Titre : Figaro : journal non politique
Éditeur : Figaro (Paris)
Date d'édition : 1902-02-10
Contributeur : Villemessant, Hippolyte de (1810-1879). Directeur de publication
Contributeur : Jouvin, Benoît (1810-1886). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 10 février 1902 10 février 1902
Description : 1902/02/10 (Numéro 41). 1902/02/10 (Numéro 41).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Description : Collection numérique : BIPFPIG63 Collection numérique : BIPFPIG63
Description : Collection numérique : BIPFPIG69 Collection numérique : BIPFPIG69
Description : Collection numérique : Arts de la marionnette Collection numérique : Arts de la marionnette
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Description : Collection numérique : France-Brésil Collection numérique : France-Brésil
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 15/10/2007
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Lundi 10 Févfeer188goa
L«HVuraêH*= SEINE & SSUUE-ET-QISÊ 15 centimes ^DEPMTEttEtiaS 20 centimes
48e Année = 3e Série = U° 41
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H. DE VILLEMESSANT
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SOMMAIRE
*tes Français de mon temps Vl« G. D'A VENEL.
'Chronique du jour .-Figaro.
i L'opérationde Dood/caet Bacfica Thomas Be ylb.
IfDess'm Caban d'Ache.
t Le carnaval de Nice .-Théophile GAUTIER.
41np lettre du baron de San-Malato à Pini.
• Réponse de Pini MAURICE Leudet.
Les chemins de fer éthiopiens MARC LANDRY.
Critique des critiques Le Marquis de Priola
Robert DE Flers. ·
'l'odyssée d'une philosophe JULES Bois.
feuilleton L'Ange du foyer ADRIEN BAR-
BUSSE.
Chronique du Jc>ur 1
Selon l'usage dominical, un certain
(nombre de réunions politiques ont été
.•ténues hier en province, dans un sens
,.comme dans l'autre. A Vesoul, M. Ca-
vaignac a fait une conférence antiminis-
térielle qui a donné lieu à une contre-
manifestation, dirigée par M. Couyba,
,député radical du département. M.
Couyba et ses amis avaient voulu pren-
dre part à la réunion organisée par M.
Cavaignac, mais l'entrée leur en fut in-
terdite, la conférence étant privée. Ils se
réunirent alors dans un autre local, et les
deux manifestations adverses purent se
produire librement sans qu'il en résultât
aucun conflit sérieux, ni à l'intérieur des
salles, ni dans la rue, que les: mem-
bres de la réunion Couyba, au nombre
d'environ trois mille, ont parcourue en
chantant la Marseillaise, et en poussant
.des cris hostiles pour leurs adversaires.
'A Soissons, réunion organisée par le
Comité républicain libéral de l'arrondis-
sement, sous la présidence de M. Mau-
rice Lasserre, député. A Montmorency,
MM. Jules Lemaître et le général Mer-
cier ont parlé en faveur de la candida-
ture de M. Roger Ballu, ancien inspec-
teur général des beaux-arts, récemment
relevé de ses fonctions pour motifs poli-
tiques. A MaisOns-Laffitte, M. François
Coppée a soutenu la candidature de M.
Charles Oster qui se présente contre M.
Bërteâux, député radical de Seine-et-
Gise.
A Lyon, conférence organisée par la
section lyonnaise de la Ligue des patrio-
tes, sous la présidence de M. Galli,
conseiller municipal de Paris. Durant les
discours, un certain tumulte s'est pro-
duit dans la salle, et des bagarres ont eu
lieu à la sortie entre nationalistes et
socialistes. Les, gardiens de la paix n'ont
d'ailleurs pis eu de p.eine à rétablir .l'or-
dre et aucune arrestation n'a été opérée.
Autre manifestation, celle-là d'un carac-
tère plus apaisant et plus recueilli le pré-
fet de la Seine a présidé la cérémonie de
la remise à la ville de Sceaux du monu-
ment élevé à la mémoire des soldats
morts pendant la guerre de 1870. De pa-
triotiques discours ont été prononcés, et
la population tout entière s'est associée
à '•cette pieuse solennité.
M. Pichon, résident général de France
en Tunisie, est arrivé à Paris. M. Revoil
gouverneur général de l'Algérie, y arri-
vera demain. Il faut voir très vraisem-
blablement dans la présence simultanée
de ces deux hauts fonctionnaires le désir
d'examiner avec le gouvernement et de
résoudre d'un commun accord certaines
questions d'ordre administratif et éco-
nomique actuellement à l'ordre du jour
et qui présentent les mêmes intérêts
pour l'Algérie que pour la Tunisie.
Le dimanche gras que les confetti et
les serpentins ont décidément galvanisé
s'est passé avec le cérémonial accoutumé
et dans la même gaieté bruyante et en-
combrante qui est de mise depuis quel-
ques années. Il faut cependant signaler
un progrès. Cette sorte de fête, si désa-
gréable pour ceux qui n'ont pas envie de
s'y mêler, tend de plus en plus à se loca-
liser sur les boulevards. Il y a maintenant
des rues où l'on peut se risquer sans re-
cevoir la mitraille des confetti.Il arrivera
peut-être un moment où l'on ne sera
pas obligé ce dimanche-là, ni le mardi
d'après, de rester enfermé chez soi toute
la journée.
Radica et Doodica, les deux petites
sœurs hindoues, quoique siamoises, ont
été opérées hier par le docteur Doyen.
L'opération a été motivée par cette con-
sidération que, l'une des deux sœurs
étant gravement malade, il s'agissait, si
c'était possible, de sauver l'autre. On lira
plus loin des détails très circonstanciés
sur cette opération très rare dans les
annales de la chirurgie et qui donnera
lieu, certainement, à bien des discus-
sions dans les milieux techniques.
L'affaire Pini-San Malato se corse. Ce
n'est plus maintenant le jeune baron
Athos qui'défie le chevalier en un match
courtois. C'est son père, le vieux et tou-
jours bouillant San Malato, qui provo-
que Pini en combat singulier.. Don Diè-
gue se substitue à Rodrigue, et cette re-
prise du Cid a ceci de particulier qu'elle
se passe à Paris, Pré aux Clercs des na-
tions entre deux vaillants étrangers ve-
nus l'un et l'autre de fort loin, pour
nieux nous prouver sans doute que les
rendez-vous de noble compagnie se don-
nent tous en ce charmant séjour.
Au dîner offert par l'empereur de
Russie en l'honneur de l'archiduc Fran-
çois-Ferdinand, les toasts prononcés ont
été de pure courtoisie, conservant ainsi
à la visite de l'archiduc le caractère ami-
cal et sincèrement cordial que prennent
toujours ces illustres entrevues, lors-
qu'on a la sage précaution de n'y abor-
der aucun sujet politique.
Les bruits de discorde dans la famille
princièrede Monténégro sontdémentis,et
f'on-continue même, quoique non offi-
ciellement encore, à annoncer un projet
de mariage entre la princesse Xénia et
le tsarévitch. Il est certain que la seconde
de' ces nouvelles suffirait amplement à
détruire la première.
Figaro. `
Échos
La Température
Le baromètre reste encore très bas sur toute
l'Europe sur la Baltique à 7391101. sur les
Pays-Bas à 740011^ à Paris, 7500101. Sur nos
côtes la mer est houleuse à Boulogne, Cher-
bourg et Brest, très agitée sur la Méditerra-
née des pluies sont tombées à Bordeaux,
Lyon, Nantes et Nancy.
La température a baissé dans le nord de
l'Europe hier matin, à Paris, le thermomètre
indiquait go au-dessus de zéro vers sept heu-
res et 90 dans l'après-midi; on notait 150 à
Biarritz. En France, des averses restent pro-
bables avec temps frais. Après une assez belle
journée passée sans vent et sans pluie, le ba-
romètre était à 749mm dans la soirée.
Monte-Carlo. Thermomètre le matin à
huit heures, 11°; à midi, 150; beau temps.
LA CORRUPTION ÉLECTORALE
Oy L'approche des élections a mis la
puce à l'oreille des purita.ins. Ces
successeurs de Caton les veulent pures,
blanches comme neige, immaculées.
C'est une conception qui leur fait hon-
neur. Qu'y a-t-il de plus beau qu'un
candidat sans peur, un député sans re-
proche, un orateur sans tache? Il fau-
drait, quand on met la main dessus, l'ex-
poser dans un musée, sous une vitrine,
comme le Régent. (C'est le diamant
que je veux dire.)
Je ne m'étonne donc pas qu'un certain
nombre d'inventeurs vertueux deman-
dent à Dieu et à diable les moyens de
dénicher cet oiseau rare. Ils sont au
moins une vingtaine, à la Chambre et
ailleurs, qui n'en dorment plus. Ils ont
formé une espèce de cénacle où chacun
d'eux apporte son idée. Ils la travaillent
en commun, et lorsqu'ils lui ont donné sa
forme définitive, ils l'envoient en grande
cérémonie à une Commission officielle
qui, après une étude consciencieuse, l'é-
limine ou l'admet.
L'heure est-elle bien choisie pour une
opération de ce genre? Ce n'est pas lors-
que la maison brûle qu'on appelle l'assu-
reur. Bien qu'il paraisse assez naturel de
prendre ses précautions à la veille de la
grande consultation nationale, on se per-
suade, en y réfléchissant, qu'il vaudrait
peut-être mieux les prendre le lende-
main. La fièvre est tombée, l'esprit est
beaucoup plus dégagé, beaucoup plus
libre pour rester dans la mesure, s'arrê-
ter au point juste et ne pas chercher,
comme on le fait en ce moment,,qua-
torze heures à midi.
Il est d'une belle âme de flétrir la cor-
ruption et de la punir. Mais qu'est-ce
que la corruption électorale? Où com-
mence-t-élle? où finit-elle? Comment la
préciser? comment la définir? Et même
comment la reconnaître, comment la
saisir sous tous les masques qu'elle
prend? `
Entre nous, il faut être encore un peu
jeune, ou très canaille, pour prétendre
s'en garantir par des barrières fixes. Il
saute aux yeux qu'elles seront toujours
aussi élastiques que du caoutchouc, sur-
tout si on abandonne à des politiciens le
soin de les changer de place, suivant
qu'elles gêneront un adversaire ou un
ami.
Laissons donc une bonne fois la loi
tranquille. Elle est très bien comme elle
est. Consulté à ce sujet, le président du
Conseil a mis le doigt, du premier coup,
sur la solution raisonnable les tribu-
naux. C'est déjà bien assez que les as-
semblées politiques vérifient elles-mêmes
les pouvoirs de leurs membres. L'histoire
proclame que leur justice ne peut pas
être juste.
Cela ne veut pas dire que je partage
l'opinion d'un philosophe de mes amis,
partisan résolu de la corruption élec-
torale.
Comment! me disait-il, voilà un
pauvre homme qui n'a qu'une fois
en quatre ans l'occasion de gagner cent
sous en vendant son vote, sa seule
ressource, et vous l'en privez Ce n'est
pas démocratique 1
A Travers Paris
Le Président de la République, qui, on
le sait, s'intéresse beaucoup aux ques-
tions d'élevage, a fait savoir à M. le duc
Féry d'Esclands, président, aux mem-
bres du bureau de la Société des avicul-
teurs français qu'il désirait participer,
par l'envoi d'un objet d'art, qui sera of-
fert en prix d'honneur, à l'exposition
d'aviculture dont l'inauguration aura
lieu vendredi dans les serres. du Cours-
la-Reine.
Le président de la Chambre offre, de
son côté, deux volumes Questions so-
ciales et la République nouvelle, de M.
Paul Deschanel, de l'Académie française.
On croit en général que les Burgraves,
dont la Comédie prépare une reprise
solennelle à l'occasion du Centenaire de
Victor Hugo, n'ont pas été représentés
depuis la création. Ils le furent pourtant,
à vrai dire pour une très faible partie,
et voici dans quelles circonstances
Il y a quelque temps, M. Albert Lam-
bert père alla jouer don Salluste en pro-
vince. Au dernier moment, le titulaire de
Ruy Blas manqua, et il fallut confier à
un camarade le soin de lire le rôle. Ce-
lui-ci s'acquittait assez bien de la tâche,
quand un beau geste de don Salluste fit
sauter en l'air le volume.
L'exemplaire était usé il tomba en
faisant accordéon. L'infortuné Ruy Blas
se précipite, le ramasse, le feuillette
éperdu, et, croyant avoir retrouvé la
scène, il profère d'une voix éclatante
II était des serments dans la vieille Allemagne,
Comme de nos habits de guerre et de campagne.
Et il continue sans voir qu'il enfilait
le grand monologue du burgrave du
Loué par ceux-ci, blâmé par ceux-là, me moquant des sots, bravant les méchants, je me hâte
de rire de tout- de peur d'être obHgé d'en pleurer. > (Beaumarchais.)
Rhin. Le volume, hélas contenait les
deux pièces..vj
Le public, d!ailleurs, ne s'aperçut dP
rien et un des Mécènes du cru s'écria de
sa loge:
Hein? cet Hugo, quel génie, quelle
variété
Le succès fut immense.
-ar*
Il avait été, à l'origine, moins éclatant.
M. de Villemessant raconte à propos
de cet événement, dans ses Souvenirs
d'un journaliste, une piquante anec-
dote
Alexandre Dumas, l'ancien, aussi fort à la
valse qu'à la riposte, valsait avec Mme Méla-
nie Waldor, une partenaire digne de lui (à la
valse bien entendu). Tout à coup il fait un
faux pas et touche terre.
Passe, au moment de sa glissade, Paul Fou-
cher, le beau-frère de Victor Hugo dont le
dernier drame, les Burgraves, venait d'es-
suyer, aux Français, une chute éclatante et
durable.
Eh quoi! Dumas, dit Foucher, vous
tombez? Un valseur tel que vous!
Oui, je suis comme les Burgraves, ré-
plique Dumas déjà debout, je tombe; mais
moi, je me relève.. -̃
Les Burgraves ont fait comme Dumas.
NOTES D'UN PARISIEN
M. Huguenet Va donner un spirituel épilo-
gue à son récent démêlé avec la Comédie-
Française. On se souvient de la condition assez
bizarre qu'on avait mise à son entrée dans la
Maison de Molière. On voulait qu'il passât,
préalablement, un petit examen de « classi-
que ». Nul ne doutait de son aptitude à inter-
préter les pièces modernes. Mais on paraissait
moins confiant en ce qui regardait le vieux
répertoire.
On demandait donc à M. Huguenet, en y
mettant d'ailleurs toutes les formes, de vou-
loir bien donner une petite audition. L'éminent
artiste n'y a pas consenti. Il lui a semblé que
son âge ni sa situation ne lui permettaient
de recommencer ses classes, et les pour-
parlers ont été rompus. Mais M. Huguenet
avait cette petite aventure sur le cœur, et il
tenait à prouver qu'il connaissait le classique
autant que personne.
Il a donc demandé au Directeur du Gymnase,
dont il est le plus brillant pensionnaire, de lui
laisser jouer deux pièces du répertoire, Tar 4
tuffe et le Bourgeois gentilhomme. M.FrancK,*
comme on pense, y a consenti avec grand,
plaisir, et c'est donc dans son propre théâtre,
sur la scène où on l'applaudit chaque soir,que;,
M. Huguenet donnera l'audition que désiraient:
de lui ses camarades de la Comédie-Française.i
'Il leur enverra même à tous des invitations*
C'est là du bon esprit très courtois et très màf
licieux, et, par ce côté tout au moins, M.. Hu-
guenet prouve déjà qu'il était digne d'entrer
chez Molière. £. -̃
Une des maîtresses de' maison les plus
impeccables du faubourg Saint-Germain
a causé l'autre soir, sans le vouloir, dans
un bal qu'elle donnait en son hôtel sis
non loin de la rue de Varenne, un véri--
table petit scandale..
Elle avait remarqué, en effet, que
l'huissier si recherché qui connaîttoutes
les têtes du Tout-Paris et qui « annonce»
les invités sans même leur demander
leurs noms commettait journellement
un impair regrettable. Ce fonctionnaire
mondain ayant coutume de voir arriver
ensemble depuis, de longues années la
comtesse de X. et le marquis de Z.
dont la liaison très respectable est consa-
crée par la bienveillance générale, an-
nonçait
Mme la comtesse'de,X. et M. le
marquis de Z. 1
La maîtresse de maison, trouvant là
conjonction fâcheuse, recommanda à
l'huissier de la supprimer lorsque celui-
ci vint prendre ses ordres pour la fête du
soir.
Et vers minuit, en voyant arriver la
comtesse de X. l'homme à la chaine
d'argent se souvint de la prescription
qui lui avait été faite et refaite, et c'est
d'une voix de stentor qu'il jeta ces beaux
noms, en baissant les yeux
Mme la comtesse de X. M. le mar-
quis de Z.
Mais, par malheur, le marquis de Z.
souffrant, n'était pas venu.
Tableau! • .••'•
M. Georges Leygues a résolu de re-
nouer une tradition injustement dédai-
gnée il annonce pour le i5 février un
bal costumé au ministère de l'instruction
publique. Pareille chose ne s'est pas faite
depuis l'Empire. Honneur à l'audacieux
qui tente d'ôter, aux fêtes officielles leur
morne solennité!
Un indiscret nous envoie quelques pro-
nostics de déguisement. A l'en croire,
nous verrons
M. Cailiaux en petit chaperon rouge,
portant dans son panier la bonne galette,
M. PASCAL en Hommelette.
M. PIOT en nourrice. ̃;̃
M. GEORGES Berry en confetti.
M. MESUREUR en J' m'enf.iste.
M. GEORGES CAIN en Abel.
M. MARTIN Du Nord en cadet de Gascogne.
M. Bérenger en vigne vierge.
M. B.erteaux en Tout-Chatou.
M. Roujon en Macquart.
Le comte Robert de Montesqdiou en Chef
des auteurs suaves.
M". CAPUS en trèfle à quatre feuilles.
M. LINTILHAC en fleur-de rhétorique.
M. Jules Laffitte, ancien directeur du
Voltaire et du Siècle, revient prendre sa
place dans la presse parisienne. Il
fonde le Pavé de Paris, journal satirique,
hebdomadaire et illustré à un sou.
On annonce le premier numéro pour
le mardi gras.
Hors Paris
Le carnaval de Nice a été marqué cette
a^née par un. événement politique d'un
caractère exceptionnel, car les batail-
les de fleurs se terminent rarement par
des victoires de l'esprit de famille S. M.
la roides Belges s'est réconcilié avec sa
fille. Oq n'a pas oublié que Léopold II
avait rompu toutes relations avec la
veuve de l'archiduc Rodolphe quand
celle-ci, passant outre à son refus de
consentement, épousa le comte Lonyay.
L'entrevue entre le souverain et la
comtesse eut lieu à Cannes. Cette nou-
velle, qui est très commentée dans les
salons du high-life cosmopolite, sera
également bien accueillie à Bruxelles et
à Vienne. __t_M_
.sw.
On nous signale de Riom,la mort d'un
personnage assez singulier.
M. Georget qu'on appelait familiè-
rement dans le pays le père Georget-
était une sorte d'ermite laïque qui s'était
retiré en un repli de la vallée, entre
Saint-Hippolyte et Manzat, et dans une
maisonnette modeste construite par lui-
même, relisait Homère, Virgile ou Ho-
race et, entre temps, mettait en bouteille
l'eau minérale d'une source voisine (nunc
est bibendum !) qu'un petit âne l'aidait à
transporter à la ville. Mais un hiver,
les ressources manquant, il dut tuer
l'animal pour ne pas mourir de faim.
Cet original qui associait en sa per-
sonne l'anachorète, le négociant et l'hel-
léniste avait été jadis professeur au lycée
de, Clermont. Les baigneurs. qui l'été
fréquentent Châtelguyon se plaisaient à
lui faire visite et à s'entretenir avec lui.
Le père Georget était âgé de quatre-
vingt-douze ans. Si elle ne profite pas
aux sociologues, son histoire, toutefois,
est de nature à laisser un enseignement
aux hygiénistes.
Un médecin bien embarrassé, c'est M.
Russell, de Brooklyn. Nous avons conté
l'ingénieuse imagination de ce docteur
qui offre complaisamment son corps
comme sujet d'expériences scientifiques
aux praticiens yankees, afin de démon-
trer à l'univers l'intérêt de la vivisec-
tion. Six de.ses confrères viennent de le
prendre au mot. L'un d'eux, chirurgien
de l'hôpital de Brooklyn, en se mettant
à sa disposition, énumère déjà avec
complaisance les opérations auxquelles
il se propose de soumettre M. Russell.
Le programme est, parait-il, admi-
rable si admirable même qu'en le li-
sant l'excentrique philanthrope, dit-on,
a pâli. Fort heureusement pour lui, l'at-
torney, du district a fait savoir,que les
chirurgiens coupables de se prêter aux
entreprises du martyr par puffisme se-
raient poursuivis pour assassinat. Et la
précaution n'était pas superflue il pa-
raissait, en effet, particulièrement dan-
gereux d'abandonner aux bistouris de
ses collègues un médecin qui, s'il n'était
mort, eût sans doute « raflé» la clientèle
dç la ville!.
Nouvelles â la Main
Vous savez que Londres est en
émoi! On craint que le roatsbeef mamque
pour les fêtes du couronnement.
Bah 1 les Anglais n'ont qu'à s'a-
dresser à une de leurs colonie. N'en ont-
ils pas une où le jambon et le pain de
mie poussent à même les arbres.
Laquelle ?
Parbleu i les îles Sandwich.
En Cour d'assises. 1
Un témoin dépose d'une façon em-
brouillée.
Je vous engage, lui dit le président,
à ne pas chercher à déguiser la vérité,
car cela pourrait vous mener loin.
Le témoin, froidement
Si je la déguisais, il n'y aurait pas
délit; ne sommes-nous pas en carnaval?
Le Masque de Fer.
LES
Français de mon temps
'̃̃̃̃.7 ̃ -Il- 'v •
LES PROFITS DU RESPECT
Si l'étiquette, chevillée à l'âme des
souverains d'il y a deux siècles et qui ne
les quittait ni jour ni nuit, a disparu
dans le détail de leur existence, comme
un accessoire que l'on sert aux jours de
gala, les dynasties environnantes se
maintiennent par la persistance du sen-
timent qui est leur seule base possible
l'amour.
L'amour est en effet la seule raison
d'être des monarchies, le ciment qui
unit un peuple à une lignée de chefs. En
l'amour est le secret du crédit que fait
ce peuple à cette lignée, quand elle
commet des fautes il lui donne le
temps et le moyen de les réparer. En
l'amour est le secret de l'indulgence que
prodiguent les nations à des primes
ineptes ou débauchés elles attendent
patiemment que la mort les débarrasse
des premiers et que la vieillesse assa-
gisse les. seconds. Elles jettent le man-
teau sur leurs faiblesses et répugnent
presque à en parler.
Les personnes royales sont les idoles
vivantes de cette religion de la patrie,
qui, ailleurs, se symbolise et se concrète
sous l'aspect de morceaux d'étoffes mul-
ticolores les drapeaux.
L'esprit monarchique est donc affaire
de sentiment, et de sentiment éomplexe
comme tous ceux des hommes à demi
instinctif, à demi raisonné. Il entre dans
cette sympathie une part d'intérêt et une
part d'habitude respectueuse. En Angle-
terre, Allemagne, Autriche ou Italie, le
monarque, même aux yeux de ceux qui
veulent le renverser et qui croient le
haïr, conserve quelque auréole le socia-
liste allemand ne peut s'empêcher de
« rectifier la position » sur lé passage de
l'Empereur et de crier « Hoch Hoch »
En France, l'auréole s'est dissipée et il
n'y a plus d'encens pour ce culte. Per-
sonne ne croit, plus à l'essence supé-
rieure, au caractère supernaturel du
prince, ni le peuple, ni l'aristocratie, ni
les membres de la famille royale. L en-
tourage même du prétendant et son pro-
pre parti, prompts à le blâmer lorsqu'il
affecte des allures trop unies et familiè-
res, s'il semble au contraire trop con-
vaincu de sa«Majesté »,nese gênent pas
pour en rire.
Il en allait tout autrement à la fin du
dix-huitième siècle, non seulement chez
les royalistes mais chez les révolution-
naires. En guillotinant le Roi, -les régi-
cides entendaient bien commettre un sa-
crilège mais on ne commet de sacrilège
que lorsqu'on a quelque reste de foi.
S'ils n'avaient pas eu au cœur un fonds
inavoué de vénération, ils auraient tout
bonnement destitué ou chassé LouisX VI.
̃'̃ ̃ :̃ #̃
C'est, semble-t-il, un grand avantage 1
pour une nation que d'avoir perdu le
« respect ». Une nation respectueuse res-
pecte beaucoup de choses et de gens qui
'ne sont pas respectables. Elle place donc
très mal son respect. On objectera que du
respect mal placé revient de celui qui
en est l'objet indigne à celui qui l'a ma-
nifèsté et l'honore lui même, parce qu'il
fait preuve de soumission à des lois gé-
nérales et utiles. On dira aussi qu'une
nation qui perd le respect le remplace
peut-être par l'envie, qui n'est que du
respect tourné à l'aigre, ou par du « sno-
bisme », qui n'est que du respect tourné
au ridicule.
Cependant un peuple qui perd le res-
pect des puissants, celui des noms et des
belles apparences, continuera d'honorer
ce qui est vraiment estimable il ne révé-
rera ni les seigneurs, ni les ministres, ni
les millionnaires, parce qu'il sait com-
ment on les fabrique, ce qu'ils sont et
combien ils valent leur niaiserie',
leurs vices, leur parfaite ressemblance
avec les plus médiocres des citoyens,
mais il rendra hommage aux héros, aux
savants, aux individus qui, par leur in-
telligence ou leur vertu, ont acquis des
droits à la déférence.
Ainsi il placera bien son respect au
lieu de le placer mal. Et il faut se félici-
ter d'avoir perdu le mauvais respect et
d'avoir gagné le bon. Voilà qui est par-
fait les hommes de valeur, artistes,
gens de lettres, chez qui le génie n'ex-
dut pas la vanité, se réjouissent, comme
vaniteux, des égards accordés à leur ta-
lent et pensent que tout est bien. Les an-
ciennes supériorités, qui jadis avaient
remplacé la force du poignet^- la plus an-
cienne force, celle des sauvages et
qui consistaient en la puissance, la ri-
chesse, la naissance, ne donnent pftis
droit au respect et la gloire seule, le mé-
dite personnel le conféreront.
Théoriquement ce serait très beau; il
en va tout autrement 'dans la pratique.
Les hommes glorieux et méritants, qui
les désignera ? La notoriété, venue de la
chance, de la camaraderie, de la réclame
imite assez exactement la gloire et le mé-
rite, du moins pour un temps et pendant
la vie de l'intéressé. On peut donc res-
pecter un faux glorieux, un faux méri-
tant, et, là encore, le respect fera fausse
route.
Puis ce respect, qui n'est plus un lien
social mais seulement une opinion dis-
cutable, un dilettantisme, ne suffit pas a
investir d'autorité les hommes auxquels
il s'adresse. Ceux qui sont honorés sont
de simples particuliers, sans influence
effective, sans rang positif dans l'Etat.
Ceux qui possèdent ce rang sont de tout
autres gens.
C'est un régime fâcheux, parce que
ceux qui jouissent de l'autorité ne jouis-
sent pas du respect. Ils ne jouissent que
de la puissance brutale, de celle du ser-
gent de ville la force du poignet. Et
ainsi, en perdant le respect pour ceux
qui avaient le pouvoir- ce qui était une
fiction, stupide si l'on veut, mais néces-
saire,- une nation se rapproche, non
pas d'un degré supérieur de civilisation,
mais d'un degré inférieur de barbarie.
Il faut toujours en revenir au mot de
Pascal « Ne pouvant faire que la justice
fût la force, on a fait que la force serait
la justice. » Et en effet cela est très
sage, sinon il n'y aurait point de paix.
'̃•
Les hommes se parlent pour se per-
suader ils espèrent donc se persuader.
Ils trouvent naturel de convaincre autrui
d'erreur; mais ils trouvent déshonorant
d'être eux-mêmes convaincus d'erreur.
Cependant ils professent qu'il est juste
de changer d'opinion, quand on en a une
mauvaise les journaux, les discours
ont pour objet de modifier l'opinion en
l' « éclairant ». Mais lorsqu'on est par-
venu à ce but et que l'adversaire s'est
rendu à votre avis, on le méprise; s'il
ne s'y est point rendu, on le hait.
Plaisant prosélytisme qui réprouve
les prosélytes mêmes qu'il fait. Chacun
dit qu'il faut se perfectionner par l'ex-
périence et tout le monde estime que
c'est petitesse et faiblesse d'esprit de
changer sa manière de voir.
Une chose très fréquente est de dis-
cuter avec quelqu'un en défendant sa
thèse jusqu'à la fin, sans en démordre.
Mais l'avis contraire, quoi qu'on en ait,
vous a touché. C'est un germe; il fer-
mente, et le mois d'après on s'entre-
tient avec un autre interlocuteur en
soutenant les arguments que l'on com-
battait naguère, et qui ont pénétré en
soi, que l'on a fait siens.
« On affirme que tel ou tel régime ne
convient pas à la France », disait un
vieil homme d'Etat, et il ajoutait rêveu-
sement « Je voudrais bien savoir quel
est le régime qui convient à la France 1 »
Peut-être aucun, peut-être tous; car elle
a aimé les plus divers, et de tous, elle
s'est lassée. Quand elle a joui d'un gou-
vernement libéral, elle s'est plainte,de
l'anarchie; elle s'est plainte du despo-
tisme quand elle a possédé un gouverne-
On s'abonne dans tous les Bureaux de Poste
de France et d'Algérie.
ment autoritaire, et sous la présente
République on reproche aux Chambres
d'être « indisciplinées quand elles ren-
versent les ministères, et d'être « ser-
viles quand elles les conservent.
Qui dira les motifs de la popularité ?
qui en sondera les mystères? Autant
vaudrait-il chercher à expliquer pour-
quoi les femmes ont porté des crinolines
et pourquoi elles n'en portent plus. Deux
Présidents se sont succédé, dont le pre-
mier s'est rendu impopulaire par un
attelage à la Daumont et par un piqueur
galonné d'or, sur lesquels son successeur
a fondé sa popularité.
Des inconnus excitèrent l'enthou-
siasme et provoquèrent l'admiration par
un libellé injuste, ou par quelques in-
vectives déclamatoires; portés au som-
met du pouvoir ils s'en étaient montrés
dignes en ordonnant un gouvernement
raisonnable ou en dotant leur pays de
territoires étendus. Mais, depuis qu'ils
méritaient l'estime, ils étaient parvenus
au comble de l'impopularité,
V">G. d'Avenel.
LE WAGON-SALON
Rencontré hier M. Edgar Dutampon, le
sympathique sous-chef de gare, aquarelliste
distingué à ses heures.
Eh bien cher ami, on se prépare, j'es-
père, à ce Salon des chemins de fer, à ce
wagon-Salon, pourrait-on dire ? Sera-t-on prêt
pour le 2 mars ?
N'ayez crainte, nous arriverons à l'heure
exacte. à moins d'accident.
Tant mieux! car le public est' dans
l'attente. que dis-je ? dans la salle d'attente.
Savez-vous bien que cette exposition sera un
événement de great attraction ?
La traction, ça nous connaît.
Exquis. On voit que vous êtes dans le
train. A propos, qu'exposez-vous?
Pas grand' chose. un Coin de.
Compartiment?
Non, de forêt. Une étude. rapide; un
souvenir de voyage.
Vous êtes trop modeste. Je prévois que
les amateurs dont vous n'avez pas à crain-
dre le contrôle n'en seront pas quittes de-
vant votre œuvre à moins de. dix minutes
d'arrêt.
Degrâce, mettez un frein à- vos compli-
ments.
Mais un de vos collègues doit, je crois^
exposer aussi un Coin de forêt.
Ah dame, il est bien difficile d'éviter les
rencontres 1
Avouez que celui-là, vous l'avez fait
express.. •̃- ̃
Aussi; vous in'avèr mis'sur la voie
Je vous quitte et: vous souhaite un succès
sur toute la ligne, un* succès. de première
classe.
Merci. On vous verra. au vernissage?
Tout..au,.moins.au buffet!
Champignol.
RADICA ET DOODICA
Récit de l'opération
Radica et Doodica ont été opérées hier,
presque à l'improviste. Nous avons vu le
docteur Doyen, qui a réussi brillamment
cette difficile opération, et il a bien voulu
nous en donner une description détaillée.
Cet exact récit initiera nos lecteurs aux
détails d'un « cas » assez rare dans les
annales de la chirurgie.
Oui certes, il est rare, nous dit le
distingué praticien, car la séparation des
monstres viables et bien conformés,sou-
dés deux à deux par un large pont de
tissus au niveau de la fourchette du ster-
num, et scientifiquement appelés xipho-
pages, a été longtemps considérée comme:
impraticable.
» Les opérations qu'on en cite sont
celles de Kœnig, en 1689 de Boehm, en,
1866, qui opéra ses propres filles et ne
put en sauver qu'une; celle des sœurs
Marie-Adèle, opérées sans succès en
Suisse, en 1882 enfin l'opération faite le
30 mai 1900 par le docteur Chapot-Pré-
vost sur deux petites Brésiliennes âgées
de sept an% dont l'une succomba le
sixième jour, et dont l'autre guérit par-
faitement.
» L'opération que j'ai dû pratiquer d'ur-
gence aujourd'hui a été entreprise dans
des conditions exceptionnellement défa-
vorables, puisqu'il s'agissait de séparer
deux sujets tuberculeux, l'un plus gra-
vement atteint et presque mourant.
» Je n'ai eu d'autre but, en entre-
prenant cette opération grave, que de
sauver l'existence de l'une au moins de
ces charmantes fillettes, s'il en était en-
core temps. Je n'ai pas pu opérer plus
tôt, car elles étaient beaucoup trop fai-
bles le jour où on,me les a amenées. »
Ici, j'interromps le docteur Doyen
On s'est un peu étonné de les voir
enlever brusquement de l'hôpital où on
les avait conduites. Pour quelle raison?
• La chose est cependant bien simple.
» Ces enfants avaient été amenées à
l'hôpital Trousseau avec l'assentiment
de Mme Colmann, leur mère adoptive,
qui les a réclamées, comme elle en avait
le droit, parce qu'elle a jugé convenable
de le faire.
» Mme Colmann, qui est la tutrice lé-
gale des deux fillettes, m'a prié de les
recevoir dans ma maison de santé, afin
que les petites malades, qu'elle aime
beaucoup,. soient mieux soignées et
puissent échapper à des examens répé-.
tés, comme il est d'usage dans les hôpi-
taux.
-Et l'opération a réussi ?
Exceptionnellement courte, elle a,
duré, pour les deux enfants, en tout
vingt minutes. Elle a été pratiquée de ta.
façon suivante. »
Ici j'écris sous la dictée du docteur
Doyen
Les deux sœurs, placées sur une ta-
ble recouverte d'un drap stérilisé, et moi i
Lundi 10 Févfeer188goa
L«HVuraêH*= SEINE & SSUUE-ET-QISÊ 15 centimes ^DEPMTEttEtiaS 20 centimes
48e Année = 3e Série = U° 41
a 1
H. DE VILLEMESSANT
Fondateur
Gaston CALMETTE
Directeur-Gérant
RÉDACTION ADMINISTRATION
26, rue Drouot PARIS (9« Art1}
Téléphone trois lignes
K«» 102-46 102-47 102-49
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36 rue Drouot 26
SOMMAIRE
*tes Français de mon temps Vl« G. D'A VENEL.
'Chronique du jour .-Figaro.
i L'opérationde Dood/caet Bacfica Thomas Be ylb.
IfDess'm Caban d'Ache.
t Le carnaval de Nice .-Théophile GAUTIER.
41np lettre du baron de San-Malato à Pini.
• Réponse de Pini MAURICE Leudet.
Les chemins de fer éthiopiens MARC LANDRY.
Critique des critiques Le Marquis de Priola
Robert DE Flers. ·
'l'odyssée d'une philosophe JULES Bois.
feuilleton L'Ange du foyer ADRIEN BAR-
BUSSE.
Chronique du Jc>ur 1
Selon l'usage dominical, un certain
(nombre de réunions politiques ont été
.•ténues hier en province, dans un sens
,.comme dans l'autre. A Vesoul, M. Ca-
vaignac a fait une conférence antiminis-
térielle qui a donné lieu à une contre-
manifestation, dirigée par M. Couyba,
,député radical du département. M.
Couyba et ses amis avaient voulu pren-
dre part à la réunion organisée par M.
Cavaignac, mais l'entrée leur en fut in-
terdite, la conférence étant privée. Ils se
réunirent alors dans un autre local, et les
deux manifestations adverses purent se
produire librement sans qu'il en résultât
aucun conflit sérieux, ni à l'intérieur des
salles, ni dans la rue, que les: mem-
bres de la réunion Couyba, au nombre
d'environ trois mille, ont parcourue en
chantant la Marseillaise, et en poussant
.des cris hostiles pour leurs adversaires.
'A Soissons, réunion organisée par le
Comité républicain libéral de l'arrondis-
sement, sous la présidence de M. Mau-
rice Lasserre, député. A Montmorency,
MM. Jules Lemaître et le général Mer-
cier ont parlé en faveur de la candida-
ture de M. Roger Ballu, ancien inspec-
teur général des beaux-arts, récemment
relevé de ses fonctions pour motifs poli-
tiques. A MaisOns-Laffitte, M. François
Coppée a soutenu la candidature de M.
Charles Oster qui se présente contre M.
Bërteâux, député radical de Seine-et-
Gise.
A Lyon, conférence organisée par la
section lyonnaise de la Ligue des patrio-
tes, sous la présidence de M. Galli,
conseiller municipal de Paris. Durant les
discours, un certain tumulte s'est pro-
duit dans la salle, et des bagarres ont eu
lieu à la sortie entre nationalistes et
socialistes. Les, gardiens de la paix n'ont
d'ailleurs pis eu de p.eine à rétablir .l'or-
dre et aucune arrestation n'a été opérée.
Autre manifestation, celle-là d'un carac-
tère plus apaisant et plus recueilli le pré-
fet de la Seine a présidé la cérémonie de
la remise à la ville de Sceaux du monu-
ment élevé à la mémoire des soldats
morts pendant la guerre de 1870. De pa-
triotiques discours ont été prononcés, et
la population tout entière s'est associée
à '•cette pieuse solennité.
M. Pichon, résident général de France
en Tunisie, est arrivé à Paris. M. Revoil
gouverneur général de l'Algérie, y arri-
vera demain. Il faut voir très vraisem-
blablement dans la présence simultanée
de ces deux hauts fonctionnaires le désir
d'examiner avec le gouvernement et de
résoudre d'un commun accord certaines
questions d'ordre administratif et éco-
nomique actuellement à l'ordre du jour
et qui présentent les mêmes intérêts
pour l'Algérie que pour la Tunisie.
Le dimanche gras que les confetti et
les serpentins ont décidément galvanisé
s'est passé avec le cérémonial accoutumé
et dans la même gaieté bruyante et en-
combrante qui est de mise depuis quel-
ques années. Il faut cependant signaler
un progrès. Cette sorte de fête, si désa-
gréable pour ceux qui n'ont pas envie de
s'y mêler, tend de plus en plus à se loca-
liser sur les boulevards. Il y a maintenant
des rues où l'on peut se risquer sans re-
cevoir la mitraille des confetti.Il arrivera
peut-être un moment où l'on ne sera
pas obligé ce dimanche-là, ni le mardi
d'après, de rester enfermé chez soi toute
la journée.
Radica et Doodica, les deux petites
sœurs hindoues, quoique siamoises, ont
été opérées hier par le docteur Doyen.
L'opération a été motivée par cette con-
sidération que, l'une des deux sœurs
étant gravement malade, il s'agissait, si
c'était possible, de sauver l'autre. On lira
plus loin des détails très circonstanciés
sur cette opération très rare dans les
annales de la chirurgie et qui donnera
lieu, certainement, à bien des discus-
sions dans les milieux techniques.
L'affaire Pini-San Malato se corse. Ce
n'est plus maintenant le jeune baron
Athos qui'défie le chevalier en un match
courtois. C'est son père, le vieux et tou-
jours bouillant San Malato, qui provo-
que Pini en combat singulier.. Don Diè-
gue se substitue à Rodrigue, et cette re-
prise du Cid a ceci de particulier qu'elle
se passe à Paris, Pré aux Clercs des na-
tions entre deux vaillants étrangers ve-
nus l'un et l'autre de fort loin, pour
nieux nous prouver sans doute que les
rendez-vous de noble compagnie se don-
nent tous en ce charmant séjour.
Au dîner offert par l'empereur de
Russie en l'honneur de l'archiduc Fran-
çois-Ferdinand, les toasts prononcés ont
été de pure courtoisie, conservant ainsi
à la visite de l'archiduc le caractère ami-
cal et sincèrement cordial que prennent
toujours ces illustres entrevues, lors-
qu'on a la sage précaution de n'y abor-
der aucun sujet politique.
Les bruits de discorde dans la famille
princièrede Monténégro sontdémentis,et
f'on-continue même, quoique non offi-
ciellement encore, à annoncer un projet
de mariage entre la princesse Xénia et
le tsarévitch. Il est certain que la seconde
de' ces nouvelles suffirait amplement à
détruire la première.
Figaro. `
Échos
La Température
Le baromètre reste encore très bas sur toute
l'Europe sur la Baltique à 7391101. sur les
Pays-Bas à 740011^ à Paris, 7500101. Sur nos
côtes la mer est houleuse à Boulogne, Cher-
bourg et Brest, très agitée sur la Méditerra-
née des pluies sont tombées à Bordeaux,
Lyon, Nantes et Nancy.
La température a baissé dans le nord de
l'Europe hier matin, à Paris, le thermomètre
indiquait go au-dessus de zéro vers sept heu-
res et 90 dans l'après-midi; on notait 150 à
Biarritz. En France, des averses restent pro-
bables avec temps frais. Après une assez belle
journée passée sans vent et sans pluie, le ba-
romètre était à 749mm dans la soirée.
Monte-Carlo. Thermomètre le matin à
huit heures, 11°; à midi, 150; beau temps.
LA CORRUPTION ÉLECTORALE
Oy L'approche des élections a mis la
puce à l'oreille des purita.ins. Ces
successeurs de Caton les veulent pures,
blanches comme neige, immaculées.
C'est une conception qui leur fait hon-
neur. Qu'y a-t-il de plus beau qu'un
candidat sans peur, un député sans re-
proche, un orateur sans tache? Il fau-
drait, quand on met la main dessus, l'ex-
poser dans un musée, sous une vitrine,
comme le Régent. (C'est le diamant
que je veux dire.)
Je ne m'étonne donc pas qu'un certain
nombre d'inventeurs vertueux deman-
dent à Dieu et à diable les moyens de
dénicher cet oiseau rare. Ils sont au
moins une vingtaine, à la Chambre et
ailleurs, qui n'en dorment plus. Ils ont
formé une espèce de cénacle où chacun
d'eux apporte son idée. Ils la travaillent
en commun, et lorsqu'ils lui ont donné sa
forme définitive, ils l'envoient en grande
cérémonie à une Commission officielle
qui, après une étude consciencieuse, l'é-
limine ou l'admet.
L'heure est-elle bien choisie pour une
opération de ce genre? Ce n'est pas lors-
que la maison brûle qu'on appelle l'assu-
reur. Bien qu'il paraisse assez naturel de
prendre ses précautions à la veille de la
grande consultation nationale, on se per-
suade, en y réfléchissant, qu'il vaudrait
peut-être mieux les prendre le lende-
main. La fièvre est tombée, l'esprit est
beaucoup plus dégagé, beaucoup plus
libre pour rester dans la mesure, s'arrê-
ter au point juste et ne pas chercher,
comme on le fait en ce moment,,qua-
torze heures à midi.
Il est d'une belle âme de flétrir la cor-
ruption et de la punir. Mais qu'est-ce
que la corruption électorale? Où com-
mence-t-élle? où finit-elle? Comment la
préciser? comment la définir? Et même
comment la reconnaître, comment la
saisir sous tous les masques qu'elle
prend? `
Entre nous, il faut être encore un peu
jeune, ou très canaille, pour prétendre
s'en garantir par des barrières fixes. Il
saute aux yeux qu'elles seront toujours
aussi élastiques que du caoutchouc, sur-
tout si on abandonne à des politiciens le
soin de les changer de place, suivant
qu'elles gêneront un adversaire ou un
ami.
Laissons donc une bonne fois la loi
tranquille. Elle est très bien comme elle
est. Consulté à ce sujet, le président du
Conseil a mis le doigt, du premier coup,
sur la solution raisonnable les tribu-
naux. C'est déjà bien assez que les as-
semblées politiques vérifient elles-mêmes
les pouvoirs de leurs membres. L'histoire
proclame que leur justice ne peut pas
être juste.
Cela ne veut pas dire que je partage
l'opinion d'un philosophe de mes amis,
partisan résolu de la corruption élec-
torale.
Comment! me disait-il, voilà un
pauvre homme qui n'a qu'une fois
en quatre ans l'occasion de gagner cent
sous en vendant son vote, sa seule
ressource, et vous l'en privez Ce n'est
pas démocratique 1
A Travers Paris
Le Président de la République, qui, on
le sait, s'intéresse beaucoup aux ques-
tions d'élevage, a fait savoir à M. le duc
Féry d'Esclands, président, aux mem-
bres du bureau de la Société des avicul-
teurs français qu'il désirait participer,
par l'envoi d'un objet d'art, qui sera of-
fert en prix d'honneur, à l'exposition
d'aviculture dont l'inauguration aura
lieu vendredi dans les serres. du Cours-
la-Reine.
Le président de la Chambre offre, de
son côté, deux volumes Questions so-
ciales et la République nouvelle, de M.
Paul Deschanel, de l'Académie française.
On croit en général que les Burgraves,
dont la Comédie prépare une reprise
solennelle à l'occasion du Centenaire de
Victor Hugo, n'ont pas été représentés
depuis la création. Ils le furent pourtant,
à vrai dire pour une très faible partie,
et voici dans quelles circonstances
Il y a quelque temps, M. Albert Lam-
bert père alla jouer don Salluste en pro-
vince. Au dernier moment, le titulaire de
Ruy Blas manqua, et il fallut confier à
un camarade le soin de lire le rôle. Ce-
lui-ci s'acquittait assez bien de la tâche,
quand un beau geste de don Salluste fit
sauter en l'air le volume.
L'exemplaire était usé il tomba en
faisant accordéon. L'infortuné Ruy Blas
se précipite, le ramasse, le feuillette
éperdu, et, croyant avoir retrouvé la
scène, il profère d'une voix éclatante
II était des serments dans la vieille Allemagne,
Comme de nos habits de guerre et de campagne.
Et il continue sans voir qu'il enfilait
le grand monologue du burgrave du
Loué par ceux-ci, blâmé par ceux-là, me moquant des sots, bravant les méchants, je me hâte
de rire de tout- de peur d'être obHgé d'en pleurer. > (Beaumarchais.)
Rhin. Le volume, hélas contenait les
deux pièces..vj
Le public, d!ailleurs, ne s'aperçut dP
rien et un des Mécènes du cru s'écria de
sa loge:
Hein? cet Hugo, quel génie, quelle
variété
Le succès fut immense.
-ar*
Il avait été, à l'origine, moins éclatant.
M. de Villemessant raconte à propos
de cet événement, dans ses Souvenirs
d'un journaliste, une piquante anec-
dote
Alexandre Dumas, l'ancien, aussi fort à la
valse qu'à la riposte, valsait avec Mme Méla-
nie Waldor, une partenaire digne de lui (à la
valse bien entendu). Tout à coup il fait un
faux pas et touche terre.
Passe, au moment de sa glissade, Paul Fou-
cher, le beau-frère de Victor Hugo dont le
dernier drame, les Burgraves, venait d'es-
suyer, aux Français, une chute éclatante et
durable.
Eh quoi! Dumas, dit Foucher, vous
tombez? Un valseur tel que vous!
Oui, je suis comme les Burgraves, ré-
plique Dumas déjà debout, je tombe; mais
moi, je me relève.. -̃
Les Burgraves ont fait comme Dumas.
NOTES D'UN PARISIEN
M. Huguenet Va donner un spirituel épilo-
gue à son récent démêlé avec la Comédie-
Française. On se souvient de la condition assez
bizarre qu'on avait mise à son entrée dans la
Maison de Molière. On voulait qu'il passât,
préalablement, un petit examen de « classi-
que ». Nul ne doutait de son aptitude à inter-
préter les pièces modernes. Mais on paraissait
moins confiant en ce qui regardait le vieux
répertoire.
On demandait donc à M. Huguenet, en y
mettant d'ailleurs toutes les formes, de vou-
loir bien donner une petite audition. L'éminent
artiste n'y a pas consenti. Il lui a semblé que
son âge ni sa situation ne lui permettaient
de recommencer ses classes, et les pour-
parlers ont été rompus. Mais M. Huguenet
avait cette petite aventure sur le cœur, et il
tenait à prouver qu'il connaissait le classique
autant que personne.
Il a donc demandé au Directeur du Gymnase,
dont il est le plus brillant pensionnaire, de lui
laisser jouer deux pièces du répertoire, Tar 4
tuffe et le Bourgeois gentilhomme. M.FrancK,*
comme on pense, y a consenti avec grand,
plaisir, et c'est donc dans son propre théâtre,
sur la scène où on l'applaudit chaque soir,que;,
M. Huguenet donnera l'audition que désiraient:
de lui ses camarades de la Comédie-Française.i
'Il leur enverra même à tous des invitations*
C'est là du bon esprit très courtois et très màf
licieux, et, par ce côté tout au moins, M.. Hu-
guenet prouve déjà qu'il était digne d'entrer
chez Molière. £. -̃
Une des maîtresses de' maison les plus
impeccables du faubourg Saint-Germain
a causé l'autre soir, sans le vouloir, dans
un bal qu'elle donnait en son hôtel sis
non loin de la rue de Varenne, un véri--
table petit scandale..
Elle avait remarqué, en effet, que
l'huissier si recherché qui connaîttoutes
les têtes du Tout-Paris et qui « annonce»
les invités sans même leur demander
leurs noms commettait journellement
un impair regrettable. Ce fonctionnaire
mondain ayant coutume de voir arriver
ensemble depuis, de longues années la
comtesse de X. et le marquis de Z.
dont la liaison très respectable est consa-
crée par la bienveillance générale, an-
nonçait
Mme la comtesse'de,X. et M. le
marquis de Z. 1
La maîtresse de maison, trouvant là
conjonction fâcheuse, recommanda à
l'huissier de la supprimer lorsque celui-
ci vint prendre ses ordres pour la fête du
soir.
Et vers minuit, en voyant arriver la
comtesse de X. l'homme à la chaine
d'argent se souvint de la prescription
qui lui avait été faite et refaite, et c'est
d'une voix de stentor qu'il jeta ces beaux
noms, en baissant les yeux
Mme la comtesse de X. M. le mar-
quis de Z.
Mais, par malheur, le marquis de Z.
souffrant, n'était pas venu.
Tableau! • .••'•
M. Georges Leygues a résolu de re-
nouer une tradition injustement dédai-
gnée il annonce pour le i5 février un
bal costumé au ministère de l'instruction
publique. Pareille chose ne s'est pas faite
depuis l'Empire. Honneur à l'audacieux
qui tente d'ôter, aux fêtes officielles leur
morne solennité!
Un indiscret nous envoie quelques pro-
nostics de déguisement. A l'en croire,
nous verrons
M. Cailiaux en petit chaperon rouge,
portant dans son panier la bonne galette,
M. PASCAL en Hommelette.
M. PIOT en nourrice. ̃;̃
M. GEORGES Berry en confetti.
M. MESUREUR en J' m'enf.iste.
M. GEORGES CAIN en Abel.
M. MARTIN Du Nord en cadet de Gascogne.
M. Bérenger en vigne vierge.
M. B.erteaux en Tout-Chatou.
M. Roujon en Macquart.
Le comte Robert de Montesqdiou en Chef
des auteurs suaves.
M". CAPUS en trèfle à quatre feuilles.
M. LINTILHAC en fleur-de rhétorique.
M. Jules Laffitte, ancien directeur du
Voltaire et du Siècle, revient prendre sa
place dans la presse parisienne. Il
fonde le Pavé de Paris, journal satirique,
hebdomadaire et illustré à un sou.
On annonce le premier numéro pour
le mardi gras.
Hors Paris
Le carnaval de Nice a été marqué cette
a^née par un. événement politique d'un
caractère exceptionnel, car les batail-
les de fleurs se terminent rarement par
des victoires de l'esprit de famille S. M.
la roides Belges s'est réconcilié avec sa
fille. Oq n'a pas oublié que Léopold II
avait rompu toutes relations avec la
veuve de l'archiduc Rodolphe quand
celle-ci, passant outre à son refus de
consentement, épousa le comte Lonyay.
L'entrevue entre le souverain et la
comtesse eut lieu à Cannes. Cette nou-
velle, qui est très commentée dans les
salons du high-life cosmopolite, sera
également bien accueillie à Bruxelles et
à Vienne. __t_M_
.sw.
On nous signale de Riom,la mort d'un
personnage assez singulier.
M. Georget qu'on appelait familiè-
rement dans le pays le père Georget-
était une sorte d'ermite laïque qui s'était
retiré en un repli de la vallée, entre
Saint-Hippolyte et Manzat, et dans une
maisonnette modeste construite par lui-
même, relisait Homère, Virgile ou Ho-
race et, entre temps, mettait en bouteille
l'eau minérale d'une source voisine (nunc
est bibendum !) qu'un petit âne l'aidait à
transporter à la ville. Mais un hiver,
les ressources manquant, il dut tuer
l'animal pour ne pas mourir de faim.
Cet original qui associait en sa per-
sonne l'anachorète, le négociant et l'hel-
léniste avait été jadis professeur au lycée
de, Clermont. Les baigneurs. qui l'été
fréquentent Châtelguyon se plaisaient à
lui faire visite et à s'entretenir avec lui.
Le père Georget était âgé de quatre-
vingt-douze ans. Si elle ne profite pas
aux sociologues, son histoire, toutefois,
est de nature à laisser un enseignement
aux hygiénistes.
Un médecin bien embarrassé, c'est M.
Russell, de Brooklyn. Nous avons conté
l'ingénieuse imagination de ce docteur
qui offre complaisamment son corps
comme sujet d'expériences scientifiques
aux praticiens yankees, afin de démon-
trer à l'univers l'intérêt de la vivisec-
tion. Six de.ses confrères viennent de le
prendre au mot. L'un d'eux, chirurgien
de l'hôpital de Brooklyn, en se mettant
à sa disposition, énumère déjà avec
complaisance les opérations auxquelles
il se propose de soumettre M. Russell.
Le programme est, parait-il, admi-
rable si admirable même qu'en le li-
sant l'excentrique philanthrope, dit-on,
a pâli. Fort heureusement pour lui, l'at-
torney, du district a fait savoir,que les
chirurgiens coupables de se prêter aux
entreprises du martyr par puffisme se-
raient poursuivis pour assassinat. Et la
précaution n'était pas superflue il pa-
raissait, en effet, particulièrement dan-
gereux d'abandonner aux bistouris de
ses collègues un médecin qui, s'il n'était
mort, eût sans doute « raflé» la clientèle
dç la ville!.
Nouvelles â la Main
Vous savez que Londres est en
émoi! On craint que le roatsbeef mamque
pour les fêtes du couronnement.
Bah 1 les Anglais n'ont qu'à s'a-
dresser à une de leurs colonie. N'en ont-
ils pas une où le jambon et le pain de
mie poussent à même les arbres.
Laquelle ?
Parbleu i les îles Sandwich.
En Cour d'assises. 1
Un témoin dépose d'une façon em-
brouillée.
Je vous engage, lui dit le président,
à ne pas chercher à déguiser la vérité,
car cela pourrait vous mener loin.
Le témoin, froidement
Si je la déguisais, il n'y aurait pas
délit; ne sommes-nous pas en carnaval?
Le Masque de Fer.
LES
Français de mon temps
'̃̃̃̃.7 ̃ -Il- 'v •
LES PROFITS DU RESPECT
Si l'étiquette, chevillée à l'âme des
souverains d'il y a deux siècles et qui ne
les quittait ni jour ni nuit, a disparu
dans le détail de leur existence, comme
un accessoire que l'on sert aux jours de
gala, les dynasties environnantes se
maintiennent par la persistance du sen-
timent qui est leur seule base possible
l'amour.
L'amour est en effet la seule raison
d'être des monarchies, le ciment qui
unit un peuple à une lignée de chefs. En
l'amour est le secret du crédit que fait
ce peuple à cette lignée, quand elle
commet des fautes il lui donne le
temps et le moyen de les réparer. En
l'amour est le secret de l'indulgence que
prodiguent les nations à des primes
ineptes ou débauchés elles attendent
patiemment que la mort les débarrasse
des premiers et que la vieillesse assa-
gisse les. seconds. Elles jettent le man-
teau sur leurs faiblesses et répugnent
presque à en parler.
Les personnes royales sont les idoles
vivantes de cette religion de la patrie,
qui, ailleurs, se symbolise et se concrète
sous l'aspect de morceaux d'étoffes mul-
ticolores les drapeaux.
L'esprit monarchique est donc affaire
de sentiment, et de sentiment éomplexe
comme tous ceux des hommes à demi
instinctif, à demi raisonné. Il entre dans
cette sympathie une part d'intérêt et une
part d'habitude respectueuse. En Angle-
terre, Allemagne, Autriche ou Italie, le
monarque, même aux yeux de ceux qui
veulent le renverser et qui croient le
haïr, conserve quelque auréole le socia-
liste allemand ne peut s'empêcher de
« rectifier la position » sur lé passage de
l'Empereur et de crier « Hoch Hoch »
En France, l'auréole s'est dissipée et il
n'y a plus d'encens pour ce culte. Per-
sonne ne croit, plus à l'essence supé-
rieure, au caractère supernaturel du
prince, ni le peuple, ni l'aristocratie, ni
les membres de la famille royale. L en-
tourage même du prétendant et son pro-
pre parti, prompts à le blâmer lorsqu'il
affecte des allures trop unies et familiè-
res, s'il semble au contraire trop con-
vaincu de sa«Majesté »,nese gênent pas
pour en rire.
Il en allait tout autrement à la fin du
dix-huitième siècle, non seulement chez
les royalistes mais chez les révolution-
naires. En guillotinant le Roi, -les régi-
cides entendaient bien commettre un sa-
crilège mais on ne commet de sacrilège
que lorsqu'on a quelque reste de foi.
S'ils n'avaient pas eu au cœur un fonds
inavoué de vénération, ils auraient tout
bonnement destitué ou chassé LouisX VI.
̃'̃ ̃ :̃ #̃
C'est, semble-t-il, un grand avantage 1
pour une nation que d'avoir perdu le
« respect ». Une nation respectueuse res-
pecte beaucoup de choses et de gens qui
'ne sont pas respectables. Elle place donc
très mal son respect. On objectera que du
respect mal placé revient de celui qui
en est l'objet indigne à celui qui l'a ma-
nifèsté et l'honore lui même, parce qu'il
fait preuve de soumission à des lois gé-
nérales et utiles. On dira aussi qu'une
nation qui perd le respect le remplace
peut-être par l'envie, qui n'est que du
respect tourné à l'aigre, ou par du « sno-
bisme », qui n'est que du respect tourné
au ridicule.
Cependant un peuple qui perd le res-
pect des puissants, celui des noms et des
belles apparences, continuera d'honorer
ce qui est vraiment estimable il ne révé-
rera ni les seigneurs, ni les ministres, ni
les millionnaires, parce qu'il sait com-
ment on les fabrique, ce qu'ils sont et
combien ils valent leur niaiserie',
leurs vices, leur parfaite ressemblance
avec les plus médiocres des citoyens,
mais il rendra hommage aux héros, aux
savants, aux individus qui, par leur in-
telligence ou leur vertu, ont acquis des
droits à la déférence.
Ainsi il placera bien son respect au
lieu de le placer mal. Et il faut se félici-
ter d'avoir perdu le mauvais respect et
d'avoir gagné le bon. Voilà qui est par-
fait les hommes de valeur, artistes,
gens de lettres, chez qui le génie n'ex-
dut pas la vanité, se réjouissent, comme
vaniteux, des égards accordés à leur ta-
lent et pensent que tout est bien. Les an-
ciennes supériorités, qui jadis avaient
remplacé la force du poignet^- la plus an-
cienne force, celle des sauvages et
qui consistaient en la puissance, la ri-
chesse, la naissance, ne donnent pftis
droit au respect et la gloire seule, le mé-
dite personnel le conféreront.
Théoriquement ce serait très beau; il
en va tout autrement 'dans la pratique.
Les hommes glorieux et méritants, qui
les désignera ? La notoriété, venue de la
chance, de la camaraderie, de la réclame
imite assez exactement la gloire et le mé-
rite, du moins pour un temps et pendant
la vie de l'intéressé. On peut donc res-
pecter un faux glorieux, un faux méri-
tant, et, là encore, le respect fera fausse
route.
Puis ce respect, qui n'est plus un lien
social mais seulement une opinion dis-
cutable, un dilettantisme, ne suffit pas a
investir d'autorité les hommes auxquels
il s'adresse. Ceux qui sont honorés sont
de simples particuliers, sans influence
effective, sans rang positif dans l'Etat.
Ceux qui possèdent ce rang sont de tout
autres gens.
C'est un régime fâcheux, parce que
ceux qui jouissent de l'autorité ne jouis-
sent pas du respect. Ils ne jouissent que
de la puissance brutale, de celle du ser-
gent de ville la force du poignet. Et
ainsi, en perdant le respect pour ceux
qui avaient le pouvoir- ce qui était une
fiction, stupide si l'on veut, mais néces-
saire,- une nation se rapproche, non
pas d'un degré supérieur de civilisation,
mais d'un degré inférieur de barbarie.
Il faut toujours en revenir au mot de
Pascal « Ne pouvant faire que la justice
fût la force, on a fait que la force serait
la justice. » Et en effet cela est très
sage, sinon il n'y aurait point de paix.
'̃•
Les hommes se parlent pour se per-
suader ils espèrent donc se persuader.
Ils trouvent naturel de convaincre autrui
d'erreur; mais ils trouvent déshonorant
d'être eux-mêmes convaincus d'erreur.
Cependant ils professent qu'il est juste
de changer d'opinion, quand on en a une
mauvaise les journaux, les discours
ont pour objet de modifier l'opinion en
l' « éclairant ». Mais lorsqu'on est par-
venu à ce but et que l'adversaire s'est
rendu à votre avis, on le méprise; s'il
ne s'y est point rendu, on le hait.
Plaisant prosélytisme qui réprouve
les prosélytes mêmes qu'il fait. Chacun
dit qu'il faut se perfectionner par l'ex-
périence et tout le monde estime que
c'est petitesse et faiblesse d'esprit de
changer sa manière de voir.
Une chose très fréquente est de dis-
cuter avec quelqu'un en défendant sa
thèse jusqu'à la fin, sans en démordre.
Mais l'avis contraire, quoi qu'on en ait,
vous a touché. C'est un germe; il fer-
mente, et le mois d'après on s'entre-
tient avec un autre interlocuteur en
soutenant les arguments que l'on com-
battait naguère, et qui ont pénétré en
soi, que l'on a fait siens.
« On affirme que tel ou tel régime ne
convient pas à la France », disait un
vieil homme d'Etat, et il ajoutait rêveu-
sement « Je voudrais bien savoir quel
est le régime qui convient à la France 1 »
Peut-être aucun, peut-être tous; car elle
a aimé les plus divers, et de tous, elle
s'est lassée. Quand elle a joui d'un gou-
vernement libéral, elle s'est plainte,de
l'anarchie; elle s'est plainte du despo-
tisme quand elle a possédé un gouverne-
On s'abonne dans tous les Bureaux de Poste
de France et d'Algérie.
ment autoritaire, et sous la présente
République on reproche aux Chambres
d'être « indisciplinées quand elles ren-
versent les ministères, et d'être « ser-
viles quand elles les conservent.
Qui dira les motifs de la popularité ?
qui en sondera les mystères? Autant
vaudrait-il chercher à expliquer pour-
quoi les femmes ont porté des crinolines
et pourquoi elles n'en portent plus. Deux
Présidents se sont succédé, dont le pre-
mier s'est rendu impopulaire par un
attelage à la Daumont et par un piqueur
galonné d'or, sur lesquels son successeur
a fondé sa popularité.
Des inconnus excitèrent l'enthou-
siasme et provoquèrent l'admiration par
un libellé injuste, ou par quelques in-
vectives déclamatoires; portés au som-
met du pouvoir ils s'en étaient montrés
dignes en ordonnant un gouvernement
raisonnable ou en dotant leur pays de
territoires étendus. Mais, depuis qu'ils
méritaient l'estime, ils étaient parvenus
au comble de l'impopularité,
V">G. d'Avenel.
LE WAGON-SALON
Rencontré hier M. Edgar Dutampon, le
sympathique sous-chef de gare, aquarelliste
distingué à ses heures.
Eh bien cher ami, on se prépare, j'es-
père, à ce Salon des chemins de fer, à ce
wagon-Salon, pourrait-on dire ? Sera-t-on prêt
pour le 2 mars ?
N'ayez crainte, nous arriverons à l'heure
exacte. à moins d'accident.
Tant mieux! car le public est' dans
l'attente. que dis-je ? dans la salle d'attente.
Savez-vous bien que cette exposition sera un
événement de great attraction ?
La traction, ça nous connaît.
Exquis. On voit que vous êtes dans le
train. A propos, qu'exposez-vous?
Pas grand' chose. un Coin de.
Compartiment?
Non, de forêt. Une étude. rapide; un
souvenir de voyage.
Vous êtes trop modeste. Je prévois que
les amateurs dont vous n'avez pas à crain-
dre le contrôle n'en seront pas quittes de-
vant votre œuvre à moins de. dix minutes
d'arrêt.
Degrâce, mettez un frein à- vos compli-
ments.
Mais un de vos collègues doit, je crois^
exposer aussi un Coin de forêt.
Ah dame, il est bien difficile d'éviter les
rencontres 1
Avouez que celui-là, vous l'avez fait
express.. •̃- ̃
Aussi; vous in'avèr mis'sur la voie
Je vous quitte et: vous souhaite un succès
sur toute la ligne, un* succès. de première
classe.
Merci. On vous verra. au vernissage?
Tout..au,.moins.au buffet!
Champignol.
RADICA ET DOODICA
Récit de l'opération
Radica et Doodica ont été opérées hier,
presque à l'improviste. Nous avons vu le
docteur Doyen, qui a réussi brillamment
cette difficile opération, et il a bien voulu
nous en donner une description détaillée.
Cet exact récit initiera nos lecteurs aux
détails d'un « cas » assez rare dans les
annales de la chirurgie.
Oui certes, il est rare, nous dit le
distingué praticien, car la séparation des
monstres viables et bien conformés,sou-
dés deux à deux par un large pont de
tissus au niveau de la fourchette du ster-
num, et scientifiquement appelés xipho-
pages, a été longtemps considérée comme:
impraticable.
» Les opérations qu'on en cite sont
celles de Kœnig, en 1689 de Boehm, en,
1866, qui opéra ses propres filles et ne
put en sauver qu'une; celle des sœurs
Marie-Adèle, opérées sans succès en
Suisse, en 1882 enfin l'opération faite le
30 mai 1900 par le docteur Chapot-Pré-
vost sur deux petites Brésiliennes âgées
de sept an% dont l'une succomba le
sixième jour, et dont l'autre guérit par-
faitement.
» L'opération que j'ai dû pratiquer d'ur-
gence aujourd'hui a été entreprise dans
des conditions exceptionnellement défa-
vorables, puisqu'il s'agissait de séparer
deux sujets tuberculeux, l'un plus gra-
vement atteint et presque mourant.
» Je n'ai eu d'autre but, en entre-
prenant cette opération grave, que de
sauver l'existence de l'une au moins de
ces charmantes fillettes, s'il en était en-
core temps. Je n'ai pas pu opérer plus
tôt, car elles étaient beaucoup trop fai-
bles le jour où on,me les a amenées. »
Ici, j'interromps le docteur Doyen
On s'est un peu étonné de les voir
enlever brusquement de l'hôpital où on
les avait conduites. Pour quelle raison?
• La chose est cependant bien simple.
» Ces enfants avaient été amenées à
l'hôpital Trousseau avec l'assentiment
de Mme Colmann, leur mère adoptive,
qui les a réclamées, comme elle en avait
le droit, parce qu'elle a jugé convenable
de le faire.
» Mme Colmann, qui est la tutrice lé-
gale des deux fillettes, m'a prié de les
recevoir dans ma maison de santé, afin
que les petites malades, qu'elle aime
beaucoup,. soient mieux soignées et
puissent échapper à des examens répé-.
tés, comme il est d'usage dans les hôpi-
taux.
-Et l'opération a réussi ?
Exceptionnellement courte, elle a,
duré, pour les deux enfants, en tout
vingt minutes. Elle a été pratiquée de ta.
façon suivante. »
Ici j'écris sous la dictée du docteur
Doyen
Les deux sœurs, placées sur une ta-
ble recouverte d'un drap stérilisé, et moi i
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