Titre : Excelsior : journal illustré quotidien : informations, littérature, sciences, arts, sports, théâtre, élégances
Éditeur : [s. n.] (Paris)
Date d'édition : 1916-07-09
Contributeur : Lafitte, Pierre (1872-1938). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32771891w
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 09 juillet 1916 09 juillet 1916
Description : 1916/07/09 (A7,N2063). 1916/07/09 (A7,N2063).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k46066146
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-228
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 12/07/2016
A bâtons rompus
\ On n'a jamais prétendu qu'il ne- pleuvait
pas avant l'invention de l'artillerie, mais ce
n'est pas une raison pour qu'il n'y ait aucun
rapport entre le déluge d'eau dont nous souf-
frons depuis plus d'une semaine et le déluge
de feu qui se déverse sur les tranchées à un
nombre de kilomètres qui n'a que lé tort d'être
encore trop faible,
M. Angot ne veut pas qu'il y en ait. Qu'est-ce
que ça 'peut lui faire? Vous me direz que
M. Angot est directeur du bureau central mé-
téorologique. Certes, après les statisticiens il
n'y a pas d'hommes plus distingués que les
météorologistes. Seulement, je, voudrais qu'on
me montrât en quoi leur distinction influe sur
les météores dont nous avons à nous plaindre.
J'ai connu aussi un - météorologiste. Avant de
l'aire la moindre promenade, il consultait avec
soin son hygromètre, son baromètre, son plu-
viomètre, son anémomètre, et plusieurs autres
•appareils en mètre; après quoi, il disait en
souriant :
— Et maintenant, je vais prendre mon pe-
ipinomètre, c'est encore le plus sûr.
Et, si beau qu'il fît, il ne sortait jamais sans
son parapluie, seul moyen que toute sa science
lui eût enseigné de n'être pas mouillé.
J'ignore si M. Angot a quelque lien de pa-
renté avec la dame du même nom, si célèbre
dans l'opérette; mais je puis lui affirmer que
l'opérette a fourni bien des consolations aux
âmes sensibles tandis ,que la météorologie pa-
raît n'avoir d'autre but que de les en priver.
Quand nous marchons les pieds dans des
flaques d'eau et la tête sous la ra.faie sans
espoir de toucher le cœur d'un chauffeur d-e
taxi, n'est-ce pas une consolation de nous
cjire : __ Il fait humide, certes, mais puisque
nous devons cela au canon, c'est une façon
pour nous autres épaves laissées à l'arriere^de
participer aux souffrances de la guerre. '
Et quand le poilu est dans sa tranchée de
départ, attendant le moment de bondir au de-
hors, tandis que crachent au-dessus de sa tête
toutes les variétés de bouches à feu, n'eprouve-
t-il pas quelque satisfaction à penser : —
Qu'est-ce qu'ils doivent prendre comme bain
de pieds, ces mollusques de eivîts! -
La science représentée par l'homonyme de
Mme Angot nous interdit cette illusion-là; je
bénis une fois de plus le Ciel de n'avoir pas
fait de moi un savant.
Si, d'ailleurs, je passe de M. Angot à M., de
Max, ce n'est pas pour insinuer que celui-ci
aussi fait pleuvoir, mais pour remarquer que
la science semble s'être donné la mission de
nous ôter nos plus aimables distractions. Il
paraît que certains savante très forts, comme
M. ARgot lui-même, sont en train de découvrir
que tout ce qu'on nous ressasse depuis des siè-
cles sur les empereurs romains est un vaste
tissu de blagues, que Suétone était une ma-
nière d'Henri Rochefort de son temps, Tacite
une espèce d'Edouard Drumont, et J u vénal un
simple gobe-mouches ; que l'es histoires qu ils
ont perpétrées sur les douze Césars et les nom-
breux Augustes si connus au cirque avaient
juste la valeur des anecdotes que nous racon-
tons sur nos hommes politiques avant de leur
demander une recommandation,et qu en somme
il n'en faut pas croire un mot; que Néron, par
exemple, fut un brave jeune homme qui chan-
tait lui-même dans les représentations die bien-
faisance pour rémédier à la vie ehère, et qui,
voulant, à l'instar de M. Honnorat, diminuer
les frais d'éclairage, illuminait ses jardins
avec des chrétiens enflammes à seule fin de
faire des économies de torches; que Britanicus
est mort d'une indigestion de camomille, et
que la vieille Agrippine a succombé a. une 00-
lere rentrée un jour que son fils respectueux
lui avait dit : — Ne crie donc pas toujours
comme ça, maman, tu vas finir par ameuter
les voisins.
Ces savants ont peut-être raison; mais s ils
avaient eu raison deux siècles plus tôt., Racine
n'aurait pas écrit son Britannicus, en. sorte
que nous ne verrions pas aujourd'hui M. de
Max jouer Néron et arborer des manteaux à
traîne en guise de pyjama, et des bottines
d'aviateur cirées à la poussière d'étoile, ce qui
doit être fort1 gênant, dans un appartement.
Et si nous n'avions pas M. de Max pour nous
consoler des horreurs de la guerre, on peut
bien se demander ce que nous deviendrions, à
moins que M. Fabre ne se décidât à faire in-
carner Néron par M. de Max Dearly...
La. perte de Britctnnicus serait d'autant plus
regrettable que la pièce possède cette vertu
essentielle des chefs-d'œuvre,l'éterneUe actua-
lité. Ainsi, vendredi, au moment où Racine
parle avec tristesse des « déserts peuplés de
sénateurs », le public s'écria d'une seule voix ;
fe- Il v tenaient peut-être un comité secret!
Paul Dollfus.
Ce que l'on dit
En attendant...
Le rapport de l'amiral J ellicoë Isur la bataille
navale du Jutland est très ii-tiéressaîît : il rend
hommage à la bravoure des marins anglais et
rapporte d'admirables actes d'héroïsme. Il
prouve, de plus, la victoire remportée par la
flotte anglaise : mais, à l'heure qu'il est, il
était devenu à cet égard absolument inutile.
U,it philosophe grec démontrait le mouve-
ment en, marchant. La victoire anglaise se
prouve aussi simplement par tout ce qui s'est
passé depuis le jour de la bataille..
C'est, en effet, une illusion assez commune
dans le public que de s'imaginer que la vic-
toire sur mer consiste à couler à son adversaire
plus de bateaux qu'il ne vous en a coulés (c'est
le cas pour la flotte de l'amiral Jellicoë, 1nais
il demeure d'une importance secondaire).Quand
j'étais enfant, c'est ainsi que je me figurais les
batciilles. Un camarade et moi nous mettions
des soldats de plomb français à l'un des bouts
d'une table, des soldats de plomb prussiens à
l'autre bout. Après quoi chacun tirait dans les
troupes de l'adversaire à coups de billes. Ce-
lui' qui avait perdu lotis ses soldats avait
perdu. Celui qui en avait gardé, fÛt-ce un seul,
fIllXlil gagné.
Lct guerre) sur terre comme sur mer, ce n'est
pas ça. La victoire consiste à imposer sa vo-
lonté à son adversaire. Le prix n'est rien. Il
n-'.y « que le but qui importe. Celle définition,
est rude et inhumaine, mais c'est que la guerre,
en soi, est une chose qui n'a rien à voir avec
Vhunmmté.
Sur î)ter, le but est la, maîtrise des océans.
Il s'agit 4'e31J;pêcJwr les navires de -commerce
de it':e1\n.err¡:zi de les parcourir et de ravitailler
leur lJays. Et les navires de guerre ne servent
qu'à ça : à protég-er les bateaux de commerce
de leur nationalité et à attaquer ceux de la
nationalité adverse lfU à les empêcher de sortir.
La tentative de la flotte allemande a-t-elle
permis aux bâtime»ds de commerce de l'A lle-
magne de reprendre ta mer? Noii; ils sont plus
étroitement bloqués encore que par le passé.
Dans ces conditions Vaffaire est entendue :
la vietoire- est aux Anglais.
Pierre Mille.
C'est une histoire de marchés assez singulière dont
s'occupe, avec la ferme intention de Ja tirer au clair,
la commission de l'agriculture de la Chambre des
députés.
Il y est question d'achats de vins d'Espace et de
livraisons qui auraient été loin 4e donner satisfac-
tion. On y parle aussi d'une petite personnalité po-
litique dont l'iiitervtption n aurait pas été étrangère
à la conclusion de l'affaire.
Et ce parlementaire, qui se serait prétendu chargé
d'une mission en Espagne, n'en est pas à sa première
mésaventure. A deux reprises, dans une -aifaire de
casino puis lors d'un menu fait divers qui eut potir
théâtre une grande ville méditerranéenne, il a déjà
défrayé la chronique.
Ses collègues sont décidés, cette fois, à k jeter
carrément par-dessus bord dans le cas où ses... im-
prudences auraient dépassé les limites permises.
' Attendons.
***
On racornie sur la Jeune fiancée du prince de Ca2-
les, la princesse Yolande d'Italie, une amusante
anecdote. C'est un mot d'enfant d'une naïveté d'obser-
vation délicieuse et qui prend, à la veille de son ma-
riage avec l héritier du trône du Royaume-Uni, une
signification amusante et quasi prophétique.
Il y a quelques années, lorsque ^ les 'souverains
d'Italie vinrent rendre visite au roi Edouard et à
la reine Alexandra, ils revinrent chargés de ca-
deau:f, offerts par les monarques anglais à leurs en-
fants. Las très jeune (alors) YÓlande reçut une pou-
pée superbe et qui disait « papa, maman », une mer-
veille ! La petite Yolande, 'enchantee, s'empara aus-
sitôt -de ee cadeau ravissant, mais soudai-n- elle s'ar-
rêta, saisie d'un: doute, et elle s'écria, anxieuse ï
« Oh ! maman, est-ce que ma ■ poupée crie en an-
glais ? M ; ; -- - " " ; ; ' " : ; - ;
Demain - la princesse Yolande sera princesse d<à
Galles, et elle aura peut-être bientôt « une poupée î
qui criera en anglais » et qui en grandissant devien- „
dra sans doute, dans l'avenir; un roi d'Angleterre.
„ ^ ^ }!j
E.,rcelsior a déjà, soulevé la question du deuil de
guerre. \
Nous avons croisé hier, dans les Champs-Elysées,
une-jeune femme de qui le mari a été tué à Verdun.
Un long voile blanc la coiffait et qui, descendant *
jusqu'à ses hanches, l'enveloppait.
— Mon mari m'a fait promettre, avant de. ,partir, j
nous dit-elle, et si jamais l'honneur de mourir pour, |
son pays lui était échu, de ne pas porter son deuil, : j
ou, en tout cas, de ne pas porter de crêpe noir. ;
« Tu devras être fière de moi, me dit-il; je ne veux |
pas de ce triste et désagréable attirail funèbre qui I
pourrait faire croire que tu regrettes mon glorieux
sort. Toutes les femmes fières devraient au contraire |
se voiler de blanc : cette communion vestimentaire
serait un symbole de la beauté de notre sort... » Je f
lui ai obéi, sa sœur lui a obéi. Et dans ces voiles glo- j
rieux je marche, avec plus de fierté, et peut-être 1
moins de douleur.
Je la regardai partir, évoquant sous ses voiles
blancs une noble statue mouvante...
*** * ^
Vous vous rappelez cette petite baronne Lyska
Kostio, présentée à Paris par Louise Balthy et tÙt j
chroniqueur boulevardier ? Elle avait lancé cette |
mode du ventre en avant et du parapluie sous le \
bras, comme déambulent aujourd'hui les trottins qui
veulent se donner un air de dame. Lyska Kostio
était la reine du tango : elle avait fait abattre les
cloisons de son appartement de1 l'avenue du Bois,
afin d'en faire une immense salle de danse.
Et quelques-uns qui regrettent le temps passé.; se
demandaient parfois avec mélancolie en quelles Ar-
gentines, en quelles Roumanies s'en était retournée
la petite baronne du tango...
. Nous l'avons rencontrée, hier, avenue du Bois, *
sans parapluie, presque sans ventre, et sans un nuage
de poudre sur le visage. En serre-tête, un voile d'éta-
.mine bleu foncé; autour du corps, un sarreau sur
lequel était brodée une petite croix rouge. Elle nous
invita à visiter sa « nouvelle salle de bal ». Entre
les panneaux de Bakst et de Raulin dormaient pai-
siblement quelques convalescents de la guerre. La
même femme de chambr'e -qui préparait les cocktails
servait des tisanes...
Et cela nous a un peu raccommodé avec les ex-
danseuses exotiques de tangos et de maxixes..- -''
Ne désespérez jamais !
- Un soldat du 12" territorial, disparu en ',s-epttaibr'ë
1-914, et dont on était sans nouvelles depuis MUS,.
vient d'écr.ia'.e à -sa femme, qui habite près d'Amiens,,
qu'il était prisonnier en Allemagne.
Tout de même,, vingt-trois mois sans nouvelles,
c'est long, très long; et l'on serait curieux de con-
naître la raison de ce long silence.
/ ***
. Les Américains, qui ne s'étonnent pourtant de
rien, ont enfin un sujet d'émerveillement : c'est
Mlle, Kathleen Burke, secrétaire de l'Association,
des Femmes écossaises pour la création d'hôpitaux
de guerre à l'étranger.
Miss Burke, Française par sa mère, fait aux
Etats-Unis une tournée pour recueillir des fonds.
On lui a immédiatement donné le surnom de « Made*
moiselle Une livre à la Minute J). Elle parle avec une
volubilité fantastique : 260 mots en soixante se-
condes. Sa première conférence, en Floride, lui a
vaïia quinze mille dollars de souscription en vingt-
cinq minutes. , •
Sur le bateau qui l'am'enait en Amérique, elle a
ramassé mille dollars, et cinq cents dans son 'hÔtcl,;
le premier soir, avant 4e se coucher. A un banquet
de la Andrew's Society, elle 'entre sans se faite an-
noncer et, au dessert, en dix minutes, fait- cinq mille
dollars. -Parlant en français, ait Canada, sur le quai
de la gare, en attendant le train, elle recueille quatre
mille dollars. A Ottawa, elle parle du drapeau fran-
çais en des termes si chaleureux, qu'elle draine, ca
un instant, une petite fo-rtu,ne, et que son -speteh, sté-
nographié, est imprimé et va nous être envoyé, pa"
faît-3, «"poîir. qtè nous l'ilisérions dans les Eirés dç
leçons .ée nos enfants ». ' • ." : - -
Le Veilleur.
\ On n'a jamais prétendu qu'il ne- pleuvait
pas avant l'invention de l'artillerie, mais ce
n'est pas une raison pour qu'il n'y ait aucun
rapport entre le déluge d'eau dont nous souf-
frons depuis plus d'une semaine et le déluge
de feu qui se déverse sur les tranchées à un
nombre de kilomètres qui n'a que lé tort d'être
encore trop faible,
M. Angot ne veut pas qu'il y en ait. Qu'est-ce
que ça 'peut lui faire? Vous me direz que
M. Angot est directeur du bureau central mé-
téorologique. Certes, après les statisticiens il
n'y a pas d'hommes plus distingués que les
météorologistes. Seulement, je, voudrais qu'on
me montrât en quoi leur distinction influe sur
les météores dont nous avons à nous plaindre.
J'ai connu aussi un - météorologiste. Avant de
l'aire la moindre promenade, il consultait avec
soin son hygromètre, son baromètre, son plu-
viomètre, son anémomètre, et plusieurs autres
•appareils en mètre; après quoi, il disait en
souriant :
— Et maintenant, je vais prendre mon pe-
ipinomètre, c'est encore le plus sûr.
Et, si beau qu'il fît, il ne sortait jamais sans
son parapluie, seul moyen que toute sa science
lui eût enseigné de n'être pas mouillé.
J'ignore si M. Angot a quelque lien de pa-
renté avec la dame du même nom, si célèbre
dans l'opérette; mais je puis lui affirmer que
l'opérette a fourni bien des consolations aux
âmes sensibles tandis ,que la météorologie pa-
raît n'avoir d'autre but que de les en priver.
Quand nous marchons les pieds dans des
flaques d'eau et la tête sous la ra.faie sans
espoir de toucher le cœur d'un chauffeur d-e
taxi, n'est-ce pas une consolation de nous
cjire : __ Il fait humide, certes, mais puisque
nous devons cela au canon, c'est une façon
pour nous autres épaves laissées à l'arriere^de
participer aux souffrances de la guerre. '
Et quand le poilu est dans sa tranchée de
départ, attendant le moment de bondir au de-
hors, tandis que crachent au-dessus de sa tête
toutes les variétés de bouches à feu, n'eprouve-
t-il pas quelque satisfaction à penser : —
Qu'est-ce qu'ils doivent prendre comme bain
de pieds, ces mollusques de eivîts! -
La science représentée par l'homonyme de
Mme Angot nous interdit cette illusion-là; je
bénis une fois de plus le Ciel de n'avoir pas
fait de moi un savant.
Si, d'ailleurs, je passe de M. Angot à M., de
Max, ce n'est pas pour insinuer que celui-ci
aussi fait pleuvoir, mais pour remarquer que
la science semble s'être donné la mission de
nous ôter nos plus aimables distractions. Il
paraît que certains savante très forts, comme
M. ARgot lui-même, sont en train de découvrir
que tout ce qu'on nous ressasse depuis des siè-
cles sur les empereurs romains est un vaste
tissu de blagues, que Suétone était une ma-
nière d'Henri Rochefort de son temps, Tacite
une espèce d'Edouard Drumont, et J u vénal un
simple gobe-mouches ; que l'es histoires qu ils
ont perpétrées sur les douze Césars et les nom-
breux Augustes si connus au cirque avaient
juste la valeur des anecdotes que nous racon-
tons sur nos hommes politiques avant de leur
demander une recommandation,et qu en somme
il n'en faut pas croire un mot; que Néron, par
exemple, fut un brave jeune homme qui chan-
tait lui-même dans les représentations die bien-
faisance pour rémédier à la vie ehère, et qui,
voulant, à l'instar de M. Honnorat, diminuer
les frais d'éclairage, illuminait ses jardins
avec des chrétiens enflammes à seule fin de
faire des économies de torches; que Britanicus
est mort d'une indigestion de camomille, et
que la vieille Agrippine a succombé a. une 00-
lere rentrée un jour que son fils respectueux
lui avait dit : — Ne crie donc pas toujours
comme ça, maman, tu vas finir par ameuter
les voisins.
Ces savants ont peut-être raison; mais s ils
avaient eu raison deux siècles plus tôt., Racine
n'aurait pas écrit son Britannicus, en. sorte
que nous ne verrions pas aujourd'hui M. de
Max jouer Néron et arborer des manteaux à
traîne en guise de pyjama, et des bottines
d'aviateur cirées à la poussière d'étoile, ce qui
doit être fort1 gênant, dans un appartement.
Et si nous n'avions pas M. de Max pour nous
consoler des horreurs de la guerre, on peut
bien se demander ce que nous deviendrions, à
moins que M. Fabre ne se décidât à faire in-
carner Néron par M. de Max Dearly...
La. perte de Britctnnicus serait d'autant plus
regrettable que la pièce possède cette vertu
essentielle des chefs-d'œuvre,l'éterneUe actua-
lité. Ainsi, vendredi, au moment où Racine
parle avec tristesse des « déserts peuplés de
sénateurs », le public s'écria d'une seule voix ;
fe- Il v tenaient peut-être un comité secret!
Paul Dollfus.
Ce que l'on dit
En attendant...
Le rapport de l'amiral J ellicoë Isur la bataille
navale du Jutland est très ii-tiéressaîît : il rend
hommage à la bravoure des marins anglais et
rapporte d'admirables actes d'héroïsme. Il
prouve, de plus, la victoire remportée par la
flotte anglaise : mais, à l'heure qu'il est, il
était devenu à cet égard absolument inutile.
U,it philosophe grec démontrait le mouve-
ment en, marchant. La victoire anglaise se
prouve aussi simplement par tout ce qui s'est
passé depuis le jour de la bataille..
C'est, en effet, une illusion assez commune
dans le public que de s'imaginer que la vic-
toire sur mer consiste à couler à son adversaire
plus de bateaux qu'il ne vous en a coulés (c'est
le cas pour la flotte de l'amiral Jellicoë, 1nais
il demeure d'une importance secondaire).Quand
j'étais enfant, c'est ainsi que je me figurais les
batciilles. Un camarade et moi nous mettions
des soldats de plomb français à l'un des bouts
d'une table, des soldats de plomb prussiens à
l'autre bout. Après quoi chacun tirait dans les
troupes de l'adversaire à coups de billes. Ce-
lui' qui avait perdu lotis ses soldats avait
perdu. Celui qui en avait gardé, fÛt-ce un seul,
fIllXlil gagné.
Lct guerre) sur terre comme sur mer, ce n'est
pas ça. La victoire consiste à imposer sa vo-
lonté à son adversaire. Le prix n'est rien. Il
n-'.y « que le but qui importe. Celle définition,
est rude et inhumaine, mais c'est que la guerre,
en soi, est une chose qui n'a rien à voir avec
Vhunmmté.
Sur î)ter, le but est la, maîtrise des océans.
Il s'agit 4'e31J;pêcJwr les navires de -commerce
de it':e1\n.err¡:zi de les parcourir et de ravitailler
leur lJays. Et les navires de guerre ne servent
qu'à ça : à protég-er les bateaux de commerce
de leur nationalité et à attaquer ceux de la
nationalité adverse lfU à les empêcher de sortir.
La tentative de la flotte allemande a-t-elle
permis aux bâtime»ds de commerce de l'A lle-
magne de reprendre ta mer? Noii; ils sont plus
étroitement bloqués encore que par le passé.
Dans ces conditions Vaffaire est entendue :
la vietoire- est aux Anglais.
Pierre Mille.
C'est une histoire de marchés assez singulière dont
s'occupe, avec la ferme intention de Ja tirer au clair,
la commission de l'agriculture de la Chambre des
députés.
Il y est question d'achats de vins d'Espace et de
livraisons qui auraient été loin 4e donner satisfac-
tion. On y parle aussi d'une petite personnalité po-
litique dont l'iiitervtption n aurait pas été étrangère
à la conclusion de l'affaire.
Et ce parlementaire, qui se serait prétendu chargé
d'une mission en Espagne, n'en est pas à sa première
mésaventure. A deux reprises, dans une -aifaire de
casino puis lors d'un menu fait divers qui eut potir
théâtre une grande ville méditerranéenne, il a déjà
défrayé la chronique.
Ses collègues sont décidés, cette fois, à k jeter
carrément par-dessus bord dans le cas où ses... im-
prudences auraient dépassé les limites permises.
' Attendons.
***
On racornie sur la Jeune fiancée du prince de Ca2-
les, la princesse Yolande d'Italie, une amusante
anecdote. C'est un mot d'enfant d'une naïveté d'obser-
vation délicieuse et qui prend, à la veille de son ma-
riage avec l héritier du trône du Royaume-Uni, une
signification amusante et quasi prophétique.
Il y a quelques années, lorsque ^ les 'souverains
d'Italie vinrent rendre visite au roi Edouard et à
la reine Alexandra, ils revinrent chargés de ca-
deau:f, offerts par les monarques anglais à leurs en-
fants. Las très jeune (alors) YÓlande reçut une pou-
pée superbe et qui disait « papa, maman », une mer-
veille ! La petite Yolande, 'enchantee, s'empara aus-
sitôt -de ee cadeau ravissant, mais soudai-n- elle s'ar-
rêta, saisie d'un: doute, et elle s'écria, anxieuse ï
« Oh ! maman, est-ce que ma ■ poupée crie en an-
glais ? M ; ; -- - " " ; ; ' " : ; - ;
Demain - la princesse Yolande sera princesse d<à
Galles, et elle aura peut-être bientôt « une poupée î
qui criera en anglais » et qui en grandissant devien- „
dra sans doute, dans l'avenir; un roi d'Angleterre.
„ ^ ^ }!j
E.,rcelsior a déjà, soulevé la question du deuil de
guerre. \
Nous avons croisé hier, dans les Champs-Elysées,
une-jeune femme de qui le mari a été tué à Verdun.
Un long voile blanc la coiffait et qui, descendant *
jusqu'à ses hanches, l'enveloppait.
— Mon mari m'a fait promettre, avant de. ,partir, j
nous dit-elle, et si jamais l'honneur de mourir pour, |
son pays lui était échu, de ne pas porter son deuil, : j
ou, en tout cas, de ne pas porter de crêpe noir. ;
« Tu devras être fière de moi, me dit-il; je ne veux |
pas de ce triste et désagréable attirail funèbre qui I
pourrait faire croire que tu regrettes mon glorieux
sort. Toutes les femmes fières devraient au contraire |
se voiler de blanc : cette communion vestimentaire
serait un symbole de la beauté de notre sort... » Je f
lui ai obéi, sa sœur lui a obéi. Et dans ces voiles glo- j
rieux je marche, avec plus de fierté, et peut-être 1
moins de douleur.
Je la regardai partir, évoquant sous ses voiles
blancs une noble statue mouvante...
*** * ^
Vous vous rappelez cette petite baronne Lyska
Kostio, présentée à Paris par Louise Balthy et tÙt j
chroniqueur boulevardier ? Elle avait lancé cette |
mode du ventre en avant et du parapluie sous le \
bras, comme déambulent aujourd'hui les trottins qui
veulent se donner un air de dame. Lyska Kostio
était la reine du tango : elle avait fait abattre les
cloisons de son appartement de1 l'avenue du Bois,
afin d'en faire une immense salle de danse.
Et quelques-uns qui regrettent le temps passé.; se
demandaient parfois avec mélancolie en quelles Ar-
gentines, en quelles Roumanies s'en était retournée
la petite baronne du tango...
. Nous l'avons rencontrée, hier, avenue du Bois, *
sans parapluie, presque sans ventre, et sans un nuage
de poudre sur le visage. En serre-tête, un voile d'éta-
.mine bleu foncé; autour du corps, un sarreau sur
lequel était brodée une petite croix rouge. Elle nous
invita à visiter sa « nouvelle salle de bal ». Entre
les panneaux de Bakst et de Raulin dormaient pai-
siblement quelques convalescents de la guerre. La
même femme de chambr'e -qui préparait les cocktails
servait des tisanes...
Et cela nous a un peu raccommodé avec les ex-
danseuses exotiques de tangos et de maxixes..- -''
Ne désespérez jamais !
- Un soldat du 12" territorial, disparu en ',s-epttaibr'ë
1-914, et dont on était sans nouvelles depuis MUS,.
vient d'écr.ia'.e à -sa femme, qui habite près d'Amiens,,
qu'il était prisonnier en Allemagne.
Tout de même,, vingt-trois mois sans nouvelles,
c'est long, très long; et l'on serait curieux de con-
naître la raison de ce long silence.
/ ***
. Les Américains, qui ne s'étonnent pourtant de
rien, ont enfin un sujet d'émerveillement : c'est
Mlle, Kathleen Burke, secrétaire de l'Association,
des Femmes écossaises pour la création d'hôpitaux
de guerre à l'étranger.
Miss Burke, Française par sa mère, fait aux
Etats-Unis une tournée pour recueillir des fonds.
On lui a immédiatement donné le surnom de « Made*
moiselle Une livre à la Minute J). Elle parle avec une
volubilité fantastique : 260 mots en soixante se-
condes. Sa première conférence, en Floride, lui a
vaïia quinze mille dollars de souscription en vingt-
cinq minutes. , •
Sur le bateau qui l'am'enait en Amérique, elle a
ramassé mille dollars, et cinq cents dans son 'hÔtcl,;
le premier soir, avant 4e se coucher. A un banquet
de la Andrew's Society, elle 'entre sans se faite an-
noncer et, au dessert, en dix minutes, fait- cinq mille
dollars. -Parlant en français, ait Canada, sur le quai
de la gare, en attendant le train, elle recueille quatre
mille dollars. A Ottawa, elle parle du drapeau fran-
çais en des termes si chaleureux, qu'elle draine, ca
un instant, une petite fo-rtu,ne, et que son -speteh, sté-
nographié, est imprimé et va nous être envoyé, pa"
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