Titre : Le Temps
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1940-01-10
Contributeur : Nefftzer, Auguste (1820-1876). Fondateur de la publication. Directeur de publication
Contributeur : Hébrard, Adrien (1833-1914). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 10 janvier 1940 10 janvier 1940
Description : 1940/01/10 (Numéro 28606). 1940/01/10 (Numéro 28606).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
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Description : Collection numérique : France-Japon Collection numérique : France-Japon
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Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
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Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 18/01/2011
QUATRE-VINGTIEME ANNEE. N» 2860FI
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MERCREDI 10 JANVIER 1940
S'oiTDA.xsj-cr». t Auguste NEPfTZER, (iset)
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?A-drien HÉBRARD (1337-1914)
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Un numéro rP-4R/S et DÉPARTEMENTS) ; 7S centimes
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CHÈQUE POSTAL : Paris, Numéro 60
SOMMAIRE
PAGE 2
Lfl; Vie à Rome, P. GENTIZON. - Nouvelles de-l'étran-
.jer La Vie économique.-La France d'outré-
mer.
PAGE 3
Les Livres : Jean Rostand, ANDRÉ THÉRIVE. - Nou-
velles du jour. - La Présidence du Sénat. -
Académies. - Echos et informations. - Théâ-
tres. - Cinémas. - T. S. F. - La 'Bourse.
PAGE 4
LA JOURNÉE : DERNIÈRES NOUVELLES. - Les Opé-
rations militaires. - En Finlande. - Après les
entretiens de Venise. - La Hollande est-elle
menacée ? - La Rentrée du Parlement.
Paris, le 9 janvier 1940
BULLETIN DU JOUR
CAMPAGNES ALLEMANDES
Les Finlandais viennent de remporter un
nouveau succès sur l'armée rouge, dans la
région entre Suomussalmi et la frontière sovié-
tique, succès qui paraît bien être un des plus
importants de l'admirable campagne de résis-
tance des troupes du maréchal Mannerheim.
Cet événement confirme non seulement le peu
de valeur militaire de l'armée rouge, que la
propagande communiste représentait comme
une force « invincible », mais aussi les gran-
des qualités de l'armée finlandaise, capable de
faire échec par ses seuls moyens à un adver-
saire très supérieur en nombre et disposant
d'un armement formidable. Cela pose de façon
plus pressante que ij amais le problème de
'aide à fournir au peuple finnois afin qu'il
puisse soutenir héroïquement jusqu'à la vic-
toire finale le magnifique effort qu'il déploie
depuis six semaines et qu'on peut citer en
exemple au monde entier. A Moscou on se rend
parfaitement compte que l'aide à la Finlande
assurée en temps utile peut décider de l'issue
de la campagne projetée pour les premières
semaines du printemps, et à Berlin on s'in-
quiète des répercussions que la victoire fin-
landaise aurait indirectement sur les dévelop-
pements mêmes de la guerre européenne.
C'est ce qui explique que la presse allemande,
inspirée par les services de propagande de
M. Goebbels, s'efforce actuellement, une fois
de plus, d'intimider les pays neutres disposés
à prêter assistance, en vertu de la décision
prise à Genève, au peuple finnois. Il se con-
firme que les Allemands ont arrêté ume partie
du matériel italien envoyé en Finlande en
transit à travers le territoire du Reich, et d'au-
tre part les organes nazis soutiennent auda-
cieusement la thèse que toute aide aux Finlan-
dais constitue un manquement à la neutralité.
On ne se prive même pas d'alléguer contre
la réalité des faits que cette aide ne serait
qu'un prétexte pour élargir le conflit européen
contre l'Allemagne elle-même, la France et
l'Angleterre cherchant à entraîner dans leur
propre camp, par cette politique, des puissances
jusqu'ici neutres. Tout cela ne résiste pas au
plus élémentaire examen critique. Il n'est pas
contestable que la Russie soviétique se soit
rendue coupable d'une odieuse agression con- '
tre le ; petit peuple finlandais.; Helsinki ayant
porté îa question devant la Société des nations,
celle-ci n'a pu que constater l'agression et re-
commander à tous les Etats sociétaires l'assis-
tance, dans la mesure de leurs moyens et de
leurs possibilités, due aux pays victimes d'une
attaque non provoquée. Cela n'affecte en rien
la politique de neutralité des puissances qui
entendent rester à l'écart du conflit européen
jusqu'au jour où elles auraient à se défendre
elles-mêmes contre une agression. Aucun gou-
vernement ne manque à son devoir de neutra-
lité en se conformant honnêtement aux obli-
gations résultant pour lui du pacte de la So-
ciété des nations. Quand l'Allemagne fait obs-
tacle à l'aide d'autrui à la Finlande, c'est elle
qui manque à la neutralité qu'elle a déclaré
vouloir observer en ce qui concerne le conflit
russo-finlandais. Elle paye par là d'une cou-
pable complaisance de plus cette amitié de
la Russie stalinienne dont elle a espéré tant
d'avantages économiques et même militaires,
et qui ne lui a valu jusqu'ici que des mécomp-
tes et des déceptions.
Mais l'aide à la Finlande n'est que le prétexte
dont Berlin entend couvrir ses manoeuvres
d'intimidation à l'égard des neutres, manoeu-
vres qui visent tout autre chose que la lutte de
la Finlande contre l'impérialisme bolcheviste.
Depuis le premier jour des hostilités le Reich
s'est efforcé d'exercer sur les neutres la plus
vive pression afin de les entraîner dams sa pro-
pre politique. Il a escompté d'abord une ini-
tiative des. non-belligérants en faveur d'une
paix de compromis assurant à l'Allemagne le
bénéfice de sa politique de violence en Europe
centrale .et orientale. Il a voulu ensuite con-
traindre les puissances neutres à faire échec,
dans la mesure du possible et aux dépens de
leurs propres intérêts, au blocus franco-bri-
tannique. Il s'agit actuellement de se servir des
neutres aux fins de la politique concertée entre
Berlin et Moscou en vue de cette hégémonie
partagée germano-russe à établir aussi bien
dans le Nord que dans le Sud-Est du conti-
nent. Tous les moyens sont bons pour les di-
rigeants du III" Reich quand il s'agit pour eux
de faire face aux nécessités de leur politique
de conquête et de domination. La presse alle-
mande multiplie sur un ton de plus en plus
violent ses menaces à l'adresse des pays scan-
' dinaves, de la Hollande et de la Belgique, aux-
quels elle reproche de se montrer trop souples
envers l'Angleterre et la France. Ces menaces,
le gouvernement du Reich serait d'ailleurs bien
. en peine de les mettre à exécution maintenant
qu'il ne peut plus escompter uni effet de sur-
prise et que dans tous les pays voisins les me-
sures indispensables ont été prises en vue
d'une défense efficace contre une agression
éventuelle. Les Allemands se risquent même
à soutenir que, la neutralité étant incompatible,
à leur sens, avec les obligations incombant aux
Etats membres de la Société des nations, les
petits pays ont le devoir de se retirer de l'ins-
titution internationale de Genève.
Cette campagne insensée donne des résultats
absolument contraires à ceux que l'on escomp-
tait à Berlin. Il apparaît clairement qu'au
stade actuel de l'évolution de la situation inter-
nationale les neutres ne se laissent plus inti-
mider par les menaces directes ou indirectes
du Reich. La presse des pays nordiques pro-
clame qu'en aucun cas les peuples Scandina-
ves ne manqueront à leur devoir de solidarité,
daps l'ordre humanitaire et dans le cadre de
leur politique propre, envers la nation finlan-
daise, et qu'il ne saurait être question pour
aucun d'eux de se retirer de la Société des
nations, laquelle représente à leurs yeux des
principes auxquels ils restent attachés. La
réaction est identique en Belgique et dans les
Pays-Bas, et le communiqué publié récem-
ment à la Haye a coupé court en termes caté-
goriques aux rumeurs tendancieuses selon les-
quelles la Hollande ne serait pas résolue à se
défendre avec tous ses moyens au cas où elle
viendrait à être attaquée. Tout cela confirme
que les manoeuvres allemandes d'intimidation
à l'égard des faibles et des petits ne rendent
plus, et que les peuples libres savent faire la
distinction nécessaire entre la neutralité loyale-
ment comprise et la politique d'indépendance
sans laquelle il ne saurait y avoir de véritable
souveraineté nationale.
PARLEMENT ET LIBERTÉ
Le Parlement, pendant les quatre premiers
mois de la guerre, a su tenir son rôle de façon
exemplaire, ïfa limité son action à l'objet de la
session, c'est-à-dire au vote du budget, son
contrôle dans les autres domaines ne s'exerçant
guère que par l'intermédiaire des commissions.
La question des crédits budgétaires étant mo-
mentanément réglée, il a maintenant à remplir
une mission plus vaste et plus délicate à la fois,
en collaboration avec le gouvernement.
Celui-ci, à qui incombe la conduite de la
guerre, a besoin de pouvoirs extraordinaires.
Les citoyens, et le Parlement lui-même, qui les
représente, s'imposent volontairement une dis-
cipline sévère. Est-ce à dire que nous devions
copier les régimes totalitaires, dans lesquels le
gouvernement agit en dehors et au-dessus de
l'opinion, comme si les hommes n'étaient que
les rouages sans âme d'une machine ? Ce n'est
pas ainsi que nous concevons la discipline
nationale, mais bien comme un travail en com-
mun sous la direction des chefs que le pays se
donne. Travail d'autant plus fécond que chacun
a le sentiment qu'il met librement ses forces au
service du pays. Le rôle du Parlement est de
réaliser cet accord des volontés.
Une telle collaboration est particulièrement
précieuse dans l'ordre économique. L'Etat a
des attributions étendues. Il réquisitionne
usines et produits pour les besoins de l'armée,
répartit la main-d'oeuvre, contrôle les prix, les
profits, les salaires, le commerce extérieur, le
change, etc. Nous avd'ns consenti à ces empiéte-
ments sur nos libertés, dans l'intérêt supérieur
de la patrie. Mais le danger est qu'ils s'étendent
à l'excès, toute administration étant portée par
sa nature à considérer les citoyens comme des
sujets et à restreindre leurs libertés. Si une
direction et une réglementation de l'économie
sont nécessaires, elles dépasseraient leur but si
elles allaient jusqu'à annihiler les initiatives.
« line caserne, une cuisine », cette formule
nationale-socialiste n'est pas française.
On a quelquefois posé cette alternative : ou
le libéralisme ou l'étatisme. On commettrait
une grave erreur en présentant le problème
d'une manière aussi absolue. En temps de
guerre la part de l'Etat grandit nécessairement,
mais celle du citoyen libre ne disparaît pas et
ne doit pas disparaître. C'est affaire de mesure
et de doigté. On a voulu opposer les nouvelles
méthodes économiques de guerre à la politique
qui a été suivie pendant la guerre de 1914. En
réalité il n'y a guère qu'une différence de
degré. Lors du dernier conflit nous avons eu
peut-être trop de laisser-aller. Ne tombons pas
dans l'excès contraire, et essayons de concilier
le pouvoir directeur de l'Etat et l'initiative libre,
de tirer parti de l'une et de l'autre.
Le Parlement, qui défend la liberté, la défen-
dra dans le domaine économique comme dans
le domaine politique. Il retiendra l'adminis-
tration sur la pente de l'étàtisme. Il l'éclairerà
sur les conséquences des contrôles et des règle-
ments. Les- avertissements et les critiques doi-
vent être présentés sans acrimonie, sans esprit
d'opposition, et, au contraire, avec le désir de
rendre service au gouvernement. On ne l'ai-
dera pas en lui cachant ses fautes, en l'enfer-
mant comme dans une tour d'ivoire, avec la
croyance que tout ce qu'il fait est excellent. Le
Parlement le tiendra en contact avec la nation
et avec la réalité. Par là même, il l'empêchera
d'oublier la valeur des initiatives individuelles
et l'engagera à en profiter. Il sauvera cette
flamme de liberté pour laquelle combat la
démocratie française.
LES OPERATIONS
MILITAIRES
COMMUNIQUÉS OFFICIELS FRANÇAIS
DU 8 JANVIER (SOIR)
Rien d'important à signaler.
DU 9 JANVIER (MATIN)
An cours de la nuit, des patrouilles enne-
mies ont été repoussées par nos feux en divers
points.
SUR MER
Vapeur britannique coulé
Le vapeur Cedrington-Court (3,000 tonnes) a
coulé dimanche au large de la côte sud-est de
l'Angleterre, dix minutes après une explosion pro-
voquée probablement par une mine. L'équipage a
été sauvé.
Un bateau suédois est emmené
dans un port allemand
On confirme de Stockholm que le bateau suédois
Kung-Oskar a été amené dans le port de Swine-
mùende, samedi.
Naufrage d'un vapeur allemand
On mande d'Oslo, le 8 janvier :
Un vapeur de la Hambourg Amerika Linie, le
Frankenwald (5,062 tonnes), a talonné, vers 18 heu-
res, samedi, près de Duoltein-Sund, dans lié.
Sognfjord.
.Le vapeur a coulé. L'équipage de 48 hommes et
les deux pilotes norvégiens ont été pris à bord
d'Un contre-torpilleur norvégien et conduits à
Bergen.
SUR LE FRONT
Le général Gamelin
décore des généraux anglais
M. Churchill, premier lord de l'amirauté, qu'ac-
Compagnait son fils, le lieutenant Rudolph Chur-
chill, est arrivé lundi matin au grand quartier
britannique, accompagné par le général Sir Ed-
mund Ironside, chef de l'état-major impérial.
Le général Gamelin et le général Georges se
sont aussi rendus au grand quartier, où un déjeu-
ner offert, par lord Gort,. commandant du corps
- Xpéditionnaire britannique, à réuni ces hautes
personnalités anglaises et françaises.
Le. général Gamelin a remis, avéc le cérémonial
rituel, au général Gort et au général Ironside lés
insignes de grand-croix de la Légion d'honneur qui
leur avaient été conférés par un décret daté du
25 décembre.
Les honneurs étaient rendus par un détache-
ment de zouaves, avec le drapeau et la clique, et
par un détachement d'un régiment de la Garde
anglaise.
En décorant les généraux anglais, le général
Gamelin a adressé une brève proclamation aux
troupes.
Le général Gamelin et le général Georges ont
pris congé" du premier lord de l'amirauté. Les gé-
néraux Gort et Ironside ont accompagné les géné-
raux français à leur train spécial jusqu'au mo-
ment du départ.
En Grande-Bretagne
LE DEBAT DP 16 JANVIER il COMMUES
La démission de M. Hore Belisha
On mande de Londres, 8 janvier :
On assure qu'en dépit des suggestions de cer-
tains députés, le Parlement ne sera pas convoqué
avant l.a date fixée pour sa rentrée, soit mardi
prochain 16 janvier.
Le désir générai d'explication complètes de la
démission du ministre de la guerre reste évident,
et la déclaration que M. Horè Belisha doit faire à
la Chambre des communes est attendu aveo im-
patience.
Le désir général de connaître tous les faits, écrit
le rédacteur politique de la Press Association, est si
puissant qu'il est probable que le gouvernement ne
s'opposera pas à un débat de grande envergure, ce
qui rend de plus en plus douteuse la possibilité d'une
séance secrète. Les questions de politique militaire
seront particulièrement évoquées, car certains préten-
dent que M. Hore Belisha et quelques-uns, tout au
moins, des membres du haut commandement avaient
sur ce sujet des opinions divergentes.
Sir Walter Citrine, secrétaire général du con-
grès des Trades Unions, a pris contact ce soir
avec M. Attlee, chef de l'opposition. Le conseil
national du travail qui se réunira mercredi dé-
cidera s'il doit prendre des mesures pour faire
face à la situation ou attendre le résultat du
débat parlementaire.
Enfin le rédacteur parlementaire de la Press
Association assure que l'organisation démocrati-
que de l'armée et la question de l'augmentation
du nombre des officiers sortant du rang ne sont
pas des sujets de dés accord entre M. Hore Belisha
et les militaires, et ces réformes, tout comme les
autres qui ont été faites par le miinstre, demeu-
reront en vigueur.
Suivant l'Evening Standard, les questions sui-
vantes seront soulevées au cours du débat parle-
mentaire du 16 j.anvier :
1° Quels ont été les points sur lesquels le ministre
et les généraux ont été en conflit?
2° Les généraux se sont-ils adressés directement au
premier ministre par-dessus le ministre de la guerre?
3» Quelle a été l'enquête à laquelle M. Neville
Chamberlain s'est livré sur le conflit avant de décider
de remplacer M. Hore Belisha?
4" Le premier ministre a-t-il jamais eu -l'occasion
de discuter l'incompatibilité de ses vues avec celles
de l'ancien ministre?
5° M. Hore Belisha a-t-il eu l'occasion de résoudre
les difficultés existantes au moyen de mutations?
6° Les milieux militaires ou politiques ont-ils accusé
le ministre de la guerre de manquer de compétence?
Un discours du ministre des fournitures
M. Leslie Burgin, ministre des fournitures bri-
tannique, a prononcé lundi soir à l'adresse de la
France un discours radiodiffusé par des postes
français, où il a dit notamment :
Je sais que le corps expéditionnaire britannique n'est
pas encore très important, mais vous savez que ce
n'est qu'une avant-garde. Le nombre des soldais bri-
tanniques envoyés en France croit chaque jour. Vous
verrez les colonnes succéder aux colonnes. Les Alle-
mands en verront peut-être plus qu'ils ne le voudraient.
Que nos ennemis ne comptent pas seulement nos hom-
mes. Qu'ils pensent à la qualité des canons et des vé-
hicules motorisés; qu'ils se rendent compte de la réso-
lution des hommes.
On nous a promis une guerre totalitaire. Nous avons
relevé le défi et. nous apporterons à la lutte toute la
force et l'énergie de nos réserves financières. Nous
avons anpris avec enthousiasme que la France et l'An-
gleterre sont en train de mettre leurs ressources en
commun. Il n'est pas aisé de mesurer l'étendue des res-
sources de mon pays. Où pouvez-vous trouver dans l,e
monde des ressources dont l'importance, la richesse, la
diversité et la solidité puissent se comparer aux res-
sources britanniques? . . ;ï
Dans le monde de l'armement, l'industrie britannique
travaille nuit et jour à plein rendement afin d'être à
même de satisfaire à la demande gigantesque qu'exige
une guerre avec l'Allemagne. L'effort de guerre de la
Grande-Bretagne ne se confine pas au domaine matériel.
Derrière tout cet effort matériel, il y a l'esprit indomp-
table de l'Anglais, fier, prêt à résister, profondément
patriote, qu'anime un dévouement absolu pour son pays,
son roi, ses coutumes et sa liberté. . .. -?
Nous apportons donc à la cause commune une in-
dustrie qui travaillera de toutes ses forces pour exé-
cuter le programme élaboré par nos chefs. La coopé-
ration de nos deux pays commence à produire son effet.
Considérez les voyages de vos ministres en Angleterre
et des nôtres en France. J'ai moi-même eu le plaisir conférer aveo mon collègue français, M. Dautry, et je
n'hésite pas à vous dire que notre accord est aussi
complet que celui qui existe entre nos deux pays.
Mes amis, je suis comme vous inébranlablement con-
vaincu que nous remporterons la victoire. Nous nous
battons à vos côtés, et quelle que soit la violence avec
laquelle l'ennemi se déchaîne contre nous, nous demeu-
rerons fidèles à votre devise et répétons avec vous :
« On ne passe pa6 ».
La réorganisation du service de l'information
Le vice-amiral Usborne a confirmé dans des dé-
clarations à la presse que sa démission des fonc-
tions de censeur principal au service de l'infor-
mation était motivée par le désir de devenir di-
recteur adjoint d'une firme de constructions na^
vales. Il estime qu'en cette qualité il sera plus
utile au pays qu'à son poste de censeur.
L'amiral, qui nourrissait du reste depuis environ
un an le dessein de se consacrer aux constructions
navales, est l'inventeur du filet protecteur contre
les torpilles. Dans l'intérêt national il s'est abs-
tenu de fournir des détails sur les nouveaux tra-
vaux qu'il se proposait de poursuivre.,Il a..tau-
tefois laissé entendre qu'il s'agissait « d'une idée
qu'il avait eue il y a un an et qui était mainte-
nant devenue une très grande chose dont JJ
se « jugeait désormais tenu d'assurer la réalisa-
tion ». ,7-
Le'rationnement
On mande de Londres, 8 janvier :
Pendant que dans toutes les boutiques d'alimen-
tation du Royaume-Uni commençait l'application
du système de rationnement décidé par le gouver-
nement en ce qui concerne le beurre, le sucre et
le bacon, on indiquait ce soir dans les milieux
parlementaires que d'autres mesures suivraient.
On sait déjà que le système du rationnemenl
doit être étendu prochainement aux différentes
viandes de boucherie. Or, on prévoit que d'autres
produits que les denrées alimentaires pourraient
être affectées par les mesures de restriction, no-
tamment les tissus.
Le but essentiel de ces mesures est la consécra-
tion à l'effort militaire de toutes les ressources
qui ne sont pas nécessaires à la continuation de
la vie de la nation. C'est le désir de limiter les
importations aux produits indispensables à la vie
normale du pays, au maintien du commerce d'ex?
portât ion et à la conduite de la guerre qui a ins-
piré le gouvernement dans les décisions qu'il a
déjà prises ou. celles qu'il envisage de prendre en
matière de rationnement.
Questions extérieures
LE jÂPÔN OEVANÏ LES BELLIGERANTS
Il y a longtemps déjà qu'en traitant de la
politique d'Extrême-Orient nous avons pour
la première fois envisagé certaines tendances
ou certains Intérêts qui pouvaient mener à la
formation de groupements auxquels les Occi-
dentaux ne pens -t que rarement.
Pourtant, depuis que les communications
de toute nature permettent la transmission
quasi instantanée des informations à travers
les continents, que la facilité et la rapidité des
voyages permettent à des émissaires qualifiés
d'aller se renseigner sur la situation politique
de n'importe quel pays, fût-il aux antipodes, il
est de plus en plus inconsidéré de limiter
l'observation de la politique étrangère à cer-
taines nations seulement, abstraction faite des
autres. Le rapprochement des peuples, créé par
les nouveaux et multiples moyens de corres-
pondre entre eux et de se voir, entremêle né-
cessairement leurs intérêts et en rend la sau-
vegarde à la fois plus simple et plus compli-
quée, plus facile et plus malaisée.
La politique étrangère doit positivement
embrasser l'ensemble du monde, et jamais
l'obligation de « penser la politique générale »
avant de faire leur politique nationale ne s'est
plus impérieusement fait sentir que de nos
jours aux gouvernements.
En tout cas, si les enquêtes de politique
étrangère offrent une utilité en tout temps, à
plus forte raison au milieu des événements
que nous vivons y a-t-il intérêt à connaître la
position des gouvernements étrangers quels
qu'ils soient, en prévision du rôle que, volens
nolens, ils peuvent être appelés à jouer dans
la guerre actuelle.
On revient, depuis quelque temps, en France
et au dehors, sur l'idée d'une politique que
nous avons qualifiée ici plusieurs fois et ré-
cemment encore de redoutable (Temps du
19 décembre). Ellg consiste en la formation
d'un bloc que, d'après la Gazette de la Bourse
du 31 décembre, le porte-parole de la Wilhelm-
strasse définissait bloc asiatico-européen et qui
comprendrait l'Allemagne, la Russie, le Japon
et l'Italie, « seule façon, ajoutait-il, de déli-
vrer l'Europe de l'empire britannique ».
Nous savons que ce n'est là qu'un voeu-de
fin d'année qui n'est sans doute pas à la veille
d'être exaucé, et plus spécialement, quand
nous avons nous-même envisagé la possibi-
lité de voir se former un bloc asiatico-euro-
péen, nous n'avons jamais pensé qu'il pour-
rait comprendre les quatre puissances sus-
indiquées.
Nous ne songeons pas davantage aujour-
d'hui à en déterminer exactement les partici-
pants; nous voulons seulement mettre l'opi-
nion en garde contre une insouciance selon
nous dangereuse en face de ce qui pourrait-
être préparé à ce sujet.
Il ne saurait être indifférent que le Japon,
PU.R.S.S. et l'Allemagne s'entendissent comme
le souhaitent ces deux dernières.
D'après une information récente, Berlin re-
procherait à son ambassadeur au Japon, le
général Ott, dont nous avons-constaté l'acti-
vite a, Tokio lorsqu'il n'y était encore qu'attaché
militaire auprès de l'ambassadeur Dirksen, de
ne pas, avoir bien conduit les affaires dè son
pays au cours des derniers mois. L'attitude du
Japon dès la signature du pacte germano-
soviétique,/ et certaines tendances qu'il mon-
tre depuis, lors à se rapprocher des démocra-
ties, enfin sa réserve en face des avances de
Moscou, ont grandement déçu le gouverne-
ment de Berlin. Malgré cela les Allemands,
dont la ténacité est connue, se livrent à Tokio
à un travail de propagande acharnée. Or,
quel que soit le nouveau penchant japonais
que nous venons de signaler, il ne faut pas
oublier que les Allemands conservent au Ja-
pon des admirateurs dans les milieux tant
politiques et diplomatiques que militaires.
Le but immédiat de l'Allemagne est moins
d'attirer le Japon dans une alliance militaire
que de le pousser à signer avec l'U.R.S.S. un
accord qui donne à celle-ci sur ses frontières
d'Asie l'apaisement dont elle a besoin, surtout
après son échec en Finlande, pour se tourner
vers l'Europe en toute tranquillité.
Certes, Tokio se méfie, et, pour des raisons
faciles à deviner, dans la période de « deve-
nir » politique où est le monde, évitera de
se lier, préférant conserver son entière liberté
d'action. Cependant les assauts d'amabilité de
Moscou, qui se remarquent dans les tractations
en cours relatives aux pêcheries japonaises
dans les eaux russes et au payement du fa-
meux chemin de fer de l'Est chinois, assauts
encouragés par Berlin, et en même temps les
efforts de la propagande allemande, ne sont
pas choses négligeables, et dont on peut, sans
préjudice, ne pas se soucier.
Penser la politique générale, c'est aussi
« penser la guerre » ; et si toutes les guerres
doivent être pensées, c'est surtout quand une
guerre ne peut vraiment laisser uni seul pays
en parfaite quiétude qu'il est nécessaire de la
penser. Et lorsque la réflexion doit porter sur
le rôle éventuel d'une puissance comme le
Japon, y manquer serait impardonnable.
Mais encore une fois nous ne suggérons
aucun plan, nous ne prétendons à aucun bre-
vet de construction; nous voulons simplement
mettre en garde contre une insouciance dan-
gereuse. Que l'étude de la politique extrême-
orientale soit, si l'on veut, du domaine des
« spécialistes » en temps ordinaire, elle n'est
plus une spécialité lorsqu'elle évolue en fonc-
tion de celle de l'Europe, ou qu'elle peut avoir
sur celle-ci de graves répercussions.
Nous ajouterons que tout ce que nous avons
dit n'implique pas, contrairement à _ ce que
pourraient s'imaginer les gens à systèmes, le
moindre changement dans la politique des dé-
mocraties à l'égard de la Chine.
Lorsque nous montrons l'intérêt que nous
avons tous à regarder le Japon tel qu'il est
aujourd'hui devant les belligérants, sollicité
par nos ennemis, mais prudent à l'extrême,
soucieux de jouer habilement son jeu, troublé
peut-être aussi par des sentiments qui naissent
au fond de son peuple et le rapprochent de
nous, nous n'excluons pas la Chine de notre
amitié. Mais nous voudrions que les deux plus
grandes puissances de cette Asie où, pour sa
part,"la France compte tant de-loyaux sujets
qui se battent pour elle, collaborassent de quel-
que manière à la victoire avec nous et nos
alliés.
ANDRÉ DUBOSCQ.
Menace de crise ministérielle
On télégraphie de Tokio :
L'impression générale dans les milieux politi-
ques est que le sort du cabinet est compromis. La
presse, pour la première fois depuis le début de
la tension politique, prononce le nom du général
Ugaki, qui est arrivé de province et aurait de
nombreux appuis dans l'armée.
La délimitation de frontière
mandchoue-mongole
On télégraphie de Tokio :
On mande de Kharbine à 1'agence Domei que les
pourparlers au sujet de la délimitation des fron-
tières se poursuivent de façon satisfaisante entre
les délégations constituant la commission mixte
nippo-mandchoue et soviéto-mongole.
L'ÀGRESSION SOVIETIQUE CONTRE LA FINLANDE
Les Finlandais écrasent une division russe sur la route
de Raate à Suomussalmi
Le butin, considérable, comprend notamment 102 pièces d artillerie
Le commandement suprême de l'armée finlandaise
a publié, dans l'après-midi du 8 janvier, le communi-
qué suivant sur les opérations:
Les combats mentionnés par le communiqué
finlandais d'hier autour du village de Raate (à
36 kilomètres à l'est de Suomussalmi, et à proxi-
mité immédiate de la frontière, russe) viennent
de se terminer, ce matin, par une victoire écla-
tante des Finlandais, qui ont détruit une division
soviétique sur la route de Suomussalmi à la fron-
tière soviétique.
Il s'agit de la 44° division soviétique. Le butin
fait par les Finlandais et jusqu'à présent dénom-
bré comprend plus de 1,000 prisonniers et un
nombreux matériel. On compte 102 canons de
divers types, 42 chars d'assaut, 10 autos blindées,
20 tracteurs, 27S autos de divers modèles parmi
lesquelles 16 autos de D. C. A. avec mitrailleuses
quadruplées, 46 fusils automatiques et d'autres
armes; 1,170 chevaux ont été pris, et 47 cuisines
voulantes.
Les Finlandais continuent le nettoyage du ter-
rain et le dénombrement du butin.
Ailleurs, le front est relativement calme, à part
l'activité habituelle d'artillerie et de patrouilles.
Sur mer, rien de spécial aujourd'hui.
Dans les airs, sur le front comme à l'intérieur,
la situation est calme. On a seulement observé
quelques avions ennemis, et on ignore encore s'ils
ont jeté des bombes.
On mande d'Helsinki:'
Les détails qui parviennent sur la victoire de
Raate confirment l'étendue du succès finlandais.
Depuis la victoire de Suomussalmi, les combats
s'étaient poursuivis le long de la route étroite
qui, passant par Raate, conduit vers la frontière.
Cette route traverse un pays sauvage, coupé de
forêts à peu près impénétrables.
Après la défaite de la 44e division soviétique,
les forces principales de l'ennemi dans ce secteur
sont considérées comme anéanties.
La récolte du butin augmente d'heure en heure,
à mesure que les Finlandais nettoient le terrain
conquis.
La victoire la plus importante
depuis le début des hostilités
Le correspondant de l'agence Havas à Helsinki mande,
le 8 janvier au soir :
Pour la première fois depuis qu'existent les
hostilités entre la Finlande et l'U. R. S. S., l'on
a distribué dans les rues d'Helsinki, cet après-
midi, un communiqué, et les Finlandais ont des
raisons d'être fiers.
La victoire finlandaise rapportée par le commu-
niqué de cet après-midi est certainement la plus
importante qui ait été enregistrée jusqu'à présent
par lés troupes du maréchal Mannerheim.
En' un peu plus de trois semaines, les Finlan-
dais ont anéanti trois divisions : une à Tolva-
jaervi, la deuxième à Suomussalmi, et la troi-
sième, ces derniers jours, entre Suomussalmi et
Raate.
Une division soviétique représente entre quinze
mille et dix-huit mille hommes. Les prises des
Finlandais en matière de-matériel sont d'une très
grande importance, et le communiqué de cet après-
midi n'en donne qu'une partie. Les troupes sovié-
tiques ont laissé sur la route une énorme quan-
tité de matériel, de chevaux, d'armes de toutes
sortes ét d'équipements divers; bref, tout ce qui
constitue le train de la division soviétique, qui
doit normalement être un bloc compact d'hommes
et de machines, et qui doit garder son homo-
généité en toutes circonstances.
Les Finlandais ont, cette fois encore, opéré uni-
quement par une tactique de patrouilles, coupant
les colonnes de ravitaillement ennemies, surpre-
nant leurs détachements en route ou en recon-
naissance, et prenant sous le feu de leurs armes
automatiques les formations russes chaque fois
que le terrain le permettait»
. Avec les détails obtenus de sources non offi-
cielles, on peut, dès maintenant, tirer quelques
conclusions sur les opérations oui viennent de se
terminer par la victoire finlandaise.
D'abord se pose une question à laquelle on ne
peut encore répondre que par des hypothèses :
alors que les Finlandais taillaient en pièces, au
nord ^e Suomussalmi, la division soviétique (la
163') qui se dirigeait par deux routes vers Suo-
mussalmi, pourquoi la 44« division soviétique
est-elle demeurée en arrière, dans le secteur de
Raate? Peut-être cette division est-elle restée
dans l'expectative, avant de venir soutenir la
division coupée au nord par les Finlandais; cela
est possible. Le fait que la 44" division était, me
dit-on, composée de troupes assez fraîches, per-
met de supposer qu'elle n'est arrivée qu'assez
récemment sur la route et que, encombrée
d'hommes et de matériel, elle s'est trouvée retar-
dée sur cette voie de communication étroite et
difficile.
Il est possible aussi - et cette hypothèse a été
émise par des milieux souvent.bien informés -
que la 44" division soviétique ait montré quelque
mauvaise volonté pour avancer.
Le nombre des prisonniers faits par les Fin-
landais - plus de mille, dit le communiqué, plus
de mille cinq cents, dit-on d'autres sources -
montre que les troupes soyiétiques se sont ren-
dues plus facilement qu'à Suomussalmi, où elles
tentèrent de fuir par la glace du lac de Kianta-
jaervi.
J'apprends en outre un autre détail, digne
d'être noté, au sujet de cette opération : l'aviation
finlandaise a joué un rôle assez important dans
l'affaire de Raate, en détruisant et en harcelant
les campements et les convois soviétiques, parfois
assez loin en arrière, en territoire soviétique.
En résumé, il s'est agi d'une lutte à un contre
dix ou vingt adversaires, où les Finlandais ont
employé à fond leur technique de patrouilles et
d'utilisation du terrain, une affaire de mouve-
ments rapides à travers la forêt ou par la glace
des lacs.
Les conséquences de la défaite soviétique
Les conséquences de cette heureuse opération
peuvent dès maintenant être envisagées.
D'abord, pour les Soviets, elle signifie une
grave perte de prestige moral et militaire à
l'extérieur. Le communiqué soviétique, d'ailleurs,
- ce qui ne surprend personne, - est aujour-
d'hui complètement muet et ne mentionne que
des opérations de patrouilles.
D'.autre part si pour les Soviets ia perte d'une
division ne tire pas à conséquence pour la mar-
che de l'armée rouge, qui a autant de divisions
qu'elle veut, il est probable néanmoins que le
remplacement des troupes soviétiques ne se fera
pas immédiatement, en raison des difficultés de
transport existant actuellement en U. R. S. S.
Par conséquent, pour le moment en tout cas,
tout espoir que les Soviets auraient pu nourrir
pour couper les Finlandais en deux points est
perdu.
Pour les Finlandais, enfin, cet événement ap-
porte un grand réconfort moral. U leur permet-
tra peut-être de libérer quelques-unes de leurs
troupes - très peu nombreuses - afin de faire
face à la pression soviétique possible qui ne peut
manquer de se faire sentir avec violence en d'au-
tres points.
Le communiqué soviétique
L'état-major de la circonscription militaire de
de Léningrad publie le communiqué suivant :
8 janvier. - Aucun événement important. Dans les
régions à l'ouest d'Ouchta, de Repola et de Petroza-
vodsk, actions de .détachements d'éclaireurs.
Dans l'isthme de Carélie, actions d'éclaireurs, tirs de
mousqueterie, de mitrailleuses et d'artillerie.
Par suite du mauvais temps, l'aviation soviétique S
effectué seulement des vols de reconnaissance.
Les exploits des skieurs finlandais
On mande d'Helsinki, le 8 janvier :
Une patrouille de skieurs, dont un certain
nombre jouissent d'une réputation mondiale, a été
interviewée par un correspondant de l'Agence
télégraphique finlandaise.
Dans ce détachement se trouvent le champion
du monde Pauli Pitkanen, les frères Kukkonen et
d'autres skieurs bien connus par leur habileté et
leur vitesse.
Lorsque cette patrouille a été interviewée, elle
venait d'accomplir sa onzième expédition. La pre-
mière a eu lieu il y a trois semaines, et, au cours
de celle-ci, la patrouille réussit à surprendre, der-
rière les lignes soviétiques, une colonne ennemie;
composée de huit attelages traînés par des che-
vaux et dont le chargement comprenait des télé-
phones de campagne. La colonne soviétique ne par-
vint jamais à destination.
En une autre occasion, alors qu'il s'était mis en
route de très bonne heure le matin, et qu'il allait
traverser une clairière dans la forêt, le détache-
ment se trouva en présence de soldats ennemis. Des;
coups de feu furent échangés. Puis, les mitrail-
leuses soviétiques tentèrent de prendre en enfilade
le détachement. La patrouille finlandaise changea
alors rapidement de position. Toute la journée on
tira de part et d'autre et les Finlandais réussirent
à avertir l'artillerie, qui força les soviétiques à se
déplacer. A la tombée de la nuit, les Finlandais
lancèrent une attaque et les soviétiques, qui avaient
commencé déjà à se retirer, malgré les renforts
qu'ils avaient reçus, laissèrent une cinquantaine
de morts sur le terrain.
Un autre champion du monde de ski, dont le nom
est Pekka Vanniven, a rejoint récemment cette
petite formation. Il arriva au détachement un soir
a minuit, et, dans la nuit même, il était avec les
autres sur le terrain. Vanniven effectua un jour
tout seul une reconnaissance autour d'un village
pour connaître le nombre des sentinelles sovié-
tiques. U réussit à regagner les lignes en rappor-
tant des informations précieuses.
On fait remarquer qu'il y a en Finlande un
grand nombre de formations de ce genre; elles ne
comprennent pas toutes des champions, mais toutes
sont composées de skieurs de premier ordre.
Le point faible de la défense finlandaise :
l'aviation de chasse
On mande, d'Helsinki à l'agence Havas, le 8 janvier
Trois méthodes ont été employées successive-
ment par les Soviets pour essayer de réduire à
néant l'indépendance finlandaise : d'abord, les
négociations, avec des tentatives pour obtenir des
conditions telles que l'intépendance de la Finlande
se serait trouvée anéantie.
Puis, ce fut l'attaque en masse sur tous les
points de la frontière, les bombardements des
villes ouvertes et tout ce qu'on sait de la guerre.
Le moral des Finlandais a résisté, et les troupes
finlandaises tiennent victorieusement la frontière.
Maintenant, les Soviets tentent de détruire des
villages à l'intérieur du pays, d'attaquer avec leurs
avions, leurs bombes et leurs mitrailleuses les lieux
qui leur paraissent être des centres industriels.
Us tentent de supprimer les rapports de la Fin-
lande avec l'extérieur. Ils ne s'en vantent pas dans
leurs communiqués, et les pertes qu'ils subissent
dans le domaine de l'aviation du fait que ces opé-
rations sont importantes : il suffit de mentionner
qu'au cours des deux jours de l'Epiphanie, ils ont
perdu vingt avions.
Il est probable que le jour où les Finlandais dis-
poseront d'une aviation de chasse plus effective et
plus nombreuse que celle qu'ils possèdent actuelle-
ment, ils seront en mesure de donner à l'ennemi
qui attaque leurs foyers et leurs familles, des
leçons plus dures encore que celles qu'ils lui ont
déjà infligées.
L'ASSISTANCE A LA FINLANDE
Appel émouvant
de la Chambre finlandaise
"aux peuples civilisés"
La Chambre des représentants de Finlande a
adressé l'appel suivant au bureau de Genève de
l'Union interparlementaire, pour être transmis
aux divers groupes nationaux de l'Union :
Le -peuple finlandais, qui 6'est efforcé toujours de
vivre en concorde avec les autres peuples et de déve-
lopper une oeuvre pacifique pour son avenir, vient de
subir, de la part de son voisin de l'Est, une agression
brutale dont les causes ne peuvent en aucune façon
être imputées à la Finlande.
Nous avons été forcés de lutter et nous n'avons pas
eu à choisir. Le peuple finlandais combat pour son
indépendance, pour s liberté et pour son honneur.
Nous défendrons la patrie, le foyer, la Constitution
démocratique, la religion, bref, tout ce que les peuples
civilisés tiennent pour sacré.
Pour le moment, nous luttons seuls contre l'ennemi
qui vient d'attaquer notre pays, mais notre combat vise
à défendre la cause commune de toute l'humanité.
Nous avons montré que nous faisons tous nos efforts
dans ce combat et nous croyons que le monde civilisé,
ayant déjà témoigné d'une si grande sympathie pour
notre pays, ne pourra nous laisser lutter seuls contre
un ennemi supérieur en nombre. Notre peuple, qui
constitue l'avant-garde de la civilisation occidentale,
est en droit de s'attendre à un secours actif de la -part
des autres peuples civilisés. C'est à tous ces peuples
que la Chambre des représentants du peuple finlan-
dais adresse cet appel.
La réponse française
Le bureau de Genève de l'Union interparlemen-
taire ayant envoyé au groupe français « l'émou-
vant appel adressé par la Chambre des repré-
sentants de Finlande aux peuples civilisés >> le
président Mario Roustan, sénateur, ancien minis-
tre, a répondu par le message suivant :
Monsieur le secrétaire général,
Nous avons lu avec une émotion profonde le noble
appel de la Chambre des représentants du peuple fin-
landais, que nos collègues et amis du groupe de Fin-
lande vous avaient prié de nous transmettre.
Nous n'avions pas attendu jusque-là pour exprimer
à M. le président Oskari Mantere, ancien ministre, nos
sentiments à l'égard de la nation héroïque qui, dans la
défense de sa liberté et de son honneur, déploie des
vertus surhumaines, qui font l'admiration de l'univers.
J'avais ajouté que les parlementaires français gar-
daient la conviction que chacun des peuples qui
avaient promis aide et assistance à la Finlande, auraient
à coeur de tenir leurs engagements solennels, et que
la France comme son alliée l'Angleterre, mettrait sa
gloire à donner l'exemple.
Par la voix du chef de son gouvernement, la France
a répondu, ces jours derniers, que, dans le cadre des
dispositions du pacte, et suivant les formes prévues
par lesdites dispositions, elle remplirait jusqu'au bout
son devoir d'assistance envers la Finlande, brutalement
et odieusement attaquée. Elle ajoutait que les actes
avaient précédé les paroles, et que l'accomplissement
de ce devoir était commencé.
Les parlementaires français de l'Union, sans dis-
tinction de parti, sans restriction, sans réserve, aide-
ront leur gouvernement dans cette tâche, Ils ne négli-
On s'abonne aux Bureaux du Journal, 5, RUE DES ITALIENS,'A PARIS (9e), et dans tous les Bureaux de Poste
MERCREDI 10 JANVIER 1940
S'oiTDA.xsj-cr». t Auguste NEPfTZER, (iset)
ANCIBITS DIBSCTETTBS I
?A-drien HÉBRARD (1337-1914)
Emile HÉBRARD (îeis-ieas)
. Adrien HÉBRARD 1920-1930)
XjOXJIS-MILjL. (1929-ieai)
Directeus.s :
Jacques OHASTENET et Emile MIR.EJATXX
Le Journal ne répond pas des manuscrits communiqués
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( Autres pajs - 130 fr. - 260fr. - SOOfr.
LES ABONNEMENTS DATENT DES I" ET 16 DE CUAQUE MOIS
Un numéro rP-4R/S et DÉPARTEMENTS) ; 7S centimes
ANNONCES : AUX BUREAUX DU Ctmps, 5, rue des Italiens,
et dans toutes les Agences de Publicité
Le Journal décline toute responsabilité quant à leur teneur
CHÈQUE POSTAL : Paris, Numéro 60
SOMMAIRE
PAGE 2
Lfl; Vie à Rome, P. GENTIZON. - Nouvelles de-l'étran-
.jer La Vie économique.-La France d'outré-
mer.
PAGE 3
Les Livres : Jean Rostand, ANDRÉ THÉRIVE. - Nou-
velles du jour. - La Présidence du Sénat. -
Académies. - Echos et informations. - Théâ-
tres. - Cinémas. - T. S. F. - La 'Bourse.
PAGE 4
LA JOURNÉE : DERNIÈRES NOUVELLES. - Les Opé-
rations militaires. - En Finlande. - Après les
entretiens de Venise. - La Hollande est-elle
menacée ? - La Rentrée du Parlement.
Paris, le 9 janvier 1940
BULLETIN DU JOUR
CAMPAGNES ALLEMANDES
Les Finlandais viennent de remporter un
nouveau succès sur l'armée rouge, dans la
région entre Suomussalmi et la frontière sovié-
tique, succès qui paraît bien être un des plus
importants de l'admirable campagne de résis-
tance des troupes du maréchal Mannerheim.
Cet événement confirme non seulement le peu
de valeur militaire de l'armée rouge, que la
propagande communiste représentait comme
une force « invincible », mais aussi les gran-
des qualités de l'armée finlandaise, capable de
faire échec par ses seuls moyens à un adver-
saire très supérieur en nombre et disposant
d'un armement formidable. Cela pose de façon
plus pressante que ij amais le problème de
'aide à fournir au peuple finnois afin qu'il
puisse soutenir héroïquement jusqu'à la vic-
toire finale le magnifique effort qu'il déploie
depuis six semaines et qu'on peut citer en
exemple au monde entier. A Moscou on se rend
parfaitement compte que l'aide à la Finlande
assurée en temps utile peut décider de l'issue
de la campagne projetée pour les premières
semaines du printemps, et à Berlin on s'in-
quiète des répercussions que la victoire fin-
landaise aurait indirectement sur les dévelop-
pements mêmes de la guerre européenne.
C'est ce qui explique que la presse allemande,
inspirée par les services de propagande de
M. Goebbels, s'efforce actuellement, une fois
de plus, d'intimider les pays neutres disposés
à prêter assistance, en vertu de la décision
prise à Genève, au peuple finnois. Il se con-
firme que les Allemands ont arrêté ume partie
du matériel italien envoyé en Finlande en
transit à travers le territoire du Reich, et d'au-
tre part les organes nazis soutiennent auda-
cieusement la thèse que toute aide aux Finlan-
dais constitue un manquement à la neutralité.
On ne se prive même pas d'alléguer contre
la réalité des faits que cette aide ne serait
qu'un prétexte pour élargir le conflit européen
contre l'Allemagne elle-même, la France et
l'Angleterre cherchant à entraîner dans leur
propre camp, par cette politique, des puissances
jusqu'ici neutres. Tout cela ne résiste pas au
plus élémentaire examen critique. Il n'est pas
contestable que la Russie soviétique se soit
rendue coupable d'une odieuse agression con- '
tre le ; petit peuple finlandais.; Helsinki ayant
porté îa question devant la Société des nations,
celle-ci n'a pu que constater l'agression et re-
commander à tous les Etats sociétaires l'assis-
tance, dans la mesure de leurs moyens et de
leurs possibilités, due aux pays victimes d'une
attaque non provoquée. Cela n'affecte en rien
la politique de neutralité des puissances qui
entendent rester à l'écart du conflit européen
jusqu'au jour où elles auraient à se défendre
elles-mêmes contre une agression. Aucun gou-
vernement ne manque à son devoir de neutra-
lité en se conformant honnêtement aux obli-
gations résultant pour lui du pacte de la So-
ciété des nations. Quand l'Allemagne fait obs-
tacle à l'aide d'autrui à la Finlande, c'est elle
qui manque à la neutralité qu'elle a déclaré
vouloir observer en ce qui concerne le conflit
russo-finlandais. Elle paye par là d'une cou-
pable complaisance de plus cette amitié de
la Russie stalinienne dont elle a espéré tant
d'avantages économiques et même militaires,
et qui ne lui a valu jusqu'ici que des mécomp-
tes et des déceptions.
Mais l'aide à la Finlande n'est que le prétexte
dont Berlin entend couvrir ses manoeuvres
d'intimidation à l'égard des neutres, manoeu-
vres qui visent tout autre chose que la lutte de
la Finlande contre l'impérialisme bolcheviste.
Depuis le premier jour des hostilités le Reich
s'est efforcé d'exercer sur les neutres la plus
vive pression afin de les entraîner dams sa pro-
pre politique. Il a escompté d'abord une ini-
tiative des. non-belligérants en faveur d'une
paix de compromis assurant à l'Allemagne le
bénéfice de sa politique de violence en Europe
centrale .et orientale. Il a voulu ensuite con-
traindre les puissances neutres à faire échec,
dans la mesure du possible et aux dépens de
leurs propres intérêts, au blocus franco-bri-
tannique. Il s'agit actuellement de se servir des
neutres aux fins de la politique concertée entre
Berlin et Moscou en vue de cette hégémonie
partagée germano-russe à établir aussi bien
dans le Nord que dans le Sud-Est du conti-
nent. Tous les moyens sont bons pour les di-
rigeants du III" Reich quand il s'agit pour eux
de faire face aux nécessités de leur politique
de conquête et de domination. La presse alle-
mande multiplie sur un ton de plus en plus
violent ses menaces à l'adresse des pays scan-
' dinaves, de la Hollande et de la Belgique, aux-
quels elle reproche de se montrer trop souples
envers l'Angleterre et la France. Ces menaces,
le gouvernement du Reich serait d'ailleurs bien
. en peine de les mettre à exécution maintenant
qu'il ne peut plus escompter uni effet de sur-
prise et que dans tous les pays voisins les me-
sures indispensables ont été prises en vue
d'une défense efficace contre une agression
éventuelle. Les Allemands se risquent même
à soutenir que, la neutralité étant incompatible,
à leur sens, avec les obligations incombant aux
Etats membres de la Société des nations, les
petits pays ont le devoir de se retirer de l'ins-
titution internationale de Genève.
Cette campagne insensée donne des résultats
absolument contraires à ceux que l'on escomp-
tait à Berlin. Il apparaît clairement qu'au
stade actuel de l'évolution de la situation inter-
nationale les neutres ne se laissent plus inti-
mider par les menaces directes ou indirectes
du Reich. La presse des pays nordiques pro-
clame qu'en aucun cas les peuples Scandina-
ves ne manqueront à leur devoir de solidarité,
daps l'ordre humanitaire et dans le cadre de
leur politique propre, envers la nation finlan-
daise, et qu'il ne saurait être question pour
aucun d'eux de se retirer de la Société des
nations, laquelle représente à leurs yeux des
principes auxquels ils restent attachés. La
réaction est identique en Belgique et dans les
Pays-Bas, et le communiqué publié récem-
ment à la Haye a coupé court en termes caté-
goriques aux rumeurs tendancieuses selon les-
quelles la Hollande ne serait pas résolue à se
défendre avec tous ses moyens au cas où elle
viendrait à être attaquée. Tout cela confirme
que les manoeuvres allemandes d'intimidation
à l'égard des faibles et des petits ne rendent
plus, et que les peuples libres savent faire la
distinction nécessaire entre la neutralité loyale-
ment comprise et la politique d'indépendance
sans laquelle il ne saurait y avoir de véritable
souveraineté nationale.
PARLEMENT ET LIBERTÉ
Le Parlement, pendant les quatre premiers
mois de la guerre, a su tenir son rôle de façon
exemplaire, ïfa limité son action à l'objet de la
session, c'est-à-dire au vote du budget, son
contrôle dans les autres domaines ne s'exerçant
guère que par l'intermédiaire des commissions.
La question des crédits budgétaires étant mo-
mentanément réglée, il a maintenant à remplir
une mission plus vaste et plus délicate à la fois,
en collaboration avec le gouvernement.
Celui-ci, à qui incombe la conduite de la
guerre, a besoin de pouvoirs extraordinaires.
Les citoyens, et le Parlement lui-même, qui les
représente, s'imposent volontairement une dis-
cipline sévère. Est-ce à dire que nous devions
copier les régimes totalitaires, dans lesquels le
gouvernement agit en dehors et au-dessus de
l'opinion, comme si les hommes n'étaient que
les rouages sans âme d'une machine ? Ce n'est
pas ainsi que nous concevons la discipline
nationale, mais bien comme un travail en com-
mun sous la direction des chefs que le pays se
donne. Travail d'autant plus fécond que chacun
a le sentiment qu'il met librement ses forces au
service du pays. Le rôle du Parlement est de
réaliser cet accord des volontés.
Une telle collaboration est particulièrement
précieuse dans l'ordre économique. L'Etat a
des attributions étendues. Il réquisitionne
usines et produits pour les besoins de l'armée,
répartit la main-d'oeuvre, contrôle les prix, les
profits, les salaires, le commerce extérieur, le
change, etc. Nous avd'ns consenti à ces empiéte-
ments sur nos libertés, dans l'intérêt supérieur
de la patrie. Mais le danger est qu'ils s'étendent
à l'excès, toute administration étant portée par
sa nature à considérer les citoyens comme des
sujets et à restreindre leurs libertés. Si une
direction et une réglementation de l'économie
sont nécessaires, elles dépasseraient leur but si
elles allaient jusqu'à annihiler les initiatives.
« line caserne, une cuisine », cette formule
nationale-socialiste n'est pas française.
On a quelquefois posé cette alternative : ou
le libéralisme ou l'étatisme. On commettrait
une grave erreur en présentant le problème
d'une manière aussi absolue. En temps de
guerre la part de l'Etat grandit nécessairement,
mais celle du citoyen libre ne disparaît pas et
ne doit pas disparaître. C'est affaire de mesure
et de doigté. On a voulu opposer les nouvelles
méthodes économiques de guerre à la politique
qui a été suivie pendant la guerre de 1914. En
réalité il n'y a guère qu'une différence de
degré. Lors du dernier conflit nous avons eu
peut-être trop de laisser-aller. Ne tombons pas
dans l'excès contraire, et essayons de concilier
le pouvoir directeur de l'Etat et l'initiative libre,
de tirer parti de l'une et de l'autre.
Le Parlement, qui défend la liberté, la défen-
dra dans le domaine économique comme dans
le domaine politique. Il retiendra l'adminis-
tration sur la pente de l'étàtisme. Il l'éclairerà
sur les conséquences des contrôles et des règle-
ments. Les- avertissements et les critiques doi-
vent être présentés sans acrimonie, sans esprit
d'opposition, et, au contraire, avec le désir de
rendre service au gouvernement. On ne l'ai-
dera pas en lui cachant ses fautes, en l'enfer-
mant comme dans une tour d'ivoire, avec la
croyance que tout ce qu'il fait est excellent. Le
Parlement le tiendra en contact avec la nation
et avec la réalité. Par là même, il l'empêchera
d'oublier la valeur des initiatives individuelles
et l'engagera à en profiter. Il sauvera cette
flamme de liberté pour laquelle combat la
démocratie française.
LES OPERATIONS
MILITAIRES
COMMUNIQUÉS OFFICIELS FRANÇAIS
DU 8 JANVIER (SOIR)
Rien d'important à signaler.
DU 9 JANVIER (MATIN)
An cours de la nuit, des patrouilles enne-
mies ont été repoussées par nos feux en divers
points.
SUR MER
Vapeur britannique coulé
Le vapeur Cedrington-Court (3,000 tonnes) a
coulé dimanche au large de la côte sud-est de
l'Angleterre, dix minutes après une explosion pro-
voquée probablement par une mine. L'équipage a
été sauvé.
Un bateau suédois est emmené
dans un port allemand
On confirme de Stockholm que le bateau suédois
Kung-Oskar a été amené dans le port de Swine-
mùende, samedi.
Naufrage d'un vapeur allemand
On mande d'Oslo, le 8 janvier :
Un vapeur de la Hambourg Amerika Linie, le
Frankenwald (5,062 tonnes), a talonné, vers 18 heu-
res, samedi, près de Duoltein-Sund, dans lié.
Sognfjord.
.Le vapeur a coulé. L'équipage de 48 hommes et
les deux pilotes norvégiens ont été pris à bord
d'Un contre-torpilleur norvégien et conduits à
Bergen.
SUR LE FRONT
Le général Gamelin
décore des généraux anglais
M. Churchill, premier lord de l'amirauté, qu'ac-
Compagnait son fils, le lieutenant Rudolph Chur-
chill, est arrivé lundi matin au grand quartier
britannique, accompagné par le général Sir Ed-
mund Ironside, chef de l'état-major impérial.
Le général Gamelin et le général Georges se
sont aussi rendus au grand quartier, où un déjeu-
ner offert, par lord Gort,. commandant du corps
- Xpéditionnaire britannique, à réuni ces hautes
personnalités anglaises et françaises.
Le. général Gamelin a remis, avéc le cérémonial
rituel, au général Gort et au général Ironside lés
insignes de grand-croix de la Légion d'honneur qui
leur avaient été conférés par un décret daté du
25 décembre.
Les honneurs étaient rendus par un détache-
ment de zouaves, avec le drapeau et la clique, et
par un détachement d'un régiment de la Garde
anglaise.
En décorant les généraux anglais, le général
Gamelin a adressé une brève proclamation aux
troupes.
Le général Gamelin et le général Georges ont
pris congé" du premier lord de l'amirauté. Les gé-
néraux Gort et Ironside ont accompagné les géné-
raux français à leur train spécial jusqu'au mo-
ment du départ.
En Grande-Bretagne
LE DEBAT DP 16 JANVIER il COMMUES
La démission de M. Hore Belisha
On mande de Londres, 8 janvier :
On assure qu'en dépit des suggestions de cer-
tains députés, le Parlement ne sera pas convoqué
avant l.a date fixée pour sa rentrée, soit mardi
prochain 16 janvier.
Le désir générai d'explication complètes de la
démission du ministre de la guerre reste évident,
et la déclaration que M. Horè Belisha doit faire à
la Chambre des communes est attendu aveo im-
patience.
Le désir général de connaître tous les faits, écrit
le rédacteur politique de la Press Association, est si
puissant qu'il est probable que le gouvernement ne
s'opposera pas à un débat de grande envergure, ce
qui rend de plus en plus douteuse la possibilité d'une
séance secrète. Les questions de politique militaire
seront particulièrement évoquées, car certains préten-
dent que M. Hore Belisha et quelques-uns, tout au
moins, des membres du haut commandement avaient
sur ce sujet des opinions divergentes.
Sir Walter Citrine, secrétaire général du con-
grès des Trades Unions, a pris contact ce soir
avec M. Attlee, chef de l'opposition. Le conseil
national du travail qui se réunira mercredi dé-
cidera s'il doit prendre des mesures pour faire
face à la situation ou attendre le résultat du
débat parlementaire.
Enfin le rédacteur parlementaire de la Press
Association assure que l'organisation démocrati-
que de l'armée et la question de l'augmentation
du nombre des officiers sortant du rang ne sont
pas des sujets de dés accord entre M. Hore Belisha
et les militaires, et ces réformes, tout comme les
autres qui ont été faites par le miinstre, demeu-
reront en vigueur.
Suivant l'Evening Standard, les questions sui-
vantes seront soulevées au cours du débat parle-
mentaire du 16 j.anvier :
1° Quels ont été les points sur lesquels le ministre
et les généraux ont été en conflit?
2° Les généraux se sont-ils adressés directement au
premier ministre par-dessus le ministre de la guerre?
3» Quelle a été l'enquête à laquelle M. Neville
Chamberlain s'est livré sur le conflit avant de décider
de remplacer M. Hore Belisha?
4" Le premier ministre a-t-il jamais eu -l'occasion
de discuter l'incompatibilité de ses vues avec celles
de l'ancien ministre?
5° M. Hore Belisha a-t-il eu l'occasion de résoudre
les difficultés existantes au moyen de mutations?
6° Les milieux militaires ou politiques ont-ils accusé
le ministre de la guerre de manquer de compétence?
Un discours du ministre des fournitures
M. Leslie Burgin, ministre des fournitures bri-
tannique, a prononcé lundi soir à l'adresse de la
France un discours radiodiffusé par des postes
français, où il a dit notamment :
Je sais que le corps expéditionnaire britannique n'est
pas encore très important, mais vous savez que ce
n'est qu'une avant-garde. Le nombre des soldais bri-
tanniques envoyés en France croit chaque jour. Vous
verrez les colonnes succéder aux colonnes. Les Alle-
mands en verront peut-être plus qu'ils ne le voudraient.
Que nos ennemis ne comptent pas seulement nos hom-
mes. Qu'ils pensent à la qualité des canons et des vé-
hicules motorisés; qu'ils se rendent compte de la réso-
lution des hommes.
On nous a promis une guerre totalitaire. Nous avons
relevé le défi et. nous apporterons à la lutte toute la
force et l'énergie de nos réserves financières. Nous
avons anpris avec enthousiasme que la France et l'An-
gleterre sont en train de mettre leurs ressources en
commun. Il n'est pas aisé de mesurer l'étendue des res-
sources de mon pays. Où pouvez-vous trouver dans l,e
monde des ressources dont l'importance, la richesse, la
diversité et la solidité puissent se comparer aux res-
sources britanniques? . . ;ï
Dans le monde de l'armement, l'industrie britannique
travaille nuit et jour à plein rendement afin d'être à
même de satisfaire à la demande gigantesque qu'exige
une guerre avec l'Allemagne. L'effort de guerre de la
Grande-Bretagne ne se confine pas au domaine matériel.
Derrière tout cet effort matériel, il y a l'esprit indomp-
table de l'Anglais, fier, prêt à résister, profondément
patriote, qu'anime un dévouement absolu pour son pays,
son roi, ses coutumes et sa liberté. . .. -?
Nous apportons donc à la cause commune une in-
dustrie qui travaillera de toutes ses forces pour exé-
cuter le programme élaboré par nos chefs. La coopé-
ration de nos deux pays commence à produire son effet.
Considérez les voyages de vos ministres en Angleterre
et des nôtres en France. J'ai moi-même eu le plaisir
n'hésite pas à vous dire que notre accord est aussi
complet que celui qui existe entre nos deux pays.
Mes amis, je suis comme vous inébranlablement con-
vaincu que nous remporterons la victoire. Nous nous
battons à vos côtés, et quelle que soit la violence avec
laquelle l'ennemi se déchaîne contre nous, nous demeu-
rerons fidèles à votre devise et répétons avec vous :
« On ne passe pa6 ».
La réorganisation du service de l'information
Le vice-amiral Usborne a confirmé dans des dé-
clarations à la presse que sa démission des fonc-
tions de censeur principal au service de l'infor-
mation était motivée par le désir de devenir di-
recteur adjoint d'une firme de constructions na^
vales. Il estime qu'en cette qualité il sera plus
utile au pays qu'à son poste de censeur.
L'amiral, qui nourrissait du reste depuis environ
un an le dessein de se consacrer aux constructions
navales, est l'inventeur du filet protecteur contre
les torpilles. Dans l'intérêt national il s'est abs-
tenu de fournir des détails sur les nouveaux tra-
vaux qu'il se proposait de poursuivre.,Il a..tau-
tefois laissé entendre qu'il s'agissait « d'une idée
qu'il avait eue il y a un an et qui était mainte-
nant devenue une très grande chose dont JJ
se « jugeait désormais tenu d'assurer la réalisa-
tion ». ,7-
Le'rationnement
On mande de Londres, 8 janvier :
Pendant que dans toutes les boutiques d'alimen-
tation du Royaume-Uni commençait l'application
du système de rationnement décidé par le gouver-
nement en ce qui concerne le beurre, le sucre et
le bacon, on indiquait ce soir dans les milieux
parlementaires que d'autres mesures suivraient.
On sait déjà que le système du rationnemenl
doit être étendu prochainement aux différentes
viandes de boucherie. Or, on prévoit que d'autres
produits que les denrées alimentaires pourraient
être affectées par les mesures de restriction, no-
tamment les tissus.
Le but essentiel de ces mesures est la consécra-
tion à l'effort militaire de toutes les ressources
qui ne sont pas nécessaires à la continuation de
la vie de la nation. C'est le désir de limiter les
importations aux produits indispensables à la vie
normale du pays, au maintien du commerce d'ex?
portât ion et à la conduite de la guerre qui a ins-
piré le gouvernement dans les décisions qu'il a
déjà prises ou. celles qu'il envisage de prendre en
matière de rationnement.
Questions extérieures
LE jÂPÔN OEVANÏ LES BELLIGERANTS
Il y a longtemps déjà qu'en traitant de la
politique d'Extrême-Orient nous avons pour
la première fois envisagé certaines tendances
ou certains Intérêts qui pouvaient mener à la
formation de groupements auxquels les Occi-
dentaux ne pens -t que rarement.
Pourtant, depuis que les communications
de toute nature permettent la transmission
quasi instantanée des informations à travers
les continents, que la facilité et la rapidité des
voyages permettent à des émissaires qualifiés
d'aller se renseigner sur la situation politique
de n'importe quel pays, fût-il aux antipodes, il
est de plus en plus inconsidéré de limiter
l'observation de la politique étrangère à cer-
taines nations seulement, abstraction faite des
autres. Le rapprochement des peuples, créé par
les nouveaux et multiples moyens de corres-
pondre entre eux et de se voir, entremêle né-
cessairement leurs intérêts et en rend la sau-
vegarde à la fois plus simple et plus compli-
quée, plus facile et plus malaisée.
La politique étrangère doit positivement
embrasser l'ensemble du monde, et jamais
l'obligation de « penser la politique générale »
avant de faire leur politique nationale ne s'est
plus impérieusement fait sentir que de nos
jours aux gouvernements.
En tout cas, si les enquêtes de politique
étrangère offrent une utilité en tout temps, à
plus forte raison au milieu des événements
que nous vivons y a-t-il intérêt à connaître la
position des gouvernements étrangers quels
qu'ils soient, en prévision du rôle que, volens
nolens, ils peuvent être appelés à jouer dans
la guerre actuelle.
On revient, depuis quelque temps, en France
et au dehors, sur l'idée d'une politique que
nous avons qualifiée ici plusieurs fois et ré-
cemment encore de redoutable (Temps du
19 décembre). Ellg consiste en la formation
d'un bloc que, d'après la Gazette de la Bourse
du 31 décembre, le porte-parole de la Wilhelm-
strasse définissait bloc asiatico-européen et qui
comprendrait l'Allemagne, la Russie, le Japon
et l'Italie, « seule façon, ajoutait-il, de déli-
vrer l'Europe de l'empire britannique ».
Nous savons que ce n'est là qu'un voeu-de
fin d'année qui n'est sans doute pas à la veille
d'être exaucé, et plus spécialement, quand
nous avons nous-même envisagé la possibi-
lité de voir se former un bloc asiatico-euro-
péen, nous n'avons jamais pensé qu'il pour-
rait comprendre les quatre puissances sus-
indiquées.
Nous ne songeons pas davantage aujour-
d'hui à en déterminer exactement les partici-
pants; nous voulons seulement mettre l'opi-
nion en garde contre une insouciance selon
nous dangereuse en face de ce qui pourrait-
être préparé à ce sujet.
Il ne saurait être indifférent que le Japon,
PU.R.S.S. et l'Allemagne s'entendissent comme
le souhaitent ces deux dernières.
D'après une information récente, Berlin re-
procherait à son ambassadeur au Japon, le
général Ott, dont nous avons-constaté l'acti-
vite a, Tokio lorsqu'il n'y était encore qu'attaché
militaire auprès de l'ambassadeur Dirksen, de
ne pas, avoir bien conduit les affaires dè son
pays au cours des derniers mois. L'attitude du
Japon dès la signature du pacte germano-
soviétique,/ et certaines tendances qu'il mon-
tre depuis, lors à se rapprocher des démocra-
ties, enfin sa réserve en face des avances de
Moscou, ont grandement déçu le gouverne-
ment de Berlin. Malgré cela les Allemands,
dont la ténacité est connue, se livrent à Tokio
à un travail de propagande acharnée. Or,
quel que soit le nouveau penchant japonais
que nous venons de signaler, il ne faut pas
oublier que les Allemands conservent au Ja-
pon des admirateurs dans les milieux tant
politiques et diplomatiques que militaires.
Le but immédiat de l'Allemagne est moins
d'attirer le Japon dans une alliance militaire
que de le pousser à signer avec l'U.R.S.S. un
accord qui donne à celle-ci sur ses frontières
d'Asie l'apaisement dont elle a besoin, surtout
après son échec en Finlande, pour se tourner
vers l'Europe en toute tranquillité.
Certes, Tokio se méfie, et, pour des raisons
faciles à deviner, dans la période de « deve-
nir » politique où est le monde, évitera de
se lier, préférant conserver son entière liberté
d'action. Cependant les assauts d'amabilité de
Moscou, qui se remarquent dans les tractations
en cours relatives aux pêcheries japonaises
dans les eaux russes et au payement du fa-
meux chemin de fer de l'Est chinois, assauts
encouragés par Berlin, et en même temps les
efforts de la propagande allemande, ne sont
pas choses négligeables, et dont on peut, sans
préjudice, ne pas se soucier.
Penser la politique générale, c'est aussi
« penser la guerre » ; et si toutes les guerres
doivent être pensées, c'est surtout quand une
guerre ne peut vraiment laisser uni seul pays
en parfaite quiétude qu'il est nécessaire de la
penser. Et lorsque la réflexion doit porter sur
le rôle éventuel d'une puissance comme le
Japon, y manquer serait impardonnable.
Mais encore une fois nous ne suggérons
aucun plan, nous ne prétendons à aucun bre-
vet de construction; nous voulons simplement
mettre en garde contre une insouciance dan-
gereuse. Que l'étude de la politique extrême-
orientale soit, si l'on veut, du domaine des
« spécialistes » en temps ordinaire, elle n'est
plus une spécialité lorsqu'elle évolue en fonc-
tion de celle de l'Europe, ou qu'elle peut avoir
sur celle-ci de graves répercussions.
Nous ajouterons que tout ce que nous avons
dit n'implique pas, contrairement à _ ce que
pourraient s'imaginer les gens à systèmes, le
moindre changement dans la politique des dé-
mocraties à l'égard de la Chine.
Lorsque nous montrons l'intérêt que nous
avons tous à regarder le Japon tel qu'il est
aujourd'hui devant les belligérants, sollicité
par nos ennemis, mais prudent à l'extrême,
soucieux de jouer habilement son jeu, troublé
peut-être aussi par des sentiments qui naissent
au fond de son peuple et le rapprochent de
nous, nous n'excluons pas la Chine de notre
amitié. Mais nous voudrions que les deux plus
grandes puissances de cette Asie où, pour sa
part,"la France compte tant de-loyaux sujets
qui se battent pour elle, collaborassent de quel-
que manière à la victoire avec nous et nos
alliés.
ANDRÉ DUBOSCQ.
Menace de crise ministérielle
On télégraphie de Tokio :
L'impression générale dans les milieux politi-
ques est que le sort du cabinet est compromis. La
presse, pour la première fois depuis le début de
la tension politique, prononce le nom du général
Ugaki, qui est arrivé de province et aurait de
nombreux appuis dans l'armée.
La délimitation de frontière
mandchoue-mongole
On télégraphie de Tokio :
On mande de Kharbine à 1'agence Domei que les
pourparlers au sujet de la délimitation des fron-
tières se poursuivent de façon satisfaisante entre
les délégations constituant la commission mixte
nippo-mandchoue et soviéto-mongole.
L'ÀGRESSION SOVIETIQUE CONTRE LA FINLANDE
Les Finlandais écrasent une division russe sur la route
de Raate à Suomussalmi
Le butin, considérable, comprend notamment 102 pièces d artillerie
Le commandement suprême de l'armée finlandaise
a publié, dans l'après-midi du 8 janvier, le communi-
qué suivant sur les opérations:
Les combats mentionnés par le communiqué
finlandais d'hier autour du village de Raate (à
36 kilomètres à l'est de Suomussalmi, et à proxi-
mité immédiate de la frontière, russe) viennent
de se terminer, ce matin, par une victoire écla-
tante des Finlandais, qui ont détruit une division
soviétique sur la route de Suomussalmi à la fron-
tière soviétique.
Il s'agit de la 44° division soviétique. Le butin
fait par les Finlandais et jusqu'à présent dénom-
bré comprend plus de 1,000 prisonniers et un
nombreux matériel. On compte 102 canons de
divers types, 42 chars d'assaut, 10 autos blindées,
20 tracteurs, 27S autos de divers modèles parmi
lesquelles 16 autos de D. C. A. avec mitrailleuses
quadruplées, 46 fusils automatiques et d'autres
armes; 1,170 chevaux ont été pris, et 47 cuisines
voulantes.
Les Finlandais continuent le nettoyage du ter-
rain et le dénombrement du butin.
Ailleurs, le front est relativement calme, à part
l'activité habituelle d'artillerie et de patrouilles.
Sur mer, rien de spécial aujourd'hui.
Dans les airs, sur le front comme à l'intérieur,
la situation est calme. On a seulement observé
quelques avions ennemis, et on ignore encore s'ils
ont jeté des bombes.
On mande d'Helsinki:'
Les détails qui parviennent sur la victoire de
Raate confirment l'étendue du succès finlandais.
Depuis la victoire de Suomussalmi, les combats
s'étaient poursuivis le long de la route étroite
qui, passant par Raate, conduit vers la frontière.
Cette route traverse un pays sauvage, coupé de
forêts à peu près impénétrables.
Après la défaite de la 44e division soviétique,
les forces principales de l'ennemi dans ce secteur
sont considérées comme anéanties.
La récolte du butin augmente d'heure en heure,
à mesure que les Finlandais nettoient le terrain
conquis.
La victoire la plus importante
depuis le début des hostilités
Le correspondant de l'agence Havas à Helsinki mande,
le 8 janvier au soir :
Pour la première fois depuis qu'existent les
hostilités entre la Finlande et l'U. R. S. S., l'on
a distribué dans les rues d'Helsinki, cet après-
midi, un communiqué, et les Finlandais ont des
raisons d'être fiers.
La victoire finlandaise rapportée par le commu-
niqué de cet après-midi est certainement la plus
importante qui ait été enregistrée jusqu'à présent
par lés troupes du maréchal Mannerheim.
En' un peu plus de trois semaines, les Finlan-
dais ont anéanti trois divisions : une à Tolva-
jaervi, la deuxième à Suomussalmi, et la troi-
sième, ces derniers jours, entre Suomussalmi et
Raate.
Une division soviétique représente entre quinze
mille et dix-huit mille hommes. Les prises des
Finlandais en matière de-matériel sont d'une très
grande importance, et le communiqué de cet après-
midi n'en donne qu'une partie. Les troupes sovié-
tiques ont laissé sur la route une énorme quan-
tité de matériel, de chevaux, d'armes de toutes
sortes ét d'équipements divers; bref, tout ce qui
constitue le train de la division soviétique, qui
doit normalement être un bloc compact d'hommes
et de machines, et qui doit garder son homo-
généité en toutes circonstances.
Les Finlandais ont, cette fois encore, opéré uni-
quement par une tactique de patrouilles, coupant
les colonnes de ravitaillement ennemies, surpre-
nant leurs détachements en route ou en recon-
naissance, et prenant sous le feu de leurs armes
automatiques les formations russes chaque fois
que le terrain le permettait»
. Avec les détails obtenus de sources non offi-
cielles, on peut, dès maintenant, tirer quelques
conclusions sur les opérations oui viennent de se
terminer par la victoire finlandaise.
D'abord se pose une question à laquelle on ne
peut encore répondre que par des hypothèses :
alors que les Finlandais taillaient en pièces, au
nord ^e Suomussalmi, la division soviétique (la
163') qui se dirigeait par deux routes vers Suo-
mussalmi, pourquoi la 44« division soviétique
est-elle demeurée en arrière, dans le secteur de
Raate? Peut-être cette division est-elle restée
dans l'expectative, avant de venir soutenir la
division coupée au nord par les Finlandais; cela
est possible. Le fait que la 44" division était, me
dit-on, composée de troupes assez fraîches, per-
met de supposer qu'elle n'est arrivée qu'assez
récemment sur la route et que, encombrée
d'hommes et de matériel, elle s'est trouvée retar-
dée sur cette voie de communication étroite et
difficile.
Il est possible aussi - et cette hypothèse a été
émise par des milieux souvent.bien informés -
que la 44" division soviétique ait montré quelque
mauvaise volonté pour avancer.
Le nombre des prisonniers faits par les Fin-
landais - plus de mille, dit le communiqué, plus
de mille cinq cents, dit-on d'autres sources -
montre que les troupes soyiétiques se sont ren-
dues plus facilement qu'à Suomussalmi, où elles
tentèrent de fuir par la glace du lac de Kianta-
jaervi.
J'apprends en outre un autre détail, digne
d'être noté, au sujet de cette opération : l'aviation
finlandaise a joué un rôle assez important dans
l'affaire de Raate, en détruisant et en harcelant
les campements et les convois soviétiques, parfois
assez loin en arrière, en territoire soviétique.
En résumé, il s'est agi d'une lutte à un contre
dix ou vingt adversaires, où les Finlandais ont
employé à fond leur technique de patrouilles et
d'utilisation du terrain, une affaire de mouve-
ments rapides à travers la forêt ou par la glace
des lacs.
Les conséquences de la défaite soviétique
Les conséquences de cette heureuse opération
peuvent dès maintenant être envisagées.
D'abord, pour les Soviets, elle signifie une
grave perte de prestige moral et militaire à
l'extérieur. Le communiqué soviétique, d'ailleurs,
- ce qui ne surprend personne, - est aujour-
d'hui complètement muet et ne mentionne que
des opérations de patrouilles.
D'.autre part si pour les Soviets ia perte d'une
division ne tire pas à conséquence pour la mar-
che de l'armée rouge, qui a autant de divisions
qu'elle veut, il est probable néanmoins que le
remplacement des troupes soviétiques ne se fera
pas immédiatement, en raison des difficultés de
transport existant actuellement en U. R. S. S.
Par conséquent, pour le moment en tout cas,
tout espoir que les Soviets auraient pu nourrir
pour couper les Finlandais en deux points est
perdu.
Pour les Finlandais, enfin, cet événement ap-
porte un grand réconfort moral. U leur permet-
tra peut-être de libérer quelques-unes de leurs
troupes - très peu nombreuses - afin de faire
face à la pression soviétique possible qui ne peut
manquer de se faire sentir avec violence en d'au-
tres points.
Le communiqué soviétique
L'état-major de la circonscription militaire de
de Léningrad publie le communiqué suivant :
8 janvier. - Aucun événement important. Dans les
régions à l'ouest d'Ouchta, de Repola et de Petroza-
vodsk, actions de .détachements d'éclaireurs.
Dans l'isthme de Carélie, actions d'éclaireurs, tirs de
mousqueterie, de mitrailleuses et d'artillerie.
Par suite du mauvais temps, l'aviation soviétique S
effectué seulement des vols de reconnaissance.
Les exploits des skieurs finlandais
On mande d'Helsinki, le 8 janvier :
Une patrouille de skieurs, dont un certain
nombre jouissent d'une réputation mondiale, a été
interviewée par un correspondant de l'Agence
télégraphique finlandaise.
Dans ce détachement se trouvent le champion
du monde Pauli Pitkanen, les frères Kukkonen et
d'autres skieurs bien connus par leur habileté et
leur vitesse.
Lorsque cette patrouille a été interviewée, elle
venait d'accomplir sa onzième expédition. La pre-
mière a eu lieu il y a trois semaines, et, au cours
de celle-ci, la patrouille réussit à surprendre, der-
rière les lignes soviétiques, une colonne ennemie;
composée de huit attelages traînés par des che-
vaux et dont le chargement comprenait des télé-
phones de campagne. La colonne soviétique ne par-
vint jamais à destination.
En une autre occasion, alors qu'il s'était mis en
route de très bonne heure le matin, et qu'il allait
traverser une clairière dans la forêt, le détache-
ment se trouva en présence de soldats ennemis. Des;
coups de feu furent échangés. Puis, les mitrail-
leuses soviétiques tentèrent de prendre en enfilade
le détachement. La patrouille finlandaise changea
alors rapidement de position. Toute la journée on
tira de part et d'autre et les Finlandais réussirent
à avertir l'artillerie, qui força les soviétiques à se
déplacer. A la tombée de la nuit, les Finlandais
lancèrent une attaque et les soviétiques, qui avaient
commencé déjà à se retirer, malgré les renforts
qu'ils avaient reçus, laissèrent une cinquantaine
de morts sur le terrain.
Un autre champion du monde de ski, dont le nom
est Pekka Vanniven, a rejoint récemment cette
petite formation. Il arriva au détachement un soir
a minuit, et, dans la nuit même, il était avec les
autres sur le terrain. Vanniven effectua un jour
tout seul une reconnaissance autour d'un village
pour connaître le nombre des sentinelles sovié-
tiques. U réussit à regagner les lignes en rappor-
tant des informations précieuses.
On fait remarquer qu'il y a en Finlande un
grand nombre de formations de ce genre; elles ne
comprennent pas toutes des champions, mais toutes
sont composées de skieurs de premier ordre.
Le point faible de la défense finlandaise :
l'aviation de chasse
On mande, d'Helsinki à l'agence Havas, le 8 janvier
Trois méthodes ont été employées successive-
ment par les Soviets pour essayer de réduire à
néant l'indépendance finlandaise : d'abord, les
négociations, avec des tentatives pour obtenir des
conditions telles que l'intépendance de la Finlande
se serait trouvée anéantie.
Puis, ce fut l'attaque en masse sur tous les
points de la frontière, les bombardements des
villes ouvertes et tout ce qu'on sait de la guerre.
Le moral des Finlandais a résisté, et les troupes
finlandaises tiennent victorieusement la frontière.
Maintenant, les Soviets tentent de détruire des
villages à l'intérieur du pays, d'attaquer avec leurs
avions, leurs bombes et leurs mitrailleuses les lieux
qui leur paraissent être des centres industriels.
Us tentent de supprimer les rapports de la Fin-
lande avec l'extérieur. Ils ne s'en vantent pas dans
leurs communiqués, et les pertes qu'ils subissent
dans le domaine de l'aviation du fait que ces opé-
rations sont importantes : il suffit de mentionner
qu'au cours des deux jours de l'Epiphanie, ils ont
perdu vingt avions.
Il est probable que le jour où les Finlandais dis-
poseront d'une aviation de chasse plus effective et
plus nombreuse que celle qu'ils possèdent actuelle-
ment, ils seront en mesure de donner à l'ennemi
qui attaque leurs foyers et leurs familles, des
leçons plus dures encore que celles qu'ils lui ont
déjà infligées.
L'ASSISTANCE A LA FINLANDE
Appel émouvant
de la Chambre finlandaise
"aux peuples civilisés"
La Chambre des représentants de Finlande a
adressé l'appel suivant au bureau de Genève de
l'Union interparlementaire, pour être transmis
aux divers groupes nationaux de l'Union :
Le -peuple finlandais, qui 6'est efforcé toujours de
vivre en concorde avec les autres peuples et de déve-
lopper une oeuvre pacifique pour son avenir, vient de
subir, de la part de son voisin de l'Est, une agression
brutale dont les causes ne peuvent en aucune façon
être imputées à la Finlande.
Nous avons été forcés de lutter et nous n'avons pas
eu à choisir. Le peuple finlandais combat pour son
indépendance, pour s liberté et pour son honneur.
Nous défendrons la patrie, le foyer, la Constitution
démocratique, la religion, bref, tout ce que les peuples
civilisés tiennent pour sacré.
Pour le moment, nous luttons seuls contre l'ennemi
qui vient d'attaquer notre pays, mais notre combat vise
à défendre la cause commune de toute l'humanité.
Nous avons montré que nous faisons tous nos efforts
dans ce combat et nous croyons que le monde civilisé,
ayant déjà témoigné d'une si grande sympathie pour
notre pays, ne pourra nous laisser lutter seuls contre
un ennemi supérieur en nombre. Notre peuple, qui
constitue l'avant-garde de la civilisation occidentale,
est en droit de s'attendre à un secours actif de la -part
des autres peuples civilisés. C'est à tous ces peuples
que la Chambre des représentants du peuple finlan-
dais adresse cet appel.
La réponse française
Le bureau de Genève de l'Union interparlemen-
taire ayant envoyé au groupe français « l'émou-
vant appel adressé par la Chambre des repré-
sentants de Finlande aux peuples civilisés >> le
président Mario Roustan, sénateur, ancien minis-
tre, a répondu par le message suivant :
Monsieur le secrétaire général,
Nous avons lu avec une émotion profonde le noble
appel de la Chambre des représentants du peuple fin-
landais, que nos collègues et amis du groupe de Fin-
lande vous avaient prié de nous transmettre.
Nous n'avions pas attendu jusque-là pour exprimer
à M. le président Oskari Mantere, ancien ministre, nos
sentiments à l'égard de la nation héroïque qui, dans la
défense de sa liberté et de son honneur, déploie des
vertus surhumaines, qui font l'admiration de l'univers.
J'avais ajouté que les parlementaires français gar-
daient la conviction que chacun des peuples qui
avaient promis aide et assistance à la Finlande, auraient
à coeur de tenir leurs engagements solennels, et que
la France comme son alliée l'Angleterre, mettrait sa
gloire à donner l'exemple.
Par la voix du chef de son gouvernement, la France
a répondu, ces jours derniers, que, dans le cadre des
dispositions du pacte, et suivant les formes prévues
par lesdites dispositions, elle remplirait jusqu'au bout
son devoir d'assistance envers la Finlande, brutalement
et odieusement attaquée. Elle ajoutait que les actes
avaient précédé les paroles, et que l'accomplissement
de ce devoir était commencé.
Les parlementaires français de l'Union, sans dis-
tinction de parti, sans restriction, sans réserve, aide-
ront leur gouvernement dans cette tâche, Ils ne négli-
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