Titre : Le Temps
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1934-01-20
Contributeur : Nefftzer, Auguste (1820-1876). Fondateur de la publication. Directeur de publication
Contributeur : Hébrard, Adrien (1833-1914). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 20 janvier 1934 20 janvier 1934
Description : 1934/01/20 (Numéro 26441). 1934/01/20 (Numéro 26441).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
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Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
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Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 15/10/2007
3, <• XI TEMPS, •> 20 janvier 1034 l"11
t. LE TEMPS. 20 janvier 1934
Ira Petite -Histoire
LE MARIAGE DE SUZANNE! CÏfflOD
LD MNiAbtt IJD SUZANNE uuttLttui)
C'était, en 1757, une belle fille de dix-huit
ans « Des yeux bleus, un regard à la fois
candide et assuré, une masse de légers che-
veux blonds, un teint éclatant, une taille élan-
cée et fine. » Mais elle avait un terrible dé-
faut elle était sans dot. Son père, pasteur à
Crassier, près de Divonne un sage, content
de sa médiocrité et tout dévoué à ses ouailles,
avait occupé ses nombreux loisirs à faire de
sa fille une savante. Quand il fut à bout de
sa science, l'enfant, déjà ambitieuse de se
distinguer, continua à s'instruire elle-même, et
on voit encore à Crassier le vieux presbytère,
devenu la gendarmerie, où, tard dans la nuit,
derrière les volets clos, brûlait la lampe de
Suzanne, assidue à lire, et à faire des .extraits
de tous les ouvrages qu'elle parvenait à se pro-
curer. Aussi était-elle fêtée quand sa mère la
conduisait aux fêtes de Nyon ou de Lausanne,
« dont les meilleures familles se disputaient
la présence de cette attrayante et docte per-
sonne »..Bientôt elle fut la reine de res agréa-
bles compagnies, telles que « l'Académie de
la source, la Société du Printemps », où ne
déplaisait pas un certain pédantisme, inter-
mède profitable des jeux et des danses. Les
jeunes gens, eux étudiants de Lausanne ou
candidats pasteurs, appréciaient plus la
beauté, l'entrain et la grâce de Mlle Curchod
que ses connaissances encyclopédiques, et les
gazettes locales eurent souvent à insérer des
madrigaux discrets ou des épîtres d'amour
dont la galanterie témoignait de la s-éduction
inspirée aux muses juvéniles par les charmes
de la fille du pasteur de Crassier. Celui-ci
s'étonnait du nombre de visiteurs qui défi-
laient dans sa maison, faveur que si mo-
deste fût-il il attribuait naïvement à son
bon renom et à la réputation méritée de sa vie
exemplaire.
Mais Suzanne avait l'esprit pratique elle
Savait, par expérience, combien est rude l'exis-
tence d'un ménage réduit à de minimes res-
sources elle se rendait compte de sa propre
valeur, et s'était depuis longtemps résolue à
ne point s'embarquer dans le mariage sans
être pourvue des provisions indispensables à
l'agrément d'un si aventureux voyage. Aussi,
parmi sa cour d'adorateurs, avait-elle remar-
qué un jeune Anglais de vingt ans, nomé Gib-
bon, dont la laideur était « caricaturale » et la
tournure sans élégance, mais qui appartenait
à une famille riche de.Londres. Gibbon, un
peu excentrique, comme tous les Anglais que
l'on rencontrait sur le continent en ce temps-
là, s'était, à Oxford, converti au catholicisme.
Ses parents, rigides protestants, désolés de ce
coup de tête, avaient expédié leur fils chez un
ministre réputé de Lausanne, qui s'engageait à
le « décatholiciser » et à le remettra dans la
bonne voie. Gibbon, féru de contradiction,
ayant écouté docilement les leçons de son ca-
téchiste, déclara que, tout compte fait, étant
instruit des deux religions, il était en mesure
d'en évaluer les mérites, et que décidément il
n'en choisirait aucune et se contenterait d'être,
à l'avenir, « un penseur libre, dégagé de tojite
confession ». Ce trait, qui dénotait tout au moins
un esprit dépourvu d'idéal, aurait dû mettre
Suzanne en garde. Confiante au pouvoir de sa
beauté et de son intelligence, elle se promet-
tait de ramener, quand elle le tiendrait dans
ses filets, cet original à des sentiments plus
normaux, car, au plaisir qu'il prenait mani-
festement à causer avec elle histoire, sciences,
philosophie littérature, économie sociale, lin-
guistique et morale elle savait tout! elle
ne doutait pas qu'il ne finît par tomber un
jour à ses genoux, lui déclarer sa flamme et lui
offrir son nom et sa fortune.
Or, de flamme, Gibbon n'en a aucune; il s'en-
tretient volontiers avec Suzanne parce qu'il lui
trouve l'esprit « nourrissant ». Il est beaucoup
plus pratique encore qu'elle ne l'est elle-même,
et il ne songe pas un instant à s'éprendre de
ce puits de savoir. En vaia use-t-elle de tous les
manèges de la coquetterie, regards langoureux,
allusions transparentes, soupirs, mélancolie,
élans mal comprimés; elle ne lui cache pas
qu'il semble ne point se douter « du prix d'un
cœur dont sa froideur risque de le priver à
jamais »; elle tente de le rendre jaloux; elle
essaie de la bouderie, des pleurs, de l'indiffé-
rence affectée, voire du dédain, des évanouis-
sements, des menaces. Rien ne porte; Gibbon
demeure de glace, et ne paraît même pas s'aper-
jeevoir de la peine qu'elle se donne pour le con-
quérir. Les parents Curchod, tenus au courant
du combat que livre (leur fille, l'encouragent à
persévérer. Le pasteur est usé il sait que ses
jours sont comptés, et il souhaiterait laisser
Suzanne dans une situation de fortune assurée.
On invite donc l'Anglais à Crassier l'aspect
des vénérables vieillards qui souhaitent de
l'avoir pour gendre, le tableau de leur pauvre
et vertueux ménage l'attendriront peut-être.
Non; il n'est pas ému, et les Curchod en sont
pour leurs avances et leur frais d'amabilité. Et
comme Gibbon, mis en demeure de s'expliquer,
s'est enfui en Angleterre, il écrit de là-bas un
mot bref, disant que son vieux père s'oppose
à. son mariage.
Ohl Si ce n'est que ça! Suzanne, prévoyant
nsuiLLETonr du %4Wfê
DU 20 JANVIER 1934
LES CONCERTS
CPLONNE ( Préluda à m conte de fée », de M. Le
Guillard.
WMÛUEEUX Concerto, de M. Georges Dandelot.
«Poème romantique >, de M. Mazelier.
fASDELOUP.
Rien de très sensationnel parmi les nou-
veautés de cette dernière 'quinzaine. Il semble-
rait que, dans l'amoncellement des manuscrits,
les associations symphoniques prissent à tâche
de'ne faire entendre que les moins significa-
tifs. Il y a cependant en ce moment en France
une bonne demi-douzaine de jeunes composi-
fçurs de talent authentique. Je sais bien qu'ils
nu peuvent prétendre, à eux seuls, alimenter
la rubrique relativement considérable des pre-
mières auditions. Est-ce une raison pour les
exclure ? Et ne vaudrait-il pas infiniment
mieux alors, au lieu de jeter en pâture au pu-
blic des productions amorphes, dont le seul
intérêt est d'être entendues pour la première
fois et apparemment la dernière, recou-
rir* aux deuxièmes et même aux troisièmes au-
ditions d'œuvres dont le mérite, dès la pre-
mière, a été unanimement reconnu? Voici, par
exemple, côté France, la belle symphonie de
Pierre-Octave Ferroud, jouée deux fois en qua-
tre ans. Ne serait-il pas logique qu'on l'entendît
au moins une fois par saison, quitte à nous
priver d'une symphonie de Franck sur ia -quin-
zaine annuelle. Voici les exquises Figures so-
ttotes 4e Marcel Delannoy, les Feuilles d'ima-
ges de Louis Aubert, la Danse de Paul Le Flem,
içs Transparences de Jeanne Leleu, le Bal vé-
nitien de Claude Delvincourt, le Divertissement
éarrasin de Henri Martelli, l'Epiphanie d'An-
dré Caplet, d'autres encore que j'oublie. Et,
parmi les « étrangers », la suite si brillante et
pittoresque du Hongrois Tibor Harsanyi, la
Suite grecque de Petridis, la Fantaisie du Rou-
aiain Mihalovici, le concerto de F. Bozza, qu'on
aurait tant de joie à retrouver et qui, tout de
même, méritaient plus que cette flambée d'un
soir chez Straram ou à l'O. S. P.
Ceci, bien entendu, sans parler d'aînées non
moins injustement méconnues comme la troi-
sième symphonie de Guy Ropartz, jamais re-
prise depuis 1906, la symphonie de Witkowski,
celle de Louis Thirion, la suite de Georges
eelle de Loms Th rao ~eg t
Eneseo, toutes oeuvres de beauté éprouvée et
qui viendraient rajeunir des programmes si
désolément désuets que le public, s'il s'éton-
nait de quoi que ce soit, devrait norra-alement
se demander si, en dehors de la -trinité
Beethoven-Wagner-Franck, il existe encore des
musiciens dans cette Atlantide de la musique,
et si leurs productions n'ont pas sombré dans
quelque, cataclysme
l'obstacle, détient une combinaison qu'elle se
hâte de lui exposer. Qu'il revienne, qu'il
l'épouse clandestinement ou non, mais qu'il
l'épouse. Elle le laissera libre de vivre à Lon-
dres et elle restera en Suisse, où, d'ailleurs, il
pourra, tous les deux ans, venir passer près
d'elle deux ou trois mois de la belle saison,
projet qu'elle estime « judicieux », mais qui
ne satisfait pas les Gibbon, ces affreuses gens,
« dont le cœur est si fermé aux choses de
l'amour ». Ils ont avisé Mlle Curchod qu'elle
ait à les laisser tranquilles, qu'on ne recevra
plus ses lettres. Elle en envoie de nouvelles
pourtant, et interminables, et l'on cite d'elle
une missive, de longueur insolite, où elle
s'acharne à dépeindre sa triste situation d'hon-
nête fille "délaissée. Quel feu 1 Quels aveux 1 Si
l'on découvrait une lettre adressée par l'inces-
tueuse Phèdre au farouche Hippolyfe, ce serait
sur ce ton qu'elle serait écrite. Cette lutte se pro-
longea durant quatre ans. Suzanne s'opiniâtrait.
Apprenant que Gibbon, se rendant en Italie,:
allait passer en Suisse,selle résolut de l'y arrêter'
par un barrage décisif, afin qu'il ne quittât pas
le pays sans l'avoir prise pour femme. Elle
le pays sans l'avoir prise 1 p1our1femme. Elle
alerta donc tousses amis, les conjurant de s'unir
à elle pour ce suprême combat. Elle trouva
même le moyen de se metlre en rapport avec
Jean-Jacques Rousseau, alors de séjour au Val-
Travers, le suppliant d'intercéder pour elle au-
près de Gibbon. Elle imaginait que le pres-
tige du père de la Nouvelle Hèloîse qui s'y
connaissait, flui, en choses du cœur amène-
rait à résipiscence l'Anglais buté. On dit que
Jean-Jacques, qui ne se déridait pas souvent,
manifesta une certaine gaieté quand on lui
soumit la supplique de sa jeune concitoyenne.
Gibbon traversa la Suisse sans même soup-
çonner les périls qui l'y menaçaient.
Le pasteur'Curchod mourut en i760; trois ans
plus tard succombait Mme Curchod. Suzanne
restait, à vingt-quatre ans, orpheline et sans
ressources. Elle dut se résoudre à utiliser ses
talents elle fut institutrice et courut le cachet,
sans grand succès, semble-t-il. Le sentiment de
ses déboires aigrissait son humeur; son pédan-
tisme, la trop haute idée qu'elle concevait de
son savoir, rebutaient les enfants. Néanmoins,
Mme de Vermenoux, jeune veuve parisienne,
aimable et gaie, un peu étourdie, sur le point
de rentrer en France après un long séjour à
Genève, confia à Mlle Curchod l'éducation de
son enfant. Voilà donc Suzanne à Paris. Les
familiers de Mme de Vermenoux jugèrent tout
de suite que cette précieuse empesée n'y- réus-
sirait pas. « Avec sa métaphysique et sa coif-
fure, elle aurait dû rester à Crassier. Au nom
du ciel, simplifiez-la! » conseillaient-ils à leur
amie. ̃
Le ciel, en effet, s'en, mêla; non point qu'il
réussît à « simplifier » la roide pédante,
miracle impossible, mais en amenant chez
Mme de Vermenoux un Genevois aussi impor-
tant et sentencieux, aussi guindé, aussi étran-
ger au « tour de Paris » que l'était l'institu-
trice. Il se nommait Jacques Necker, trente-
cinq ans, tournure gauche et gourmée; né d'un
père d'origine prussienne, il avait, très jeun<9,
obtenu un petit emploi à la banque Thélusson,
aux appointements de 600 livres. Une téna-
cité sans défaillance lui valût de gagner la
confiance de ses'patrons; plusieurs opérations,
favorables à la banque, le mirent en vedette,
A présent, il est l'associé des Thélusson et ri-
che de 60,000 livres de rente, chiffre mies-
quin à l'estime de nos contemporains, mais
qui alors classait un financier au nombre des
nababs. Necker fréquentait assidûment chez
Mme de Vermenoux et se posait en suupirant
de cette aimable femme; mais elle, enjouée et
malicieuse, s'épouvantait à l'idée de lier sa vis
à ce pontife syllogistique et sentencieux, qui,
toujours solennel, ne parlait que de lui-même,
de sa vertu et des mystères de l'économie poli-
tique, ne s'exprimant qu'en termes dédaigneux
et péremptoires, dont se dégageait un écra-
sant ennui qui mettait en fuite les commen-
saux de la Dulcinée. Il trouva chez celle-ci une
femme telle qu'il n'en avait jamais rencontré
c'était Suzanne Curchod, qui, elle, « n'ayant pu
gagner château en Angleterre », s'attacha à
la capture de l'opulent banquier. Elle buvait
ses paroles, l'écoutait bouche bée et ne bâillait
jamais. Mme de Vermenoux, heureuse de
n'avoir plus à se pincer pour résister au som-
meil provoqué par l'élocution lourde et pré-
tentieuse de son redoutable prétendant, favori-
sait ces tête-à-tête avec l'institutrice, qui sut
adroitement insinuer à ce confident tombé du
ciel que « leurs deux âmes étaient faites pour
s'amalgamer » et que leur mariage offrirait au
monde le sublime spectacle de « l'union du
génie et de la vertu ». Necker partit pour la
Suisse. Suzanne s'était assuré la connivence
de tous ses amis « Sans un miracle, leur écri-
vait-elle, je désespère du succès. » Le banquier
ne recueillit donc que des renseignements favo-
rables, et à son retour il épousait clandesti-
nement son admiratrice à la chapelle protes-
tante de l'ambassade de Hollande. Mme de
Vermenoux ne fut informée de « l'affaire »
qu'après sa conclusion. Elle était incapable de
rpssentiment; comme elle avait beaucoup d'es-
prit, sa seule vengeance fut un mot piquant
« Ils s'ennuieront tellement ensemble, dit-
elle, que ça leur fera une occupation. »
C'est ainsi que Suzanne Curchod, devenue
Mme Necker, est entrée dans l'Histoire, et
figure, à ce titre, en bonne place dans un livre
récent où M. E. Lavaquery, avec un remarqua-
Et quand par hasard l'inédit choisi vise a
un niveau supérieur à cette musique, disait
Chabrier, « que c'est pas la peine », c'est au
compte-gouttes qu'on nous le débite. Ainsi du
Prélude à un conte de fée de M. Le Guillard, un
jeune musicien connu surtout par un quatuor
et diverses musiques de chambre, que les Con*-
certs-Colonne inscrivaient au programme. Des-
tinée à inaugurer une brève partition, une mu-
sique de scène écrite pour le Quincampoir,
marchand de perles, de Mme J. LavaJl, cette
page se présente bien et présage d'heureuses
subséquences. Des esquisses de thèmes s'y
pressent, se succèdent rapidement comme une
série d'images, évoquant les personnages et
l'action, les uns alertes, d'un esprit caustique
et un peu fuyant qui rappellerait peut-être,
de loin, les Fêles debussystes, les autres, quand
d'aventure l'auteur se prend à rêver, tendres,
expressifs, d'une cordialité charmante. Le tout
très délicatement musical. Et dans l'orchestre
fin et diapré rien qui approche ces sonorités
sèches et rugueuses, ces jazz ou caricatures
de jazz dont on a tant abusé depuis l'irruption
noire en Europe. Le musicien a voulu avant
tout de la musique, et je l'en félicite. Mais il est
dommage que ce soit si court. Au point que
lorsqu'on commence pour de bon à s'intéres-
ser à ces jeux tout est fini et l'attention reste
en suspens. Il me semble qu'on aurait pu cueil-
lir dans la partition un ou deux fragments et
les joindre à cette ouverture musicale, de
manière que l'auditoire pût se faire de l'œu-
vre une idée moins superficielle. Qu'y aurions-
nous perdu? Deux mélodies de Schubert, de
Strauss, ou le scherzo de l'Ut mineur. Nous
n'en sommes pas à cela près. En tout cas, en-
tre deux maux, ne fallait-il pas choisir le
moindre ?.
Le concert avait commencé par la Grotte de
l'ingal, ce mélanoolique tableau d'après na-
ture dont Paul Paray sait ai merveille doser'
les contrastes. Puis M. Vogel avait chanté
d'une voix chaude, émouvante, le très bel
Arioso, tiré de je ne sais quelQe cantate de
Haendel, avant-coureur ou réplique du célèbre
Largo, dont il a l'ampleur et la majesté. Il fut
moins heureux dans l'air de Leporello, qu'il
interprète avec une solennité, une « profon-
deur » quelque peu déplacées. Puis quelle idée
malencontreuse, biscornue, sadique, véritable
idée de ténor encore qu'il s'agisse ici d'un
baryton, de faire accompagner au piano, ce
piano juste supportable comme pis-aller à dé-
faut de tout le reste, accordéon compris, une
œuvre écrite pour orchestre et cela au milieu
de quatre-vingt-dix exécutants qui rongent
leur frein. Mozart, prompt au pardon des in-
jures, ne lui eût pas pardonné celle-ci. Rien de
funèbre comme cette sonorité grêle, banale,
tombant inopinément en éteignoir, tel, au
milieu d'un banquet, un discours de ministre
des finances. Aussi l'enthousiasme qui avait
accueilli l'Arioso s'était-il singulièrement re-
froidi.
Le lendemain M. Georges Kulenkampff exé-
cutait l'intéressant concerto pgnv, yMpn de
ble talent et une érudition des questions fi-
nancières qui demeure toujours aussi claire
qu'agréablement accessible, qualité bien
rare en ces obscures matières, nous conte,
l'ascension de Necker et de sa femme, deve-
nus époux modèles et parents idolâtrés par la
fille exceptionnelle qui fut le fruit de leur
union. (Necker, fourrier de la Révolution, par
E. Lavaquery, i vol.. in-12 avec portraits.) Six
ans après son mariage Necker était ministre
des finances, et la petite Suzanne Curchod ha-
bitait, rue neuve des Petits-Champs, le splen-
dide palais du Contrôle général qu'avait bâti,
pour Hugues de Lionne, l'architecte Le Veau.
Elle trônait là dans les grands salons plafon-
nés d'olympes et lambrissés de boiseries mer-
veilleuses. Elle eut la joie d'y recevoir Gibbon,
l'Anglais dédaigneux de naguère. Il dînait au
Contrôle tous les soirs durant ses séjours en
France, en compagnie de tout ce que Paris
Clôture du débat sur la politique extérieure au Sénat
L'ordre du jour de confiance adopté par 241 voix contre 3
Le débat sur la politique extérieure, qui avait
commencé vendredi dernier et s'était poursuivi
mardi, a été clos par le vote à la presque una-
nimité de l'ordre du jour présenté par M. Henry
Bérenger, président de la commission dos affaires
étrangères, et sur lequel le président du conseil,
en l'absence du ministre des affaires étrangères,
avait posé la question de confiance.
Dans un bref exposé que le Sénat a été una-
nime à applaudir longuement, M. Henry Béren-
ger a indiqué les raisons qui avaient guidé les
signataires de l'ordre du jour fidélité inébran-
lable aux principes posés par le pacte de la So-
ciété des nations; resserrement des liens nous
unissant aux amis qui nous ont aidés à l'heure
du péril; nécessité de ne pas laisser s'affaiblir
nos moyens de défense nationale.
Posant la question de confiance sur cet or-
dre du jour, M. Camille Chautemps, tout en se dé-
fendant de vouloir rouvrir le débat, a assuré que
son gouvernement, comme d'ailleurs ceux qui
l'avaient précédé, était toujours resté fidèle à
ces principes. Il a précisé la situation internatio-
nale créée par l'Allemagne hitlérienne et en face
de laquelle la Franco doit garder son sang-froid
et, aussi, toute sa vigilance. « Les conversations
engagées ne peuvent aboutir que dans le cadre
du pacte de la Société des nations auquel la France
est toujours restée et restera toujours fidèle », a
déclaré le président du conseil, dont le magnif i-
que et utile discours a été acclamé par l'unanimité
de la haute Assemblée.
\A. M. Labrousse
yMïi François Labrousse (Gauche démopratique).,
ne partage ni le pessimisme de M. Millerand ni
l'optimisme de M. de Jouvenel. Il constate cepen-
dant que l'Allemagne réarme en nous demandant
de désarmer. Dans la Sarre, Hitler prépare te
plébiscite par la violence, alors que la France
attend avec sérénité les décisions de Genève et
les résultats du plébiscite.
M. Labrousse. Nous espérons que le gouverne-;
ment veillera à. la stricte observance des pactes, car ils;
sont un gage de paix, aussi bien le covenant que lé
pacte général d'arbitrage, le pacte Briand-Kellogg et
le pacte de Looarno, qui apparaît comme la oharte des
amitiés françaises et de la position juridique de l'Al-
lemagne, qu'elle le veuille ou non.
Quatre ans après Locarno, Hitler réclamait dans Mçln
Kampf une lutte décisive aveo la France dont la des-
truction serait le moyen d'assurer au .peuple allemand
tout son développement.
M. Labrousse est d'avis que Briand, au lieu
d'être « le pèlerin vieilli et sermonneur que cer-
tains affirment », fut « essentiellement un réa-
liste » qui a essayé de tirer du traité de Versailles
toutes Tes possibilités qui y étaient en germe et
qui réclamait la mise en défense de nos fron-
tières dans le même temps qu'il pousuivait son
effort de conciliation.
Le sénateur de la Corrèze déclara que toutes les
difficultés d'après guerre sont dues à Ja carence
de l'Amérique et de l'Angleterre devant le cove-
nant de sécurité. Pour parer à cette carence, fait
remarquer l'orateur, Briand a amené l'Angleterre
et l'Italie à signer le pacte de Locarno qui garan-
tit notre frontière rhénane, pacte qui lie l'An-
gleterre quoi qu'on ait dit.
il. Labrousse. Nous comprenons très bien l'utilité
do conversations loyales, c'est le gouvernement qui est
le juge dernier de la bonne foi de ses interlocuteurs.
Nous lui ferons confiance, convaincus qu'il peut se
mouvoir dans le champ immense qui s'offre à lui tout
en restant fidèle à cette triple loi d'airain respect
intangible du traité de Locarno et de tous nos pactes,
respect intangible de la Société des nations, respect
intangible do toutes, les amitiés qui entourent notre
pays. (Vifs applaudissements.)
M. Paul Laffont
M. Paul Lyf font (Gauche démocratique) cons-
tate que le Sénat est unanime à demander qu'une
conclusion utile soit donnée à ce débat qui gra-
vite autour du réarmement de l'Allemagne. Les
déclarations du ministre des affaires étrangères
n'ont point rassuré le sénateur de l'Arïège, qui
attend du président du conseil les apaisements
et les assurances nécessaires..
Le général Bourgeois et M. Millerand ont montré
que l'Allemagne ne respeotait aucune des stipu-
lajijpns du traité de Versailles. « Après la fail-
Glazounow. Belle séance, d'ailleurs, si l'on
songe qu'elle comprenait des fragmpnts de
Sne;ourotchka, la fougueuse, joyeuse Espaiîa
de Chabrier, et, jouée avec flamme, la seconde
suite de Daphnis et Chloè, ce resplendissant
Lever du jour, cette Danse finale, apothéose,
du mouvement, élue' des dieux, et prédestinée,
au jour du Jugement, à emporter dans sa gira-
tion la population entière de Josaphai. Chef-
d'œuvre de l'auteur des magnifiques Poèmes
de Mallarmé, ou plutôt chef-d'œuvre tout court,
qui, enjambant de négligeables boléros seule
tache dans une collection unique, classe
Maurice Ravel au premier rang des musiciens
^Ivrànts^ Mais ji 'entendrons-nous plus jamais
Daphnis avec les voix ? Paudra-t-il itnporte-r
le chœur, de Bilbao, qui, à l'instigation d'Arbos,
donne de l'oeuvre des exécutions vraiment « in-
tégrales », toutes dimensions respectées, den-
sité comme étendue?
Aux Concerts-Lamoureux, après une exécu-
tion aérienne du scherzo shakespearien aux
amples génitifs, de ces génitifs enfilés à perte
de vue, si antipathiques, entre parenthèses, à
l'auteur des « Cosaques du dont », alias feu
Bremond, abbé de l'Académie, après, dis-je,
l'exécution Du scherzo DU Songe D'une nuit
n'été DE Mendelssôhn, Albert Wolff nous ré-
vélait un concerto pour piano de M. Georges
Dandelot. Auteur pendant plusieurs années de
Chansons de Bilitis postdebussystes qui, à dé-
faut d'une personnalité très accusée, décelaient
du moins un sens harmonique subtil et dont
quelques-unes, transposées à l'orchestre, ga-
gnèrent indiscutablement en accent et en cou-
leur, 1s jeune musicien est enfin parvenu à
s'évader d'un cadre par définition un. peu li-
mité. Ainsi sans transition, que je sache, au-
tre que celle de menus devoirs de classe, il.
saute du simple lied à la symphonie, autant
dire, ou tout au moins à un genre qui, dit-on,
non absolument réussi, peut ne pas valoir un
lied parfait, mais en tout cas exige un peu plus
quant :i l'invention et à la forme. De fait l'œu-
vre de G. Dandelot semble affecter, plutôt que
les formes du concerto proprement dit, celles
plus indépendantes de la symphonie (ce n'est
pas moi qui m'en plaindrai) ou plus précisé-
nient, en raison de ses dimensions restreintes
et malgré l'appât trompeur d'un orchestre par
trois, de la symphoniette. Alors que le concerto
vise à ne mettre au premier plan que la vir-
tuosité, la symphonie y met la musique. Sans
négliger la virtuosité ce qui eût été acte de
pur vandalisme quand on dispose d'une inter-
prète de choix comme Mlle Tagliaferro, l'au-
teur, plus ambitieux, a voulu faire œuvre non
seulement de pianiste mais de musicien.
Il y a dans ce concerto d'heureux passages,
notamment le début, un fugato libre à la ma-
nière du concours des Maîtres dont un motif
s'inspire et avec, bien entendu, les soixante-
dix-sept réglementaires infractions à la règle,
autant clume académique des relatifs Berkmesser.
J'aime moins la seconde idée, idée féminine
comptait d'hommes célèbres en littérature, arts
ou finances, habituels courtisans du ministrs
et de sa femme. Les heures où elle voyait
l'homme qui l'avait refusée assis à sa table,
témoin' de cette réunion d'élite, de l'éclat des
lustres de l'empressement des valets, de la
magnihcence du couvert, durent compter parmi
les plus vaniteuses de sa vie. Quelle glorieuse
riposte aux jours lointains où elle l'avait at-
tiré à Crassier dans l'espoir .qu'il serait sé-
duit par l'intimité du presbytère et la simple
existence qu'y menaient les Curchod M. La-
vaquery raconte qu'un jour, comme Gibbon
vantait devant elle l'heureuse situation d'un
de ses amis, possesseur de 20,000 livres de
rente, Mme Necker prit un air consterné
«Rien que ça? Pas plus de 20,000 livres? »
fit-elle d'un ton de compassion qui sous-enten-
dait « Comment peut-on vivre avec si peu! »
G. Lenotre.
^Tournée parlementaire
lite des réparations, c'est la faillite de la sécu-
rité » déclare l'orateur. « La France, dit-il, ne
doit, ne peut plus diminuer ses armements. »
Quant aux négociations directes avec l'Allema-
gne, M. Paul Laffont demande jusqu'à quel point
on peut avoir loi dans la parole de rA!lemagrie.i
M. Paul Laffont. Nous avons pu mesurer depuis
Bismark et.Stresemann toute la duplicité de l'Alle-
magne. Le Reich d'Hitler n'a point changé le livre
M ein Kampf ne laisse aucune illusion sur ce point
aussi ne peut-on pas trop attendre des conversations
engagées.
En les provoquant, l'Allemagne a voulu faire échec
k la Société des nations en négociant en dehors de
Genève. Déjà, le pacte à quatre était un accroc au pacte
de la Société des nations. Quelques gestes de mauvaise
humeur de nos alliés de l'Europe centrale l'ont bien
montré.
Eh bien I je demande que notre gouvernement reste
fldèle à la Société des, nations.
L'orateur rappelle que la semaine dernière, dans
un discours retentissant, le président Roosevelt
a dijt son admiration pour la Société des nations.
Comme M. Laffont s'étonne que lo gouvernement
Ify&nçais n'ait pas donné son.. adhésion à ce dis-
cours, h; président du conseil déclare que cela
a été fait et qu'il a adressé aussitôt au président
de ta grande République américaine un message,
de reconnaissance et de félicitations.
L'ancien ministre des P.T.T., dont le. discours
a été très applaudi, se dit persuadé que la causé
de la paix peut être encore gagnée, car tous les
peuples, sauf peut-être le peuple allemand, la
veulent; il souhaite que ce soit la France qui in-
dique au monde le moyen de la garantir.
M. Lémery
Tout en déplorant l'absence du ministre des
affaires étrangèies, M. Lémery (Gauche démo-
cratique), croit devoir répondre à certaines cri-
tiques que M. Paul-Boncour lui a adressées.
Le sénateur de la Martinique déclare avoir re-
.proché au ministre des affaires étrangères, non
pas d'avoir dit que l'article 213 du traité de Ver.
sailles devrait être remisé au magasin des vieux
accessoires, mais d'avoir affirmé ne pas pouvoir
le mettre en action. Et cela, le sénateur de la
Martinique le maintient, comme il maintient que le
pacte à quatre et l'aide-mémoire au Reich ont
soulevé bien des inquiétudes chez nos alliés de
l'Europe centrale.
M. Lémery. M. le ministre des affaires étrangères
a beaucoup parlé des résultats de sa politique. H n'en
a oublié qu'un c'est le réarmement de l'Allemagne.
(Très bien I droite.)
En face des armements de l'Allemagne nous vou-
drions savoir comment on peut encore espérer le main-
tien de la paix par le moyen d'une coopération inter-
nationale alors que disparaissent les engagements d'as-
sistance. Comment congoit-on cette coopération î Com-
ment l'organisei-a-t-on .11
• Ji faut que ce débat se termine par des faits et des
promesses et non par des paroles vagues comme celles
'qui ont été .prononcées mardi.
Si on veut accepter de désarmer en quelque manière
la France, en ne lui donnant comme compensation que
des pactes qui ne sont que des chiffons de papier, un
contrôle Inexistant, jg dis non (Très bien 1 Applau-
dissements.)
La France ne doit rien abandonner de sa force si
elle n'obtient pas des garanties équivalentes de sécu-
rité. Que l'on nous donne sur ce point des engagements
formels. (Vifs applaudissements.)
A ceux qui prétendent que l'on risque l'isole-
ment, M. Lémery, répond que la France doit comp-
ter sur elle-même et non plus sur les autres.
D'ailleurs, fait-il remarquer, les intérêts du peu-
ple anglais ne sont-ils pas « soudés » à ceux du
peuple français? L'isolement? L'orateur le re-
doute plutôt du côté de l'Europe centrale « où
nos faiblesses et nos atermoiements ont provoqué
des déceptions ».
Quant à la course aux armements, on aurait
dû la prévoir ta jour où l'on a accordé à l'Alle-
magne l'égalité des droits. « Restons forts et n'ou-
blions pas que la France est la dépositrice de
la, plus belle promesse et, du plus grand espoir de
l'humanité », a conclu M. Lémery qui a été lon-
guement applaudi et que de nombreux collègues
sont venus féliciter quand il est descendu de la
tribune.
extraite de l'idée mâle, comme Eve d'Adam,
mais sans féminité aucune. Ce rythme uni-
forme et, persistant de deux noires, la deuxième
pointée,, et trois croches, procédé commode
employé fréquemment par Schumann quand
il était à cotfrt, devient à la longue fatigant,
obsédant jusqu'à la souffrance. Le scherzo est'
agréable avec sa partie centrale très joliment
f auréenne; d'ailleurs le seul moment expressif
dans l'œuvre. Mais, en ses trois comparti-
ments étanches où l'on s'ignore d'un thème à
l'autre, il apparaît vraiment d'une brièveté
contre nature. On le déplore, car l'orchestre en
était fin et charmant.
D'andante, point. C'est pourtant dans le mou-
vement lent qu'on peut juger des qualités les
plus profondes d'un musicien. Sans les admi-
rables adagios de ses sonates, entre autres les
op. 106 et 111, du dix-septième quatuor de la
Neuvième, Beethoven ne serait point Beetho-
ven1, Sans les andantes non moins merveilleux
de ses quatuors et du second quintette, nous
n'aurions de Fauré qu'une idée fort incomplète.
Quant au quatuor de Debussy, dont la pre-
mière page de VAndantino est le plus bel orne-
ment, il survivrait à peine, et celui de Ravel
serait bien compromis. Mais passons, puisque
de sensibilité l'auteur n'a cure. Voici donc le
finale, non moins bref que ses devanciers, mais
éclatant, tumultueux. Un thème rapide, cursif,
semble devoir créer une atmosphère nouvelle.
Mais presque aussitôt réapparaît, bien un peu
indiscrètement, note pour note, l'enfant terri-
ble du début, ce thème obsédant qu'on n'a pas
eu le temps d'oublier et qui tient décidément
à marquer son droit à l'existence. C'est là, à
mon avis, la grave erreur pas de contraste
entre le premier mouvement et le finale, qui,
faits des mêmes éléments, des mêmes senti-
ments, de.la même atmosphère, ne .sont séparés
que par un court intermede. Il en résulte une
ïi©évHable monotonie, la monotonie de l'œuvre,
il faut bien le dire, parcimonieuse d'invention,
insuffisamment pensée et hâtivement écrite,
l'çeuvre, pour ainsi parler, née avant terme.
ttégrettons-le, car, je le répète, elle contient
des pages très musicales. A côté d'agrégations
ingénues en trompe-l'oreille, témoin ces octaves
uniformément raccourcies pendant les six mi,
nutes du second thème, le jeune musicien en
est encore à l'âge de'pierre de la fausse note
à ce point de vue, Alban Berg et Webern ha-
billent mieux, nous trouvons des harmonies
délicieuses, comme dans le trio fauréen du
scherzo. Peut-être a-t-on beaucoup reproché à
M Daiidelot son debussysme lors des Chansons
faJïïHtis. Dans son effort pour désarrondir ses
angles, il s'est laissé prendre aux embûches
d'un cubisme strawinskyste un peu élémen-
taire. Souhaitons que, s'affranchissant une
nouvelle fois, il devienne définitivement lui-
même.
Aux autres séances, notons de belles exécu-
tions des Impressions d'Italie d'un Gustave
Charpentier dans tout l'enthousiasme de la
jeunesse, et de Sauge-fleurie d'un Vincent
d'Indy prématurément grave. Puis, adroite-
LES ORDRES DU JOUR `'
Après une suspension de séance ordonnée afin
de permettre aux membres du bureau nommé
pour 1934 de rendre visite au président de la Ré-
publique, M. Jules Jeanneney fait connaître qu'il
a été s-aisi de deux ordres du jour.
Le premier, signé de M. Lémery et de plusieurs
de ses collègues, est ainsi conçu
Le Sénat,
Interprète des vœux du pays passionnément attaché
à la. paix, et assuré que tout affaiblissement, de nos
forces, toute atteinte au statut européen fixé par les
traités, aurait pour résultat immédiat d'en compromet-
tre le maintien.
Fait confiance au gouvernement pour conformer la
politique de la France à ces directives,
Et' passe à l'ordre du jour.
Le second porte les signatures de MM- Henry
Bérenger, président de la commission des affai-
res étrangères Bienvenu-Martin, président du
groupe de la Gauche démocratique, radicale et
radicale socialiste; Louis Barthou, président du
groupe de l'Union démocratique et radicale; Jo-
seph Caillaux, président de la commission des
finances, etc.
Il est ainsi libellé ;j
Le Sénat,,
Fidèle au pacte de la Société des nations et à ceux
qui en dérivent, notamment lç pacte de Locarno, et
rappelant les principes consacrés dans ces pactes,
Faisant confiance au gouvernement pour poursuivre
l'œuvre de la paix dans le cadre de la Société des na-
tions, pour fortifier ses amitiés internationales, pour
assurer sa défense nationale, et pour consolider la sécu-
rité de la France,
Passe à l'ordre du jour.
La priorité ayant été demandée en faveur du
premier de ces deux ordres du jour, M. Henry
Bérenger, soutenant le second, déclare qu'à l'is-
sue d un débat qui a honoré le Sénat, la haute
Assemblée se doit d'apporter au gouvernement,
dans les conversations qu'il poursuit, une appro-
bation explicite et sans réserve. Pp
M. Henry Bérenger. D'abord, la France*doit rester
fidèle aux principes de droit international posés par le
pacte de la Société des nations, frontispice du traité
dfi Versailles, et par les pactes qui en sont dérivés
pacte de Locarno (19*25) et pacte de renonciation à la
guerre (1928).
On a pu médire, et ici même, de ces pactes, en criti-
quer les lacunes, les Imperfections. Il ne faut pas
oublier qu'ils sont nés dans les contradictions et les
compétitions de l'après-guerre; il ne faut pas oublier,
surtout que, depuis quinze ans, ils ont maintenu la
paix en Europe et contribué à éviter une nouvelle con-
flagration, qui eût été plus effroyable encore que la
dernière.
Nous estimons qu'ils répondent à l'idéal le plus pro-
fond de notre démocratie toujours défendus par nos
gouvernements, ratifiés par notre Parlement, approu-
vés par la conscience populaire, ils sont conformes
aux principes de notre droit public tels que, la Révolu-
tion française les a consaoréè,. et c'est de Paris qu'ils
ont été portés* à Genève portes hommes d'Etat répu-
blicains les mieux qualifiés. Nous approuvons M. le
ministre des affaires étrangères de les défendre et
nous estimons que le moment serait mat choisi, quand
de divers côtés on cherche à diminuer leur valeur et
à déserter le drapeau de la Société des nations qui est
celui de la France, pour laisser contester leur efficacité
qui est notre essentielle sauvegarde. (Applaudisse-
ments.)
Le deuxième principe sur lequel les signatai-
res de l'ordre du jour appuient leur confiance,
c'est que le gouvernement s'efforce de toujours
fortifier les liens nous unissant aux amis qui
nous ont aidés à l'heure du péril. Le troisième,
c'est qu'en face de certains réarmements suspects
H convient d'approuver le gouvernement quand
il fait savoir que l'existence de paotes de garantie
ne suffit pas pour assurer notre sécurité, et que
notre vigilance doit s'employer à perfectionner
nos moyens de défense nationale.
Très applaudi par l'unanimité de l'Assemblée, le
président de la. commission des affaires étrangères
conclut ainsi
M. Henry Bérenger. Nous avons confiance dans la
Société des nations; mais nous mesurons l'importance
d3 certains déparie aussi nous déclarons-nouB soli-
daires de notre gouvernement pour tenir fermement
les deux bouts de la chaîne organisation internatio-
nale, défense nationale,
C'est en nous inspirant de ces considérations que nous
avons rédigé l'ordre du jour que nous vous demandons,
mes amis et moi, de bien vouloir voter. (Vifs applau-
dissements.)
DISCOURS DE M. CAMILLE CHAUTEMPS
PRÉSIDENT DU CONSEIL
Le président du conseil regrette que « les exi-
gences vraiment abusives de l'actualité scanda-
leuse aient empêché le peuple de France, si sain
et si' laborieux », de suivre, comme il l'aurait dû,
le débat qui vient de se dérouler devant la haute
Assemblée et qui fut, dit-il, « si remarquable par
son ampleur, son objectivité" et la hauteur des
vues qui ont été exposées ».
'M. Camille. Chautemps ne veut pas rouvrir ce
débat, le ministre des affaires étrangères ayant
déjà, estime-t-il, « justifïé les résultats d'une poli-
tique par laquelle il s'est efforcé de poursuivre avec
une ténacité discrète et utile l'extension du réseau
d'amitiés quii sont un des éléments de la puis-
sance française u.
Le président du conseil déclare « accepter
l'ordre du jour que le président de la commission
des affaires étrangères vient do commenter, et
approuver pleinement les idées qu'il a exposées.
Il demande à M. Lémery, puisque son ordre du
jour comporte également la connanoe, de se rallier
à, celui du président de' la commission des affaires
étrangères. x
̃ M. Camille Chautemps. Au cours de la discus-
sion, deux faits ont été notamment évoqués le pre-
mier a trait aux transformations importantes dans la
ment joué par Mlle Lucienne Radisse, le con-
certo pour violoncelle de Saint-Saëns réappa-
rut après quelque trêve illusoire. Un concerto
dont je n'irai pas jusqu'à dire que je l'aime
passionnément, mais qui, assurent les techni-
ciens, met admirablement l'instrument en re-
liéf. La belle malice si l'auteur supprime l'or-
chestre, ou à peu près, comme c'est le cas ici,
comme c'est le cas, d'ailleurs, pour Tzigane, de
Ravel, ce qui fait que Tzigane m'intéresse infi-
niment plus au piano, qui existe, qu'à l'or-
chestre, qui n'existe pas. Je signale à Lucienne
Radisse, si d'aventure elle les ignore, les beaux
concertos de Honegger et de Julien Krein (très
fier de connaître ce dernier depuis quinze
jours). Ils feront valoir tout autant ses qualités
et, de plus, intéresseront tout le monde, elle,
son public. et les auteurs, qui sont vivants.
Car ils n'ont pas cette solennité académique
dont Saint-Saëns se départ difficilement,
même lorsqu'il veut être gai et caustique
comme dans ce Carnaval des animaux qui est,
je crois bien, ce qu'il y a de plus sérieux au
monde.
Le Poème romantique de M. Mazelier, que
Firmin Touche exécute brillamment, n'était
pas inédit pour toute l'assistance. Apitoyons-
nous'un instant, en dépit des qualités de en
morceau, sur le sort des infortunés jurés (ils
jurèrent un peu tard.) qui, au récent concours
de violon, ne le subirent pas moins de qua-
rante-cinq fois, c'est-à-dine plus qu'ils n'enten-
dront jamais, je l'espère, la Pastorale et le
Prélude-et-mort, même si Dieu leur prête lon-
gue vie. Quarante-cinq fois Et l'on en cite
qui sont encore, ma foi très lucides. La
véritable nouveauté consistait donc dans l'or-
chestration plus que dans le texte musical lui-
même. Page habile, d'ailleurs, bien construite,
bien sonnante avec ses jets de cuivres très
Rhapsodie norvégienne, et qui n'omet à dessein
aucune des insidieuses caractéristiques du
morceau d'épreuve et de bravoure. Mais quand
se souviendra-t-on, au Conservatoire de Paris,
qu'il est certain concerto de Szymanowski, cer-
taine Fontaine d'Arélhuse que connurent, il y a
dix ans, les concurrents d'un conservatoire
départemental et qui, outre que plus difficiles
encore, ce qui permettrait, éliminant la plu-
part des candidats, de faire du premier prix
une chose rare et enviable, et de lancer sur le
marché, en ces temps de crise, moins de vir-
tuoses in partibus, sont de fort belle mu-
sique, question pas si négligeable.;
Après le concerto de tout à l'heure, j'eus la
curiosité de réentendre celui de Serge Pro-
kofleff le troisième qui se jouait chez
Pasdeloup. Comparaison possible dans la me-
sure où l'on peut comparer Sainte-Sophie de
Stamboul à la tour métallique de Lyon. Des
deux, c'est incontestablement celui-ci le plus
récent, quoique déjà célèbre il y a dix ans Ici,
partout l'invention éclate, la puissance, l'abon-
dance des idées, l'audace harmonique, la ri-
chesse, la variété du rythme. J'en aime jus-
.qu'aux défauts. =̃ si .défauts il y a (Deut-êtcs
politique d'un grand pays européen. On S évoqué titi
changement de politique intérieure allemande. Ai-Je
besoin de dire, messieurs, que la France est trop res-
pectueuse de la souveraineté des autres nations pour
s'immiscer dans le libre choix d'un autre peuple ? Mais
je comprends que certains orateurs aient marqué l'émo-i
tion que peut cependant causer aux hommes qui mè*
ditent l'adoption, quasi unanime dans un pays, d'une
doctrine portant en elle une telle exaltation du senn
timent national qu'elle risque de se projeter au dehors
et de réagir sur la politique extérieure de la nation,
(Très bien Très bien !)
M. Joseph CaXUaux. Très bonne définition î
Le président du conseil. Le second fait. c'est le
brusque et injuste départ de l'Allemagne de la Société
des nations et de la conférence du désarmement. On
a déjà dit que les motifs de départ invoqués par l'Alle-
magne, et tirés de ce que les exigences des autres pays
porteraient atteinte à l'honneur allemand, ne répon-
dent pas à la réalité. Dès le lendemain de la guerre*
la France, par une série de concessions, a marqué sa
volonté de paix; jamais elle n'a eu la pensée d'humi-
lier ou -d'amoindrir un grand peuple qui avait le droit
de reprendre sa place parmi les grandes puissances
du monde. L'Allemagne, elle, a quitte la conférence dit
désarmement au moment où il semblait qu'un accord
unanime pû£ se réaliser; elle ne 'peut dono' pas être
surprise si son attitude provoque une impression d'in«
quiétude et même de méfiance.
Certains orateurs ont demandé que fussent tirées
les conclusions de cet état de fait, à savoir la revision.
des doctrines qui ont guidé notre diplomatie pendant
les dernières années. Ces doctrines, tous les gouver-
nements successifs de la France depuis la guerre s'ea1
«ont inspirés; c'est donc une sorte d'examen de con-
science national à quoi l'on nous convie.
Après que le problème eut été exposé, la solution,
al-je dit, en a été apportée, ou plutôt des solutions
différentes. Quelques orateurs ont préconisé le main.
tien de la force française; d'autres ont rappelé que
c'est notre mission historique de poursuivre des négo-
ciations qui ne sont peut-être pas dépourvues de
risques, mais qui sont à coup sûr glorieuses.
Je voudrais vous montrer qu'entre ces deux néce^
sités également nationales il n'y a pas contradiction*
(Assentiment.) > ̃
Coopération internationale et défense nationale
La politique de coopération internationale est, elle
aussi, un des éléments de notre défense nationale.;
En effet, quand on parle de réduire les armements,
il ne e'agit que d'une éventualité qui ne se réaliserait
qu'en vertu d'une convention générale; il n'entre pas
dans notre esprit de laisser affaiblir la force fraiw
çalse en face du réarmement d'autres peuples.
En ce qui concerne nos relations avec nos amis, je»
demande qu'on tente plutôt do voiler les difficultés
que de les aggraver. J'ajoute que jamais ces relations
n'ont été plus ferventes ni plus intimes qu'aujour-'
d'hui. Je ne vois rien qui soit susceptible d'affaibliB
la confiance que nos amis ont en nous; nos négocia-4
tiens patientes et tenaces ne sauraient en rien les inn
quiétet et- ils ne peuvent que se réjouir de voir la)
Franco posséder une force qu'elle met à leur servies,
(Très bien 1) .̃•
Je viens de faire allusion à certains do nos amis'
les plus fidèles; il est aussi de grandes nations, qui
ont le droit d'avoir leur libre opinion en face de ia
nôtre, mais dont l'esprit de cordialité demeure pour,
nous un élément essentiel de là sécurité européenne,
C'est ainsi que l'accord entre deux grandes démomw
ties telles que la République française et l'Empire bri-
tannique constitue l'un des piliers essentiels de ïa!
paix du monde. (Très bien -I)
Si nous nous éloignions hâtivement de certaines né*
gociations, aurlons-nous ainsi fortifié notre position à!
l'égard du grand paye dont je viens de parler ? Certes
je ne méconnais pas la nécessité d'une politique do
défense nationale. Dans ce domaine, je reste en plein'
accord avec les ministres de la guerre, de la marine
et de l'air. Je n'apporterai jamais de propositions al-i
lant à rencontre de leurs désirs. Mais loin de voir une;
contradiction entre les deux politiques de coopération;
internationale et de défense nationale, j'estime que la
politique nationale trouve son meilleur appui dans la'
politique de coopération internationale. (Applaudisse-
ments.)
Le discours de M. Roosevelt
Comme l'a déjà fait si éloquemment M. Paul Laffont,
je voudrais évoquer le récent discours du président)
Hoosevelt pour lui apporter, du haut de cette tribune,
une réponse solennelle et fervente. Le jour'même ou
oe discours a été connu, nous avons exprimé haute-
ment, tant par la vole de la presse que par la voie
diplomatique, notre approbation et notre gratitude^
Je voudrais maintenant montrer que ce message «a-*
pital du président de la grande République amérn
calne et la réponse que nous y avons faite contiens
nent tout ce qui peut faire comprendre notre politn
que extérieure. M. Roosevelt a loué les efforts de son:
Illustre prédécesseur M. Wilson en faveur de la So-:
oiété des nations et s'est- exprimé à l'égard de celle-ci;
en termes obligeants. Même s'il y avait dans ses
éloges quelque, ironie, commo' certains l'ont prétendu,
nous ne pouvons que nous réjouir en constatant que
le président Roosevelt ait senti lui-même la nécessité.
d'une coopération avec la Société des nations.
Son discours renferme aussi trois affirmations ca-
pitales. La première est qu'aucun peuple ne doit, à'
''heure présente, accroître ses armements. Nous ac-<
cueillons cette affirmation aveo enthousiasme,
La seconde est que, si toutes les grandes nations
prenaient l'engagement solennel de ne jamais revcn->
diquer un territoire étranger et de ne jamais se livrer
à une agression, il y aurait là une garantie de paix
durable. La réponse que nous avons faite à cette affli*
mation est l'écho de la pensée de tous les Français
nous no revendiquons pas un pouce do territoire
étranger! Nous ne ferons jamais une guerre d'agrès-*
sion, et nous souhaitons que tous les autres peuples
prennent les mêmes engagements, qui constitueraient
une garantie certaine du maintien de la paix.
Nous demandons seulement que, poussant jusqu'au
bout sa pensée, le président Roosevelt admette que;
la guerre étant mise au ban des nations comme un
crime, il n'y ait plus de neutralité à l'égard d'un agresM
seur criminel. (Très bien' )
Tout le pacte, rien que te pacte!
Telles sont les idées que nous entendons défendre!
dans le cadre de la Société des nations. Le président
Herriot disait « Tout le paote, rien que le pacte' ;»J ~,l
quelque disparate dans le finale) qui son!!
encore du génie. Sans prétendre, le joueç
comme Prokofieff lui-même au seul Mitro-.
poulos je concéderai ce droit M. Uninsky y
déploie une énergiei qu'il étaye d'un rythme
inflexible. Sa technique est solide. Mais il reste;
un peu sec, un peu indifférent dans les passa-
ges expressifs, là où la musique a la parole.
Pour m'en convaincre, malgré mon aversion
pour le piano solo dans un concert d'orchestre
et au prix de la troisième symphonie de!
Brahms double trait d'héroïsme dont il ne
se doutera jamais, j'ai attendu qu'il reparût
pour jouer le Nocturne en fa dièse ce jour-Iàj
je ne l'entendis, pas davantage.
Auparavant, M. van Raalte, un chef d'or-
chestre de haute classe, avait donné de la Péri
de Paul Dukas, une exécution ardente et colo-
rée, précédée nous l'en remercions. de la
fanfare qu'on a souvent le tort d'omettre, cette
fière, somptueuse Fanfare de là Péri, écrite a
l'instigation de Robert Brussel pour les séances,
de Natacha Troulianowa lorsqu'elle créa l'œu-i
vre au Châtelet. Mais je parle là de temps loin-
tains 1912, un siècle
La semaine suivante, nous avions le plaisir,
qui nous est trop rarement accordé, de réen-s
tendre JVitt^, le noble poème de Gustave Sarcm-.
zeuilh, d'après Henri de Régnier « 0 toi,
chère nuit, ô toi lumineuse et secrète! »
page d'abord toute de mystère, de mélancolie^
de rêve, mais où peu à peu s'éveillent, en ua
long crescendo, toutes les vies latentes. Il serait
bien désirable qu'on fût un peu moins avare
de ce beau morceau. Et, puisque l'occasion* ë'én
présente, je rappelle à qui de droit qu'il est, du
même auteur, un magnifique, éloquent poème
pour violon et orchestre, plein d'une musiquu
mtense qui n'exclut pas la virtuosité. On l'en-
tendit juste une fois .chez- Colonne. Il n'y a
pourtant pas pléthore, dans ce genre, de belles
œuvres contemporaines les compositions de
Szymanowski, dont je parlais à l'instant, le
concerto de Casella, ce poème de Samazeuilh.
Je crois bien que c'est tout ce qu'on peut di-
gnement opposer, depuis Edouard Lalo, aux
concertos de Beethoven et de Mendelssôhn.
Les virtuoses sont continuellement à harceler
les compositeurs, leur reprochant de négliger,
qui le violon, qui le violoncelle, qui le saxo-
phone, ou l'orgue, ou les sopranos légers, ou
les ondes Martenot, que sais-je Et quand le
compositeur se laisse séduire, quand l'œuvro,
est faite, sitôt déflorée on l'enterre vive commq
une vestale.
Nous réentendîmes aussn comme chaque
année louable habitude, la fidèle
Habanera de Louis Aubert, musique d'une vo-'
luptueuse complexité et qui n'a pas fini de nous
(livrer ses secrets le prélude de l'Ouragan
d'Alfred Bruneau. Puis, chantées délicieuse-
ment par Mme Marjorie Lawrence, d'aimables,
élégantes mélodies de Philippe Gaubert. Enfin,
la Suite en fa, d'un anachronisme brillant, la
meilleure composition, je pense, d'Albert
Roussel.
Florent jjçBM-t'EE,
t. LE TEMPS. 20 janvier 1934
Ira Petite -Histoire
LE MARIAGE DE SUZANNE! CÏfflOD
LD MNiAbtt IJD SUZANNE uuttLttui)
C'était, en 1757, une belle fille de dix-huit
ans « Des yeux bleus, un regard à la fois
candide et assuré, une masse de légers che-
veux blonds, un teint éclatant, une taille élan-
cée et fine. » Mais elle avait un terrible dé-
faut elle était sans dot. Son père, pasteur à
Crassier, près de Divonne un sage, content
de sa médiocrité et tout dévoué à ses ouailles,
avait occupé ses nombreux loisirs à faire de
sa fille une savante. Quand il fut à bout de
sa science, l'enfant, déjà ambitieuse de se
distinguer, continua à s'instruire elle-même, et
on voit encore à Crassier le vieux presbytère,
devenu la gendarmerie, où, tard dans la nuit,
derrière les volets clos, brûlait la lampe de
Suzanne, assidue à lire, et à faire des .extraits
de tous les ouvrages qu'elle parvenait à se pro-
curer. Aussi était-elle fêtée quand sa mère la
conduisait aux fêtes de Nyon ou de Lausanne,
« dont les meilleures familles se disputaient
la présence de cette attrayante et docte per-
sonne »..Bientôt elle fut la reine de res agréa-
bles compagnies, telles que « l'Académie de
la source, la Société du Printemps », où ne
déplaisait pas un certain pédantisme, inter-
mède profitable des jeux et des danses. Les
jeunes gens, eux étudiants de Lausanne ou
candidats pasteurs, appréciaient plus la
beauté, l'entrain et la grâce de Mlle Curchod
que ses connaissances encyclopédiques, et les
gazettes locales eurent souvent à insérer des
madrigaux discrets ou des épîtres d'amour
dont la galanterie témoignait de la s-éduction
inspirée aux muses juvéniles par les charmes
de la fille du pasteur de Crassier. Celui-ci
s'étonnait du nombre de visiteurs qui défi-
laient dans sa maison, faveur que si mo-
deste fût-il il attribuait naïvement à son
bon renom et à la réputation méritée de sa vie
exemplaire.
Mais Suzanne avait l'esprit pratique elle
Savait, par expérience, combien est rude l'exis-
tence d'un ménage réduit à de minimes res-
sources elle se rendait compte de sa propre
valeur, et s'était depuis longtemps résolue à
ne point s'embarquer dans le mariage sans
être pourvue des provisions indispensables à
l'agrément d'un si aventureux voyage. Aussi,
parmi sa cour d'adorateurs, avait-elle remar-
qué un jeune Anglais de vingt ans, nomé Gib-
bon, dont la laideur était « caricaturale » et la
tournure sans élégance, mais qui appartenait
à une famille riche de.Londres. Gibbon, un
peu excentrique, comme tous les Anglais que
l'on rencontrait sur le continent en ce temps-
là, s'était, à Oxford, converti au catholicisme.
Ses parents, rigides protestants, désolés de ce
coup de tête, avaient expédié leur fils chez un
ministre réputé de Lausanne, qui s'engageait à
le « décatholiciser » et à le remettra dans la
bonne voie. Gibbon, féru de contradiction,
ayant écouté docilement les leçons de son ca-
téchiste, déclara que, tout compte fait, étant
instruit des deux religions, il était en mesure
d'en évaluer les mérites, et que décidément il
n'en choisirait aucune et se contenterait d'être,
à l'avenir, « un penseur libre, dégagé de tojite
confession ». Ce trait, qui dénotait tout au moins
un esprit dépourvu d'idéal, aurait dû mettre
Suzanne en garde. Confiante au pouvoir de sa
beauté et de son intelligence, elle se promet-
tait de ramener, quand elle le tiendrait dans
ses filets, cet original à des sentiments plus
normaux, car, au plaisir qu'il prenait mani-
festement à causer avec elle histoire, sciences,
philosophie littérature, économie sociale, lin-
guistique et morale elle savait tout! elle
ne doutait pas qu'il ne finît par tomber un
jour à ses genoux, lui déclarer sa flamme et lui
offrir son nom et sa fortune.
Or, de flamme, Gibbon n'en a aucune; il s'en-
tretient volontiers avec Suzanne parce qu'il lui
trouve l'esprit « nourrissant ». Il est beaucoup
plus pratique encore qu'elle ne l'est elle-même,
et il ne songe pas un instant à s'éprendre de
ce puits de savoir. En vaia use-t-elle de tous les
manèges de la coquetterie, regards langoureux,
allusions transparentes, soupirs, mélancolie,
élans mal comprimés; elle ne lui cache pas
qu'il semble ne point se douter « du prix d'un
cœur dont sa froideur risque de le priver à
jamais »; elle tente de le rendre jaloux; elle
essaie de la bouderie, des pleurs, de l'indiffé-
rence affectée, voire du dédain, des évanouis-
sements, des menaces. Rien ne porte; Gibbon
demeure de glace, et ne paraît même pas s'aper-
jeevoir de la peine qu'elle se donne pour le con-
quérir. Les parents Curchod, tenus au courant
du combat que livre (leur fille, l'encouragent à
persévérer. Le pasteur est usé il sait que ses
jours sont comptés, et il souhaiterait laisser
Suzanne dans une situation de fortune assurée.
On invite donc l'Anglais à Crassier l'aspect
des vénérables vieillards qui souhaitent de
l'avoir pour gendre, le tableau de leur pauvre
et vertueux ménage l'attendriront peut-être.
Non; il n'est pas ému, et les Curchod en sont
pour leurs avances et leur frais d'amabilité. Et
comme Gibbon, mis en demeure de s'expliquer,
s'est enfui en Angleterre, il écrit de là-bas un
mot bref, disant que son vieux père s'oppose
à. son mariage.
Ohl Si ce n'est que ça! Suzanne, prévoyant
nsuiLLETonr du %4Wfê
DU 20 JANVIER 1934
LES CONCERTS
CPLONNE ( Préluda à m conte de fée », de M. Le
Guillard.
WMÛUEEUX Concerto, de M. Georges Dandelot.
«Poème romantique >, de M. Mazelier.
fASDELOUP.
Rien de très sensationnel parmi les nou-
veautés de cette dernière 'quinzaine. Il semble-
rait que, dans l'amoncellement des manuscrits,
les associations symphoniques prissent à tâche
de'ne faire entendre que les moins significa-
tifs. Il y a cependant en ce moment en France
une bonne demi-douzaine de jeunes composi-
fçurs de talent authentique. Je sais bien qu'ils
nu peuvent prétendre, à eux seuls, alimenter
la rubrique relativement considérable des pre-
mières auditions. Est-ce une raison pour les
exclure ? Et ne vaudrait-il pas infiniment
mieux alors, au lieu de jeter en pâture au pu-
blic des productions amorphes, dont le seul
intérêt est d'être entendues pour la première
fois et apparemment la dernière, recou-
rir* aux deuxièmes et même aux troisièmes au-
ditions d'œuvres dont le mérite, dès la pre-
mière, a été unanimement reconnu? Voici, par
exemple, côté France, la belle symphonie de
Pierre-Octave Ferroud, jouée deux fois en qua-
tre ans. Ne serait-il pas logique qu'on l'entendît
au moins une fois par saison, quitte à nous
priver d'une symphonie de Franck sur ia -quin-
zaine annuelle. Voici les exquises Figures so-
ttotes 4e Marcel Delannoy, les Feuilles d'ima-
ges de Louis Aubert, la Danse de Paul Le Flem,
içs Transparences de Jeanne Leleu, le Bal vé-
nitien de Claude Delvincourt, le Divertissement
éarrasin de Henri Martelli, l'Epiphanie d'An-
dré Caplet, d'autres encore que j'oublie. Et,
parmi les « étrangers », la suite si brillante et
pittoresque du Hongrois Tibor Harsanyi, la
Suite grecque de Petridis, la Fantaisie du Rou-
aiain Mihalovici, le concerto de F. Bozza, qu'on
aurait tant de joie à retrouver et qui, tout de
même, méritaient plus que cette flambée d'un
soir chez Straram ou à l'O. S. P.
Ceci, bien entendu, sans parler d'aînées non
moins injustement méconnues comme la troi-
sième symphonie de Guy Ropartz, jamais re-
prise depuis 1906, la symphonie de Witkowski,
celle de Louis Thirion, la suite de Georges
eelle de Loms Th rao ~eg t
Eneseo, toutes oeuvres de beauté éprouvée et
qui viendraient rajeunir des programmes si
désolément désuets que le public, s'il s'éton-
nait de quoi que ce soit, devrait norra-alement
se demander si, en dehors de la -trinité
Beethoven-Wagner-Franck, il existe encore des
musiciens dans cette Atlantide de la musique,
et si leurs productions n'ont pas sombré dans
quelque, cataclysme
l'obstacle, détient une combinaison qu'elle se
hâte de lui exposer. Qu'il revienne, qu'il
l'épouse clandestinement ou non, mais qu'il
l'épouse. Elle le laissera libre de vivre à Lon-
dres et elle restera en Suisse, où, d'ailleurs, il
pourra, tous les deux ans, venir passer près
d'elle deux ou trois mois de la belle saison,
projet qu'elle estime « judicieux », mais qui
ne satisfait pas les Gibbon, ces affreuses gens,
« dont le cœur est si fermé aux choses de
l'amour ». Ils ont avisé Mlle Curchod qu'elle
ait à les laisser tranquilles, qu'on ne recevra
plus ses lettres. Elle en envoie de nouvelles
pourtant, et interminables, et l'on cite d'elle
une missive, de longueur insolite, où elle
s'acharne à dépeindre sa triste situation d'hon-
nête fille "délaissée. Quel feu 1 Quels aveux 1 Si
l'on découvrait une lettre adressée par l'inces-
tueuse Phèdre au farouche Hippolyfe, ce serait
sur ce ton qu'elle serait écrite. Cette lutte se pro-
longea durant quatre ans. Suzanne s'opiniâtrait.
Apprenant que Gibbon, se rendant en Italie,:
allait passer en Suisse,selle résolut de l'y arrêter'
par un barrage décisif, afin qu'il ne quittât pas
le pays sans l'avoir prise pour femme. Elle
le pays sans l'avoir prise 1 p1our1femme. Elle
alerta donc tousses amis, les conjurant de s'unir
à elle pour ce suprême combat. Elle trouva
même le moyen de se metlre en rapport avec
Jean-Jacques Rousseau, alors de séjour au Val-
Travers, le suppliant d'intercéder pour elle au-
près de Gibbon. Elle imaginait que le pres-
tige du père de la Nouvelle Hèloîse qui s'y
connaissait, flui, en choses du cœur amène-
rait à résipiscence l'Anglais buté. On dit que
Jean-Jacques, qui ne se déridait pas souvent,
manifesta une certaine gaieté quand on lui
soumit la supplique de sa jeune concitoyenne.
Gibbon traversa la Suisse sans même soup-
çonner les périls qui l'y menaçaient.
Le pasteur'Curchod mourut en i760; trois ans
plus tard succombait Mme Curchod. Suzanne
restait, à vingt-quatre ans, orpheline et sans
ressources. Elle dut se résoudre à utiliser ses
talents elle fut institutrice et courut le cachet,
sans grand succès, semble-t-il. Le sentiment de
ses déboires aigrissait son humeur; son pédan-
tisme, la trop haute idée qu'elle concevait de
son savoir, rebutaient les enfants. Néanmoins,
Mme de Vermenoux, jeune veuve parisienne,
aimable et gaie, un peu étourdie, sur le point
de rentrer en France après un long séjour à
Genève, confia à Mlle Curchod l'éducation de
son enfant. Voilà donc Suzanne à Paris. Les
familiers de Mme de Vermenoux jugèrent tout
de suite que cette précieuse empesée n'y- réus-
sirait pas. « Avec sa métaphysique et sa coif-
fure, elle aurait dû rester à Crassier. Au nom
du ciel, simplifiez-la! » conseillaient-ils à leur
amie. ̃
Le ciel, en effet, s'en, mêla; non point qu'il
réussît à « simplifier » la roide pédante,
miracle impossible, mais en amenant chez
Mme de Vermenoux un Genevois aussi impor-
tant et sentencieux, aussi guindé, aussi étran-
ger au « tour de Paris » que l'était l'institu-
trice. Il se nommait Jacques Necker, trente-
cinq ans, tournure gauche et gourmée; né d'un
père d'origine prussienne, il avait, très jeun<9,
obtenu un petit emploi à la banque Thélusson,
aux appointements de 600 livres. Une téna-
cité sans défaillance lui valût de gagner la
confiance de ses'patrons; plusieurs opérations,
favorables à la banque, le mirent en vedette,
A présent, il est l'associé des Thélusson et ri-
che de 60,000 livres de rente, chiffre mies-
quin à l'estime de nos contemporains, mais
qui alors classait un financier au nombre des
nababs. Necker fréquentait assidûment chez
Mme de Vermenoux et se posait en suupirant
de cette aimable femme; mais elle, enjouée et
malicieuse, s'épouvantait à l'idée de lier sa vis
à ce pontife syllogistique et sentencieux, qui,
toujours solennel, ne parlait que de lui-même,
de sa vertu et des mystères de l'économie poli-
tique, ne s'exprimant qu'en termes dédaigneux
et péremptoires, dont se dégageait un écra-
sant ennui qui mettait en fuite les commen-
saux de la Dulcinée. Il trouva chez celle-ci une
femme telle qu'il n'en avait jamais rencontré
c'était Suzanne Curchod, qui, elle, « n'ayant pu
gagner château en Angleterre », s'attacha à
la capture de l'opulent banquier. Elle buvait
ses paroles, l'écoutait bouche bée et ne bâillait
jamais. Mme de Vermenoux, heureuse de
n'avoir plus à se pincer pour résister au som-
meil provoqué par l'élocution lourde et pré-
tentieuse de son redoutable prétendant, favori-
sait ces tête-à-tête avec l'institutrice, qui sut
adroitement insinuer à ce confident tombé du
ciel que « leurs deux âmes étaient faites pour
s'amalgamer » et que leur mariage offrirait au
monde le sublime spectacle de « l'union du
génie et de la vertu ». Necker partit pour la
Suisse. Suzanne s'était assuré la connivence
de tous ses amis « Sans un miracle, leur écri-
vait-elle, je désespère du succès. » Le banquier
ne recueillit donc que des renseignements favo-
rables, et à son retour il épousait clandesti-
nement son admiratrice à la chapelle protes-
tante de l'ambassade de Hollande. Mme de
Vermenoux ne fut informée de « l'affaire »
qu'après sa conclusion. Elle était incapable de
rpssentiment; comme elle avait beaucoup d'es-
prit, sa seule vengeance fut un mot piquant
« Ils s'ennuieront tellement ensemble, dit-
elle, que ça leur fera une occupation. »
C'est ainsi que Suzanne Curchod, devenue
Mme Necker, est entrée dans l'Histoire, et
figure, à ce titre, en bonne place dans un livre
récent où M. E. Lavaquery, avec un remarqua-
Et quand par hasard l'inédit choisi vise a
un niveau supérieur à cette musique, disait
Chabrier, « que c'est pas la peine », c'est au
compte-gouttes qu'on nous le débite. Ainsi du
Prélude à un conte de fée de M. Le Guillard, un
jeune musicien connu surtout par un quatuor
et diverses musiques de chambre, que les Con*-
certs-Colonne inscrivaient au programme. Des-
tinée à inaugurer une brève partition, une mu-
sique de scène écrite pour le Quincampoir,
marchand de perles, de Mme J. LavaJl, cette
page se présente bien et présage d'heureuses
subséquences. Des esquisses de thèmes s'y
pressent, se succèdent rapidement comme une
série d'images, évoquant les personnages et
l'action, les uns alertes, d'un esprit caustique
et un peu fuyant qui rappellerait peut-être,
de loin, les Fêles debussystes, les autres, quand
d'aventure l'auteur se prend à rêver, tendres,
expressifs, d'une cordialité charmante. Le tout
très délicatement musical. Et dans l'orchestre
fin et diapré rien qui approche ces sonorités
sèches et rugueuses, ces jazz ou caricatures
de jazz dont on a tant abusé depuis l'irruption
noire en Europe. Le musicien a voulu avant
tout de la musique, et je l'en félicite. Mais il est
dommage que ce soit si court. Au point que
lorsqu'on commence pour de bon à s'intéres-
ser à ces jeux tout est fini et l'attention reste
en suspens. Il me semble qu'on aurait pu cueil-
lir dans la partition un ou deux fragments et
les joindre à cette ouverture musicale, de
manière que l'auditoire pût se faire de l'œu-
vre une idée moins superficielle. Qu'y aurions-
nous perdu? Deux mélodies de Schubert, de
Strauss, ou le scherzo de l'Ut mineur. Nous
n'en sommes pas à cela près. En tout cas, en-
tre deux maux, ne fallait-il pas choisir le
moindre ?.
Le concert avait commencé par la Grotte de
l'ingal, ce mélanoolique tableau d'après na-
ture dont Paul Paray sait ai merveille doser'
les contrastes. Puis M. Vogel avait chanté
d'une voix chaude, émouvante, le très bel
Arioso, tiré de je ne sais quelQe cantate de
Haendel, avant-coureur ou réplique du célèbre
Largo, dont il a l'ampleur et la majesté. Il fut
moins heureux dans l'air de Leporello, qu'il
interprète avec une solennité, une « profon-
deur » quelque peu déplacées. Puis quelle idée
malencontreuse, biscornue, sadique, véritable
idée de ténor encore qu'il s'agisse ici d'un
baryton, de faire accompagner au piano, ce
piano juste supportable comme pis-aller à dé-
faut de tout le reste, accordéon compris, une
œuvre écrite pour orchestre et cela au milieu
de quatre-vingt-dix exécutants qui rongent
leur frein. Mozart, prompt au pardon des in-
jures, ne lui eût pas pardonné celle-ci. Rien de
funèbre comme cette sonorité grêle, banale,
tombant inopinément en éteignoir, tel, au
milieu d'un banquet, un discours de ministre
des finances. Aussi l'enthousiasme qui avait
accueilli l'Arioso s'était-il singulièrement re-
froidi.
Le lendemain M. Georges Kulenkampff exé-
cutait l'intéressant concerto pgnv, yMpn de
ble talent et une érudition des questions fi-
nancières qui demeure toujours aussi claire
qu'agréablement accessible, qualité bien
rare en ces obscures matières, nous conte,
l'ascension de Necker et de sa femme, deve-
nus époux modèles et parents idolâtrés par la
fille exceptionnelle qui fut le fruit de leur
union. (Necker, fourrier de la Révolution, par
E. Lavaquery, i vol.. in-12 avec portraits.) Six
ans après son mariage Necker était ministre
des finances, et la petite Suzanne Curchod ha-
bitait, rue neuve des Petits-Champs, le splen-
dide palais du Contrôle général qu'avait bâti,
pour Hugues de Lionne, l'architecte Le Veau.
Elle trônait là dans les grands salons plafon-
nés d'olympes et lambrissés de boiseries mer-
veilleuses. Elle eut la joie d'y recevoir Gibbon,
l'Anglais dédaigneux de naguère. Il dînait au
Contrôle tous les soirs durant ses séjours en
France, en compagnie de tout ce que Paris
Clôture du débat sur la politique extérieure au Sénat
L'ordre du jour de confiance adopté par 241 voix contre 3
Le débat sur la politique extérieure, qui avait
commencé vendredi dernier et s'était poursuivi
mardi, a été clos par le vote à la presque una-
nimité de l'ordre du jour présenté par M. Henry
Bérenger, président de la commission dos affaires
étrangères, et sur lequel le président du conseil,
en l'absence du ministre des affaires étrangères,
avait posé la question de confiance.
Dans un bref exposé que le Sénat a été una-
nime à applaudir longuement, M. Henry Béren-
ger a indiqué les raisons qui avaient guidé les
signataires de l'ordre du jour fidélité inébran-
lable aux principes posés par le pacte de la So-
ciété des nations; resserrement des liens nous
unissant aux amis qui nous ont aidés à l'heure
du péril; nécessité de ne pas laisser s'affaiblir
nos moyens de défense nationale.
Posant la question de confiance sur cet or-
dre du jour, M. Camille Chautemps, tout en se dé-
fendant de vouloir rouvrir le débat, a assuré que
son gouvernement, comme d'ailleurs ceux qui
l'avaient précédé, était toujours resté fidèle à
ces principes. Il a précisé la situation internatio-
nale créée par l'Allemagne hitlérienne et en face
de laquelle la Franco doit garder son sang-froid
et, aussi, toute sa vigilance. « Les conversations
engagées ne peuvent aboutir que dans le cadre
du pacte de la Société des nations auquel la France
est toujours restée et restera toujours fidèle », a
déclaré le président du conseil, dont le magnif i-
que et utile discours a été acclamé par l'unanimité
de la haute Assemblée.
\A. M. Labrousse
yMïi François Labrousse (Gauche démopratique).,
ne partage ni le pessimisme de M. Millerand ni
l'optimisme de M. de Jouvenel. Il constate cepen-
dant que l'Allemagne réarme en nous demandant
de désarmer. Dans la Sarre, Hitler prépare te
plébiscite par la violence, alors que la France
attend avec sérénité les décisions de Genève et
les résultats du plébiscite.
M. Labrousse. Nous espérons que le gouverne-;
ment veillera à. la stricte observance des pactes, car ils;
sont un gage de paix, aussi bien le covenant que lé
pacte général d'arbitrage, le pacte Briand-Kellogg et
le pacte de Looarno, qui apparaît comme la oharte des
amitiés françaises et de la position juridique de l'Al-
lemagne, qu'elle le veuille ou non.
Quatre ans après Locarno, Hitler réclamait dans Mçln
Kampf une lutte décisive aveo la France dont la des-
truction serait le moyen d'assurer au .peuple allemand
tout son développement.
M. Labrousse est d'avis que Briand, au lieu
d'être « le pèlerin vieilli et sermonneur que cer-
tains affirment », fut « essentiellement un réa-
liste » qui a essayé de tirer du traité de Versailles
toutes Tes possibilités qui y étaient en germe et
qui réclamait la mise en défense de nos fron-
tières dans le même temps qu'il pousuivait son
effort de conciliation.
Le sénateur de la Corrèze déclara que toutes les
difficultés d'après guerre sont dues à Ja carence
de l'Amérique et de l'Angleterre devant le cove-
nant de sécurité. Pour parer à cette carence, fait
remarquer l'orateur, Briand a amené l'Angleterre
et l'Italie à signer le pacte de Locarno qui garan-
tit notre frontière rhénane, pacte qui lie l'An-
gleterre quoi qu'on ait dit.
il. Labrousse. Nous comprenons très bien l'utilité
do conversations loyales, c'est le gouvernement qui est
le juge dernier de la bonne foi de ses interlocuteurs.
Nous lui ferons confiance, convaincus qu'il peut se
mouvoir dans le champ immense qui s'offre à lui tout
en restant fidèle à cette triple loi d'airain respect
intangible du traité de Locarno et de tous nos pactes,
respect intangible de la Société des nations, respect
intangible do toutes, les amitiés qui entourent notre
pays. (Vifs applaudissements.)
M. Paul Laffont
M. Paul Lyf font (Gauche démocratique) cons-
tate que le Sénat est unanime à demander qu'une
conclusion utile soit donnée à ce débat qui gra-
vite autour du réarmement de l'Allemagne. Les
déclarations du ministre des affaires étrangères
n'ont point rassuré le sénateur de l'Arïège, qui
attend du président du conseil les apaisements
et les assurances nécessaires..
Le général Bourgeois et M. Millerand ont montré
que l'Allemagne ne respeotait aucune des stipu-
lajijpns du traité de Versailles. « Après la fail-
Glazounow. Belle séance, d'ailleurs, si l'on
songe qu'elle comprenait des fragmpnts de
Sne;ourotchka, la fougueuse, joyeuse Espaiîa
de Chabrier, et, jouée avec flamme, la seconde
suite de Daphnis et Chloè, ce resplendissant
Lever du jour, cette Danse finale, apothéose,
du mouvement, élue' des dieux, et prédestinée,
au jour du Jugement, à emporter dans sa gira-
tion la population entière de Josaphai. Chef-
d'œuvre de l'auteur des magnifiques Poèmes
de Mallarmé, ou plutôt chef-d'œuvre tout court,
qui, enjambant de négligeables boléros seule
tache dans une collection unique, classe
Maurice Ravel au premier rang des musiciens
^Ivrànts^ Mais ji 'entendrons-nous plus jamais
Daphnis avec les voix ? Paudra-t-il itnporte-r
le chœur, de Bilbao, qui, à l'instigation d'Arbos,
donne de l'oeuvre des exécutions vraiment « in-
tégrales », toutes dimensions respectées, den-
sité comme étendue?
Aux Concerts-Lamoureux, après une exécu-
tion aérienne du scherzo shakespearien aux
amples génitifs, de ces génitifs enfilés à perte
de vue, si antipathiques, entre parenthèses, à
l'auteur des « Cosaques du dont », alias feu
Bremond, abbé de l'Académie, après, dis-je,
l'exécution Du scherzo DU Songe D'une nuit
n'été DE Mendelssôhn, Albert Wolff nous ré-
vélait un concerto pour piano de M. Georges
Dandelot. Auteur pendant plusieurs années de
Chansons de Bilitis postdebussystes qui, à dé-
faut d'une personnalité très accusée, décelaient
du moins un sens harmonique subtil et dont
quelques-unes, transposées à l'orchestre, ga-
gnèrent indiscutablement en accent et en cou-
leur, 1s jeune musicien est enfin parvenu à
s'évader d'un cadre par définition un. peu li-
mité. Ainsi sans transition, que je sache, au-
tre que celle de menus devoirs de classe, il.
saute du simple lied à la symphonie, autant
dire, ou tout au moins à un genre qui, dit-on,
non absolument réussi, peut ne pas valoir un
lied parfait, mais en tout cas exige un peu plus
quant :i l'invention et à la forme. De fait l'œu-
vre de G. Dandelot semble affecter, plutôt que
les formes du concerto proprement dit, celles
plus indépendantes de la symphonie (ce n'est
pas moi qui m'en plaindrai) ou plus précisé-
nient, en raison de ses dimensions restreintes
et malgré l'appât trompeur d'un orchestre par
trois, de la symphoniette. Alors que le concerto
vise à ne mettre au premier plan que la vir-
tuosité, la symphonie y met la musique. Sans
négliger la virtuosité ce qui eût été acte de
pur vandalisme quand on dispose d'une inter-
prète de choix comme Mlle Tagliaferro, l'au-
teur, plus ambitieux, a voulu faire œuvre non
seulement de pianiste mais de musicien.
Il y a dans ce concerto d'heureux passages,
notamment le début, un fugato libre à la ma-
nière du concours des Maîtres dont un motif
s'inspire et avec, bien entendu, les soixante-
dix-sept réglementaires infractions à la règle,
autant
J'aime moins la seconde idée, idée féminine
comptait d'hommes célèbres en littérature, arts
ou finances, habituels courtisans du ministrs
et de sa femme. Les heures où elle voyait
l'homme qui l'avait refusée assis à sa table,
témoin' de cette réunion d'élite, de l'éclat des
lustres de l'empressement des valets, de la
magnihcence du couvert, durent compter parmi
les plus vaniteuses de sa vie. Quelle glorieuse
riposte aux jours lointains où elle l'avait at-
tiré à Crassier dans l'espoir .qu'il serait sé-
duit par l'intimité du presbytère et la simple
existence qu'y menaient les Curchod M. La-
vaquery raconte qu'un jour, comme Gibbon
vantait devant elle l'heureuse situation d'un
de ses amis, possesseur de 20,000 livres de
rente, Mme Necker prit un air consterné
«Rien que ça? Pas plus de 20,000 livres? »
fit-elle d'un ton de compassion qui sous-enten-
dait « Comment peut-on vivre avec si peu! »
G. Lenotre.
^Tournée parlementaire
lite des réparations, c'est la faillite de la sécu-
rité » déclare l'orateur. « La France, dit-il, ne
doit, ne peut plus diminuer ses armements. »
Quant aux négociations directes avec l'Allema-
gne, M. Paul Laffont demande jusqu'à quel point
on peut avoir loi dans la parole de rA!lemagrie.i
M. Paul Laffont. Nous avons pu mesurer depuis
Bismark et.Stresemann toute la duplicité de l'Alle-
magne. Le Reich d'Hitler n'a point changé le livre
M ein Kampf ne laisse aucune illusion sur ce point
aussi ne peut-on pas trop attendre des conversations
engagées.
En les provoquant, l'Allemagne a voulu faire échec
k la Société des nations en négociant en dehors de
Genève. Déjà, le pacte à quatre était un accroc au pacte
de la Société des nations. Quelques gestes de mauvaise
humeur de nos alliés de l'Europe centrale l'ont bien
montré.
Eh bien I je demande que notre gouvernement reste
fldèle à la Société des, nations.
L'orateur rappelle que la semaine dernière, dans
un discours retentissant, le président Roosevelt
a dijt son admiration pour la Société des nations.
Comme M. Laffont s'étonne que lo gouvernement
Ify&nçais n'ait pas donné son.. adhésion à ce dis-
cours, h; président du conseil déclare que cela
a été fait et qu'il a adressé aussitôt au président
de ta grande République américaine un message,
de reconnaissance et de félicitations.
L'ancien ministre des P.T.T., dont le. discours
a été très applaudi, se dit persuadé que la causé
de la paix peut être encore gagnée, car tous les
peuples, sauf peut-être le peuple allemand, la
veulent; il souhaite que ce soit la France qui in-
dique au monde le moyen de la garantir.
M. Lémery
Tout en déplorant l'absence du ministre des
affaires étrangèies, M. Lémery (Gauche démo-
cratique), croit devoir répondre à certaines cri-
tiques que M. Paul-Boncour lui a adressées.
Le sénateur de la Martinique déclare avoir re-
.proché au ministre des affaires étrangères, non
pas d'avoir dit que l'article 213 du traité de Ver.
sailles devrait être remisé au magasin des vieux
accessoires, mais d'avoir affirmé ne pas pouvoir
le mettre en action. Et cela, le sénateur de la
Martinique le maintient, comme il maintient que le
pacte à quatre et l'aide-mémoire au Reich ont
soulevé bien des inquiétudes chez nos alliés de
l'Europe centrale.
M. Lémery. M. le ministre des affaires étrangères
a beaucoup parlé des résultats de sa politique. H n'en
a oublié qu'un c'est le réarmement de l'Allemagne.
(Très bien I droite.)
En face des armements de l'Allemagne nous vou-
drions savoir comment on peut encore espérer le main-
tien de la paix par le moyen d'une coopération inter-
nationale alors que disparaissent les engagements d'as-
sistance. Comment congoit-on cette coopération î Com-
ment l'organisei-a-t-on .11
• Ji faut que ce débat se termine par des faits et des
promesses et non par des paroles vagues comme celles
'qui ont été .prononcées mardi.
Si on veut accepter de désarmer en quelque manière
la France, en ne lui donnant comme compensation que
des pactes qui ne sont que des chiffons de papier, un
contrôle Inexistant, jg dis non (Très bien 1 Applau-
dissements.)
La France ne doit rien abandonner de sa force si
elle n'obtient pas des garanties équivalentes de sécu-
rité. Que l'on nous donne sur ce point des engagements
formels. (Vifs applaudissements.)
A ceux qui prétendent que l'on risque l'isole-
ment, M. Lémery, répond que la France doit comp-
ter sur elle-même et non plus sur les autres.
D'ailleurs, fait-il remarquer, les intérêts du peu-
ple anglais ne sont-ils pas « soudés » à ceux du
peuple français? L'isolement? L'orateur le re-
doute plutôt du côté de l'Europe centrale « où
nos faiblesses et nos atermoiements ont provoqué
des déceptions ».
Quant à la course aux armements, on aurait
dû la prévoir ta jour où l'on a accordé à l'Alle-
magne l'égalité des droits. « Restons forts et n'ou-
blions pas que la France est la dépositrice de
la, plus belle promesse et, du plus grand espoir de
l'humanité », a conclu M. Lémery qui a été lon-
guement applaudi et que de nombreux collègues
sont venus féliciter quand il est descendu de la
tribune.
extraite de l'idée mâle, comme Eve d'Adam,
mais sans féminité aucune. Ce rythme uni-
forme et, persistant de deux noires, la deuxième
pointée,, et trois croches, procédé commode
employé fréquemment par Schumann quand
il était à cotfrt, devient à la longue fatigant,
obsédant jusqu'à la souffrance. Le scherzo est'
agréable avec sa partie centrale très joliment
f auréenne; d'ailleurs le seul moment expressif
dans l'œuvre. Mais, en ses trois comparti-
ments étanches où l'on s'ignore d'un thème à
l'autre, il apparaît vraiment d'une brièveté
contre nature. On le déplore, car l'orchestre en
était fin et charmant.
D'andante, point. C'est pourtant dans le mou-
vement lent qu'on peut juger des qualités les
plus profondes d'un musicien. Sans les admi-
rables adagios de ses sonates, entre autres les
op. 106 et 111, du dix-septième quatuor de la
Neuvième, Beethoven ne serait point Beetho-
ven1, Sans les andantes non moins merveilleux
de ses quatuors et du second quintette, nous
n'aurions de Fauré qu'une idée fort incomplète.
Quant au quatuor de Debussy, dont la pre-
mière page de VAndantino est le plus bel orne-
ment, il survivrait à peine, et celui de Ravel
serait bien compromis. Mais passons, puisque
de sensibilité l'auteur n'a cure. Voici donc le
finale, non moins bref que ses devanciers, mais
éclatant, tumultueux. Un thème rapide, cursif,
semble devoir créer une atmosphère nouvelle.
Mais presque aussitôt réapparaît, bien un peu
indiscrètement, note pour note, l'enfant terri-
ble du début, ce thème obsédant qu'on n'a pas
eu le temps d'oublier et qui tient décidément
à marquer son droit à l'existence. C'est là, à
mon avis, la grave erreur pas de contraste
entre le premier mouvement et le finale, qui,
faits des mêmes éléments, des mêmes senti-
ments, de.la même atmosphère, ne .sont séparés
que par un court intermede. Il en résulte une
ïi©évHable monotonie, la monotonie de l'œuvre,
il faut bien le dire, parcimonieuse d'invention,
insuffisamment pensée et hâtivement écrite,
l'çeuvre, pour ainsi parler, née avant terme.
ttégrettons-le, car, je le répète, elle contient
des pages très musicales. A côté d'agrégations
ingénues en trompe-l'oreille, témoin ces octaves
uniformément raccourcies pendant les six mi,
nutes du second thème, le jeune musicien en
est encore à l'âge de'pierre de la fausse note
à ce point de vue, Alban Berg et Webern ha-
billent mieux, nous trouvons des harmonies
délicieuses, comme dans le trio fauréen du
scherzo. Peut-être a-t-on beaucoup reproché à
M Daiidelot son debussysme lors des Chansons
faJïïHtis. Dans son effort pour désarrondir ses
angles, il s'est laissé prendre aux embûches
d'un cubisme strawinskyste un peu élémen-
taire. Souhaitons que, s'affranchissant une
nouvelle fois, il devienne définitivement lui-
même.
Aux autres séances, notons de belles exécu-
tions des Impressions d'Italie d'un Gustave
Charpentier dans tout l'enthousiasme de la
jeunesse, et de Sauge-fleurie d'un Vincent
d'Indy prématurément grave. Puis, adroite-
LES ORDRES DU JOUR `'
Après une suspension de séance ordonnée afin
de permettre aux membres du bureau nommé
pour 1934 de rendre visite au président de la Ré-
publique, M. Jules Jeanneney fait connaître qu'il
a été s-aisi de deux ordres du jour.
Le premier, signé de M. Lémery et de plusieurs
de ses collègues, est ainsi conçu
Le Sénat,
Interprète des vœux du pays passionnément attaché
à la. paix, et assuré que tout affaiblissement, de nos
forces, toute atteinte au statut européen fixé par les
traités, aurait pour résultat immédiat d'en compromet-
tre le maintien.
Fait confiance au gouvernement pour conformer la
politique de la France à ces directives,
Et' passe à l'ordre du jour.
Le second porte les signatures de MM- Henry
Bérenger, président de la commission des affai-
res étrangères Bienvenu-Martin, président du
groupe de la Gauche démocratique, radicale et
radicale socialiste; Louis Barthou, président du
groupe de l'Union démocratique et radicale; Jo-
seph Caillaux, président de la commission des
finances, etc.
Il est ainsi libellé ;j
Le Sénat,,
Fidèle au pacte de la Société des nations et à ceux
qui en dérivent, notamment lç pacte de Locarno, et
rappelant les principes consacrés dans ces pactes,
Faisant confiance au gouvernement pour poursuivre
l'œuvre de la paix dans le cadre de la Société des na-
tions, pour fortifier ses amitiés internationales, pour
assurer sa défense nationale, et pour consolider la sécu-
rité de la France,
Passe à l'ordre du jour.
La priorité ayant été demandée en faveur du
premier de ces deux ordres du jour, M. Henry
Bérenger, soutenant le second, déclare qu'à l'is-
sue d un débat qui a honoré le Sénat, la haute
Assemblée se doit d'apporter au gouvernement,
dans les conversations qu'il poursuit, une appro-
bation explicite et sans réserve. Pp
M. Henry Bérenger. D'abord, la France*doit rester
fidèle aux principes de droit international posés par le
pacte de la Société des nations, frontispice du traité
dfi Versailles, et par les pactes qui en sont dérivés
pacte de Locarno (19*25) et pacte de renonciation à la
guerre (1928).
On a pu médire, et ici même, de ces pactes, en criti-
quer les lacunes, les Imperfections. Il ne faut pas
oublier qu'ils sont nés dans les contradictions et les
compétitions de l'après-guerre; il ne faut pas oublier,
surtout que, depuis quinze ans, ils ont maintenu la
paix en Europe et contribué à éviter une nouvelle con-
flagration, qui eût été plus effroyable encore que la
dernière.
Nous estimons qu'ils répondent à l'idéal le plus pro-
fond de notre démocratie toujours défendus par nos
gouvernements, ratifiés par notre Parlement, approu-
vés par la conscience populaire, ils sont conformes
aux principes de notre droit public tels que, la Révolu-
tion française les a consaoréè,. et c'est de Paris qu'ils
ont été portés* à Genève portes hommes d'Etat répu-
blicains les mieux qualifiés. Nous approuvons M. le
ministre des affaires étrangères de les défendre et
nous estimons que le moment serait mat choisi, quand
de divers côtés on cherche à diminuer leur valeur et
à déserter le drapeau de la Société des nations qui est
celui de la France, pour laisser contester leur efficacité
qui est notre essentielle sauvegarde. (Applaudisse-
ments.)
Le deuxième principe sur lequel les signatai-
res de l'ordre du jour appuient leur confiance,
c'est que le gouvernement s'efforce de toujours
fortifier les liens nous unissant aux amis qui
nous ont aidés à l'heure du péril. Le troisième,
c'est qu'en face de certains réarmements suspects
H convient d'approuver le gouvernement quand
il fait savoir que l'existence de paotes de garantie
ne suffit pas pour assurer notre sécurité, et que
notre vigilance doit s'employer à perfectionner
nos moyens de défense nationale.
Très applaudi par l'unanimité de l'Assemblée, le
président de la. commission des affaires étrangères
conclut ainsi
M. Henry Bérenger. Nous avons confiance dans la
Société des nations; mais nous mesurons l'importance
d3 certains déparie aussi nous déclarons-nouB soli-
daires de notre gouvernement pour tenir fermement
les deux bouts de la chaîne organisation internatio-
nale, défense nationale,
C'est en nous inspirant de ces considérations que nous
avons rédigé l'ordre du jour que nous vous demandons,
mes amis et moi, de bien vouloir voter. (Vifs applau-
dissements.)
DISCOURS DE M. CAMILLE CHAUTEMPS
PRÉSIDENT DU CONSEIL
Le président du conseil regrette que « les exi-
gences vraiment abusives de l'actualité scanda-
leuse aient empêché le peuple de France, si sain
et si' laborieux », de suivre, comme il l'aurait dû,
le débat qui vient de se dérouler devant la haute
Assemblée et qui fut, dit-il, « si remarquable par
son ampleur, son objectivité" et la hauteur des
vues qui ont été exposées ».
'M. Camille. Chautemps ne veut pas rouvrir ce
débat, le ministre des affaires étrangères ayant
déjà, estime-t-il, « justifïé les résultats d'une poli-
tique par laquelle il s'est efforcé de poursuivre avec
une ténacité discrète et utile l'extension du réseau
d'amitiés quii sont un des éléments de la puis-
sance française u.
Le président du conseil déclare « accepter
l'ordre du jour que le président de la commission
des affaires étrangères vient do commenter, et
approuver pleinement les idées qu'il a exposées.
Il demande à M. Lémery, puisque son ordre du
jour comporte également la connanoe, de se rallier
à, celui du président de' la commission des affaires
étrangères. x
̃ M. Camille Chautemps. Au cours de la discus-
sion, deux faits ont été notamment évoqués le pre-
mier a trait aux transformations importantes dans la
ment joué par Mlle Lucienne Radisse, le con-
certo pour violoncelle de Saint-Saëns réappa-
rut après quelque trêve illusoire. Un concerto
dont je n'irai pas jusqu'à dire que je l'aime
passionnément, mais qui, assurent les techni-
ciens, met admirablement l'instrument en re-
liéf. La belle malice si l'auteur supprime l'or-
chestre, ou à peu près, comme c'est le cas ici,
comme c'est le cas, d'ailleurs, pour Tzigane, de
Ravel, ce qui fait que Tzigane m'intéresse infi-
niment plus au piano, qui existe, qu'à l'or-
chestre, qui n'existe pas. Je signale à Lucienne
Radisse, si d'aventure elle les ignore, les beaux
concertos de Honegger et de Julien Krein (très
fier de connaître ce dernier depuis quinze
jours). Ils feront valoir tout autant ses qualités
et, de plus, intéresseront tout le monde, elle,
son public. et les auteurs, qui sont vivants.
Car ils n'ont pas cette solennité académique
dont Saint-Saëns se départ difficilement,
même lorsqu'il veut être gai et caustique
comme dans ce Carnaval des animaux qui est,
je crois bien, ce qu'il y a de plus sérieux au
monde.
Le Poème romantique de M. Mazelier, que
Firmin Touche exécute brillamment, n'était
pas inédit pour toute l'assistance. Apitoyons-
nous'un instant, en dépit des qualités de en
morceau, sur le sort des infortunés jurés (ils
jurèrent un peu tard.) qui, au récent concours
de violon, ne le subirent pas moins de qua-
rante-cinq fois, c'est-à-dine plus qu'ils n'enten-
dront jamais, je l'espère, la Pastorale et le
Prélude-et-mort, même si Dieu leur prête lon-
gue vie. Quarante-cinq fois Et l'on en cite
qui sont encore, ma foi très lucides. La
véritable nouveauté consistait donc dans l'or-
chestration plus que dans le texte musical lui-
même. Page habile, d'ailleurs, bien construite,
bien sonnante avec ses jets de cuivres très
Rhapsodie norvégienne, et qui n'omet à dessein
aucune des insidieuses caractéristiques du
morceau d'épreuve et de bravoure. Mais quand
se souviendra-t-on, au Conservatoire de Paris,
qu'il est certain concerto de Szymanowski, cer-
taine Fontaine d'Arélhuse que connurent, il y a
dix ans, les concurrents d'un conservatoire
départemental et qui, outre que plus difficiles
encore, ce qui permettrait, éliminant la plu-
part des candidats, de faire du premier prix
une chose rare et enviable, et de lancer sur le
marché, en ces temps de crise, moins de vir-
tuoses in partibus, sont de fort belle mu-
sique, question pas si négligeable.;
Après le concerto de tout à l'heure, j'eus la
curiosité de réentendre celui de Serge Pro-
kofleff le troisième qui se jouait chez
Pasdeloup. Comparaison possible dans la me-
sure où l'on peut comparer Sainte-Sophie de
Stamboul à la tour métallique de Lyon. Des
deux, c'est incontestablement celui-ci le plus
récent, quoique déjà célèbre il y a dix ans Ici,
partout l'invention éclate, la puissance, l'abon-
dance des idées, l'audace harmonique, la ri-
chesse, la variété du rythme. J'en aime jus-
.qu'aux défauts. =̃ si .défauts il y a (Deut-êtcs
politique d'un grand pays européen. On S évoqué titi
changement de politique intérieure allemande. Ai-Je
besoin de dire, messieurs, que la France est trop res-
pectueuse de la souveraineté des autres nations pour
s'immiscer dans le libre choix d'un autre peuple ? Mais
je comprends que certains orateurs aient marqué l'émo-i
tion que peut cependant causer aux hommes qui mè*
ditent l'adoption, quasi unanime dans un pays, d'une
doctrine portant en elle une telle exaltation du senn
timent national qu'elle risque de se projeter au dehors
et de réagir sur la politique extérieure de la nation,
(Très bien Très bien !)
M. Joseph CaXUaux. Très bonne définition î
Le président du conseil. Le second fait. c'est le
brusque et injuste départ de l'Allemagne de la Société
des nations et de la conférence du désarmement. On
a déjà dit que les motifs de départ invoqués par l'Alle-
magne, et tirés de ce que les exigences des autres pays
porteraient atteinte à l'honneur allemand, ne répon-
dent pas à la réalité. Dès le lendemain de la guerre*
la France, par une série de concessions, a marqué sa
volonté de paix; jamais elle n'a eu la pensée d'humi-
lier ou -d'amoindrir un grand peuple qui avait le droit
de reprendre sa place parmi les grandes puissances
du monde. L'Allemagne, elle, a quitte la conférence dit
désarmement au moment où il semblait qu'un accord
unanime pû£ se réaliser; elle ne 'peut dono' pas être
surprise si son attitude provoque une impression d'in«
quiétude et même de méfiance.
Certains orateurs ont demandé que fussent tirées
les conclusions de cet état de fait, à savoir la revision.
des doctrines qui ont guidé notre diplomatie pendant
les dernières années. Ces doctrines, tous les gouver-
nements successifs de la France depuis la guerre s'ea1
«ont inspirés; c'est donc une sorte d'examen de con-
science national à quoi l'on nous convie.
Après que le problème eut été exposé, la solution,
al-je dit, en a été apportée, ou plutôt des solutions
différentes. Quelques orateurs ont préconisé le main.
tien de la force française; d'autres ont rappelé que
c'est notre mission historique de poursuivre des négo-
ciations qui ne sont peut-être pas dépourvues de
risques, mais qui sont à coup sûr glorieuses.
Je voudrais vous montrer qu'entre ces deux néce^
sités également nationales il n'y a pas contradiction*
(Assentiment.) > ̃
Coopération internationale et défense nationale
La politique de coopération internationale est, elle
aussi, un des éléments de notre défense nationale.;
En effet, quand on parle de réduire les armements,
il ne e'agit que d'une éventualité qui ne se réaliserait
qu'en vertu d'une convention générale; il n'entre pas
dans notre esprit de laisser affaiblir la force fraiw
çalse en face du réarmement d'autres peuples.
En ce qui concerne nos relations avec nos amis, je»
demande qu'on tente plutôt do voiler les difficultés
que de les aggraver. J'ajoute que jamais ces relations
n'ont été plus ferventes ni plus intimes qu'aujour-'
d'hui. Je ne vois rien qui soit susceptible d'affaibliB
la confiance que nos amis ont en nous; nos négocia-4
tiens patientes et tenaces ne sauraient en rien les inn
quiétet et- ils ne peuvent que se réjouir de voir la)
Franco posséder une force qu'elle met à leur servies,
(Très bien 1) .̃•
Je viens de faire allusion à certains do nos amis'
les plus fidèles; il est aussi de grandes nations, qui
ont le droit d'avoir leur libre opinion en face de ia
nôtre, mais dont l'esprit de cordialité demeure pour,
nous un élément essentiel de là sécurité européenne,
C'est ainsi que l'accord entre deux grandes démomw
ties telles que la République française et l'Empire bri-
tannique constitue l'un des piliers essentiels de ïa!
paix du monde. (Très bien -I)
Si nous nous éloignions hâtivement de certaines né*
gociations, aurlons-nous ainsi fortifié notre position à!
l'égard du grand paye dont je viens de parler ? Certes
je ne méconnais pas la nécessité d'une politique do
défense nationale. Dans ce domaine, je reste en plein'
accord avec les ministres de la guerre, de la marine
et de l'air. Je n'apporterai jamais de propositions al-i
lant à rencontre de leurs désirs. Mais loin de voir une;
contradiction entre les deux politiques de coopération;
internationale et de défense nationale, j'estime que la
politique nationale trouve son meilleur appui dans la'
politique de coopération internationale. (Applaudisse-
ments.)
Le discours de M. Roosevelt
Comme l'a déjà fait si éloquemment M. Paul Laffont,
je voudrais évoquer le récent discours du président)
Hoosevelt pour lui apporter, du haut de cette tribune,
une réponse solennelle et fervente. Le jour'même ou
oe discours a été connu, nous avons exprimé haute-
ment, tant par la vole de la presse que par la voie
diplomatique, notre approbation et notre gratitude^
Je voudrais maintenant montrer que ce message «a-*
pital du président de la grande République amérn
calne et la réponse que nous y avons faite contiens
nent tout ce qui peut faire comprendre notre politn
que extérieure. M. Roosevelt a loué les efforts de son:
Illustre prédécesseur M. Wilson en faveur de la So-:
oiété des nations et s'est- exprimé à l'égard de celle-ci;
en termes obligeants. Même s'il y avait dans ses
éloges quelque, ironie, commo' certains l'ont prétendu,
nous ne pouvons que nous réjouir en constatant que
le président Roosevelt ait senti lui-même la nécessité.
d'une coopération avec la Société des nations.
Son discours renferme aussi trois affirmations ca-
pitales. La première est qu'aucun peuple ne doit, à'
''heure présente, accroître ses armements. Nous ac-<
cueillons cette affirmation aveo enthousiasme,
La seconde est que, si toutes les grandes nations
prenaient l'engagement solennel de ne jamais revcn->
diquer un territoire étranger et de ne jamais se livrer
à une agression, il y aurait là une garantie de paix
durable. La réponse que nous avons faite à cette affli*
mation est l'écho de la pensée de tous les Français
nous no revendiquons pas un pouce do territoire
étranger! Nous ne ferons jamais une guerre d'agrès-*
sion, et nous souhaitons que tous les autres peuples
prennent les mêmes engagements, qui constitueraient
une garantie certaine du maintien de la paix.
Nous demandons seulement que, poussant jusqu'au
bout sa pensée, le président Roosevelt admette que;
la guerre étant mise au ban des nations comme un
crime, il n'y ait plus de neutralité à l'égard d'un agresM
seur criminel. (Très bien' )
Tout le pacte, rien que te pacte!
Telles sont les idées que nous entendons défendre!
dans le cadre de la Société des nations. Le président
Herriot disait « Tout le paote, rien que le pacte' ;»J ~,l
quelque disparate dans le finale) qui son!!
encore du génie. Sans prétendre, le joueç
comme Prokofieff lui-même au seul Mitro-.
poulos je concéderai ce droit M. Uninsky y
déploie une énergiei qu'il étaye d'un rythme
inflexible. Sa technique est solide. Mais il reste;
un peu sec, un peu indifférent dans les passa-
ges expressifs, là où la musique a la parole.
Pour m'en convaincre, malgré mon aversion
pour le piano solo dans un concert d'orchestre
et au prix de la troisième symphonie de!
Brahms double trait d'héroïsme dont il ne
se doutera jamais, j'ai attendu qu'il reparût
pour jouer le Nocturne en fa dièse ce jour-Iàj
je ne l'entendis, pas davantage.
Auparavant, M. van Raalte, un chef d'or-
chestre de haute classe, avait donné de la Péri
de Paul Dukas, une exécution ardente et colo-
rée, précédée nous l'en remercions. de la
fanfare qu'on a souvent le tort d'omettre, cette
fière, somptueuse Fanfare de là Péri, écrite a
l'instigation de Robert Brussel pour les séances,
de Natacha Troulianowa lorsqu'elle créa l'œu-i
vre au Châtelet. Mais je parle là de temps loin-
tains 1912, un siècle
La semaine suivante, nous avions le plaisir,
qui nous est trop rarement accordé, de réen-s
tendre JVitt^, le noble poème de Gustave Sarcm-.
zeuilh, d'après Henri de Régnier « 0 toi,
chère nuit, ô toi lumineuse et secrète! »
page d'abord toute de mystère, de mélancolie^
de rêve, mais où peu à peu s'éveillent, en ua
long crescendo, toutes les vies latentes. Il serait
bien désirable qu'on fût un peu moins avare
de ce beau morceau. Et, puisque l'occasion* ë'én
présente, je rappelle à qui de droit qu'il est, du
même auteur, un magnifique, éloquent poème
pour violon et orchestre, plein d'une musiquu
mtense qui n'exclut pas la virtuosité. On l'en-
tendit juste une fois .chez- Colonne. Il n'y a
pourtant pas pléthore, dans ce genre, de belles
œuvres contemporaines les compositions de
Szymanowski, dont je parlais à l'instant, le
concerto de Casella, ce poème de Samazeuilh.
Je crois bien que c'est tout ce qu'on peut di-
gnement opposer, depuis Edouard Lalo, aux
concertos de Beethoven et de Mendelssôhn.
Les virtuoses sont continuellement à harceler
les compositeurs, leur reprochant de négliger,
qui le violon, qui le violoncelle, qui le saxo-
phone, ou l'orgue, ou les sopranos légers, ou
les ondes Martenot, que sais-je Et quand le
compositeur se laisse séduire, quand l'œuvro,
est faite, sitôt déflorée on l'enterre vive commq
une vestale.
Nous réentendîmes aussn comme chaque
année louable habitude, la fidèle
Habanera de Louis Aubert, musique d'une vo-'
luptueuse complexité et qui n'a pas fini de nous
(livrer ses secrets le prélude de l'Ouragan
d'Alfred Bruneau. Puis, chantées délicieuse-
ment par Mme Marjorie Lawrence, d'aimables,
élégantes mélodies de Philippe Gaubert. Enfin,
la Suite en fa, d'un anachronisme brillant, la
meilleure composition, je pense, d'Albert
Roussel.
Florent jjçBM-t'EE,
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