Titre : Figaro : journal non politique
Éditeur : Figaro (Paris)
Date d'édition : 1875-07-27
Contributeur : Villemessant, Hippolyte de (1810-1879). Directeur de publication
Contributeur : Jouvin, Benoît (1810-1886). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 27 juillet 1875 27 juillet 1875
Description : 1875/07/27 (Numéro 207). 1875/07/27 (Numéro 207).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
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Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Description : Collection numérique : France-Brésil Collection numérique : France-Brésil
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Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 15/10/2007
LE FIGARO MARDI 27 JUILLET 1875
S~S~i~S~s~EE.s~a~s~~
a raconté en manière d'explication la
plus étrange des histoires.
Il a prétendu qu'au moment de quitter
le Guyane. il avait apuras l'existence, à
vingt lieues dans l'intérieur des terres,
d'un richissime placer d'or mais on l'a-
vait ramené en France sans lui laisser
le temps d'aller commencer des fouilles.
Depuis, pris de la fièvre d'or, il n'avait
plus eu qu'une idée, retourner à la
Guyane. Si cette fable était vraie, pour-
tant ? Voyez-vous Maillot revenant gra-
cié dans une vingtaine d'années à cause
de sa bonne conduite, étonnant Paris du
luxe de son hôtel et de ses équipages,
fondant des hôpitaux, et protégeant les
arts?.
Quoi qu'il en soit, Maillot est désespéré
qu'au lieu de le réexpédier sur la Guyane,
on l'envoie en Nouvelle-Calédonie.
Georges
Georges, le complice de Maillot, est le
confident que celui-ci avait pris pour
ses rêves d'or. Quant à Thauvin que
tous deux considèrent comme un gamin
sans consistance, malgré ses indiscuta-
bles qualités d'etrangleur on s'était
méfié de lui et on ne lui avait rien dit.
Georges prend assez philosophique-
ment son parti d'être envoyé en Nou-
velle-Calédonie. Il a déclaré a quelqu'un
qui l'a vu dans la prison de la Rochelle
que, « en fin finale, cela lui était bien
égal, attendu qu'il savait bien qu'il était
maintenant un homme nettoyé ».
Depuis sa condamnation, Georges a
vieilli de dix ans. Sa figure s'est consi-
dérablement altérée; au coin de ses
yeux il y a des rides, et ses cheveux sont
devenus gris. Il mange à peine. Chose
bizarre, il sifflotte tout bas presque toute
la journée, machinalement, ia célèbre
« romance de la Rose » de Martha.
Thauvin
Thauvin réalise absolument le type
du condamné satisfait de son sort.
J'ai eu occasion de vous dire que, pen-
dant son séjour à la Roquette, une de
ses préoccupations avait été de savoir si
on ne vouaralt pas tout de même de lui
comme ténor au théâtre qui vient de se
fonder à Nouméa.
Aux encouragements d'un digne prêtre
qui est venu le voir à Saint-Martin-de-
Ré, au moment de son arrivée, il a ré-
pondu
Certainement, qu'on se conduira
bien. Pourquoi donc qu'on ne serait
pas colon comme un autre ? Moi, d'abord,
y aime là vie des champs.
Contrairement à Georges, il semble at-
.teint d'une véritable fringale depuis sa
commutation.
I>ubois
Dubois est ce condamné à mort à pro-
pos duquel Sancho disait à l'aumônier,
e matin de son exécution, il y a quel-
ques jours à peine
N'est-ce pas, monsieur l'abbé, que
mon co-détenu Dubois va être guillotiné
avec moi?
Dubois n'a pas été exécuté. Le prési-
dent de la République a pris une déci-
sion gracieuse en sa faveur, afin de ne
pas multiplier les exécutions dans la
même localité, et norr certes parce que
Dubois était intéressant. Rappelons som-
mairement, en effet, les crimes de ce
misérable.
Il y a un an, il avait voulu assassiner
un de ses co-détenus, et avait, pour ce
fait, été condamné aux travaux forcés.
Trois mois après, au moment de partir
pour le bagne, il tentait de tuer 'un de
ses gardiens. La cour d'assises du Gard
le condamna, le 22 mai dernier, à la
peine de mort.
Impossible d'imaginer cynisme plus
révoltant que celui de ce gredin de
vingt-six ans. Depuis sa commutation,
il n'a pas donné une marque de repentir.
Une des réflexions qu'il a faites peut
donner une idée de ce qu'il est:
Malheur! a-t-il dit un jour. On est
autant condamné pour avoir voulu suri.
ner un détenu et un gardien que si on
s'en était pris à un honnête homme
Il dit souvent qu'il lui aurait été indif-
férent de mourir.
.'̃̃̃: ,̃:̃ Brest
Le boulanger du Havre. Vous sa-
vez, ce misérable qui torturait, brûlait
et tenaillait sa pauvre petite fille, tant
et si bien qu'elle en est morte ? C'est un
singulier type que ce condamné à per-
pétuité vingt-huit ans,blond, l'air extrê-
mement comme il faut, et ne parlant
qu'avec la plus grande politesse à tous
ceux qui l'approchent, détenus ou gar-
diens. Jamais, à le voir, on ne se doute-
rait qu'on est en présence d'une bête
féroce. Il ne parle pas de son crime, ne
jécrimiae pas, et un de ses grands sou-
feuilleton fla E1GÀH0 du N Juillet 1815
3
v V IA
CHÂSSE AUX FANTOMES
PREMIÈRE PARTIE
L'AUOUR »E t»O»
1
suite.
Nous laisserons Pierre Melven et
Louis Copeau, que nous retrouverons
bientôt, pour suivre Robert Dachet.
Celui-ci fut, tour à "tour, employé chez
nn entrepreneur de travaux calligra-
phiques et clerc d'huissier.
Si Robert Dachet eût eu des illusions,
à coup sûr il les eût promptement per-
dues chez l'entrepreneur d'écritures. Ce
qu'il vit là de misères, de pauvreté hon-
teuse, d'existences brisées, de fortunes
déchues, de déclassés de toutes sortes
défrayeraient- en drames lugubres tous
les journaux de Paris pendant cinq ans.
Robert Dachet n'en fut point décou-
ragé. Il puisa au contraire dans la vue
de toutes ces misères, une nouvelle éner-
gie etla volonté fermement arrêtée d'être
riche un jour, dût-il pour cela briser les
affections les plus unies, marcher sur le
corps de ses meilleurs amis.
Soutenu par cet espoir, il mangea bra-
vement de la vache enragée et gagna de
son séjour à l'office général des travaux
calligraphiques, la patience qui fait
l'homme fort et l'horreur de la pauvreté
qui prépare à toutes les ambitions. Il
comprit bien vite la puissance de l'or,
devina que la jeunesse et la volonté ne
suffisaient pas toujours pour parvenir,
et, afin de se créer un petit capital, de-
vint avare, but de l'eau et se nourrit de
pain qu'il allait acheter au rabais, à la
porte de la caserne du faubourg Pois-
cis est d'avoir assez d'eau- pour se tenir
très propre.
Brest, grâce à sa profession de bou-
langer, pourra vivre là-bas d'une fa-
çon presque agréable d'ici à quelques
années.
Garcia =-
Encore un coquin d'un endurcissement
inouï. Garcia a été condamné par la
Cour d'assises des Ardennes pour avoir
assassiné sa. femme, en l'étranglant. avec
un mouchoir. Sa fille, une enfant, avait
vu le crime. On l'amena naturellement t
devant la Cour d'assises pour déposer.
Mais, une fois devant le tribunal, la
pauvre petite se mit à fondre en larmes
et supplia qu'on ne la forçât pas d'accuser
son père
Garcia, :dit alors M. le président,
voyez-vous un inconvénient à ce que
votre fille soit entendue?
Qu'est-ce que vous voulez que ça
me fasse? répondit l'accusé en ricanant.
Ça m'est bien indifférent.
° Tel l'homme s'est montré ce jour-là,
tel il est depuis sa condamnation. Cyni-
que, immonde, sans donner la moindre
marque de repentir, humble et har-
gneux comme un loup de ménagerie, il
encourt à chaque instant des punitions
pour ses insubordinations et sa paresse.
Il faudra évidement le mettre aux fers
pendant la traversée.
Louis Cros
De l'école de Dubois, celui-là. Il est
condamné pour avoir tenté d'assassiner
un gardien de la maison centrale d'Eysse,
avec une lame de couteau emmanchée
dans une plinthe en bois de chêne.
Effroyables antécédents. L'air extrême-
ment distingué, du reste. Il n'est âgé que
de vingt-quatre ans et dit qu'il a heureu-
sement du temps devant lui pour rache-
ter sa vie et devenir un honnête homme.
Signe particulier a une crainte per-
pétuelle de mourir du mal de mer pen-
dant la traversée.
Frédéric TTallayrand.
Condamné le 24 mars dernier par la
Cour d'assises de l'Ardèche, pour avoir,
de complicité avec son père, assommé
une malheureuse fille sourde et muette.
Les deux gredins l'ont noyée après l'a-
voir attachée et bâillonnée. La cupidité
était le motif de leur crime.
Le père, condamné à perpétuité comme
son fils, ne sera pas transporté en Nou-
velle-Calédonie à cause de son âge.
Quant au fils, il a une tète de coquin
s'il en fut. Front haut et fuyant, sourcils
épais et arqués, yeux enfoncés dans les
orbites, figure en lame de couteau.
Il trouve « dégoûtant » c'est son
expression qu'on laisse son père en
France tandis qu'on l'envoie si loin.
Léon Boité
Le Cartouche du Berry, dont il a été
pendant plusieurs mois la terreur. On
ne causait plus, dans le tranquille pays
si cher à George Sand, que de vols avec
effraction, d'attaques à main armée, dont
l'auteur échappait toujours à la gendar-
merie.
On commençait même à parler d'une
bande de voleurs parfaitement organi-
sée, lorsqu'un soir le malfaiteur se fit
prendre en blessant à coups de fusil
deux cultivateurs du pays, du nom de
Meunier.
Boité est jeune et a la tenue cor-
recte d'un ancien sous-officier. Sa figure
exprime une énergie terrible. Il ne té-
moigne aucun repentir.
JToly
Joly est le plus jeune de tous les for-
cats qui vont etre.embarqués à bord du
Rhin. Il- n'a que SEIZE ans, et il est con-
damné à perpétuité. Son crime est un
des plus effroyables qui se rencontrent
dans les annales judiciaires.
Il a assassiné, dans la Loire-Inférieure,
un vieillard de soixante ans, du nom
d'Hervé Gueff, et sur ce cadavre, dont
il avait broyé la tête, il s'est livré au
plus épouvantable attentat.
Un de ses sabots tout couvert de sang,
a été trouvé sur le lieu du crime. C'est
ce qui l'a fait prendre.
Joly a un type des plus singuliers. Sa
figure, assez douce et d'une expression
bête, est d'une longueur tout à fait ex-
traordinaire. Ses yeux, immobiles et
sans expression, sont enfoncés. On di-
rait Calino, le Calino du bagne.
Mignon et Guirande
Dans la collection de misérables dont
nous nous occupons, Mignon et Guirande
ont la partie du faux-monnayage.
Le premier était horloger dans le Puy-
sonnière. Aux heures de la jeunesse on
est capable de ces tours de force.
Dans l'étude de l'huissier, Robert Da-
chet vit une nouvelle sorte de misère, la
misère qui bataille et qui lutte, celle du
boutiquier, du commerçant, du fabricant
aux prises avec cette chose brutale et
inexorable qui se nomme l'échéance; il
vit comment, pour se libérer par termes,
frais et intérêts dépassaient souvent le
capital.
Chez l'entrepreneur d'écritures, son
cœur connaissait encore la pitié; il l'en
chassa complétement chez l'huissier. Il
vivait au sein de la rouerie, de l'astuce,
de la duplicité, du mensonge; il apprit
la rouerie, l'astuce, la duplicité, le men-
songe, et se convainquit de nouveau que
la vie ne devait avoir qu'un seul but la
richesse 1
Depuis son entrée chez l'homme de
loi, il n'avait pas revu ses amis Melven
et Copeau; il craignait que ceux-ci ne
fissent une saignée au produit des éco-
nomies sordides auxquelles il se livrait.
Mais comme il était tenu à des cour-
ses assez fréquentes dans Paris, il se
trouva, un matin sur le boulevard
Montmartre, nez à nez avec Pierre Mel-
ven, qu'il avait quitté, lors de leur der-
nière rencontre, employé à la confection
des bandes manuscrites, au journal le
Furet, revue de la littérature, des arts
et des théâtres.
Te voilà donc enfin, réfractaire de
l'amitié s'écria Melven d'où sors-tu? 2
Qu'es-tu devenu dépuis ces longs mois
pendant lesquels tu n'a pas donné signe
de vie?
Pierre Melven était vêtu d'une façon
élégante toute sa personne laissait
échapper cette satisfaction que donne
l'aisance.
Dachet se mordit les lèvres et se garda
bien d'avouer la vérité.
J'ai été malade, dit-il.
-Il fallait m'écrire au journal.
Tu y es toujours?
Oui, dit en souriant Melven, seule-
ment j'ai changé de condition je suis
de-Dôme, à Latour; doué d'un réel ta-
lent de graveur, il se livrait à la fabri-
cation des billets de mille francs. Ce qui
l'a fait pincer, c'^st qu'un jour il a voulu
acheter du papier au fournisseur même
de la Banque de France. Mignon en a
pour quinze ans. Son procès est un de
ceux qui ont causé le plus d'émotion
dans le Puy-de-Dôme. Depuis le 20 mars,
jour de sa condamnation, les paysans
de ce pays illettré refusent comme fal-
sifiés tous les billets de banque qu'on
leur présente. -Mignon semble avoir un
très grand repentir.
Guirande, lui, a été condamné, pour
émission de pièces de 2 francs fausses,
par la Cour d'assises de la Corrèze. Un
détail dramatique avait signalé son ar- '-i~
restation il avait réussi à s'échapper
des mains des gendarmes, sur la route
de Tulle, et une véritable chasse à
l'homme avait dû être organisée pour le
rattraper.
Guirande paraît aussi revenu à de
meilleurs sentiments..
Vincent
André Noël, dit Vincent, appartient
à une famille de voleurs. On est escarpe
là dedans de père en fils, ou à peu près.
Lui-même, avant son crime, avait déjà
subi quatre condamnations. Ce qui l'a fait
envoyer au bagne, c'est qu'il a assassiné
un vieillard sur la route de Grenoble à
Lyon. ,t' .11' D b
Pourrait être appareillé avec Dubois
pour le cynisme; ils formeraient à eux
deux un remarquable attelage de co-
quins. Bo,~iu
Bouin
Grand, maigre, sans barbe, l'air aus-
tère et digne, Bouin a l'aspect d'un huis-
sier retiré des affaires apres une carrière
honorablement remplie.
Il a assassiné une vieille femme pour
la voler. C'est évidemment le plus
flegmatique de tous les futurs passagers
du Rhin.
Bouin ne prononce pas dix paroles
sans y intercaler un proverbe ou un
dicton.
liaherrère ̃•̃̃••̃»
Ainsi que Barbier, dont je parle plus
loin, Pierre Laherrère est un forçat plus
intéressant que les autres. Ce n'est pas,
en effet, la cupidité qui l'a envoyé au
bagne, mais l'amour. Laherrère était au
service il aimait passionnément sa cou-
sine Jeanne, et sa seule idée était de
l'épouser. Quand il revint, les parents de
la jeune fille lui déclarèrent que celle-ci
n'était pas pour lui. Laherrère insista,
supplia. Un jour eut lieu une scène plus
violente que les autres, et, en présence
de Jeanne, Laherrère s'élança, le couteau
à la main, sur les parents de la jeune
fille. Le père fut légèrement blessé, et la
mère reçut treize coups de couteau.
Laherrère, exaspéré par le sang, voyant
rouge, s'acharna sur son corps.
Iln'aquevingt-quatreans.C'estunbeau
garçon qui a reçu l'éducation d'un cam-
pagnard aisé. Depuis sa condamnation,
il ne semble pas se préoccuper de ce qui
va lui arriver. Son immense amour pour
sa cousine domine tout et l'absorbe.
Souvent quand il se croit seul, on le
surprend murmurantle nom de « Jeanne »
et de grosses larmes lui viennent dans
les yeux.
Il évite du reste de parler de son
crime, et se montre extrêmement doux
avec ses gardiens.
Pauvre garçon, digne d'intérêt, mal-
gré l'horreur de son crime Comme il
doit souffrir de se voir mêlé à tous ces
misérables, et de s'en aller si loin, si
loin de la femme qu'il aime, dans un
pays d'où il ne reviendra jamais 1
Barbier
Vous n'avez pas oublié quel bruit a
fait récemment le procès de Barbier
devant la Cour d'assises de Toulon. Bar-
bier a été criminel par amour, comme
Laherrère. Il a déchargé un revolver sur
la veuve Flaud, sa parente, et sur le fils
de celle-ci, parce qu'on ne voulait pas
lui laisser épouser sa cousine.
Celle-ci a déclaré à l'audience qu'elle
ne l'avait jamais aimé. Cette déclaration
a positivement stupéfié Barbier, et c'est
un malheureux hébété qu'on va emmen er
à Nouka-Hiva.
Stoltz
Le gredin qui a si violemment frappé
M. Beauquesne, directeur de la prison
de la Roquette. C'est une bête brute
qui sera la terreur du bagne, si l'on ne
prend des mesures de sûreté.
Mais il peut être sûr de son affaire, on
les prendra.
&*#
Mais abrégeons, la place va me man-
passé de la confection des bandes à la
rédaction.
Tu es employé à la rédaction ?
Mieux que cela, je suis rédacteur
en chef du Furet.
Diable et Louis Copeau?
Oh! Copeau est resté ce qu'il était:
garçon de bureau au journal et n'a pas
'autre ambition, surtout maintenant
que je suis son chef. Et toi, voyons, que
fais-tu maintenant, car je ne suppose pas
qu'un garçon doué comme tu l'es reste
longtemps à copier des rôles chez un
entrepreneur d'écritures?
Moi, dit Dachet, je suis, -pour le
moment, clerc d'huissier.
Et tu gagnes!
Une centaine de trancs par mois.
Melvén réfléchit quelques instants.
Cent francs par mois s'écria-t-il
tout à coup, tu vaux mieux que ça; et
tu peux en gagner cinq fois autant sans
te donner beaucoup de peine et en con-
servant toute ta liberté 1
Comment cela ? demanda Dachet.
Melven reprit.
Ecoute-moi. Il existe une profes-
sion dont tu ignores sans doute l'exis-
tence et à laquelle je n'avais jamais
songé avant mon entrée dans le journa-
lisme. Pour y réussir, il faut, il est vrai,
deux qualités, mais tu les possèdes au
suprême degré: c'est l'audace et la vo-
lonté. Ce métier est celui d'agent de
publicité; on y gagne beaucoup d'argent.
veux-tu l'entreprendre?
Pourquoi pas ? dit Dachet.
S'il en est ainsi, viens me voir au
journal, je t'expliquerai le mécanisme
de l'opération et tu travailleras pour
nous. Viens de deux heures à quatre
heures, le propriétaire du Furet sera au
bureau; je te présenterai à lui et au be-
soin je te ferai donner une avance. Est-
ce dit?
C'est dit 1
A demain, alors. ̃
A demain.
Trois jours plus tard, Robert Dachet,
stylé par le propriétaire du Furet, encou-
quer, et mentionnons rapidement:
Sœuves, Greffier et Ciré, trois des tris-
tes héros da la bande de Clamart
Samuel Gros, ce marchand de vin
qui a assassiné dans l'Ain sa domestique
Mariette, parce qu'il la croyait enceinte,
et dont la victime mourante s'est traînée
à deux cents pas du lieu du crime pour
dénoncer son meurtrier;
Frémont, le communard de Rouen, qui
a criblé de coups de couteau deux ser-
gents de ville chargés de l'arrêter
Désiré Guignon, l'assassin de Glan-
delles J.-B. Perret, un chenapan de vingt
ans qui a tué à coups de couteau un
vieillard du nom de Boucharine; Dieu-
set, qui a pillé le trésor d'une église dans
le Pas-de-Calais; Adam, Reguidel, Bris-
set, Courtin, Duuet, Lacourt, Laversat^
Marche, Hector Patin de Saulcourt,.
Mignot, arrivés de la Roquette en
même temps que les assassins de la
veuve Rougier; enfin, les nommés Du-
pont, Gomet, Jahier, Miard. Mulot, Re-
gnard, Chabannes; Dupré, Verdez, Peti-
tot, Dodoin, Mennechez, Joseph Ferry,
Cossaigne, Bonardeau, Borclennec, Le-
clerc, Prouet, Viguier, Blanc, Bannielli,
Désignes, Roussel, Savard, Lagoutte,
Chazeïles, Champavayre, Gachet, Cou-
pier, Belgodère, Casanova, Giamminelli,
Renarre, etc.etc., etc.
Il y en a comme cela deux cent cin-
quante environ.
Le Rhin emportera très probablement
aussi une cinquantaine de femmes, mais
elles ne sont pas encore transférées à
Saint-Martin-de-Ré. L'avant du navire
est aménagé pour elles, et elles seront
traitées un peu moins durement que les
hommes. Inutile de dire que jamais
ceux-ci ne pourront les apercevoir pen-
dant la traversée.
Vous savez qu'une fois dans la colonie
elles peuvent se marier avec ceux des
forçats qui se conduisent bien.
Qui sait ? Thauvin, qui est jeune, fera
peut-être ainsi souche d'hommes de gé-
nie ou de conquérants.
P. S. Je n'ai pas cru nécessaire de
rester à Rochefort poùr assister aux
funérailles du vice-amiral Exelmans,
qui ont lieu mardi. Elles s'annoncent
comme très solennelles toute la garni-
son de Rochefort, tous les équipages
des vaisseaux actuellement dans ce port
y assisteront, et la flotte fera entendre
des salves d'adieu pendant toute la du-
rée de la cérémonie. G. v.
CORREWD.IMI ANGLAISE DU FIGARO
Voyage du préfet de la Seine et du
préfet de police en Angleterre.
Avant l'arrivée ici du préfet de la
Seine, du préfet de police et de toutes
les autres notabilités françaises, il sera,
je crois, agréable à mes lecteurs d'avoir
quelques détails sur les fêtes qui vont
être offertes par la Cité de Londres à
toutes les municipalités étrangères.
La première idée de ces fêtes appar-
tient au lord-maire, qui voulait répon-
dre de cette façon à la somptueuse récep-
tion qui lui avait été faite à Paris; c'est
donc à Mansion-House, habitation offi-
cielle du premier magistrat de la Cité,
qu'elles devaient avoir lieu. Mais la cor-
poration de la Cité a désiré qu'il lui fût
laissé le soin de témoigner toute sa re-
connaissance des honneurs prodigués à
son chef; en conséquence ila été décidé
que ces fêtes seraient données à l'Hôtel
de Ville, c'est-à-dire à Guildhall.
Le Guildhall, situé tout près de,Man-
sion-House est un immense édifice qui
date de 1789. C'est là que la Cité de Lon-
dres donne toutes les têtes. La grande
salle peut contenir cinq à six mille per-
sonnes. D'une élévation d'environ vingt
mètres, elle en a soixante de long sur dix-
huit de large. Depuis quinze jours, une
armée d'ouvriers travaille à élever, à
l'entrée, un pavillon qui, le jour du ban-
quet, doit servir de vestibule et desalle de
bal supplémentaire, lanuitsuivante.Il est
difficile desefigurer avecquelleprofusion
toutes les salles sont garnies de fleurs et
de plantes exotiques de ce côté, les An-
glais ont une véritable supériorité. Au
banquet figurera la magnifique vaisselle
plate appartenant aux diverses compa-
gnies de la Cité presque tous ces ser-
vices chefs-d'œuvre d'orfèvrerie, ont un
grand intérêt historique.
Le banquet aura lieu jeudi,- 29. Six
cents invitations ont été envoyées. Les
cartes d'admission sont de véritables
curiosités. Elles ont quarante centimè-
tres de long sur vingt-deux de large
elles sont adressées entre deux cartons
ragé pa* Melven, était courtier de publi-
cité et travaillait pour le compte du
journal.
Certes, le métier n'est pas très facile;
mais, comme l'avait dit Melven, Dachet
avait toutes les qualités requises pour la
profession; de plus, il avait de l'entre-
gent, parlait bien, était jeune et joli
garçon, ce qui ne nuit jamais.
A ce métier, Robert Dachet apprit en-
core beaucoup de choses qu'il ignorait
-l'art de faire habilement de la réclame
surtout et se créa des relations nom-
breuses.
Il continua sa manière de vivre par-
cimonieuse, et se trouva un jour à la
tête d'un capital de dix mille francs.
C'était déjà quelque chose. Beaucoup ont
commencé avec moins que cela 1
Tout à coup, et sans motif apparent,
Robert Dachet abandonna la publicité
pour entrer, en qualité d'employé, chez
un négociateur en mariages.
Celui-ci, pour le déterminer à cette
décision, n'avait eu que bien peu de
chose à faire.
Il lui avait dit
Mon cher Dachet, entrez chez moi.
J'ai besoin d'un secrétaire jeune, actif,
intelligent, beau diseur, connaissant bien
Paris et les Parisiens, n'ayant point de
sots préjugés, et très décidé' à faire for-
tune par tous les moyens qui ne sont pas
réprouvés par la loi. Si je ne me suis pas
trompé sur votre compte, et si vous vou-
lez m'aider, avant cinq ans d'ici vous
serez dans une passe superbe. Fiez-vous
à moi. Je ne vous demande que trois
mois de patience, de discrétion et de sa-
gacité. M'avez-vous compris?
Peut-être, répondit Dachet.
Etes-vous mon homme?
Je suis votre homme
C'est parler en garçon sensé. Dans
deux jours, nous entrerons en besogne.
Je vous crois très fort, mais sachez que
vous avez encore beaucoup à apprendre.
Votre éducation s'achèvera chez moi.
S'il faut davantage éclairer la lanterne,
nous dirons que Robert Dachet n'avait
très éoais, afin qu'elles arrivent intactes,
précaution utile s'il en fut, car chaque
titulaire désirera certainement conser-
ver cette carte dont le dessin et l'orne-
inentation en couleur rehaussée d'or est
véritablement très réussie. Pour le bal
du vendredi 30, il y a quatre mille
invités, parmi lesquels M. le préfet de la
Seine, M. le préfet de police de la ville
de Paris, le colonel des pompiers, le
colonel da la garde de Paris, le prési-
dent du tribunal de commerce de
Paris, le préfet du Pas.de-Calais, le
sous.préfet de Boulogne, les maires de
Bordeaux, de Marseille, de Lisbonne,
d'Oporto, de Québec, de Rome, de Tu-
rin, le bourgmestre de Bruxelles, celui
d'Amsterdam, les premiers magistrats
municipaux de Florence, de Genève.
Le samedi 31, le lord-maire recevra à
dix heures du mttin ces mêmes invités
à M'insion-House, et les conduira à
Alexandra-Palace où ils entendront un
grand concert au bénéfice des inondés
de la Francs. Cette fête de l'Alexandra-
Palace n'est pas donnée, ainsi qu'on l'a
cru généralement par le lord-maire
elle est offerte sous son patronage et
dans une intention éminemment chari-
table. Leprogramme est attrayant, et si,
comme on l'espère, la musique de la
garde de Paris vient s'y faire entendre,
une très grosse recette sera réalisée..
Le dimanche 1er août, à la cathédrale,
à Saint-Paul, grand service religieux
auquel doivent assister tous ceux de nos
hôtes qui ne seront pas harassés.
Les invités français sauf modification
imprévue, doivent arriver à Londres
mercredi, à six heures du matin. Ils au-
rontdoncunjour pour se reposer et se pré-
parer à la fatigue qui les attend. Aucune
réception ne sera faite à Douvres; à la
gare de Londres seutement, le lord-
maire leur souhaitera la bienvenue, mais
cependant jusqu'au 29 ils restent des
touristes ordinaires.
M. le préfet de la Seine et M. le préfet
de police descendent chez Crawley, hô-
tel d'York, Albermarle-street, où des ap-
partements leur ont été retenus. C'est un
hôtel de famille, très simple quoique de
premier ordre, et je crois bien le plus
ancien de tout le quartier Piccadilly.
-J'ai visité ces appartements, composés
chacun d'une vaste chambre à coucher,
avec lit anglais aux lourdes colonnes d'a-
cajou massif, et d'un salon de réception;
tout cela est confortable, mais sans luxe.
Je sais que nos deux premiers fonction-
naires désirent, en dehors des cérémo-
nies officielles, garder autant que possi-
ble un caractère privé, et j'imagine
que leur domicile a été admirablement
choisi pour servir leurs intentions.
T. Johnson.
4
TÉLÉGRAMMES & CORRESPONDANCES
Rochefort, 25 juillet. La mort
prématurée du vice-amiral Exelmans cause
un deuil général. Le parti conservateur fait
en lui uue grande perte. Il était depuis moins
d'un an parmi nous, mais son énergie bien
connue rassurait lés faibles et contenait les
factieux.
Son courage proverbial, sa conduite hé-
roique pendant lé iiége de Strasbourg lui ou-
vrent une belle page dans l'histoire.
Mme la vicomtesse Exelmans, que tout le
monde aime et vénère, est ici la providence
de toutes les misères.
L'amiral laisse quatre enfants un fils aîné,
sous-lieutenant au 103e de ligne; une jeune
fille âgée de vingt ans, et deux jeunes garçons
encore au collége.
Il a trouvé la mort, comme son illustre père,
dans un accident de cheval, et la, coincidence
fatale apparaît encore bien plus quand on
rapproche les dates des deux événements le
maréchal, le 21 juillet 1852 le vice-amiral a
fait sa terrible chute le 22 juillet.
TOULON, 24 juillet. Un -abordage
a eu lieu dans l'escadre de la Méditerranée
entre la corvette cuirassée la Jeanne-d'Arc et
le croiseur à hélice le Forfait. Ce dernier a
coulé bas un quart d'heure après l'accident.
Tout le monde a été sauvé; personne n'a eu
la moindre blessure. L'équipage du Forfait,
recueilli par le Château- Renaud, a été ramené
à Toulon par ce navire qui est arrivé en rade
hier, à neuf heures et demie du soir.
Il paraît que le Forfait aurait coupé la ligne
de l'escadre pour répondre à un appel à l'ordre
du commandant en chef. La Jeanne-d'Arc l'a a
abordé par l'arrière avec son éperon.
Le Forfait était commandé par M. Vivielle,
capitaine de frégate. Sa conduite et son sang-
froid ont été admirables dans la catastrophe.
Le sauvetage a été opéré dans le plus grand
ordre.
Construit au Havre en 1856, le For fait était
armé depuis le 27 juillet 1860. Sa machine
était de la force de 230 chevaux, l'effectif de
son équipage, de 154 hommes, et son artillerie
de 6 bouches à feu. Sa valeur, d'après l'in-
ventaire des bâtiments de la flotte, était de
1,400,000 francs.
L'abordage a eu lieu mercredi à midi. L'es-
Gaston Vassy.
alors dans la pensée que l'espoir d'un
riche mariage ) il prenait au sérieux la
qualité assez enigmatique de négocia-
teur en mariages.
Un mois plus tard, ses illusions sur ce
point c'étaient probablement les der-
nières s'envolaient complétement.
Robert Dachet savait très bien à quoi
s'en tenir, et sa conscience n'était point
effarouchée. Son patron avait dit vrai
il achevait là une éducation qui ne de-
vait, plus tard, avoir ni émoi, ni scru-
pule.
Un jour, un des domestiques si bien
dressés que possédait le négociateur en
mariages, remit à celui-ci une carte ar-
moriée qui ne contenait que ces deux
mots Comtesse Svitzer. »
Il prit la carte, sourit et contempla fixe-
ment Dachet, qui était présent.
Qu'avez-vous? demanda le jeune
homme.
Regardez le nom écrit sur cette
carte.
Dachet lut tout haut Comtesse
Svitzer.
Eh bien? fit-il.
La temme qui porte ce nom à qua-
rante-cinq ans, un cœur des plus inflam-
mables, des relations superbes et six à
huit millions de fortune.
Vous dites?
Six à huit millions de fortune 1 re-
péta l'intermédiaire en scandant ses
mots.
Des yeux de Robert Dachet s'échap-
pèrent des éclairs de convoitise.
Si j'avais votre âge, votre tournure
et votre figure, reprit son patron, avant
quinze jours je serais l'ami le plus in-
tinie de la comtesse.
-Comment arriver à ce but?
Rien n'est plus facile. si je vous
donne mon concours.
Dachet réfléchit un instant.
Il se leva et fit quelques pas dans le
cabinet.
C'est un marché que vous me pro-
posez ? dit-il tout à coup.
Non I de simples honoraires.
cadre, en route de Smyrne pour la France, se
trouvait à ce moment par le travers de la
Corse, près de l'île de Monte-Christo. Elle
est actuellement mouillée en rade de Ville-
franche.
Un des officiers dc l'éiat-major de l'amiral
La Roncière s'est rendu immédiatement à Pa-
ris pour donner au ministre des renseigne-
ments sur la catastrophe.
L'amiral a lui-même traversé notre gare
hier soir, se rendant à Paris par le train ex-
press de 7 h. 40 m.
On parle de l'armement du Desaix (ancien
yacht impérial la Reine Hortense) pour rem-
placer le Forfait dans l'escadre.
Besancon, 24 juillet. On sait les
grandes colères qu'excitaient sous l'Empire,
chez les futurs incendiaires de Paris, les trai-
tements des cardinaux-sénateurs. Le cardinal
Mathieu en a bénéficié pendant toute la durée
de l'Empire. Voici, sur la fortune personnelle
que laisse réminent prélat, un paragraphe de
son testament:
Je déclare, pour prévenir toute mauvaise édifi-
cation, e, si je ne fais ni fondation ni donatiou
dans le diocèse, c'est que je ne peux pas, ayant
donné de mon vivant en œuvres et en aumônes
tout ce que je pouvais et au-dela de ce que je
pouvais, de sorte que j'espère ne rien laisser à
ma famille de ce qui m'est venu de mes charges
ecclésiastiques.
Fait à Besançon, en présence de la mort, qui
peut m'atteindre à chaque instant, le 5 août 1866.
f Césaire Mathieu,
cardinal-archevêque de Besançopi
Cambrai, 24 juillet. Au moment
où l'orage éclatait hier, vers trois heures de
l'après-midi, sur notre ville, une trombe s'a-
battait sur Douai et les environs.
De mémoire d'homme on n'a vu de pluie
aussi torrentielle, ni de coups de tonnerre
aussi retentissants. Les ruisseaux, subitement
grossis, ont débordé. Les maisons ont été en-
vahies. Mgr l'évêque de Lydva et M. le cha-
noine Destombes (dont je vous ̃ ai récemment
annoncé le départ de Cambrai, avec le cardi-
nal Régnier), qui se trouvaient sur la route de
Sains à Douai, ont été surpris parla tempête.
Ce n'est qu'à grand'peine, aidés par quelques
personnes accourues à leur secours, que leur
voiture a pu avancer au milieu du chemïn
changé en torrent et gagner un abri.
Vichy, 25 juillet.- Grande àffluence
à Vichy cette année. Malheureusement les
baigneurs sont unanimes à,se plaindre des
procédés de la Compagnie fermière. Non con-
tente d'avoir augmenté d'un cinquième le prix
d'entrée au Casino, l'administration se réserve
toutes les soirées où elle fait venir un artiste
de quelque valeur ou dequelque renom, lais.-
sant aux pauvres abonnés le soin d'applaudir
une troupe remplie de zèle, mais bien faible.
Vendredi, Mlle Heilbronn chantait Lucie.;
c'était naturellement jour réservé. La pauvre
artiste n'avait personne pour la seconder.
D'un autre côté, l'administration, par éco-
nomie, sans doute, maintient fermées les
grilles du parc, obligeant les abonnés à tra-
verser les salons pour aller s'asseoir dans le
jardin réservé. Par contre, on oublie de fer*
mer la trappe par où s'éclipsent les musicien^
de l'orchestre. Avant-hier, un monsieur y est
tombé et c'est miracle s'il ne s'est pas tué.
L'économie est une belle chose, mais elle
doit avoir des limites.
PÉRIGUEUX, 25 juillet. Trois cents
carlistes environ sont internés dans notre
ville. Ils appartiennent en partie aux batail-
lons d'infanterie du prétendant. Les uns por-
tent le pantalon rouge, la veste bleue et le
béret blanc traditionnel; les autres, le panta-;
Ion gris bleuté comme nos chasseurs a pied
et la veste bleue avec passepoil jaune et pare-
ments verts.
Plusieurs d'entre eux sont employés chez
les industriels de la villa ou aux travaux des
champs. ̃•,
~> Les courses de Périgueux sont fixées
aux 29, 30 et 31 août prochain. On inaugurera
un nouvel hippodrome dans la plaine de Cha-
rnier, voisine de la ligne de Périgueux à Bor«
deaux.
Orange (Vauoluse), 25 juillet. –La
population d'Orange et de l'arrondissement
est cruellement éprouvée par la déconfiture
de trois notaires de la ville. Le premier, M.
B. a disparu il y a quelques jours, laissant
ses affaires très embrouillées et un déficit
que l'on dit considérable. Le second, M. M.
sest noyé volontairement à Avignon, dans
la nuit du 12 ou 13 juillet. Son cadavre a été
retrouvé quelques jours après, à Arles.
Enfin, le troisième, M. D. a été arrêté
hier, en vertu d'un mandat d'amener décerné
sur les réquisitions de M. le procureur de la,
République, Anquetil, à la suite d'une viola-
tion de dépôts. Une instruction se poursuit
contre MM. B. et D. Je vous en ferai con-
naître les résultats.
On cite plusieurs familles qui sont complè-
tément ruinées, notamment dans la classe
ouvrière. M. Bonamour, notaire à Orange,
reste seul chargé de la gestion des trois étu-
des dont je viens de vous parler.
AuxoNNE, 25 juillet. Le Tribunal
correctionnel de Dijon vient de condamner à
13 mois-de prison, pour usurpation de titres
et qualités, l'individu qui s'était présenté au
18° régiment de chasseurs à cheval, comme
officier d'ordonnance du général de Galiffet,
et dont vous aviez annoncé l'arrestation ré-
cente dans notre ville. Cet individu, M. L.
est réellement, paraît-il, de bonne famille.
SALON (Bouches-du-Rhône). 24 juil-
let. Dimanche dernier, très beau concert
organisé par les amateurs de la ville au béné«
Combien ? fit brusquement Dachet.
L'agent tira de son bureau un de ces
papiers oblongs, à vignette représentant
la Justice et sa balance avec cet exer-
gue « Timbre impérial. » II prit une
plume et traça en tête, et à droite du
papier, cette formule commerciale
« B. P. F. 50,000. » Puis il tendit la
plume à Robert Dachet.
Répétez cette formule en toutes
lettres à la partie inférieure du billet et
signez.
Le jeune homme ne sourcilla pas.
Il prit la plume, traça d'une main
hardie la formule indiquee et dit
C'est fait.
Je suis enchanté de voir que je ne
m'étais pas trompé sur votre compté,
mon cher Dachet; vous irez loin. J'es«
père bien que vous n'oublierez pas mes
bons offices.
Que dois-je faire? demanda Dachet.
Rien, aujourd'hui; mais demain, à
quatre heures, vous vous présenterez
chez madame la comtesse Svitzer avec
une lettre d'introduction. -̃̃••:
De vous?
Non! répondit en souriant l'obli-
geant personnage. Au surplus, ne vous
inquiétez point de la forme de la présen-
tation elle sera ce qu'elle doit être.
Il pressa le bouton d'une- sonnerie
électrique.
Le même domestique qui avait apporté
la carte se présenta.
-–Faites entrer Mme la comtesse
Svitzer, lui dit-il, et vous, mon cher
Dachet, à demain.
Tandis que le jeune homme sortait par
une porte mystérieuse qui donnait dans
un des trois escaliers conduisant à l'ap«
partement du négociateur en mariages,
Mme la comtesse Svitzer entrait dans le
cabinet de celui-ci.
Armand LA.POINTE.
(io suite à demain.\
S~S~i~S~s~EE.s~a~s~~
a raconté en manière d'explication la
plus étrange des histoires.
Il a prétendu qu'au moment de quitter
le Guyane. il avait apuras l'existence, à
vingt lieues dans l'intérieur des terres,
d'un richissime placer d'or mais on l'a-
vait ramené en France sans lui laisser
le temps d'aller commencer des fouilles.
Depuis, pris de la fièvre d'or, il n'avait
plus eu qu'une idée, retourner à la
Guyane. Si cette fable était vraie, pour-
tant ? Voyez-vous Maillot revenant gra-
cié dans une vingtaine d'années à cause
de sa bonne conduite, étonnant Paris du
luxe de son hôtel et de ses équipages,
fondant des hôpitaux, et protégeant les
arts?.
Quoi qu'il en soit, Maillot est désespéré
qu'au lieu de le réexpédier sur la Guyane,
on l'envoie en Nouvelle-Calédonie.
Georges
Georges, le complice de Maillot, est le
confident que celui-ci avait pris pour
ses rêves d'or. Quant à Thauvin que
tous deux considèrent comme un gamin
sans consistance, malgré ses indiscuta-
bles qualités d'etrangleur on s'était
méfié de lui et on ne lui avait rien dit.
Georges prend assez philosophique-
ment son parti d'être envoyé en Nou-
velle-Calédonie. Il a déclaré a quelqu'un
qui l'a vu dans la prison de la Rochelle
que, « en fin finale, cela lui était bien
égal, attendu qu'il savait bien qu'il était
maintenant un homme nettoyé ».
Depuis sa condamnation, Georges a
vieilli de dix ans. Sa figure s'est consi-
dérablement altérée; au coin de ses
yeux il y a des rides, et ses cheveux sont
devenus gris. Il mange à peine. Chose
bizarre, il sifflotte tout bas presque toute
la journée, machinalement, ia célèbre
« romance de la Rose » de Martha.
Thauvin
Thauvin réalise absolument le type
du condamné satisfait de son sort.
J'ai eu occasion de vous dire que, pen-
dant son séjour à la Roquette, une de
ses préoccupations avait été de savoir si
on ne vouaralt pas tout de même de lui
comme ténor au théâtre qui vient de se
fonder à Nouméa.
Aux encouragements d'un digne prêtre
qui est venu le voir à Saint-Martin-de-
Ré, au moment de son arrivée, il a ré-
pondu
Certainement, qu'on se conduira
bien. Pourquoi donc qu'on ne serait
pas colon comme un autre ? Moi, d'abord,
y aime là vie des champs.
Contrairement à Georges, il semble at-
.teint d'une véritable fringale depuis sa
commutation.
I>ubois
Dubois est ce condamné à mort à pro-
pos duquel Sancho disait à l'aumônier,
e matin de son exécution, il y a quel-
ques jours à peine
N'est-ce pas, monsieur l'abbé, que
mon co-détenu Dubois va être guillotiné
avec moi?
Dubois n'a pas été exécuté. Le prési-
dent de la République a pris une déci-
sion gracieuse en sa faveur, afin de ne
pas multiplier les exécutions dans la
même localité, et norr certes parce que
Dubois était intéressant. Rappelons som-
mairement, en effet, les crimes de ce
misérable.
Il y a un an, il avait voulu assassiner
un de ses co-détenus, et avait, pour ce
fait, été condamné aux travaux forcés.
Trois mois après, au moment de partir
pour le bagne, il tentait de tuer 'un de
ses gardiens. La cour d'assises du Gard
le condamna, le 22 mai dernier, à la
peine de mort.
Impossible d'imaginer cynisme plus
révoltant que celui de ce gredin de
vingt-six ans. Depuis sa commutation,
il n'a pas donné une marque de repentir.
Une des réflexions qu'il a faites peut
donner une idée de ce qu'il est:
Malheur! a-t-il dit un jour. On est
autant condamné pour avoir voulu suri.
ner un détenu et un gardien que si on
s'en était pris à un honnête homme
Il dit souvent qu'il lui aurait été indif-
férent de mourir.
.'̃̃̃: ,̃:̃ Brest
Le boulanger du Havre. Vous sa-
vez, ce misérable qui torturait, brûlait
et tenaillait sa pauvre petite fille, tant
et si bien qu'elle en est morte ? C'est un
singulier type que ce condamné à per-
pétuité vingt-huit ans,blond, l'air extrê-
mement comme il faut, et ne parlant
qu'avec la plus grande politesse à tous
ceux qui l'approchent, détenus ou gar-
diens. Jamais, à le voir, on ne se doute-
rait qu'on est en présence d'une bête
féroce. Il ne parle pas de son crime, ne
jécrimiae pas, et un de ses grands sou-
feuilleton fla E1GÀH0 du N Juillet 1815
3
v V IA
CHÂSSE AUX FANTOMES
PREMIÈRE PARTIE
L'AUOUR »E t»O»
1
suite.
Nous laisserons Pierre Melven et
Louis Copeau, que nous retrouverons
bientôt, pour suivre Robert Dachet.
Celui-ci fut, tour à "tour, employé chez
nn entrepreneur de travaux calligra-
phiques et clerc d'huissier.
Si Robert Dachet eût eu des illusions,
à coup sûr il les eût promptement per-
dues chez l'entrepreneur d'écritures. Ce
qu'il vit là de misères, de pauvreté hon-
teuse, d'existences brisées, de fortunes
déchues, de déclassés de toutes sortes
défrayeraient- en drames lugubres tous
les journaux de Paris pendant cinq ans.
Robert Dachet n'en fut point décou-
ragé. Il puisa au contraire dans la vue
de toutes ces misères, une nouvelle éner-
gie etla volonté fermement arrêtée d'être
riche un jour, dût-il pour cela briser les
affections les plus unies, marcher sur le
corps de ses meilleurs amis.
Soutenu par cet espoir, il mangea bra-
vement de la vache enragée et gagna de
son séjour à l'office général des travaux
calligraphiques, la patience qui fait
l'homme fort et l'horreur de la pauvreté
qui prépare à toutes les ambitions. Il
comprit bien vite la puissance de l'or,
devina que la jeunesse et la volonté ne
suffisaient pas toujours pour parvenir,
et, afin de se créer un petit capital, de-
vint avare, but de l'eau et se nourrit de
pain qu'il allait acheter au rabais, à la
porte de la caserne du faubourg Pois-
cis est d'avoir assez d'eau- pour se tenir
très propre.
Brest, grâce à sa profession de bou-
langer, pourra vivre là-bas d'une fa-
çon presque agréable d'ici à quelques
années.
Garcia =-
Encore un coquin d'un endurcissement
inouï. Garcia a été condamné par la
Cour d'assises des Ardennes pour avoir
assassiné sa. femme, en l'étranglant. avec
un mouchoir. Sa fille, une enfant, avait
vu le crime. On l'amena naturellement t
devant la Cour d'assises pour déposer.
Mais, une fois devant le tribunal, la
pauvre petite se mit à fondre en larmes
et supplia qu'on ne la forçât pas d'accuser
son père
Garcia, :dit alors M. le président,
voyez-vous un inconvénient à ce que
votre fille soit entendue?
Qu'est-ce que vous voulez que ça
me fasse? répondit l'accusé en ricanant.
Ça m'est bien indifférent.
° Tel l'homme s'est montré ce jour-là,
tel il est depuis sa condamnation. Cyni-
que, immonde, sans donner la moindre
marque de repentir, humble et har-
gneux comme un loup de ménagerie, il
encourt à chaque instant des punitions
pour ses insubordinations et sa paresse.
Il faudra évidement le mettre aux fers
pendant la traversée.
Louis Cros
De l'école de Dubois, celui-là. Il est
condamné pour avoir tenté d'assassiner
un gardien de la maison centrale d'Eysse,
avec une lame de couteau emmanchée
dans une plinthe en bois de chêne.
Effroyables antécédents. L'air extrême-
ment distingué, du reste. Il n'est âgé que
de vingt-quatre ans et dit qu'il a heureu-
sement du temps devant lui pour rache-
ter sa vie et devenir un honnête homme.
Signe particulier a une crainte per-
pétuelle de mourir du mal de mer pen-
dant la traversée.
Frédéric TTallayrand.
Condamné le 24 mars dernier par la
Cour d'assises de l'Ardèche, pour avoir,
de complicité avec son père, assommé
une malheureuse fille sourde et muette.
Les deux gredins l'ont noyée après l'a-
voir attachée et bâillonnée. La cupidité
était le motif de leur crime.
Le père, condamné à perpétuité comme
son fils, ne sera pas transporté en Nou-
velle-Calédonie à cause de son âge.
Quant au fils, il a une tète de coquin
s'il en fut. Front haut et fuyant, sourcils
épais et arqués, yeux enfoncés dans les
orbites, figure en lame de couteau.
Il trouve « dégoûtant » c'est son
expression qu'on laisse son père en
France tandis qu'on l'envoie si loin.
Léon Boité
Le Cartouche du Berry, dont il a été
pendant plusieurs mois la terreur. On
ne causait plus, dans le tranquille pays
si cher à George Sand, que de vols avec
effraction, d'attaques à main armée, dont
l'auteur échappait toujours à la gendar-
merie.
On commençait même à parler d'une
bande de voleurs parfaitement organi-
sée, lorsqu'un soir le malfaiteur se fit
prendre en blessant à coups de fusil
deux cultivateurs du pays, du nom de
Meunier.
Boité est jeune et a la tenue cor-
recte d'un ancien sous-officier. Sa figure
exprime une énergie terrible. Il ne té-
moigne aucun repentir.
JToly
Joly est le plus jeune de tous les for-
cats qui vont etre.embarqués à bord du
Rhin. Il- n'a que SEIZE ans, et il est con-
damné à perpétuité. Son crime est un
des plus effroyables qui se rencontrent
dans les annales judiciaires.
Il a assassiné, dans la Loire-Inférieure,
un vieillard de soixante ans, du nom
d'Hervé Gueff, et sur ce cadavre, dont
il avait broyé la tête, il s'est livré au
plus épouvantable attentat.
Un de ses sabots tout couvert de sang,
a été trouvé sur le lieu du crime. C'est
ce qui l'a fait prendre.
Joly a un type des plus singuliers. Sa
figure, assez douce et d'une expression
bête, est d'une longueur tout à fait ex-
traordinaire. Ses yeux, immobiles et
sans expression, sont enfoncés. On di-
rait Calino, le Calino du bagne.
Mignon et Guirande
Dans la collection de misérables dont
nous nous occupons, Mignon et Guirande
ont la partie du faux-monnayage.
Le premier était horloger dans le Puy-
sonnière. Aux heures de la jeunesse on
est capable de ces tours de force.
Dans l'étude de l'huissier, Robert Da-
chet vit une nouvelle sorte de misère, la
misère qui bataille et qui lutte, celle du
boutiquier, du commerçant, du fabricant
aux prises avec cette chose brutale et
inexorable qui se nomme l'échéance; il
vit comment, pour se libérer par termes,
frais et intérêts dépassaient souvent le
capital.
Chez l'entrepreneur d'écritures, son
cœur connaissait encore la pitié; il l'en
chassa complétement chez l'huissier. Il
vivait au sein de la rouerie, de l'astuce,
de la duplicité, du mensonge; il apprit
la rouerie, l'astuce, la duplicité, le men-
songe, et se convainquit de nouveau que
la vie ne devait avoir qu'un seul but la
richesse 1
Depuis son entrée chez l'homme de
loi, il n'avait pas revu ses amis Melven
et Copeau; il craignait que ceux-ci ne
fissent une saignée au produit des éco-
nomies sordides auxquelles il se livrait.
Mais comme il était tenu à des cour-
ses assez fréquentes dans Paris, il se
trouva, un matin sur le boulevard
Montmartre, nez à nez avec Pierre Mel-
ven, qu'il avait quitté, lors de leur der-
nière rencontre, employé à la confection
des bandes manuscrites, au journal le
Furet, revue de la littérature, des arts
et des théâtres.
Te voilà donc enfin, réfractaire de
l'amitié s'écria Melven d'où sors-tu? 2
Qu'es-tu devenu dépuis ces longs mois
pendant lesquels tu n'a pas donné signe
de vie?
Pierre Melven était vêtu d'une façon
élégante toute sa personne laissait
échapper cette satisfaction que donne
l'aisance.
Dachet se mordit les lèvres et se garda
bien d'avouer la vérité.
J'ai été malade, dit-il.
-Il fallait m'écrire au journal.
Tu y es toujours?
Oui, dit en souriant Melven, seule-
ment j'ai changé de condition je suis
de-Dôme, à Latour; doué d'un réel ta-
lent de graveur, il se livrait à la fabri-
cation des billets de mille francs. Ce qui
l'a fait pincer, c'^st qu'un jour il a voulu
acheter du papier au fournisseur même
de la Banque de France. Mignon en a
pour quinze ans. Son procès est un de
ceux qui ont causé le plus d'émotion
dans le Puy-de-Dôme. Depuis le 20 mars,
jour de sa condamnation, les paysans
de ce pays illettré refusent comme fal-
sifiés tous les billets de banque qu'on
leur présente. -Mignon semble avoir un
très grand repentir.
Guirande, lui, a été condamné, pour
émission de pièces de 2 francs fausses,
par la Cour d'assises de la Corrèze. Un
détail dramatique avait signalé son ar- '-i~
restation il avait réussi à s'échapper
des mains des gendarmes, sur la route
de Tulle, et une véritable chasse à
l'homme avait dû être organisée pour le
rattraper.
Guirande paraît aussi revenu à de
meilleurs sentiments..
Vincent
André Noël, dit Vincent, appartient
à une famille de voleurs. On est escarpe
là dedans de père en fils, ou à peu près.
Lui-même, avant son crime, avait déjà
subi quatre condamnations. Ce qui l'a fait
envoyer au bagne, c'est qu'il a assassiné
un vieillard sur la route de Grenoble à
Lyon. ,t' .11' D b
Pourrait être appareillé avec Dubois
pour le cynisme; ils formeraient à eux
deux un remarquable attelage de co-
quins. Bo,~iu
Bouin
Grand, maigre, sans barbe, l'air aus-
tère et digne, Bouin a l'aspect d'un huis-
sier retiré des affaires apres une carrière
honorablement remplie.
Il a assassiné une vieille femme pour
la voler. C'est évidemment le plus
flegmatique de tous les futurs passagers
du Rhin.
Bouin ne prononce pas dix paroles
sans y intercaler un proverbe ou un
dicton.
liaherrère ̃•̃̃••̃»
Ainsi que Barbier, dont je parle plus
loin, Pierre Laherrère est un forçat plus
intéressant que les autres. Ce n'est pas,
en effet, la cupidité qui l'a envoyé au
bagne, mais l'amour. Laherrère était au
service il aimait passionnément sa cou-
sine Jeanne, et sa seule idée était de
l'épouser. Quand il revint, les parents de
la jeune fille lui déclarèrent que celle-ci
n'était pas pour lui. Laherrère insista,
supplia. Un jour eut lieu une scène plus
violente que les autres, et, en présence
de Jeanne, Laherrère s'élança, le couteau
à la main, sur les parents de la jeune
fille. Le père fut légèrement blessé, et la
mère reçut treize coups de couteau.
Laherrère, exaspéré par le sang, voyant
rouge, s'acharna sur son corps.
Iln'aquevingt-quatreans.C'estunbeau
garçon qui a reçu l'éducation d'un cam-
pagnard aisé. Depuis sa condamnation,
il ne semble pas se préoccuper de ce qui
va lui arriver. Son immense amour pour
sa cousine domine tout et l'absorbe.
Souvent quand il se croit seul, on le
surprend murmurantle nom de « Jeanne »
et de grosses larmes lui viennent dans
les yeux.
Il évite du reste de parler de son
crime, et se montre extrêmement doux
avec ses gardiens.
Pauvre garçon, digne d'intérêt, mal-
gré l'horreur de son crime Comme il
doit souffrir de se voir mêlé à tous ces
misérables, et de s'en aller si loin, si
loin de la femme qu'il aime, dans un
pays d'où il ne reviendra jamais 1
Barbier
Vous n'avez pas oublié quel bruit a
fait récemment le procès de Barbier
devant la Cour d'assises de Toulon. Bar-
bier a été criminel par amour, comme
Laherrère. Il a déchargé un revolver sur
la veuve Flaud, sa parente, et sur le fils
de celle-ci, parce qu'on ne voulait pas
lui laisser épouser sa cousine.
Celle-ci a déclaré à l'audience qu'elle
ne l'avait jamais aimé. Cette déclaration
a positivement stupéfié Barbier, et c'est
un malheureux hébété qu'on va emmen er
à Nouka-Hiva.
Stoltz
Le gredin qui a si violemment frappé
M. Beauquesne, directeur de la prison
de la Roquette. C'est une bête brute
qui sera la terreur du bagne, si l'on ne
prend des mesures de sûreté.
Mais il peut être sûr de son affaire, on
les prendra.
&*#
Mais abrégeons, la place va me man-
passé de la confection des bandes à la
rédaction.
Tu es employé à la rédaction ?
Mieux que cela, je suis rédacteur
en chef du Furet.
Diable et Louis Copeau?
Oh! Copeau est resté ce qu'il était:
garçon de bureau au journal et n'a pas
'autre ambition, surtout maintenant
que je suis son chef. Et toi, voyons, que
fais-tu maintenant, car je ne suppose pas
qu'un garçon doué comme tu l'es reste
longtemps à copier des rôles chez un
entrepreneur d'écritures?
Moi, dit Dachet, je suis, -pour le
moment, clerc d'huissier.
Et tu gagnes!
Une centaine de trancs par mois.
Melvén réfléchit quelques instants.
Cent francs par mois s'écria-t-il
tout à coup, tu vaux mieux que ça; et
tu peux en gagner cinq fois autant sans
te donner beaucoup de peine et en con-
servant toute ta liberté 1
Comment cela ? demanda Dachet.
Melven reprit.
Ecoute-moi. Il existe une profes-
sion dont tu ignores sans doute l'exis-
tence et à laquelle je n'avais jamais
songé avant mon entrée dans le journa-
lisme. Pour y réussir, il faut, il est vrai,
deux qualités, mais tu les possèdes au
suprême degré: c'est l'audace et la vo-
lonté. Ce métier est celui d'agent de
publicité; on y gagne beaucoup d'argent.
veux-tu l'entreprendre?
Pourquoi pas ? dit Dachet.
S'il en est ainsi, viens me voir au
journal, je t'expliquerai le mécanisme
de l'opération et tu travailleras pour
nous. Viens de deux heures à quatre
heures, le propriétaire du Furet sera au
bureau; je te présenterai à lui et au be-
soin je te ferai donner une avance. Est-
ce dit?
C'est dit 1
A demain, alors. ̃
A demain.
Trois jours plus tard, Robert Dachet,
stylé par le propriétaire du Furet, encou-
quer, et mentionnons rapidement:
Sœuves, Greffier et Ciré, trois des tris-
tes héros da la bande de Clamart
Samuel Gros, ce marchand de vin
qui a assassiné dans l'Ain sa domestique
Mariette, parce qu'il la croyait enceinte,
et dont la victime mourante s'est traînée
à deux cents pas du lieu du crime pour
dénoncer son meurtrier;
Frémont, le communard de Rouen, qui
a criblé de coups de couteau deux ser-
gents de ville chargés de l'arrêter
Désiré Guignon, l'assassin de Glan-
delles J.-B. Perret, un chenapan de vingt
ans qui a tué à coups de couteau un
vieillard du nom de Boucharine; Dieu-
set, qui a pillé le trésor d'une église dans
le Pas-de-Calais; Adam, Reguidel, Bris-
set, Courtin, Duuet, Lacourt, Laversat^
Marche, Hector Patin de Saulcourt,.
Mignot, arrivés de la Roquette en
même temps que les assassins de la
veuve Rougier; enfin, les nommés Du-
pont, Gomet, Jahier, Miard. Mulot, Re-
gnard, Chabannes; Dupré, Verdez, Peti-
tot, Dodoin, Mennechez, Joseph Ferry,
Cossaigne, Bonardeau, Borclennec, Le-
clerc, Prouet, Viguier, Blanc, Bannielli,
Désignes, Roussel, Savard, Lagoutte,
Chazeïles, Champavayre, Gachet, Cou-
pier, Belgodère, Casanova, Giamminelli,
Renarre, etc.etc., etc.
Il y en a comme cela deux cent cin-
quante environ.
Le Rhin emportera très probablement
aussi une cinquantaine de femmes, mais
elles ne sont pas encore transférées à
Saint-Martin-de-Ré. L'avant du navire
est aménagé pour elles, et elles seront
traitées un peu moins durement que les
hommes. Inutile de dire que jamais
ceux-ci ne pourront les apercevoir pen-
dant la traversée.
Vous savez qu'une fois dans la colonie
elles peuvent se marier avec ceux des
forçats qui se conduisent bien.
Qui sait ? Thauvin, qui est jeune, fera
peut-être ainsi souche d'hommes de gé-
nie ou de conquérants.
P. S. Je n'ai pas cru nécessaire de
rester à Rochefort poùr assister aux
funérailles du vice-amiral Exelmans,
qui ont lieu mardi. Elles s'annoncent
comme très solennelles toute la garni-
son de Rochefort, tous les équipages
des vaisseaux actuellement dans ce port
y assisteront, et la flotte fera entendre
des salves d'adieu pendant toute la du-
rée de la cérémonie. G. v.
CORREWD.IMI ANGLAISE DU FIGARO
Voyage du préfet de la Seine et du
préfet de police en Angleterre.
Avant l'arrivée ici du préfet de la
Seine, du préfet de police et de toutes
les autres notabilités françaises, il sera,
je crois, agréable à mes lecteurs d'avoir
quelques détails sur les fêtes qui vont
être offertes par la Cité de Londres à
toutes les municipalités étrangères.
La première idée de ces fêtes appar-
tient au lord-maire, qui voulait répon-
dre de cette façon à la somptueuse récep-
tion qui lui avait été faite à Paris; c'est
donc à Mansion-House, habitation offi-
cielle du premier magistrat de la Cité,
qu'elles devaient avoir lieu. Mais la cor-
poration de la Cité a désiré qu'il lui fût
laissé le soin de témoigner toute sa re-
connaissance des honneurs prodigués à
son chef; en conséquence ila été décidé
que ces fêtes seraient données à l'Hôtel
de Ville, c'est-à-dire à Guildhall.
Le Guildhall, situé tout près de,Man-
sion-House est un immense édifice qui
date de 1789. C'est là que la Cité de Lon-
dres donne toutes les têtes. La grande
salle peut contenir cinq à six mille per-
sonnes. D'une élévation d'environ vingt
mètres, elle en a soixante de long sur dix-
huit de large. Depuis quinze jours, une
armée d'ouvriers travaille à élever, à
l'entrée, un pavillon qui, le jour du ban-
quet, doit servir de vestibule et desalle de
bal supplémentaire, lanuitsuivante.Il est
difficile desefigurer avecquelleprofusion
toutes les salles sont garnies de fleurs et
de plantes exotiques de ce côté, les An-
glais ont une véritable supériorité. Au
banquet figurera la magnifique vaisselle
plate appartenant aux diverses compa-
gnies de la Cité presque tous ces ser-
vices chefs-d'œuvre d'orfèvrerie, ont un
grand intérêt historique.
Le banquet aura lieu jeudi,- 29. Six
cents invitations ont été envoyées. Les
cartes d'admission sont de véritables
curiosités. Elles ont quarante centimè-
tres de long sur vingt-deux de large
elles sont adressées entre deux cartons
ragé pa* Melven, était courtier de publi-
cité et travaillait pour le compte du
journal.
Certes, le métier n'est pas très facile;
mais, comme l'avait dit Melven, Dachet
avait toutes les qualités requises pour la
profession; de plus, il avait de l'entre-
gent, parlait bien, était jeune et joli
garçon, ce qui ne nuit jamais.
A ce métier, Robert Dachet apprit en-
core beaucoup de choses qu'il ignorait
-l'art de faire habilement de la réclame
surtout et se créa des relations nom-
breuses.
Il continua sa manière de vivre par-
cimonieuse, et se trouva un jour à la
tête d'un capital de dix mille francs.
C'était déjà quelque chose. Beaucoup ont
commencé avec moins que cela 1
Tout à coup, et sans motif apparent,
Robert Dachet abandonna la publicité
pour entrer, en qualité d'employé, chez
un négociateur en mariages.
Celui-ci, pour le déterminer à cette
décision, n'avait eu que bien peu de
chose à faire.
Il lui avait dit
Mon cher Dachet, entrez chez moi.
J'ai besoin d'un secrétaire jeune, actif,
intelligent, beau diseur, connaissant bien
Paris et les Parisiens, n'ayant point de
sots préjugés, et très décidé' à faire for-
tune par tous les moyens qui ne sont pas
réprouvés par la loi. Si je ne me suis pas
trompé sur votre compte, et si vous vou-
lez m'aider, avant cinq ans d'ici vous
serez dans une passe superbe. Fiez-vous
à moi. Je ne vous demande que trois
mois de patience, de discrétion et de sa-
gacité. M'avez-vous compris?
Peut-être, répondit Dachet.
Etes-vous mon homme?
Je suis votre homme
C'est parler en garçon sensé. Dans
deux jours, nous entrerons en besogne.
Je vous crois très fort, mais sachez que
vous avez encore beaucoup à apprendre.
Votre éducation s'achèvera chez moi.
S'il faut davantage éclairer la lanterne,
nous dirons que Robert Dachet n'avait
très éoais, afin qu'elles arrivent intactes,
précaution utile s'il en fut, car chaque
titulaire désirera certainement conser-
ver cette carte dont le dessin et l'orne-
inentation en couleur rehaussée d'or est
véritablement très réussie. Pour le bal
du vendredi 30, il y a quatre mille
invités, parmi lesquels M. le préfet de la
Seine, M. le préfet de police de la ville
de Paris, le colonel des pompiers, le
colonel da la garde de Paris, le prési-
dent du tribunal de commerce de
Paris, le préfet du Pas.de-Calais, le
sous.préfet de Boulogne, les maires de
Bordeaux, de Marseille, de Lisbonne,
d'Oporto, de Québec, de Rome, de Tu-
rin, le bourgmestre de Bruxelles, celui
d'Amsterdam, les premiers magistrats
municipaux de Florence, de Genève.
Le samedi 31, le lord-maire recevra à
dix heures du mttin ces mêmes invités
à M'insion-House, et les conduira à
Alexandra-Palace où ils entendront un
grand concert au bénéfice des inondés
de la Francs. Cette fête de l'Alexandra-
Palace n'est pas donnée, ainsi qu'on l'a
cru généralement par le lord-maire
elle est offerte sous son patronage et
dans une intention éminemment chari-
table. Leprogramme est attrayant, et si,
comme on l'espère, la musique de la
garde de Paris vient s'y faire entendre,
une très grosse recette sera réalisée..
Le dimanche 1er août, à la cathédrale,
à Saint-Paul, grand service religieux
auquel doivent assister tous ceux de nos
hôtes qui ne seront pas harassés.
Les invités français sauf modification
imprévue, doivent arriver à Londres
mercredi, à six heures du matin. Ils au-
rontdoncunjour pour se reposer et se pré-
parer à la fatigue qui les attend. Aucune
réception ne sera faite à Douvres; à la
gare de Londres seutement, le lord-
maire leur souhaitera la bienvenue, mais
cependant jusqu'au 29 ils restent des
touristes ordinaires.
M. le préfet de la Seine et M. le préfet
de police descendent chez Crawley, hô-
tel d'York, Albermarle-street, où des ap-
partements leur ont été retenus. C'est un
hôtel de famille, très simple quoique de
premier ordre, et je crois bien le plus
ancien de tout le quartier Piccadilly.
-J'ai visité ces appartements, composés
chacun d'une vaste chambre à coucher,
avec lit anglais aux lourdes colonnes d'a-
cajou massif, et d'un salon de réception;
tout cela est confortable, mais sans luxe.
Je sais que nos deux premiers fonction-
naires désirent, en dehors des cérémo-
nies officielles, garder autant que possi-
ble un caractère privé, et j'imagine
que leur domicile a été admirablement
choisi pour servir leurs intentions.
T. Johnson.
4
TÉLÉGRAMMES & CORRESPONDANCES
Rochefort, 25 juillet. La mort
prématurée du vice-amiral Exelmans cause
un deuil général. Le parti conservateur fait
en lui uue grande perte. Il était depuis moins
d'un an parmi nous, mais son énergie bien
connue rassurait lés faibles et contenait les
factieux.
Son courage proverbial, sa conduite hé-
roique pendant lé iiége de Strasbourg lui ou-
vrent une belle page dans l'histoire.
Mme la vicomtesse Exelmans, que tout le
monde aime et vénère, est ici la providence
de toutes les misères.
L'amiral laisse quatre enfants un fils aîné,
sous-lieutenant au 103e de ligne; une jeune
fille âgée de vingt ans, et deux jeunes garçons
encore au collége.
Il a trouvé la mort, comme son illustre père,
dans un accident de cheval, et la, coincidence
fatale apparaît encore bien plus quand on
rapproche les dates des deux événements le
maréchal, le 21 juillet 1852 le vice-amiral a
fait sa terrible chute le 22 juillet.
TOULON, 24 juillet. Un -abordage
a eu lieu dans l'escadre de la Méditerranée
entre la corvette cuirassée la Jeanne-d'Arc et
le croiseur à hélice le Forfait. Ce dernier a
coulé bas un quart d'heure après l'accident.
Tout le monde a été sauvé; personne n'a eu
la moindre blessure. L'équipage du Forfait,
recueilli par le Château- Renaud, a été ramené
à Toulon par ce navire qui est arrivé en rade
hier, à neuf heures et demie du soir.
Il paraît que le Forfait aurait coupé la ligne
de l'escadre pour répondre à un appel à l'ordre
du commandant en chef. La Jeanne-d'Arc l'a a
abordé par l'arrière avec son éperon.
Le Forfait était commandé par M. Vivielle,
capitaine de frégate. Sa conduite et son sang-
froid ont été admirables dans la catastrophe.
Le sauvetage a été opéré dans le plus grand
ordre.
Construit au Havre en 1856, le For fait était
armé depuis le 27 juillet 1860. Sa machine
était de la force de 230 chevaux, l'effectif de
son équipage, de 154 hommes, et son artillerie
de 6 bouches à feu. Sa valeur, d'après l'in-
ventaire des bâtiments de la flotte, était de
1,400,000 francs.
L'abordage a eu lieu mercredi à midi. L'es-
Gaston Vassy.
alors dans la pensée que l'espoir d'un
riche mariage ) il prenait au sérieux la
qualité assez enigmatique de négocia-
teur en mariages.
Un mois plus tard, ses illusions sur ce
point c'étaient probablement les der-
nières s'envolaient complétement.
Robert Dachet savait très bien à quoi
s'en tenir, et sa conscience n'était point
effarouchée. Son patron avait dit vrai
il achevait là une éducation qui ne de-
vait, plus tard, avoir ni émoi, ni scru-
pule.
Un jour, un des domestiques si bien
dressés que possédait le négociateur en
mariages, remit à celui-ci une carte ar-
moriée qui ne contenait que ces deux
mots Comtesse Svitzer. »
Il prit la carte, sourit et contempla fixe-
ment Dachet, qui était présent.
Qu'avez-vous? demanda le jeune
homme.
Regardez le nom écrit sur cette
carte.
Dachet lut tout haut Comtesse
Svitzer.
Eh bien? fit-il.
La temme qui porte ce nom à qua-
rante-cinq ans, un cœur des plus inflam-
mables, des relations superbes et six à
huit millions de fortune.
Vous dites?
Six à huit millions de fortune 1 re-
péta l'intermédiaire en scandant ses
mots.
Des yeux de Robert Dachet s'échap-
pèrent des éclairs de convoitise.
Si j'avais votre âge, votre tournure
et votre figure, reprit son patron, avant
quinze jours je serais l'ami le plus in-
tinie de la comtesse.
-Comment arriver à ce but?
Rien n'est plus facile. si je vous
donne mon concours.
Dachet réfléchit un instant.
Il se leva et fit quelques pas dans le
cabinet.
C'est un marché que vous me pro-
posez ? dit-il tout à coup.
Non I de simples honoraires.
cadre, en route de Smyrne pour la France, se
trouvait à ce moment par le travers de la
Corse, près de l'île de Monte-Christo. Elle
est actuellement mouillée en rade de Ville-
franche.
Un des officiers dc l'éiat-major de l'amiral
La Roncière s'est rendu immédiatement à Pa-
ris pour donner au ministre des renseigne-
ments sur la catastrophe.
L'amiral a lui-même traversé notre gare
hier soir, se rendant à Paris par le train ex-
press de 7 h. 40 m.
On parle de l'armement du Desaix (ancien
yacht impérial la Reine Hortense) pour rem-
placer le Forfait dans l'escadre.
Besancon, 24 juillet. On sait les
grandes colères qu'excitaient sous l'Empire,
chez les futurs incendiaires de Paris, les trai-
tements des cardinaux-sénateurs. Le cardinal
Mathieu en a bénéficié pendant toute la durée
de l'Empire. Voici, sur la fortune personnelle
que laisse réminent prélat, un paragraphe de
son testament:
Je déclare, pour prévenir toute mauvaise édifi-
cation, e, si je ne fais ni fondation ni donatiou
dans le diocèse, c'est que je ne peux pas, ayant
donné de mon vivant en œuvres et en aumônes
tout ce que je pouvais et au-dela de ce que je
pouvais, de sorte que j'espère ne rien laisser à
ma famille de ce qui m'est venu de mes charges
ecclésiastiques.
Fait à Besançon, en présence de la mort, qui
peut m'atteindre à chaque instant, le 5 août 1866.
f Césaire Mathieu,
cardinal-archevêque de Besançopi
Cambrai, 24 juillet. Au moment
où l'orage éclatait hier, vers trois heures de
l'après-midi, sur notre ville, une trombe s'a-
battait sur Douai et les environs.
De mémoire d'homme on n'a vu de pluie
aussi torrentielle, ni de coups de tonnerre
aussi retentissants. Les ruisseaux, subitement
grossis, ont débordé. Les maisons ont été en-
vahies. Mgr l'évêque de Lydva et M. le cha-
noine Destombes (dont je vous ̃ ai récemment
annoncé le départ de Cambrai, avec le cardi-
nal Régnier), qui se trouvaient sur la route de
Sains à Douai, ont été surpris parla tempête.
Ce n'est qu'à grand'peine, aidés par quelques
personnes accourues à leur secours, que leur
voiture a pu avancer au milieu du chemïn
changé en torrent et gagner un abri.
Vichy, 25 juillet.- Grande àffluence
à Vichy cette année. Malheureusement les
baigneurs sont unanimes à,se plaindre des
procédés de la Compagnie fermière. Non con-
tente d'avoir augmenté d'un cinquième le prix
d'entrée au Casino, l'administration se réserve
toutes les soirées où elle fait venir un artiste
de quelque valeur ou dequelque renom, lais.-
sant aux pauvres abonnés le soin d'applaudir
une troupe remplie de zèle, mais bien faible.
Vendredi, Mlle Heilbronn chantait Lucie.;
c'était naturellement jour réservé. La pauvre
artiste n'avait personne pour la seconder.
D'un autre côté, l'administration, par éco-
nomie, sans doute, maintient fermées les
grilles du parc, obligeant les abonnés à tra-
verser les salons pour aller s'asseoir dans le
jardin réservé. Par contre, on oublie de fer*
mer la trappe par où s'éclipsent les musicien^
de l'orchestre. Avant-hier, un monsieur y est
tombé et c'est miracle s'il ne s'est pas tué.
L'économie est une belle chose, mais elle
doit avoir des limites.
PÉRIGUEUX, 25 juillet. Trois cents
carlistes environ sont internés dans notre
ville. Ils appartiennent en partie aux batail-
lons d'infanterie du prétendant. Les uns por-
tent le pantalon rouge, la veste bleue et le
béret blanc traditionnel; les autres, le panta-;
Ion gris bleuté comme nos chasseurs a pied
et la veste bleue avec passepoil jaune et pare-
ments verts.
Plusieurs d'entre eux sont employés chez
les industriels de la villa ou aux travaux des
champs. ̃•,
~> Les courses de Périgueux sont fixées
aux 29, 30 et 31 août prochain. On inaugurera
un nouvel hippodrome dans la plaine de Cha-
rnier, voisine de la ligne de Périgueux à Bor«
deaux.
Orange (Vauoluse), 25 juillet. –La
population d'Orange et de l'arrondissement
est cruellement éprouvée par la déconfiture
de trois notaires de la ville. Le premier, M.
B. a disparu il y a quelques jours, laissant
ses affaires très embrouillées et un déficit
que l'on dit considérable. Le second, M. M.
sest noyé volontairement à Avignon, dans
la nuit du 12 ou 13 juillet. Son cadavre a été
retrouvé quelques jours après, à Arles.
Enfin, le troisième, M. D. a été arrêté
hier, en vertu d'un mandat d'amener décerné
sur les réquisitions de M. le procureur de la,
République, Anquetil, à la suite d'une viola-
tion de dépôts. Une instruction se poursuit
contre MM. B. et D. Je vous en ferai con-
naître les résultats.
On cite plusieurs familles qui sont complè-
tément ruinées, notamment dans la classe
ouvrière. M. Bonamour, notaire à Orange,
reste seul chargé de la gestion des trois étu-
des dont je viens de vous parler.
AuxoNNE, 25 juillet. Le Tribunal
correctionnel de Dijon vient de condamner à
13 mois-de prison, pour usurpation de titres
et qualités, l'individu qui s'était présenté au
18° régiment de chasseurs à cheval, comme
officier d'ordonnance du général de Galiffet,
et dont vous aviez annoncé l'arrestation ré-
cente dans notre ville. Cet individu, M. L.
est réellement, paraît-il, de bonne famille.
SALON (Bouches-du-Rhône). 24 juil-
let. Dimanche dernier, très beau concert
organisé par les amateurs de la ville au béné«
Combien ? fit brusquement Dachet.
L'agent tira de son bureau un de ces
papiers oblongs, à vignette représentant
la Justice et sa balance avec cet exer-
gue « Timbre impérial. » II prit une
plume et traça en tête, et à droite du
papier, cette formule commerciale
« B. P. F. 50,000. » Puis il tendit la
plume à Robert Dachet.
Répétez cette formule en toutes
lettres à la partie inférieure du billet et
signez.
Le jeune homme ne sourcilla pas.
Il prit la plume, traça d'une main
hardie la formule indiquee et dit
C'est fait.
Je suis enchanté de voir que je ne
m'étais pas trompé sur votre compté,
mon cher Dachet; vous irez loin. J'es«
père bien que vous n'oublierez pas mes
bons offices.
Que dois-je faire? demanda Dachet.
Rien, aujourd'hui; mais demain, à
quatre heures, vous vous présenterez
chez madame la comtesse Svitzer avec
une lettre d'introduction. -̃̃••:
De vous?
Non! répondit en souriant l'obli-
geant personnage. Au surplus, ne vous
inquiétez point de la forme de la présen-
tation elle sera ce qu'elle doit être.
Il pressa le bouton d'une- sonnerie
électrique.
Le même domestique qui avait apporté
la carte se présenta.
-–Faites entrer Mme la comtesse
Svitzer, lui dit-il, et vous, mon cher
Dachet, à demain.
Tandis que le jeune homme sortait par
une porte mystérieuse qui donnait dans
un des trois escaliers conduisant à l'ap«
partement du négociateur en mariages,
Mme la comtesse Svitzer entrait dans le
cabinet de celui-ci.
Armand LA.POINTE.
(io suite à demain.\
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