Titre : La Petite presse : journal quotidien... / [rédacteur en chef : Balathier Bragelonne]
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1868-02-23
Contributeur : Balathier Bragelonne, Adolphe de (1811-1888). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32837965d
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 23 février 1868 23 février 1868
Description : 1868/02/23 (A3,N675). 1868/02/23 (A3,N675).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k4717677j
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-190
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/11/2017
LA PETITE PRESSE
5 cent. le numéro
. JOURNAL QUOTIDIEN
7 S cent, le numéro
ABONNEMENTS. — Trois Six mois. Cn an.
1
Paris 5 fr. 9 fr. 1 8 fr.
Départements.. a if
Administrateur : E. DELSAUX. g tb
ame année. — DIMANCHE 23 FEVRIER 1868. — 675
*>
.Directeur-Propriétaire : J A N N 1 N.
Rédacteur en chef : A. DE. BALAT HIER BRAG ELONNE.
BUREAUX D'ABONNEMENT : rue Ds*ouot.
ADMINISTRATION : 13, place Breda.
PARIS, 28 FEVRIER 1868.
L'ORDRE ET LA MARCHE DU BŒUF-GRAS
I LE BŒUF
Depuis hier, chers lecteurs, oo crier dan&la>,
vue la description du cortége du
Demain commencera la promenade légen-
daire.
Cette promenade a eu le privilége d'occuper
les savants.
— C'est, disent les uns, un vestige du culte
que les anciens laboureurs vouaient aux
astres.
— C'est, prétendent les autres, un souve-
nir de l'attelage des premiers rois francs.
— C'est le symbole du carnaval, temps où
l'on mange de la chair, affirment les troi-
sièmes.
Ce qu'il y a de certain, c'est que cette fête
«xiste depuis des siècles.
On nommait le bœuf-gras « bœuf villé, »
parce qu'il allait par la ville ; ou « bœuf
viellé » parce qu'il marchait au son des viel- .
les ; ou encore « bœuf violé, » parce que les ;
violes accompagnaient sa marche. i
t " !
La première promenade décrite par les au-
teurs est celle de 1739.
« Le bœuf, dit le bibliophile Jacob, était
couvert d'une housse de tapisserie et portait
une aigrette de feuillage, à l'instay du ,-bczut
gaulois. Sur son dos on avait assis un enfant
nu avec un ruban en écharpe î et cet enfant,
qui tenait dans une main un sceptre doré, et
dans l'autre une épée nue, était appelé le
Boi.des bouchers. Jusqu'alors les bouchers
n'avaient eu que des maîtres, et sans doute
ils voulurent rivaliser avec les merciers, les
barbiers et les arbalétriers, qui avaient des
rois. Le bœuf-gras de 173J avait pour escorte
quinze garçons bouchers vêtus de rouge et
et de blanc, coiffés de turbans de diverses
couleurs ; deux le menaient par les cornes,
à la façon des sacrificateurs païens ou juifs.
Les violons, les fifres et les tambours précé-
daient cette marche triomphale, qui parcou- j
J'ut les quartiers de Paris pour se rendre i
iiux maisons des prévûts:éehevins, présidents j
et conseillers, à qui cet honneur appartenait.
Le bœuf fut partout le bienvenu, et ses gar-
des du corps largement payés. Mais le pre-
mier président du parlement n'étant pas à.
son domicile, on ne le priva pas de la visite
^u bœuf-gras, qui fut amené dans la grande
sklle du palais par l'escalier de la Sainte-
Cmapelle, et qui eut l'avantage d'être présenté
M président en plein tribunal. Le président.
on robe rouge, accueillit bien le pauvre ani-
onal, qui s'étonnait de cette promenade dans
la salle du palais, au milieu des procureurs
et des avocats... »
La Révolution ne respecta pas plus la cé-
rémonie du bœuf gras que les autres cérémo-
nies traditionnelles. Mais Napoléon, qui te-
nait à rattacher l'Empire à la tradition royale;
et qui, dans ce dessein, se préoccupait des
moindres détails, rétablit, par ordonnance, la
promenade des bouchers.
Tout alors se faisait à la grecque et à la
romaine. Le Roi des bouchers devint l'Amour.
Il quitta le sceptre pour le carquois, et l'épée
pour le flambeau. Au métier d'Amour plu-
sieurs malheureux enfants gagnèrent des
fluxions de poitrine; l'un d'eux mourut. La
police alors fit descendre l'Amour de sa mon-
ture et le plaça, un peu plus vêtu, sur le char
où figuraient les autres divinités de l'Qlympe.
La Restauration et le gouvernement de
Juillet suivirent l'exemple de l'Empire; mais
il n'y eut pas de promenades en 1848 et
1849.
En 1850, le cortége reparut, mais l'admi-
nistration municipale lui refusa la subvention
qu'elle avait l'habËWàc de lui accorder,. Les,
bouchers de -Pà*r»-is, mécontents, s'abstinrent.
Un boucher de la banlieue acheta le bœuf
gras, et le nomma César.
L'allusion historique côtoyait la mytho-
logie.
La marche de cette année sera véritable-
ment une marche triomphale...
Cinq cents personnages, onze chars, six
bœufs et un éléphant!... *
Un hussard, portant l'uniforme de 1804,
ouvrira la marche. Je ne sais pourquoi on a
planté à sa suite deux hérauts d'armes, ornés
de trompettes pareilles à celles de la Renom-
mée. Ces héros jureront étrangement dans
l'heureuse composition du premier groupe :
un tambour-major, trente tambours de gre-
nadiers de la vieille garde, quarante musi-
ciens et trente soldats, en uniforme d'infan-
terie du premier Empire.
La France se tiendra sur le premier char
attelé de quatre chevaux blancs.
Un bœuf, qu'on eût dû. nommer Apis, et
qu'onjt nommé Mfignon, entouré de nègres et
de cavaliers égyptiens, représentera l'Afrique.
Des musiciens, des peaux-rouges et des
GauGhos représenteront l'Amérique.
L'éléphant, entouré d'esclaves et de gardés,
symbolisera l'Asie.
Des paysans bretons escorteront le bœuf-
gras. ,
Sur le char de l'Olympe, entouré de cava-
liers romains, des personnages allégoriques,
aux artaes des grandes Tilles de France,
seront mêlés 'Aux dieux et aux déesses.
[ J'abrége la description.
« Il faudra voir le cortége pour le juger,
dit le programme, et c'est pour cela que les
habitant de Paris et des départements voi-
sins de la capitale accourront sur le passage
du boeufi 4rras, ne serait-ce que pour remer-
cier, par 'unanimes acclamations, M. Duval
et les a istes qui lui ont prêté leur con-
cours... »
' Le tambour-major de la vieille garde peut
lever sa canne, et ses tapins peuvent com-
mencer lèur roulement.
Vlà la peau d'âne qui ronfle : ,
C'est Froment du branle-bas !.,»
Le programme ne nomme que quatre
bœufs. Il y en aura six : La Nièvre,.Eaul Fo-
restier, le Lutteur masqué, la Bonne aven-
ture, ô gué ! Mignon et Brubant.
La Nièvi@e' vient des herbages de M. Des-
jardins, un éleveur du Tremblayes. Ce magni-
fique bœuf, à la robe froment, pèse 1361 ki-
logrammes. Son poids est inférieur à celui du
Lutteur masqué (1480 kilogrammes), mais le
jury lui a donné la préférence, à cause de
l'harmonie et la, beauté de ses formes.
L'éleveur de Luttewr masqué est M. Bellart,
in autre herbag-er de la Nièvre.
La Normandie est vaincue cette année.
Un détail curieux sur l'acquisition du
)Œuf-grr s.
Les éleveurs qui espèrent être primés
proposent en général tout leur troupeau à
l'un des grands bouchers de Paris. Cr. dernier
fait prix avec eux. C'est, par exemple, qua- •
rante ou cinquante mille francs. Le by-uf-gras
une fois désigné, l'acheteur va, trouver le
vendeur, et lui dit : — Je vais vous payer
Votre bœuf une grosse somme, huit ou dix
mille francs, par exemple, et notre 'marché
sera résilié pour le reste du troupeau.
L'autre consent, et revend à divers bou-
chers le troupeau vendu une première fois,
ï
D'où viennent les personnages du cor-
tége ?
Quatre cents sur cinq cents sont do braves
soldats de la garnison, enchantés do revêtir
de brillants costumes et de toucher une
haute-paye.
Les déesses sorfent des petits thea:'res, où
elles sont figurantes le soir.
On se rappalle la réponse de ce vieux vaga-
bond, interrogé par le président do la 6e
chambre.—Votre profession?— Enfant de
la loterie, mon président. Or, la lOterie est
abolie depuis 1836. Le Temps est r.u même
titre « un enfant de la Cavalcade. »
La même famille fournit.. chaqr.3 année
l'Amour.
Le dieu Mars vient de l'abattoir.
Rien n'est indifférent dans le compte rendu
d'une fête populaire.
Les cochers et les .chevaux viennent de
chez Brion.
Depuis plusieurs années, l'acquéreur du
Bœuf-Gras était M. Fl('!chelle , le célèbre
boucher.
L'auteur de la Rue, mon ami Jules Vallès,
a écrit la biographie de ce vainqueur :
« De braves gens, ces Fléchelle ! Je m'at-
tendais, quand ma soif de renseignements me
poussa chez eux, à voir un boucher amateur
qui me recevrait, s'il me recevait, dans un
salon éclairé au demi-jour. Point ; il était là,
qui, à côté d'un garçon parant une côtelette,
sciait un quartier de chair rouge, en tablier
long, le couteau au flanc.
» — Culotte — trois-quatre-vingts !
D Mme Fléchelle, dans son confessionnal,
écrivait, recevait, rendait.
» Fléchelle se lève à quatre heures du
ROCAMBOLE
LES
MISÈRES DE LONDRES
PAR
PONSON DU TERRAIL
TROISIÈME PARTIE
NEWGATE. — LE CIMETIÈRE DES SUPPLICIÉS
III
Is0 106
M. Harris, le chef de la maison Harris John-
son et Ce, avait sa maison particulière dans
Flgin crescant, tout auprès de Kinsington-gar-
den.
C est un des quartiers les plus éloignés et les
plus tranquilles du Wpst-End. -4 ;•..
♦ "Voirie pumérodu 22 novembre.
Là, chacun a son habitation donnant sur un
square commun.
Ni magasins, ni boutiques, ni maisons de
commerce d'aucune' s.orto,
'C'est un quartier,ajoitié aristocratique, moitié
bourgeois, où léÉ4i*gens retenus au centre de la
ville tout le jour par les affaires, viennent re-
trouver chaque soir la vie de famille et les joies
calmes du foyer.
M. Harris avait une jeune femme, très-mon-
daine , et qu'il conduisait au bal très-sou-
vent. ^
La nuit précédente encore, il avait assisté à
î une fête splendide, qui ne s'était terminée qu'a-
vec les premiers rayons de l'aube.
Donc, M. Harris dormait à peine depuis une
heure ou deux, lorsque le commis, expédié par
M. Morok, arriva.
M. Morok ne dérangeait pas son patron deux
fois par an.
Il avait la haute main sur les affaires couran-
tes, et, pour qu'il envoyât chercher M. Harris,
il fallait une circonstance tout à fait extraordi-
naire.
Un banquier français, arraché à son premier
sommeil, eût manifesté une vive mauvaise hu-
meur.
M. Harris se leva sal» mot dire, fit sa toilette
avec le plus grand calme, et, ayant donné
l'ordre qu'on introduisit le commis, il se bOrJIa
à lui demander s'il savait pourquoi M. Morok
le dérangeait.
A quoi le commis ripondit qu'un étranger, un
Français s'était présenté dans Ofd-Bailey et de-
mandait instamment-à le voir.- • -
— Il est pourvu d'une lettre de crédit t, de-
manda M. Harris.
— Oui.
— Savez-vous le chiffre 7 .
— Quarante mille livres.
L'explication était suffisante. Un homme qui
peut toucher à la minute quarante mille livres a
toujours le droit de déranger un banquier, même
quand ce desnier a passé la nuit au bal.
M. Harris avait des chevaux, des voitures, et
ses équipages étaient remarqués à Hyde-Park.
Mais il ne donna pas l'ordre d'atteler; *
Avec cette simplicité qui caractérise les An-
glais, il sauta dans le cab de son commis et
s'assit à côté de lui.
Trois quarts d'heure après, il arrivait dans
Old-Bailey.
Le Français était toujours là, dans le bureau
de M, Morok qui avait cm de son devoir de
remettre du coke dans le poêle et de présenter à
son hôte deux journaux français qui arrivaient
à l'adresse de M. Harris.
,4 M. Harris entra et regarda le Francs avec ce
flegme dont les Anglais ne se départent jamais.
Il lui adressa la parole en français :
— Je suis monsieur Harris, dit-il, et tout à
.votre service, monsieur.
- — Monsieur, répondit le Français, je vous de-
mande mille pardons de vous avoir dérangé,
mais je. suis porteur d'une lettre de vos cor-
respondants de Paris. ,
Et il ouvrit une troisirui.ié'fÓis son portefeuille
et en tira une enveloppe qui portait le timbre
sec de la maison Harris et Johnson de Paris,
rue de la Chaussée d'Antin, 67.
— Veuillez passer dans mon cabinet, mon-
sieur, dit M. Harris, qui .ouvrit une porte au
fond du bureau de M. Morok., et s'effaça pour
laisser passer son visiteur.
Quand ils furent seuls, M. Harris ouvrit la
lettre* de'son correspondant et lut :
« Nous vous adressons M. Firmin Bellecombe,
» chirurgien, chargé, par l'Ecole de médecine
» de Paris, de faire des études sur la strangu-
» lation. M. Firmjn. Bellecombe est immergé-
M ment riche, et if émporte de Paris des traites
» de plusieurs maisons. Vous' ferez honneur à
» toutes celles qu'il vous présentera.
1 Nous comptons que vous vous mettrez com- .
» plétement à sa disposition pour tous les ser-
» vices qu'il pourra vous demander.
> 11. Firmin Bellecombe désire. no£amiDaE&,
5 cent. le numéro
. JOURNAL QUOTIDIEN
7 S cent, le numéro
ABONNEMENTS. — Trois Six mois. Cn an.
1
Paris 5 fr. 9 fr. 1 8 fr.
Départements.. a if
Administrateur : E. DELSAUX. g tb
ame année. — DIMANCHE 23 FEVRIER 1868. — 675
*>
.Directeur-Propriétaire : J A N N 1 N.
Rédacteur en chef : A. DE. BALAT HIER BRAG ELONNE.
BUREAUX D'ABONNEMENT : rue Ds*ouot.
ADMINISTRATION : 13, place Breda.
PARIS, 28 FEVRIER 1868.
L'ORDRE ET LA MARCHE DU BŒUF-GRAS
I LE BŒUF
Depuis hier, chers lecteurs, oo crier dan&la>,
vue la description du cortége du
Demain commencera la promenade légen-
daire.
Cette promenade a eu le privilége d'occuper
les savants.
— C'est, disent les uns, un vestige du culte
que les anciens laboureurs vouaient aux
astres.
— C'est, prétendent les autres, un souve-
nir de l'attelage des premiers rois francs.
— C'est le symbole du carnaval, temps où
l'on mange de la chair, affirment les troi-
sièmes.
Ce qu'il y a de certain, c'est que cette fête
«xiste depuis des siècles.
On nommait le bœuf-gras « bœuf villé, »
parce qu'il allait par la ville ; ou « bœuf
viellé » parce qu'il marchait au son des viel- .
les ; ou encore « bœuf violé, » parce que les ;
violes accompagnaient sa marche. i
t " !
La première promenade décrite par les au-
teurs est celle de 1739.
« Le bœuf, dit le bibliophile Jacob, était
couvert d'une housse de tapisserie et portait
une aigrette de feuillage, à l'instay du ,-bczut
gaulois. Sur son dos on avait assis un enfant
nu avec un ruban en écharpe î et cet enfant,
qui tenait dans une main un sceptre doré, et
dans l'autre une épée nue, était appelé le
Boi.des bouchers. Jusqu'alors les bouchers
n'avaient eu que des maîtres, et sans doute
ils voulurent rivaliser avec les merciers, les
barbiers et les arbalétriers, qui avaient des
rois. Le bœuf-gras de 173J avait pour escorte
quinze garçons bouchers vêtus de rouge et
et de blanc, coiffés de turbans de diverses
couleurs ; deux le menaient par les cornes,
à la façon des sacrificateurs païens ou juifs.
Les violons, les fifres et les tambours précé-
daient cette marche triomphale, qui parcou- j
J'ut les quartiers de Paris pour se rendre i
iiux maisons des prévûts:éehevins, présidents j
et conseillers, à qui cet honneur appartenait.
Le bœuf fut partout le bienvenu, et ses gar-
des du corps largement payés. Mais le pre-
mier président du parlement n'étant pas à.
son domicile, on ne le priva pas de la visite
^u bœuf-gras, qui fut amené dans la grande
sklle du palais par l'escalier de la Sainte-
Cmapelle, et qui eut l'avantage d'être présenté
M président en plein tribunal. Le président.
on robe rouge, accueillit bien le pauvre ani-
onal, qui s'étonnait de cette promenade dans
la salle du palais, au milieu des procureurs
et des avocats... »
La Révolution ne respecta pas plus la cé-
rémonie du bœuf gras que les autres cérémo-
nies traditionnelles. Mais Napoléon, qui te-
nait à rattacher l'Empire à la tradition royale;
et qui, dans ce dessein, se préoccupait des
moindres détails, rétablit, par ordonnance, la
promenade des bouchers.
Tout alors se faisait à la grecque et à la
romaine. Le Roi des bouchers devint l'Amour.
Il quitta le sceptre pour le carquois, et l'épée
pour le flambeau. Au métier d'Amour plu-
sieurs malheureux enfants gagnèrent des
fluxions de poitrine; l'un d'eux mourut. La
police alors fit descendre l'Amour de sa mon-
ture et le plaça, un peu plus vêtu, sur le char
où figuraient les autres divinités de l'Qlympe.
La Restauration et le gouvernement de
Juillet suivirent l'exemple de l'Empire; mais
il n'y eut pas de promenades en 1848 et
1849.
En 1850, le cortége reparut, mais l'admi-
nistration municipale lui refusa la subvention
qu'elle avait l'habËWàc de lui accorder,. Les,
bouchers de -Pà*r»-is, mécontents, s'abstinrent.
Un boucher de la banlieue acheta le bœuf
gras, et le nomma César.
L'allusion historique côtoyait la mytho-
logie.
La marche de cette année sera véritable-
ment une marche triomphale...
Cinq cents personnages, onze chars, six
bœufs et un éléphant!... *
Un hussard, portant l'uniforme de 1804,
ouvrira la marche. Je ne sais pourquoi on a
planté à sa suite deux hérauts d'armes, ornés
de trompettes pareilles à celles de la Renom-
mée. Ces héros jureront étrangement dans
l'heureuse composition du premier groupe :
un tambour-major, trente tambours de gre-
nadiers de la vieille garde, quarante musi-
ciens et trente soldats, en uniforme d'infan-
terie du premier Empire.
La France se tiendra sur le premier char
attelé de quatre chevaux blancs.
Un bœuf, qu'on eût dû. nommer Apis, et
qu'onjt nommé Mfignon, entouré de nègres et
de cavaliers égyptiens, représentera l'Afrique.
Des musiciens, des peaux-rouges et des
GauGhos représenteront l'Amérique.
L'éléphant, entouré d'esclaves et de gardés,
symbolisera l'Asie.
Des paysans bretons escorteront le bœuf-
gras. ,
Sur le char de l'Olympe, entouré de cava-
liers romains, des personnages allégoriques,
aux artaes des grandes Tilles de France,
seront mêlés 'Aux dieux et aux déesses.
[ J'abrége la description.
« Il faudra voir le cortége pour le juger,
dit le programme, et c'est pour cela que les
habitant de Paris et des départements voi-
sins de la capitale accourront sur le passage
du boeufi 4rras, ne serait-ce que pour remer-
cier, par 'unanimes acclamations, M. Duval
et les a istes qui lui ont prêté leur con-
cours... »
' Le tambour-major de la vieille garde peut
lever sa canne, et ses tapins peuvent com-
mencer lèur roulement.
Vlà la peau d'âne qui ronfle : ,
C'est Froment du branle-bas !.,»
Le programme ne nomme que quatre
bœufs. Il y en aura six : La Nièvre,.Eaul Fo-
restier, le Lutteur masqué, la Bonne aven-
ture, ô gué ! Mignon et Brubant.
La Nièvi@e' vient des herbages de M. Des-
jardins, un éleveur du Tremblayes. Ce magni-
fique bœuf, à la robe froment, pèse 1361 ki-
logrammes. Son poids est inférieur à celui du
Lutteur masqué (1480 kilogrammes), mais le
jury lui a donné la préférence, à cause de
l'harmonie et la, beauté de ses formes.
L'éleveur de Luttewr masqué est M. Bellart,
in autre herbag-er de la Nièvre.
La Normandie est vaincue cette année.
Un détail curieux sur l'acquisition du
)Œuf-grr s.
Les éleveurs qui espèrent être primés
proposent en général tout leur troupeau à
l'un des grands bouchers de Paris. Cr. dernier
fait prix avec eux. C'est, par exemple, qua- •
rante ou cinquante mille francs. Le by-uf-gras
une fois désigné, l'acheteur va, trouver le
vendeur, et lui dit : — Je vais vous payer
Votre bœuf une grosse somme, huit ou dix
mille francs, par exemple, et notre 'marché
sera résilié pour le reste du troupeau.
L'autre consent, et revend à divers bou-
chers le troupeau vendu une première fois,
ï
D'où viennent les personnages du cor-
tége ?
Quatre cents sur cinq cents sont do braves
soldats de la garnison, enchantés do revêtir
de brillants costumes et de toucher une
haute-paye.
Les déesses sorfent des petits thea:'res, où
elles sont figurantes le soir.
On se rappalle la réponse de ce vieux vaga-
bond, interrogé par le président do la 6e
chambre.—Votre profession?— Enfant de
la loterie, mon président. Or, la lOterie est
abolie depuis 1836. Le Temps est r.u même
titre « un enfant de la Cavalcade. »
La même famille fournit.. chaqr.3 année
l'Amour.
Le dieu Mars vient de l'abattoir.
Rien n'est indifférent dans le compte rendu
d'une fête populaire.
Les cochers et les .chevaux viennent de
chez Brion.
Depuis plusieurs années, l'acquéreur du
Bœuf-Gras était M. Fl('!chelle , le célèbre
boucher.
L'auteur de la Rue, mon ami Jules Vallès,
a écrit la biographie de ce vainqueur :
« De braves gens, ces Fléchelle ! Je m'at-
tendais, quand ma soif de renseignements me
poussa chez eux, à voir un boucher amateur
qui me recevrait, s'il me recevait, dans un
salon éclairé au demi-jour. Point ; il était là,
qui, à côté d'un garçon parant une côtelette,
sciait un quartier de chair rouge, en tablier
long, le couteau au flanc.
» — Culotte — trois-quatre-vingts !
D Mme Fléchelle, dans son confessionnal,
écrivait, recevait, rendait.
» Fléchelle se lève à quatre heures du
ROCAMBOLE
LES
MISÈRES DE LONDRES
PAR
PONSON DU TERRAIL
TROISIÈME PARTIE
NEWGATE. — LE CIMETIÈRE DES SUPPLICIÉS
III
Is0 106
M. Harris, le chef de la maison Harris John-
son et Ce, avait sa maison particulière dans
Flgin crescant, tout auprès de Kinsington-gar-
den.
C est un des quartiers les plus éloignés et les
plus tranquilles du Wpst-End. -4 ;•..
♦ "Voirie pumérodu 22 novembre.
Là, chacun a son habitation donnant sur un
square commun.
Ni magasins, ni boutiques, ni maisons de
commerce d'aucune' s.orto,
'C'est un quartier,ajoitié aristocratique, moitié
bourgeois, où léÉ4i*gens retenus au centre de la
ville tout le jour par les affaires, viennent re-
trouver chaque soir la vie de famille et les joies
calmes du foyer.
M. Harris avait une jeune femme, très-mon-
daine , et qu'il conduisait au bal très-sou-
vent. ^
La nuit précédente encore, il avait assisté à
î une fête splendide, qui ne s'était terminée qu'a-
vec les premiers rayons de l'aube.
Donc, M. Harris dormait à peine depuis une
heure ou deux, lorsque le commis, expédié par
M. Morok, arriva.
M. Morok ne dérangeait pas son patron deux
fois par an.
Il avait la haute main sur les affaires couran-
tes, et, pour qu'il envoyât chercher M. Harris,
il fallait une circonstance tout à fait extraordi-
naire.
Un banquier français, arraché à son premier
sommeil, eût manifesté une vive mauvaise hu-
meur.
M. Harris se leva sal» mot dire, fit sa toilette
avec le plus grand calme, et, ayant donné
l'ordre qu'on introduisit le commis, il se bOrJIa
à lui demander s'il savait pourquoi M. Morok
le dérangeait.
A quoi le commis ripondit qu'un étranger, un
Français s'était présenté dans Ofd-Bailey et de-
mandait instamment-à le voir.- • -
— Il est pourvu d'une lettre de crédit t, de-
manda M. Harris.
— Oui.
— Savez-vous le chiffre 7 .
— Quarante mille livres.
L'explication était suffisante. Un homme qui
peut toucher à la minute quarante mille livres a
toujours le droit de déranger un banquier, même
quand ce desnier a passé la nuit au bal.
M. Harris avait des chevaux, des voitures, et
ses équipages étaient remarqués à Hyde-Park.
Mais il ne donna pas l'ordre d'atteler; *
Avec cette simplicité qui caractérise les An-
glais, il sauta dans le cab de son commis et
s'assit à côté de lui.
Trois quarts d'heure après, il arrivait dans
Old-Bailey.
Le Français était toujours là, dans le bureau
de M, Morok qui avait cm de son devoir de
remettre du coke dans le poêle et de présenter à
son hôte deux journaux français qui arrivaient
à l'adresse de M. Harris.
,4 M. Harris entra et regarda le Francs avec ce
flegme dont les Anglais ne se départent jamais.
Il lui adressa la parole en français :
— Je suis monsieur Harris, dit-il, et tout à
.votre service, monsieur.
- — Monsieur, répondit le Français, je vous de-
mande mille pardons de vous avoir dérangé,
mais je. suis porteur d'une lettre de vos cor-
respondants de Paris. ,
Et il ouvrit une troisirui.ié'fÓis son portefeuille
et en tira une enveloppe qui portait le timbre
sec de la maison Harris et Johnson de Paris,
rue de la Chaussée d'Antin, 67.
— Veuillez passer dans mon cabinet, mon-
sieur, dit M. Harris, qui .ouvrit une porte au
fond du bureau de M. Morok., et s'effaça pour
laisser passer son visiteur.
Quand ils furent seuls, M. Harris ouvrit la
lettre* de'son correspondant et lut :
« Nous vous adressons M. Firmin Bellecombe,
» chirurgien, chargé, par l'Ecole de médecine
» de Paris, de faire des études sur la strangu-
» lation. M. Firmjn. Bellecombe est immergé-
M ment riche, et if émporte de Paris des traites
» de plusieurs maisons. Vous' ferez honneur à
» toutes celles qu'il vous présentera.
1 Nous comptons que vous vous mettrez com- .
» plétement à sa disposition pour tous les ser-
» vices qu'il pourra vous demander.
> 11. Firmin Bellecombe désire. no£amiDaE&,
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