Titre : Le Pays de Retz : journal des communes et des mutualités de l'arrondissement de Paimboeuf, du Canton de Machecoul et des communes limitrophes, paraissant le dimanche
Éditeur : [s.n.] (Chauvé)
Éditeur : [s.n.][s.n.] (Paimboeuf)
Date d'édition : 1904-01-10
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32834456b
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 10 janvier 1904 10 janvier 1904
Description : 1904/01/10 (N51). 1904/01/10 (N51).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Description : Collection numérique : BIPFPIG44 Collection numérique : BIPFPIG44
Description : Collection numérique : BIPFPIG44 Collection numérique : BIPFPIG44
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k4586949d
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JO-87460
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 04/02/2018
LA LIBERTÉ !
—O—
En ce temps de tyrannie à ou
trance où notre pauvre France,
meurtrie et pantelante, n’a plus
même l’énergie de se révolter
contre ses bouchers qui la mènent
à l’abattoir, où vont l’égorger
Combes-Robespierrot et autres
bandits portés sur le pavoi par
l’horrible suffrage universel, il
est doux, il estsalutaire, pourtout
cœur bien pensant, d’aller se re
tremper aux sources mêmes du
libéralisme...
C’est l’antique noblesse, dont le
sein maternel a nourri le peuple
de France pendantjene sais com
bien de calendes, qui serra sur
son cœur tendre la liberté expi
rante et son jeune frère le patrio
tisme. La grande ombre dePiche-
gru et celle non moins imposante
de Dumouriez en ont tressailli
d’aise. Désormais, l’évocation du
patriotisme ne pourra plus se fai
re sans aupremierplan du tableau,
des princesses allemandes et des
fourgons anglais.
De vieilles badernes qui mon
tent assez bien à cheval, à l’aide
d’une chaise, ont refusé l’obéis
sance.Noble et salutaire exemple
pour nos pioupious !
St-Rémy, Leroy-La du rie, Por
tier, Cornulier-Lucinière, réunis
sez-vous en conseil de guerre pour
juger la France et ses petits sol
dats. Que celui qui dira rouge
quand vous direz jaune ait sa tête
sacrifiée à la bonne harmonie des
choses? La discipline quand vous
êtes les maîtres, mais la liberté
quand c’est votre tour d’obéir! Il
ne vous reste plus qu’à passer la
Manche et aller rejoindre votre
vieux copain, le noble Estherazy,
que le supplément illustré de la
feuille du père du Lac sacra jadis:
digne émule du chevalier sans peur
et sans reproches.
Oh ! la ! la ! quel honneur pour
les pauvres cendres du brave che
valier !
J. B.
CARTES BE VISITE
1 fr. 50 et 2 fr.
à l’Imprimerie 4b BQUYRQM
à Chauvé.
litotes de ta Semaine
VENDREDI I e1 ’ JANVIER 1904.
, Paris. — A l’Elysée. — Le président de
la République a reçu, à l’occasion du nou-
jvel an, les ministres, les membres des bu
reaux du Sénat et de la Chambre, les dé
légations de l’armée et des corps consti
tués.
j De nombreux télégrammes de souverains
étrangers, de colonies françaises et de grou
pes républicains des départements sont
parvenus à l’Elysée.
| Les étudiants espagnols. — Le président
et le secrétaire de l’Union des étudiants de
■Madrid sont arrivés à Paris ; le reste de la
délégation débarquera à la gare d’Orsay
samedi matin.
I Départements. — Le transport la
j«c Vienne ». — La préfecture de Toulon a
reçu plusieurs télégrammes confirmant
que la Vienne a été aperçue à 120 milles
'au large de Gibraltar, ayant une avarie de
'machine et marchan* à une allure très len
te. jô . .
! Les troubles arSenneboni. ■— Le minis
tère de l’intérieur a prescrit une enquête
immédiate et des arrestations au sujet des
troubles d’Hennebont. L’instruction aura
lieu aujourd’hui et dimanche.
ï Etranger. — La France et le Siam. —
L’agence Havas communique la note sui
vante : •
! « Le ministre du Siam ayant accepté les
bases d’un accord complémentaire posées
f iar le gouvernement français, la conven-
ion du 7 octobre 1902 a été prorogée jus
qu’au 15 février 1904».
Le conflit russo-japonais. — On annonce
officiellement de Saint-Pétersbourg que,
dans sa dernière note, le Japon n'a posé
aucune condition relativement au délai
dans lequel la Russie devrait faire parve
nir sa réponse à cette note.
.samedi 2 janvier 1904
Paris. — Les Caisses d'épargne. —
Voici le détail des opérations concernant
les Caisses d’épargne ordinaires, du 21 au
31 décembre 1903. Dépôts de fonds, 3 mil
lions 448,998 59. Retraits de fonds, 0 mil
lions 388,558 45. Soit un excédent de re
traits de 2,899,559 88.
( Ce qui porte l’excédent de retraits, du
I e1 ' janvier au 31 décembre 1903, à plus de
198 millions.
(' Mort delà princesse Mathilde. —i.u pr.n-
! cesse Mathilde est entrée en agonie, same
di, après-midi et est morte à 7 heures du
soir.
Départements. — Attentat contre un
préfet. — Un attentat a été commis contre
M. Mascle, prélet de la Loire. Un nommé
Teyssier,ancien brigadier du train des équi
pages en Algérie, a tiré deux coups, de re
volver chargé de chevrotines sur la terras
se de la préfecture, ou le préfet a l’habitu
de de se promener après son déjeuner.
Etranger.— Tamponnement de trains.
Le train 801 a tamponné un train de mar
chandise ce matin, à dix heures, près do
l’usine Paulilles, près Cerbère.
11 y a de nombreux morts et blessés.
La catastrophe de Chicago, — L’électri
cien du théâtre a été arrêté. II a déclaré
ue ce sont des étincelles qui avaient jailli
e la lampe à arc qu’il employait pour les
effets de scène qui enflammèrent la drape
rie du rideau.
.< DIMANCHE 3 JANVIER 1904
Paris. — TJne démission. — M. juge
d’instruction à Paris a envoyé sa démission
à M. Vallé, garde des sceaux.
Le juge d’instruction a déclaré que ce
n’était pas à propos de l’affaire Bousquet
qu'il avait donné sa démission, mais bien
pour des raisons de santé.
Le capitaine Fouque. — La famille du
capitaine Fouque vient de recevoird’excel-
lentes nouvelles du jeune officier; le
compagnon de Marchand à Fachoda est
complètement remis des blessures qu il a
reçues en combattant les Touareg.
Départements. — L’affaire de Tours.
— Le parquet de Tours s’est transporté à
l’asile d’aliénés pour la reconstitution de
la scène de violence au cours de laquelle
le malheureux Méchin a succombé ; quatre
gardiens ont été arrêtés.
Troubles à Eenneboni. — Les habitants
d'Ilennebont, victimes des désordres de
mercredi, ont été entendus par le juge
d instruction.
Trois arrestations ont été opérées parmi
les grévistes.
Etrangers. — Traité d’arbitrage anglo-
italien. — Un traité d’arbitrage vient d'ê
tre arrêté en principe entre l’Angleterre et
l’Italie.
It peut être signé prochainement, et le
sera sans doute dans quelques jours.
Ce traité, assure-t-on, suivra les lignes du
traité anglo-français du 14 octobre,"et ren
fermera probablement le même nombre
d’articles.
LUNDI 4 JANVIER 1904
Paris.— Démission retirée. —M. Gan-
neval,juge d’instruction vient d’adresser
une lettre au garde des sceaux dans la
quelle il déclare retirer sa démission pour
protester contre les commentaires dont
elle a été l’objet.
L'affaire Dreyfus. — Le bruit court
que le conseil de guerre chargé de ju
ger l’ex-capitaine Dreyfus pour'la troisiè
me fois serait celui du dix-nuhîème corps
d’armée, à Bordeaux.
Départements. — Les grèves. — On té-
légraphiede Béziers que deux mille travail
leurs agricoles de la région se sont mis en
grève sur le retus des propriétaires d ac
corder un salaire de 3 francs pour la jour
née de travail de 6 heures.
—On télégraphie de Lyon que les tisseurs
et tisseuses,augmentés d’un grand nombre
de manifestants non grévistes, ont par-,
couru le centre de la ville, ayant à leur
tète MM. Krauss et de Pressensé, députés. Il
% ’y a pas eu d’incident. j
Étranger. — La catastrophe de Chicago.
— Le nombre des personnes qui ont péri
dans l’incendie est définitivement fixé à
587. Dix cadavres ne sont pas encore re
connus. 1
r - ?
! La révolution à Saint-Domingue. — Les
insurgés d’Azua assiègent la capitale.
C’est l’armée du général Jimenez, can
didat à la présidence aux élections de
ce mois-ci, qui assiège dans Saint Domin-,
gue le général Morales, chef provisoire du
pouvoir exécutif. !
i A Panama. — On a pris les mcsuies né- 1
cessaires pour transporter des troupes et
des approvisionnements de New-York et do
San-Francisco, dans l’isthme de Panama, j
, On étudie les plans pour la construction
de casernes et de magasins ; 800,990 dol-j
lars seront affectés à ces travaux. >
1 MARDI 5 JANVIER 1904
Paris. — Conseil des ministres. — Le
conseil des ministres s’est occupé desques-;
tions que soulève la rentrée des Chambres
et a expédié les affaires courantes. |
; Déplacements ministériels. — Le minis
tre de la guerre est parti mardi soir pour
Dijon, où il assistera au mariage de son fils
qui doit avoir lieu samedi. Il ne rentrera à
.Paris que dans le courant de la semaine
prochaine.
, — M. Combes est parti mardi soir pour
passer deux jours dans la Charente-Infé
rieure. I
_M. Rouvier quittera Paris mercredi et
restera absent jusqu’à la lin de la semaine.'
— On nous télégraphie de Falaise que M.J
Turgis, sénateur républicain-progressiste!
du Calvados, est gravement malade et que
son état inspire de vives inquiétudes. |
• Départements. — Les grèves. — Mardi
matin une nouvelle grève a éclaté à lien-
nebont, celle des bateliers. Une gabarre,
est coulée prés du pont d’Hennebont, mais
on isnore si c’est un fait de grève ; on
ignore aussi quelles sont les revendica-j
tions des grévistes.
A la recherche de la Vienne. — Le mi-J
nistre de la marine a reçu la dépêche sui
vante de Gibraltar : I
Gibraltar, 9 heures soir. — Galilée, venu
pour compléter charbon, appareillera de
main mardi à quatre heures soir pour ex
ploration large Saint-Vincent. |
Etranger. —En Extrême-Orient. — La
réponse de la Ilussieà la note japonaise
n’est pas encore parvenue. Les préparatifs
pour l’embarquement de deux divisions se
poursuivent activement. |
■ La révolution à Saint-Domingue. — Le
croiseur français Troude et les croiseurs
allemands Vineta Gazel et Panlher sont
arrivés à Port-au-Prince. Ils viennent récla
mer la mise en liberté immédiate du di
recteur et du haut personnel de la Banque
d’Haïti, qui avaient été arrêtés arbitraire
ment.
MERCREDI 6 JANVIER 1904.
Paris. — M. Millerand, —La Fédéra
tion socialiste de la Seine, appartenant au
parti socialiste français (nuance Jaurès ),\
vient de voter l’exclusion de M. Mille-'
rand. . |
Le concours agricole. — Le ministère de
l’agriculture communique la note suivan
te : |
Le concours général agricole de Paris se
tiendra, en 1904. à la Galerie des Machines,!
du lundi 29 février au mardi 8 mars I
La censure. — M. Gérault-Richard vient
de recevoir une lettre du ministre de r ins
truction publique l’informant qu’il vient
de lever l’interdiction parla censure de
Ces Messieurs, la pièce de M. Georges An-
cev . i
Départements. — Les grèves de Lyon. \
— Les (députés de Pressensé et Krauss on^
rendu visite hier aux vingt-deux patrons;
tisseurs dont les usines chôment actuelle-!
ment. Deux seulement ont accepté une’
partie des revendications ouvrières, et un
seul a consenti à traiter avec le syndicat
des tisseurs.
La neige.'— De Prades jusqu’à îvvvg-
Madame, de nombreux fils télégrapL-- -,
et téléphoniques se sont rompus sous le
poids de la neige. Les communications
postales sont interrompues dans les can
tons d’OIette, Mont-Louis. Saillagouseet une
partie du canton de Prades. ,
Etranger. — L'expédition du Thibet.
— Une note communiquée aux journaux
dit que d’après les renseignements fournis
par le colonel Younghusband, sa mission
doit arriver le mois prochain àGyangtsee,
centre important qui est le but de la mis
sion. On ne s’attend à aucun obstacle de
la part des Thibétains, au moins jusqu’aux
approches de Gyangtse. —>
EN EXTRÊME-ORIENT j|
Les négociations
On communique, sous toutes réserves,
et à titre de document, une longue dépê
che sur les vues des milieux japonais dans-
les négociations en cours et sur la marche
de ces négociations.
Après avoir rapporté que la Russie, qui
dans le courant du mois d’octobre aurait
fait certaines concessions acceptées par le
Japon, serait revenue sur ses décisions et
aurait pris une attitude telle qu’elle ne
laissaitque peu d’espoir au gouvernement
japonais d’arriver à une entente satisfai
sante, la dépêche résume ainsi les négo
ciations qui ont eu lieu depuis que la crise
est devenue aiguë.
Première note japonaise
Le Japon, voyant que la Russie ne sepréè
pare pas, à la date fixée par elle-même à
évacuer la Mandchourie et songe au con
traire à s’avancer en Corée demande à la
Russie de : Ü
I- lo S’engager mutuellement à respecter
i’indépendance et l’intégrité territoriale do
la Chine et de la Corée,
ij 2° S’engager à reconnaître réciproque
ment : le Japon, les intérêts spéciaux de
la Russie en Mandchourie, la Russie, les
intérêts spéciaux du Japon en Corée. ç
3° S’engager mutuellement à ne pas en-,
freindre : le Japon, les droits et immuni
tés commerciaux acquis par la Russie' ^
| Le Japon, en faisant à la Russie cette
troisième proposition, ne voulait pas seu
lement garantir ses droit? acquis en Mand
chourie et les droits acquis de la Russie eri
Corée, mais voulait également consacrer
par là le principe de l’égalité de traitement
ae toutes les nations en matière commer
ciale. j
,1 Réponse russe
1 La Russie refuse d’examiner la question
de la Mandchourie avec le Japon et aurait
présenté comme contre-proposition une
clause créant une zone neutre allant de la
frontière sino-coréennne jusqu’à Wong-
Ping-Yang à l’est et à Ping-Yang à l’ouest.
Cette clause ferait entrer dans la zone
neutre presque le tiers de toute la Corée.
Deuxième note japonaise j
f Le Japon répond qu’ayant dans la zone!
que la Russie propose de neutraliser des
intérêts prépondérants, il ne peut accepter
la proposition de la Russie pour les deux
raisons suivantes :
■j f® L’installation définitive de la Russid
en Mandchourie serait une menace perma- j
nente contre l'indépendance de la Corée,
que le Japon doit défendre à tout prix, car
ï a “dorée est l’avant-poste de ses lignes de
Réponse et le salut de cette péninsule est
tme condition sine qud non de sa propre
Sécurité :
1 2° Le Japon a, comme toutes les autres ,
puissances, des droits et des immunités en.
Mandchourie, en vertu de ses traités avec
la Chine.
Il ne saurait laisser ces droits et ces im-;
munités à la merci de la Russie. ■!
imwrifimsaifwpiBBiiiiwii ;i m
FEUILLETON DU “PAYS DE RETZ”
du 10 Janvier 1903
_ N° 34 ===== ^
LA
BELLE P0RNICÀÎSE
PREMIÈRE PARTIE
RÉCITS DE LA GRANDE-GUERRE
Y {Suite)
La petite troupe, se composant d’envi
ron 700 hommes, arriva à Chéméré vers
midi. La forêt était tout près, à deux
kilomètres à peine et le commandant
orit ses dispositions pour l’explorer. Il
interrogea les habitants du bourg qui ne
mi donnèrent que des renseignements
vagues et contradictoires. En prévision
l’un séjour prolongé dans la forêt, il
l’occupa des vivres, mais s’aperçut que,
lans toutle bourg et les fermes voisines,
1 lui serait difficile de trouver un litre
Ide blé ou une livre de farine. Par ces
emps de famine, les habitants en étaient
lénués ou cachaient soigneusement le
>eu qui leur restait.
Avec les vivres apportés de Pornic,
e commandant vit qu’il ne pourrait te-
îir longtemps, mais il ne se découragea
pas et s’aventura le soir même dans la
forêt.
Dans les sentiers tortueux et détrem
pés la petite troupe ne rencontrait âme
qui vive. Le gibier même, qui, pourtant,
ne devait pas être rare, se cachait à son
approche et on désespéra vite de faire
bonne chasse. A défaut de brigands, on
se serait pourtant bien contenté de quel
que biche ou sanglier voire même de
lapins, qui de tous temps ont pullulé
dans la forêt et dans les champs voisins.
Cela aurait amélioré l’ordinaire, qui en
avait grand besoin.
Dans la journée il avait fait une cha
leur torride, avant-courière de l’orage
qui, en effet, éclata un peu avant la nuit.
On rebroussa chemin et on se rallia
sur la tour de Princé, qui, située sur la
lisière, au sud, domine toute la forêt. Au
pied de la tour est un antique manoir
aux murs épais, dans les vastes salles
duquel une grande partie de la troupe
put se loger, tandis que l’autre trouvait
asile dans les bâtiments d’une ferme
voisine.
On coucha sur la planche, ou sur la
terre nue, car on ne put trouver ni paille,
ni foin, ou plutôt on ne se coucha pas.
La plupart passèrent leur nuit à fumer
et à chanter. Au petit jour, exténués de
fatigue, comme après une longue marche,
tous reprirent tristement leur place dans
le rang, et précédée de ses éclaireurs et
de ses tambours silencieux, la petite
troupe des patriotes s’ébranla. Dans les
étroits sentiers de la forêt noire et mys
térieuse, ils défilèrent à laqueue leu leu,
se ralliant aussitôt quils débouchaient
surun chemin, n’osant pas se disperser
de peur que chaque détachement se
krouvât trop faible, dans le cas! d’une
surprise.
Vers midi, on fit halte au milieu d’une
clairière et les officiers tinrent conseil
sur la tactique à suivre.
On décida de continuer l’exploration
de la forêt, dans l’espoir que l’on finirait
par mettre la main sur quelque vendéen
(qui découvrirait la retraite des autres.
La forêt fut donc battue et rebattue
dans sa partie nord, mais sans résultat.
A la nuit, c’est-à-dire sur les huit
heures du soir, la troupe républicaine
qui ne voulait pas coucher en pleine
forêt de peur d’une surprise, se trouva
sur la lisière, du côté de Rouans.
Les bâtiments d’un métayer servaient
d’abri pour les officiers, tandis que
la plupart des hommes passèrent la nuit
à la belle étoile.
Le métayer était un homme d’une qua
rantaine d’années qui, devant cette in
vasion de militaires, tremblait comme la
feuille au vent. Sa femme, au contraire,
saisissant contraste, de quelques ann ées
plus jeune que lui, restait impassible et
comme indifférente, allant et venant
comme si de rien n’était.
— Comment t’appelles-tu ? demanda
au fermier le commandant Babain.
— Collinet, pour vous servir, mon
seigneur.
— Et je vois qui tu es, car tu me dé
cernes un titre qui ne me va pas, qui
d’ailleurs ne va plus à personne. Je vois
que tu es bien en retard et que tu ne sais
probablement pas que nous sommes en
République, qui a aboli les titres de no
blesse. Je n’y ai jamais eu droit à ces ti
tres, et je m’en flatte, car c’est le sang
roturier qui régénérera le pays.
Collinet, appelle-moi citoyen, c’est le
plus beau titre dont un homme puisse
se prévaloir.
Collinet, toujours tremblant, se grat
tait l’oreille et restait bouebe bée.
— Or donc, Collinet’, je vois que tu
n’es point un méchant homme et je veux
qu’il ne te soit fait aucun mal. Rassure-
toi donc, pas un de tes cheveux ne tom
bera de ma part. Mais à la guerre com
me à la guerre et donnant donnant. Si
tu tiens à ta tête, tu vas répondre à mes
questions, sans sourciller et sans dé
tour. As-tu compris ?
Collinet fit un geste vague que le com
mandant voulutbien interpréter pour
un assentiment.
— Et pendant ce temps-là la char
mante citoyenne que tu as choisi pour
compagne, va nous préparer un frichti,
fit le commandant, dans le langage am
poulé qui était de mode à cette époque.
— Un frichti ! j’comprenons, mons...
citoyen, mais avec quoi en faire, bon
sang 1
— Mais avec ce qu’il y aura ! Nous ne
sommes pas difficiles, va! Il ne nous faut
pas trente-six plats, ni une douzaine de
verres à chacun, comme sur la table des
ci-devants !
— Mais j’avons rin de rin, mon... ci
toyen.
— Voyons! ni pain, ni viande, ni beur
re, ni fromage, ni vin, ni eau, tu te
moques de nous, Collinet. Prends garde.
Ta tête est en jeu.
— Mais quand je vous dis 11
— On ne dit plus vous à personne,
depuis que l’on est sous le régime de
l’égalité. Et toi que manges-tu donc,
Collinet ?
— Sauf votre... excuse!., ton respect,
j’mangions des graux depuis queuque
temps... C’est fait avec de la farine de
blé noir... une espèce de bouillie qu’on
fait cuire.
— Oui, j’ te comprends, de la bouillie
pour les chats. Enfin s’il n’y a que ça il
faut bien s’en contenter !
— Pardon, excuse ! mais il n’y en a
plus de la farine de blé-noir.
— Que vas-tu donc manger ce soir,
misérable? fit le commandant en lui
sautant à la gorge.
(.A suivre ) Julien Bouvron.
—O—
En ce temps de tyrannie à ou
trance où notre pauvre France,
meurtrie et pantelante, n’a plus
même l’énergie de se révolter
contre ses bouchers qui la mènent
à l’abattoir, où vont l’égorger
Combes-Robespierrot et autres
bandits portés sur le pavoi par
l’horrible suffrage universel, il
est doux, il estsalutaire, pourtout
cœur bien pensant, d’aller se re
tremper aux sources mêmes du
libéralisme...
C’est l’antique noblesse, dont le
sein maternel a nourri le peuple
de France pendantjene sais com
bien de calendes, qui serra sur
son cœur tendre la liberté expi
rante et son jeune frère le patrio
tisme. La grande ombre dePiche-
gru et celle non moins imposante
de Dumouriez en ont tressailli
d’aise. Désormais, l’évocation du
patriotisme ne pourra plus se fai
re sans aupremierplan du tableau,
des princesses allemandes et des
fourgons anglais.
De vieilles badernes qui mon
tent assez bien à cheval, à l’aide
d’une chaise, ont refusé l’obéis
sance.Noble et salutaire exemple
pour nos pioupious !
St-Rémy, Leroy-La du rie, Por
tier, Cornulier-Lucinière, réunis
sez-vous en conseil de guerre pour
juger la France et ses petits sol
dats. Que celui qui dira rouge
quand vous direz jaune ait sa tête
sacrifiée à la bonne harmonie des
choses? La discipline quand vous
êtes les maîtres, mais la liberté
quand c’est votre tour d’obéir! Il
ne vous reste plus qu’à passer la
Manche et aller rejoindre votre
vieux copain, le noble Estherazy,
que le supplément illustré de la
feuille du père du Lac sacra jadis:
digne émule du chevalier sans peur
et sans reproches.
Oh ! la ! la ! quel honneur pour
les pauvres cendres du brave che
valier !
J. B.
CARTES BE VISITE
1 fr. 50 et 2 fr.
à l’Imprimerie 4b BQUYRQM
à Chauvé.
litotes de ta Semaine
VENDREDI I e1 ’ JANVIER 1904.
, Paris. — A l’Elysée. — Le président de
la République a reçu, à l’occasion du nou-
jvel an, les ministres, les membres des bu
reaux du Sénat et de la Chambre, les dé
légations de l’armée et des corps consti
tués.
j De nombreux télégrammes de souverains
étrangers, de colonies françaises et de grou
pes républicains des départements sont
parvenus à l’Elysée.
| Les étudiants espagnols. — Le président
et le secrétaire de l’Union des étudiants de
■Madrid sont arrivés à Paris ; le reste de la
délégation débarquera à la gare d’Orsay
samedi matin.
I Départements. — Le transport la
j«c Vienne ». — La préfecture de Toulon a
reçu plusieurs télégrammes confirmant
que la Vienne a été aperçue à 120 milles
'au large de Gibraltar, ayant une avarie de
'machine et marchan* à une allure très len
te. jô . .
! Les troubles arSenneboni. ■— Le minis
tère de l’intérieur a prescrit une enquête
immédiate et des arrestations au sujet des
troubles d’Hennebont. L’instruction aura
lieu aujourd’hui et dimanche.
ï Etranger. — La France et le Siam. —
L’agence Havas communique la note sui
vante : •
! « Le ministre du Siam ayant accepté les
bases d’un accord complémentaire posées
f iar le gouvernement français, la conven-
ion du 7 octobre 1902 a été prorogée jus
qu’au 15 février 1904».
Le conflit russo-japonais. — On annonce
officiellement de Saint-Pétersbourg que,
dans sa dernière note, le Japon n'a posé
aucune condition relativement au délai
dans lequel la Russie devrait faire parve
nir sa réponse à cette note.
.samedi 2 janvier 1904
Paris. — Les Caisses d'épargne. —
Voici le détail des opérations concernant
les Caisses d’épargne ordinaires, du 21 au
31 décembre 1903. Dépôts de fonds, 3 mil
lions 448,998 59. Retraits de fonds, 0 mil
lions 388,558 45. Soit un excédent de re
traits de 2,899,559 88.
( Ce qui porte l’excédent de retraits, du
I e1 ' janvier au 31 décembre 1903, à plus de
198 millions.
(' Mort delà princesse Mathilde. —i.u pr.n-
! cesse Mathilde est entrée en agonie, same
di, après-midi et est morte à 7 heures du
soir.
Départements. — Attentat contre un
préfet. — Un attentat a été commis contre
M. Mascle, prélet de la Loire. Un nommé
Teyssier,ancien brigadier du train des équi
pages en Algérie, a tiré deux coups, de re
volver chargé de chevrotines sur la terras
se de la préfecture, ou le préfet a l’habitu
de de se promener après son déjeuner.
Etranger.— Tamponnement de trains.
Le train 801 a tamponné un train de mar
chandise ce matin, à dix heures, près do
l’usine Paulilles, près Cerbère.
11 y a de nombreux morts et blessés.
La catastrophe de Chicago, — L’électri
cien du théâtre a été arrêté. II a déclaré
ue ce sont des étincelles qui avaient jailli
e la lampe à arc qu’il employait pour les
effets de scène qui enflammèrent la drape
rie du rideau.
.< DIMANCHE 3 JANVIER 1904
Paris. — TJne démission. — M. juge
d’instruction à Paris a envoyé sa démission
à M. Vallé, garde des sceaux.
Le juge d’instruction a déclaré que ce
n’était pas à propos de l’affaire Bousquet
qu'il avait donné sa démission, mais bien
pour des raisons de santé.
Le capitaine Fouque. — La famille du
capitaine Fouque vient de recevoird’excel-
lentes nouvelles du jeune officier; le
compagnon de Marchand à Fachoda est
complètement remis des blessures qu il a
reçues en combattant les Touareg.
Départements. — L’affaire de Tours.
— Le parquet de Tours s’est transporté à
l’asile d’aliénés pour la reconstitution de
la scène de violence au cours de laquelle
le malheureux Méchin a succombé ; quatre
gardiens ont été arrêtés.
Troubles à Eenneboni. — Les habitants
d'Ilennebont, victimes des désordres de
mercredi, ont été entendus par le juge
d instruction.
Trois arrestations ont été opérées parmi
les grévistes.
Etrangers. — Traité d’arbitrage anglo-
italien. — Un traité d’arbitrage vient d'ê
tre arrêté en principe entre l’Angleterre et
l’Italie.
It peut être signé prochainement, et le
sera sans doute dans quelques jours.
Ce traité, assure-t-on, suivra les lignes du
traité anglo-français du 14 octobre,"et ren
fermera probablement le même nombre
d’articles.
LUNDI 4 JANVIER 1904
Paris.— Démission retirée. —M. Gan-
neval,juge d’instruction vient d’adresser
une lettre au garde des sceaux dans la
quelle il déclare retirer sa démission pour
protester contre les commentaires dont
elle a été l’objet.
L'affaire Dreyfus. — Le bruit court
que le conseil de guerre chargé de ju
ger l’ex-capitaine Dreyfus pour'la troisiè
me fois serait celui du dix-nuhîème corps
d’armée, à Bordeaux.
Départements. — Les grèves. — On té-
légraphiede Béziers que deux mille travail
leurs agricoles de la région se sont mis en
grève sur le retus des propriétaires d ac
corder un salaire de 3 francs pour la jour
née de travail de 6 heures.
—On télégraphie de Lyon que les tisseurs
et tisseuses,augmentés d’un grand nombre
de manifestants non grévistes, ont par-,
couru le centre de la ville, ayant à leur
tète MM. Krauss et de Pressensé, députés. Il
% ’y a pas eu d’incident. j
Étranger. — La catastrophe de Chicago.
— Le nombre des personnes qui ont péri
dans l’incendie est définitivement fixé à
587. Dix cadavres ne sont pas encore re
connus. 1
r - ?
! La révolution à Saint-Domingue. — Les
insurgés d’Azua assiègent la capitale.
C’est l’armée du général Jimenez, can
didat à la présidence aux élections de
ce mois-ci, qui assiège dans Saint Domin-,
gue le général Morales, chef provisoire du
pouvoir exécutif. !
i A Panama. — On a pris les mcsuies né- 1
cessaires pour transporter des troupes et
des approvisionnements de New-York et do
San-Francisco, dans l’isthme de Panama, j
, On étudie les plans pour la construction
de casernes et de magasins ; 800,990 dol-j
lars seront affectés à ces travaux. >
1 MARDI 5 JANVIER 1904
Paris. — Conseil des ministres. — Le
conseil des ministres s’est occupé desques-;
tions que soulève la rentrée des Chambres
et a expédié les affaires courantes. |
; Déplacements ministériels. — Le minis
tre de la guerre est parti mardi soir pour
Dijon, où il assistera au mariage de son fils
qui doit avoir lieu samedi. Il ne rentrera à
.Paris que dans le courant de la semaine
prochaine.
, — M. Combes est parti mardi soir pour
passer deux jours dans la Charente-Infé
rieure. I
_M. Rouvier quittera Paris mercredi et
restera absent jusqu’à la lin de la semaine.'
— On nous télégraphie de Falaise que M.J
Turgis, sénateur républicain-progressiste!
du Calvados, est gravement malade et que
son état inspire de vives inquiétudes. |
• Départements. — Les grèves. — Mardi
matin une nouvelle grève a éclaté à lien-
nebont, celle des bateliers. Une gabarre,
est coulée prés du pont d’Hennebont, mais
on isnore si c’est un fait de grève ; on
ignore aussi quelles sont les revendica-j
tions des grévistes.
A la recherche de la Vienne. — Le mi-J
nistre de la marine a reçu la dépêche sui
vante de Gibraltar : I
Gibraltar, 9 heures soir. — Galilée, venu
pour compléter charbon, appareillera de
main mardi à quatre heures soir pour ex
ploration large Saint-Vincent. |
Etranger. —En Extrême-Orient. — La
réponse de la Ilussieà la note japonaise
n’est pas encore parvenue. Les préparatifs
pour l’embarquement de deux divisions se
poursuivent activement. |
■ La révolution à Saint-Domingue. — Le
croiseur français Troude et les croiseurs
allemands Vineta Gazel et Panlher sont
arrivés à Port-au-Prince. Ils viennent récla
mer la mise en liberté immédiate du di
recteur et du haut personnel de la Banque
d’Haïti, qui avaient été arrêtés arbitraire
ment.
MERCREDI 6 JANVIER 1904.
Paris. — M. Millerand, —La Fédéra
tion socialiste de la Seine, appartenant au
parti socialiste français (nuance Jaurès ),\
vient de voter l’exclusion de M. Mille-'
rand. . |
Le concours agricole. — Le ministère de
l’agriculture communique la note suivan
te : |
Le concours général agricole de Paris se
tiendra, en 1904. à la Galerie des Machines,!
du lundi 29 février au mardi 8 mars I
La censure. — M. Gérault-Richard vient
de recevoir une lettre du ministre de r ins
truction publique l’informant qu’il vient
de lever l’interdiction parla censure de
Ces Messieurs, la pièce de M. Georges An-
cev . i
Départements. — Les grèves de Lyon. \
— Les (députés de Pressensé et Krauss on^
rendu visite hier aux vingt-deux patrons;
tisseurs dont les usines chôment actuelle-!
ment. Deux seulement ont accepté une’
partie des revendications ouvrières, et un
seul a consenti à traiter avec le syndicat
des tisseurs.
La neige.'— De Prades jusqu’à îvvvg-
Madame, de nombreux fils télégrapL-- -,
et téléphoniques se sont rompus sous le
poids de la neige. Les communications
postales sont interrompues dans les can
tons d’OIette, Mont-Louis. Saillagouseet une
partie du canton de Prades. ,
Etranger. — L'expédition du Thibet.
— Une note communiquée aux journaux
dit que d’après les renseignements fournis
par le colonel Younghusband, sa mission
doit arriver le mois prochain àGyangtsee,
centre important qui est le but de la mis
sion. On ne s’attend à aucun obstacle de
la part des Thibétains, au moins jusqu’aux
approches de Gyangtse. —>
EN EXTRÊME-ORIENT j|
Les négociations
On communique, sous toutes réserves,
et à titre de document, une longue dépê
che sur les vues des milieux japonais dans-
les négociations en cours et sur la marche
de ces négociations.
Après avoir rapporté que la Russie, qui
dans le courant du mois d’octobre aurait
fait certaines concessions acceptées par le
Japon, serait revenue sur ses décisions et
aurait pris une attitude telle qu’elle ne
laissaitque peu d’espoir au gouvernement
japonais d’arriver à une entente satisfai
sante, la dépêche résume ainsi les négo
ciations qui ont eu lieu depuis que la crise
est devenue aiguë.
Première note japonaise
Le Japon, voyant que la Russie ne sepréè
pare pas, à la date fixée par elle-même à
évacuer la Mandchourie et songe au con
traire à s’avancer en Corée demande à la
Russie de : Ü
I- lo S’engager mutuellement à respecter
i’indépendance et l’intégrité territoriale do
la Chine et de la Corée,
ij 2° S’engager à reconnaître réciproque
ment : le Japon, les intérêts spéciaux de
la Russie en Mandchourie, la Russie, les
intérêts spéciaux du Japon en Corée. ç
3° S’engager mutuellement à ne pas en-,
freindre : le Japon, les droits et immuni
tés commerciaux acquis par la Russie' ^
| Le Japon, en faisant à la Russie cette
troisième proposition, ne voulait pas seu
lement garantir ses droit? acquis en Mand
chourie et les droits acquis de la Russie eri
Corée, mais voulait également consacrer
par là le principe de l’égalité de traitement
ae toutes les nations en matière commer
ciale. j
,1 Réponse russe
1 La Russie refuse d’examiner la question
de la Mandchourie avec le Japon et aurait
présenté comme contre-proposition une
clause créant une zone neutre allant de la
frontière sino-coréennne jusqu’à Wong-
Ping-Yang à l’est et à Ping-Yang à l’ouest.
Cette clause ferait entrer dans la zone
neutre presque le tiers de toute la Corée.
Deuxième note japonaise j
f Le Japon répond qu’ayant dans la zone!
que la Russie propose de neutraliser des
intérêts prépondérants, il ne peut accepter
la proposition de la Russie pour les deux
raisons suivantes :
■j f® L’installation définitive de la Russid
en Mandchourie serait une menace perma- j
nente contre l'indépendance de la Corée,
que le Japon doit défendre à tout prix, car
ï a “dorée est l’avant-poste de ses lignes de
Réponse et le salut de cette péninsule est
tme condition sine qud non de sa propre
Sécurité :
1 2° Le Japon a, comme toutes les autres ,
puissances, des droits et des immunités en.
Mandchourie, en vertu de ses traités avec
la Chine.
Il ne saurait laisser ces droits et ces im-;
munités à la merci de la Russie. ■!
imwrifimsaifwpiBBiiiiwii ;i m
FEUILLETON DU “PAYS DE RETZ”
du 10 Janvier 1903
_ N° 34 ===== ^
LA
BELLE P0RNICÀÎSE
PREMIÈRE PARTIE
RÉCITS DE LA GRANDE-GUERRE
Y {Suite)
La petite troupe, se composant d’envi
ron 700 hommes, arriva à Chéméré vers
midi. La forêt était tout près, à deux
kilomètres à peine et le commandant
orit ses dispositions pour l’explorer. Il
interrogea les habitants du bourg qui ne
mi donnèrent que des renseignements
vagues et contradictoires. En prévision
l’un séjour prolongé dans la forêt, il
l’occupa des vivres, mais s’aperçut que,
lans toutle bourg et les fermes voisines,
1 lui serait difficile de trouver un litre
Ide blé ou une livre de farine. Par ces
emps de famine, les habitants en étaient
lénués ou cachaient soigneusement le
>eu qui leur restait.
Avec les vivres apportés de Pornic,
e commandant vit qu’il ne pourrait te-
îir longtemps, mais il ne se découragea
pas et s’aventura le soir même dans la
forêt.
Dans les sentiers tortueux et détrem
pés la petite troupe ne rencontrait âme
qui vive. Le gibier même, qui, pourtant,
ne devait pas être rare, se cachait à son
approche et on désespéra vite de faire
bonne chasse. A défaut de brigands, on
se serait pourtant bien contenté de quel
que biche ou sanglier voire même de
lapins, qui de tous temps ont pullulé
dans la forêt et dans les champs voisins.
Cela aurait amélioré l’ordinaire, qui en
avait grand besoin.
Dans la journée il avait fait une cha
leur torride, avant-courière de l’orage
qui, en effet, éclata un peu avant la nuit.
On rebroussa chemin et on se rallia
sur la tour de Princé, qui, située sur la
lisière, au sud, domine toute la forêt. Au
pied de la tour est un antique manoir
aux murs épais, dans les vastes salles
duquel une grande partie de la troupe
put se loger, tandis que l’autre trouvait
asile dans les bâtiments d’une ferme
voisine.
On coucha sur la planche, ou sur la
terre nue, car on ne put trouver ni paille,
ni foin, ou plutôt on ne se coucha pas.
La plupart passèrent leur nuit à fumer
et à chanter. Au petit jour, exténués de
fatigue, comme après une longue marche,
tous reprirent tristement leur place dans
le rang, et précédée de ses éclaireurs et
de ses tambours silencieux, la petite
troupe des patriotes s’ébranla. Dans les
étroits sentiers de la forêt noire et mys
térieuse, ils défilèrent à laqueue leu leu,
se ralliant aussitôt quils débouchaient
surun chemin, n’osant pas se disperser
de peur que chaque détachement se
krouvât trop faible, dans le cas! d’une
surprise.
Vers midi, on fit halte au milieu d’une
clairière et les officiers tinrent conseil
sur la tactique à suivre.
On décida de continuer l’exploration
de la forêt, dans l’espoir que l’on finirait
par mettre la main sur quelque vendéen
(qui découvrirait la retraite des autres.
La forêt fut donc battue et rebattue
dans sa partie nord, mais sans résultat.
A la nuit, c’est-à-dire sur les huit
heures du soir, la troupe républicaine
qui ne voulait pas coucher en pleine
forêt de peur d’une surprise, se trouva
sur la lisière, du côté de Rouans.
Les bâtiments d’un métayer servaient
d’abri pour les officiers, tandis que
la plupart des hommes passèrent la nuit
à la belle étoile.
Le métayer était un homme d’une qua
rantaine d’années qui, devant cette in
vasion de militaires, tremblait comme la
feuille au vent. Sa femme, au contraire,
saisissant contraste, de quelques ann ées
plus jeune que lui, restait impassible et
comme indifférente, allant et venant
comme si de rien n’était.
— Comment t’appelles-tu ? demanda
au fermier le commandant Babain.
— Collinet, pour vous servir, mon
seigneur.
— Et je vois qui tu es, car tu me dé
cernes un titre qui ne me va pas, qui
d’ailleurs ne va plus à personne. Je vois
que tu es bien en retard et que tu ne sais
probablement pas que nous sommes en
République, qui a aboli les titres de no
blesse. Je n’y ai jamais eu droit à ces ti
tres, et je m’en flatte, car c’est le sang
roturier qui régénérera le pays.
Collinet, appelle-moi citoyen, c’est le
plus beau titre dont un homme puisse
se prévaloir.
Collinet, toujours tremblant, se grat
tait l’oreille et restait bouebe bée.
— Or donc, Collinet’, je vois que tu
n’es point un méchant homme et je veux
qu’il ne te soit fait aucun mal. Rassure-
toi donc, pas un de tes cheveux ne tom
bera de ma part. Mais à la guerre com
me à la guerre et donnant donnant. Si
tu tiens à ta tête, tu vas répondre à mes
questions, sans sourciller et sans dé
tour. As-tu compris ?
Collinet fit un geste vague que le com
mandant voulutbien interpréter pour
un assentiment.
— Et pendant ce temps-là la char
mante citoyenne que tu as choisi pour
compagne, va nous préparer un frichti,
fit le commandant, dans le langage am
poulé qui était de mode à cette époque.
— Un frichti ! j’comprenons, mons...
citoyen, mais avec quoi en faire, bon
sang 1
— Mais avec ce qu’il y aura ! Nous ne
sommes pas difficiles, va! Il ne nous faut
pas trente-six plats, ni une douzaine de
verres à chacun, comme sur la table des
ci-devants !
— Mais j’avons rin de rin, mon... ci
toyen.
— Voyons! ni pain, ni viande, ni beur
re, ni fromage, ni vin, ni eau, tu te
moques de nous, Collinet. Prends garde.
Ta tête est en jeu.
— Mais quand je vous dis 11
— On ne dit plus vous à personne,
depuis que l’on est sous le régime de
l’égalité. Et toi que manges-tu donc,
Collinet ?
— Sauf votre... excuse!., ton respect,
j’mangions des graux depuis queuque
temps... C’est fait avec de la farine de
blé noir... une espèce de bouillie qu’on
fait cuire.
— Oui, j’ te comprends, de la bouillie
pour les chats. Enfin s’il n’y a que ça il
faut bien s’en contenter !
— Pardon, excuse ! mais il n’y en a
plus de la farine de blé-noir.
— Que vas-tu donc manger ce soir,
misérable? fit le commandant en lui
sautant à la gorge.
(.A suivre ) Julien Bouvron.
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