Titre : La Petite presse : journal quotidien... / [rédacteur en chef : Balathier Bragelonne]
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1868-02-14
Contributeur : Balathier Bragelonne, Adolphe de (1811-1888). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32837965d
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 14 février 1868 14 février 1868
Description : 1868/02/14 (A3,N666). 1868/02/14 (A3,N666).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k4717668k
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-190
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/11/2017
LA PETITE PRESSE
Sk cent, le numéro
JOURNAL QUOTIDIEN
1 . 1 0 5 cent. le numéro
ABONNEMENTS. — Trois mois. six mois. Ua in.
Paris 5 fr. 9 fr. 1S fr.
Départements.. a il %
Administrateur : E. DELSAUX. :e tb
1
s®» année. — VENDREDI 1 i FEVRIER 1868..—W» 666
J
Directeur-Propriétaii-e : JAN N I N.
Rédacteur en chef: A. DE BALATHIEU BRAGELONNE.
. BUREAUX D'ABONNEMENT : 9, rue Bl'OUOl.
ADMINISTRATION : 13, place Breda.
PARIS, 13 FEVRIER 1868.
LA PETITE PRESSE
Depuis quelques jours, ch^^* lecB'iiisVja/
presse littéraire est attaquée avec
,dont, jusqu'ici, peu de polémiques ont oWert
l'exemple. /
Cela devait être : elle a beaucoup d .e succès
et elle fait beaucoup de bien.
Quand on est calomnié, deux pa' .-tis se pré-
sentent d'abord : mépriser la calor nnie, ou ID,
prendre corps à corps et la combattre jusqu'à
ce qu'on en ait eu raison. •
Mais, entre ces deux partis, il en est un
:roisième, qui consiste à dire 'simplement la
yéri té. :
C'est ce dernier que nous : idoptons
Il y a quelques années, f trois sortes de jour-
naux existaient :
Les grands journaux, ; qui donnaient et dis-
cutaient les nouvelles / politiques; les petits
journaux, qui deman' daient leur succès à des
révélations sur l'a vi.e privée des individus;
les journaux spéciau x, qui publiaient, soit des
romans et seulemei it des romans, soit Fhis-
toire illustrée de la semaine.
Les grands «t les petits journaux se ven-
daient clier; ils étaient par conséquent hors
. de la portée de la masse des lecteurs. Le peu-
ple, affamé de lecture, n'avait à sa disposition
que les recueils hebdomadaires de romans.
Une quatrième presse, est née, due à l'ini-
-.Îatiw, d'un .esprit ingénieux et hardi, et
son &on marche l'a -mise tout de suite à la por-
tée des bourses les plus humbles,
1
1
L-e travailleur, auquel s'adressait le journal
A-nn son, est fatigué de sa journée lorsqu'il
se met à lire. Il est las de la vie réelle, si
dure parfois. Il aimera les aventures extraor-
dinaires et merveilleuses qui ne ressemble-
ront en rien à ce qu'il voit et à ce qu'il fait
tous les jours ; car, en les lisant, il sera dis-
trait et amusé. — Il fallait donc lui donner
les romans.
Mais on ne vit pas toujours dans la lune.
Deux amis s'abordent: — Quoi de nou-
veau Pour répondre à cette curiosité toute !
naturelle du lecteur, la nouvelle presse donne-
V'àt des faits divers.. • !
\ Double élément d'intérêt et de réussite. !
| Ce n'était pas assez.
- ; Il fallait non-seulement distraire, amuser,
Satisfaire la curiosité, mais encore instruire.
Là était la justification de l'entreprise. Là
serait son mérite et sa raison d'être.
La politique est une science souvent abs-
traite. Même vulgari=ce, elle n'est guère à la
portée que des lecteurs qui ont reçu des don-
nées premières. Pour comprendre un premier-
Paris, il faut savoir un peu d'histoire, un peu
de géographie, un peu de législation.
Eh ! bien, ce sont ces données premières
que le petit journal à un sou répandrait chez
tous, faisant l'office d'un maître d'école sans
pédantisme, ou plutôt remplissant le rôle
d'un ami éclairé.
A l'apprenti, il dirait comment on devient
un bon ouvrier, à l'enfant comment on devient
un homme, à l'homme comment on devient
un citoyen. Le citoyen lirait plus tard les
grands journaux. '
Il énumérerait à l'ouvrière les devoirs de la !
ménagère et de la mère .de famille. Il lui ap-
prendrait à bien élever ses' enfants, et même
à faire un bon pot au-feu. Mais, en se gardant
de lui parler la langue de l'Hôtel de Ram-
bouillet, il ne se croirait pas.obligé pour cela ;
de se servir d'un français de cuisine. I
Il mettrait tour à tour en scène le cocher ;
dans la rue, le casseur de pierres sur le grand
chemin, la porteuse de pain levée avant il
soleil, et la couturière don? la lampe brille
dans la nuit. Tontes les professions humbles 1
et obscures, mais grandes par cela qu'elles
sont utiles, auraient chez lui leurs chroni-
queurs et leurs poëtes.
Avec les grands jours de l'année, il ensei-
gnerait l'histoire ; à propos des voyages des
contemporains , il enseignerait la géogra-
phie.
Il encadrerait, dans des scènes populaires,
l'amour, l'amitié, le dévouement, les senti-
ments qui anoblissent et relèvent l'homme.
Il se ferait le propagateur infatigable de
toutes les institutions de bienfaisance, de j
mutualité et de crédit, sachant bien, avec
Lacordaire, que l'association est la formule
des sociétés modernes.
Enfin, à défaut de l'intérêt, qui naît des
luttes au jour le jour de la politique, il aurait ;
■cet intérêt plus permanent et plus vraiment j
démocratique, qui résulte de l'exposé des I
idée- générales, hase de toute instruction. j
Cet idéal que j'indique, le journal à un sou
l'à-t-il ait-eint?...
Oui, dans une large mesure. Mais n'elit-il
fait que se le proposer et le poursuivre,"ce
que nul n'oserait 1ui contester, il aurait eu-
core rempli une mission plus utile el, fait plus
de bien que ceux qui l'attaquent aujour-
d'hui. grands diseurs de rien, grands dispu
teurs dans le vide, libérateurs du monde et
annonciers.
Ah ^messieurs, vous voudriez tuer le jour-
nal à an sou, sans souci des deux millions de
lecteu15 qu'il a créés.
Mais ce journal à un sou,, que vous affectez
de metSTiser, ce n'est pas seulement le jour-
nal, c'fst l'ami du peuple.
Enttez dans les plus -hnmMes logis. Sur le
coin cfe'la cheminée ou sur la tablette de la
com--- de, vous verrez une pile de papiers
noircis. .- Bons à brûler ! direz-vous sans
doute. Mais, ceux q û sont là ne I pensent pas
comme vous. Car ces petits journaux, qui
s'accumulent, représentent pour eux toute une
sommé de joies honnêtes. Ils ont remplacé
les sots livres que propageaient les colpor-
teurs avant leur apparition. Grâce à eux,
l'esprit de l'enfant s'est peuplé de COlUlaÍssan-
ces nouvelles ; le père, un ouvrier, peut dire :
— J'ai mon journal, comme un bourgeois !
La feg^are remercie tout bas cet hôte qui re-
tient'chaque ,soir son mari à la maison, en
pensant qu'autrefois il allait au cabaret.
| Ces journaux, mais quiconque aime les
' classes pauvres et laborieuses devrait les
| bénir !..
I
Voyez du reste tous les grands esprits : Vic-
tor Hugo, Lamartine, Michelet, Sainte-Beuve
lui-même qui est un diletlanti et un pur
lettré.
'
Ce n'est pas eux qui attaquent la presse.
populaire !
Loin de là, ils en ont compris la bienfai-
sante influence, et ils se sont empressés de la
proclamer bien haut.
Mais il est un suffrage digne du leur, et qui
m'a plus touché peut-être.
Ik m'est arrivé Ü'a-:oisicr à des fêies, E des
réunions.
■ Là se trouvaient cent, cent cinquante, quel-
quefois deux cents personnes, qui, pour venir,
avaient quitté la boutique ou l'atelier. Tous
ces brave? cens me parlaient — de quoi?..,
du petit journal de leur ami de tous hs jou"*,
auquel ils reprochaient ceci, duquel iJs
louaient cch, mais-qui les intéressait, qui les
pasxiouujut, qui faisait partie de hur vie.
— La Petite Presse est le second plat de
mon souper, me disait l1l1 vieil ouvrier, et
souvent je le mange avant l'autre.
Et puis, a côté de ces témoignages puL'/c-.
il y a les lettres.
Quiconque intente s'adresse à nous :
a Propagez mon invention! » Nous l'exami-
nons d'abord (nous ne faisons pas d'annoNi':'
et nous la propageons si elle est utile.Qni'vn-
que cherche, soun'rc, attend, trouve en nous
un conseiller, un confident, et, quand cch:
se peut, un appui..
A vous de faire sonner vos méritas. Mes-
sieurs des grands journaux, mais à ne-us de
dire nos titres. Vous appelez notre œuvit
grossière, ce qui n'est poli ni pour nos lec-
teurs ni pour nous. Il n'est pas néce.::::.:!'O
d'être docteur ès-Havas-Bullier, ou ès-choo-
lat-Perron pour savoir le français, et, quant
à la délicatesse des sentiments, elle se trouve
partout, dans les plus pauvres familles comme
dans les plus aisées, et dans les colonnes de
la presse populaire aussi bien que dans les
premiers-Paris des grands journaux.
TONY RÉVILLON.
QUELQUES CHIFFRES
On a beaucoup parle, depuis quelques jours,
des bénéfices énormes, prodigieux, des jO\l ,-
naux quotidiens à un sou. On nous permettra
bien, à nous qui devons apparemment con-
naître la matière, de réduire ces hyperbcies
à leur juste valeur.
Sans nous appesantir sur les pertes, sèches
I 'des entreprises avortées don.t la nomenclature
formerait un assez riche nécrologe, ni sur les
sacrifices imposés aux entreprises existantes
| avant d'arriyer à joindre les deux bouts,
sacrifices qui représentent plusieurs centaines
; de mille francs, voici quelle est, en résumé,
ROCAMBOLE
LES
MISÈRES DE LONDRES
PAR
PONSON DU TERRAIL
DEUXIÈME PARTIE
UN MOULIN SANS EAU
XXXI
[texte illisible]
Le pont de Waterloo traversé, l'homme gris
t SilOking se trouvèrent dans cette partie de
.ondres située sur la rive droite qu'on appelle
i Sonthwark.
De là à Saint-George, le trajet était court.
" Néanmoins l'homme gris évita les rues larges
)t les voies fréquentées, et se dirigea vers la
Vejr le numérodu 22 novembre."
cathédrale catholique par ces petites ruelles
dans lesquelles, la nuit précédente, il avait suivi
la mère du pauvre garçon mort d'amour.
Le brouillard s'épaississait selon l'ordinaire.
C'est entre neuf heures du soir et deux heu-
res du matin qu'il atteint, sur les deux rives de
la Tamise, sa plus extrême densité.
L'église en était enveloppée, et à peine son
clocher parvenait-il il déchirer cette enveloppe
de brumes.
Cependant une lumière tremblottait dans le
clocher et ressemblait à la lueur d'un cigare,
tant elle était faible et sans rayons.
— Le sacristain nous attend, dit l'homme
gris.
Et il contourna le mur du cimetière pour ar-
river jusqu'à la grille.
La grille était tout contre, pour nous servir
d'une expression familière que tout le monde
comprend.
Shokiug la poussa et elle tourna sans bruit
sur ses gonds.
Quand ils furent dans le cimetière, l'homme
gris dit à Shoking :
— Donne-moi la main ; tu pourrais te heur-
ter à quelque tombe. Moi, je connais le che-
min.
— Brrr ! fit Shoking, si on m'avait dit, il y a
huit jours, que ie me promènerais la nuit dans
un cimetière, je n'aurais pas voulu le croire. Je
n'ai pas peur des morts, précisément, mais je
préférerais le gazon de Hyde-Park.
— Gentleman ! fit l'homme gris d'un ton mo-
queur. >
— C'est que, voyez-vous, continua Shoking,
on a beau dire, mais les, morts ne peuvent pas
être contents.
L'homme gris ne répondit pas.
Mais il continua son chemin, traînant tou-
jours à sa suite, Shoking qui avait le frisson et
sentait ses cheveux se hérisser.
Ils arrivèrent ainsi à la petite porte- percée
derrière le chœur.
L'homme gris n'eut qu'à frapper trois coups,
et elle s'ouvrit presque aussitôt.
Le vieux sacristain, apparut.son surplis blanc
sur les épaules et sa lampe. à la main.
— Tout va bien? lui demanda l'homme
gris.
— Oui, Votre Honneur. La mère et l'enfant
sont toujours là-haut. '
— Et ils m'attendent?
'- Sans doute. L'abbé Samuel est venu ce'
soir.
— Ah!
— Il les a vus et il m'a dit que je pouvais
vous obéir aveu--Iément,
— Il a eu raison, dit l'homme gris en péné-
trant dans l'église.
-" Aussi vous obéirai-je, ajouta le sacristain.
— Quoique je fasse ou dise ?
— Sans doute, puisque l'abbé Samuel le veut.
Nous brûlerions Fe-rlise, b'il nous le comman-
dait.
L'homme gris se tourna vers Shoking.
— Attends-moi ici, sur ce b;:nc, lui 'llit-i1.
— Où donc allez-vous ?
— Dans le clocher.
Et il se dirigea vers la porte de l'escalier er:
colimaçon qui conduisait au logis du sacristain.
Ce dernier suivait l'homme gris. qui lui dit en-
core :
— L'Irlandaise est-elle couchée?
— Elle, non, mais son fils dort.
— Je n'ai affaire qu'à elle*.
Et il monta sans bruit, probablement pour ro
pas troubler le repos de l'enfant.
Que se passa-t-il entre l'Irlandaise et lui?
Shoking ne le sut pas.
Mais il attendit près d'une heure, tremblant
de tous ses membres et n'osant parler au sacri -
tain, tant le bruit de sa voix que répercutaient
les échos de l'église l'effrayait.
— Je n'ai pas peur des vivants, pensait-il,
non bien sûr. Shoking est brave autant qu'il est
Sk cent, le numéro
JOURNAL QUOTIDIEN
1 . 1 0 5 cent. le numéro
ABONNEMENTS. — Trois mois. six mois. Ua in.
Paris 5 fr. 9 fr. 1S fr.
Départements.. a il %
Administrateur : E. DELSAUX. :e tb
1
s®» année. — VENDREDI 1 i FEVRIER 1868..—W» 666
J
Directeur-Propriétaii-e : JAN N I N.
Rédacteur en chef: A. DE BALATHIEU BRAGELONNE.
. BUREAUX D'ABONNEMENT : 9, rue Bl'OUOl.
ADMINISTRATION : 13, place Breda.
PARIS, 13 FEVRIER 1868.
LA PETITE PRESSE
Depuis quelques jours, ch^^* lecB'iiisVja/
presse littéraire est attaquée avec
,dont, jusqu'ici, peu de polémiques ont oWert
l'exemple. /
Cela devait être : elle a beaucoup d .e succès
et elle fait beaucoup de bien.
Quand on est calomnié, deux pa' .-tis se pré-
sentent d'abord : mépriser la calor nnie, ou ID,
prendre corps à corps et la combattre jusqu'à
ce qu'on en ait eu raison. •
Mais, entre ces deux partis, il en est un
:roisième, qui consiste à dire 'simplement la
yéri té. :
C'est ce dernier que nous : idoptons
Il y a quelques années, f trois sortes de jour-
naux existaient :
Les grands journaux, ; qui donnaient et dis-
cutaient les nouvelles / politiques; les petits
journaux, qui deman' daient leur succès à des
révélations sur l'a vi.e privée des individus;
les journaux spéciau x, qui publiaient, soit des
romans et seulemei it des romans, soit Fhis-
toire illustrée de la semaine.
Les grands «t les petits journaux se ven-
daient clier; ils étaient par conséquent hors
. de la portée de la masse des lecteurs. Le peu-
ple, affamé de lecture, n'avait à sa disposition
que les recueils hebdomadaires de romans.
Une quatrième presse, est née, due à l'ini-
-.Îatiw, d'un .esprit ingénieux et hardi, et
son &on marche l'a -mise tout de suite à la por-
tée des bourses les plus humbles,
1
1
L-e travailleur, auquel s'adressait le journal
A-nn son, est fatigué de sa journée lorsqu'il
se met à lire. Il est las de la vie réelle, si
dure parfois. Il aimera les aventures extraor-
dinaires et merveilleuses qui ne ressemble-
ront en rien à ce qu'il voit et à ce qu'il fait
tous les jours ; car, en les lisant, il sera dis-
trait et amusé. — Il fallait donc lui donner
les romans.
Mais on ne vit pas toujours dans la lune.
Deux amis s'abordent: — Quoi de nou-
veau Pour répondre à cette curiosité toute !
naturelle du lecteur, la nouvelle presse donne-
V'àt des faits divers.. • !
\ Double élément d'intérêt et de réussite. !
| Ce n'était pas assez.
- ; Il fallait non-seulement distraire, amuser,
Satisfaire la curiosité, mais encore instruire.
Là était la justification de l'entreprise. Là
serait son mérite et sa raison d'être.
La politique est une science souvent abs-
traite. Même vulgari=ce, elle n'est guère à la
portée que des lecteurs qui ont reçu des don-
nées premières. Pour comprendre un premier-
Paris, il faut savoir un peu d'histoire, un peu
de géographie, un peu de législation.
Eh ! bien, ce sont ces données premières
que le petit journal à un sou répandrait chez
tous, faisant l'office d'un maître d'école sans
pédantisme, ou plutôt remplissant le rôle
d'un ami éclairé.
A l'apprenti, il dirait comment on devient
un bon ouvrier, à l'enfant comment on devient
un homme, à l'homme comment on devient
un citoyen. Le citoyen lirait plus tard les
grands journaux. '
Il énumérerait à l'ouvrière les devoirs de la !
ménagère et de la mère .de famille. Il lui ap-
prendrait à bien élever ses' enfants, et même
à faire un bon pot au-feu. Mais, en se gardant
de lui parler la langue de l'Hôtel de Ram-
bouillet, il ne se croirait pas.obligé pour cela ;
de se servir d'un français de cuisine. I
Il mettrait tour à tour en scène le cocher ;
dans la rue, le casseur de pierres sur le grand
chemin, la porteuse de pain levée avant il
soleil, et la couturière don? la lampe brille
dans la nuit. Tontes les professions humbles 1
et obscures, mais grandes par cela qu'elles
sont utiles, auraient chez lui leurs chroni-
queurs et leurs poëtes.
Avec les grands jours de l'année, il ensei-
gnerait l'histoire ; à propos des voyages des
contemporains , il enseignerait la géogra-
phie.
Il encadrerait, dans des scènes populaires,
l'amour, l'amitié, le dévouement, les senti-
ments qui anoblissent et relèvent l'homme.
Il se ferait le propagateur infatigable de
toutes les institutions de bienfaisance, de j
mutualité et de crédit, sachant bien, avec
Lacordaire, que l'association est la formule
des sociétés modernes.
Enfin, à défaut de l'intérêt, qui naît des
luttes au jour le jour de la politique, il aurait ;
■cet intérêt plus permanent et plus vraiment j
démocratique, qui résulte de l'exposé des I
idée- générales, hase de toute instruction. j
Cet idéal que j'indique, le journal à un sou
l'à-t-il ait-eint?...
Oui, dans une large mesure. Mais n'elit-il
fait que se le proposer et le poursuivre,"ce
que nul n'oserait 1ui contester, il aurait eu-
core rempli une mission plus utile el, fait plus
de bien que ceux qui l'attaquent aujour-
d'hui. grands diseurs de rien, grands dispu
teurs dans le vide, libérateurs du monde et
annonciers.
Ah ^messieurs, vous voudriez tuer le jour-
nal à an sou, sans souci des deux millions de
lecteu15 qu'il a créés.
Mais ce journal à un sou,, que vous affectez
de metSTiser, ce n'est pas seulement le jour-
nal, c'fst l'ami du peuple.
Enttez dans les plus -hnmMes logis. Sur le
coin cfe'la cheminée ou sur la tablette de la
com--- de, vous verrez une pile de papiers
noircis. .- Bons à brûler ! direz-vous sans
doute. Mais, ceux q û sont là ne I pensent pas
comme vous. Car ces petits journaux, qui
s'accumulent, représentent pour eux toute une
sommé de joies honnêtes. Ils ont remplacé
les sots livres que propageaient les colpor-
teurs avant leur apparition. Grâce à eux,
l'esprit de l'enfant s'est peuplé de COlUlaÍssan-
ces nouvelles ; le père, un ouvrier, peut dire :
— J'ai mon journal, comme un bourgeois !
La feg^are remercie tout bas cet hôte qui re-
tient'chaque ,soir son mari à la maison, en
pensant qu'autrefois il allait au cabaret.
| Ces journaux, mais quiconque aime les
' classes pauvres et laborieuses devrait les
| bénir !..
I
Voyez du reste tous les grands esprits : Vic-
tor Hugo, Lamartine, Michelet, Sainte-Beuve
lui-même qui est un diletlanti et un pur
lettré.
'
Ce n'est pas eux qui attaquent la presse.
populaire !
Loin de là, ils en ont compris la bienfai-
sante influence, et ils se sont empressés de la
proclamer bien haut.
Mais il est un suffrage digne du leur, et qui
m'a plus touché peut-être.
Ik m'est arrivé Ü'a-:oisicr à des fêies, E des
réunions.
■ Là se trouvaient cent, cent cinquante, quel-
quefois deux cents personnes, qui, pour venir,
avaient quitté la boutique ou l'atelier. Tous
ces brave? cens me parlaient — de quoi?..,
du petit journal de leur ami de tous hs jou"*,
auquel ils reprochaient ceci, duquel iJs
louaient cch, mais-qui les intéressait, qui les
pasxiouujut, qui faisait partie de hur vie.
— La Petite Presse est le second plat de
mon souper, me disait l1l1 vieil ouvrier, et
souvent je le mange avant l'autre.
Et puis, a côté de ces témoignages puL'/c-.
il y a les lettres.
Quiconque intente s'adresse à nous :
a Propagez mon invention! » Nous l'exami-
nons d'abord (nous ne faisons pas d'annoNi':'
et nous la propageons si elle est utile.Qni'vn-
que cherche, soun'rc, attend, trouve en nous
un conseiller, un confident, et, quand cch:
se peut, un appui..
A vous de faire sonner vos méritas. Mes-
sieurs des grands journaux, mais à ne-us de
dire nos titres. Vous appelez notre œuvit
grossière, ce qui n'est poli ni pour nos lec-
teurs ni pour nous. Il n'est pas néce.::::.:!'O
d'être docteur ès-Havas-Bullier, ou ès-choo-
lat-Perron pour savoir le français, et, quant
à la délicatesse des sentiments, elle se trouve
partout, dans les plus pauvres familles comme
dans les plus aisées, et dans les colonnes de
la presse populaire aussi bien que dans les
premiers-Paris des grands journaux.
TONY RÉVILLON.
QUELQUES CHIFFRES
On a beaucoup parle, depuis quelques jours,
des bénéfices énormes, prodigieux, des jO\l ,-
naux quotidiens à un sou. On nous permettra
bien, à nous qui devons apparemment con-
naître la matière, de réduire ces hyperbcies
à leur juste valeur.
Sans nous appesantir sur les pertes, sèches
I 'des entreprises avortées don.t la nomenclature
formerait un assez riche nécrologe, ni sur les
sacrifices imposés aux entreprises existantes
| avant d'arriyer à joindre les deux bouts,
sacrifices qui représentent plusieurs centaines
; de mille francs, voici quelle est, en résumé,
ROCAMBOLE
LES
MISÈRES DE LONDRES
PAR
PONSON DU TERRAIL
DEUXIÈME PARTIE
UN MOULIN SANS EAU
XXXI
[texte illisible]
Le pont de Waterloo traversé, l'homme gris
t SilOking se trouvèrent dans cette partie de
.ondres située sur la rive droite qu'on appelle
i Sonthwark.
De là à Saint-George, le trajet était court.
" Néanmoins l'homme gris évita les rues larges
)t les voies fréquentées, et se dirigea vers la
Vejr le numérodu 22 novembre."
cathédrale catholique par ces petites ruelles
dans lesquelles, la nuit précédente, il avait suivi
la mère du pauvre garçon mort d'amour.
Le brouillard s'épaississait selon l'ordinaire.
C'est entre neuf heures du soir et deux heu-
res du matin qu'il atteint, sur les deux rives de
la Tamise, sa plus extrême densité.
L'église en était enveloppée, et à peine son
clocher parvenait-il il déchirer cette enveloppe
de brumes.
Cependant une lumière tremblottait dans le
clocher et ressemblait à la lueur d'un cigare,
tant elle était faible et sans rayons.
— Le sacristain nous attend, dit l'homme
gris.
Et il contourna le mur du cimetière pour ar-
river jusqu'à la grille.
La grille était tout contre, pour nous servir
d'une expression familière que tout le monde
comprend.
Shokiug la poussa et elle tourna sans bruit
sur ses gonds.
Quand ils furent dans le cimetière, l'homme
gris dit à Shoking :
— Donne-moi la main ; tu pourrais te heur-
ter à quelque tombe. Moi, je connais le che-
min.
— Brrr ! fit Shoking, si on m'avait dit, il y a
huit jours, que ie me promènerais la nuit dans
un cimetière, je n'aurais pas voulu le croire. Je
n'ai pas peur des morts, précisément, mais je
préférerais le gazon de Hyde-Park.
— Gentleman ! fit l'homme gris d'un ton mo-
queur. >
— C'est que, voyez-vous, continua Shoking,
on a beau dire, mais les, morts ne peuvent pas
être contents.
L'homme gris ne répondit pas.
Mais il continua son chemin, traînant tou-
jours à sa suite, Shoking qui avait le frisson et
sentait ses cheveux se hérisser.
Ils arrivèrent ainsi à la petite porte- percée
derrière le chœur.
L'homme gris n'eut qu'à frapper trois coups,
et elle s'ouvrit presque aussitôt.
Le vieux sacristain, apparut.son surplis blanc
sur les épaules et sa lampe. à la main.
— Tout va bien? lui demanda l'homme
gris.
— Oui, Votre Honneur. La mère et l'enfant
sont toujours là-haut. '
— Et ils m'attendent?
'- Sans doute. L'abbé Samuel est venu ce'
soir.
— Ah!
— Il les a vus et il m'a dit que je pouvais
vous obéir aveu--Iément,
— Il a eu raison, dit l'homme gris en péné-
trant dans l'église.
-" Aussi vous obéirai-je, ajouta le sacristain.
— Quoique je fasse ou dise ?
— Sans doute, puisque l'abbé Samuel le veut.
Nous brûlerions Fe-rlise, b'il nous le comman-
dait.
L'homme gris se tourna vers Shoking.
— Attends-moi ici, sur ce b;:nc, lui 'llit-i1.
— Où donc allez-vous ?
— Dans le clocher.
Et il se dirigea vers la porte de l'escalier er:
colimaçon qui conduisait au logis du sacristain.
Ce dernier suivait l'homme gris. qui lui dit en-
core :
— L'Irlandaise est-elle couchée?
— Elle, non, mais son fils dort.
— Je n'ai affaire qu'à elle*.
Et il monta sans bruit, probablement pour ro
pas troubler le repos de l'enfant.
Que se passa-t-il entre l'Irlandaise et lui?
Shoking ne le sut pas.
Mais il attendit près d'une heure, tremblant
de tous ses membres et n'osant parler au sacri -
tain, tant le bruit de sa voix que répercutaient
les échos de l'église l'effrayait.
— Je n'ai pas peur des vivants, pensait-il,
non bien sûr. Shoking est brave autant qu'il est
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