Titre : La Petite presse : journal quotidien... / [rédacteur en chef : Balathier Bragelonne]
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1872-06-19
Contributeur : Balathier Bragelonne, Adolphe de (1811-1888). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32837965d
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 19 juin 1872 19 juin 1872
Description : 1872/06/19 (A6,N2234). 1872/06/19 (A6,N2234).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k4715306t
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-190
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 23/10/2017
PARIS
■! LE GROS 'LOT. — Au tirage de l'Emprunt muni-
cipal de 1865 qui a eu lieu samedi, le n° 434,307,
a gegné le gros lot de 150,000 francs.
L'heureux favorisé du sort est M. Bobin, pro-
priétaire, demeurant boulevard Richard-Lenoir,
qui se trouvait déjà dans une belle position de
fortune. -
LE FUTUR PAPE. —■- Dans la journée d'hier,
Mgr Manning,auquel le Sacré Collége destine la
succession de Pie IX, est arrivé à Paris et est
descendu à la nonciature, où un grand dîner a
dû avoir lieu hier soir en son honneur.
ACCIDENT SUR UN CHEMIN DE FER.—Un accident
épouvantable a eu lieu avant-hier, à cinq heures
du matin, sur la ligne de Paris à Cherbourg.
Le train n° 44, venant de Cherboujg. a amené
hier malin à la gare St-Lazare le cercueil ren-
fermant le corps du sieur Testu, chef de train,
tué accidentellement.
Le corps du défunt a été transporté par les
soins de la compagnie de l'Ouest, à son domicile,
route de la Révolte, passage de l'Ecole, 15. • j
Le mécanicien, le chauffeur et le conducteur
du train qui a déraillé ont été blessés.
L'ARRIVÉE D'UN PERSAN. — Hier est arrivé à !
Paris un Persan de haute race, un véritable i
descendant du grand Rustan, Abdullah-Moham- ;
Med-Mirza-Khan.
Ce gentilhomme oriental, proche parent du
shah, vient s'installer à Paris.
Il a d'excellentes raisons, du reste, pour ne
pas rester à Téhéran ou à îspahan. Son sublime ;
cousin l'a condamné à mort pour crime de lèse - ]
majesté. ; ; . i
AbdulJah-Mohammed-Mirza-Khan s'est, en ef- i
fet, rendu coupable de tentative d'enlèvement j
sur la personne d'une Circassienne au harem ;
imp,érial. J
CORS gu éris sans DOULEURS. 1 fr.Rtie Lafayette, 45.
L'INSURRECTION D'ESPAGNE
Madrid, 16 juin, 8 h. du soir.
M. Zorilla est arrivé à deux heures cette après
midi; une foule immense l'attendait; les corpo- I
■ rations municipale et provinciale étaient allées le ■
recevoir à la gare. Il a prononcé un discours dé- !
'clarant que la liberté sera affermie. M. Zorilla
doit prêter serment ce soir.
Les nouvelles militaires sont peu importantes. !
La lutte prend de três=sériéuses proportions éiî !
^ des renforts de troupes ont du être '
envoyés en toute hâte dans cette province. !
La brigade Ceruti, de l'armée du Nord, a i
quitté la Navarre en chemin de fer pour opérer
dans la province de Tarragone. Elle sera rem-
placée sons peu en Navarre par une partie de la,
garnison de Madrid. -
LE SYNODE DE 1872
; Au moment, où le synode général des Egli-
ses réformées semble'tourner au concile, il
n'est peut-être pas sans intérêt de caractéri-
ser ces assemblées de consistoires (au nombre
de 105 aujourd'hui), que la plupart des gens
comparent assez volontiers à, des réunions ca-
tholiques analogues. '
Disons d'abord que ces synodes généraux
diffèrent absolument des synodes diocésains
du droit canon et des conciles catholiques.
On pourra s'en rendre compte facilement en
lisant le petit exposé historique suivant, dont
nous empruntons la plupart des éléments à
un confrère fort compétent en-pareille matière,
M. Marc Gérard :
Le mot de synode vient du grec sun odos,
(rencontre, réunion). Dans l'Église primitive,
il servait à désigner une assemblée d'évêques
délibérant sur des affaires ecclésiastiques et
de foi, c'est-à-dire un concile de deuxième
ordre. Depuis, le nom de concile a prévalu.
Nous ne nous occuperons ni des saints-sy-
nodes de Russie et de Grèce, ni des synodes
généraux, fréquents en Ecosse et en Hollande,
où subsiste l'organisation presbytérale, en
Prusse, en Allemagne, en Suisse, en Hongrie,
ni de l'organisation synodale en Angleterre,
autrefois si active, devenue aujourd'hui une
affaire de forme ; nous ne parlerons que des
synodes de.France......., j .
* î
[ Lorsqu'on 1521 Naquit la religion réformée,
ce ne furent d'abord que quelques hommes
qui se levèrent çà et là, « prêchant, dit un
auteur protestant, contre res erreurs et les
abus' du catholicisme, et invitant les peuples.
à revenir aux enseignements de l'Ecriture. »'
De ce nombre était Calvin, qui avait alors
vingt ans. Point de pasteurs réguliers, aucun
lieu fixe d'assemblée : on se réunissait par
petites, ^bandes, conservant toujours'un œil et
une oreille au guet.. ,
■ Bientôt vinrent les enthousiastes, les prédi-
cateurs publics, puis les martyrs.
: Eu 1;555, suivant les conseils envoyés de
Genève par Calvin, les profitants (ce mot
est ici un anachronisme, car il fut pendant
plus de deux cents ans appliqué aux luthé-
riens par les partisans de la : religion réfor-
mée primitive) les protestants de France se
constituèrent en communautés locales, en pa-
roisses. Mais toutes ces petites églises parti-
culières n'étaient unies par aucun lien exté-
rieur.
Libres de toute autorité commune, bien
qu'animées de la même foi et du même esprit,
elles étaient loin de constituer un corps com-
pacte. Aussi, dès 1558, Antoine de Chaudieu,
ministre à Paris, et ses collègues de Poitiers,
commençaient ils « à appréhender quel bien
ce serait s'il plaisait à Dieu que toutes les
églises de France dressassent d'un commun
accord une confession de foi et une discipline
ecclésiastique. »
La petite assemblée générale des paroisses
ou conseils presbytéraux, formant le consis-
toire de Paris, partagea cette opinion et « prit
sur lui, en l'absence d'une autorité plus COill-
pétente » de convoquer pour l'année suivante
le premier synode national, destiné à donner
à la religion réformée une base solide, une
confession de foi.
On convint tout d'abord qu'un synode serait
tenu tous les ans, afin de maintenir la com-
munion entre les différentes églises, mais on
dut y renoncer au bout de quatre ans; la
réunion .était impossible. Il fut tenu cepen-
dant un grand nombre de synodes : vingt-
neuf de 1559 à 1669 ; après une interruption
de soixante-six ans, huit, de 1726 à 1763 : ce
furent les synodes an désert; et enfin, après
une nouvelle interruption de quatre-vingt-cinq
ans, une assemblée protestante générale, qui
ne porta pas le nom de synode, fut tenue à
Paris en 1849.
Toutes ces assemblées examinèrent des arti-
cles de dogme et de foi ; c'est ce qui les a fait
comparer atix conciles. Mais la distance qui
les en sépare est immense.
Tandis que le concile catholique conserve
ou transforme, avec une autorité toujours sou-
veraine, les dogmes catholiques, le synode
protestant est appelé seulement à éclairer les
fidèles sur les points des saintes Ecritures
qu'ils pourraient ne pas comprendre; car
ici chaque fidèle interprète les Ecritures et ne
reconnaît, en cette matière, d'autre juge sou-
verain que sa conscience, toute idée de dogme
imposé étant contraire à la religion réformée.
La confession de 'appelée article de foi
par les catholiques — n'est-pour les protestants
que l interprétation des Ecritures pair tel ou
tel_ ministre et n'est point obligatoire. -de
qui explique les différences des doctrines éga-
lement respectables -et respectées 'de, l'Eglise
nationale libérale et ,qe. l'Eglise nationale or-
thodoxe.
Les doctrines reçues sont celles de.Calvin et
■ Luther; mais aucun dogme nouveau ne
peut être introduit. (Toute la discussion se
tro.uve porter de nos jours sur le symbole Mes
apôtres, que les libéraux n'admettent pas
sans restrictions.) Mais quant à l'interpré-
tation, le synode n'est pas infaillible :. voilà
pour la compétence en matière de dogme.
En matière de discipline, le synode peut blâ-
mer ;tel_ ou tel individu; — excommunier,
c'est-à-dire refuser le titre de protestant (sy-
node de Privas) ; — refuser le titre de pasteur
à quiconque s'écarterait des doctrines reçues
comme fondamentales ; — réprimander tel ou
tel consistoire qui tendrait à une séparation
complète (actuellement darbvsme ou secte
mommienne) et à l'oubli des croyances de
1572 (synode à Nîmes) et de 1763 (synode au
désert).
En matière contentieuse, le synode peut de-
mander des crédits pour les traitements ' des
pasteurs et les indemnités pastorales; — pour
l'édification ou la restauration des temples ;
— pour l'établissement ou la réorganisation
des écoles protestantes ; — pour les traite-
ments des instituteurs ou des institutrices;
— pour les hôpitaux et les établissements de
bienfaisance dépendant de la religion réfor-
mée; - etc., etc.
1 La protection du premier et du deuxième
empire (dont un protestant a pourtant dit :
« Chaque fois que nos griefs, assez rares sous j
son règne, sont arrivés jusqu'à lui, il a or-
donné de les redresser... etc.) » avait été s té- !
rile, et Jes protestants n'avaient pu obtenir
j usqu'ici l'autorisation de convoquer un synode.
Un décret rendu le 29 novembre 1871, et
rappelant la loi de germinal an X relative à la j
convocation des synodes, a enfin donné satis-
faction aux demandes qui, nettement formu-
Lées en 1848 et maintes fois répétées depuis,
étaient jusqu'alors restées sans résultat., , |
Le 7_ juin, le synode s'est ouvert au temple
du Saint-Fsprit, rue Roquépine, dans une
vaste salle veuve de tableaux et de statues
comme toutes les chapelles du culte réformé.
Au rez-de-chaussée, quarante bancs en
chêne, coupés par des stalles, peuvent rece-
voir environ trois cents personnes. Deux ga-
leries supérieures, partagées en travées par
des colonnes de pierre blanche, contiennent
juste cent places.
Au fond du temple, sur une estrade assez
élevée, le bureau du président et des six
membres du synode. Derrière le fauteuil pré-
sidentiel, une grande b,ible ouverte sur un
pupitre recouvert en velours.. - .
En face du bureau, à l'autre extrémité de
la chapelle, un buffet d'orgue assez modeste.
Les trois dernières séances du synode ont
été consacrées à déterminer lus droits et l'au-
torité de l'assemblée.
Après s'être reconnu le pouvoir de légiférer
souverainement, en matière religieuse, plu-
sieurs membres ont tenté de proclamer, non
pas seulement leur propre foi, mais la foi de
l'Eglise, de mettre aux voix des doctrines, et j
l'assemblée a voté par assis et levé, à la plura- !
lité des assistants. -
Pour notre compte, nous avons éprouvé un
étonnement bien explicable à voir, en pareil
cas, une majorité de soixante membres envi-
ron affirmer, en face d'une minorité de qua-
rantercinq, que ce qu'elle croit doit passer
pour la foi de l'assemblée, et la foi de l'assem-
blée pour la foi de toute la communauté. Nous
sommes^ donc désormais en face non d'umi
assemûibô consiiuâbiVp, mais d'un véritable
concile. Ce fait, a une portée qui n'échappera
a pensionne. ;\ . : ;
journaux affirmaient -hier qu'une lettre.
de; A M. Barthélémy Saint-Hilaire vient, d'in-
former une députation des membres, du sy-
npdo..général. que M. Thiers, jusqu'ici emp'ê-
pourra la recevoir cette semaine. ,
V.-F. MAISONNEUFVE.
CHRONIQUE JUDICIAIRE
LE DÉSERTEUR DE PHALSBOURG. — On écrit cè
la Lorraine allemande au Courrier du Bas-
Rhin: .
Il n'est bruit dans notre contrée que de la prise
de M. Ccrfbeer, capitaine de la mobile à Phajs-
bourg pendant le siège. ;
Le jour où les rôtis vinrent à manquer dans
la place, le brave capitaine, à l'abri du drapeau,
parlementaire, prit le large. Il fut condamné à:
mort par contumace par le conseil de guerre de
Phalsbourg; cetle condamnation fut confirmée à
Tours...
La paix signée, M. Cerfbeer entreprit plusieurs
fois le voyage de Paris. Il ne fut pas inquiété.
Revenant de l'un de ces voyages, il descendit de
chemin de fer à Lunéville pour serrer la main,
sur le quai, à un vieil ami. Un agent de police
fut frappé de la ressemblance des traits de cet
homme avec ceux d'une photographie qu'il por-
tait sur lui, * -V
Au moment où la locomotive donnait le signal
du départ, il aborde l'homme qui venait de s'en-
tretenir avec l'étranger et apprend que cet étran.--
ger était le capitaine Cerfbeer.
^ A Embermenil, quatre gendarmes attendaient
l arrivée du train et mirent poliment la main sur;
notre capitaine, qui fut conduit à pied jusqu'!
Lunéville.
LES GÉNÉRAUX DE SERRES ET CREMER ET L'ÉPICIE&
ARBINET: — Le président de la République vient
d'avoir une longue entrevue avec M. de Cissey£
ministre de la guerre, au sujet de l'affaire de
Serres-Cremer-Arbinet.
Rappelons celte affaire en quelques lignes.
Durant la guerre 1870-71, le général Cremer
commandait une division de l'armée de l'Est à
Dijon. Plusieurs habitants de cette ville étaient
accusés de correspondre avec l'ennemi et de lui
fournir des renseignements sur l'état de nos for-
ces. L'armée française avait été surprise plusieurs
fois, ^ et des mouvements projetés avaient été
empêchés, l'ennemi, par les dispositions qu'il
prenait, montrant qu'il savait à l'avance ce qu'al-
làient faire nos soldats.
L'irritation était grande.. "'1
Au nombre de ceux qui étaient signalés comme
espions, se trouvait l'épicier Arbinet. Arbinet
était appelé par son commerce dans les environs,
de la ville. Il allait, avec une petite carriole, &
quelques kilométrés de Dijon acheter et vendre
des marchandises. Arbinet fut signalé au gou-
vernement. Le général Cremer reçut l'ordre de
le faire fusiller. Cet ordre était signé de Serres.
Aujourd'hui la veuve de l'épicier se porte,
partie civile et assigne le général Cremer et M<
de Serres. Le général Cremer se retranche der-
rière l'ordre qu'il avait reçu de M. de Serres.
M. de Serres invoque l'ordre, du ministre. Mais
l'ordre du ministre portait :
, «; Traduisez Arbinet devant conseil de guerre
et fusillez s'il y a lieu. »
L'affaire viendra probablement le 25 juin de-;
vant la cour d'assises.
Le président de la République et le ministre
de la guerre, après avoir examiné le dossier»
l'ont renvoyé au parquet de Lyon.
UNE ÉVASION. — Jeudi dernier, Eugène Abriat,"
âge de 26 ans, condamné à Lisieux pour escro-
queries à deux ans de prison, 50 fr. d'amende ;
et à six ans d'interdiction de ses droits civiques, |
était amené de Caen à Lisieux dans un waggon.
de seconde classe par deux gendarmes. -
Profitant de l'obscurité du tunnel de la Moite,
peut-être aussi du sommeil des t!p.nrlarmp.
N° 60 — Feuilleton de la PETITE PRESSE
Le Chiffonnier Philosophe
DEUXIÈME PARTIE
XVI (suite)
Explications et réunion.
Pour ne pas succomber à la tentation de VO'.lS
révéler la retraite d'Elise, elle s'est réfugiée in-
cognito, non aux environs de Caen, mais à
Roiïen, où, uri en-cas financier, offert par la su-
périeure que j'avais largement munie d'ar-
gent, lui a permis de vivre modestement, en at-
tendant son rappel à Paris, près de vous — et
de votre pupille.
Cependant, celle-ci ne testa pies complète-
ment privée de vos nouvelles, car la sœur com-
TmsstOnnàTre, renseignée par Mme Paphos avant
son départ, était à même de vous rencontrer
presque chaque semaine.
MBe Bernard me l'avait déclaré, en nous sé-
parant:
me r.ésignerai à disParaître passagère-
ment pour S* mais à la réserve expresse qu'on
f ' moi, sur le sort du pauvre
abandonné.,, et que, s'il tombait dangereuse-
,yc!r lq numéro d'hier.
ment malade, j'aurai la possibilité d'accourir à
son chevet.
N'importe ! je sentis bientôt combien votre sé-
paration absolue était douloureuse pour Elise...
et pour vous. Mais plus je trouvais cruel mon
amoureux despotisme, plus cet égoïsme spécial
éprouvait de peine à rétracter son arrêt, tant que
je n'étais pas là, à partager le bonheur de revoir
notre commun bon ange.
Afin de concilia deux gent"iinents, je hâtai
mon retour à Paris, laissant Isidore diriger, à la
Nouvelle-Orléans, la partie encore compromise
d» mes immenses intérêts, car le conflit de la
sécession...
En ce moment, l'aigre grincement des gonds
d'une porte coupa la parole à Willcomb; que
son auditeur entendait toujours avidement, avec
un singulier mélange de joie et de tristesse.
Dans la seconde division du parloir, la mère
Sainte-Agnès entra, aussi impassible d'apparence
qu'un sphinx égyptien.
Mais derrière elle, chancelante, pâle d'émo-
tion, s avançait une jeune fille, qui avait rem-:
placé le rigide costume du. pensionnat par un
frais habillement, d'une élégante simplicité.
C était Elise transfigurée, d'une distinction et
d'une ^ grâce exquises dans tout son aspect, et
néanmoins ayant conservé l'air compatissant, le
regard candide de la gentille ouvrière de na-
guère.
A la vue de son enfant d'adoption, tous les
griefs que 1 excellent Cambronné pensait avoir
cohtre elle s'évàrièiïîrent, Comme la brume sous
les rayons ardents du soleil. il lui tendit les
bras, à travers les barreaux de fer, criball)utiant ;
j "des mots inintelligibles de tendresse et de pardon?
De son côté, Georges, tout frémissant, dévo- i
rait des yeux la ravissante apparition. !
Mlle Bernard, en proie à ■ un trouble inexpri- i
j niable* s'en vint tomber agenouillée devant le
i vieillard, non sans avoir enveloppé, toutefois, son
j compagnon d'un rapide et avide coup d'oeil,
î Q'Qant.à là supérieure-, elle avait continué sa ;
1 'marche presque automatique vers l'un des c'dins i
!' de là grille de'séparation où elle poussa un res- j
sort caché. ; ' |
Une partie de la clôture se replia aussitôt, de ;
façon à permettre la réunion des quatre acteurs ;
de cette scène pathétique. j
; Le philosophe courut à Elise, la releva, la j
■ pressa sur son cœur avec une fougue paternelle,
' mais; sans trouver dé phrase ' pour exprimer sa j
félicité. - ( i
' Les romanciers à fracas ont beau déclamer, !
les grandes effusions sont le plus souvent muettes; j
La jeune fille rendait au vieux chiffonnier j
"embrassement pour embrasement. < ;
— Mon père, murmurait-elle 6n6n/ éclatant j
; ën sanglots, mon bon père ! que notre, séparation !
m'a coûté !... Mais c'était dans l'intérêt de votre '
avenir à vous et à Isidore... Et puis... j
• Elle s'arrêta toute confuse. !
Et puis ?,i. tu l'aimais, adheva ;Çambronq 5 j
;en indiquant; d'un mouvement de tête le tran- ;
satlantique, que la mère Sainte-Agnès avait em- j
mène à l'autre bout de la pièce. " )
Elise, passant de la blancheur du lys à l'in- '
carnat de la rose, selon une métaphore trop con-r;
.sacrée, cacha .son doux visage sur l'épaule du.,
digne- Etienne. ! I~ .
(La suite et demain.) J
JULES CAUVAIN.
MILLE FRANCS GAGNÉS LES YEUX FERMES. — Trois
heures du matin.—Une trentaine d'individus, en
'manteau couleur 'de muraille, arrivent mysté-
: rieusement sur la place du Nouvel-Opéra. Un
d'eux se détache du groupe ; on lui bande ,
, les yeux. cc - Allez !» dit une voix grave.
il va.
Escorté par les trente inconnus, le nouveau
Colin-Maillard enfile la rue de la Paix, traverse
la place Vendôme et la rue Castiglione; tourne 1 :
droite dans la rue de Ri-voli, double la place de
la Concorde et remonte l'avenue des Champs-
Elysées. Une fois au Rond-Point : « -- Halte 1, »
dit encore la voix grave. « 'Victeire ! » crient en
chœur les trente âffidés. Colin-Maillard arrache
son bandeau et tend la main daas laquelle on lui
verse cinquante louis.
Ces cinquante louis, représentaient le montant
d'un pari fait entre deux membres du Sporting-
Club et dont l'objet était le trajet parcouru les
yeux bandés. Les trente personnes mystérieuses
étaient trente membres du même cercle, désl,,:;
ghés comme juges. - f i
Et voila. les plaisirs nocturnes de P8.J'j,s." en 1'&%
de grâce f872! , ^
■! LE GROS 'LOT. — Au tirage de l'Emprunt muni-
cipal de 1865 qui a eu lieu samedi, le n° 434,307,
a gegné le gros lot de 150,000 francs.
L'heureux favorisé du sort est M. Bobin, pro-
priétaire, demeurant boulevard Richard-Lenoir,
qui se trouvait déjà dans une belle position de
fortune. -
LE FUTUR PAPE. —■- Dans la journée d'hier,
Mgr Manning,auquel le Sacré Collége destine la
succession de Pie IX, est arrivé à Paris et est
descendu à la nonciature, où un grand dîner a
dû avoir lieu hier soir en son honneur.
ACCIDENT SUR UN CHEMIN DE FER.—Un accident
épouvantable a eu lieu avant-hier, à cinq heures
du matin, sur la ligne de Paris à Cherbourg.
Le train n° 44, venant de Cherboujg. a amené
hier malin à la gare St-Lazare le cercueil ren-
fermant le corps du sieur Testu, chef de train,
tué accidentellement.
Le corps du défunt a été transporté par les
soins de la compagnie de l'Ouest, à son domicile,
route de la Révolte, passage de l'Ecole, 15. • j
Le mécanicien, le chauffeur et le conducteur
du train qui a déraillé ont été blessés.
L'ARRIVÉE D'UN PERSAN. — Hier est arrivé à !
Paris un Persan de haute race, un véritable i
descendant du grand Rustan, Abdullah-Moham- ;
Med-Mirza-Khan.
Ce gentilhomme oriental, proche parent du
shah, vient s'installer à Paris.
Il a d'excellentes raisons, du reste, pour ne
pas rester à Téhéran ou à îspahan. Son sublime ;
cousin l'a condamné à mort pour crime de lèse - ]
majesté. ; ; . i
AbdulJah-Mohammed-Mirza-Khan s'est, en ef- i
fet, rendu coupable de tentative d'enlèvement j
sur la personne d'une Circassienne au harem ;
imp,érial. J
CORS gu éris sans DOULEURS. 1 fr.Rtie Lafayette, 45.
L'INSURRECTION D'ESPAGNE
Madrid, 16 juin, 8 h. du soir.
M. Zorilla est arrivé à deux heures cette après
midi; une foule immense l'attendait; les corpo- I
■ rations municipale et provinciale étaient allées le ■
recevoir à la gare. Il a prononcé un discours dé- !
'clarant que la liberté sera affermie. M. Zorilla
doit prêter serment ce soir.
Les nouvelles militaires sont peu importantes. !
La lutte prend de três=sériéuses proportions éiî !
^ des renforts de troupes ont du être '
envoyés en toute hâte dans cette province. !
La brigade Ceruti, de l'armée du Nord, a i
quitté la Navarre en chemin de fer pour opérer
dans la province de Tarragone. Elle sera rem-
placée sons peu en Navarre par une partie de la,
garnison de Madrid. -
LE SYNODE DE 1872
; Au moment, où le synode général des Egli-
ses réformées semble'tourner au concile, il
n'est peut-être pas sans intérêt de caractéri-
ser ces assemblées de consistoires (au nombre
de 105 aujourd'hui), que la plupart des gens
comparent assez volontiers à, des réunions ca-
tholiques analogues. '
Disons d'abord que ces synodes généraux
diffèrent absolument des synodes diocésains
du droit canon et des conciles catholiques.
On pourra s'en rendre compte facilement en
lisant le petit exposé historique suivant, dont
nous empruntons la plupart des éléments à
un confrère fort compétent en-pareille matière,
M. Marc Gérard :
Le mot de synode vient du grec sun odos,
(rencontre, réunion). Dans l'Église primitive,
il servait à désigner une assemblée d'évêques
délibérant sur des affaires ecclésiastiques et
de foi, c'est-à-dire un concile de deuxième
ordre. Depuis, le nom de concile a prévalu.
Nous ne nous occuperons ni des saints-sy-
nodes de Russie et de Grèce, ni des synodes
généraux, fréquents en Ecosse et en Hollande,
où subsiste l'organisation presbytérale, en
Prusse, en Allemagne, en Suisse, en Hongrie,
ni de l'organisation synodale en Angleterre,
autrefois si active, devenue aujourd'hui une
affaire de forme ; nous ne parlerons que des
synodes de.France......., j .
* î
[ Lorsqu'on 1521 Naquit la religion réformée,
ce ne furent d'abord que quelques hommes
qui se levèrent çà et là, « prêchant, dit un
auteur protestant, contre res erreurs et les
abus' du catholicisme, et invitant les peuples.
à revenir aux enseignements de l'Ecriture. »'
De ce nombre était Calvin, qui avait alors
vingt ans. Point de pasteurs réguliers, aucun
lieu fixe d'assemblée : on se réunissait par
petites, ^bandes, conservant toujours'un œil et
une oreille au guet.. ,
■ Bientôt vinrent les enthousiastes, les prédi-
cateurs publics, puis les martyrs.
: Eu 1;555, suivant les conseils envoyés de
Genève par Calvin, les profitants (ce mot
est ici un anachronisme, car il fut pendant
plus de deux cents ans appliqué aux luthé-
riens par les partisans de la : religion réfor-
mée primitive) les protestants de France se
constituèrent en communautés locales, en pa-
roisses. Mais toutes ces petites églises parti-
culières n'étaient unies par aucun lien exté-
rieur.
Libres de toute autorité commune, bien
qu'animées de la même foi et du même esprit,
elles étaient loin de constituer un corps com-
pacte. Aussi, dès 1558, Antoine de Chaudieu,
ministre à Paris, et ses collègues de Poitiers,
commençaient ils « à appréhender quel bien
ce serait s'il plaisait à Dieu que toutes les
églises de France dressassent d'un commun
accord une confession de foi et une discipline
ecclésiastique. »
La petite assemblée générale des paroisses
ou conseils presbytéraux, formant le consis-
toire de Paris, partagea cette opinion et « prit
sur lui, en l'absence d'une autorité plus COill-
pétente » de convoquer pour l'année suivante
le premier synode national, destiné à donner
à la religion réformée une base solide, une
confession de foi.
On convint tout d'abord qu'un synode serait
tenu tous les ans, afin de maintenir la com-
munion entre les différentes églises, mais on
dut y renoncer au bout de quatre ans; la
réunion .était impossible. Il fut tenu cepen-
dant un grand nombre de synodes : vingt-
neuf de 1559 à 1669 ; après une interruption
de soixante-six ans, huit, de 1726 à 1763 : ce
furent les synodes an désert; et enfin, après
une nouvelle interruption de quatre-vingt-cinq
ans, une assemblée protestante générale, qui
ne porta pas le nom de synode, fut tenue à
Paris en 1849.
Toutes ces assemblées examinèrent des arti-
cles de dogme et de foi ; c'est ce qui les a fait
comparer atix conciles. Mais la distance qui
les en sépare est immense.
Tandis que le concile catholique conserve
ou transforme, avec une autorité toujours sou-
veraine, les dogmes catholiques, le synode
protestant est appelé seulement à éclairer les
fidèles sur les points des saintes Ecritures
qu'ils pourraient ne pas comprendre; car
ici chaque fidèle interprète les Ecritures et ne
reconnaît, en cette matière, d'autre juge sou-
verain que sa conscience, toute idée de dogme
imposé étant contraire à la religion réformée.
La confession de 'appelée article de foi
par les catholiques — n'est-pour les protestants
que l interprétation des Ecritures pair tel ou
tel_ ministre et n'est point obligatoire. -de
qui explique les différences des doctrines éga-
lement respectables -et respectées 'de, l'Eglise
nationale libérale et ,qe. l'Eglise nationale or-
thodoxe.
Les doctrines reçues sont celles de.Calvin et
■ Luther; mais aucun dogme nouveau ne
peut être introduit. (Toute la discussion se
tro.uve porter de nos jours sur le symbole Mes
apôtres, que les libéraux n'admettent pas
sans restrictions.) Mais quant à l'interpré-
tation, le synode n'est pas infaillible :. voilà
pour la compétence en matière de dogme.
En matière de discipline, le synode peut blâ-
mer ;tel_ ou tel individu; — excommunier,
c'est-à-dire refuser le titre de protestant (sy-
node de Privas) ; — refuser le titre de pasteur
à quiconque s'écarterait des doctrines reçues
comme fondamentales ; — réprimander tel ou
tel consistoire qui tendrait à une séparation
complète (actuellement darbvsme ou secte
mommienne) et à l'oubli des croyances de
1572 (synode à Nîmes) et de 1763 (synode au
désert).
En matière contentieuse, le synode peut de-
mander des crédits pour les traitements ' des
pasteurs et les indemnités pastorales; — pour
l'édification ou la restauration des temples ;
— pour l'établissement ou la réorganisation
des écoles protestantes ; — pour les traite-
ments des instituteurs ou des institutrices;
— pour les hôpitaux et les établissements de
bienfaisance dépendant de la religion réfor-
mée; - etc., etc.
1 La protection du premier et du deuxième
empire (dont un protestant a pourtant dit :
« Chaque fois que nos griefs, assez rares sous j
son règne, sont arrivés jusqu'à lui, il a or-
donné de les redresser... etc.) » avait été s té- !
rile, et Jes protestants n'avaient pu obtenir
j usqu'ici l'autorisation de convoquer un synode.
Un décret rendu le 29 novembre 1871, et
rappelant la loi de germinal an X relative à la j
convocation des synodes, a enfin donné satis-
faction aux demandes qui, nettement formu-
Lées en 1848 et maintes fois répétées depuis,
étaient jusqu'alors restées sans résultat., , |
Le 7_ juin, le synode s'est ouvert au temple
du Saint-Fsprit, rue Roquépine, dans une
vaste salle veuve de tableaux et de statues
comme toutes les chapelles du culte réformé.
Au rez-de-chaussée, quarante bancs en
chêne, coupés par des stalles, peuvent rece-
voir environ trois cents personnes. Deux ga-
leries supérieures, partagées en travées par
des colonnes de pierre blanche, contiennent
juste cent places.
Au fond du temple, sur une estrade assez
élevée, le bureau du président et des six
membres du synode. Derrière le fauteuil pré-
sidentiel, une grande b,ible ouverte sur un
pupitre recouvert en velours.. - .
En face du bureau, à l'autre extrémité de
la chapelle, un buffet d'orgue assez modeste.
Les trois dernières séances du synode ont
été consacrées à déterminer lus droits et l'au-
torité de l'assemblée.
Après s'être reconnu le pouvoir de légiférer
souverainement, en matière religieuse, plu-
sieurs membres ont tenté de proclamer, non
pas seulement leur propre foi, mais la foi de
l'Eglise, de mettre aux voix des doctrines, et j
l'assemblée a voté par assis et levé, à la plura- !
lité des assistants. -
Pour notre compte, nous avons éprouvé un
étonnement bien explicable à voir, en pareil
cas, une majorité de soixante membres envi-
ron affirmer, en face d'une minorité de qua-
rantercinq, que ce qu'elle croit doit passer
pour la foi de l'assemblée, et la foi de l'assem-
blée pour la foi de toute la communauté. Nous
sommes^ donc désormais en face non d'umi
assemûibô consiiuâbiVp, mais d'un véritable
concile. Ce fait, a une portée qui n'échappera
a pensionne. ;\ . : ;
journaux affirmaient -hier qu'une lettre.
de; A M. Barthélémy Saint-Hilaire vient, d'in-
former une députation des membres, du sy-
npdo..général. que M. Thiers, jusqu'ici emp'ê-
pourra la recevoir cette semaine. ,
V.-F. MAISONNEUFVE.
CHRONIQUE JUDICIAIRE
LE DÉSERTEUR DE PHALSBOURG. — On écrit cè
la Lorraine allemande au Courrier du Bas-
Rhin: .
Il n'est bruit dans notre contrée que de la prise
de M. Ccrfbeer, capitaine de la mobile à Phajs-
bourg pendant le siège. ;
Le jour où les rôtis vinrent à manquer dans
la place, le brave capitaine, à l'abri du drapeau,
parlementaire, prit le large. Il fut condamné à:
mort par contumace par le conseil de guerre de
Phalsbourg; cetle condamnation fut confirmée à
Tours...
La paix signée, M. Cerfbeer entreprit plusieurs
fois le voyage de Paris. Il ne fut pas inquiété.
Revenant de l'un de ces voyages, il descendit de
chemin de fer à Lunéville pour serrer la main,
sur le quai, à un vieil ami. Un agent de police
fut frappé de la ressemblance des traits de cet
homme avec ceux d'une photographie qu'il por-
tait sur lui, * -V
Au moment où la locomotive donnait le signal
du départ, il aborde l'homme qui venait de s'en-
tretenir avec l'étranger et apprend que cet étran.--
ger était le capitaine Cerfbeer.
^ A Embermenil, quatre gendarmes attendaient
l arrivée du train et mirent poliment la main sur;
notre capitaine, qui fut conduit à pied jusqu'!
Lunéville.
LES GÉNÉRAUX DE SERRES ET CREMER ET L'ÉPICIE&
ARBINET: — Le président de la République vient
d'avoir une longue entrevue avec M. de Cissey£
ministre de la guerre, au sujet de l'affaire de
Serres-Cremer-Arbinet.
Rappelons celte affaire en quelques lignes.
Durant la guerre 1870-71, le général Cremer
commandait une division de l'armée de l'Est à
Dijon. Plusieurs habitants de cette ville étaient
accusés de correspondre avec l'ennemi et de lui
fournir des renseignements sur l'état de nos for-
ces. L'armée française avait été surprise plusieurs
fois, ^ et des mouvements projetés avaient été
empêchés, l'ennemi, par les dispositions qu'il
prenait, montrant qu'il savait à l'avance ce qu'al-
làient faire nos soldats.
L'irritation était grande.. "'1
Au nombre de ceux qui étaient signalés comme
espions, se trouvait l'épicier Arbinet. Arbinet
était appelé par son commerce dans les environs,
de la ville. Il allait, avec une petite carriole, &
quelques kilométrés de Dijon acheter et vendre
des marchandises. Arbinet fut signalé au gou-
vernement. Le général Cremer reçut l'ordre de
le faire fusiller. Cet ordre était signé de Serres.
Aujourd'hui la veuve de l'épicier se porte,
partie civile et assigne le général Cremer et M<
de Serres. Le général Cremer se retranche der-
rière l'ordre qu'il avait reçu de M. de Serres.
M. de Serres invoque l'ordre, du ministre. Mais
l'ordre du ministre portait :
, «; Traduisez Arbinet devant conseil de guerre
et fusillez s'il y a lieu. »
L'affaire viendra probablement le 25 juin de-;
vant la cour d'assises.
Le président de la République et le ministre
de la guerre, après avoir examiné le dossier»
l'ont renvoyé au parquet de Lyon.
UNE ÉVASION. — Jeudi dernier, Eugène Abriat,"
âge de 26 ans, condamné à Lisieux pour escro-
queries à deux ans de prison, 50 fr. d'amende ;
et à six ans d'interdiction de ses droits civiques, |
était amené de Caen à Lisieux dans un waggon.
de seconde classe par deux gendarmes. -
Profitant de l'obscurité du tunnel de la Moite,
peut-être aussi du sommeil des t!p.nrlarmp.
N° 60 — Feuilleton de la PETITE PRESSE
Le Chiffonnier Philosophe
DEUXIÈME PARTIE
XVI (suite)
Explications et réunion.
Pour ne pas succomber à la tentation de VO'.lS
révéler la retraite d'Elise, elle s'est réfugiée in-
cognito, non aux environs de Caen, mais à
Roiïen, où, uri en-cas financier, offert par la su-
périeure que j'avais largement munie d'ar-
gent, lui a permis de vivre modestement, en at-
tendant son rappel à Paris, près de vous — et
de votre pupille.
Cependant, celle-ci ne testa pies complète-
ment privée de vos nouvelles, car la sœur com-
TmsstOnnàTre, renseignée par Mme Paphos avant
son départ, était à même de vous rencontrer
presque chaque semaine.
MBe Bernard me l'avait déclaré, en nous sé-
parant:
me r.ésignerai à disParaître passagère-
ment pour S* mais à la réserve expresse qu'on
f ' moi, sur le sort du pauvre
abandonné.,, et que, s'il tombait dangereuse-
,yc!r lq numéro d'hier.
ment malade, j'aurai la possibilité d'accourir à
son chevet.
N'importe ! je sentis bientôt combien votre sé-
paration absolue était douloureuse pour Elise...
et pour vous. Mais plus je trouvais cruel mon
amoureux despotisme, plus cet égoïsme spécial
éprouvait de peine à rétracter son arrêt, tant que
je n'étais pas là, à partager le bonheur de revoir
notre commun bon ange.
Afin de concilia deux gent"iinents, je hâtai
mon retour à Paris, laissant Isidore diriger, à la
Nouvelle-Orléans, la partie encore compromise
d» mes immenses intérêts, car le conflit de la
sécession...
En ce moment, l'aigre grincement des gonds
d'une porte coupa la parole à Willcomb; que
son auditeur entendait toujours avidement, avec
un singulier mélange de joie et de tristesse.
Dans la seconde division du parloir, la mère
Sainte-Agnès entra, aussi impassible d'apparence
qu'un sphinx égyptien.
Mais derrière elle, chancelante, pâle d'émo-
tion, s avançait une jeune fille, qui avait rem-:
placé le rigide costume du. pensionnat par un
frais habillement, d'une élégante simplicité.
C était Elise transfigurée, d'une distinction et
d'une ^ grâce exquises dans tout son aspect, et
néanmoins ayant conservé l'air compatissant, le
regard candide de la gentille ouvrière de na-
guère.
A la vue de son enfant d'adoption, tous les
griefs que 1 excellent Cambronné pensait avoir
cohtre elle s'évàrièiïîrent, Comme la brume sous
les rayons ardents du soleil. il lui tendit les
bras, à travers les barreaux de fer, criball)utiant ;
j "des mots inintelligibles de tendresse et de pardon?
De son côté, Georges, tout frémissant, dévo- i
rait des yeux la ravissante apparition. !
Mlle Bernard, en proie à ■ un trouble inexpri- i
j niable* s'en vint tomber agenouillée devant le
i vieillard, non sans avoir enveloppé, toutefois, son
j compagnon d'un rapide et avide coup d'oeil,
î Q'Qant.à là supérieure-, elle avait continué sa ;
1 'marche presque automatique vers l'un des c'dins i
!' de là grille de'séparation où elle poussa un res- j
sort caché. ; ' |
Une partie de la clôture se replia aussitôt, de ;
façon à permettre la réunion des quatre acteurs ;
de cette scène pathétique. j
; Le philosophe courut à Elise, la releva, la j
■ pressa sur son cœur avec une fougue paternelle,
' mais; sans trouver dé phrase ' pour exprimer sa j
félicité. - ( i
' Les romanciers à fracas ont beau déclamer, !
les grandes effusions sont le plus souvent muettes; j
La jeune fille rendait au vieux chiffonnier j
"embrassement pour embrasement. < ;
— Mon père, murmurait-elle 6n6n/ éclatant j
; ën sanglots, mon bon père ! que notre, séparation !
m'a coûté !... Mais c'était dans l'intérêt de votre '
avenir à vous et à Isidore... Et puis... j
• Elle s'arrêta toute confuse. !
Et puis ?,i. tu l'aimais, adheva ;Çambronq 5 j
;en indiquant; d'un mouvement de tête le tran- ;
satlantique, que la mère Sainte-Agnès avait em- j
mène à l'autre bout de la pièce. " )
Elise, passant de la blancheur du lys à l'in- '
carnat de la rose, selon une métaphore trop con-r;
.sacrée, cacha .son doux visage sur l'épaule du.,
digne- Etienne. ! I~ .
(La suite et demain.) J
JULES CAUVAIN.
MILLE FRANCS GAGNÉS LES YEUX FERMES. — Trois
heures du matin.—Une trentaine d'individus, en
'manteau couleur 'de muraille, arrivent mysté-
: rieusement sur la place du Nouvel-Opéra. Un
d'eux se détache du groupe ; on lui bande ,
, les yeux. cc - Allez !» dit une voix grave.
il va.
Escorté par les trente inconnus, le nouveau
Colin-Maillard enfile la rue de la Paix, traverse
la place Vendôme et la rue Castiglione; tourne 1 :
droite dans la rue de Ri-voli, double la place de
la Concorde et remonte l'avenue des Champs-
Elysées. Une fois au Rond-Point : « -- Halte 1, »
dit encore la voix grave. « 'Victeire ! » crient en
chœur les trente âffidés. Colin-Maillard arrache
son bandeau et tend la main daas laquelle on lui
verse cinquante louis.
Ces cinquante louis, représentaient le montant
d'un pari fait entre deux membres du Sporting-
Club et dont l'objet était le trajet parcouru les
yeux bandés. Les trente personnes mystérieuses
étaient trente membres du même cercle, désl,,:;
ghés comme juges. - f i
Et voila. les plaisirs nocturnes de P8.J'j,s." en 1'&%
de grâce f872! , ^
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