Titre : Figaro : journal non politique
Éditeur : Figaro (Paris)
Date d'édition : 1933-02-17
Contributeur : Villemessant, Hippolyte de (1810-1879). Directeur de publication
Contributeur : Jouvin, Benoît (1810-1886). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34355551z
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 17 février 1933 17 février 1933
Description : 1933/02/17 (Numéro 48). 1933/02/17 (Numéro 48).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Description : Collection numérique : BIPFPIG63 Collection numérique : BIPFPIG63
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Description : Collection numérique : Arts de la marionnette Collection numérique : Arts de la marionnette
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Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Description : Collection numérique : France-Brésil Collection numérique : France-Brésil
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 15/10/2007
FIGARO. VENDREDI 17 FEVRIER 1933
LETTRES, THEATRE, SCIENCES ET ARTS
LES PREMIERES
AU GYMNASE reprise de Le Voleur m,
pièce en trois actes, de M. Henry
Bernstein.
Le Gymnase vient de faire une excel-
lente reprise du Voleur, pièce solide, qui
semble faite pour braver allégrement les
années. Elle appartient à cette période où
l'auteur avait le goût des drames violents,
où il procédait par instinct plus que par
raisonnement. D'abord le drame, brutal,
imprévisible. Ensuite, une rapide enquête
'psychologique pour justifier la catastro-
phe et montrer à quoi elle est due.
Vous connaissez le sujet du Voleur. C'est
l'histoire d'une jeune femme, Marie-Louise,
qui a volé trente mille francs à des amis
riches dont elle était l'hôte avec son mari.
Le fils de la maison, Raymond, qui a dix-
neuf ans et qui est amoureux d'elle, se lais-
sera accuser pour la sauver. La révélation
de cette infamie a lieu au deuxième acte
et surprend le spectateur comme un coup
de poing dans l'estomac. L'auteur a pris
grand soin d'égarer les soupçons du public
pour se ménager cet effet de surprise. Il
s'est contenté de glisser quelques répliques,
qu'on se remémorera après coup, et qui
justifieront cet événement incroyable à
première vue. Mais l'explication ne vien-
dra qu'ensuite. Pourquoi Marie-Louise
a-t-elle volé ? C'est elle qui nous l'appren-
dra par amour. Elle aime follement son
mari elle a voulu être toujours plus
belle pour le garder, pour que sa vanité
dt mâle fortifie ses sentiments. Ainsi la
jeune femme a été entraînée à des dépen-
des exagérées qui l'ont bientôt conduite à
une situation inextricable* -Le désordre
•d'une amie,' si riche qu'elle ne compte
même pas son argent, l'a fait succomber à
la tentation. Elle a pris une première fois
quelques billets, puis, bientôt, elle a orga-
nisé ses vols. Cette confession laisse suppo-
ser des angoisses d'amoureuse, des crain-
tes, des jalousies chimériques, bref, un lent
travail de maturation. Refaisant la pièce
aujourd'hui, M. Henry Bernstein commen-
cerait par là. Il nous montrerait d'abord le
caractère anxieux de son héroïne. La con-
fession du deuxième acte deviendrait le
thème de la pièce, et le vol qui, ici, dé-
clenche l'aventure, lui servirait au con-
traire de dénouement. Ce ne serait plus
« Le Voleur », titre destiné à brouiller les
cartes, mais « la Voleuse a.
La première méthode, si elle ne per-
met pas une étude psychologique aussi
poussée que la seconde, a l'avantage d'être
propice aux émotions fortes. Le deuxième
acte du Voleur, en particulier, est un chef-
d'œuvre de construction dramatique. Il ue
se passe qu'entre Marie-Louise et son mari,
et l'action y rebondit toute seule, sans au-
cun apport extérieur. C'est d'un mécanis-
e admirable-
·< llc1mJ~ab~e. ,J,
Mme Jeanne Chevrel, qui remplace au-
jourd'hui Mme Simone, la magnifique titu-
laire de ce rôle, s'y est montrée excellente.
On la sent comme possédée par son amour
et prête à toutes les bassesses pour le gar-
der. Son succès a été très vif. Dans le rôle
plus difficile du mari, son partenaire,
M. Jean Max, a fait preuve de la plus cha-
leureuse autorité. Les autres emplois sont
tenus au mieux par Mme Marguerite
Mayane, MM. André Gray, Jean Clarens et
Lucien Blondeau.
James de Coquet.
CARNET
DU LECTEUR^
La Campagne du colonel Lawrence
(Arabie déserte, 1916-1919), par Lowell Tho-
mas. Traduit de l'anglais par L. Rambert
{Payot). h,
I Thomas Edward Lawrence,, le, jeune archéo-
logue d'Oxf ord, qui, pendant la guerre, f ut «le
roi sans couronne, de l'Arabie », le libérateur
de la terre sainte des Mahométans, et qui,
après avoir détruit- la puissance turque, entra
en 1018 à Damas, général en chef (à vingt-
huit ans) d'une armée qu'il avait constituée
par un merveilleux travail de diplomate, est
un homme de légende. Il a retracé lui-même,
dans un ouvrage, La Révolte dans le désert,
(la traduction a été éditée yar Payot), l'épo-
pée prodigieuse soulever l'Arabie contre les
Turcs et, ce qui était plus difficile, unir en
une seule volonté des tribus qui étaient en ri-
valité depuis des siècles.
Mais Lawrence est modeste et secret. Dans
ses Mémoires, il s'est effacé volontiers il a
passé sous silence bien des incidents pour ne
se confier qu'à l'Histoire. Aussi l'ouvrage de
Lowel Thomas est-il loin d'être inutile nous
le recommanderions même de préférence à qui
aime l'aventure il vaut par sort pittoresque
et par la présence constante du héros, de Law-
rence dans son action d'agitateur, de diplomate
et de guerrier. De dynamiteur même, car ce
chapitre XI est savoureux, qui met en scène
les joyeuses expéditions de Lawrence contre
la voie ferrée qui, d'une grande importance stra-
tégique, reliait Damas à Medine, qui était, en-
core, aux mains des Turcs par des coups de
main audacieux qui s'exécutaient dans nue
atmosphère de farce, Lawrence fit sauter, en
dix-huit mois, soixante-dix-neuf trains Inter-
mèdes dans la guerre au désert, qui est ici peinte
dans des tableaux attachants.
Jean Fréteval.
/♦♦.♦
"n- LIVRES NOUVEAUX
Variétés. Chants et chansons de t'armée
d'Afrique, par le capitaine L. Lehuraux (Ed. Sou-
biron, Alger) Les droits du Danemark sur le
Groenland, par Knund Berlin (Alcan) L'Illuminé,
la Légende du Bouddha, par Luigi Suali (Denoël
et Steele) Un Barbare en Asie, par Henri Mi-
chaux (Librairie Gallimard).
Romans. Vie d'Adrien Zograffi. I, La maison
Thüringer, par Panait Istrati (Rieder) Avia-
teur par Paul Bléry (Querelle) La main tendfte,
par Philippe Hériat (Denoël et Steele).
CHRONIQUE DES THEATRES DE PARIS
THEATRE DES MARIONNETTES DE SALZBOURG La Vie scandaleuse et Ia fin terrifiante du célèbre magicien Johann Faust.
THEATRE DES VARIETES Une Poule sur un mur, pièce en trois actes de M. Léopold Marchand, décors de Bertin.
Revenons aux Marionnettes de Salz-
bourg, car nous ne saurions passer sous
silence sa représentation de Faust, des
plus intéressantes. Ceux des auditeurs
qui entendent l'allemand ont pu jouir
à leur aise du texte, établi par M. H.
Aicher d'après la légende ancienne. Les
autres se sont livrés à leur imagination
aidée par de précis commentaires.
« C'est en 1587,nous apprend-on, qu'ap-
parut, à Francfort-sur-le-Mein, le livre
populaire du docteur Faust, dont le thé-
âtre des marionnettes s'empara aussi-
tôt. Ce sont ces mêmes marionnettes que
Gœthe vit dans sa jeunesse, à Francfort,
et qui lui donnèrent la première idée
de son chef-d'oeuvre. D'après les docu-
ments, le vrai docteur Faust serait né
en Wurtemberg, à Knittingen, vers 1400
et mort, victime probablement d'une
expérience chimique, en 1540. Une lé-
gende le fait fils de paysans. Un cousin
riche l'adopte et l'instruit. De toute
manière, il s'adonne aux sciences oc-
cultes et vend son âme au diable. Si les
premières dates sont exactes, nous cal-
culons que ce vieux Faust mourut à
cinquante ans. A cinquante ans, on
était, en ce temps-là, un savant véné-
rable, chenu, caduc, orné d'une longue
barbe blanche et obligé de vendre son
âme au diable pour se rajeunir. Ce n'est
pas la peine d'être chimiste. Faust m'a
l'air fort niais en cette légende. Il se
laisse rouler par le Malin et, cela, dès
l'âge de trente-huit ans, puisque le pacte
de Méphisto lui donnait douze ans de
jeunesse et de pouvoirs variés douze
ans. par rouerie-on voit bien là que
c'est une légende allemande puisque
Faust avait conclu pour vingt-quatre
ans ce marché de dupe mais être jeune
nuit et jour, cela se comptait double et
Méphisto n'avait pas, de cela, averti le
naïf. Il y a là une fort bonne morale
qui, peu à peu, conduisit les sages à
constater que « être savant, c'est sa-
voir qu'on ne sait rien ».
Ce pacte, ainsi que nous l'expli-
qua avec la plus amusante compétence
le conférencier qui, à la « répétition
générale », était M. Lichtenberger,
ce pacte défendait aussi au rajeuni d'en-
trer à l'église, de se marier, et de se
laver. Evidemment, sur ce point, la
magie redevenait utile pour paraître,
avenant et parfumé sans jamais tou-
cher l'eau. Mais, que fait Faust de son
rajeunissement Il se fait transporter
à Parme pour y assiter à une fête,
flirter un peu avec la belle duchessp,
et éblouir le duc de ses pouvoirs sata-
niques. Faust me paraît être ici le
patron des mondains. Faire un pacte
avec le diable pour « aller dans le
monde ». c'est bien là l'alliage de Sa-
tan et des pompes et vanités. Il est vrai
que c'est une fête en Italie, et que l'Ita-
lie a toujours paru aux Germains le
Paradis tentateur. Quel charmant dé-
cor Ce jardin de Parme, si lumineux
entre ces groupes de sombres cyprès,
nous a paru rappeler plutôt les jardins
Boboli. Là, Faust, jeune et vêtu de noir,
éblouit la duchesse aux beaux atours,
bien peu, mais trop sans doute, aux
yeux jaloux du duc, vêtu d'or et
d'orange, qui envie la science magique
de son invité. Faust, ayant cru les sub-
juguer en évoquant pour eux des appa-
ritions de lumière et d'ombre, puis
LE MAROC D'EUGÈNE DELACROIX
L'œuvre et la vie d'Eugène Delacroix
sont un thème si riche, un sujet d'études
si ample, que l'inoubliable exposition du
Louvre ne les avait pas épuisés on le
voit bien à cette exposition du Musée de
l'Orangerie qui a été inaugurée mer-
credi. Elle nous offre de nouvelles occa-
sions d'admirer les efforts et les réussites
de l'un des plus beaux génies du siècle
passé un génie dont notre temps a
appris à mieux mesurer la grandeur, grâce
aux travaux et aux publications de MM.
André Joubin, Raymond Escholier, Guif-
frey et J.-L. Vaudoyer, et grâce à l'acti-
vité de la Société des Amis d'Eugène Dela-
croix.
C'est parce que cette dernière a tenu
à commémorer le centenaire du voyage du
maître à Tanger, à Meknès, en Espagne et
à Alger, que sont rassemblés pour quelques
semaines des documents et des œuvres
dispersés de coutume dans les collections
publiques ou privées. D'avoir eu un objet
si défini et des limites si précises l'expo-
sition tire un incontestable avantage elle
présente une unité, une cohésion dont de
semblables manifestations sont trop sou-
vent dépourvues. Ceux qui l'ont organisée
ont montré beaucoup de méthode non seu-
lement dans la réunion des ouvrages expo-
sés, mais aussi dans leur présentation,
qualités qui se retrouvent dans l'excellent
catalogue de M. Charles Sterling. Tout
cela est de l'ouvrage bien fait, qui facili-
tera grandement le plaisir du visiteur déjà
renseigné comme du visiteur peu averti.
L'un comme l'autre ne pourront pas ne
pas éprouver plus ou moins consciemment
une autre impression d'unité, d'unité supé-
rieure et bien rare. Lorsqu'ils se trouve-
ront au centre de la grande salle du musée,
et qu'ils seront ainsi entourés des « orien-
Prométhée, puis Salomé, ne se doute
pas qu'il a excité autant que la jalousie
la méfiance effrayée du duc. Le duc mé-
dite de l'empoisonner au souper. Il faut
que ce soit Méphisto qui avertisse
Faust, toujours ignare, et l'enlève en
son manteau magique pour l'emmener
à Constantinople. Espérons qu'il y eut
quelques aventures intéressantes, mais
on ne nous les représente point.
Nous le retrouvons à Wittemberg,
place de l'église. Le temps va llnir pour
Faust des plaisirs coupables et de la
jeunesse diabolique. Il se repent. Les
cloches tintent dans l'air natal. Faust,
plein de remords, tombe à genoux de-
vant le crucifix. Va-t-il échapper aux
griffes du diable ? Méphisto fait appa-
raître à la rescousse Hélène de Sparte
qui, blanche et nue en des voiles légers,
s'élève, lumineuse, admirable et, comme
toujours depuis tant de siècles, habituée
à plaire. Faust ne résiste pas, lui non
plus. Il suit la beauté et achève ainsi de
se perdre. Cela n'est plus moral. Mais
cette Hélène, en ce vieux conte, incarne
sans doute les voluptés impies, telle
Vénus dans Tannhseuser, les char-
mes défendus et non le rayonnement
du beau. Faust ne tarde pas à revenir,
seul, ayant tenu dans ses bras, non la
divine Hélène, mais une horrible goule.
Le pacte expire dans quelques heures.
Faust est perdu. En vain, en ce cime-
tière qui dort aux pieds de l'église, il
ouvre une tombe pour que le cœur d'un
mort puisse le défendre contre Satan.
L'esprit défunt se lève du sépulcre, non
pour le défendre, mais pour le maudire.
Faust est environné de démons, et il
disparaît.
Nous sommes aux Enfers, comme au
prologue, où Charon regrettait de ne
jamais passer en sa barque d'éminents
personnages, ce qui donna à Pluton
l'idée de tenter et conquérir le docteur
Faust, illustre savant. Dans l'épilogue,
l'entrée de l'enfer est la gueule d'un
monstre, gigantesque à l'échelle des
marionnettes, et qui peut-être est
Cerbère. Ses yeux sont des phares glo-
buleux il ouvre la gueule. Sa mâ-
choire inférieure devient une barque et
le nautonier infernal y embarque ce
Faust, aussi niais que savant. Les en-
fers, en ce conte, sont les enfers païens,
Charon y rame, Pluton y règne; le fan-
tôme de la beauté antique y erre, tout
naturellement ses diables sont pour-
tant ceux-là des enfers bibliques Mé-
phisto est une sorte de Lucifer ambas-
sadeur. Ce mélange de paganisme et de
sentiment chrétien, la scène au pied
du crucifix, de magie, de nécroman-
cie, tout cela est fort étrange et des plus
savoureux.
C'est donc le fantôme d'Hélène qui
inspira à Gœthe les splendeurs de son
second Faust, Gœthe comprit, en revan-
che, pour le premier Faust, que les
aventures du héros étaient, en la lé-
gende, un peu brèves au point de vue
de l'emploi du rajeunissement. Et il
inventa l'épisode de Marguerite, plus
humain en son drame banal qu'une fête
chez le duc de Parme, mais qui, malgré
le succès, toujours inépuisé, de cette
anecdote amoureuse de jeune fille-
mère, trahie, coupable et sauvée, ne me
semble pas non plus d'un poids suffi-
sant pour expliquer qu'on vende son
âme au diable. Car c'est Marguerite qui
AU MUSÉE DE L'OE AHG-EKI
tales de Delacroix, ils admireront leur
magnifique résonance, leurs accords si
pleins, et l'harmonie entre elles de ces
oeuvres, si diverses pourtant, composées
et exécutées à des dates fort différentes,
au cours de trente années, mais toutes por-
tant l'empreinte de la même force, for-
mant une symphonie puissante que seul au
monde pouvait créer le chef d'orchestre
de l'art romantique.
En 1832, le comte Charles de Mornay
dont un croquis nous restitue le masque
décidé et narquois est envoyé par la
France en embassade auprès du sultan du
Maroc. Eugène Delacroix, qui a un peu
plus de trente ans et qui est déjà un homme
célèbre, part avec lui éirconstance con-
sidérable par ses conséquences, petit fait
qui était, on le voit aujourd'hui, un fait
capital et pour le talent de Delacroix, et
pour sa carrière, et pour la peinture fran-
çaise. Le voyage du peintre deux séjours
à Tanger, un séjour à Meknès, des escales
à Oran et à Alger, des excursions à Cadix
et il Séville ne dura que cinq mois.
Mais que de notes prises, quelle glane de
documents en ce court espace de temps,
et surtout quel butin d'images, d'observa-
tions Jusqu'à sa mort, le peintre puisera.
dans ce trésor. Du même coup, il a décou-
vert le monde oriental, alors encore intact,
et redécouvert le monde antique que les
disciples de David avaient travesti et pres-
que ridieulé à ses yeux.
A l'Orangerie, nous assistons en quelque
sorte à la récolte de l'artiste, et à l'élabo-
ration de quelques-uns de ses plus beaux
tableaux. Nous le voyons attentif, intuitif,
merveilleusement intelligent, saisir au pas-
sage tout ce qui le séduit, tout ce qu'il
devine pouvoir être utilisé dans des œuvres
futures, tout ce que sa vie intérieure si
nîme. Et Faust ne connaît pas l'amour.
Il cherche avec orgueil je ne sais quel
pouvoir au delà des puissances hu-
maines..
Le personnage de bon sens de la
pièce des marionnettes, c'est Hans
Wurst, que l'élève Wagner a placé
comme valet, chez Faust, au premier
acte du laboratoire et de magies. Hans
Wurst, Leporello de ce don Juan au
harem d'idées, Hans Wurst, c'est no-
tre ami Kasperl, la même poupée avec le
même costume, les mêmes petits gestes
et il est la joie de ces sombres aventures.
Au début, il a ramassé par terre, dans
le laboratoire, le livre magique et pro-
noncé des mots, au hasard. Ce sont les
formules qui appellent les démons,
et les voilà, tous, autour de Wurst
avec leurs apparences insensées, leurs
queues recourbées, leurs cornes variées,
l'un d'eux a une tête de cheval et un
petit jupon de danseuse c'est ef-
frayant Faust dort dans la pièce voi-
sine. Wurst ira-t-il le réveiller ? Non.
Il serait chassé. Mieux vaut lire au ha-
sard d'autres syllabes. Et il prononce
celles qui renvoient les diables. Alors
il s'amuse comme un petit fou, les fait
revenir, les renvoie, les appelle de nou-
veau. Wurst n,'a peur de rien le rideau
'.tombe sur ces jeux diaboliquement
innocents. Faust, au second acte, en ce
même obscur laboratoire, où brille le
feu de l'athanor et où se profilent dans
les armoires les formes saugrenues des
alambics et des cornues, Faust signe
son pacte avec Méphisto, car, entre tous
les démons apparus, c'est lui qu'il a
choisi comme compagnon, Méphisto lui
ayant affirmé « Je suis rapide comme
la pensée de l'homme. » Et le pacte
signé du sang de Faust, celui-ci, jeune
et beau, part dans le manteau diaboli-
que, à Parme. Et une sorte de dragon
ailé, enfourché par Hans Wurst, se
charge de faire voyager le joyeux valet.
Celui-ci a juré de ne révéler à personne
le véritable nom de son maître. Mais il
ne tient pas parole. Il est bavard comme
tous les bons enfants. Pour le punir,
quand Faust et Méphisto s'envolent im-
promptu vers la Turquie, ils abandon-
nent Wurst. Celui-ci est bien ennuyé.
Mais un autre animal étrange, un coq
de bruyère énorme, surgit, et offre de
rapatrier Hans Wurst s'il vend son âme
au diable. « Mon âme ? je l'ai laissée
ù Wittemberg. Allons-y d'abord, je vous
la donnerai après. » Et le voilà de re-
tour, et, naturellement, se dépêtrant du
diable. Il devient veilleur de nuit et
nous le revoyons tout guilleret, avec sa
lanterne, éclairant un instant les dé-
tresses de Faust, son ancien maître, qui,
en sa nuit fatale, se roule sur le sol en
proie aux cauchemars suprêmes. Le
diable toujours transformé en coq
de bruyère essaie une fois encore de
s'emparer de Wurst, mais le brave petit
type ne se laisse pas faire, et le diable
renonce à lui qui est, en somme, une
trop humble proie. Wurst est pourtant
ce qu'il y a rie vital dans les êtres, ce
bon sens qui s'accommode et se tire
d'affaire, cette gaieté, cette santé, cette
foi rieuse qui aident l'humble créature
à supporter l'existence. Le petit Wurst
représente cet humain bien humain
et non « trop humain » dont la mo-
deste lanterne est plus sûre que ces
fausses lueurs aux terribles magies qui
intense et son imagination toujours fié-
vreuse transformeront en secret. Comme
tous les grands hommes qui ont reçu le
don divin de poésie, il sait d'instinct
trouver dans la réalité les points d'appui
de son rêve.
Comment ne pas contempler avec une
avide curiosité ces croquetons, ces aqua-
relles, ces pastels, tous ces fragments d'al-
bums ou ces études qui conservent l'im-
pression première du maître, celle d'où par
le jeu d'un mécanisme cérébral admirable
est sorti, quelques mois ou quelques années
plus tard, un chef-d'œuvre ? Et qu'il est
émouvant le spectacle du prestigieux
improvisateur s'appliquant à copier sans
erreur un détail de costume ou de harna-
chement, la forme d'une porte, la déco-
ration d'un mur.
Après cela, il faut le voir se livrer à
toute la hâte fébrile et impétueuse de son
génie, enlever avec une sorte de furia cette
esquisse de la Chasse aui lions, où l'ara-
besque principale du grand tableau est
déjà trouvée, ainsi que la distribution des
taches cette esquisse étourdissante, cette
esquisse inspirée.
D'ailleurs la Chasse aux tions, que mal-
heureusement un incendie a dévastée en
1870, est, avec la toile du Louvre Femmes
d'Alger dans leur appartement, la plus
belle parure de l'exposition. Au musée de
Bordeaux, auquel elle appartient, elle est
fort mal placée et on la voit imparfaite-
ment. Sur la cimaise du musée de l'Oran-
gerie, toutes ses beautés triomphent
beauté de la composition et beauté de
l'exécution, beauté des expressions et
beauté des mouvements, et beauté presque
incomparable de la couleur. Là, comme
dans presque tous les tableaux orientaux
de Delacroix et dans tant d'autres de ses i
conduisent aux feux de l'enfer; Leçon
pour les foules apologue fait sans
doute pour décourager le public des
siècles passés 3e se livrer à l'étude des
sciences occultes.
Remercions l'excellente troupe de M.
H. Aicher de nous avoir joué et révélé
cette belle fable séculaire, pleine de sens
nombreux et grosse de songes Si je
préfère les beaux petits acteurs dans
la bonhomie et le riant, je n'en rends
pas moins justice a la façon un peu
trop pompeuse dont ils incarnent les
personnages légendaires, et je ne les
oublierai certes pas, après les avoir si
sincèrement applaudis et goûtés avec
tant de joie et d'admiration à leur taille.
Une poule sur un mur n'a rien i voir
avec le coq de bruyère satanique du
Docteur Faust. Est-ce un mur « der-
rière lequel il se passe quelque chose » ? '?
On se l'imagine. Mais. il ne se passe
rien. Il n'y avait là qu'une certaine
Claudine, avide de devenir « poule »
au sens parisien du mot. Ce pourquoi
elle a fait semblant d'être violée avec
un sac sur la tête. Nous ne la verrons
pas elle restera à jamais pour nous
avec un sac sur la tête. C'était un
« truc » pour se faire remarquer. A la
fin, elle partira, en effet, pour Paris,
enlevée par l'inspecteur de police que
le châtelain du lieu fit venir pour dé-
couvrir le satyre. Et cela, auparavant,
nous fait, tour à tour, soupçonner peu-
dant trois actes et quatre tableaux, ce
châtelain lui-même, son domestique
lequel se révèle à la fin comme inno-
cent d'office, ayant été « abélardé », si
j'ose dire, par une blessure de guerre,
et les deux neveux du châtelain,
François, célibataire, et Bob, marié à
Betty, et Henri, leur ami, marié ù Fos-
sette qui, tout au long de ces actes,
tremble d'être à son tour violée. Nous
avons pu croire aussi, avant les révéla-
tions et successives déductions que tous
ces messieurs s'étaient réunis et com-
posaient, à eux tous, un seul satyre.
Car en ce château, n'est-ce pas, tous
s'ennuient à périr. Mais non. Le jeu,
c'était de leur faire avouer, à ces maris
aux airs innocents, à cet oncle à l'air
respectable, ce qu'ils ont perpétré le
jaufc fatal entre cinq et sept. Et nous
en apprenons. de bien bonnes et
banales et aussi que Betly.l'épouse si
tendrpde Bob, si gros, était la maîtresse
d'Henri, etc., etc., etc. Ce jeu où chacun
tombe mais moralement à tour
de rôle, comme dans la blague enfan-
tine, « Le roi de Maroc est mort. » a
fait beaucoup rire le public. Et puis, le
premier acte, c'est un grand lit, où les
deux ménages se réunissent pour jouer
à la belote. Alors, pour voir installés
comme les frères Poucet ou les filles
de l'Ogre Pauley, Escandc, Mmes
Auger et Daussmond, on ira aux Va-
riétés et on aura raison, car ils sont im-
payables. Et Marcel Vallée, Palau, Lar-
quey, Gérard.Micheline, Bernard jouent
à qui mieux mieux. Mais M. Léopold
Marchand, qui nous a affirmé déjà
tant de talent, n'a fait ici que s'amuser.
Il nous doit, n'est-ce pas ? une vraie
pièce comme il sait en écrire. Car, enfin,
nous ne sommes plus des enfants.
Gérard d'Houville.
E
oeuvres, on voit la trace de l'admiration
profonde du maître pour Rubens mais
si le coloriste du dix-neuvième siècle égale
le coloriste d'Anvers, nous trouvons en lui
des accents d'âme et quelque chose de
frémissant que ne possédait pas le maître
ancien.
On a eu l'idée ingénieuse, et pleuse aussi
en somme, de grouper dans cette exposi-
tion consacrée au voyage de Delacroix
quelques pages d'un artiste dont l'influence
contribua à donner l'envie du départ et
le goût de l'exotisme au romantique Pari-
sien ce M. Auguste, petit-fils de l'orfèvre
célèbre du dix-huitième siècle, qui, fort
cultivé et bien doué, paraît avoir été le
type du délicat voluptueux, trop attiré
par les plaisirs de la vie et les joies de
la curiosité esthétique pour être vraiment
un créateur.
Encore qu'il fût sculpteur, c'est vers la
peinture qu'allaient ses préférences et
qu'il ait eu un œil de peintre, le moindre
de ses essais est là pour l'attester. Un petit
nombre d'oeuvres, dont plusieurs .sont ina-
chevées, nous ravissent par leur distinc-
tion de coloris et de facture, quelque chose
de chatoyant et de nacré qui fait de ce
dilettante à la fois un parent de Delacroix
et un descendant des peintres du dix-hui-
tième siècle, dont il avait eu bien soin
de recueillir et aussi de copier les ouvrages
dédaignés par ses contemporains. L'expo-
sition actuelle va mettre en honneur le
nom de ce charmant original que se
rappelaient seulement quelques passion-
nés de la petite histoire des arts par
mode, on le répétera bientôt, et ainsi la
renommée viendra fêter celui qui se
montra si insoucieux d'elle.
Raymond Lécuyer.
NOUVELLES
LITTERAIRES'
La Société Alexandre Dumas
Les amis et admirateurs d'Alexandre
Dumas père viennent, nous l'avons dit, de
se réunir sous la présidence de Mm»
Alexandre Dumas fils et de fonder la « So-
ciété.des amis d'Alexandre Dumas père ».
Voici la composition du comité
Présidente d'honneur Mme Alexandre
Dumas fils.
Membres d'honneur Mme Ernest d'Hau-
terive, née Alexandre Dumas la générale
Pallu.
Président Docteur Maurice Delort
vice-président M. Fossé d'Arcosse; secré-
taires Mlle ltaza Grand Moulin, M. Hervé
de Peslouan; trésorières: Mme Maurice
Delort, Mme Hervé de Peslouan.
Envoyer les adhésions à M. Hervé de
Peslouan, il Lumagny (Seine-et-Marne).
♦ ♦ ♦
• Le Miroir de l'Est (passage Bleu,
Nancy) organise un concours entre les
jeunes écrivains de langue française. Les
douze manuscrits classés premiers seront
édités gracieusement par les « Cahiers
du Miroir de l'Est ». Ce concours com-
prend quatre sections Romans, Contes et
Nouvelles, Théâtres, Poésies. Demander le
programme à la direction.
«S* M. Jacques Copeau, le célèbre régis-
seur français, se trouve en ce moment à Flo-
rence. Il s'y occupe activement de la pré-
paration du mystère sacré de sainte Olive.
L'exécution dudit mystère fait partie du
Mai musical florentin et aura lieu le 2 juin.
M. Jacques Copeau a visité le cloître mo-
numental de Sainte-Croix en compagnie de
l'ingénieur Galti, secrétaire général du
comité. Après en avoir étudié tous les dé-
tails, il s'est déclaré enthousiasme, jugeant
le cloître admirablement adapté à l'évoca-
tion du mystère sacré.
M. Copeau pense rester quelques jours
encore en Italie. Son intention est de se
mettre en rapport avec les différents inter-
prètes et de fixer les grandes lignes de
l'exécution.
».< Entre le 3 juin et le 3 juillet de cette
année sera ouverte à Bruxelles une expo-
sition italienne du livre, de l'illustration
et des placards illustrés. Cette organisation
est confiée à l'Institut italien du livre qui
est l'organisateur aussi, comme l'on sait,
de la Quadriennale Internationale du Li-
vre. Pendant la période d'ouverture de
l'exposition et exactement entre le 18 et
le 22 jjuin, à Bruxelles, aura lieu aussi Io
Congrès international des Editeurs.
J* On n'a pas oublié les études sur la
Littérature française de Belgique, publiées
ici même par notre excellent collaborateur
M. Léon Bocquet.
Sur proposition de M. le ministre des
affaires étrangères de Belgique, un arrêté
de S. M. le roi Albert vient de conférer :i
notre confrère et ami la croix de chevalier
de l'Ordre de Léopold.
On sait que M. Léon Bocquet était par
ailleurs déjà chevalier do l'ordre de la
Couronne de Belgique.
NOUVELLES
ARTISTIQUES
Le site du Château-Gaillard .<̃ t
aux Andelys
M. Marcel Delaunay, président de la
Société des Amis des Monuments et Sites
de l'Eure, nous communique cette note
L'énergique offensive que nous avons
menée avec notre ami le peintre Sautin,
M. Marcel Baudot, président de la Commis-
sionn des sites, et avec la presse parisienne
et régionale pour la protection totale de la
célèbre forteresse et de son site légendaire,
porte ses fruits.
Les parcelles figurant au cadastre sous
les numéros 47, 48, 72, 74, 75, 78 et 79 de
la section G sont inscrites sur l'inventaire
des sites et monuments naturels.
L'enrichissement
des musées nationaux
Au cours de sa séance du G février, pré-
sidée par M. D. David-Weill, le Conseil
des Musées nationaux, sur la demande de
M. René Dussaud, a accepté le don d'une
céramique du Louristan, fait au départe-
ment des antiquités orientales par un
bienfaiteur anonyme. Sur la proposition
de M. Jean Guiffrey, il a agréé le don par
la Société des Amis du Louvre d'un tableau
de Degas portrait de Pagans et de M. de
Gas père, et de deux dessins de cet artiste.
Egalement sur la proposition de M. Guif-
frey, le conseil a prononcé l'acquisition
d'un tableau de Claude Vignon, signé et
daté de 1624, représentant « Salomon re-
cevant la Reine de Saba ».
Ont été aussi acceptés, sur la proposi-
tion de M. Marquet de Vasselot, pour le
département des objets d'art, une pendule
du début du dix-neuvième siècle représen-
tant « Bélisaire », legs de Mme Chedr,-
ville sur la proposition de M. Louis
Hautecœur, pour le musée du Luxem-
bourg, 17 médailles du graveur Dropsy, of-
fertes par cet artiste sur la proposi-
tion de M. René Grousset, pour le musée
Guimet, un bas-relief indien, école d'Ama-
ravati, figurant « le grand départ du
Bouddha », don de la Société des Amis du
Musée trois statues dravidiennes, « les
trois mères », don de M. Loo, et 13 pein-
tures thibétaines représentant les saints
bouddhiques, don de M. Jacques Bacot.
Pour le musée des antiquités nationales
du château de Saint-Germain-en-Laye, une
statue en bronze de divinité celtique a été
acquise sur la proposition de M. Lantier
qui a, en outre, annoncé Je don par Mme
Millon-Capitan du gisement préhistorique
de la Ferrassie (Dordogne). Enfin, sur la
proposition de M. Brière, a été accepté
pour le musée de Versailles un fragment
de carrelage à décor bleu sur fond blanc
provenant du Trianon de porcelaine. Ce
vestige est un don de Mme Auscher.
En dernier lieu, sur la proposition de
M. Edouard Sarradin, 6 gravures et 11 ca-
ricatures relatives au second Empire et
offertes par M. Duvau ont été acceptées
pour le musée de Compiègne.
LETTRES, THEATRE, SCIENCES ET ARTS
LES PREMIERES
AU GYMNASE reprise de Le Voleur m,
pièce en trois actes, de M. Henry
Bernstein.
Le Gymnase vient de faire une excel-
lente reprise du Voleur, pièce solide, qui
semble faite pour braver allégrement les
années. Elle appartient à cette période où
l'auteur avait le goût des drames violents,
où il procédait par instinct plus que par
raisonnement. D'abord le drame, brutal,
imprévisible. Ensuite, une rapide enquête
'psychologique pour justifier la catastro-
phe et montrer à quoi elle est due.
Vous connaissez le sujet du Voleur. C'est
l'histoire d'une jeune femme, Marie-Louise,
qui a volé trente mille francs à des amis
riches dont elle était l'hôte avec son mari.
Le fils de la maison, Raymond, qui a dix-
neuf ans et qui est amoureux d'elle, se lais-
sera accuser pour la sauver. La révélation
de cette infamie a lieu au deuxième acte
et surprend le spectateur comme un coup
de poing dans l'estomac. L'auteur a pris
grand soin d'égarer les soupçons du public
pour se ménager cet effet de surprise. Il
s'est contenté de glisser quelques répliques,
qu'on se remémorera après coup, et qui
justifieront cet événement incroyable à
première vue. Mais l'explication ne vien-
dra qu'ensuite. Pourquoi Marie-Louise
a-t-elle volé ? C'est elle qui nous l'appren-
dra par amour. Elle aime follement son
mari elle a voulu être toujours plus
belle pour le garder, pour que sa vanité
dt mâle fortifie ses sentiments. Ainsi la
jeune femme a été entraînée à des dépen-
des exagérées qui l'ont bientôt conduite à
une situation inextricable* -Le désordre
•d'une amie,' si riche qu'elle ne compte
même pas son argent, l'a fait succomber à
la tentation. Elle a pris une première fois
quelques billets, puis, bientôt, elle a orga-
nisé ses vols. Cette confession laisse suppo-
ser des angoisses d'amoureuse, des crain-
tes, des jalousies chimériques, bref, un lent
travail de maturation. Refaisant la pièce
aujourd'hui, M. Henry Bernstein commen-
cerait par là. Il nous montrerait d'abord le
caractère anxieux de son héroïne. La con-
fession du deuxième acte deviendrait le
thème de la pièce, et le vol qui, ici, dé-
clenche l'aventure, lui servirait au con-
traire de dénouement. Ce ne serait plus
« Le Voleur », titre destiné à brouiller les
cartes, mais « la Voleuse a.
La première méthode, si elle ne per-
met pas une étude psychologique aussi
poussée que la seconde, a l'avantage d'être
propice aux émotions fortes. Le deuxième
acte du Voleur, en particulier, est un chef-
d'œuvre de construction dramatique. Il ue
se passe qu'entre Marie-Louise et son mari,
et l'action y rebondit toute seule, sans au-
cun apport extérieur. C'est d'un mécanis-
e admirable-
·< llc1mJ~ab~e. ,J,
Mme Jeanne Chevrel, qui remplace au-
jourd'hui Mme Simone, la magnifique titu-
laire de ce rôle, s'y est montrée excellente.
On la sent comme possédée par son amour
et prête à toutes les bassesses pour le gar-
der. Son succès a été très vif. Dans le rôle
plus difficile du mari, son partenaire,
M. Jean Max, a fait preuve de la plus cha-
leureuse autorité. Les autres emplois sont
tenus au mieux par Mme Marguerite
Mayane, MM. André Gray, Jean Clarens et
Lucien Blondeau.
James de Coquet.
CARNET
DU LECTEUR^
La Campagne du colonel Lawrence
(Arabie déserte, 1916-1919), par Lowell Tho-
mas. Traduit de l'anglais par L. Rambert
{Payot). h,
I Thomas Edward Lawrence,, le, jeune archéo-
logue d'Oxf ord, qui, pendant la guerre, f ut «le
roi sans couronne, de l'Arabie », le libérateur
de la terre sainte des Mahométans, et qui,
après avoir détruit- la puissance turque, entra
en 1018 à Damas, général en chef (à vingt-
huit ans) d'une armée qu'il avait constituée
par un merveilleux travail de diplomate, est
un homme de légende. Il a retracé lui-même,
dans un ouvrage, La Révolte dans le désert,
(la traduction a été éditée yar Payot), l'épo-
pée prodigieuse soulever l'Arabie contre les
Turcs et, ce qui était plus difficile, unir en
une seule volonté des tribus qui étaient en ri-
valité depuis des siècles.
Mais Lawrence est modeste et secret. Dans
ses Mémoires, il s'est effacé volontiers il a
passé sous silence bien des incidents pour ne
se confier qu'à l'Histoire. Aussi l'ouvrage de
Lowel Thomas est-il loin d'être inutile nous
le recommanderions même de préférence à qui
aime l'aventure il vaut par sort pittoresque
et par la présence constante du héros, de Law-
rence dans son action d'agitateur, de diplomate
et de guerrier. De dynamiteur même, car ce
chapitre XI est savoureux, qui met en scène
les joyeuses expéditions de Lawrence contre
la voie ferrée qui, d'une grande importance stra-
tégique, reliait Damas à Medine, qui était, en-
core, aux mains des Turcs par des coups de
main audacieux qui s'exécutaient dans nue
atmosphère de farce, Lawrence fit sauter, en
dix-huit mois, soixante-dix-neuf trains Inter-
mèdes dans la guerre au désert, qui est ici peinte
dans des tableaux attachants.
Jean Fréteval.
/♦♦.♦
"n- LIVRES NOUVEAUX
Variétés. Chants et chansons de t'armée
d'Afrique, par le capitaine L. Lehuraux (Ed. Sou-
biron, Alger) Les droits du Danemark sur le
Groenland, par Knund Berlin (Alcan) L'Illuminé,
la Légende du Bouddha, par Luigi Suali (Denoël
et Steele) Un Barbare en Asie, par Henri Mi-
chaux (Librairie Gallimard).
Romans. Vie d'Adrien Zograffi. I, La maison
Thüringer, par Panait Istrati (Rieder) Avia-
teur par Paul Bléry (Querelle) La main tendfte,
par Philippe Hériat (Denoël et Steele).
CHRONIQUE DES THEATRES DE PARIS
THEATRE DES MARIONNETTES DE SALZBOURG La Vie scandaleuse et Ia fin terrifiante du célèbre magicien Johann Faust.
THEATRE DES VARIETES Une Poule sur un mur, pièce en trois actes de M. Léopold Marchand, décors de Bertin.
Revenons aux Marionnettes de Salz-
bourg, car nous ne saurions passer sous
silence sa représentation de Faust, des
plus intéressantes. Ceux des auditeurs
qui entendent l'allemand ont pu jouir
à leur aise du texte, établi par M. H.
Aicher d'après la légende ancienne. Les
autres se sont livrés à leur imagination
aidée par de précis commentaires.
« C'est en 1587,nous apprend-on, qu'ap-
parut, à Francfort-sur-le-Mein, le livre
populaire du docteur Faust, dont le thé-
âtre des marionnettes s'empara aussi-
tôt. Ce sont ces mêmes marionnettes que
Gœthe vit dans sa jeunesse, à Francfort,
et qui lui donnèrent la première idée
de son chef-d'oeuvre. D'après les docu-
ments, le vrai docteur Faust serait né
en Wurtemberg, à Knittingen, vers 1400
et mort, victime probablement d'une
expérience chimique, en 1540. Une lé-
gende le fait fils de paysans. Un cousin
riche l'adopte et l'instruit. De toute
manière, il s'adonne aux sciences oc-
cultes et vend son âme au diable. Si les
premières dates sont exactes, nous cal-
culons que ce vieux Faust mourut à
cinquante ans. A cinquante ans, on
était, en ce temps-là, un savant véné-
rable, chenu, caduc, orné d'une longue
barbe blanche et obligé de vendre son
âme au diable pour se rajeunir. Ce n'est
pas la peine d'être chimiste. Faust m'a
l'air fort niais en cette légende. Il se
laisse rouler par le Malin et, cela, dès
l'âge de trente-huit ans, puisque le pacte
de Méphisto lui donnait douze ans de
jeunesse et de pouvoirs variés douze
ans. par rouerie-on voit bien là que
c'est une légende allemande puisque
Faust avait conclu pour vingt-quatre
ans ce marché de dupe mais être jeune
nuit et jour, cela se comptait double et
Méphisto n'avait pas, de cela, averti le
naïf. Il y a là une fort bonne morale
qui, peu à peu, conduisit les sages à
constater que « être savant, c'est sa-
voir qu'on ne sait rien ».
Ce pacte, ainsi que nous l'expli-
qua avec la plus amusante compétence
le conférencier qui, à la « répétition
générale », était M. Lichtenberger,
ce pacte défendait aussi au rajeuni d'en-
trer à l'église, de se marier, et de se
laver. Evidemment, sur ce point, la
magie redevenait utile pour paraître,
avenant et parfumé sans jamais tou-
cher l'eau. Mais, que fait Faust de son
rajeunissement Il se fait transporter
à Parme pour y assiter à une fête,
flirter un peu avec la belle duchessp,
et éblouir le duc de ses pouvoirs sata-
niques. Faust me paraît être ici le
patron des mondains. Faire un pacte
avec le diable pour « aller dans le
monde ». c'est bien là l'alliage de Sa-
tan et des pompes et vanités. Il est vrai
que c'est une fête en Italie, et que l'Ita-
lie a toujours paru aux Germains le
Paradis tentateur. Quel charmant dé-
cor Ce jardin de Parme, si lumineux
entre ces groupes de sombres cyprès,
nous a paru rappeler plutôt les jardins
Boboli. Là, Faust, jeune et vêtu de noir,
éblouit la duchesse aux beaux atours,
bien peu, mais trop sans doute, aux
yeux jaloux du duc, vêtu d'or et
d'orange, qui envie la science magique
de son invité. Faust, ayant cru les sub-
juguer en évoquant pour eux des appa-
ritions de lumière et d'ombre, puis
LE MAROC D'EUGÈNE DELACROIX
L'œuvre et la vie d'Eugène Delacroix
sont un thème si riche, un sujet d'études
si ample, que l'inoubliable exposition du
Louvre ne les avait pas épuisés on le
voit bien à cette exposition du Musée de
l'Orangerie qui a été inaugurée mer-
credi. Elle nous offre de nouvelles occa-
sions d'admirer les efforts et les réussites
de l'un des plus beaux génies du siècle
passé un génie dont notre temps a
appris à mieux mesurer la grandeur, grâce
aux travaux et aux publications de MM.
André Joubin, Raymond Escholier, Guif-
frey et J.-L. Vaudoyer, et grâce à l'acti-
vité de la Société des Amis d'Eugène Dela-
croix.
C'est parce que cette dernière a tenu
à commémorer le centenaire du voyage du
maître à Tanger, à Meknès, en Espagne et
à Alger, que sont rassemblés pour quelques
semaines des documents et des œuvres
dispersés de coutume dans les collections
publiques ou privées. D'avoir eu un objet
si défini et des limites si précises l'expo-
sition tire un incontestable avantage elle
présente une unité, une cohésion dont de
semblables manifestations sont trop sou-
vent dépourvues. Ceux qui l'ont organisée
ont montré beaucoup de méthode non seu-
lement dans la réunion des ouvrages expo-
sés, mais aussi dans leur présentation,
qualités qui se retrouvent dans l'excellent
catalogue de M. Charles Sterling. Tout
cela est de l'ouvrage bien fait, qui facili-
tera grandement le plaisir du visiteur déjà
renseigné comme du visiteur peu averti.
L'un comme l'autre ne pourront pas ne
pas éprouver plus ou moins consciemment
une autre impression d'unité, d'unité supé-
rieure et bien rare. Lorsqu'ils se trouve-
ront au centre de la grande salle du musée,
et qu'ils seront ainsi entourés des « orien-
Prométhée, puis Salomé, ne se doute
pas qu'il a excité autant que la jalousie
la méfiance effrayée du duc. Le duc mé-
dite de l'empoisonner au souper. Il faut
que ce soit Méphisto qui avertisse
Faust, toujours ignare, et l'enlève en
son manteau magique pour l'emmener
à Constantinople. Espérons qu'il y eut
quelques aventures intéressantes, mais
on ne nous les représente point.
Nous le retrouvons à Wittemberg,
place de l'église. Le temps va llnir pour
Faust des plaisirs coupables et de la
jeunesse diabolique. Il se repent. Les
cloches tintent dans l'air natal. Faust,
plein de remords, tombe à genoux de-
vant le crucifix. Va-t-il échapper aux
griffes du diable ? Méphisto fait appa-
raître à la rescousse Hélène de Sparte
qui, blanche et nue en des voiles légers,
s'élève, lumineuse, admirable et, comme
toujours depuis tant de siècles, habituée
à plaire. Faust ne résiste pas, lui non
plus. Il suit la beauté et achève ainsi de
se perdre. Cela n'est plus moral. Mais
cette Hélène, en ce vieux conte, incarne
sans doute les voluptés impies, telle
Vénus dans Tannhseuser, les char-
mes défendus et non le rayonnement
du beau. Faust ne tarde pas à revenir,
seul, ayant tenu dans ses bras, non la
divine Hélène, mais une horrible goule.
Le pacte expire dans quelques heures.
Faust est perdu. En vain, en ce cime-
tière qui dort aux pieds de l'église, il
ouvre une tombe pour que le cœur d'un
mort puisse le défendre contre Satan.
L'esprit défunt se lève du sépulcre, non
pour le défendre, mais pour le maudire.
Faust est environné de démons, et il
disparaît.
Nous sommes aux Enfers, comme au
prologue, où Charon regrettait de ne
jamais passer en sa barque d'éminents
personnages, ce qui donna à Pluton
l'idée de tenter et conquérir le docteur
Faust, illustre savant. Dans l'épilogue,
l'entrée de l'enfer est la gueule d'un
monstre, gigantesque à l'échelle des
marionnettes, et qui peut-être est
Cerbère. Ses yeux sont des phares glo-
buleux il ouvre la gueule. Sa mâ-
choire inférieure devient une barque et
le nautonier infernal y embarque ce
Faust, aussi niais que savant. Les en-
fers, en ce conte, sont les enfers païens,
Charon y rame, Pluton y règne; le fan-
tôme de la beauté antique y erre, tout
naturellement ses diables sont pour-
tant ceux-là des enfers bibliques Mé-
phisto est une sorte de Lucifer ambas-
sadeur. Ce mélange de paganisme et de
sentiment chrétien, la scène au pied
du crucifix, de magie, de nécroman-
cie, tout cela est fort étrange et des plus
savoureux.
C'est donc le fantôme d'Hélène qui
inspira à Gœthe les splendeurs de son
second Faust, Gœthe comprit, en revan-
che, pour le premier Faust, que les
aventures du héros étaient, en la lé-
gende, un peu brèves au point de vue
de l'emploi du rajeunissement. Et il
inventa l'épisode de Marguerite, plus
humain en son drame banal qu'une fête
chez le duc de Parme, mais qui, malgré
le succès, toujours inépuisé, de cette
anecdote amoureuse de jeune fille-
mère, trahie, coupable et sauvée, ne me
semble pas non plus d'un poids suffi-
sant pour expliquer qu'on vende son
âme au diable. Car c'est Marguerite qui
AU MUSÉE DE L'OE AHG-EKI
tales de Delacroix, ils admireront leur
magnifique résonance, leurs accords si
pleins, et l'harmonie entre elles de ces
oeuvres, si diverses pourtant, composées
et exécutées à des dates fort différentes,
au cours de trente années, mais toutes por-
tant l'empreinte de la même force, for-
mant une symphonie puissante que seul au
monde pouvait créer le chef d'orchestre
de l'art romantique.
En 1832, le comte Charles de Mornay
dont un croquis nous restitue le masque
décidé et narquois est envoyé par la
France en embassade auprès du sultan du
Maroc. Eugène Delacroix, qui a un peu
plus de trente ans et qui est déjà un homme
célèbre, part avec lui éirconstance con-
sidérable par ses conséquences, petit fait
qui était, on le voit aujourd'hui, un fait
capital et pour le talent de Delacroix, et
pour sa carrière, et pour la peinture fran-
çaise. Le voyage du peintre deux séjours
à Tanger, un séjour à Meknès, des escales
à Oran et à Alger, des excursions à Cadix
et il Séville ne dura que cinq mois.
Mais que de notes prises, quelle glane de
documents en ce court espace de temps,
et surtout quel butin d'images, d'observa-
tions Jusqu'à sa mort, le peintre puisera.
dans ce trésor. Du même coup, il a décou-
vert le monde oriental, alors encore intact,
et redécouvert le monde antique que les
disciples de David avaient travesti et pres-
que ridieulé à ses yeux.
A l'Orangerie, nous assistons en quelque
sorte à la récolte de l'artiste, et à l'élabo-
ration de quelques-uns de ses plus beaux
tableaux. Nous le voyons attentif, intuitif,
merveilleusement intelligent, saisir au pas-
sage tout ce qui le séduit, tout ce qu'il
devine pouvoir être utilisé dans des œuvres
futures, tout ce que sa vie intérieure si
nîme. Et Faust ne connaît pas l'amour.
Il cherche avec orgueil je ne sais quel
pouvoir au delà des puissances hu-
maines..
Le personnage de bon sens de la
pièce des marionnettes, c'est Hans
Wurst, que l'élève Wagner a placé
comme valet, chez Faust, au premier
acte du laboratoire et de magies. Hans
Wurst, Leporello de ce don Juan au
harem d'idées, Hans Wurst, c'est no-
tre ami Kasperl, la même poupée avec le
même costume, les mêmes petits gestes
et il est la joie de ces sombres aventures.
Au début, il a ramassé par terre, dans
le laboratoire, le livre magique et pro-
noncé des mots, au hasard. Ce sont les
formules qui appellent les démons,
et les voilà, tous, autour de Wurst
avec leurs apparences insensées, leurs
queues recourbées, leurs cornes variées,
l'un d'eux a une tête de cheval et un
petit jupon de danseuse c'est ef-
frayant Faust dort dans la pièce voi-
sine. Wurst ira-t-il le réveiller ? Non.
Il serait chassé. Mieux vaut lire au ha-
sard d'autres syllabes. Et il prononce
celles qui renvoient les diables. Alors
il s'amuse comme un petit fou, les fait
revenir, les renvoie, les appelle de nou-
veau. Wurst n,'a peur de rien le rideau
'.tombe sur ces jeux diaboliquement
innocents. Faust, au second acte, en ce
même obscur laboratoire, où brille le
feu de l'athanor et où se profilent dans
les armoires les formes saugrenues des
alambics et des cornues, Faust signe
son pacte avec Méphisto, car, entre tous
les démons apparus, c'est lui qu'il a
choisi comme compagnon, Méphisto lui
ayant affirmé « Je suis rapide comme
la pensée de l'homme. » Et le pacte
signé du sang de Faust, celui-ci, jeune
et beau, part dans le manteau diaboli-
que, à Parme. Et une sorte de dragon
ailé, enfourché par Hans Wurst, se
charge de faire voyager le joyeux valet.
Celui-ci a juré de ne révéler à personne
le véritable nom de son maître. Mais il
ne tient pas parole. Il est bavard comme
tous les bons enfants. Pour le punir,
quand Faust et Méphisto s'envolent im-
promptu vers la Turquie, ils abandon-
nent Wurst. Celui-ci est bien ennuyé.
Mais un autre animal étrange, un coq
de bruyère énorme, surgit, et offre de
rapatrier Hans Wurst s'il vend son âme
au diable. « Mon âme ? je l'ai laissée
ù Wittemberg. Allons-y d'abord, je vous
la donnerai après. » Et le voilà de re-
tour, et, naturellement, se dépêtrant du
diable. Il devient veilleur de nuit et
nous le revoyons tout guilleret, avec sa
lanterne, éclairant un instant les dé-
tresses de Faust, son ancien maître, qui,
en sa nuit fatale, se roule sur le sol en
proie aux cauchemars suprêmes. Le
diable toujours transformé en coq
de bruyère essaie une fois encore de
s'emparer de Wurst, mais le brave petit
type ne se laisse pas faire, et le diable
renonce à lui qui est, en somme, une
trop humble proie. Wurst est pourtant
ce qu'il y a rie vital dans les êtres, ce
bon sens qui s'accommode et se tire
d'affaire, cette gaieté, cette santé, cette
foi rieuse qui aident l'humble créature
à supporter l'existence. Le petit Wurst
représente cet humain bien humain
et non « trop humain » dont la mo-
deste lanterne est plus sûre que ces
fausses lueurs aux terribles magies qui
intense et son imagination toujours fié-
vreuse transformeront en secret. Comme
tous les grands hommes qui ont reçu le
don divin de poésie, il sait d'instinct
trouver dans la réalité les points d'appui
de son rêve.
Comment ne pas contempler avec une
avide curiosité ces croquetons, ces aqua-
relles, ces pastels, tous ces fragments d'al-
bums ou ces études qui conservent l'im-
pression première du maître, celle d'où par
le jeu d'un mécanisme cérébral admirable
est sorti, quelques mois ou quelques années
plus tard, un chef-d'œuvre ? Et qu'il est
émouvant le spectacle du prestigieux
improvisateur s'appliquant à copier sans
erreur un détail de costume ou de harna-
chement, la forme d'une porte, la déco-
ration d'un mur.
Après cela, il faut le voir se livrer à
toute la hâte fébrile et impétueuse de son
génie, enlever avec une sorte de furia cette
esquisse de la Chasse aui lions, où l'ara-
besque principale du grand tableau est
déjà trouvée, ainsi que la distribution des
taches cette esquisse étourdissante, cette
esquisse inspirée.
D'ailleurs la Chasse aux tions, que mal-
heureusement un incendie a dévastée en
1870, est, avec la toile du Louvre Femmes
d'Alger dans leur appartement, la plus
belle parure de l'exposition. Au musée de
Bordeaux, auquel elle appartient, elle est
fort mal placée et on la voit imparfaite-
ment. Sur la cimaise du musée de l'Oran-
gerie, toutes ses beautés triomphent
beauté de la composition et beauté de
l'exécution, beauté des expressions et
beauté des mouvements, et beauté presque
incomparable de la couleur. Là, comme
dans presque tous les tableaux orientaux
de Delacroix et dans tant d'autres de ses i
conduisent aux feux de l'enfer; Leçon
pour les foules apologue fait sans
doute pour décourager le public des
siècles passés 3e se livrer à l'étude des
sciences occultes.
Remercions l'excellente troupe de M.
H. Aicher de nous avoir joué et révélé
cette belle fable séculaire, pleine de sens
nombreux et grosse de songes Si je
préfère les beaux petits acteurs dans
la bonhomie et le riant, je n'en rends
pas moins justice a la façon un peu
trop pompeuse dont ils incarnent les
personnages légendaires, et je ne les
oublierai certes pas, après les avoir si
sincèrement applaudis et goûtés avec
tant de joie et d'admiration à leur taille.
Une poule sur un mur n'a rien i voir
avec le coq de bruyère satanique du
Docteur Faust. Est-ce un mur « der-
rière lequel il se passe quelque chose » ? '?
On se l'imagine. Mais. il ne se passe
rien. Il n'y avait là qu'une certaine
Claudine, avide de devenir « poule »
au sens parisien du mot. Ce pourquoi
elle a fait semblant d'être violée avec
un sac sur la tête. Nous ne la verrons
pas elle restera à jamais pour nous
avec un sac sur la tête. C'était un
« truc » pour se faire remarquer. A la
fin, elle partira, en effet, pour Paris,
enlevée par l'inspecteur de police que
le châtelain du lieu fit venir pour dé-
couvrir le satyre. Et cela, auparavant,
nous fait, tour à tour, soupçonner peu-
dant trois actes et quatre tableaux, ce
châtelain lui-même, son domestique
lequel se révèle à la fin comme inno-
cent d'office, ayant été « abélardé », si
j'ose dire, par une blessure de guerre,
et les deux neveux du châtelain,
François, célibataire, et Bob, marié à
Betty, et Henri, leur ami, marié ù Fos-
sette qui, tout au long de ces actes,
tremble d'être à son tour violée. Nous
avons pu croire aussi, avant les révéla-
tions et successives déductions que tous
ces messieurs s'étaient réunis et com-
posaient, à eux tous, un seul satyre.
Car en ce château, n'est-ce pas, tous
s'ennuient à périr. Mais non. Le jeu,
c'était de leur faire avouer, à ces maris
aux airs innocents, à cet oncle à l'air
respectable, ce qu'ils ont perpétré le
jaufc fatal entre cinq et sept. Et nous
en apprenons. de bien bonnes et
banales et aussi que Betly.l'épouse si
tendrpde Bob, si gros, était la maîtresse
d'Henri, etc., etc., etc. Ce jeu où chacun
tombe mais moralement à tour
de rôle, comme dans la blague enfan-
tine, « Le roi de Maroc est mort. » a
fait beaucoup rire le public. Et puis, le
premier acte, c'est un grand lit, où les
deux ménages se réunissent pour jouer
à la belote. Alors, pour voir installés
comme les frères Poucet ou les filles
de l'Ogre Pauley, Escandc, Mmes
Auger et Daussmond, on ira aux Va-
riétés et on aura raison, car ils sont im-
payables. Et Marcel Vallée, Palau, Lar-
quey, Gérard.Micheline, Bernard jouent
à qui mieux mieux. Mais M. Léopold
Marchand, qui nous a affirmé déjà
tant de talent, n'a fait ici que s'amuser.
Il nous doit, n'est-ce pas ? une vraie
pièce comme il sait en écrire. Car, enfin,
nous ne sommes plus des enfants.
Gérard d'Houville.
E
oeuvres, on voit la trace de l'admiration
profonde du maître pour Rubens mais
si le coloriste du dix-neuvième siècle égale
le coloriste d'Anvers, nous trouvons en lui
des accents d'âme et quelque chose de
frémissant que ne possédait pas le maître
ancien.
On a eu l'idée ingénieuse, et pleuse aussi
en somme, de grouper dans cette exposi-
tion consacrée au voyage de Delacroix
quelques pages d'un artiste dont l'influence
contribua à donner l'envie du départ et
le goût de l'exotisme au romantique Pari-
sien ce M. Auguste, petit-fils de l'orfèvre
célèbre du dix-huitième siècle, qui, fort
cultivé et bien doué, paraît avoir été le
type du délicat voluptueux, trop attiré
par les plaisirs de la vie et les joies de
la curiosité esthétique pour être vraiment
un créateur.
Encore qu'il fût sculpteur, c'est vers la
peinture qu'allaient ses préférences et
qu'il ait eu un œil de peintre, le moindre
de ses essais est là pour l'attester. Un petit
nombre d'oeuvres, dont plusieurs .sont ina-
chevées, nous ravissent par leur distinc-
tion de coloris et de facture, quelque chose
de chatoyant et de nacré qui fait de ce
dilettante à la fois un parent de Delacroix
et un descendant des peintres du dix-hui-
tième siècle, dont il avait eu bien soin
de recueillir et aussi de copier les ouvrages
dédaignés par ses contemporains. L'expo-
sition actuelle va mettre en honneur le
nom de ce charmant original que se
rappelaient seulement quelques passion-
nés de la petite histoire des arts par
mode, on le répétera bientôt, et ainsi la
renommée viendra fêter celui qui se
montra si insoucieux d'elle.
Raymond Lécuyer.
NOUVELLES
LITTERAIRES'
La Société Alexandre Dumas
Les amis et admirateurs d'Alexandre
Dumas père viennent, nous l'avons dit, de
se réunir sous la présidence de Mm»
Alexandre Dumas fils et de fonder la « So-
ciété.des amis d'Alexandre Dumas père ».
Voici la composition du comité
Présidente d'honneur Mme Alexandre
Dumas fils.
Membres d'honneur Mme Ernest d'Hau-
terive, née Alexandre Dumas la générale
Pallu.
Président Docteur Maurice Delort
vice-président M. Fossé d'Arcosse; secré-
taires Mlle ltaza Grand Moulin, M. Hervé
de Peslouan; trésorières: Mme Maurice
Delort, Mme Hervé de Peslouan.
Envoyer les adhésions à M. Hervé de
Peslouan, il Lumagny (Seine-et-Marne).
♦ ♦ ♦
• Le Miroir de l'Est (passage Bleu,
Nancy) organise un concours entre les
jeunes écrivains de langue française. Les
douze manuscrits classés premiers seront
édités gracieusement par les « Cahiers
du Miroir de l'Est ». Ce concours com-
prend quatre sections Romans, Contes et
Nouvelles, Théâtres, Poésies. Demander le
programme à la direction.
«S* M. Jacques Copeau, le célèbre régis-
seur français, se trouve en ce moment à Flo-
rence. Il s'y occupe activement de la pré-
paration du mystère sacré de sainte Olive.
L'exécution dudit mystère fait partie du
Mai musical florentin et aura lieu le 2 juin.
M. Jacques Copeau a visité le cloître mo-
numental de Sainte-Croix en compagnie de
l'ingénieur Galti, secrétaire général du
comité. Après en avoir étudié tous les dé-
tails, il s'est déclaré enthousiasme, jugeant
le cloître admirablement adapté à l'évoca-
tion du mystère sacré.
M. Copeau pense rester quelques jours
encore en Italie. Son intention est de se
mettre en rapport avec les différents inter-
prètes et de fixer les grandes lignes de
l'exécution.
».< Entre le 3 juin et le 3 juillet de cette
année sera ouverte à Bruxelles une expo-
sition italienne du livre, de l'illustration
et des placards illustrés. Cette organisation
est confiée à l'Institut italien du livre qui
est l'organisateur aussi, comme l'on sait,
de la Quadriennale Internationale du Li-
vre. Pendant la période d'ouverture de
l'exposition et exactement entre le 18 et
le 22 jjuin, à Bruxelles, aura lieu aussi Io
Congrès international des Editeurs.
J* On n'a pas oublié les études sur la
Littérature française de Belgique, publiées
ici même par notre excellent collaborateur
M. Léon Bocquet.
Sur proposition de M. le ministre des
affaires étrangères de Belgique, un arrêté
de S. M. le roi Albert vient de conférer :i
notre confrère et ami la croix de chevalier
de l'Ordre de Léopold.
On sait que M. Léon Bocquet était par
ailleurs déjà chevalier do l'ordre de la
Couronne de Belgique.
NOUVELLES
ARTISTIQUES
Le site du Château-Gaillard .<̃ t
aux Andelys
M. Marcel Delaunay, président de la
Société des Amis des Monuments et Sites
de l'Eure, nous communique cette note
L'énergique offensive que nous avons
menée avec notre ami le peintre Sautin,
M. Marcel Baudot, président de la Commis-
sionn des sites, et avec la presse parisienne
et régionale pour la protection totale de la
célèbre forteresse et de son site légendaire,
porte ses fruits.
Les parcelles figurant au cadastre sous
les numéros 47, 48, 72, 74, 75, 78 et 79 de
la section G sont inscrites sur l'inventaire
des sites et monuments naturels.
L'enrichissement
des musées nationaux
Au cours de sa séance du G février, pré-
sidée par M. D. David-Weill, le Conseil
des Musées nationaux, sur la demande de
M. René Dussaud, a accepté le don d'une
céramique du Louristan, fait au départe-
ment des antiquités orientales par un
bienfaiteur anonyme. Sur la proposition
de M. Jean Guiffrey, il a agréé le don par
la Société des Amis du Louvre d'un tableau
de Degas portrait de Pagans et de M. de
Gas père, et de deux dessins de cet artiste.
Egalement sur la proposition de M. Guif-
frey, le conseil a prononcé l'acquisition
d'un tableau de Claude Vignon, signé et
daté de 1624, représentant « Salomon re-
cevant la Reine de Saba ».
Ont été aussi acceptés, sur la proposi-
tion de M. Marquet de Vasselot, pour le
département des objets d'art, une pendule
du début du dix-neuvième siècle représen-
tant « Bélisaire », legs de Mme Chedr,-
ville sur la proposition de M. Louis
Hautecœur, pour le musée du Luxem-
bourg, 17 médailles du graveur Dropsy, of-
fertes par cet artiste sur la proposi-
tion de M. René Grousset, pour le musée
Guimet, un bas-relief indien, école d'Ama-
ravati, figurant « le grand départ du
Bouddha », don de la Société des Amis du
Musée trois statues dravidiennes, « les
trois mères », don de M. Loo, et 13 pein-
tures thibétaines représentant les saints
bouddhiques, don de M. Jacques Bacot.
Pour le musée des antiquités nationales
du château de Saint-Germain-en-Laye, une
statue en bronze de divinité celtique a été
acquise sur la proposition de M. Lantier
qui a, en outre, annoncé Je don par Mme
Millon-Capitan du gisement préhistorique
de la Ferrassie (Dordogne). Enfin, sur la
proposition de M. Brière, a été accepté
pour le musée de Versailles un fragment
de carrelage à décor bleu sur fond blanc
provenant du Trianon de porcelaine. Ce
vestige est un don de Mme Auscher.
En dernier lieu, sur la proposition de
M. Edouard Sarradin, 6 gravures et 11 ca-
ricatures relatives au second Empire et
offertes par M. Duvau ont été acceptées
pour le musée de Compiègne.
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