Titre : Figaro : journal non politique
Éditeur : Figaro (Paris)
Date d'édition : 1898-05-10
Contributeur : Villemessant, Hippolyte de (1810-1879). Directeur de publication
Contributeur : Jouvin, Benoît (1810-1886). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 10 mai 1898 10 mai 1898
Description : 1898/05/10 (Numéro 130). 1898/05/10 (Numéro 130).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Description : Collection numérique : BIPFPIG63 Collection numérique : BIPFPIG63
Description : Collection numérique : BIPFPIG69 Collection numérique : BIPFPIG69
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Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Description : Collection numérique : France-Brésil Collection numérique : France-Brésil
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 15/10/2007
44e Année-
20
Mardi 10 Mal itÉÉ
DE RODAYS A. PÉRJVIEIS
Directeurs- Gérants
» "Gaston CALMETTK
Secrétaire de la Rédaction
ABONNEMENT
• Trois Mois Six Mois Un An
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Les Elections
Habituellement, au lendemain d'élec-
tions générales, tous les partis se décla-
rent enchantés du résultat. Ceux-là
même qui ne peuvent dissimuler leurs
pertes affectent de s'en consoler en comp-
iant les morts des autres.*
Cette attitude traditionnelle est aujour-
d'hui rendue plus facile par ce double
fait qui ressort de la journée de diman-
che, et que ne1modifieront probablément
.pas profondément. les ballottages du 22
de ce mois:.
Chacune des fractions de la Chambre
défunte retrouve, à q uelques unitésprès,
importance numérique qu'elle possé-
dait, et,chacune aussi subit des pertes
qui portent moins sur la quantité que
sur la qualité de son personnel.
Les radicaux laissent sur le terrain
quelques-unes de leurs rares personna-
lités' notables; car c'est. à la pénurie
d'hommes politiques considérables rele-
vant de ce parti que M. Goblet, qui n'est
;pas encore perdu, doit l'effet produit par
son ballottage dans le premier arrondis-
-sement de Paris.
Les modérés ont à déplorer ladispa-
rition de quelques-uns des plus énergi-
.ques d'entre eux, comme, par exemple,
M. Lavertujon.
Le parti conservateur est frappé par la
perte d'hommes tels que le duc de La
Rochefoucauld, Jules Delafosse, Gamard,
le prince d'Arenberg.
Les socialistes perdent deux chefs de
file MM. Jules Guesde et Jaurès. C'est
un échec moral des plus sensibles. D'au-
tant, plus sensible que M. Guesde est
battu par un modéré et M..Jaurès par un
marquis. Il est, d'ailleurs, infiniment
oro.bable que M. Jaurès tout, au moins
reviendra.
Les partis.révolutionnaires sont moins
portés au gaspillage du talent que les
partis conservateurs. Ils sont, en outre,
protégés par une solidarité qui ne dispa-
paraît qu'avec le. succès. Un des pâles
satellites de. l'ex-rdéputé de Carmaux
donnera sa démission et lui cédera son
siège. Il n'en faudra pas pleurer. Quand
on est contraint d'entendre un instru-
ment, il vaut mieux qu'il soit joué par
un virtuose que par un pifferaro.
Il n'empêche que le socialisme subit là
un échec qui vient à point, après les ro-
domontades. comiques .de, ce parti pen-
dant la période électorale.
̃ "̃ Leà alliances contractées entre les mo-
dérés de toutes nuances contre les socia-
listes soutenus par les radicaux se trou-
vent ainsi justifiées par la réussite. Les
modérés sont en réalité les vainqueurs
de la' journée.
Ils auraient pu remporter une victoire
plus .éclatante, mais ils ont eu contre eux
deux circonstances défavorables.
Le ministère Méline, qui tient le pou-
voir depuis plus de deux ans, est de tous
les ministères républicains qui se succè-
dent depuis- vingt-deux ans celui qui a
ressemblé le plus à un ministère conser-
vateur. Parmi'les qualités des conserva-
teurs figure le respect qu'ils ont pour les
situations acquises. C'est pourquoi M.
Méline, en arrivant au pouvoir et de-
puis qu'il y est,,n'a procédé à aucune
hécatombe de fonctionnaires. Les pré-
fectures, les administrations sont restées
bondées et farcies des créatures de tous
les ministères antérieurs, de gens vio-
lents, sortis des groupes antigouverne-
mentaux ou antireligieux, qui considè-
rent le pays comme une terre conquise et
l'électeur conservateur comme un serf.
Ces gens-là ne comprennent rien non
pas à une alliance avec la droite qui
n'existe pas, mais à un mot d'ordre de
bons sens et d'honnêteté ordonnant de
traiter sur un pied d'égalité parfaite
tous les Français qui n'affichent pas l'in-
tention formelle de renverser le gouver-
nement.
Sans doute, les fonctionnaires et les
instituteurs sont des êtres plastiques et
malléables, en leur qualité de Français.
Ils n'ont pas refusé l'obéissance aux
instructions [ministérielles, mais, dans
beaucoup d'endroits, le vieil homme
a reparu en eux, et en dépit de re-
commandations sincères de neutralité,
dans de nombreuses circonscriptions,
ils ont donné; en faveur de candidats re-
présentant mieux les aspirations des mi-
nistères antérieurs que les aspirations
du ministère actuel.
On peut dire, sans vouloir se plaindre,
que non seulement le ministère modéré
n'a exercé aucune pression en faveur des
modérés, mais qu'il n'a pas pu partout
,empêcher ses fonctionnaires d'exercer
une pression contre les modérés.
Voilà la première circonstance défavo-
rable pour les modérés pendant la pé-
riode électorale.
La seconde a été l'irruption de l'affaire
Dreyfus transformée en affaire Zola au
travers de la, politique électorale.
Il a fallu ai ministère actuel des pro-
diges de dextérité pour résister à cette
espèce de cyclone politique. L'affaire
Dreyfus-Zola a été exploitée par les par-
tis politiques, avec leur mauvaise foi
habituelle, puisqu'elle servait de cata-
pulte contre un ministère dont pas un
membre n'était au pouvoir lorsque fut
jugé, le procès Dreyfus, et dont pas un
membre n'avait jamais mis en doute la
culpabilité du trop fameux capitaine.
Cette affaire a eu pour résultat de bri-
sertous les compartiments qui séparaient
les partis politiques et de les mélanger
tous dans un désordre inexprimable.
Mais, peu à peu, les esprits se sont cal-
més et se sont classés dans un réarrah-
gement provoqué par leurs affinités na-
turelles,
Ainsi, aujourd'hui, tout ce qui est
conservateur en France est antirevision-
niste, et de la bourrasque il est resté, en
somme, une recrudescence de sympa-
th.ie et d'enthousiasme du Français pour
l'armée qui est sa sauvegarde, pour les
principes sacrés de discipline qui le pro-
tègent à la fois contre les rivaux du
dehors et contre les barbaries internes.
Il n'en est pas moins vrai que l'émo-
tion enfantée par ces débats violents a eu
sa répercussion sur les élections, et c.'est
à elle qu'on devra l'arrivée au Palais-
Bourbon de députés qui s'efforceront
peut-être de rendre la vie dure au minis-
tère.
L'élection d'Alger, car c'est d'elle que
je veux parler, est évidemment un épi-
sode pénible pour ce ministère, parce
qu'elle rend difficile le maintien en Al-
gérie de M. Lépine comme gouverneur
général et fait saillir la faute qui fut
commise l'an dernier.
Pour des considérations électorales,
on se priva, l'an dernier, des services
d'un fonctionnaire qui avait eu le temps
d'étudier l'Algérie qu'il gouvernait et
qui allait la faire profiter des fruits d'une
laborieuse expérience. Le ministère est
ainsi puni par où il a péché. Il verra
rentrer les ,deux ou trois députés aux-
quels il a sacrifié M. Cambon. Mais il
terra arriver avec eux, grâce à M. Lé-
pine, un député nouveau qui lui causera
plus de tablature que les anciens dépu-
tés conservés ne lui causeront de satis-
faction sans compter que Drumont ne
sera pas le seul à représenter l'élément
qui s'intitule nationaliste, puisque Dé-
roulède est déjà élu et que d'autres de
leurs amis à.eux deux peuvent venir à la
rescousse.
Je suis persuadé, d'ailleurs, que ce
groupe futur, dont le patriotisme est
aussi évident que l'honnêteté, jouera,
vis-à-vis des idées modérées dont le mi-
nistère est l'expression et des idées
conservatrices qui nous sont chères, un
rôle analogue à celui que jouait jadis
vis-à-vis des idées républicaines l'ex-
trême pointe d'avant-garde de la gauche.
Et s'il faut être condamné à un peu
d'exagération, je l'aime autant du côté
où je veux aller que du côté qui m'ef-
fraye.
En somme, et. en admettant que les
ballottages soient un écho du 8 mai, la
situation des conservateurs français, et
en particulier celle des catholiques,- est
plutôt amélûorée.
Numériquement, 'ils gagnent des siè-
ges. Moralement, ils gagnent de l'in-
fluence. Ils feront partie intégrante et'
nécessaire-dés majorités ministérielles.
Il n'y aura même de stables que les ma-
jorités dont ils seront, et vouloir sè. pas-
ser d'eux serait se condamner à l'insta-
bilité ministérielle dont la République a
si longtemps souffert.
Les modérées restent les arbitres de la
situation. Nous ne demandions pas au-
tre chose, et nous avons ce que nous
demandions.
J. Cornély.
AU JOUR LE JOUR
LE COMTE D'HÉRISSON
Samedi mourait à Constantine un Parisien
dont les aventures auraient formé plusieurs
chapitres de roman, s'il avait vécu dans un
temps plus romanesque que le nôtre': le comte
Maurice Irisson d'Hérisson.
Maurice d'Hérisson avait, je crois, dix-neuf
ans lorsque Napoléon III, pour échapper au
retour d'un jeu qu'il n'aimait pas, la bombe
d'Orsini, se décida à réaliser le rêve de sa jeu-
nesse, un peu amorti par. les splendeurs de
son âge mûr, et à rendre l'Italie libre des Alpes
jusqu'à l'Adriatique.
Maurice, qui devait avoir dans les dix-neuf
ans, s'engagea aussitôt dans un régiment de
cavalerie. Mais l'Italie fut libre, ou plutôt la
Prusse déclara que l'Italie était suffisamment
libre, avant que le volontaire eût terminé ses
classes à cheval, et, comme il le disait lui-
même, d'Hérisson ne' contribua à l'abaisse-
ment de la maison d'Autriche qu'en se bais-
sant lui-même pour ramasser avec ses mains,
dans l'écurie du quartier, le crottin de son
cheval. Il s'acheta un remplaçant.
Il commença à mener à Paris, avec les
jeunes gens dé son âge, une existence tissée
d'or et de soie, qui fit désirer à ses parents
qu'il déversât en dehors de la capitale les
surabondances de son activité.
C'est pourquoi, Napoléon III ayant combiné
avec son alliée, la reine Victoria, une expédi-
tion destinée à châtier les Chinois, d'Hé-
risson obtint d'être choisi comme secrétaire
par le général Cousin de Montauban, qui de-
vait commander les troupes françaises. Il
s'engagea dans l'infanterie, fut versé dans
les dragons et passa dans les spahis qui for-
maient la seule cavalerie expédiée dans l'em-
pire du Milieu:
Pendant que t'armée expéditionnaire, mon-
tée sur de grands clippers à voile, se rendait
en Chine en doublant le cap de Bonne-Espé-
rance, le général de Montauban et son secré-
taire filaient sur Hong-Kong par l'Egypte, le
chemin de fer de Suez, la mer Rouge et le pa-
quebot. Ils arrivaient six mois avant le reste
de l'armée et préparaient sur place la campa-
gne. Depuis, lès Anglais ont imité ce procédé,
avec sir Garret Wolseley, dans leur expédition
contre les Achantis,et s'en sont admirablement
trouvés. Nous avons tous trouvé qu'ils étaient
des malins et nous avons oublié, comme il
convient à des gens modestes, que nous leur
avions donné l'exemple.
D'Hérisson init à profit le temps qu'il avait
devant lui pour apprendre le chinois, et quand
on entra en Chine, il remplissait à la satisfac-
tion générale le rôle d'interprète. Au fameux
pillage du palais d'Eté, sa connaissance de la
langue chinoise lui servit pour mettre à l'abri
des fureurs de la soldatesque (!) les épouses du
Fils du Ciel qu'il avait découvertes dans une
,!le, au milieu du lac de l'auguste résidence.
Et pendant que nos amis les. Anglais précé-
daient au déménagement méthodique 'des cu-
riosités du palais, notre maréchal des logis
reconduisait tout un lot de petites femmes en-
fouies dans la soie et le brocart, jacassant
comme des pies.
D'Hérisson revint de Chine avec la croix de
chevalier de la Légion d'honneur et la médaille
militaire. La première de ces deux distinctions
n'avait pas encore été prodiguée et produisait
grand effet sur le revers d'un habit ou d'une
redingote. Maintenant,, elle vous fait prendre
pour le quatorzième attaché au secrétariat d'un
sous-secrétaire d'Etat. Le vainqueur de la
Chine employa consciencieusement les années
qui suivirent à manger ce qui lui restait de
son patrimoine.. Il mena la vie élégante des
beaux fils de 1.'époque impériale. Il était mem-
bre du Jockey-Club, ce qui lui constituait une
fonction sociale aussi enviable que coûteuse.
Je le retrouve en 1870 capitaine de mobiles
Un ami de sa-famille le fit attacher à l'état-;
major du général Trochu et il passa aux côtés
du gouverneur toute la période du siège de
.Paris, qu'il a racontée d'ailleurs en un livre
dont le succès a été colossal et qui est inti-
tulé le Journal d'un officier d'ordonnance.
Plus tard, mis en goût par ce succès, il a
écrit le Journal d'un interprète en Chine. Le
premier de ces deux livres a eu cinquante-trois
éditions, et le second trente-cinq. >
Pendant le siège, d'Hérisson se borna à
monter à cheval et à caracoler derrière son
chef. Mais, quand arriva l'heure des catastro-
phes, son rôle devint tout à coup dramatique
et souverainement intéressant. Comme il'con-
naissait l'allemand, Trochu le donna à Jules
Favre pour l'accompagner à Versailles où il
allait traiter avec le comte de Bismarck de la
capitulation deParis.
Rien n'est saisissant comme les chapitres
dans lesquels d'Hérisson raconte cete mission.
Le passage de, la Seine -dans une barque,
sous un ciel bas, et aussi sous les obus du
Mont-Valérien qui incendiaient Saint-Cloud
avec Jules Favre, statue lamentable de la
douleur moderne, avec sa redingote à souf-
flet et son chapeau de soie, et sa figure enté-
nébrée, a l'air d'un chapitre de Dante. A Ver-
sailles, chez Bismarck, le dialogue entre le
colosse et le pauvre ministre vous fait l'effet
d'un tète-à-tête entre un lion et une vieille
chèvre. C'est d'une tristesse épique, et déses-
pérée.
A retenir cette scène Bismarck explique à
Jules Favre qui ne fume pas l'utilité du cigare
dans la discussion, et comme quoi le pur ha-
vane contribue à la sérénité en fournissant
aux doigts et au cerveau un amusement, une,
distraction. Puis,on discute les termes de la*
capitulation. Jules Favre est obligé de confes-
ser que Paris o'a plus que pour quatre jours
de vivres, et Bismarck se dresse furieux pour
flétrir l'imprudence, de ces chefs d'Etat qui se
sont mis à la merci d'un déraillement.
Je vais, 'dit-il, partager les approvision-
nements de l'armée allemande avec les Pari-
siens. Mais si un pont s'écroule,'si un retard
se produit, si la famine fait des victimes dans
une population de deux millions d'âmes, vo-
tre responsabilité sera épouvantable.
Alors d'Hérisson, en enfant terrible et gâté,
tend humblement au colosse la soucoupe où
se trouvent des cigares, les cigares apaisants;
Bismarck se met à rire et dit
-Vous avez raison, j'ai tort de m'emporter.
Après le siège, d'Hérisson vint à Versailles
et s'employa au second siège avec les troupes
qui vainquirent la Commune, ce qui lui fournit
la matière d'un troisième volume.
Peu de temps après, le brillant capitaine de
mobiles se fixait en épousant une artiste qui
lui donna le bonheur et une charmante petite
fille. Mais l'élégance n'est pas une carrière et
d'Hérisson connut de longs jours de pénurie,
dont il ne sortait que partiellement vainqueur
avec les livres dont je viens de parler. A ces
livres succédèrent d'autres ouvrages, sur
Bazaine, sur différents sujets historiques. Ils
ne trouvèrent'pas le succès de leurs frères
aînés, peut-être et sûrement parce que leur
auteur avait négligé de s'inspirer des conseils
et de requérir la collaboration de certaine
Egérie barbue qui ne veut pas être nommée,
ni même désignée.
Tant et si bien qu'il y a une demi-douzaine
d'années, le pauvre d'Hérisson était dans la noire
misère. Il demanda un poste aux colonies. On
le nomma commandant supérieur des milices
indigènes du Congo. Il partit, avec sa femme
et sa fille, plein de courage, plein des meil.
leures résolutions, et muni d'un très bel uni-
forme en flanelle blanche, orné de cinq galons,
avec un casque d'aloès.
Hélas il arriva au Congo pour tomber ma-
lade, y resta six mois à boire du lait et revint
à moitié mort. Il est mort tout à fait de ce
voyage, à Constantine.
C'était un brave homme et un homme brave.
C'était un garçon d'esprit, un type du Pari-
sien de roman d'aventures. Il est venu trop
tard dans un monde trop vieux.
Saint-Remy.
Echos
La Température
Des pluies sont signalées en France à Dun-
kerque, Le Mans, Rochefort, Bordeaux et Pa-
ris. Le baromètre est à 765mm. La tempéra-
ture est généralement en hausse elle donnait
hier à Paris au-dessus le matin à huit
heures, igo à deux heures; 20° à Alger. Dans
la soirée le thermomètre était à 140, et le
baromètre vers minuit restait à 767mm.
Les Courses
A 2 heures, courses à Saint-Ouen.
Gagnants de Robert Milton
Prix du Loiret Tancrède.
Prix de la Beauce Bueil.
Prix de la Sologne Foscari..
Prix Bandmaster: Fragoletto.
Prix de l'Orléanais Bajardo.
A Travers Paris
Le Président de la République a reçu
hier matin les membres du bureau et du
Conseil maritime de la nouvelle société
naur la, navigation d.^
I plaisance, t'Union des vachts français,
sociétés réunies du Y. CT. et de l'U. Y. F.
L'amiral Courrejqlles a présenté ses
collègues à M. Félix Faure. Parmi les
membres présents citons MM. le baron
Arthur de Rothschild et Henri Menier,
vice-présidents; de Boulongne, A. de
Caillavet, de .Caladon, comte de Dalmas,
Desprez, Fournier, Godillot, marquis de
La Jàille, comte de Kersabiec, comte de
Lyrot, Maillard, G. Martin, Récopé, de
Rollepot, Schelcher, comte de Tocque-
ville, commandant West et M. Chéruit,
secrétaire de la société.
L'accueil de M. Félix Faure a été em-
preint de la plus grande bienveillance et
il a exprimé. aux membres du Conseil
tout l'intérêt qu'il porte au yachting fran- 4
çais.
J.N.S.TANTANÉ ]
LE LANDGRAVE
ALEXANDRE-FRÉDÉRIC DE HESSE-CASSEL ]
C'est une Altesse royale, le chef d'une des
plus grandes maisons de l'Europe, l'héritier
du souverain de la Hesse électorale, et c'est
aussi un grand artiste. Né à Copenhague en
1863, il est le fils du landgrave Frédéric dont
la renonciation au trône de Danemark permit
à Christian IX de régner à Copenhague. Par
sa mère il est le petit-fils du célèbre prince
Frédéric-Charles de Prusse, et son frère cadet
a épousé la princesse Marguerite, sœur de
l'empereur d'Allemagne Guillaume II. Son
illustre naissance et son immense fortune
n'empêchent pas le prince d'être un modèle de
modestie, de bienveillance et d'affabilité. Tou-
tes les personnes qui ont l'honneur de le con-
naître lui ont voué une respectueuse et pro-
fonde sympathie. Actuellement à Paris, sous
le nom de baron Gadendorf, il y observe un
strict incognito et y mène une vie essentielle-
ment intellectuelle et artistique. Il y a inau-
guré une mode excellente. Il donne des dîners
auxquels on est convié pour six heures, mais
où l'on ne se met à table qu'à huit; en atten-
dant, on fait de la musique. Samedi dernier,
Son Altesse Royale, qui est un musicien
consommé, pianiste remarquable, violoniste
hors de pair, a joué plusieurs morceaux de
violon avec une maestria qui a littéralement
émerveillé un auditoire d'artistes et de dilet-
tantes. C'est le.Paganini des princes.
Près de trois cents hommes de lettres,
professeurs et étudiants russes habitant
Paris se sont réunis hier pour célébrer
le cinquantenaire de la mort du célèbre
critiqué russe Vissarion Belinsky, à qui
sa ville natale, Penza, se prépare à inau-
gurer une statue.
Présidée par le littérateur Ansky, la
réunion d'hier a été entièrement consa-
créé à l'œuvre philosophique et littéraire
de Belinsky. Après Mme Konrady, notre
confrère des Novosti, M. Séménoff, a fait
ressortir, dans une conférence érudite et
éloquente, l'importance de la vie et des
œuvres de Belinsky. Des artistes russes
de passage à Paris ont dit des scènes et
poésies puis, des tableaux vivants ont
présenté quelques épisodes de la vie de
Belinsky.
La fille du célèbre critique, Mme Olga
Vissarionovna Benzy, assistait à cette in-
téressante séance avec son mari, ancien
consul général, et ses deux fils, étudiants
à Paris. Dans une allocution émue, Mme
Benzy a remercié l'assemblée du culte
voué par la jeunesse russe à la mémoire
de son illustre père.
L'anniversaire de la catastrophe de la
rue Jean-Goujon avait fait de la semaine
dernière une semaine de deuil. Aussi la
maison Camille Marchais, rue de la Paix,
a-t-elle voulu attendre que l'émotion fût
calmée pour présenter à sa clientèle aris-
tocratique ses nouvelles créations de
chapeaux qui sont véritablement l'ex-
pression la plus exacte des modes du
printemps.
C'est vendredi prochain, à deux heures,
que sera inaugurée, au Salon du Figaro,,
l'exposition des pastels de M. Georges
Bertrand, pastels fixés à l'épreuve de
l'eau, selon un procédé découvert récem-
ment par l'excellent artiste.
On a dit l'autre jour quelle intéressante
personnalité était Georges Bertrand. Ses
pastels, jolies figures de femmes aux
cheveux roux et paysages tout envelop-
pés de poésie,.le montreront sous un
jour nouveau pour ceux qui gardent
dans leur mémoire le souvenir de sa
grande œuvre, Patrie aujourd'hui à
Versailles, dans la galerie des Batailles,
où le Tsar l'admira beaucoup lors de sa
visite en octobre 1896.
Hors Paris
De Taganrog (Russie)
« La Banque Foncière du Don vi ent de
fêter le vingt-cinquième anniversaire de
sa fondation. A l'occasion de ce jubilé,
les actionnaires ont décidé 1° de donner
aux employés qui sont à la Banque de-
puis vingt-cinq ans les appointements
d'une année- comme gratification; cette
mesure sera désormais appliquée à tous
les employés qui arriveront à vingt-cinq
ans de service; 2° tous les employés de
la Banque indistinctement ont reçu les
appointements d'un trimestre 3° outre
les sommes versées chaque année pour
la retraite des employés, la Banque, à
partir du jour du jubilé, assurera à ses
propres frais la vie de tous les employés
pour une sommé qui représentera huit
fois leurs gages annuels.
» Voilà un bel et intelligent exemple à
suivre!
» Le fondateur de la Banque, M. Jac-
ques de Poliakoff, qui en est aussi le pré-
sident depuis sa fondation, a été fêté,
acclamé, comblé d'honneurs. Le Conseil
municipal de Taganrog a décidé, à l'una-
nimité, de le nommer citoyen honoraire
de cette ville qu'il comble de ses bien-
faits. M. de Poliakoff n'est pas arrivé à
une telle marque de distinction unique-
ment par sa situation matérielle :il l'a
méritée surtout par sa valeur morale,
^son. travail énorme et infatigable. »
Nouvelles la Mais
Un joli mot d'un brave homme dont la
modestie va de pair avec la bienfaisance.
Décidément, on a bien raison de
dire que les services que l'on rend ne
vous attirent que des ennuis! J'avais eu
le plaisir d'obliger un ami dans l'embar-
ras. Je ne lui conseille pas d'y revenir.
Il vous'a payé de la plus noire in-
gratitude ?
Non pas. Il est allé le raconter à
tout le monde!
Mercadets modernes.
Ils en sont à leur première entrevue
pour jeter les bases d'une affaire au sujet
de laquelle on les a abouchés.
Le plus âgé sait à quoi s'en tenir sur
la moralité du seeond celui-ci est un
peu gêné par la réputation de probité
que l'autre a fini par conquérir, après un
passé fort scabreux qu'il ignore.
Alors, remarquant les hésitations de
son partenaire et en devinant la cause,
le premier s'écrie, pour le mettre tout à
fait à son aise
A propos. Mazas est-il plus gai
que de mon temps ?
Le Masque de Fer.
Un accident, dont l'importance n'est
pas encore exactement connue, est arrivé
hier sur la ligne de l'Est.
Voici la note communiquée à ce sujet
par la Compagnie
Aujourd'hui, vers deux heures de l'après-
midi, le train rapide 40-30, venant de Bàle, a
heurté un train omnibus prés de la station
de Foulain (Haute-Marne), sur une partie de
la ligne de Paris à Mulhouse où la circula-
tion se faisait à voie unique, par suite des
travaux de réparation d'un petit tunnel.
Il y aurait quelques blessés.
A cette communication nous pouvons
ajouter les renseignements suivants
Le train rapide 40-30, de Bâle à Paris,
avait quitté la gare de Langres à 1 h. 36,
et se dirigeait vers Chaumont où il doit
arriver à 2 h. 4. Il s'engageait vers
i h. 45 sous le tunnel de La Pommeraye,
situé entre les stations de Vesaignes et
de Poulain.
Ce tunnel,.long de 298 mètres, est, de-
puis le 18 février, en réparation et les tra-
vaux ont nécessité l'obstruction d'une
des voies. Un raccord a été établi pour le
passagedestrains sur la seulé voie qùi
reste. Ils ne doivent y passer que pilo-
Or, justement, le train omnibus
parti de Longueville à 5 h. 46 du matin,
et qui passe 1 h. 44 à Foulain, arriva
au même moment, allant à Belfort, et
s'engagea à l'autre extrémité du tunnel
sur cette même voie unique.
Comment cela a-t-il pu arriver? Les
mesures avarient cependant été prises
pour que les deux trains n'eussent à
passer que l'un après l'autre. Quel est
celui qui était en retard ou en avance ?
L'enquête ne l'a pas encore établi. Tou-
jours est-il qu'une rencontre se produi-
sit.
L'émotion de l'accident, le soin de sau-
ver les blessés empêchèrent de télégra-
phier à Paris, car c'est seulement en ne
voyant pas arriver le rapide à cinq heu-
res trente-cinq que le chef de la gare de
l'Est a télégraphié, pour connaître la
cause du retard, et a appris la nouvelle.
On supposait que le train 42, arrivant
de Chaumont à 6 h. 45, apporterait des
détails. On espérait même qu'il ramène-
rait les blessés. Il n'en a rien été. Le 42
avait passé à La Pommeraye trois heures
avant l'accident et ni les employés ni les
voyageurs ne savaient rien.
La nouvelle de l'accident a causé dans
le personnel une grande émotion, et les
membres du Conseil d'administration se
sont immédiatement réunis avec les in-
génieurs. Il .a été décidé qu'une Commis-
sion se rendrait à Chaumont, et de là sur
le lieu de la catastrophe. MM. Picard,
chef de l'exploitation Gerardin, chef ad-
joint Tordeux, Lancremont, ingénieurs,
et Salomon, chef de la traction, sont par-
tis par le train de 8 heures 35.
De son côté, M. Turrel, ministre des
travaux publics, a envoyé, sur les lieux
de l'accident, pour procéder à une en-
quête, M. Keller, inspecteur général des
mines, directeur du contrôle de la Com-
pagnie de l'Est, et M. Peschaud, chef
adjoint de son cabinet.
Plusieurs médecins, parmi lesquels
MM. les docteurs Créqui et Décori, se
sont mis à la disposition de l'administra-
tion.
Quant au nombre des victimes, on
l'ignore encore. Une dépêche, arrivée à
huit heures signale seulement la mort
de deux employés et ajoute qu'il y a plu-
sieurs blèssés, sans dire combien.
A dix heures. une seconde dépêche a
apporté les noms suivants
M. Léon Lehmann, voyageur de commerce,
à Troyes, mort.
M. André Régis, indigent de Grenoble,
mort.
Mlle Laurent, fille d'un_ chauffeur de Chau-
mont, morte.
Mme Laurent, mère de la précédente, con-
tusions multiples, état grave.
M. Malgray,- pilote, jambe gauche coupée.
M. Chvaline, mécanicien du train 51-53,
fracture de la jambe gauche.
M. Auxerre, courrier des postes à Dijon,
blessures aux jambes.
M. Kersfavo, voyageur, contusions à la face
et au nez.
M. Philippe "Narcisse, mineur, plaies, con-
tusion à l'œil gauche.
Mlle Marie Garnier, de Clefmont, contu-
sion à l'œil droit.
Mme Caillet, femme d'un garde-freins,
contusions à la joue et à l'œil gauche.
M. Louis Levasseur, voyageur de Chateau-
villain, contusions aux reins.
Le mécanicien du rapide a disparu. On
dit aussi que Mme Laurent avait avec
elle un enfant qui aurait été coupé en
deux et pas retrouvé.
Enfin, on affirme qu'il y aurait plu-
sieurs autres,blessés. Mais il faut faire
la part de l'exagération qui se produit
toujours dans des cas semblables.
Une compagnie du 109° est partie de
Chaumont pour déblayer la voie.
Un convoi formé à Chaumont est allé
chercher les blessés et les voyageurs du
train 40-30, pour les ramener à Paris.
Dernière heure.- Le train 40-34, formé
à Chaumont pour ramener les voyageurs
du 40-30, est arrivé sur la voie 14, gare
de l'Est, à 10 h. 17, hier soir.
II ne contenait que les voyageurs va-
lides et une Anglaise blessée qui avait la
tête enveloppée de gaze iodoformée.
Une grande foule de parents, d'amis
et de curieux attendait les voyageurs à
la gare.
D'après ce que racontent les témoins
de la catastrophe, là cause serait le mau-
vais fonctionnement du frein du -train
rapide. Le 51-53. s'était engagé sous'le
tunnel, ayant son pilote sur la machine,
à côté du mécanicien, et marchait à une
allure modérée. Au moment où il allait
sortir à l'orée, comme oh dit, du tun-
nel le train 40-30, rapide, qui se pré-
sentait pour entrer, étaitaur. le raccor-
dement. Apercevant le train omnibus, le
mécanicien du rapide a voulu s'arrêter.
Mais le frein n'a pas obéi4'et le rapide a
pris l'omnibus en écharpe.
Le choc .a été épouvantable, nous
a raconté un curé qui se trouvait dans le
train et qui est arrivé hier soir. Le com-
partiment dans- lequel je me trouvais,
avec Mgr l'évêque de Langres, a été
soulevé de dessus les rails, bien que se
trouvant à quelque distance du wagon
tamponné. Nous avons tous été jetés les
uns sur les autres.
Cet ecclésiastique fait le plus grand
éloge du zèle des ouvriers employés à la
réparation du tunnel. Ils sont accourus,
ont rassuré les voyageurs pris de pa,ni-
que, ont dégagé les blessés et ont aidé
les voyageurs valides à gagner Chau-
mont pour porter,la nouvelle et réclamer
des secours.
Georges Grison.
Elections du 8 mai
Nous publions le tableau complet dés
élections législatives, en ayant soin, dans
les départements dont nous avons déjà
donné les résultats définitifs, de rappeler
uniquement les noms des élus avec- le
chiffre des voix obtenues.
A ce tableau,qui représenté désormais
l'ensemble des scrutins du 8 mai, nous
joignons un état récapitulatif des élus,
qui nous semble devoir intéresser nos
lecteurs parce qu'il donne ..en détail .là
composition des différents partis dans la
prochaine Chambre.
Cette Chambre se réunira, on le sait,
de plein droit, le 1er juin.
DÉPARTEMENTS
̃ BELLEY
MM. Giguet, dép. s., rad. 9.891 ÉLU
Martelin, cons. gén., prog. 6.905
BOURG. Première circonscription
MM. Pochon, d«p. s., rad. 8.943 EUS
Piquet, prog.
Deuxiéme circonscription
MM. Herbet, dép. s., rad. 8.434 ÉLU
Villefranche, prog.s.
Grand de Vaux .758
GEX"
M. Bizot, dép. s., rad.̃«.̃• 3 974 ÉLU
..NANT.UA.. "r^
MM. Alfred Carrier,cons.g.prog. 6.273ÉLU
Philipon, dép. s., rad 4.488
Caron .947
TRÉVOUX
MM. Alexandre Bérard,d.s.,rad.
Rigaud, prog.
Coqui, prog
Victor Cambon, prog.
Ballottage
AISNE
-•̃̃ CHATEAU-THIERRY
MM. Morlot, dep. sort., rad. 8.557 E4U
Henriet, prog 5.106
LAON. Première circonscription-
MM Ermant, dép. sort., prog. 1.400
Bellard, rad 7.900
Testard, prog
Ballottage
Deuxième circonscription
MM. Castelin, revis, ra d. 9.405 E£U
Grégoire, rép 7.051
Dolle, rôp 7i0
SAINT-QUENTIN. Première circonscrip.
MM. François.Hugues, d. s., rép. 6.117
Touron. prog. 4.535
Henri Turot, soc. 5.877 '̃̃̃
Ballottage •
Deuxième circonscription
MM. JulesDesjardinSid.s.jprog. 8.106
Vatin, rad. 6.108.
Garbe, soc 1.138
Ballottage
SOISSONS
MM. Firino, dép. sort., prog. 6.790
Chènebenoit, rad
Magniaudet, rad. soc 6.580
Ballottage,
VERVINS. Prémière circonscription
MM. Denècheau, dép. sort., rad. 7.473 ELU
Vicomte Foy, prog 5.758
Brizon, soc 109
Deuxième circonscription '̃ ̃•.̃•
MM. Moret, dép. sort., prog 5.99âf<
Fournièrê.conseiller muni-
cipal de Paris, soc 6.112
Ballottage
ALLIER
GANNAT
MM. Delarue, dép. sort., rad. soc 9.925 ELU
Labussière, ana. dép. pr.. 7.443
LAPALISSE
MM. Dr Gacon,.dép. sort., rad. 16.278 ELU)
Paul Dehiay, prog
20
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Agence P. D0LL1NGEN, 16, rue Grange-Bafetfèw
Les Elections
Habituellement, au lendemain d'élec-
tions générales, tous les partis se décla-
rent enchantés du résultat. Ceux-là
même qui ne peuvent dissimuler leurs
pertes affectent de s'en consoler en comp-
iant les morts des autres.*
Cette attitude traditionnelle est aujour-
d'hui rendue plus facile par ce double
fait qui ressort de la journée de diman-
che, et que ne1modifieront probablément
.pas profondément. les ballottages du 22
de ce mois:.
Chacune des fractions de la Chambre
défunte retrouve, à q uelques unitésprès,
importance numérique qu'elle possé-
dait, et,chacune aussi subit des pertes
qui portent moins sur la quantité que
sur la qualité de son personnel.
Les radicaux laissent sur le terrain
quelques-unes de leurs rares personna-
lités' notables; car c'est. à la pénurie
d'hommes politiques considérables rele-
vant de ce parti que M. Goblet, qui n'est
;pas encore perdu, doit l'effet produit par
son ballottage dans le premier arrondis-
-sement de Paris.
Les modérés ont à déplorer ladispa-
rition de quelques-uns des plus énergi-
.ques d'entre eux, comme, par exemple,
M. Lavertujon.
Le parti conservateur est frappé par la
perte d'hommes tels que le duc de La
Rochefoucauld, Jules Delafosse, Gamard,
le prince d'Arenberg.
Les socialistes perdent deux chefs de
file MM. Jules Guesde et Jaurès. C'est
un échec moral des plus sensibles. D'au-
tant, plus sensible que M. Guesde est
battu par un modéré et M..Jaurès par un
marquis. Il est, d'ailleurs, infiniment
oro.bable que M. Jaurès tout, au moins
reviendra.
Les partis.révolutionnaires sont moins
portés au gaspillage du talent que les
partis conservateurs. Ils sont, en outre,
protégés par une solidarité qui ne dispa-
paraît qu'avec le. succès. Un des pâles
satellites de. l'ex-rdéputé de Carmaux
donnera sa démission et lui cédera son
siège. Il n'en faudra pas pleurer. Quand
on est contraint d'entendre un instru-
ment, il vaut mieux qu'il soit joué par
un virtuose que par un pifferaro.
Il n'empêche que le socialisme subit là
un échec qui vient à point, après les ro-
domontades. comiques .de, ce parti pen-
dant la période électorale.
̃ "̃ Leà alliances contractées entre les mo-
dérés de toutes nuances contre les socia-
listes soutenus par les radicaux se trou-
vent ainsi justifiées par la réussite. Les
modérés sont en réalité les vainqueurs
de la' journée.
Ils auraient pu remporter une victoire
plus .éclatante, mais ils ont eu contre eux
deux circonstances défavorables.
Le ministère Méline, qui tient le pou-
voir depuis plus de deux ans, est de tous
les ministères républicains qui se succè-
dent depuis- vingt-deux ans celui qui a
ressemblé le plus à un ministère conser-
vateur. Parmi'les qualités des conserva-
teurs figure le respect qu'ils ont pour les
situations acquises. C'est pourquoi M.
Méline, en arrivant au pouvoir et de-
puis qu'il y est,,n'a procédé à aucune
hécatombe de fonctionnaires. Les pré-
fectures, les administrations sont restées
bondées et farcies des créatures de tous
les ministères antérieurs, de gens vio-
lents, sortis des groupes antigouverne-
mentaux ou antireligieux, qui considè-
rent le pays comme une terre conquise et
l'électeur conservateur comme un serf.
Ces gens-là ne comprennent rien non
pas à une alliance avec la droite qui
n'existe pas, mais à un mot d'ordre de
bons sens et d'honnêteté ordonnant de
traiter sur un pied d'égalité parfaite
tous les Français qui n'affichent pas l'in-
tention formelle de renverser le gouver-
nement.
Sans doute, les fonctionnaires et les
instituteurs sont des êtres plastiques et
malléables, en leur qualité de Français.
Ils n'ont pas refusé l'obéissance aux
instructions [ministérielles, mais, dans
beaucoup d'endroits, le vieil homme
a reparu en eux, et en dépit de re-
commandations sincères de neutralité,
dans de nombreuses circonscriptions,
ils ont donné; en faveur de candidats re-
présentant mieux les aspirations des mi-
nistères antérieurs que les aspirations
du ministère actuel.
On peut dire, sans vouloir se plaindre,
que non seulement le ministère modéré
n'a exercé aucune pression en faveur des
modérés, mais qu'il n'a pas pu partout
,empêcher ses fonctionnaires d'exercer
une pression contre les modérés.
Voilà la première circonstance défavo-
rable pour les modérés pendant la pé-
riode électorale.
La seconde a été l'irruption de l'affaire
Dreyfus transformée en affaire Zola au
travers de la, politique électorale.
Il a fallu ai ministère actuel des pro-
diges de dextérité pour résister à cette
espèce de cyclone politique. L'affaire
Dreyfus-Zola a été exploitée par les par-
tis politiques, avec leur mauvaise foi
habituelle, puisqu'elle servait de cata-
pulte contre un ministère dont pas un
membre n'était au pouvoir lorsque fut
jugé, le procès Dreyfus, et dont pas un
membre n'avait jamais mis en doute la
culpabilité du trop fameux capitaine.
Cette affaire a eu pour résultat de bri-
sertous les compartiments qui séparaient
les partis politiques et de les mélanger
tous dans un désordre inexprimable.
Mais, peu à peu, les esprits se sont cal-
més et se sont classés dans un réarrah-
gement provoqué par leurs affinités na-
turelles,
Ainsi, aujourd'hui, tout ce qui est
conservateur en France est antirevision-
niste, et de la bourrasque il est resté, en
somme, une recrudescence de sympa-
th.ie et d'enthousiasme du Français pour
l'armée qui est sa sauvegarde, pour les
principes sacrés de discipline qui le pro-
tègent à la fois contre les rivaux du
dehors et contre les barbaries internes.
Il n'en est pas moins vrai que l'émo-
tion enfantée par ces débats violents a eu
sa répercussion sur les élections, et c.'est
à elle qu'on devra l'arrivée au Palais-
Bourbon de députés qui s'efforceront
peut-être de rendre la vie dure au minis-
tère.
L'élection d'Alger, car c'est d'elle que
je veux parler, est évidemment un épi-
sode pénible pour ce ministère, parce
qu'elle rend difficile le maintien en Al-
gérie de M. Lépine comme gouverneur
général et fait saillir la faute qui fut
commise l'an dernier.
Pour des considérations électorales,
on se priva, l'an dernier, des services
d'un fonctionnaire qui avait eu le temps
d'étudier l'Algérie qu'il gouvernait et
qui allait la faire profiter des fruits d'une
laborieuse expérience. Le ministère est
ainsi puni par où il a péché. Il verra
rentrer les ,deux ou trois députés aux-
quels il a sacrifié M. Cambon. Mais il
terra arriver avec eux, grâce à M. Lé-
pine, un député nouveau qui lui causera
plus de tablature que les anciens dépu-
tés conservés ne lui causeront de satis-
faction sans compter que Drumont ne
sera pas le seul à représenter l'élément
qui s'intitule nationaliste, puisque Dé-
roulède est déjà élu et que d'autres de
leurs amis à.eux deux peuvent venir à la
rescousse.
Je suis persuadé, d'ailleurs, que ce
groupe futur, dont le patriotisme est
aussi évident que l'honnêteté, jouera,
vis-à-vis des idées modérées dont le mi-
nistère est l'expression et des idées
conservatrices qui nous sont chères, un
rôle analogue à celui que jouait jadis
vis-à-vis des idées républicaines l'ex-
trême pointe d'avant-garde de la gauche.
Et s'il faut être condamné à un peu
d'exagération, je l'aime autant du côté
où je veux aller que du côté qui m'ef-
fraye.
En somme, et. en admettant que les
ballottages soient un écho du 8 mai, la
situation des conservateurs français, et
en particulier celle des catholiques,- est
plutôt amélûorée.
Numériquement, 'ils gagnent des siè-
ges. Moralement, ils gagnent de l'in-
fluence. Ils feront partie intégrante et'
nécessaire-dés majorités ministérielles.
Il n'y aura même de stables que les ma-
jorités dont ils seront, et vouloir sè. pas-
ser d'eux serait se condamner à l'insta-
bilité ministérielle dont la République a
si longtemps souffert.
Les modérées restent les arbitres de la
situation. Nous ne demandions pas au-
tre chose, et nous avons ce que nous
demandions.
J. Cornély.
AU JOUR LE JOUR
LE COMTE D'HÉRISSON
Samedi mourait à Constantine un Parisien
dont les aventures auraient formé plusieurs
chapitres de roman, s'il avait vécu dans un
temps plus romanesque que le nôtre': le comte
Maurice Irisson d'Hérisson.
Maurice d'Hérisson avait, je crois, dix-neuf
ans lorsque Napoléon III, pour échapper au
retour d'un jeu qu'il n'aimait pas, la bombe
d'Orsini, se décida à réaliser le rêve de sa jeu-
nesse, un peu amorti par. les splendeurs de
son âge mûr, et à rendre l'Italie libre des Alpes
jusqu'à l'Adriatique.
Maurice, qui devait avoir dans les dix-neuf
ans, s'engagea aussitôt dans un régiment de
cavalerie. Mais l'Italie fut libre, ou plutôt la
Prusse déclara que l'Italie était suffisamment
libre, avant que le volontaire eût terminé ses
classes à cheval, et, comme il le disait lui-
même, d'Hérisson ne' contribua à l'abaisse-
ment de la maison d'Autriche qu'en se bais-
sant lui-même pour ramasser avec ses mains,
dans l'écurie du quartier, le crottin de son
cheval. Il s'acheta un remplaçant.
Il commença à mener à Paris, avec les
jeunes gens dé son âge, une existence tissée
d'or et de soie, qui fit désirer à ses parents
qu'il déversât en dehors de la capitale les
surabondances de son activité.
C'est pourquoi, Napoléon III ayant combiné
avec son alliée, la reine Victoria, une expédi-
tion destinée à châtier les Chinois, d'Hé-
risson obtint d'être choisi comme secrétaire
par le général Cousin de Montauban, qui de-
vait commander les troupes françaises. Il
s'engagea dans l'infanterie, fut versé dans
les dragons et passa dans les spahis qui for-
maient la seule cavalerie expédiée dans l'em-
pire du Milieu:
Pendant que t'armée expéditionnaire, mon-
tée sur de grands clippers à voile, se rendait
en Chine en doublant le cap de Bonne-Espé-
rance, le général de Montauban et son secré-
taire filaient sur Hong-Kong par l'Egypte, le
chemin de fer de Suez, la mer Rouge et le pa-
quebot. Ils arrivaient six mois avant le reste
de l'armée et préparaient sur place la campa-
gne. Depuis, lès Anglais ont imité ce procédé,
avec sir Garret Wolseley, dans leur expédition
contre les Achantis,et s'en sont admirablement
trouvés. Nous avons tous trouvé qu'ils étaient
des malins et nous avons oublié, comme il
convient à des gens modestes, que nous leur
avions donné l'exemple.
D'Hérisson init à profit le temps qu'il avait
devant lui pour apprendre le chinois, et quand
on entra en Chine, il remplissait à la satisfac-
tion générale le rôle d'interprète. Au fameux
pillage du palais d'Eté, sa connaissance de la
langue chinoise lui servit pour mettre à l'abri
des fureurs de la soldatesque (!) les épouses du
Fils du Ciel qu'il avait découvertes dans une
,!le, au milieu du lac de l'auguste résidence.
Et pendant que nos amis les. Anglais précé-
daient au déménagement méthodique 'des cu-
riosités du palais, notre maréchal des logis
reconduisait tout un lot de petites femmes en-
fouies dans la soie et le brocart, jacassant
comme des pies.
D'Hérisson revint de Chine avec la croix de
chevalier de la Légion d'honneur et la médaille
militaire. La première de ces deux distinctions
n'avait pas encore été prodiguée et produisait
grand effet sur le revers d'un habit ou d'une
redingote. Maintenant,, elle vous fait prendre
pour le quatorzième attaché au secrétariat d'un
sous-secrétaire d'Etat. Le vainqueur de la
Chine employa consciencieusement les années
qui suivirent à manger ce qui lui restait de
son patrimoine.. Il mena la vie élégante des
beaux fils de 1.'époque impériale. Il était mem-
bre du Jockey-Club, ce qui lui constituait une
fonction sociale aussi enviable que coûteuse.
Je le retrouve en 1870 capitaine de mobiles
Un ami de sa-famille le fit attacher à l'état-;
major du général Trochu et il passa aux côtés
du gouverneur toute la période du siège de
.Paris, qu'il a racontée d'ailleurs en un livre
dont le succès a été colossal et qui est inti-
tulé le Journal d'un officier d'ordonnance.
Plus tard, mis en goût par ce succès, il a
écrit le Journal d'un interprète en Chine. Le
premier de ces deux livres a eu cinquante-trois
éditions, et le second trente-cinq. >
Pendant le siège, d'Hérisson se borna à
monter à cheval et à caracoler derrière son
chef. Mais, quand arriva l'heure des catastro-
phes, son rôle devint tout à coup dramatique
et souverainement intéressant. Comme il'con-
naissait l'allemand, Trochu le donna à Jules
Favre pour l'accompagner à Versailles où il
allait traiter avec le comte de Bismarck de la
capitulation deParis.
Rien n'est saisissant comme les chapitres
dans lesquels d'Hérisson raconte cete mission.
Le passage de, la Seine -dans une barque,
sous un ciel bas, et aussi sous les obus du
Mont-Valérien qui incendiaient Saint-Cloud
avec Jules Favre, statue lamentable de la
douleur moderne, avec sa redingote à souf-
flet et son chapeau de soie, et sa figure enté-
nébrée, a l'air d'un chapitre de Dante. A Ver-
sailles, chez Bismarck, le dialogue entre le
colosse et le pauvre ministre vous fait l'effet
d'un tète-à-tête entre un lion et une vieille
chèvre. C'est d'une tristesse épique, et déses-
pérée.
A retenir cette scène Bismarck explique à
Jules Favre qui ne fume pas l'utilité du cigare
dans la discussion, et comme quoi le pur ha-
vane contribue à la sérénité en fournissant
aux doigts et au cerveau un amusement, une,
distraction. Puis,on discute les termes de la*
capitulation. Jules Favre est obligé de confes-
ser que Paris o'a plus que pour quatre jours
de vivres, et Bismarck se dresse furieux pour
flétrir l'imprudence, de ces chefs d'Etat qui se
sont mis à la merci d'un déraillement.
Je vais, 'dit-il, partager les approvision-
nements de l'armée allemande avec les Pari-
siens. Mais si un pont s'écroule,'si un retard
se produit, si la famine fait des victimes dans
une population de deux millions d'âmes, vo-
tre responsabilité sera épouvantable.
Alors d'Hérisson, en enfant terrible et gâté,
tend humblement au colosse la soucoupe où
se trouvent des cigares, les cigares apaisants;
Bismarck se met à rire et dit
-Vous avez raison, j'ai tort de m'emporter.
Après le siège, d'Hérisson vint à Versailles
et s'employa au second siège avec les troupes
qui vainquirent la Commune, ce qui lui fournit
la matière d'un troisième volume.
Peu de temps après, le brillant capitaine de
mobiles se fixait en épousant une artiste qui
lui donna le bonheur et une charmante petite
fille. Mais l'élégance n'est pas une carrière et
d'Hérisson connut de longs jours de pénurie,
dont il ne sortait que partiellement vainqueur
avec les livres dont je viens de parler. A ces
livres succédèrent d'autres ouvrages, sur
Bazaine, sur différents sujets historiques. Ils
ne trouvèrent'pas le succès de leurs frères
aînés, peut-être et sûrement parce que leur
auteur avait négligé de s'inspirer des conseils
et de requérir la collaboration de certaine
Egérie barbue qui ne veut pas être nommée,
ni même désignée.
Tant et si bien qu'il y a une demi-douzaine
d'années, le pauvre d'Hérisson était dans la noire
misère. Il demanda un poste aux colonies. On
le nomma commandant supérieur des milices
indigènes du Congo. Il partit, avec sa femme
et sa fille, plein de courage, plein des meil.
leures résolutions, et muni d'un très bel uni-
forme en flanelle blanche, orné de cinq galons,
avec un casque d'aloès.
Hélas il arriva au Congo pour tomber ma-
lade, y resta six mois à boire du lait et revint
à moitié mort. Il est mort tout à fait de ce
voyage, à Constantine.
C'était un brave homme et un homme brave.
C'était un garçon d'esprit, un type du Pari-
sien de roman d'aventures. Il est venu trop
tard dans un monde trop vieux.
Saint-Remy.
Echos
La Température
Des pluies sont signalées en France à Dun-
kerque, Le Mans, Rochefort, Bordeaux et Pa-
ris. Le baromètre est à 765mm. La tempéra-
ture est généralement en hausse elle donnait
hier à Paris au-dessus le matin à huit
heures, igo à deux heures; 20° à Alger. Dans
la soirée le thermomètre était à 140, et le
baromètre vers minuit restait à 767mm.
Les Courses
A 2 heures, courses à Saint-Ouen.
Gagnants de Robert Milton
Prix du Loiret Tancrède.
Prix de la Beauce Bueil.
Prix de la Sologne Foscari..
Prix Bandmaster: Fragoletto.
Prix de l'Orléanais Bajardo.
A Travers Paris
Le Président de la République a reçu
hier matin les membres du bureau et du
Conseil maritime de la nouvelle société
naur la, navigation d.^
I plaisance, t'Union des vachts français,
sociétés réunies du Y. CT. et de l'U. Y. F.
L'amiral Courrejqlles a présenté ses
collègues à M. Félix Faure. Parmi les
membres présents citons MM. le baron
Arthur de Rothschild et Henri Menier,
vice-présidents; de Boulongne, A. de
Caillavet, de .Caladon, comte de Dalmas,
Desprez, Fournier, Godillot, marquis de
La Jàille, comte de Kersabiec, comte de
Lyrot, Maillard, G. Martin, Récopé, de
Rollepot, Schelcher, comte de Tocque-
ville, commandant West et M. Chéruit,
secrétaire de la société.
L'accueil de M. Félix Faure a été em-
preint de la plus grande bienveillance et
il a exprimé. aux membres du Conseil
tout l'intérêt qu'il porte au yachting fran- 4
çais.
J.N.S.TANTANÉ ]
LE LANDGRAVE
ALEXANDRE-FRÉDÉRIC DE HESSE-CASSEL ]
C'est une Altesse royale, le chef d'une des
plus grandes maisons de l'Europe, l'héritier
du souverain de la Hesse électorale, et c'est
aussi un grand artiste. Né à Copenhague en
1863, il est le fils du landgrave Frédéric dont
la renonciation au trône de Danemark permit
à Christian IX de régner à Copenhague. Par
sa mère il est le petit-fils du célèbre prince
Frédéric-Charles de Prusse, et son frère cadet
a épousé la princesse Marguerite, sœur de
l'empereur d'Allemagne Guillaume II. Son
illustre naissance et son immense fortune
n'empêchent pas le prince d'être un modèle de
modestie, de bienveillance et d'affabilité. Tou-
tes les personnes qui ont l'honneur de le con-
naître lui ont voué une respectueuse et pro-
fonde sympathie. Actuellement à Paris, sous
le nom de baron Gadendorf, il y observe un
strict incognito et y mène une vie essentielle-
ment intellectuelle et artistique. Il y a inau-
guré une mode excellente. Il donne des dîners
auxquels on est convié pour six heures, mais
où l'on ne se met à table qu'à huit; en atten-
dant, on fait de la musique. Samedi dernier,
Son Altesse Royale, qui est un musicien
consommé, pianiste remarquable, violoniste
hors de pair, a joué plusieurs morceaux de
violon avec une maestria qui a littéralement
émerveillé un auditoire d'artistes et de dilet-
tantes. C'est le.Paganini des princes.
Près de trois cents hommes de lettres,
professeurs et étudiants russes habitant
Paris se sont réunis hier pour célébrer
le cinquantenaire de la mort du célèbre
critiqué russe Vissarion Belinsky, à qui
sa ville natale, Penza, se prépare à inau-
gurer une statue.
Présidée par le littérateur Ansky, la
réunion d'hier a été entièrement consa-
créé à l'œuvre philosophique et littéraire
de Belinsky. Après Mme Konrady, notre
confrère des Novosti, M. Séménoff, a fait
ressortir, dans une conférence érudite et
éloquente, l'importance de la vie et des
œuvres de Belinsky. Des artistes russes
de passage à Paris ont dit des scènes et
poésies puis, des tableaux vivants ont
présenté quelques épisodes de la vie de
Belinsky.
La fille du célèbre critique, Mme Olga
Vissarionovna Benzy, assistait à cette in-
téressante séance avec son mari, ancien
consul général, et ses deux fils, étudiants
à Paris. Dans une allocution émue, Mme
Benzy a remercié l'assemblée du culte
voué par la jeunesse russe à la mémoire
de son illustre père.
L'anniversaire de la catastrophe de la
rue Jean-Goujon avait fait de la semaine
dernière une semaine de deuil. Aussi la
maison Camille Marchais, rue de la Paix,
a-t-elle voulu attendre que l'émotion fût
calmée pour présenter à sa clientèle aris-
tocratique ses nouvelles créations de
chapeaux qui sont véritablement l'ex-
pression la plus exacte des modes du
printemps.
C'est vendredi prochain, à deux heures,
que sera inaugurée, au Salon du Figaro,,
l'exposition des pastels de M. Georges
Bertrand, pastels fixés à l'épreuve de
l'eau, selon un procédé découvert récem-
ment par l'excellent artiste.
On a dit l'autre jour quelle intéressante
personnalité était Georges Bertrand. Ses
pastels, jolies figures de femmes aux
cheveux roux et paysages tout envelop-
pés de poésie,.le montreront sous un
jour nouveau pour ceux qui gardent
dans leur mémoire le souvenir de sa
grande œuvre, Patrie aujourd'hui à
Versailles, dans la galerie des Batailles,
où le Tsar l'admira beaucoup lors de sa
visite en octobre 1896.
Hors Paris
De Taganrog (Russie)
« La Banque Foncière du Don vi ent de
fêter le vingt-cinquième anniversaire de
sa fondation. A l'occasion de ce jubilé,
les actionnaires ont décidé 1° de donner
aux employés qui sont à la Banque de-
puis vingt-cinq ans les appointements
d'une année- comme gratification; cette
mesure sera désormais appliquée à tous
les employés qui arriveront à vingt-cinq
ans de service; 2° tous les employés de
la Banque indistinctement ont reçu les
appointements d'un trimestre 3° outre
les sommes versées chaque année pour
la retraite des employés, la Banque, à
partir du jour du jubilé, assurera à ses
propres frais la vie de tous les employés
pour une sommé qui représentera huit
fois leurs gages annuels.
» Voilà un bel et intelligent exemple à
suivre!
» Le fondateur de la Banque, M. Jac-
ques de Poliakoff, qui en est aussi le pré-
sident depuis sa fondation, a été fêté,
acclamé, comblé d'honneurs. Le Conseil
municipal de Taganrog a décidé, à l'una-
nimité, de le nommer citoyen honoraire
de cette ville qu'il comble de ses bien-
faits. M. de Poliakoff n'est pas arrivé à
une telle marque de distinction unique-
ment par sa situation matérielle :il l'a
méritée surtout par sa valeur morale,
^son. travail énorme et infatigable. »
Nouvelles la Mais
Un joli mot d'un brave homme dont la
modestie va de pair avec la bienfaisance.
Décidément, on a bien raison de
dire que les services que l'on rend ne
vous attirent que des ennuis! J'avais eu
le plaisir d'obliger un ami dans l'embar-
ras. Je ne lui conseille pas d'y revenir.
Il vous'a payé de la plus noire in-
gratitude ?
Non pas. Il est allé le raconter à
tout le monde!
Mercadets modernes.
Ils en sont à leur première entrevue
pour jeter les bases d'une affaire au sujet
de laquelle on les a abouchés.
Le plus âgé sait à quoi s'en tenir sur
la moralité du seeond celui-ci est un
peu gêné par la réputation de probité
que l'autre a fini par conquérir, après un
passé fort scabreux qu'il ignore.
Alors, remarquant les hésitations de
son partenaire et en devinant la cause,
le premier s'écrie, pour le mettre tout à
fait à son aise
A propos. Mazas est-il plus gai
que de mon temps ?
Le Masque de Fer.
Un accident, dont l'importance n'est
pas encore exactement connue, est arrivé
hier sur la ligne de l'Est.
Voici la note communiquée à ce sujet
par la Compagnie
Aujourd'hui, vers deux heures de l'après-
midi, le train rapide 40-30, venant de Bàle, a
heurté un train omnibus prés de la station
de Foulain (Haute-Marne), sur une partie de
la ligne de Paris à Mulhouse où la circula-
tion se faisait à voie unique, par suite des
travaux de réparation d'un petit tunnel.
Il y aurait quelques blessés.
A cette communication nous pouvons
ajouter les renseignements suivants
Le train rapide 40-30, de Bâle à Paris,
avait quitté la gare de Langres à 1 h. 36,
et se dirigeait vers Chaumont où il doit
arriver à 2 h. 4. Il s'engageait vers
i h. 45 sous le tunnel de La Pommeraye,
situé entre les stations de Vesaignes et
de Poulain.
Ce tunnel,.long de 298 mètres, est, de-
puis le 18 février, en réparation et les tra-
vaux ont nécessité l'obstruction d'une
des voies. Un raccord a été établi pour le
passagedestrains sur la seulé voie qùi
reste. Ils ne doivent y passer que pilo-
Or, justement, le train omnibus
parti de Longueville à 5 h. 46 du matin,
et qui passe 1 h. 44 à Foulain, arriva
au même moment, allant à Belfort, et
s'engagea à l'autre extrémité du tunnel
sur cette même voie unique.
Comment cela a-t-il pu arriver? Les
mesures avarient cependant été prises
pour que les deux trains n'eussent à
passer que l'un après l'autre. Quel est
celui qui était en retard ou en avance ?
L'enquête ne l'a pas encore établi. Tou-
jours est-il qu'une rencontre se produi-
sit.
L'émotion de l'accident, le soin de sau-
ver les blessés empêchèrent de télégra-
phier à Paris, car c'est seulement en ne
voyant pas arriver le rapide à cinq heu-
res trente-cinq que le chef de la gare de
l'Est a télégraphié, pour connaître la
cause du retard, et a appris la nouvelle.
On supposait que le train 42, arrivant
de Chaumont à 6 h. 45, apporterait des
détails. On espérait même qu'il ramène-
rait les blessés. Il n'en a rien été. Le 42
avait passé à La Pommeraye trois heures
avant l'accident et ni les employés ni les
voyageurs ne savaient rien.
La nouvelle de l'accident a causé dans
le personnel une grande émotion, et les
membres du Conseil d'administration se
sont immédiatement réunis avec les in-
génieurs. Il .a été décidé qu'une Commis-
sion se rendrait à Chaumont, et de là sur
le lieu de la catastrophe. MM. Picard,
chef de l'exploitation Gerardin, chef ad-
joint Tordeux, Lancremont, ingénieurs,
et Salomon, chef de la traction, sont par-
tis par le train de 8 heures 35.
De son côté, M. Turrel, ministre des
travaux publics, a envoyé, sur les lieux
de l'accident, pour procéder à une en-
quête, M. Keller, inspecteur général des
mines, directeur du contrôle de la Com-
pagnie de l'Est, et M. Peschaud, chef
adjoint de son cabinet.
Plusieurs médecins, parmi lesquels
MM. les docteurs Créqui et Décori, se
sont mis à la disposition de l'administra-
tion.
Quant au nombre des victimes, on
l'ignore encore. Une dépêche, arrivée à
huit heures signale seulement la mort
de deux employés et ajoute qu'il y a plu-
sieurs blèssés, sans dire combien.
A dix heures. une seconde dépêche a
apporté les noms suivants
M. Léon Lehmann, voyageur de commerce,
à Troyes, mort.
M. André Régis, indigent de Grenoble,
mort.
Mlle Laurent, fille d'un_ chauffeur de Chau-
mont, morte.
Mme Laurent, mère de la précédente, con-
tusions multiples, état grave.
M. Malgray,- pilote, jambe gauche coupée.
M. Chvaline, mécanicien du train 51-53,
fracture de la jambe gauche.
M. Auxerre, courrier des postes à Dijon,
blessures aux jambes.
M. Kersfavo, voyageur, contusions à la face
et au nez.
M. Philippe "Narcisse, mineur, plaies, con-
tusion à l'œil gauche.
Mlle Marie Garnier, de Clefmont, contu-
sion à l'œil droit.
Mme Caillet, femme d'un garde-freins,
contusions à la joue et à l'œil gauche.
M. Louis Levasseur, voyageur de Chateau-
villain, contusions aux reins.
Le mécanicien du rapide a disparu. On
dit aussi que Mme Laurent avait avec
elle un enfant qui aurait été coupé en
deux et pas retrouvé.
Enfin, on affirme qu'il y aurait plu-
sieurs autres,blessés. Mais il faut faire
la part de l'exagération qui se produit
toujours dans des cas semblables.
Une compagnie du 109° est partie de
Chaumont pour déblayer la voie.
Un convoi formé à Chaumont est allé
chercher les blessés et les voyageurs du
train 40-30, pour les ramener à Paris.
Dernière heure.- Le train 40-34, formé
à Chaumont pour ramener les voyageurs
du 40-30, est arrivé sur la voie 14, gare
de l'Est, à 10 h. 17, hier soir.
II ne contenait que les voyageurs va-
lides et une Anglaise blessée qui avait la
tête enveloppée de gaze iodoformée.
Une grande foule de parents, d'amis
et de curieux attendait les voyageurs à
la gare.
D'après ce que racontent les témoins
de la catastrophe, là cause serait le mau-
vais fonctionnement du frein du -train
rapide. Le 51-53. s'était engagé sous'le
tunnel, ayant son pilote sur la machine,
à côté du mécanicien, et marchait à une
allure modérée. Au moment où il allait
sortir à l'orée, comme oh dit, du tun-
nel le train 40-30, rapide, qui se pré-
sentait pour entrer, étaitaur. le raccor-
dement. Apercevant le train omnibus, le
mécanicien du rapide a voulu s'arrêter.
Mais le frein n'a pas obéi4'et le rapide a
pris l'omnibus en écharpe.
Le choc .a été épouvantable, nous
a raconté un curé qui se trouvait dans le
train et qui est arrivé hier soir. Le com-
partiment dans- lequel je me trouvais,
avec Mgr l'évêque de Langres, a été
soulevé de dessus les rails, bien que se
trouvant à quelque distance du wagon
tamponné. Nous avons tous été jetés les
uns sur les autres.
Cet ecclésiastique fait le plus grand
éloge du zèle des ouvriers employés à la
réparation du tunnel. Ils sont accourus,
ont rassuré les voyageurs pris de pa,ni-
que, ont dégagé les blessés et ont aidé
les voyageurs valides à gagner Chau-
mont pour porter,la nouvelle et réclamer
des secours.
Georges Grison.
Elections du 8 mai
Nous publions le tableau complet dés
élections législatives, en ayant soin, dans
les départements dont nous avons déjà
donné les résultats définitifs, de rappeler
uniquement les noms des élus avec- le
chiffre des voix obtenues.
A ce tableau,qui représenté désormais
l'ensemble des scrutins du 8 mai, nous
joignons un état récapitulatif des élus,
qui nous semble devoir intéresser nos
lecteurs parce qu'il donne ..en détail .là
composition des différents partis dans la
prochaine Chambre.
Cette Chambre se réunira, on le sait,
de plein droit, le 1er juin.
DÉPARTEMENTS
̃ BELLEY
MM. Giguet, dép. s., rad. 9.891 ÉLU
Martelin, cons. gén., prog. 6.905
BOURG. Première circonscription
MM. Pochon, d«p. s., rad. 8.943 EUS
Piquet, prog.
Deuxiéme circonscription
MM. Herbet, dép. s., rad. 8.434 ÉLU
Villefranche, prog.s.
Grand de Vaux .758
GEX"
M. Bizot, dép. s., rad.̃«.̃• 3 974 ÉLU
..NANT.UA.. "r^
MM. Alfred Carrier,cons.g.prog. 6.273ÉLU
Philipon, dép. s., rad 4.488
Caron .947
TRÉVOUX
MM. Alexandre Bérard,d.s.,rad.
Rigaud, prog.
Coqui, prog
Victor Cambon, prog.
Ballottage
AISNE
-•̃̃ CHATEAU-THIERRY
MM. Morlot, dep. sort., rad. 8.557 E4U
Henriet, prog 5.106
LAON. Première circonscription-
MM Ermant, dép. sort., prog. 1.400
Bellard, rad 7.900
Testard, prog
Ballottage
Deuxième circonscription
MM. Castelin, revis, ra d. 9.405 E£U
Grégoire, rép 7.051
Dolle, rôp 7i0
SAINT-QUENTIN. Première circonscrip.
MM. François.Hugues, d. s., rép. 6.117
Touron. prog. 4.535
Henri Turot, soc. 5.877 '̃̃̃
Ballottage •
Deuxième circonscription
MM. JulesDesjardinSid.s.jprog. 8.106
Vatin, rad. 6.108.
Garbe, soc 1.138
Ballottage
SOISSONS
MM. Firino, dép. sort., prog. 6.790
Chènebenoit, rad
Magniaudet, rad. soc 6.580
Ballottage,
VERVINS. Prémière circonscription
MM. Denècheau, dép. sort., rad. 7.473 ELU
Vicomte Foy, prog 5.758
Brizon, soc 109
Deuxième circonscription '̃ ̃•.̃•
MM. Moret, dép. sort., prog 5.99âf<
Fournièrê.conseiller muni-
cipal de Paris, soc 6.112
Ballottage
ALLIER
GANNAT
MM. Delarue, dép. sort., rad. soc 9.925 ELU
Labussière, ana. dép. pr.. 7.443
LAPALISSE
MM. Dr Gacon,.dép. sort., rad. 16.278 ELU)
Paul Dehiay, prog
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