goût le plus ex-
quis. C'est un vrai chef-d'œuvre en son genre,
et l'on pourrait dire qu'il est un anachronisme.
Un de nos amis qui arrive de Devonshire, dit
le journal de Paris, nous raconte un épisode très-
dramatique de la vie englaise :
Il y a trois ou quatre ans, une riche veuve an-
glaise et sa fille unique, admirablement belle, pas-
sèrent la saison d été'à Trauville. Un jeune homme
allié aux meilleures familles de la finance et de l'a-
ristocratie parisienne, s'éprit de la jeuno fille. Il
était sans fortune, mais aimable et empressé. Quel-
ques mois après il épousait la blonde miss et allait
avec elle et sa mère vivre dans leurs terres du
Devonshire.
Tout récemment, sous prélexte de se tenir en
garde contre les fénians, le jeune mari acheta un
revolver et entra dans la chambre de sa femme.
Cinq minutes après, on entendait une violente dé-
tonation; les gens de la maison accouraient et trou-
vaient la jeune femme étendue sans mouvement au
pied di-) son lit. Une balle lui avait brisé le crâne.
Pour les faits, le secrétaire de la rédaction,
ÉMILE HÉMERY.
L'AMOUR D'UN FORÇAT
Nous empruntons le dramatique épisode qu"ql'
va lire à 1 Histoire illustrée des bagnes, depuis leut:
leur création jusqu'à nos jours , écrite par un ro.-
mancier d'un grand talent, M. Pierre Zaccone, et
publiée par l'éditeur Bunel.
C était en 1838. Il y avait alors au bagne de,
Brest, un forçat que l'on appelait Joseph BOf"
delet.
C'était un tout jeune homme. Il n'avait pas
vingt-cinq ans !...
Figure souriante, cheveux hlonds,dents saines,
œil profond et vif.
En moins d une année, il conquit les sympa-
thies de tous, et le commissaire du bagne n'hé..
si ta pas, en raison de sa bonne conduite, à
l'atelier au service de l'hôpital'de la marine.
i! a\as. la des fonctions fort douces, et qui
convenaient particulièrement à son caractère. r
11 était ssrvant de la tabloïdes officiers.
Toujours d'humeur égale, e.mpressé et poli
envers chacun, il s'était si bien distingué des
autres forçats, que l'on avait fini par le traiter
comme on eût traité un malelot honnête et
probe.
Cela dura un an... Au bout de ce temps, et
sans que rien ne pût expliquer un changement
si brusque, Joseph devint tout à coup taciturne
et sombre.
On lui portait un intérêt réel; on le pressa da
questions... mais il éluda toujours d'y répondre.
Une fois cependant, un chirurgien de marine,
plus jeune que les autres — ou plus indiscret,
fit approcher Bordelet de la table, et là, devant
dix convives aussi sérieux que lui :
Messieurs, dit-il d'un ton enjoué, voulez-
• vous que je vous fasse connaître PQurquoi, de-
puis quelque temps, notre servant a perdu sa
gaieté et sa belle humeur?
— Dites ! dites ! firent plusieurs voix en
même temps.
— Eh bien... C'est qu'il est amoureux...
— Lui !
— Je l'affirme.
— Et de qui ?...
— Faut-il vous le confier?...
;—Le nom ? le nom?...
La regard du forçat venait de s'éclairer d'uni
flamme inattendue.
Dans l'expression de ce regard, il y avait da
la fureur et de la haine, mélées à je ne sais
quel sentiment étrange et indéfinissable .. Ce
fut un éclair. Mais si rapide qu'il eùt été, il.
frappa également tous les assistants. On fit si-
lence.
Un silence embarrassé, plein d'étonnement
et peut-être d'épouvante.
Pour la première fois, depuis qu'il était au
bagne, Joseph s'était oublié. L'assassin avait
percé sous l'infirmier!...
Toutefois, cetLe'scène n'avait eu pour témoins
que des jeunes gens auxquels la vie ménageait
chaque jour des distractions nouvelles. Les uns
s'embarquèrent à quelque temps de là, d'autres
quittèrent l'hôpital, la plupart oublièrent, si
bien que l'incident ne laissa de trace durabla
dans l'esprit de personne.
Ce ne fut que longtemps après, et quand sur-
vint la catastrophe dont nous avons à parler,
que !e souvenir put en ê.re évoqué par quel-
ques-uns.
Vers cette même époque, était entrée à , l'hô-
pital de la Marine une de ces saintes femmes
qui, poussées par un dévouement sublime, con-
sacrent leur vie à la dure mission de soigner les
malades et consoler les mourants.
LA
SECONDE JEUNESSE
DU
ROI HENRI
PAR
PONSON DU TERRAIL
TROISIÈME PARTIE
LA TRAHISON DE LAFFIN
XIII
9i
dâl1s son cabinet, avec M. de
bully. u ri8 M. d'Epernon et la reine.
Lu roi était sombre, taciturne, et ne répon-
ûah ^ pas à la question que M. de Sully ©»ait
faite trois lois déjà et qui était cetle-ct :
— Que compte faim Votre Majesté?
Enfin le roi releva la tête et dit :
— Attendons le retour de Galaor.
V oi,r IfS Imm01'OS parus depuis le 27 septembre
iusqa au 18 novembre» |
La reine secoua la tète : •
-Sire, dit-elle, M. Galaor reviendra seul.
— Qui sait? fit le roi.
— Je suis de l'avis de Sa Majesté, la reine, re
prit Sully.
— Ah 1 dit le roi.
Et il attacha un froid regard sur son ministre.
— M. de Biron ne viendra pas, répéta Sully
avec conviction.
— Je suis sûr qu'il, viendra, moi.
Puis, se tournant vers d'Epernon.
— Qu'en pensez-vous \naréehal ?
D 'Epernon baissa la tète e't ne répondit pas.
Alors le roi se leva et se mit à se promener
d'un pas inégal et brusque.
Puis, s'arrêtant tout à coup :
— Rien de tout cela n'est prouvé, dit-il.
— Quelle preuve désire donc Votre Majesté?
demanda Sully d'une voix ironique.
— Oh ! je sais bien, reprit Henri de Bourbon,
que pour qui ne conn ,iît pas Biron comme moi,
il est coupable.
— Sire, dit la reine. Votre Majesté ne' pour-
rait nier les pourparlers de M. de Biron avec le
duc de Savoie.
— Non, dit le roi. Je sais qu'il devait le ser-
vir. Mais 1 a-t-il servi? Vous ne vous souvenez
dor'c pas de Moritmei'ian, Sully ?
— Parfaitement, sire.
— Et, bien ! m'a-t-il trahi à Montmeillam ?
— Non.
— Vous voyez bien.. '
— Sire, reprit gravement Sully, si M. de - Bi-
f'pu était, tenu, à ses intelligences avec le
dise Savoie, je suis de ''avis de Votre Ma-
teasé.
■ — Eh bien ?
— Mais M. de Biron a fait un traité avac
l'Espagne. *
— Voilà précisément, dit le roi, ce dont nous,
n'avons aucune preuve.
— Mais,slre, j'ai mis une copie du traité sous
les yeux de Votre Majesté.
— Ce n'est qu'une copie. Où est la signature
du maréchal?
— Sur l'original, sire.
— Et qui vous dit que cet original existe?
-Oh! sire.
— Biron a des ennemis comme vou-, d'Eper-
non, comme toi,Sully. comme nous tous. Ce pa-
pier, qu'un inconnu remit en s'esquivant, est-ce
une preuve?
— Hélas! dit la reine, Votre Majesté aime si
fort l'homme qui a juré sa perte, qu'elle le veut
innocenter quand même.
— Eh bienl dit le roi, qu'on me montre le
nom de Biron écrit de sa main au bas d'une
lettre adressée au roi d Espagne et je croirai à
sa trahison.
En parlant ainsi, le roi regardait Sully.
Sully ne se déconcerta point.
- Sire, dit-il, ce matin même un homme
m'est venu trouver.
— Quel est cet homme ?
— Attendez, sire. Cel homme a en mains de
quoi faire tomber six fois la tète du maréchal.
— Eh bien ! qu'il m'apporte les preuves?
— Sire, il ne le fera que si Votre Majesté lui
donne des garanties.
— Il veut de l'argent?
— Non, sire.
— Que veut-il alorsf
— Ses lettres d'abolition d'abord.
— Et puis?
— Et puis il veut que Votre Majesté le prenne
sous sa protection.
— Un pareil misérable! fit le roi, avec dé-
dain.
— M. de Biron a des parents, et des amisi
puissants qui tueront cet homme s'il dévoila;
S'es trahisons. 11 veut que Votre Majesté lui i
donne une escurte de trente hommes.
— Et il m'apportera la ureuve que Biron ia,*a :
trahi? * j
— Oui, sire. -
— Sire, dit la reine, songez au trônes de:
France qui est le vôtre et sur lequel le roi d."Es-|
pagne se veut asseoi-r. j
Le roi n'y tint plus.
— Eh * bien! s'écria-t-il, Sully, diter- à cet
homme, quel qu'il soit, que je lui aeeai'de ca
qu'il demande. "
— Il aura ses lettres d'abolition?
— Oui.
— Et les trente hommes d'escorte?
— Oui, fit le roi.
— Alors, dit M. de Sully, je vais aller vous
quérir, sire, la preuve que M. le maréchal de
Biron est un traître et qu'il conspire avec l'Es-
pagne contre le trône de Votre Majesté.
Et Sully sortit triomphant, tandis qua le roi
retombait accablé dans son fauteuil et, couvrait
son front de ses deux mains. -A
PONSON DU TERRAIL.
1 . (La suiU au vrochain^ numérot)
Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 91.21%.
En savoir plus sur l'OCR
En savoir plus sur l'OCR
Le texte affiché peut comporter un certain nombre d'erreurs. En effet, le mode texte de ce document a été généré de façon automatique par un programme de reconnaissance optique de caractères (OCR). Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 91.21%.
-
-
Page
chiffre de pagination vue 3/4
- Recherche dans le document Recherche dans le document https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/search/ark:/12148/bpt6k47179943/f3.image ×
Recherche dans le document
- Partage et envoi par courriel Partage et envoi par courriel https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/share/ark:/12148/bpt6k47179943/f3.image
- Téléchargement / impression Téléchargement / impression https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/download/ark:/12148/bpt6k47179943/f3.image
- Mise en scène Mise en scène ×
Mise en scène
Créer facilement :
- Marque-page Marque-page https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/bookmark/ark:/12148/bpt6k47179943/f3.image ×
Gérer son espace personnel
Ajouter ce document
Ajouter/Voir ses marque-pages
Mes sélections ()Titre - Acheter une reproduction Acheter une reproduction https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/pa-ecommerce/ark:/12148/bpt6k47179943
- Acheter le livre complet Acheter le livre complet https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/indisponible/achat/ark:/12148/bpt6k47179943
- Signalement d'anomalie Signalement d'anomalie https://sindbadbnf.libanswers.com/widget_standalone.php?la_widget_id=7142
- Aide Aide https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/aide/ark:/12148/bpt6k47179943/f3.image × Aide
Facebook
Twitter
Pinterest