Titre : Le Temps
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1940-01-07
Contributeur : Nefftzer, Auguste (1820-1876). Fondateur de la publication. Directeur de publication
Contributeur : Hébrard, Adrien (1833-1914). Directeur de publication
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Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 07 janvier 1940 07 janvier 1940
Description : 1940/01/07 (Numéro 28603). 1940/01/07 (Numéro 28603).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
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Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 18/01/2011
QUATRE-VINGTIEME ANNEE. ~ N° 28.603
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DIMANCHE 7 JANVIER 1940
I'OHBA.TBUR ! Auguste NEPPTZER, (isai)
ANCOEITS DIIOECTETJRS I
Adrien KÉBRARD (ias7-tsi4)
Emila KCÉnBRAjRD (1015-1825)
Adrien. HÉBRARD isas-teas}
XJOXJXS-MIIJXJ (1838-1S31)
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CHÈQUE POSTAL t Paria, Numéro 60
1>AGE 2
1L'Agression soviétique contre la Finlande. -
Nouvelles àe l'Etranger] - Nouvelles du jour.
- La Vie économique.'.
PAGE 3
Au jour le jour : Un ministre démocratique, RENÉ-
JEAN.- Echos et informations.- Les Specta-
cles : Théâtres; Cinémas. - La T. S. F.
V PAGE 4
LA JOURNÉE : DERNIÈRES NOUVELLES. - Les Opé-
rations militaires. - Le Nouveau cabinet belge.
-- Le Remaniement ministériel en Grande-Bre-
tagne. - Lettre de Grèce : Une politique de
vigilance. - Revue de la Presse.
Paris, le 6 janvier 1940
BULLETIN DU JOUR
L'ITALIE ET LA HONGRIE
Le comte Csaky, ministre des affaires étran-
gères dp Hongrie, est arrivé hier à Venise, où
il a aujourd'hui avec le comte Ciano, ministre
des affaires étrangères d'Italie, un important
échange de vues. On a voulu présenter le
-séjour du'comte Csaky à Venise comme étant
d'ordre privé; mais il tombe sous le sens que
dans les circonstances internationales actuel-
les le voyagé du ministre des affaires étran-
gères magyar offre nécessairement un réel in-
térêt politise»-l'Italie et la Hongrie étant- éga-
lement attentives, pour de multiples raisons,
au cours des événements qui affectent les inté-
rêts de l'un et l'autre pays. Il est certain que
Je comte Giano et le comte Csaky, qui n'ont
pas pris directement contact depuis le début
des hostilités, me manqueront pas de sujets
de conversation. Leur entretien peut avoir des
répercussions directes et indirectes sur l'en-
semble de la situation dans le Sud-Est de
l'Europe.
L'Italie et la Hongrie ont partie liée depuis
nombre d'années, et leur action diplomatique
respective est toujours étroitement concertée
entre Rome et Budapest. La Hongrie est l'alliée
de l'Italie fasciste dans cette Europe danu-
bienne où, depuis l'annexion de l'Autriche au
Reich et l'anéantissement de la' Tchécoslova-
quie, la puissance fasciste a dû sacrifier à
l'amitié allemande ses positions avancées. L'e
gouvernement de Rome trouve à Budapest son
plus sûr point d'appui pour le maintien et le
développement de son .influence dans cette
partie du continent. D'autre part la Hongrie
est reconnaissante à l'Italie de l'avoir tirée de
l'isolement où elle se trouvait rejetée après la
guerre mondiale et d'avoir soutenu la cause
magyare aux heures les plus difficiles de la
consolidation de l'ordre existant en pays hon-
grois. Il est donc assez naturel que Budapest
et Rome veuillent agir parallèlement, surtout
dans les circonstances présentes où la collu-
sion germano-russe et la superposition de l'axe
Berlin-Moscou à l'axe Rome-Berlin créent aux
deux gouvernements des préoccupations iden-
tiques. Les Hongrois, qui ont: fait une tragique
expérience" dû'coïnmunisme à l'époque de Bela
Kun, ont tout lieu de s'inquiéter de l'éventualité
d'une forte poussée soviétique en direction du
Danube et des Balkans, conjuguée avec la poli-
tique d'expansion de l'Allemagne hitlérienne
qui est à proprement parler une politique de
conquête et de domination. ' Une hégémonie
partagée germano-russe sur ces régions impli-
querait nécessairement la fin de toute indé-
pendance magyare et L'asservissement écono-
mique total de la Hongrie. Pour l'Italie une
coopération germano-russe en Europe danu-
bienne et dans les Balkans ne serait pas moins
grave si elle devait se traduire par une rapide
avance sur un terrain que l'on considère à
Rome comme réservé principalement à l'in-
fluence, italienne. Les dirigeants fascistes ont
trop de finesse pour ne pas comprendre que
l'idée d'un partage à trois - Allemagne, Russie
et Italie - du Sud-Est du continent est sin-
gulièrement dangereuse en soi, l'impérialisme
bolcheviste et l'impérialisme nazi visant la
domination totale des Balkans, des Détroits et
même du Proche-Orient à leur seul bénéfice.
Dans une combinaison à trois l'Italie se trou-
verait réduite par la force des choses à une
part minime et, à un rôle secondaire dont la
fierté latine ne pourrait guère s'accommoder.
H est donc dans la logique des choses que
le gouvernement de Rome s'efforce de s'assurer
certaines, positions avant que la partie germano-
russe ne s'engage définitivement, et c'est par
.le concours de la Hongrie qu'il a des chances
d'y réussir. Indépendamment de la commu-
nauté des. intérêts italo-hongrois telle qu'elle a
été établie par lé. protocole de Rome, il y a
maintenant un lien moral nouveau entre
l'Italie et la Hongrie : c'est leur égale hostilité
fondamentale à la .Russie bolcheviste. En
somme, Rome et Budapest reprennent à leur
compté, la doctrine, du pacte antikomintern que
Berlin a sacrifié, .^délibérément à son amitié
nouvelles avec Moscou. C'est une base pour une
politique"activé "dans les circonstances actuelles
répondant au Sentiment profond des deux na-
tions. Il est vrai que cette politique se trouve
gênée par le fait de l'amitié italo-allemande
et hungaro-allemande, laquelle subsiste en dé-
pit du révirement soudain de l'orientation de
l'action générale du Reich hitlérien. On a peine
à concevoir que l'Italie et la Hongrie puissent
réagir ouvertement et énergiquement contre Ja
poussée de la Russie soviétique alors que l'Al-
lemagne est effectivement devenue l'alliée de
celle-ci. Si la collusion germano-russe devait se
transformer en alliance militaire, comme d'au-
cuns le supposent, l'Italie et la Hongrie se trou-
veraient placées devant une situation absolu-
ment nouvelle qui lés obligerait, par souci de
leurs propres intérêts, â faire un choix net et
catégorique.
: L'évolution de la politique italo-hongroise
est d'ailleurs commandée par des facteurs
d'ordre moral et psychologique qu\ ne sont
pas moins importants que les intérêts'politi-j
que s et économiques que les deux puissances
ont à sauvegarder. Nul n'ignore plus que la
destruction de l'Etat tchécoslovaque, l'agres-
sion contre la Pologne, et à cette heure l'agres-
sion russe . contre la Finlande entreprise^ de
toute évidence d'accord avec Berlin, ont vive-
ment ému l'opinion italienne, et ont créé de
l'autre côté des Alpes un climat assez nouveau.
De son côté là Hongrie demeure fortement
troublée par le fait que l'Allemagne a con-
senti l'avance de l'armée rouge jusqu'à la
frontière polono-hongroise, créant ainsi pour
les Magyars le danger que comporte tout con-
tact direct avec la Russie soviétique. Les Hon-
grois, qui entretenaient traditionnellement des
relations très cordiales avec la nation polo-
naise, ne sont pas restés indifférents au sort
réservé à cette dernière par l'agression alle-
mande, et c'est surtout à Budapest, enfin, que
l'attaque rUssé contre la Finlande a provoqué
la plus vive indignation, le peuple magyar et
le peuple finlandais, qui se réclament d'une
origine ' commune et se sentent apparentés,
ayant toujours eu les relations, les plus ami-
cales et les plus confiantes. Il y a là un ensem-
ble de problèmes que le comte Giano et le
comte Csaky ne peuvent manquer d'exami-
ner d'une manière approfondie, ce qui ne sau-
rait être indifférent pour les développement
de la situation générale. .., ;
POUR LA CLARTÉ
Le peuple finlandais continue d'opposer à
l'agression soviétique une résistance dont il
ne suffirait pas que le monde civilisé admirât
passivement l'héroïsme et l'efficacité. L'exem-
ple que ce petit pays donne à tous les peuples
I libres doit les inciter à apporter à la Finlande,
et à lui apporter le plus tôt possible, l'aide la
plus active et le concours le plus entier. La
France, en ce qui la concerne, s'est empressée
de déférer à cet égard à l'invitation de la
Société des nations, et a pris l'engagement de
seconder par tous les moyens en son pouvoir
les magnifiques soldats: qUi, à un contre cent
ou contre mille, tiennent toujours tête aux
hordes moscovites.
Cependant une équivoque subsiste, dont il y
I a lieu de signaler à la fois l'anomalie et le
danger.
Les relations de la France et de la Russie
subsistent, tout comme si Moscou n'était pas
l'agresseur d'un pays envers lequel nous
nous acquittons loyalement de toutes les obli-
gations du pacte. Sans doute les Soviets n'ont
pas officiellement déclaré la' guerre à la Fin-
lande ; mais cette grossière fiction, qui ne
trompe personne, a été certainement inspirée
au gouvernement de M. Staline par le propos
de tenir le plus longtemps possible la France
et l'Angleterre à l'écart du conflit. L'équivoque,
ici, sert donc le dictateur du Krémlin, et "nè sert
que lui. On conviendra que ce n'est pas une
raison pour que nous nous y prêtions plus
longtemps. i'
En réalité, depuis le pacte Hitler-Staline,
depuis la participation éhontée de la III' Inter-
nationale au cinquième partage de la Pologne,
depuis la collusion des Soviets et du national-
socialisme dans l'entreprise de vassalisation
de l'Europe par le fer et par le feu, les rela-
tions diplomatiques entre la Russie et les démo-
craties occidentales sont devenues sans objet.
De. Londres et de Paris à Moscou, en effet,
qu'a-t-on à se dife ? Et que sert de se parler ?
Les « valeurs » que nous défendons, Moscou
les combat. Les peuples dont la liberté'nous
importe autant que la nôtre, Moscou les a
asservis ou cherche à les asservir. Le droit des
nations, la foi jurée des traités, jusqu'à cette
pudeur élémentaire qui s'oppose d'elle-même
aux abus de la force et aux . excès de la vio-
lence, Moscou les bafoue, alors que - nous
n'avons pas hésité à subir une guerre pour en
imposer le respect. Cette Allemagne, enfin, qui
a voulu et provoqué la guerre, qui a déchaîné
sur l'ancien continent le malheur, la misère
et la mort, n'a trouvé que la Russie pour con-
sentir à lui servir de second, à étreindre sa
main sanglante. Pourquoi, dans ces conditions,
s'obstiner dans une fiction que l'évidence fait
apparaître' comme un mensonge ? Pourquoi
s'accommoder d'un voile que la réalité déchire
de toute part ?
Il ne suffit pas, au surplus, de dire que les
relations diplomatiques avec la Russie sont
devenues sans objet. Leur maintien constitue
pour nous, en effet, un indéniable péril exté-
rieur en même temps qu'un péril intérieur cer-
tain. Sur le plan international, les neutres
favorables à notre cause (c'est-à-dire presque
tous) ne manqueraient pas de s'étonner, à la
longue, de nous voir conserver des : rapports
avec un pays et un régime dont tous les actes
sont contraires aux buts de guerre de l'Entente..
Le pacte Hitler-Staline a aliéné à l'Allemagne
d'activés sympathies et l'a peut-être aussi pri-
vée de puissants concours ; une rupture Paris-
Moscou agirait dans le même sens, pourrait
pousser certains hésitants à « reconsidérer »
à nouveau certains problèmes. D'autre part, à
l'intérieur, le communisme, traqué par toutes
les rigueurs de Ja loi, devenu l'ennemi public
n" 1, bénéficie lui aussi de la continuation de
l'équivoque. Quel bon sens y a-t-il à entretenir
un ambassadeur dans la capitale de la III* In-
ternationale, à souffrir sur le territoire de la
République l'ambassadeur des Soviets, alors
que les tenants de la III* Internationale èt les
complices des Soviets n'ont chez nous de
rapports qu'avec la police judiciaire et lës tri-
bunaux répressifs ? j
. Dans une situation telle que celle qui est
aujourd'hui la nôtre, dans une guerre où les
valeurs morales jouent le rôle que l'on sait, la
clarté est notre meilleure .arme, l'équivoque
est notre pire ennemie, au dedans aussi bien
qu'au dehors démos frontières. En ce qui con-
cerne nos rapports diplomatiques avec la
Russie, dissipons l'équivoque, rétablissons la
j clarté. Chacun dans son camp, chacun à sa
place, pour ou contre le droit, pour ou contre
îa morale internationale, pour ou contre la
liberté. Les amis de nos ennemis, les ennemis
de nos amis ne sont pas nos amis. La Russie
rouge, dans l'immense conflit qui oppose la
civilisation à la barbarie, , a revendiqué sa
pleine liberté, et en use. Qu'attendons-nous
pour reprendre la nôtre ?
LES OPÉRATIONS
MILITAIRES
COMMUNIQUÉS OFFICIELS FRANÇAIS
DU 5 JANVIER (SOIR)
. ' - . . . »r . l: i~ -
c* .
Rien d'important à signaler.
DU 6 JANVIER (MATIN)
Activité habituelle des patrouilles et de
l'artillerie.
DANS LES AIRS
Protestation belge à Berlin
, On mande de Bruxelles :
Le vicomte Davignon, ambassadeur de Belgique
à Berlin, a été chargé de protester énergiquement
auprès du gouvernement du Reich contre les sur-
vols du territoire belge, qui ont été de nouveau
effectués jeudi par des avions allemands.
| NAISSANCE D'UN POÈME |
? Dans Je dernier roman de M. François Mauriac, j
les Chemins de la mer, un jeune poète nous livrait
quelques fragments du Sang d'Atys... Nous ne
doutions point que ce jeune poète ne fût le portrait
de ..Mauriac adolescent. Le Sang d'Atys, entier et
parfait, nous est offert pour nos étrennes dans i
la Nouvelle Revue française. Si l'on imagine que,
sur épreuves, il a reçu les suprêmes retouches,
voilà;l'enfant de nombreuses « nuits d'Idumée »,
unëv distillation de plus de trente années... La fa-
meuse comparaison de l'oeuvre humaine et du
fruit de l'arbre, rajeunie par M. Paul Va-
léry - « Chaque atonie de silence - Est
la chance d'.un fruit mûr... », - n'est pas
tout, a fait exacte. L'arbre ne connaît pas le doute,
. lès hésitations, les sacrifices, les refontes, qui sont
les misères et la noblesse des créations 'de l'es-
prit. Il met d'abord toutes les cellules à leur place
avec une infaillibilité qui émerveille, mais qui
manque un,peu de pathétique. Le labeur du poète
? est -de plus én plus semblable à celui de l'alchi-
miste. - « l'alchimie du verbe » - qui , recom-
mence mille fois lës mélanges et les dosages. Bien
des gens trouveront que cette façon de procéder,
si différente des beaux délires, immédiatement
productifs, des maîtres abondants du passé, est
bien laborieuse... Mais le temps de ? ce qu'on a
appelé 1' « inspiration » et l' « enthousiasme »
reviendra-t-il ? Pour moi. qui n'espère plus, d'ici
1|: fin, voir naître soudain une Iliade, un Jocelyn,
line première Légende des siècles ou des Poèmes
barbares, je vois avec émotion naître ces quatre
cents vers presque sans défauts, plus exquis, peut-
être, que profondément originaux, dont je vais
essayer de me mettre mes préférés dans la mé-
moire. « Atys dont les cheveux sentent l'herbe
- Mon souffle les'soulève et, tremblante, \
je vois - De reptiles dressés ta tête auréolée... »
Il y a beaucoup de vers parnassiens dans le Sang
d'Atys.'Et quelques-uns qui, à l'excès, rappellent
Samain; mais le meilleur Samain, celui d'Aux
flancs du vase. Il y en a de valéryens; par exem-
ple Le mensonge et le silence, - Les soldats
de mon destin, - Appuyés sur une lance - Mon-
tent leur garde sans fin... » Tels font penser à
Heredia : « Reine à l'immense front [c'est la
terre, c'est Cybèle] que les tristes marées -
Ceignent de varech noir, de méduses moirées... »
Mais on en rassemblerait, les plus beaux, et en
même temps les plus voluptueux, qui annonçaient,
bien le troublant Mauriac : « Atys, tu me brûlais
de ta petite bouche... Le doux trait des sourcils
sur ta paupière brune... » Et cette description des
membres d'Atys dormant étendu sur la terre :
« Deux serpents déliés qui feignent d'être morts...»
Le serpent occupe le premier.rang dans le bestiaire
de l'auteur du Noeud de vipères 1.
Atys et Cybèle. L'homme et la nature; le tenté
et la tentatrice. La nature amoureuse de l'homme,
qui lui refuse une âme, qui la nie, pour qui elle
n'est que le reflet de sa pensée, - « Tu ruisselles
de mes. pleurs, - Tu n'es rien, lu n'es personne... »
Ce « personne ». est déjà un cri de chrétien qui
met l'âme humaine, le moi de chacun, au-dessus
d3 tout. Atys préfère la nymphe Sangaris; on l'en
excuse fort bien. Leur amour, leur premier geste
d'amour, emplit Cybèle de jalousie et d'un dégoût
tout extraordinaire chez une déesse phrygienne...
« Mes branches s'égouttaient sur la double tor-
peur, - Sur le double sommeil. de cette chair
ùsouillée,- D'où montait lè parfum de Ip. terre
mouillée... » Les caresses de Sangarîs étaient-elles
si répugnantes? « Et le vol titubant de sa petite
bouche - Erre sans se poser sur un visage en
feu... » Pourtant, Atys - « repu », dit avec hor-
reur le poète - se sent en état de péché. « Les
coups sourds de son coeur » scandent son premier
remords. Oh ! l'adolescent de Talence, et cette an-
goisse qui le poursuit; plus belle peut-être si elle
est inutile!... Le voici mutilé; le voici changé en
pin, tendu vers le ciel, « vers l'azur, dont l'abîme
- Recèle, un pur amour, inconnu de nos dieux... »
Cybèle croit le posséder. Ses raoines, ses « mem-
bres profonds jouiront de leur crime - Dans la
nuit de mon corps que j'ai fermé sur eux... »
Pour le terrible bonheur de M. Mauriac il faut
que les plantes mêmes soient péoheresses; et il
leur bâtirait un enfer. Mais Atys ressuscite par
milliers. Les landes et les cités sont peuplées
d'Atys. Et le grand vainqueur de Cybèle, c'est
l'Atys mutilé volontaire, qui prie agenouillé dans
la- poussière, l'enfant « maigre et dur » qui ne
connaît que les délices mystiques... Pour celui-là,
Cybèle n'est plus rien, que la poussière d'où sur-
giront, aU jour du Jugement, les milliards de
morts. Cybèle ne durera que par la résurrection
des corps... Je veux bien. Cette péroraison, atten-
due, ne satisfera que ceux qui ne cherchent plus,
parce qu'ils ont déjà trouvé. Pour moi, je récon-
cilierais volontiers les deux Atys, le païen, dont le
silex eut tort, et le maigre et chaste enfant à la
Croix. L'un et l'autre nous sont des images de
douceur : douceur de vivre, dans l'ignorance et
les jouissances permises par ses dieux; miséri-
corde-et espérance... Tout beau poème est actuel.
Celui de M, Mauriac nous suggère qu'il y eut d'au-
tres Atys et des mythologies plus noires. Maudit
soit TAtys-Siegfried qui ne s'est pas mutilé; et
qui créé pour détruire!
ROBERT KEMP.
SUR LE FRONT
L'inspection du corps expéditionnaire anglais
Sir Victor Warrender, sous-secrétaire d'Etat
financier au War Office et Sir James Grigg, sous-
secrétaire d'Et.at permanent au War Office, sont
arrivés vendredi au grand quartier britannique
en France. Ils y passeront quelques jours comme
hôtes, de lord Gort, commandant du corps expé-
ditionnaire. Ils viennent étudier ^ les conditions
d'existence du corps expéditionnaire et l'ensem-
ble de la situation militaire.
Lé capitaine Balfour, sous-secrétaire d Etat de
l'air, s'est rendu, de son côté, en France, ou il
a'inspecté les principales bases aériennes.
Ces visites font suite à celle récemment faite
par M. Hore-Belisha, alors ministre de la guerre.
SUR MER
L'Allemagne continue à poser des mines
magnétiques
Selon un correspondant de la Press Association,
l'Allemagne continue, par intermittences, à poser
dPS ' mines Magnétiques, mais en nombre moins,
considérable depuis quelque temps. Des sous-
marins et des hydravions ont été employés à les
semer.
Cuirassé britannique en réparation
Le rédacteur naval de la Press Association
annonce que l'on procède rapidement à la répa-
ration du cuirassé britannique de la classe Que en
Elisabeth qui fut récemment atteint par une tor-
pille d'un sous-marin allemand, au large des
côtes d'Angleterre. Il ajoute que l'avarie est pas
grave et que le navire reprendra bientôt la mer.
L'internement du « Tacoma »
On télégraphie de Montevideo :
A la suite d'une tentative d'évasion de cinq ma-
telots de l'Admiral-Graf-Spee, qui avaient été re-
cueillis par le Tacoma, les autorités ont pris pos-
session militairement du pétrolier, où vingt ma-
rins armés montent désormais une garde, perma-
nente. '
tEMÏ MINISTÉRIEL EH GRANDE-BRETAGNE
DÉMISSIONS DE M. HORE BELISHA
ET DE LORD MACMILLAN
M. Hore Belisha, ministre de la guerre, et lord
Macmillan. ministre de l'information, ont donné
leurs démissions qui ont été. acceptées.
M. Oliver Stanley, secrétaire du Board of Trade
(ministre du commerce), a été désigné comme
ministre de la guerre en remplacement de M. Hore
Belisha.
Sir Andrew R.-A. Duncan remplacera M. Stan-
ley au Board of Trade, tandis que Sir John Charles
Walsham Reith a été désigné comme ministre de
l'information en remplacement de lord Macmillan.
LA LETTRE DE DÉMISSION
DE M. HORE BELISHA
La lettre adressée par M. Hore Belisha à |
M. Chamberlain, dans laquelle le ministre de la
guerre annonce sa démission, est rédigée dans les
termes suivants :
Mon cher premier ministre,
J'aurais voulu pouvoir accepter l'important
poste que vous avez eu la bonté de m'offrir dans
le gouvernement remanié,-mais, pour les raisons
que. je vous ai données oralement ce matin, je
regrette que cela me soit impossible.
: Je donnerai, cependant, comme il est naturel,
tout mon appui à la conduite la plus ferme de la
guerre jusqu'à la victoire finale. Je suis heureux
de savoir qu'il n'existe entre nous aucune diver-
gence de vues sur la politique à suivre.
Quant à nos relations personnelles> je me sou-
viendrai de l'amitié que vous m'avez portée au
cours des années durant lesquelles nous avons
collaboré ensemble, au ministère de la guerre,
où j'étais chargé de la réorganisation et la pré-
paration de l'armée pour la guerre; j'ai pu comp-
ter sur votre coopération pleine de compréhension,
dans la tâche qui m'était assignée.
Bien cordialement à vous.
HORE BELISHA.
Le premier ministre a répondu à M. Hore
Belisha :
Mon cher Leslie,
C'est avec un très grand regret que j'ai reçu
votre décision de ne pas accepter le poste que je
vous ai offert au cours du remaniement ministé-
riel auquel je procède actuellement. Mais, d'autre
part, je comprend parfaitement et je respecte les
raisons que vous m'avez données.
Je voudrais qu'il me soit maintenant permis de
rendre un hommage sincère à l'oeuvre que vous
avez accomplie au ministère de la guerre, et aux
importantes réformes que vous y avez appliquées.
Ce m'est une grande satisfaction de savoir qu'il
n'y a pas aujourd'hui, et qu'il n'y a jamais eu,
aucune divergence entre nous sur la politique à
suivre, et particulièrement sur la nécessité de
poursuivre la guerre avec la plus complète déter-
mination, jusqu'à son succès final.
: Je voudrais aussi vous remercier pour l'aide
loyale .que vous m'avez toujours apportée, et pour
Cfis relations personnelles gui ont, au cours de
?tant- tannées, caractérisé notre association..
I $ Fidèlement vôtre,
NEVILLE CHAMBERLAIN.
LA LETTRE DE M. MACMILLAN
Lord Macmillan, ministre de l'information, a
adressé la lettre que voici à M. Neville Chamber-
lain, premier ministre :
Mon cher premier ministre,
;. Vous avez été assez bon pour me dire que les
modifications prochaines (dans le cabinet) que
vous aviez en vue, aussi bien que les difficultés
provenant du fait que je ne siège pas à la
Chambre des communes, rendraient opportun que
je mette mon portefeuille à votre disposition.
Je ne voudrais pas un seul moment faire
obstacle à une mesure quelconque destinée à ren-
forcer le cabinet et je m'en remets volontiers à
vous.
J'avoue que c'est avec quelque regret que
j'abandonne la tâche que vous m'aviez fait l'hon-
neur de me confier au début de la guerre, car
je l'ai trouvée pleine d'intérêt et, en dernier lieu,
promettant d'être encore beaucoup plus utile.
Mais je me souviendrai toujours avec plaisir de
ma brève expérience du pouvoir sous votre
direction.
Sincèrement vôtre :
-C._ . MACMILLAN.
M. Chamberlain a répondu à lord Macmillan en
ces termes :
uMon cher Macmillan,
I-'Je. vous remercie de votre lettre du S janvier,
par laquelle vous me faites savoir que vous êtes
prêt à mettre votre poste à ma disposition dans
le but de faciliter d'autres remaniements du
gouvernement et de mettre fin à l'embarras dont
vous avez souffert en raison du fait que vous
n'avez pas été à même de prendre la parole pour
défendre votre ministère à la Chambre des
communes. ' '
Permettez-moi de vous dire sans plus attendre
combien j'apprécie le dévouement à la chose pu-
blique qui vous a incité à prendre la plume,
dévouement dont vous avez si évidemment fait
preuve lorsque je vous ai demandé de vous
charger d'une tâche nouvelle et extrêmement
difficile.
. .Je vous suis aussi reconnaissant des efforts que
vous avez faits pour améliorer l'organisation et
le rendement du ministère. A mon avis, vous avez
beaucoup fait pour remédier aux défauts qui
étaient peut-être inévitables dans le cas d'un
organisme nouveau ? et compliqué qui devait être
mis en oeuvre le plus rapidement possible.
J'espère qu'il sera maintenant possible de bâtir
le ministère sur les fondations que vous avez
posées, jusqu'à ce qu'il réponde à ce qu'on en
attend.
. .Il me faut cependant reconnaître l'importance
de la représentation de cet organisme à la
Chambre des communes, et il se peut que la tâche
qui reste à accomplir soit facilitée si le porte-
feuille est entre les mains d'un ministre qui peut
plaider sa propre cause à la Chambre.
Bien qu'avec grand regret,' j'ai donc décidé que
le parti que je dois prendre est de soumettre
votre démission à Sa Majesté.
'NEVILE CHAMBERLAIN.
tes causes de la démission de M. Hore Belisha
On mande de Londres à l'agence Havas :
On rappelle, au sujet de la démission dé M. Hore-
Belisha, qu'au cours des dernières semaines le
bruit avait couru que la question de savoir si
l'arme aérienne du corps expéditionnaire britan-
nique devait demeurer indépendante ou être pla-
cée sous le contrôle du grand quartier général de
l'armée aurait fait l'objet d'une controverse entre
le ministère de la guerre et le ministre de l'air.
La question avait été soulevée il y a un an à la
Chambre des communes lorsque la décision fut
prise de donner à la marine le contrôle de son
arme aérienne. M. Hore Belisha avait alors dé-
claré que rien de semblable n'était envisagé en ce
qui concernait l'armée et l'aviation, entre les-
quelles existait d'ailleurs la coopération la plus
étroite.
Il semble que la controverse ait été récemment
reprise sous une forme plus aiguë, à la. suite de
l'expérience acquise au cours des premiers mois
de guerre. L'armée aérienne, a-t-on fait remar-
quer, doit s'acquitter de tâches purement mili-
taires, essentielles à la conduite de la guerre, et
par conséquent elle devrait faire partie intégrante
de l'armée comme l'armée aérienne de la flotte
fait partie de la marine.
M. Hore Belisha n'avait fait aucune allusion à
sa démission au cours d'une réunion à laquelle
il assistait hier soir, peu avant que la nouvelle fût
rendue publique. Il est demeuré dans son bureau
du War Office aussi tard que de coutume et a
reçu des communications téléphoniques jusqu'à la
dernière minute.
Lorsqu'il a quitté le ministère de la guerre, un
reporter se trouvait près de sa voiture. Le minis-
tre, après lui avoir dit qu'il n'avait rien à ajouter
à la lettre qui était déjà remise à la presse, a-sim-
plement ajouté : « Bonsoir et au revoir. »
S/*" - T " \
Les nouveaux ministres britanniques
Le nouveau ministre de la guerre, M. Olivier
Stanley, actuellement souffrant d'un léger refroi-
dissement, est le fils de lord Derby. Il est âgé de
quarante-trois ans. Son père avait occupé le même
poste en 1916. Avocat, et député aux Commîmes
pour la circonscription de West Moreland depuis
1924, M. Stanley, qui au cours de la grande guerre
avait été décoré de la « Military Cross » et de la
médaille militaire française, a été successivement
ministre des transports de 1933 à 1934, ministre
du travail de 1934 à 1935, ministre de l'éducation
de 1935 à 1937 et ministre du commerce de-
puis 1937.
Sir Andrew Duncan, qui remplace M. Stanley
au Board of Trade, est âgé de cinquante-cinq ans.
Il a été, depuis la déclaration de guerre, chargé
du contrôle de la fourniture des munitions. Pré-
sident du comité exécutif de la Fédération britan-
nique des industries sidérurgiques, Sir Andrew est
un des directeurs de la Banque d'Angleterre et
des « Impérial Chemical Industries ».
Sir John Reith, ancien directeur de la British
Broadçasting Corporation (service national de ra-
diodiffusion), est âgé de cinquante ans. Avant
d'être nommé ministre de l'information, il avait
été pendant plusieurs années président de la
compagnie des transports aériens « Impérial Air-
ways ».
Dans les milieux parlementaires anglais, on
considère comme significatif que M. Chamberlain,
dans son désir de nommer les hommes les plus
qualifiés aux postes importants rendus vacants
, par les démissions précédemment annoncées, ait
fait le choix de deux hommes qui ne siègent pas
au Parlement : Sir Andrew Duncan et Sir John
Reith. Il est probable qu'aux élections partielles
qui pourront éventuellement avoir lieu ces deux
nouveaux ministres seront désignés comme can-
| didats par le gouvernement. Ces élections, en
| vertu de la trêve entre les partis politiques dé-
cidée dès la déclaration de guerre, ne sont géné-
1 ralement pas disputées maintenant.
LES COMTES CSAKY ET CIANO VONT CONFERER A VENISE
La Hongrie
' s'apprêterait à poser à la Roumanie
la question d'une revision territoriale
^ entre les deux pays
Notre correspondant particulier à Rome nous télé- I
phone samedi matin, 6 janvier :
Le comte Ciano est parti hier soir de Rome
pour Venise. On prévoit que le premier entre-
tien entre les deux ministres des affaires étran-
gères se déroulera aujourd'hui, au cours de
l'après-midi.
... A lire attentivement la presse italienne et sur-
tout les dépêches qu'elle reçoit de Budapest, il
semble que la Hongrie juge le moment opportun
pour une action décisive dans le sens d'un règle-
ment de ses rapports avec la Roumanie. Elle
serait même sur le point de faire savoir une fois
de plus ouvertement, officiellement, que la ques-
tion en jeu entre la Hongrie et la Roumanie n'est
pas celle d'un statut nouveau pour les groupes
ethniques magyars en Transylvanie, mais celle
d'une -révision territoriale entre les deux pays. Il
s'agirait, ainsi, de soulever la question la plus dif-
ficile, la plus délicate qui existe à cette heure
entre Budapest et Bucarest.
te, Quelle est. cependant, à l'heure où une menace
.'tragique plane sur les Balkans, la raison princi-
pale , qui pousse Budapest à juger le moment
opportun pour poser le problème en de tels
-.termes ? Il n'y a qu'une seule réponse. Si le gou-
vernement hongrois agit de la sorte, c'est parce
qu'il a la ferme conviction que la menace russe
doit porter à un règlement rapide des contro-
verses entre les peuples de l'Europe sud-orien-
tale, aux fins d'une entente commune contre le
danger bolcheviste. Quoi qu'il en soit, Budapest
Jugerait que la situation internationale met à
l'ordre du jour la question des frontières ma-
gyare-roumaines et que le moment est venu de
l'examiner.
Les rapports hungaro-yougoslaves
Quant aux rapports entre la Hongrie et la You-
goslavie, une correspondance de Budapest au
Corriere délia Sera les envisage sous un angle de
vue tout nouveau. Après avoir déclaré que les
chefs croates, Matchek en tête, représentent à
Belgrade un élément décisif pour les directives
de la politique étrangère yougoslave, cette cor-
respondance affirme qu'ils se prononcent pour
une collaboration intime de la Yougoslavie avec
l'Italie et la Hongrie et, pour diverses raisons,
sont opposés au maintien de liens trop étroits
avec la Roumanie.
Bref, si l'on se fonde sur la presse italienne, le
problème qui sera examiné, a Venise, avec le
plus d'attention, sera celui de l'organisation des
rapports hungaro-roumains et hungaro-yougo-
slaves, d'un côté, avec les rapports italo-hongrois
de l'autre. Cependant, aucun acte diplomatique,
aucun instrument politique nouveau n'est prévu.
Une entrevue Mussolini-Csaky, lundi ( ?)
On mande de Budapest à l'agence Havas, le 5 janvier:
On rappelle ici que le départ du comte Csaky
pour l'Italie s'est effectué après qu'il eut assisté
a un conseil des ministres au cours duquel tous
les problèmes d'actualité furent envisagés.
D'autre part, le comte Csaky avait reçu, au
cours de la semaine précédente, les représen-
tants diplomatiques de Hongrie à Londres, à Pa-
ris et en d'autres capitales, qui avaient fait leur
rapport verbal.
Enfin, la presse, sur la base d'une information
d'origine allemande, annonce que M. Mussolini
recevra lundi le comte Csaky.
Un article du comte Teleki
Voici quelques extraits de l'article du comte
Paul Teleki, président du conseil, à l'occasion de
la nouvelle année. [Article publié par les trois
journaux gouvernementaux Függetlenség, Ma-
gyarorszag, Uj Magyarsag] :
i L'année qui vient de s'écouler a été marqué par un
événement très important pour la Hongrie: la reoc-
cupation de la Subcarpathie, région non habitée par
des Hongrois.
Mais a-t-on bien compris la nature des événements
survenus et qui ne 6ont point la conséquence de la
campagne révisionniste hongroise? L'idée de revision
n'a pas encore mûri dans l'opinion des pay6 européens.
La première cause de ces événements fut l'Anschluss,
dont les traités de paix de Paris portaient le germe,
ainsi que je l'ai dit en 1921 à un des dirigeants de la
France. Il est impossible d'admettre la nationalité
comme principe fondamental pour la constitution et
l'avenir d'un Etat tout en créant un petit Etat allemand
à côté d'une grande Allemagne sans qu'à brève échéance
la force d'attraction entre les deux se fasse sentir.
EN ALLEMAGNE
la nomination de Goering
à la tête de l'économie allemande
On télégraphie de Berne
Les pleins pouvoirs donnés par Hitler au ma^
réchal Goering, pour diriger toute l'économie de
guerre allemande créent une union personnelle
entre le conseil ministériel pour la défense du
pays, dont Goering est le président, et l'économie
de guerre proprement dite. C'est une mesure plus
organique qu'effective, car elle constitue, en réa-
lité, un retour au plan de quatre ans, qui s'était
un peu relâché, du fait que la direction de la
Reichsbank avait'été confiée au docteur Funk, mi-
nistre de l'économie du Reich. Il n'en est pa^
moins vrai que la situation du maréchal Goering
s'en trouve encore consolidée.
D'après le correspondant à Berlin des Basler
Nachrichten, la super-organisation confiée au ma-;
réchal Goering sera présidée par un conseil général
de l'économie de guerre, qui comprendra, outre
le maréchal, le secrétaire d'Etat Korner, l'un de
ses plus intimes collaborateurs, ainsi que le lieu-
tenant-général Thomann, attaché au commande-
ment suprême de l'armée et l'un des spécialiste?
du plan de quatre ans.
Quant au docteur Funk, dont les pouvoirs se
trouvent diminués par la nouvelle mission confiée
à Goering, le correspondant berlinois de la National
Zeitung estime qu'il se consacrera plus spéciale-
ment à la réalisation du projet 'annoncé de'
1' « épargne forcée » ét qu'il établira bientôt dans
ce sens un vaste programme,
(Havas.)
Les difficultés d'approvisionnement
en carburants
On télégraphie de Bruxelles :
A propos des difficultés croissantes que le Reich
rencontre pour s'approvisionner en carburants,
des rapports établis par des techniciens de l'aéro-
nautique et parvenus récemment d'Allemagne dans
certaines capitales neutres, donnent à penser que
cette question tend, effectivement, de plus en plus,
à devenir une des préoccupations essentielles des
dirigeants allemands.
Ceux-ci sont particulièrement inquiets de cons-
tater les effets de l'usage d'huiles synthétiques -.
les stocks d'huiles naturelles étant tout à fait in-*
suffisants - dans les moteurs d'avions. L'usure
de ceux-ci est deux ou trois fois plus rapide, avec
les huiles synthétiques qu'avec les produits natu-
rels. Ce serait une des raisons pour lesquelles le
Reich n'aurait pas osé, jusqu'ici, passer à la
« guerre totale » avec actions aériennes massives*
Quelles que soient en effet les capacités de pro-
duction de ses usines de constructions aéronau-
tiques, l'Allemagne hésiterait à mettre en ligne une
partie importante de ses forces aériennes, tant
que l'usage quasi-obligatoire des huiles de syn-
thèse l'expose à des dechets « par usure » extrê-
mement importants et rapides, sans parler des
autres pertes. Ce serait également une des raisons
pour lesquelles le Reich pourrait être amené à
tenter un effort désespéré, pour vaincre le blocus,
soit en appuyant encore sa politique d'intimida-
tion à l'égard de certains pays neutres, dans le
Nord et à l'Occident, soit en cherchant à prendre
des gages dans le Proche-Orient.
Interdiction d'écouter les postes
de T. S. F. étrangers
On télégraphie d'Amsterdam : â
A Memel, treize ouvriers agricoles lituaniens,
employés dans une ferme, ont été condamnés,
bien qu'étrangers, à des peines allant de un
mois de travaux forcés à plusieurs mois de pri-
son, pour avoir écouté les émissions françaises
et anglaises en allemand.
Un restaurateur de Hambourg, âgé de cin-
quante-deux ans, a été condamné à trois mois
de travaux forcés pour avoir écouté, à plusieurs
reprises et intentionnellement, des postes étran-
gers de radiodiffusion.
L'interdiction d'écouter les postes étrangers est
complétée par une circulaire ordonnant à tous les
débits et restaurants du Reich de diffuser régu-
lièrement et de façon perceptible les émissions
d'information des postes allemands. Une note
officieuse constate avec indignation que les clients
continuent de parler entre eux pendant ces émis-
sions. Il est enjoint, en conséquence, aux con-
sommateurs de les écouter en silence. Les débits
et restaurants devront apposer des affiches très
apparentes pour les y inviter.
Le Reich et les neutres
On télégraphie de Berne
Il faut croire que l'accusation de complicité
avec les belligérants, portée par un organe offi-
cieux berlinois contre les neutres pour le seul
fait qu'ils font partie de la Société des nations
n'a pas, à première vue, la répercussion qu'on
en attendait à Berlin, car la Wilhelmstrasse a
cru devoir attirer l'attention des diplomates et
des journalistes sur la prétendue importance de
cette manoeuvre.
Quelle idée ont, derrière la tête, les officieux
allemands ? Le slogan de « soi-disant Etat neu-
tre », lancé par Hitler dans sa proclamation de
fin d'année - écrit le correspondant berlinois
des Basler Nachrichten, - slogan qui est repris
dans la manoeuvre officieuse signalée, retient
l'attention de certains milieux neutres. On y voit
une intention et l'indication que la diplomatie
allemande va s'efforcer de dissocier les neutres
de la France et de l'Angleterre, en se servant
comme prétexte de la Société des nations.
D'autre part, la manoeuvre ébauchée à Ber-
lin tendant à interpréter la qualité de membre
de la Société des nations comme un indice d'hos-
tilité contre l'Allemagne serait-elle une préface
à de nouvelles pressions et à de nouvelles me-
naces ?
LA NEUTRALITÉ DE LA YOUGOSLAVIE
Déclaration de M. Markovitch
On télégraphie de Belgrade :
Dans une déclaration que publiera demain le
numéro spécial de Noël orthodoxe de Politika,
M. Markovitch, ministre des affaires étrangères,
réaffirme la politique de neutralité de son pays
et rappelle les initiatives de médiation prises
par lui dans le dessein de détendre les rapports et
d'écarter toutes les causes de conflit entre les
peuples du bassin danubien et des Balkans.
Si notre indépendance n'est pas menacée, dit notam-
ment M. Markovitch, si nos intérêts vitaux peuvent
être sauvegardés sans qu'il nous soit besoin de recourir
aux armes, - et nous sommes convaincus qu'il en
sera ainsi, - nous serions impardonnables de ne pas
entreprendre tout ce qui est en notre pouvoir pour
épargner à notre pays la guerre et ses conséquences.
Dans le même numéro de Noël, la Politika
publie aussi une déclaration du général Voyn
Maximovitch, inspecteur de la défense nationale,
exprimant sa foi en l'armée yougoslave pour la
défense du pays.
Les voeux de M. Matchek
On télégraphie de Zagreb :
A l'occasion de la Noël orthodoxe, les journaux
publient un message adressé au peuple serbe par
M. Vlatko Matchek, vice-président du conseil. Le
chef croate y dit notamment :
Nous fêtons cette année Noël dans de bien meilleures
dispositions que les autres années, parce que nous
avons, il y a quelques mois, rejeté de nos positions
le lourd fardeau de la discorde entre frères. Le peuple
croate et le peuble serbe se sont préparés eux-mêmes
un meilleur Noël en établissant la paix chez eux.
Cette paix que nous avons réalisée chez nous est
la meilleure garantie pour que, en ce qui nous con-
| cerne, notre paix soit respectée à l'extérieur aussi.
On s'abonne aux Bureaux du Journal, 5, RUE DES ITALIENS^ PARIS (9e), et dans tous les Bureaux de Poste
DIMANCHE 7 JANVIER 1940
I'OHBA.TBUR ! Auguste NEPPTZER, (isai)
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Le Journal décline toute responsabilité quant à leur teneur
CHÈQUE POSTAL t Paria, Numéro 60
1>AGE 2
1L'Agression soviétique contre la Finlande. -
Nouvelles àe l'Etranger] - Nouvelles du jour.
- La Vie économique.'.
PAGE 3
Au jour le jour : Un ministre démocratique, RENÉ-
JEAN.- Echos et informations.- Les Specta-
cles : Théâtres; Cinémas. - La T. S. F.
V PAGE 4
LA JOURNÉE : DERNIÈRES NOUVELLES. - Les Opé-
rations militaires. - Le Nouveau cabinet belge.
-- Le Remaniement ministériel en Grande-Bre-
tagne. - Lettre de Grèce : Une politique de
vigilance. - Revue de la Presse.
Paris, le 6 janvier 1940
BULLETIN DU JOUR
L'ITALIE ET LA HONGRIE
Le comte Csaky, ministre des affaires étran-
gères dp Hongrie, est arrivé hier à Venise, où
il a aujourd'hui avec le comte Ciano, ministre
des affaires étrangères d'Italie, un important
échange de vues. On a voulu présenter le
-séjour du'comte Csaky à Venise comme étant
d'ordre privé; mais il tombe sous le sens que
dans les circonstances internationales actuel-
les le voyagé du ministre des affaires étran-
gères magyar offre nécessairement un réel in-
térêt politise»-l'Italie et la Hongrie étant- éga-
lement attentives, pour de multiples raisons,
au cours des événements qui affectent les inté-
rêts de l'un et l'autre pays. Il est certain que
Je comte Giano et le comte Csaky, qui n'ont
pas pris directement contact depuis le début
des hostilités, me manqueront pas de sujets
de conversation. Leur entretien peut avoir des
répercussions directes et indirectes sur l'en-
semble de la situation dans le Sud-Est de
l'Europe.
L'Italie et la Hongrie ont partie liée depuis
nombre d'années, et leur action diplomatique
respective est toujours étroitement concertée
entre Rome et Budapest. La Hongrie est l'alliée
de l'Italie fasciste dans cette Europe danu-
bienne où, depuis l'annexion de l'Autriche au
Reich et l'anéantissement de la' Tchécoslova-
quie, la puissance fasciste a dû sacrifier à
l'amitié allemande ses positions avancées. L'e
gouvernement de Rome trouve à Budapest son
plus sûr point d'appui pour le maintien et le
développement de son .influence dans cette
partie du continent. D'autre part la Hongrie
est reconnaissante à l'Italie de l'avoir tirée de
l'isolement où elle se trouvait rejetée après la
guerre mondiale et d'avoir soutenu la cause
magyare aux heures les plus difficiles de la
consolidation de l'ordre existant en pays hon-
grois. Il est donc assez naturel que Budapest
et Rome veuillent agir parallèlement, surtout
dans les circonstances présentes où la collu-
sion germano-russe et la superposition de l'axe
Berlin-Moscou à l'axe Rome-Berlin créent aux
deux gouvernements des préoccupations iden-
tiques. Les Hongrois, qui ont: fait une tragique
expérience" dû'coïnmunisme à l'époque de Bela
Kun, ont tout lieu de s'inquiéter de l'éventualité
d'une forte poussée soviétique en direction du
Danube et des Balkans, conjuguée avec la poli-
tique d'expansion de l'Allemagne hitlérienne
qui est à proprement parler une politique de
conquête et de domination. ' Une hégémonie
partagée germano-russe sur ces régions impli-
querait nécessairement la fin de toute indé-
pendance magyare et L'asservissement écono-
mique total de la Hongrie. Pour l'Italie une
coopération germano-russe en Europe danu-
bienne et dans les Balkans ne serait pas moins
grave si elle devait se traduire par une rapide
avance sur un terrain que l'on considère à
Rome comme réservé principalement à l'in-
fluence, italienne. Les dirigeants fascistes ont
trop de finesse pour ne pas comprendre que
l'idée d'un partage à trois - Allemagne, Russie
et Italie - du Sud-Est du continent est sin-
gulièrement dangereuse en soi, l'impérialisme
bolcheviste et l'impérialisme nazi visant la
domination totale des Balkans, des Détroits et
même du Proche-Orient à leur seul bénéfice.
Dans une combinaison à trois l'Italie se trou-
verait réduite par la force des choses à une
part minime et, à un rôle secondaire dont la
fierté latine ne pourrait guère s'accommoder.
H est donc dans la logique des choses que
le gouvernement de Rome s'efforce de s'assurer
certaines, positions avant que la partie germano-
russe ne s'engage définitivement, et c'est par
.le concours de la Hongrie qu'il a des chances
d'y réussir. Indépendamment de la commu-
nauté des. intérêts italo-hongrois telle qu'elle a
été établie par lé. protocole de Rome, il y a
maintenant un lien moral nouveau entre
l'Italie et la Hongrie : c'est leur égale hostilité
fondamentale à la .Russie bolcheviste. En
somme, Rome et Budapest reprennent à leur
compté, la doctrine, du pacte antikomintern que
Berlin a sacrifié, .^délibérément à son amitié
nouvelles avec Moscou. C'est une base pour une
politique"activé "dans les circonstances actuelles
répondant au Sentiment profond des deux na-
tions. Il est vrai que cette politique se trouve
gênée par le fait de l'amitié italo-allemande
et hungaro-allemande, laquelle subsiste en dé-
pit du révirement soudain de l'orientation de
l'action générale du Reich hitlérien. On a peine
à concevoir que l'Italie et la Hongrie puissent
réagir ouvertement et énergiquement contre Ja
poussée de la Russie soviétique alors que l'Al-
lemagne est effectivement devenue l'alliée de
celle-ci. Si la collusion germano-russe devait se
transformer en alliance militaire, comme d'au-
cuns le supposent, l'Italie et la Hongrie se trou-
veraient placées devant une situation absolu-
ment nouvelle qui lés obligerait, par souci de
leurs propres intérêts, â faire un choix net et
catégorique.
: L'évolution de la politique italo-hongroise
est d'ailleurs commandée par des facteurs
d'ordre moral et psychologique qu\ ne sont
pas moins importants que les intérêts'politi-j
que s et économiques que les deux puissances
ont à sauvegarder. Nul n'ignore plus que la
destruction de l'Etat tchécoslovaque, l'agres-
sion contre la Pologne, et à cette heure l'agres-
sion russe . contre la Finlande entreprise^ de
toute évidence d'accord avec Berlin, ont vive-
ment ému l'opinion italienne, et ont créé de
l'autre côté des Alpes un climat assez nouveau.
De son côté là Hongrie demeure fortement
troublée par le fait que l'Allemagne a con-
senti l'avance de l'armée rouge jusqu'à la
frontière polono-hongroise, créant ainsi pour
les Magyars le danger que comporte tout con-
tact direct avec la Russie soviétique. Les Hon-
grois, qui entretenaient traditionnellement des
relations très cordiales avec la nation polo-
naise, ne sont pas restés indifférents au sort
réservé à cette dernière par l'agression alle-
mande, et c'est surtout à Budapest, enfin, que
l'attaque rUssé contre la Finlande a provoqué
la plus vive indignation, le peuple magyar et
le peuple finlandais, qui se réclament d'une
origine ' commune et se sentent apparentés,
ayant toujours eu les relations, les plus ami-
cales et les plus confiantes. Il y a là un ensem-
ble de problèmes que le comte Giano et le
comte Csaky ne peuvent manquer d'exami-
ner d'une manière approfondie, ce qui ne sau-
rait être indifférent pour les développement
de la situation générale. .., ;
POUR LA CLARTÉ
Le peuple finlandais continue d'opposer à
l'agression soviétique une résistance dont il
ne suffirait pas que le monde civilisé admirât
passivement l'héroïsme et l'efficacité. L'exem-
ple que ce petit pays donne à tous les peuples
I libres doit les inciter à apporter à la Finlande,
et à lui apporter le plus tôt possible, l'aide la
plus active et le concours le plus entier. La
France, en ce qui la concerne, s'est empressée
de déférer à cet égard à l'invitation de la
Société des nations, et a pris l'engagement de
seconder par tous les moyens en son pouvoir
les magnifiques soldats: qUi, à un contre cent
ou contre mille, tiennent toujours tête aux
hordes moscovites.
Cependant une équivoque subsiste, dont il y
I a lieu de signaler à la fois l'anomalie et le
danger.
Les relations de la France et de la Russie
subsistent, tout comme si Moscou n'était pas
l'agresseur d'un pays envers lequel nous
nous acquittons loyalement de toutes les obli-
gations du pacte. Sans doute les Soviets n'ont
pas officiellement déclaré la' guerre à la Fin-
lande ; mais cette grossière fiction, qui ne
trompe personne, a été certainement inspirée
au gouvernement de M. Staline par le propos
de tenir le plus longtemps possible la France
et l'Angleterre à l'écart du conflit. L'équivoque,
ici, sert donc le dictateur du Krémlin, et "nè sert
que lui. On conviendra que ce n'est pas une
raison pour que nous nous y prêtions plus
longtemps. i'
En réalité, depuis le pacte Hitler-Staline,
depuis la participation éhontée de la III' Inter-
nationale au cinquième partage de la Pologne,
depuis la collusion des Soviets et du national-
socialisme dans l'entreprise de vassalisation
de l'Europe par le fer et par le feu, les rela-
tions diplomatiques entre la Russie et les démo-
craties occidentales sont devenues sans objet.
De. Londres et de Paris à Moscou, en effet,
qu'a-t-on à se dife ? Et que sert de se parler ?
Les « valeurs » que nous défendons, Moscou
les combat. Les peuples dont la liberté'nous
importe autant que la nôtre, Moscou les a
asservis ou cherche à les asservir. Le droit des
nations, la foi jurée des traités, jusqu'à cette
pudeur élémentaire qui s'oppose d'elle-même
aux abus de la force et aux . excès de la vio-
lence, Moscou les bafoue, alors que - nous
n'avons pas hésité à subir une guerre pour en
imposer le respect. Cette Allemagne, enfin, qui
a voulu et provoqué la guerre, qui a déchaîné
sur l'ancien continent le malheur, la misère
et la mort, n'a trouvé que la Russie pour con-
sentir à lui servir de second, à étreindre sa
main sanglante. Pourquoi, dans ces conditions,
s'obstiner dans une fiction que l'évidence fait
apparaître' comme un mensonge ? Pourquoi
s'accommoder d'un voile que la réalité déchire
de toute part ?
Il ne suffit pas, au surplus, de dire que les
relations diplomatiques avec la Russie sont
devenues sans objet. Leur maintien constitue
pour nous, en effet, un indéniable péril exté-
rieur en même temps qu'un péril intérieur cer-
tain. Sur le plan international, les neutres
favorables à notre cause (c'est-à-dire presque
tous) ne manqueraient pas de s'étonner, à la
longue, de nous voir conserver des : rapports
avec un pays et un régime dont tous les actes
sont contraires aux buts de guerre de l'Entente..
Le pacte Hitler-Staline a aliéné à l'Allemagne
d'activés sympathies et l'a peut-être aussi pri-
vée de puissants concours ; une rupture Paris-
Moscou agirait dans le même sens, pourrait
pousser certains hésitants à « reconsidérer »
à nouveau certains problèmes. D'autre part, à
l'intérieur, le communisme, traqué par toutes
les rigueurs de Ja loi, devenu l'ennemi public
n" 1, bénéficie lui aussi de la continuation de
l'équivoque. Quel bon sens y a-t-il à entretenir
un ambassadeur dans la capitale de la III* In-
ternationale, à souffrir sur le territoire de la
République l'ambassadeur des Soviets, alors
que les tenants de la III* Internationale èt les
complices des Soviets n'ont chez nous de
rapports qu'avec la police judiciaire et lës tri-
bunaux répressifs ? j
. Dans une situation telle que celle qui est
aujourd'hui la nôtre, dans une guerre où les
valeurs morales jouent le rôle que l'on sait, la
clarté est notre meilleure .arme, l'équivoque
est notre pire ennemie, au dedans aussi bien
qu'au dehors démos frontières. En ce qui con-
cerne nos rapports diplomatiques avec la
Russie, dissipons l'équivoque, rétablissons la
j clarté. Chacun dans son camp, chacun à sa
place, pour ou contre le droit, pour ou contre
îa morale internationale, pour ou contre la
liberté. Les amis de nos ennemis, les ennemis
de nos amis ne sont pas nos amis. La Russie
rouge, dans l'immense conflit qui oppose la
civilisation à la barbarie, , a revendiqué sa
pleine liberté, et en use. Qu'attendons-nous
pour reprendre la nôtre ?
LES OPÉRATIONS
MILITAIRES
COMMUNIQUÉS OFFICIELS FRANÇAIS
DU 5 JANVIER (SOIR)
. ' - . . . »r . l: i~ -
c* .
Rien d'important à signaler.
DU 6 JANVIER (MATIN)
Activité habituelle des patrouilles et de
l'artillerie.
DANS LES AIRS
Protestation belge à Berlin
, On mande de Bruxelles :
Le vicomte Davignon, ambassadeur de Belgique
à Berlin, a été chargé de protester énergiquement
auprès du gouvernement du Reich contre les sur-
vols du territoire belge, qui ont été de nouveau
effectués jeudi par des avions allemands.
| NAISSANCE D'UN POÈME |
? Dans Je dernier roman de M. François Mauriac, j
les Chemins de la mer, un jeune poète nous livrait
quelques fragments du Sang d'Atys... Nous ne
doutions point que ce jeune poète ne fût le portrait
de ..Mauriac adolescent. Le Sang d'Atys, entier et
parfait, nous est offert pour nos étrennes dans i
la Nouvelle Revue française. Si l'on imagine que,
sur épreuves, il a reçu les suprêmes retouches,
voilà;l'enfant de nombreuses « nuits d'Idumée »,
unëv distillation de plus de trente années... La fa-
meuse comparaison de l'oeuvre humaine et du
fruit de l'arbre, rajeunie par M. Paul Va-
léry - « Chaque atonie de silence - Est
la chance d'.un fruit mûr... », - n'est pas
tout, a fait exacte. L'arbre ne connaît pas le doute,
. lès hésitations, les sacrifices, les refontes, qui sont
les misères et la noblesse des créations 'de l'es-
prit. Il met d'abord toutes les cellules à leur place
avec une infaillibilité qui émerveille, mais qui
manque un,peu de pathétique. Le labeur du poète
? est -de plus én plus semblable à celui de l'alchi-
miste. - « l'alchimie du verbe » - qui , recom-
mence mille fois lës mélanges et les dosages. Bien
des gens trouveront que cette façon de procéder,
si différente des beaux délires, immédiatement
productifs, des maîtres abondants du passé, est
bien laborieuse... Mais le temps de ? ce qu'on a
appelé 1' « inspiration » et l' « enthousiasme »
reviendra-t-il ? Pour moi. qui n'espère plus, d'ici
1|: fin, voir naître soudain une Iliade, un Jocelyn,
line première Légende des siècles ou des Poèmes
barbares, je vois avec émotion naître ces quatre
cents vers presque sans défauts, plus exquis, peut-
être, que profondément originaux, dont je vais
essayer de me mettre mes préférés dans la mé-
moire. « Atys dont les cheveux sentent l'herbe
- Mon souffle les'soulève et, tremblante, \
je vois - De reptiles dressés ta tête auréolée... »
Il y a beaucoup de vers parnassiens dans le Sang
d'Atys.'Et quelques-uns qui, à l'excès, rappellent
Samain; mais le meilleur Samain, celui d'Aux
flancs du vase. Il y en a de valéryens; par exem-
ple Le mensonge et le silence, - Les soldats
de mon destin, - Appuyés sur une lance - Mon-
tent leur garde sans fin... » Tels font penser à
Heredia : « Reine à l'immense front [c'est la
terre, c'est Cybèle] que les tristes marées -
Ceignent de varech noir, de méduses moirées... »
Mais on en rassemblerait, les plus beaux, et en
même temps les plus voluptueux, qui annonçaient,
bien le troublant Mauriac : « Atys, tu me brûlais
de ta petite bouche... Le doux trait des sourcils
sur ta paupière brune... » Et cette description des
membres d'Atys dormant étendu sur la terre :
« Deux serpents déliés qui feignent d'être morts...»
Le serpent occupe le premier.rang dans le bestiaire
de l'auteur du Noeud de vipères 1.
Atys et Cybèle. L'homme et la nature; le tenté
et la tentatrice. La nature amoureuse de l'homme,
qui lui refuse une âme, qui la nie, pour qui elle
n'est que le reflet de sa pensée, - « Tu ruisselles
de mes. pleurs, - Tu n'es rien, lu n'es personne... »
Ce « personne ». est déjà un cri de chrétien qui
met l'âme humaine, le moi de chacun, au-dessus
d3 tout. Atys préfère la nymphe Sangaris; on l'en
excuse fort bien. Leur amour, leur premier geste
d'amour, emplit Cybèle de jalousie et d'un dégoût
tout extraordinaire chez une déesse phrygienne...
« Mes branches s'égouttaient sur la double tor-
peur, - Sur le double sommeil. de cette chair
ùsouillée,- D'où montait lè parfum de Ip. terre
mouillée... » Les caresses de Sangarîs étaient-elles
si répugnantes? « Et le vol titubant de sa petite
bouche - Erre sans se poser sur un visage en
feu... » Pourtant, Atys - « repu », dit avec hor-
reur le poète - se sent en état de péché. « Les
coups sourds de son coeur » scandent son premier
remords. Oh ! l'adolescent de Talence, et cette an-
goisse qui le poursuit; plus belle peut-être si elle
est inutile!... Le voici mutilé; le voici changé en
pin, tendu vers le ciel, « vers l'azur, dont l'abîme
- Recèle, un pur amour, inconnu de nos dieux... »
Cybèle croit le posséder. Ses raoines, ses « mem-
bres profonds jouiront de leur crime - Dans la
nuit de mon corps que j'ai fermé sur eux... »
Pour le terrible bonheur de M. Mauriac il faut
que les plantes mêmes soient péoheresses; et il
leur bâtirait un enfer. Mais Atys ressuscite par
milliers. Les landes et les cités sont peuplées
d'Atys. Et le grand vainqueur de Cybèle, c'est
l'Atys mutilé volontaire, qui prie agenouillé dans
la- poussière, l'enfant « maigre et dur » qui ne
connaît que les délices mystiques... Pour celui-là,
Cybèle n'est plus rien, que la poussière d'où sur-
giront, aU jour du Jugement, les milliards de
morts. Cybèle ne durera que par la résurrection
des corps... Je veux bien. Cette péroraison, atten-
due, ne satisfera que ceux qui ne cherchent plus,
parce qu'ils ont déjà trouvé. Pour moi, je récon-
cilierais volontiers les deux Atys, le païen, dont le
silex eut tort, et le maigre et chaste enfant à la
Croix. L'un et l'autre nous sont des images de
douceur : douceur de vivre, dans l'ignorance et
les jouissances permises par ses dieux; miséri-
corde-et espérance... Tout beau poème est actuel.
Celui de M, Mauriac nous suggère qu'il y eut d'au-
tres Atys et des mythologies plus noires. Maudit
soit TAtys-Siegfried qui ne s'est pas mutilé; et
qui créé pour détruire!
ROBERT KEMP.
SUR LE FRONT
L'inspection du corps expéditionnaire anglais
Sir Victor Warrender, sous-secrétaire d'Etat
financier au War Office et Sir James Grigg, sous-
secrétaire d'Et.at permanent au War Office, sont
arrivés vendredi au grand quartier britannique
en France. Ils y passeront quelques jours comme
hôtes, de lord Gort, commandant du corps expé-
ditionnaire. Ils viennent étudier ^ les conditions
d'existence du corps expéditionnaire et l'ensem-
ble de la situation militaire.
Lé capitaine Balfour, sous-secrétaire d Etat de
l'air, s'est rendu, de son côté, en France, ou il
a'inspecté les principales bases aériennes.
Ces visites font suite à celle récemment faite
par M. Hore-Belisha, alors ministre de la guerre.
SUR MER
L'Allemagne continue à poser des mines
magnétiques
Selon un correspondant de la Press Association,
l'Allemagne continue, par intermittences, à poser
dPS ' mines Magnétiques, mais en nombre moins,
considérable depuis quelque temps. Des sous-
marins et des hydravions ont été employés à les
semer.
Cuirassé britannique en réparation
Le rédacteur naval de la Press Association
annonce que l'on procède rapidement à la répa-
ration du cuirassé britannique de la classe Que en
Elisabeth qui fut récemment atteint par une tor-
pille d'un sous-marin allemand, au large des
côtes d'Angleterre. Il ajoute que l'avarie est pas
grave et que le navire reprendra bientôt la mer.
L'internement du « Tacoma »
On télégraphie de Montevideo :
A la suite d'une tentative d'évasion de cinq ma-
telots de l'Admiral-Graf-Spee, qui avaient été re-
cueillis par le Tacoma, les autorités ont pris pos-
session militairement du pétrolier, où vingt ma-
rins armés montent désormais une garde, perma-
nente. '
tEMÏ MINISTÉRIEL EH GRANDE-BRETAGNE
DÉMISSIONS DE M. HORE BELISHA
ET DE LORD MACMILLAN
M. Hore Belisha, ministre de la guerre, et lord
Macmillan. ministre de l'information, ont donné
leurs démissions qui ont été. acceptées.
M. Oliver Stanley, secrétaire du Board of Trade
(ministre du commerce), a été désigné comme
ministre de la guerre en remplacement de M. Hore
Belisha.
Sir Andrew R.-A. Duncan remplacera M. Stan-
ley au Board of Trade, tandis que Sir John Charles
Walsham Reith a été désigné comme ministre de
l'information en remplacement de lord Macmillan.
LA LETTRE DE DÉMISSION
DE M. HORE BELISHA
La lettre adressée par M. Hore Belisha à |
M. Chamberlain, dans laquelle le ministre de la
guerre annonce sa démission, est rédigée dans les
termes suivants :
Mon cher premier ministre,
J'aurais voulu pouvoir accepter l'important
poste que vous avez eu la bonté de m'offrir dans
le gouvernement remanié,-mais, pour les raisons
que. je vous ai données oralement ce matin, je
regrette que cela me soit impossible.
: Je donnerai, cependant, comme il est naturel,
tout mon appui à la conduite la plus ferme de la
guerre jusqu'à la victoire finale. Je suis heureux
de savoir qu'il n'existe entre nous aucune diver-
gence de vues sur la politique à suivre.
Quant à nos relations personnelles> je me sou-
viendrai de l'amitié que vous m'avez portée au
cours des années durant lesquelles nous avons
collaboré ensemble, au ministère de la guerre,
où j'étais chargé de la réorganisation et la pré-
paration de l'armée pour la guerre; j'ai pu comp-
ter sur votre coopération pleine de compréhension,
dans la tâche qui m'était assignée.
Bien cordialement à vous.
HORE BELISHA.
Le premier ministre a répondu à M. Hore
Belisha :
Mon cher Leslie,
C'est avec un très grand regret que j'ai reçu
votre décision de ne pas accepter le poste que je
vous ai offert au cours du remaniement ministé-
riel auquel je procède actuellement. Mais, d'autre
part, je comprend parfaitement et je respecte les
raisons que vous m'avez données.
Je voudrais qu'il me soit maintenant permis de
rendre un hommage sincère à l'oeuvre que vous
avez accomplie au ministère de la guerre, et aux
importantes réformes que vous y avez appliquées.
Ce m'est une grande satisfaction de savoir qu'il
n'y a pas aujourd'hui, et qu'il n'y a jamais eu,
aucune divergence entre nous sur la politique à
suivre, et particulièrement sur la nécessité de
poursuivre la guerre avec la plus complète déter-
mination, jusqu'à son succès final.
: Je voudrais aussi vous remercier pour l'aide
loyale .que vous m'avez toujours apportée, et pour
Cfis relations personnelles gui ont, au cours de
?tant- tannées, caractérisé notre association..
I $ Fidèlement vôtre,
NEVILLE CHAMBERLAIN.
LA LETTRE DE M. MACMILLAN
Lord Macmillan, ministre de l'information, a
adressé la lettre que voici à M. Neville Chamber-
lain, premier ministre :
Mon cher premier ministre,
;. Vous avez été assez bon pour me dire que les
modifications prochaines (dans le cabinet) que
vous aviez en vue, aussi bien que les difficultés
provenant du fait que je ne siège pas à la
Chambre des communes, rendraient opportun que
je mette mon portefeuille à votre disposition.
Je ne voudrais pas un seul moment faire
obstacle à une mesure quelconque destinée à ren-
forcer le cabinet et je m'en remets volontiers à
vous.
J'avoue que c'est avec quelque regret que
j'abandonne la tâche que vous m'aviez fait l'hon-
neur de me confier au début de la guerre, car
je l'ai trouvée pleine d'intérêt et, en dernier lieu,
promettant d'être encore beaucoup plus utile.
Mais je me souviendrai toujours avec plaisir de
ma brève expérience du pouvoir sous votre
direction.
Sincèrement vôtre :
-C._ . MACMILLAN.
M. Chamberlain a répondu à lord Macmillan en
ces termes :
uMon cher Macmillan,
I-'Je. vous remercie de votre lettre du S janvier,
par laquelle vous me faites savoir que vous êtes
prêt à mettre votre poste à ma disposition dans
le but de faciliter d'autres remaniements du
gouvernement et de mettre fin à l'embarras dont
vous avez souffert en raison du fait que vous
n'avez pas été à même de prendre la parole pour
défendre votre ministère à la Chambre des
communes. ' '
Permettez-moi de vous dire sans plus attendre
combien j'apprécie le dévouement à la chose pu-
blique qui vous a incité à prendre la plume,
dévouement dont vous avez si évidemment fait
preuve lorsque je vous ai demandé de vous
charger d'une tâche nouvelle et extrêmement
difficile.
. .Je vous suis aussi reconnaissant des efforts que
vous avez faits pour améliorer l'organisation et
le rendement du ministère. A mon avis, vous avez
beaucoup fait pour remédier aux défauts qui
étaient peut-être inévitables dans le cas d'un
organisme nouveau ? et compliqué qui devait être
mis en oeuvre le plus rapidement possible.
J'espère qu'il sera maintenant possible de bâtir
le ministère sur les fondations que vous avez
posées, jusqu'à ce qu'il réponde à ce qu'on en
attend.
. .Il me faut cependant reconnaître l'importance
de la représentation de cet organisme à la
Chambre des communes, et il se peut que la tâche
qui reste à accomplir soit facilitée si le porte-
feuille est entre les mains d'un ministre qui peut
plaider sa propre cause à la Chambre.
Bien qu'avec grand regret,' j'ai donc décidé que
le parti que je dois prendre est de soumettre
votre démission à Sa Majesté.
'NEVILE CHAMBERLAIN.
tes causes de la démission de M. Hore Belisha
On mande de Londres à l'agence Havas :
On rappelle, au sujet de la démission dé M. Hore-
Belisha, qu'au cours des dernières semaines le
bruit avait couru que la question de savoir si
l'arme aérienne du corps expéditionnaire britan-
nique devait demeurer indépendante ou être pla-
cée sous le contrôle du grand quartier général de
l'armée aurait fait l'objet d'une controverse entre
le ministère de la guerre et le ministre de l'air.
La question avait été soulevée il y a un an à la
Chambre des communes lorsque la décision fut
prise de donner à la marine le contrôle de son
arme aérienne. M. Hore Belisha avait alors dé-
claré que rien de semblable n'était envisagé en ce
qui concernait l'armée et l'aviation, entre les-
quelles existait d'ailleurs la coopération la plus
étroite.
Il semble que la controverse ait été récemment
reprise sous une forme plus aiguë, à la. suite de
l'expérience acquise au cours des premiers mois
de guerre. L'armée aérienne, a-t-on fait remar-
quer, doit s'acquitter de tâches purement mili-
taires, essentielles à la conduite de la guerre, et
par conséquent elle devrait faire partie intégrante
de l'armée comme l'armée aérienne de la flotte
fait partie de la marine.
M. Hore Belisha n'avait fait aucune allusion à
sa démission au cours d'une réunion à laquelle
il assistait hier soir, peu avant que la nouvelle fût
rendue publique. Il est demeuré dans son bureau
du War Office aussi tard que de coutume et a
reçu des communications téléphoniques jusqu'à la
dernière minute.
Lorsqu'il a quitté le ministère de la guerre, un
reporter se trouvait près de sa voiture. Le minis-
tre, après lui avoir dit qu'il n'avait rien à ajouter
à la lettre qui était déjà remise à la presse, a-sim-
plement ajouté : « Bonsoir et au revoir. »
S/*" - T " \
Les nouveaux ministres britanniques
Le nouveau ministre de la guerre, M. Olivier
Stanley, actuellement souffrant d'un léger refroi-
dissement, est le fils de lord Derby. Il est âgé de
quarante-trois ans. Son père avait occupé le même
poste en 1916. Avocat, et député aux Commîmes
pour la circonscription de West Moreland depuis
1924, M. Stanley, qui au cours de la grande guerre
avait été décoré de la « Military Cross » et de la
médaille militaire française, a été successivement
ministre des transports de 1933 à 1934, ministre
du travail de 1934 à 1935, ministre de l'éducation
de 1935 à 1937 et ministre du commerce de-
puis 1937.
Sir Andrew Duncan, qui remplace M. Stanley
au Board of Trade, est âgé de cinquante-cinq ans.
Il a été, depuis la déclaration de guerre, chargé
du contrôle de la fourniture des munitions. Pré-
sident du comité exécutif de la Fédération britan-
nique des industries sidérurgiques, Sir Andrew est
un des directeurs de la Banque d'Angleterre et
des « Impérial Chemical Industries ».
Sir John Reith, ancien directeur de la British
Broadçasting Corporation (service national de ra-
diodiffusion), est âgé de cinquante ans. Avant
d'être nommé ministre de l'information, il avait
été pendant plusieurs années président de la
compagnie des transports aériens « Impérial Air-
ways ».
Dans les milieux parlementaires anglais, on
considère comme significatif que M. Chamberlain,
dans son désir de nommer les hommes les plus
qualifiés aux postes importants rendus vacants
, par les démissions précédemment annoncées, ait
fait le choix de deux hommes qui ne siègent pas
au Parlement : Sir Andrew Duncan et Sir John
Reith. Il est probable qu'aux élections partielles
qui pourront éventuellement avoir lieu ces deux
nouveaux ministres seront désignés comme can-
| didats par le gouvernement. Ces élections, en
| vertu de la trêve entre les partis politiques dé-
cidée dès la déclaration de guerre, ne sont géné-
1 ralement pas disputées maintenant.
LES COMTES CSAKY ET CIANO VONT CONFERER A VENISE
La Hongrie
' s'apprêterait à poser à la Roumanie
la question d'une revision territoriale
^ entre les deux pays
Notre correspondant particulier à Rome nous télé- I
phone samedi matin, 6 janvier :
Le comte Ciano est parti hier soir de Rome
pour Venise. On prévoit que le premier entre-
tien entre les deux ministres des affaires étran-
gères se déroulera aujourd'hui, au cours de
l'après-midi.
... A lire attentivement la presse italienne et sur-
tout les dépêches qu'elle reçoit de Budapest, il
semble que la Hongrie juge le moment opportun
pour une action décisive dans le sens d'un règle-
ment de ses rapports avec la Roumanie. Elle
serait même sur le point de faire savoir une fois
de plus ouvertement, officiellement, que la ques-
tion en jeu entre la Hongrie et la Roumanie n'est
pas celle d'un statut nouveau pour les groupes
ethniques magyars en Transylvanie, mais celle
d'une -révision territoriale entre les deux pays. Il
s'agirait, ainsi, de soulever la question la plus dif-
ficile, la plus délicate qui existe à cette heure
entre Budapest et Bucarest.
te, Quelle est. cependant, à l'heure où une menace
.'tragique plane sur les Balkans, la raison princi-
pale , qui pousse Budapest à juger le moment
opportun pour poser le problème en de tels
-.termes ? Il n'y a qu'une seule réponse. Si le gou-
vernement hongrois agit de la sorte, c'est parce
qu'il a la ferme conviction que la menace russe
doit porter à un règlement rapide des contro-
verses entre les peuples de l'Europe sud-orien-
tale, aux fins d'une entente commune contre le
danger bolcheviste. Quoi qu'il en soit, Budapest
Jugerait que la situation internationale met à
l'ordre du jour la question des frontières ma-
gyare-roumaines et que le moment est venu de
l'examiner.
Les rapports hungaro-yougoslaves
Quant aux rapports entre la Hongrie et la You-
goslavie, une correspondance de Budapest au
Corriere délia Sera les envisage sous un angle de
vue tout nouveau. Après avoir déclaré que les
chefs croates, Matchek en tête, représentent à
Belgrade un élément décisif pour les directives
de la politique étrangère yougoslave, cette cor-
respondance affirme qu'ils se prononcent pour
une collaboration intime de la Yougoslavie avec
l'Italie et la Hongrie et, pour diverses raisons,
sont opposés au maintien de liens trop étroits
avec la Roumanie.
Bref, si l'on se fonde sur la presse italienne, le
problème qui sera examiné, a Venise, avec le
plus d'attention, sera celui de l'organisation des
rapports hungaro-roumains et hungaro-yougo-
slaves, d'un côté, avec les rapports italo-hongrois
de l'autre. Cependant, aucun acte diplomatique,
aucun instrument politique nouveau n'est prévu.
Une entrevue Mussolini-Csaky, lundi ( ?)
On mande de Budapest à l'agence Havas, le 5 janvier:
On rappelle ici que le départ du comte Csaky
pour l'Italie s'est effectué après qu'il eut assisté
a un conseil des ministres au cours duquel tous
les problèmes d'actualité furent envisagés.
D'autre part, le comte Csaky avait reçu, au
cours de la semaine précédente, les représen-
tants diplomatiques de Hongrie à Londres, à Pa-
ris et en d'autres capitales, qui avaient fait leur
rapport verbal.
Enfin, la presse, sur la base d'une information
d'origine allemande, annonce que M. Mussolini
recevra lundi le comte Csaky.
Un article du comte Teleki
Voici quelques extraits de l'article du comte
Paul Teleki, président du conseil, à l'occasion de
la nouvelle année. [Article publié par les trois
journaux gouvernementaux Függetlenség, Ma-
gyarorszag, Uj Magyarsag] :
i L'année qui vient de s'écouler a été marqué par un
événement très important pour la Hongrie: la reoc-
cupation de la Subcarpathie, région non habitée par
des Hongrois.
Mais a-t-on bien compris la nature des événements
survenus et qui ne 6ont point la conséquence de la
campagne révisionniste hongroise? L'idée de revision
n'a pas encore mûri dans l'opinion des pay6 européens.
La première cause de ces événements fut l'Anschluss,
dont les traités de paix de Paris portaient le germe,
ainsi que je l'ai dit en 1921 à un des dirigeants de la
France. Il est impossible d'admettre la nationalité
comme principe fondamental pour la constitution et
l'avenir d'un Etat tout en créant un petit Etat allemand
à côté d'une grande Allemagne sans qu'à brève échéance
la force d'attraction entre les deux se fasse sentir.
EN ALLEMAGNE
la nomination de Goering
à la tête de l'économie allemande
On télégraphie de Berne
Les pleins pouvoirs donnés par Hitler au ma^
réchal Goering, pour diriger toute l'économie de
guerre allemande créent une union personnelle
entre le conseil ministériel pour la défense du
pays, dont Goering est le président, et l'économie
de guerre proprement dite. C'est une mesure plus
organique qu'effective, car elle constitue, en réa-
lité, un retour au plan de quatre ans, qui s'était
un peu relâché, du fait que la direction de la
Reichsbank avait'été confiée au docteur Funk, mi-
nistre de l'économie du Reich. Il n'en est pa^
moins vrai que la situation du maréchal Goering
s'en trouve encore consolidée.
D'après le correspondant à Berlin des Basler
Nachrichten, la super-organisation confiée au ma-;
réchal Goering sera présidée par un conseil général
de l'économie de guerre, qui comprendra, outre
le maréchal, le secrétaire d'Etat Korner, l'un de
ses plus intimes collaborateurs, ainsi que le lieu-
tenant-général Thomann, attaché au commande-
ment suprême de l'armée et l'un des spécialiste?
du plan de quatre ans.
Quant au docteur Funk, dont les pouvoirs se
trouvent diminués par la nouvelle mission confiée
à Goering, le correspondant berlinois de la National
Zeitung estime qu'il se consacrera plus spéciale-
ment à la réalisation du projet 'annoncé de'
1' « épargne forcée » ét qu'il établira bientôt dans
ce sens un vaste programme,
(Havas.)
Les difficultés d'approvisionnement
en carburants
On télégraphie de Bruxelles :
A propos des difficultés croissantes que le Reich
rencontre pour s'approvisionner en carburants,
des rapports établis par des techniciens de l'aéro-
nautique et parvenus récemment d'Allemagne dans
certaines capitales neutres, donnent à penser que
cette question tend, effectivement, de plus en plus,
à devenir une des préoccupations essentielles des
dirigeants allemands.
Ceux-ci sont particulièrement inquiets de cons-
tater les effets de l'usage d'huiles synthétiques -.
les stocks d'huiles naturelles étant tout à fait in-*
suffisants - dans les moteurs d'avions. L'usure
de ceux-ci est deux ou trois fois plus rapide, avec
les huiles synthétiques qu'avec les produits natu-
rels. Ce serait une des raisons pour lesquelles le
Reich n'aurait pas osé, jusqu'ici, passer à la
« guerre totale » avec actions aériennes massives*
Quelles que soient en effet les capacités de pro-
duction de ses usines de constructions aéronau-
tiques, l'Allemagne hésiterait à mettre en ligne une
partie importante de ses forces aériennes, tant
que l'usage quasi-obligatoire des huiles de syn-
thèse l'expose à des dechets « par usure » extrê-
mement importants et rapides, sans parler des
autres pertes. Ce serait également une des raisons
pour lesquelles le Reich pourrait être amené à
tenter un effort désespéré, pour vaincre le blocus,
soit en appuyant encore sa politique d'intimida-
tion à l'égard de certains pays neutres, dans le
Nord et à l'Occident, soit en cherchant à prendre
des gages dans le Proche-Orient.
Interdiction d'écouter les postes
de T. S. F. étrangers
On télégraphie d'Amsterdam : â
A Memel, treize ouvriers agricoles lituaniens,
employés dans une ferme, ont été condamnés,
bien qu'étrangers, à des peines allant de un
mois de travaux forcés à plusieurs mois de pri-
son, pour avoir écouté les émissions françaises
et anglaises en allemand.
Un restaurateur de Hambourg, âgé de cin-
quante-deux ans, a été condamné à trois mois
de travaux forcés pour avoir écouté, à plusieurs
reprises et intentionnellement, des postes étran-
gers de radiodiffusion.
L'interdiction d'écouter les postes étrangers est
complétée par une circulaire ordonnant à tous les
débits et restaurants du Reich de diffuser régu-
lièrement et de façon perceptible les émissions
d'information des postes allemands. Une note
officieuse constate avec indignation que les clients
continuent de parler entre eux pendant ces émis-
sions. Il est enjoint, en conséquence, aux con-
sommateurs de les écouter en silence. Les débits
et restaurants devront apposer des affiches très
apparentes pour les y inviter.
Le Reich et les neutres
On télégraphie de Berne
Il faut croire que l'accusation de complicité
avec les belligérants, portée par un organe offi-
cieux berlinois contre les neutres pour le seul
fait qu'ils font partie de la Société des nations
n'a pas, à première vue, la répercussion qu'on
en attendait à Berlin, car la Wilhelmstrasse a
cru devoir attirer l'attention des diplomates et
des journalistes sur la prétendue importance de
cette manoeuvre.
Quelle idée ont, derrière la tête, les officieux
allemands ? Le slogan de « soi-disant Etat neu-
tre », lancé par Hitler dans sa proclamation de
fin d'année - écrit le correspondant berlinois
des Basler Nachrichten, - slogan qui est repris
dans la manoeuvre officieuse signalée, retient
l'attention de certains milieux neutres. On y voit
une intention et l'indication que la diplomatie
allemande va s'efforcer de dissocier les neutres
de la France et de l'Angleterre, en se servant
comme prétexte de la Société des nations.
D'autre part, la manoeuvre ébauchée à Ber-
lin tendant à interpréter la qualité de membre
de la Société des nations comme un indice d'hos-
tilité contre l'Allemagne serait-elle une préface
à de nouvelles pressions et à de nouvelles me-
naces ?
LA NEUTRALITÉ DE LA YOUGOSLAVIE
Déclaration de M. Markovitch
On télégraphie de Belgrade :
Dans une déclaration que publiera demain le
numéro spécial de Noël orthodoxe de Politika,
M. Markovitch, ministre des affaires étrangères,
réaffirme la politique de neutralité de son pays
et rappelle les initiatives de médiation prises
par lui dans le dessein de détendre les rapports et
d'écarter toutes les causes de conflit entre les
peuples du bassin danubien et des Balkans.
Si notre indépendance n'est pas menacée, dit notam-
ment M. Markovitch, si nos intérêts vitaux peuvent
être sauvegardés sans qu'il nous soit besoin de recourir
aux armes, - et nous sommes convaincus qu'il en
sera ainsi, - nous serions impardonnables de ne pas
entreprendre tout ce qui est en notre pouvoir pour
épargner à notre pays la guerre et ses conséquences.
Dans le même numéro de Noël, la Politika
publie aussi une déclaration du général Voyn
Maximovitch, inspecteur de la défense nationale,
exprimant sa foi en l'armée yougoslave pour la
défense du pays.
Les voeux de M. Matchek
On télégraphie de Zagreb :
A l'occasion de la Noël orthodoxe, les journaux
publient un message adressé au peuple serbe par
M. Vlatko Matchek, vice-président du conseil. Le
chef croate y dit notamment :
Nous fêtons cette année Noël dans de bien meilleures
dispositions que les autres années, parce que nous
avons, il y a quelques mois, rejeté de nos positions
le lourd fardeau de la discorde entre frères. Le peuple
croate et le peuble serbe se sont préparés eux-mêmes
un meilleur Noël en établissant la paix chez eux.
Cette paix que nous avons réalisée chez nous est
la meilleure garantie pour que, en ce qui nous con-
| cerne, notre paix soit respectée à l'extérieur aussi.
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