Titre : Juvénal : pamphlétaire hebdomadaire
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1948-09-11
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32803009v
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 11 septembre 1948 11 septembre 1948
Description : 1948/09/11 (N22). 1948/09/11 (N22).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k4226739z
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, 4-JO-376
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 10/02/2020
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20
WW wWWWWWWWVWWWWWWWWWWWWWWWWWW
juvénal
Quand les papillons...
L’Administration des P.T.T. s’apprête
à expédier aux abonnés leurs relevés de
comptes accompagnés de papillons-conseils
aux usagers. Il paraît qu’ils ne savent pas
téléphoner. Le Français est un monsieur
nerveux, étourdi et rouspéteur qui se plaint
de « faux numéros » alors que dans 99 ’/o
des cas, c’est lui-même qui les a formés.
Rien de surprenant : il oublie, dans 75 °/c
des cas, de refermer les portes de l’ascen
seur qu’il bloque au préjudice des amateurs
suivants. Il entre par où il doit sortir et
sort par où il doit entrer. Qu’y faire ? Il
est ainsi. Il est affligé du démon de la
pagaïe qui s’accommode mal avec les
nécessités modernes et nul exorciseur n’a
réussi à l’en libérer.
Les « papillons » retomberont à l’ctat
de chrysalides. En fait, si les P.T.T. lâ
chent cet essaim sur leurs abonnés, c’est
qu’eux-mêmes souffrent d’un terrible re
tard par rapport aux autres nations. Les
statisticiens nous apprennent que sur 41 m 1-
lions de postes en usage dans le monde
civilisé, la France n’en compte que 1 mil
lion 350.000. Encore est-il que son ma
tériel est vieillot, ses installations désuètes
et qu’on trouve encore — à l’époque des
robots automatiques —* d’anachroniques
« dames téléphonistes » casquées d’un
écouteur, cravatées d’un parleur et nanties
d’un inévitable caractère de cochon. Dans
les campagnes, les postes à manivelle pour
jouer l’orgue de barbarie aux oreiljes blin
dées de ces dames sont d’usage courant.
Comme le pianiste
Les P.T.T. sont comme le pianiste. Ils
font ce qu’ils peuvent. Aussi ne convient-
il pas de tirer sur eux. D’une part, les
faits de guerre sont responsables de la
destruction de 39 centraux, de 104 auto
matiques multiples, de 85 centres d’ampli
fication, de 1.500 postes locaux, de 2.000
coupures de câbles. Il a fallu reconstruire.
D’autre part, la loi moderne des vitesses
joue. Le nombre des communications s’ac
croît sans cesse : 1.500.000 en 1947, soit
56 % de plus qu’en 1938. Enfin, alors
que le plan d’aménagement moderne exi
gerait 28 milliards par an pendant dix ans,
les crédits consentis ne sont pour 1948 que
de 8 milliards.
Alors ?
Alors le problème pour les ingénieurs
est de tirer le maximum du bric à brac en
lui imprimant une rotation accélérée. C’est
une solution de bric et de broc. D’où les
« papillons » à l’intention louable d’acti
ver la clientèle. Hélas ! Ils se brûleront
les ailes. Nous continuerons à nous mor
fondre devant 1 appareil, à donner des
noms d’oiseaux à la dame du téléphone,
à réclamer la surveillante, à piquer des
ciises et à vitupérer le gouvernement.
Condition “ essencielle 99
A Evreux, un touriste belge descend en
trombe la côte de la Madeleine. Un pneu
arrière éclate. J^as de roue de secours.
Pour un fois, savez-vous, qué malheur
M. Beulemans se rend chez un garagiste.
— Navré, Monsieur, mais impossible.
Je ne peux vendre un pneu sans bon.
Voyez à la Préfecture.
 la préfecture : — C’est pour l’allo
cation d’essence aux touristes étrangers ?
— Non, ma foi. J ai fait le plein à
Gand où l’essence coûte moins cher. C’est
pour une attribution de pneu. Le mien
vient de claquer.
— Désolé, Monsieur. Je ne peux déli
vre de bon qu’aux allocataires d’essence.
— En ce cas, donnez-moi mes 500 li
tres d’essence.
M. Beulemans encaisse ses deux bons,
revend son essence au garage, paie son
pneu neuf avec le montant, if lui reste en
core de quoi payer une tournée générale
et faire le garçon à Paris.
— Quel bon pays ! dit le Belge.
— Pour les étrangers, reprend un doc
teur qui n’a pas assez de carburant pour
sa tournée de malades.
Le coup des œufs
Les électeurs en Amérique ont lancé une
mode qui obtient quelque succès. Elle con
siste à lapider avec des œufs (frais, natu
rellement) le candidat dont ils ne partagent
pas les idées.
Elle exige beaucoup d’adresse.
Il faut viser juste, pour ne pas atteindre
le voisin.
Dernièrement, à Grensboro, M. Henry
Wallace, candidat à la présidence des
U.S.A., prit la parole. Un étudiant, qui
n’approuvait pas son programme politique,
sortit un œuf, visa et... atteignit le candi
dat. juste à la tête.
En France on n’a pas encore adopté ce
genre de contradiction. Au prix où sont les
œufs, les rencontres électorales finiraient
par ruiner les électeurs.
Mais on y viendra peut-être, un jour, «i
le gouvernement réussit à convaincre
les poules qu’il faut produire meilleur
marché. La mode est tentante, en effet.
Mais elle n’est pas sans risques, il faut
le dire.
Vous copierez cent fois...
L’étudiant de Grensboro — dont nous
parlons plus haut — a été prié de venir
s’expliquer devant le juge, en même temps
qu’un de ses camarades qui, lui, avait jeté
sur M. Wallace une pêche mûre, mais
l’avait manqué.
Après avoir écouté les manifestants, le
juge leur dit :
— Nous vivons ici en régime de li
berté. Vous mériteriez la prison pour l’a
voir oublié. Mais je veux vous donner une
chance de vous en souvenir désormais, et
de respecter les opinions de votre pro
chain. Vous, qui avez jeté l’œuf et visé
juste, vous me copierez cent fois cette
phrase : « Je désapprouve ce que vous
dites, mais je défendrai jusqu’à la mort
votre droit de le dire. » Et vous, qui avez
mal visé, vous la copierez cinquante fois !
Si le pensum n’est pas achevé dans trois
jours, vous paierez 50 dollars, et vous
25 !... Allez, et ne recommencez plus ! »
On ne pouvait mieux juger.
Ajoutons que la pensée citée est une
phrase de Voltaire !
Nous craignons fort que beaucoup de
citoyens, en France, l’aient depuis long
temps oubliée, hélas !
Ch. Mills,
prince des drivers
Dans ce meeting de trot qui se déroule
à Vincennes, un jockey Ch. Mills, s’est
imposé nettement à l’attention par sa classe
et sa science dans l’art de conduire.
Irlandais d’origine, Ch. Mills séjourna
longtemps en Allemagne et s’en vint après
la libération, offrir modestement ses ser
vices à l’entraîneur de trot, J. Chyriacos.
On le prit et on m^ut point à s’en repen
tir car les sulkys elles trotteurs drivés par
lui volèrent à la victoire. Mais son appé
tit s’accrut avec le succès. Appointements
triplés, pourcentages doublés, l’entraîneur
dut consentir à tout. Aujourd’hui le fa
meux jockey parle d’acheter un fastyeux
appartement et il songe à solliciter pour
cela le concours des propriétaires d’écu
ries qui l’emploient. L’entraîneur est mé
dusé, pris entre le désir d’arrêter ces exi
gences et la crainte de perdre le meilleur
driver du moment.
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juvénal
Quand les papillons...
L’Administration des P.T.T. s’apprête
à expédier aux abonnés leurs relevés de
comptes accompagnés de papillons-conseils
aux usagers. Il paraît qu’ils ne savent pas
téléphoner. Le Français est un monsieur
nerveux, étourdi et rouspéteur qui se plaint
de « faux numéros » alors que dans 99 ’/o
des cas, c’est lui-même qui les a formés.
Rien de surprenant : il oublie, dans 75 °/c
des cas, de refermer les portes de l’ascen
seur qu’il bloque au préjudice des amateurs
suivants. Il entre par où il doit sortir et
sort par où il doit entrer. Qu’y faire ? Il
est ainsi. Il est affligé du démon de la
pagaïe qui s’accommode mal avec les
nécessités modernes et nul exorciseur n’a
réussi à l’en libérer.
Les « papillons » retomberont à l’ctat
de chrysalides. En fait, si les P.T.T. lâ
chent cet essaim sur leurs abonnés, c’est
qu’eux-mêmes souffrent d’un terrible re
tard par rapport aux autres nations. Les
statisticiens nous apprennent que sur 41 m 1-
lions de postes en usage dans le monde
civilisé, la France n’en compte que 1 mil
lion 350.000. Encore est-il que son ma
tériel est vieillot, ses installations désuètes
et qu’on trouve encore — à l’époque des
robots automatiques —* d’anachroniques
« dames téléphonistes » casquées d’un
écouteur, cravatées d’un parleur et nanties
d’un inévitable caractère de cochon. Dans
les campagnes, les postes à manivelle pour
jouer l’orgue de barbarie aux oreiljes blin
dées de ces dames sont d’usage courant.
Comme le pianiste
Les P.T.T. sont comme le pianiste. Ils
font ce qu’ils peuvent. Aussi ne convient-
il pas de tirer sur eux. D’une part, les
faits de guerre sont responsables de la
destruction de 39 centraux, de 104 auto
matiques multiples, de 85 centres d’ampli
fication, de 1.500 postes locaux, de 2.000
coupures de câbles. Il a fallu reconstruire.
D’autre part, la loi moderne des vitesses
joue. Le nombre des communications s’ac
croît sans cesse : 1.500.000 en 1947, soit
56 % de plus qu’en 1938. Enfin, alors
que le plan d’aménagement moderne exi
gerait 28 milliards par an pendant dix ans,
les crédits consentis ne sont pour 1948 que
de 8 milliards.
Alors ?
Alors le problème pour les ingénieurs
est de tirer le maximum du bric à brac en
lui imprimant une rotation accélérée. C’est
une solution de bric et de broc. D’où les
« papillons » à l’intention louable d’acti
ver la clientèle. Hélas ! Ils se brûleront
les ailes. Nous continuerons à nous mor
fondre devant 1 appareil, à donner des
noms d’oiseaux à la dame du téléphone,
à réclamer la surveillante, à piquer des
ciises et à vitupérer le gouvernement.
Condition “ essencielle 99
A Evreux, un touriste belge descend en
trombe la côte de la Madeleine. Un pneu
arrière éclate. J^as de roue de secours.
Pour un fois, savez-vous, qué malheur
M. Beulemans se rend chez un garagiste.
— Navré, Monsieur, mais impossible.
Je ne peux vendre un pneu sans bon.
Voyez à la Préfecture.
 la préfecture : — C’est pour l’allo
cation d’essence aux touristes étrangers ?
— Non, ma foi. J ai fait le plein à
Gand où l’essence coûte moins cher. C’est
pour une attribution de pneu. Le mien
vient de claquer.
— Désolé, Monsieur. Je ne peux déli
vre de bon qu’aux allocataires d’essence.
— En ce cas, donnez-moi mes 500 li
tres d’essence.
M. Beulemans encaisse ses deux bons,
revend son essence au garage, paie son
pneu neuf avec le montant, if lui reste en
core de quoi payer une tournée générale
et faire le garçon à Paris.
— Quel bon pays ! dit le Belge.
— Pour les étrangers, reprend un doc
teur qui n’a pas assez de carburant pour
sa tournée de malades.
Le coup des œufs
Les électeurs en Amérique ont lancé une
mode qui obtient quelque succès. Elle con
siste à lapider avec des œufs (frais, natu
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pas les idées.
Elle exige beaucoup d’adresse.
Il faut viser juste, pour ne pas atteindre
le voisin.
Dernièrement, à Grensboro, M. Henry
Wallace, candidat à la présidence des
U.S.A., prit la parole. Un étudiant, qui
n’approuvait pas son programme politique,
sortit un œuf, visa et... atteignit le candi
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En France on n’a pas encore adopté ce
genre de contradiction. Au prix où sont les
œufs, les rencontres électorales finiraient
par ruiner les électeurs.
Mais on y viendra peut-être, un jour, «i
le gouvernement réussit à convaincre
les poules qu’il faut produire meilleur
marché. La mode est tentante, en effet.
Mais elle n’est pas sans risques, il faut
le dire.
Vous copierez cent fois...
L’étudiant de Grensboro — dont nous
parlons plus haut — a été prié de venir
s’expliquer devant le juge, en même temps
qu’un de ses camarades qui, lui, avait jeté
sur M. Wallace une pêche mûre, mais
l’avait manqué.
Après avoir écouté les manifestants, le
juge leur dit :
— Nous vivons ici en régime de li
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de respecter les opinions de votre pro
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juste, vous me copierez cent fois cette
phrase : « Je désapprouve ce que vous
dites, mais je défendrai jusqu’à la mort
votre droit de le dire. » Et vous, qui avez
mal visé, vous la copierez cinquante fois !
Si le pensum n’est pas achevé dans trois
jours, vous paierez 50 dollars, et vous
25 !... Allez, et ne recommencez plus ! »
On ne pouvait mieux juger.
Ajoutons que la pensée citée est une
phrase de Voltaire !
Nous craignons fort que beaucoup de
citoyens, en France, l’aient depuis long
temps oubliée, hélas !
Ch. Mills,
prince des drivers
Dans ce meeting de trot qui se déroule
à Vincennes, un jockey Ch. Mills, s’est
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et sa science dans l’art de conduire.
Irlandais d’origine, Ch. Mills séjourna
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On le prit et on m^ut point à s’en repen
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lui volèrent à la victoire. Mais son appé
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triplés, pourcentages doublés, l’entraîneur
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cela le concours des propriétaires d’écu
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