Titre : Le Temps
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1929-03-22
Contributeur : Nefftzer, Auguste (1820-1876). Fondateur de la publication. Directeur de publication
Contributeur : Hébrard, Adrien (1833-1914). Directeur de publication
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Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 22 mars 1929 22 mars 1929
Description : 1929/03/22 (Numéro 24686). 1929/03/22 (Numéro 24686).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
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Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 15/10/2007
2. LE TEMPS. 22 mars 1929.
traire son esprit des problèmes tactiques limités
d'une portion du front pour lui fournir, le vaste
champ de l'ensemble des fronts alliés, on le pré-
parait a son rôle décisif, celui de commandant en
chef.
Il faut brûler les étapes dans le récit d'une telle
activité. C'est la préparation de l'envoi des ren-
forts en Italie, c'est la nomination, le 15 mai 1917,
comme chef, d'état-major général de l'armée, c'est
la campagne d'Italie, c'est la création du comité de
presse interallié de Versailles, c'est enfin, à la fin
de mars 1918, la conférence de Doullens où M.
Clemenceau et lord Milner tombent d'accord pour
confier à Foch le commandement suprême, déci-
sion à laquelle le général Pershing se rallie en
venant déclarer au nouveau chef
Je viens pour vous dire que le peuple américain tien-
drait à grand honneur que nos troupes fussent enga-
gées dans la présente bataille.
Je vous le demande en mon nom et au sien. H n'y a
pas en ce moment d'autre question que de combattre.
L'infanterie, l'artillerie, l'aviation, tout ce que nous
avons est à. vous. Disposez-en comme il vous plaira. H
en viendra encore d'autres, aussi nombreuses que né-
cessaire/ Je suis venu tout exprès pour vous dire que
ile peuple américain sera fler d'être engagé dans la
plus grande et la plus belle bataille de l'histoire.
A l'offensive allemande de l'Aisne et de la
Champagne, Foch répond, le 18 juillet, par celle
de Mangin débouchant de la forêt de Villers-Cotte-
rets. Conjuguée avec celle des Franco-Anglais à
l'est d'Amiens, elle ébranle définitivement l'édi-
fice allemand qui dès lors va s'effondrer. Le sablier
est tourné.
Le 6 août, M. Clemenceau propose d'élever. le
général Foch à la dignité de maréchal de France,
décret que M. Poincaré signe le jour même. Le
23 août, en présence de MM. Clemenceau, Leygues,
Loucheur, et d'officiers des armées alliées, le
président do la République lui remettait le bâton
étoile d'or, en terminant l'allocution où il rappe-
lait ses éminents services par ces mots « Nous
voulons vaincra. Nous vaincrons! »
Le 11 novembre, l'armistice signé dans son
wagon, à Rethondes, consacrait la victoire.
En ce même mois de novembre 1918 le maré-
chal Foch, après une motion du Parlement, joi-
gnant à son nom celui de M. Clemenceau, et
déclarant qu' « ils avaient bien mérité de la pa-
trie », était élu, sans concurrent, à l'Académie des
sciences et a l'Académie française; il recevait celles
des plus hautes décorations alliées qu'il ne possé-
dait pas encore; mais sa joie suprême devait être,
aux, premiers jours de décembre, de rentrer en
triomphateur dans Metz redevenue française. Ceux
qui avaient, en âge de comprendre et de souffrir,
vécu le drame de 1870-71 ont connu, en ces jours de
la nu de 1918, dans les villes-symboles Metz et
Strasbourg, la plus intense des emotions humai-
nes. Pour un officier comme Foch, dont toute
l'existence avait été étreinte par ce deuil de la
patrie mutilée, et qui, sans l'agression allemande
d'août 1914, eût pris sa retraite au moment où
l'âge inexorable vous raye de l'annuaire, sans
avoir réalisé ce pourquoi il avait Vécu et tra-
vaillé, l'entrée dans Metz était la joie au delà de
laquelle on n'en imagine pas d'autres.
Après la guerre
Le maréchal Foch était entré, vivant, dans la
gloire. Il fut fêté à Londres où le gouvernement
Êritannioue le fit field-marshal. Il reçut des lau-
riers d'or ciselé, des adresses reconnaissantes et
louangeuses, de Pologne (où il avait reçu le ma-
rechalat), de Portugal. d'Amérique, de Roumanie,
les villes deLeeds et de Manchester le firent citoyen
d'honneur, on l'acclama partout où il se rendit, à
•Morlaix, à Arreau, à Bordeaux, Tarbes, Bergues,
Dunkerque, Saint-Etienne, Lille, Tourcoing, Nan-
cy Lyon, Abbeville, Beauvais, Boulogne, Col-
mar, etc. On le convi'a à Valentina. le village. de
ses ancêtres, on l'invita à Bruxelles, à Rome, en
Pologne, en Tchécoslovaquie, en Algérie, au Maroc,
aux Etats-Unis, il se rendit à plusieurs reprises
en Angleterre soit comme hôte d'honneur soit
pour y rendre le dernier devoir à ses collabora-
teurs et amis de la grande guerre, Wi:lson et Dou-
glas Haig.
Dans l'esprit de l'actuelle génération française
et étrangère le maréchal Foch avait redonné au
génie militaire français une suprématie compa-
iable à celle de Bonaparte. Ces deux grands soldats
n'ont pourtant pas eu à envisager des problèmes
simillairès et l'unité du commandement ne s'est
pas exercée de la même manière; mais il faut aux
foules un nom qui concrète la victoire. Dans la
réponse que M. Poincaré lui adressa le 5 février
jy20,. lors de sa réception à l'Académie française,
lui dit
« Soldat respecté non seulement par toutes les
rations de l'Entente et par les jeunes Etats euro-
péens, mais par nos ennemis d'hier.. Vous et vos
armées vous avez sauvé notre vieille civilisation
latine, notre langue, nos chefs-d'œuvre, notre
passé et notre avenir. »
En juillet dernier le maréchal assistait à l'inau-
guration à Cassel de sa statue équestre, comme il
avait vu, deux ans auparavant, un autre monu-
ment s'élever à sa gloire Bouohavesnes.
Tout ce qu'un peuple. peut donner à un grand
serviteur, il l'avait reçu, mais les hommes sont
impuissants à guérir certaines blessures dont la
foi dans l'au-delà seule apaise le tourment. Le
maréchal Foch avait perdu son seul fils, Germain,
tué dans le premier mois de la guerre, et le mari
de l'une de ses deux filles, le lieutenant Bécourt.
Pour que le nom de Foch ne disparût pas, le
Conseil d'Etat avait autorisé, en juin 1927, qu'il
fût adjoint à celui des enfants de ses filles; Mmes
Fournier et Bécourt. Le maréchal, dont le cœur
avait subi tant d'assauts, a succombé par le cœur.
Il avait auprès de luil tous les siens. Dans ses
derniers jours, l'unique visite permise fut celle
du général Weygand, son collaborateur et son
ami, dont on ne dira jamais assez le rôle admi-
rable auprès du chef dont il comprenait et inter-
prétait la pensée. Leurs deux noms demeureront
inséparables dans l'histoire.
ANECDOTES ET JÉÇITS FAMILIERS
L'anecdote, si elle est authentique, peut tenir
fa place à côté de la biographie d'un grand homme.
Elle exprime, dans une sorte de raccourci, des
événements souvent considérables qui ne s'en
gravent que mieux dans la mémoire. Les foules
aie peuvent être que curieuses de ces miettes
de l'histoire quand elles sont recueillies dans l'en-
tourage d'un Foch.
Rien n'est indifférent des parales qu'a pu pro-
noncer l'illustre soldat dans l'abandon de con-
versations familières. Le maréchal Foch ne parlait
jamais pour ne rien dire. Tous ces propos étaient
substantiels, lumineux, évocateurs. Ils étaient à la
fois spontanés et réfléchis. « Attendez! attendez! »
Tels étaient les termes dont il ponctuait volontiers
son récit, rapide, imagé.
N'avait-il pas sa place dans nos annales ce mot
souvent cité sans qu'on sache toujours à qui l'at-
tribuer exactement, par lequel il caractérisait no-
tre effort militaire pendant l'action « long, dur,
Sûr »? C'est un des exemples les plus saisssants
de ces formules synthétiques qui étaient si bien
dans sa manière, soit qu'il enseignât la guerre,
goit qu'il la fit.
+**
Nous pensons qu'on nous saura gré d'avoir re-
'cherché dans les diverses circonstances où il parla
au cours des hostilités et depuis, et où il racon-
tait, avec la franchise et la simplicité qui le ca-
ractérisaient, ses souvenirs sur les gens et sur
les choses, et sur lui-même. Car il n'est homme
qui se soit mieux connu, observé, surveillé, pour
tendre à un rendement supérieur de ses facultés
sans autre ambition que de servir la gloire de
son pays, qu'il mettait bien au-dessus de la sienne.
Nous aimons à surprendre ies secrets de la
formation de ces intelligences exceptionnelles, de
ces surhommes. Charles Le Goffic qui, l'un des
̃premiers chanta dans des livres remarqués le
héros des marais de Saint-Gond, qui l'a approché
fréquemment, en a reçu peut-être les plus inté-
ressantes confidences. II l'interrogeait un jour sur
sa formation
Mon processus? lui répondit le maréchal. L'histoire
Se ma formation? Rien à dire jusqu'à mon départ pour
Metz, au collège Saint-Clément. Ah si, pourtant, mes
lectures: Thi ers d'abord. Dès ma sixième, à Tarbes,
je le savais presque par cœur. je l'avais bien lu dix
fois, et ce n'était pas flni. Et puis Walter Scott. Mais
Walter Scott, après tout, o'est encore de l'histoire. Et
enfin, mais plus ..tard, Taine, le Taine des Origines.
trop systématique peut-être. n'importe, il m'a impres-
sionné fortement aussi, oelui-là. Bien entendu, et pour
n'avoir pas à revenir sur ce chapitre, j'ai lu, étudié
avec toute l'attention requise, une fois dans le métier,
tous les classiques de la guerre: le Mémorial, Clau-
zevitch, Bernhardi, l'école allemande et l'école française,
Ardant du Picq, Maillard, Langlois, etc.
Quand, de son côté, M. Charles Chassé l'interro-
geait sur son style et ceci intéresse nos aca-
démiciens au milieu desquels il a siégé « Ma
phrase, concédait le maréchal Foch, doit quelque
chose au dix-huitième siècle, qui voulait simple-
ment un sujet, un verbe et un régime. » Parmi les
poètes du dix-neuvième siècle, il confessait n'avoir
jamais été dans ses lectures favorites au delà de
Musset.
:̃ ̃.̃
Il racontait qu'à l'école il avait été un remar-
quable cavalier il s'était astreint dans son exis-
tence en vertu du credo militaire, qu'à la guerre
il faut toujours être à cheval à monter deux
heures par jour, tous les jours.
Et voyez, ajoutait-il, l'ironie des choses! La guerre
éclate, elle dure quatre ans et pas une fois en ces
quatre ans, sauf pour des prises d'armes, je n'ai eu
l'occasion de montrer mes talents de cavalier. En
somme, j'ai cessé de faire du cheval à partir du jour
où j'ai commence de faire la guerre 1
Quand il fut devenu professeur à l'Ecole de
guerre, il lui sembla que quelque chose clochait
dans un enseignement trop théorique, trop en
l'air, pas assez concret. Sur son rôle d'éducateur,
il a développé dans une conversation familière
cette conception
Un professeur assume une grave responsabilité du
fait même qu'il est charge de façonner d'autres âmes,
d'autres esprits que le sien. J'ai cherché. cherche
suivant ma méthode habituelle, qui consiste à faire
table rase des théories et des principes et à me deman-
der, avant toutes choses: « De quoi s'agit-il? » Et je
ne dis pas que ce que j'ai trouvé fût bien sorcier.
Ça ne révolutionnait peut-être pas l'art militaire. mais
c'était du moins le fruit d'une réflexion mûrie, étroi-
tement appliquée aux faits et les épousant, s'y sou-
mettant, au lieu de les plier à une opinion préconçue.
« De quoi s'agit-il? » est l'expression qu'on re-
trouve à chaque instant alors qu'il a à pénétrer
une situation, une décision à prendre. « Compren-
dre d'abord » est une de ses formules habitueliesi
Des diverses anecdotes qu'on colporte sur lui,
il y a celle du dialogue qui s'engagea en 1907 en-
tre lui et M. Clemenceau, président du conseil.
M. Clemenceau qui l'avait fait appeler lui au-
rait dit
Je vous offre le commandement de l'Ecole
de guerre.
Je vous remercie, monsieur le président, au-
rait répondu Foch, mais vous n'ignorez sans doute
pas que l'un de mes frères est jésuite!
Je le sais, mais je m'en f. Vous nous ferez
de bons officiers, le reste ne compte pour rien.
Ces propos, si bien dans le caractère des deux
hommes, et qui les honoraient également, nous
ne pouvions que leur faire crédit. Mais le maré-
chal Foch eut l'occasion de démentir ce dialogue,
un jour qu'il s'entretenait avec Le Gofflc
Vous savez comment mes cours furent brusque-
ment interrompus par le général André. Planqué à la
porte par la fenêtre avec tout le haut personnel de
l'Ecole, je devais quelques années plus tard, sous le mi-
nistère Clemenceau, y rentrer par la grande porte, en
qualité de commandant. Mais ceci, c'est une autre his-
toire, comme dit Kipling, et que je renvoie à plus tard.
car elle est un peu longue. Ce que je puis vous dire
pour le moment, c'est que tout ce qu'on a raconté
là-dessus, l'anecdote du frère jésuite et le « je
m'en f. » de Clemenceau, est de la fantasmagorie.
C'est à M. Clemenceau à compléter l'anecdote,
s'il lui convient de le faire, mais voilà un dia-
logue que nous regretterons.
A ̃' '̃̃̃.̃"̃.
Le maréchal Foch n'a vraisemblablement pas
écrit de mémorial et nous devrons nous contenler
de quelques récits qu'il a faits, avec sa bonne
grâce coutumière 'dans l'intimité. C'est à la pre-
mière Marne. Foch, prévenu, se trouve à la Fère-
Champenoise vers midi, après le coup de surprise
réussi par le .général Dubois
Eh bienl dit-il aux généraux présents, ça
ne va pas trop mal. Allons, à l'ouvrage, il y a en-
core à faire.
Et il place dans son récit cette curieuse anec-
dote
La gare brûlait au-dessus de nous pendant que nous
piochions nos cartes. Des poutres craquaient. On n'y
faisait pas attention. Les troupes, même les meil-
l|ures, c'est comme les vibrions ça ne demande qu'à
danser, mais il faut leur donner le mouvement, l'im-
pulsion. GrçfS travail. Je n'en pouvais plus à la fin de
la journée. J'ai dormi, cette nuit-là, d'un sommeil de
plomb. Et pourtant c'était à la mairie de Fère. pleine
d'allées, de venues, au milieu d'un bruit infernal, sur
un vieux matelas qu'on avait étendu pour Weygand
et pour moi dans une grande pièoe sonore comme une
cloche. A minuit, on me réveille pour m'annoncer que
le G. Q. G. venait de me faire grand-officier de la
Légion d'honneur. « Bien! Bien! » dis-je. Et je re-
pique du nez sur ma paillasse. Une demi-heure après,
nouveau réveil en fanfare « Mon général, le Grand
Quartier vous envoie des cigares et des couvertures. »
Ça, par exemple, ça valait mieux qu'un grognement,
On grelottait par ces nuits de septembre et, depuis
huit jours, nous n'avions pas « touché » une miette de
tabac!
Le tabac est préféré aux honneurs. La pipe est
la joie du maréchal Foch, une brave pipe en me-
risier, bourrée de vulgaire « caporal ». Elle ne
quitte ses lèvres que pour revenir à sa main.
Elle est la compagne inséparable de ses médita-
tions.
*̃
Voici une autre anecdote, recueillie par M.» Sté-
phane Lauzanne, et qui a également son prix
C'est le 31 octobre 1915. L'ennemi a enlevé
Gheluzelt et menace Hooge. Les dernières réser-
ves anglaises, après un combat acharné, plient.
Foch se trouve à Vlamertinghe, poste de com-
mandement du général d'Urbal. II faut pourtant
tenir 24 heures, le temps nécessaire aux 16* et
32° corps de débarquer. Un hasard veut qu'à ce
moment passe l'automobile du maréchal French.
Informé de la présence du général Foch, il con-
sent à s'arrêter. Il est désespéré, ses dernières
réserves ont fondu dans la fournaise, ses divi-
sions épuisées seront incapables d'une plus
grande résitance il n'y a plus qu'à mourir.
Non, monsieur le maréchal, répond vivement Foch,
il faut tenir d'abord, tenir à tout prix, il sera temps de
mourir ensuite. Tenez jusqu'à, ce sonyje viens à votre
aide. ·
Le maréchal French n'est pas convaincu. Alors
Foch s'anime
Si la vieille infanterie de Wellington ne peut plue
tenir aujourd'hui derrière des tranchées, il faudra bien
que mes « gosses » y aillent.
Le maréchal French se redresse t
Elle tiendra, dit-il.
Et il donne ses instructions pour l'exécution de
l'ordre du général Foch.
*̃̃ .;̃•̃
C'est M. Stéphane Laùzahne qui! a également
recueilli ies propos de Foch sur cette expression
« Commander ».
Attendez, dit Foch, attendez, je n'ai pas commandé
tellement qu'on le croit. J'al amené ceux qui étaient au-
tour de moi à mes idées, ce qui est tout différent. Tenez,
te ïk juillet 1918, qui est le jour où furent prises les
plus grandes décisions de la guerre, je convoquai à tnom
quartier, général les commandants en chef des trois ar-
mées alliées. Et quand tout te monde fut assis autour de
la tahlr, je lus un papier où j'exposais la nécessité de
prendre l'offensive suivant un rythme alternatif dont
j'indiquais les cadences. Chacun y faisait une objeotion
de principe.
J'aurais pu répliquer en donnant un ordre formel,
catégorique, mais ce n'est pas ma manière et je sais
trop qu'un obéit mad quand on obéit à contre-oœwv Je
préférais prendre le ton d'un conseiller plutôt que d'un
chef. Je proférais convaincre chacun que mon plan était
parfaitement possible et réalisable. Je préférais donner
à chacun l'envis de le réaliser. Aussi, chacun, pris una-
lement par l'argument ou par ia logique, ou par la per-
suasion, ou mis simplement en présence de ses respon-
sabilités, se rallia de bonne grâce à mes idées, et tout
marcha bien mieux que si j'avais voulu simplement im-
poser mon autorMé.
Le maréchal terminait ainsi, scandant chacun
de ses mots
Commander n'est rien. Ce qu'il faut, c'est bien
comprendre ceux à qui on a affaire, et bien se
faire comprendre d'eux. Se bien comprendre, c'est tout
le secret de la vie.
Quand il remit au maréchal Foch, à Doullens,
l'insigne de sa dignité de maréchal de France, il y
avait dans le discours que le président de la Répu-
blique prononça à cette occasion un passage qui
sembla à bien des gens énigmatique
Mais c'est surtout dans les journées tragiques des
24, 25 et 26 mars dernier que vous avez donné la me
sure de votre caractère et que votre liberté d'esprit,
votre clairvoyance, votre sang-froid ont eu raison du
péril M. le président du conseil et moi, nous savons à
Douliens, devant la mairie, une allée de jardinier où il
fut aisé d'entrevoir vôtre bâton de maréchal,
En voici l'explication c'était à Doullens, le
24 mars. La séance où avait été décidée la nomina-
tion du généralissime venait de se terminer. Le
général Foch était sorti de la mairie ayant à sa
droite le maréchal Douglas Haig et à sa gauche le
général Pétain. Derrière eux marchaient MM. Poin-
caré et Clemenceau. A ce moment, dans une allée,
le généralissime s'arrêta, traça de sa canne quel-
ques traits sur le sable, et il indiqua brièvement
à ses deux collaborateurs comment il entendait ar-
rêter la marche de l'envahisseur. Puis, posant
amicalement la main sur l'épaule du maréchal
Haig, il se tourna vers MM. Poincaré et Clemen-
ceau et leur dit du ton le plus assuré « On les
aura. »
C'était ce souvenir que le président de la Répu-
blique évoquait et qui méritait de l'être,
y*
A la fin de mars 1918, Foch était venu s'ins-
taller à l'hôtel de ville de Beauvais. Il y répartit
ses services, puis il demanda au maire de lui in-
diquer, à proximité, une maison paisible où il
pourrait travailler tranquillement.
Très heureux, mon général, lui répondit le
maire, de vous être agréable, alors que vous avez
tant de préoccupations.
Mais, monsieur le maire, répondit-il avec
son calme imposant, je n'ai pas de préoccupa-
tions, je n'ai que des occupations.
Dans quel mot mieux, que dans celui-cï, qui'
est admirable, le généralissime a-t-il traduit le
sang-froid du chef? Ne dites pas son optimisme.
Le maréchal Foch repoussait cette expression
Optimisme, pessimisme, des mots qui n'ont pas de
sens. Ou plutôt l'optimisme est une température. En
tout cas, ça n'a rien à voir avec la guerre, ni avec ac-
tion, d'une façon générale. Oui, je sais, on a pu s'y
tromper et me croire un optimiste à tous crins.. Et
pourquoi? Parce que, de parti pris, je regarde toujours
du côté du salut et non de l'échec; je tourne volontai-
rement le dos au désastre; j'élimine l'hypothèse de
l'insuccès. Ma philosophie de l'action, car vivre, c'est
agir, la voulez-vous? Eh bien la voici toutes lès. fois
que vous avez une tâche à remplir, considérez-la soi-
gneusement rendez-vous compte exactement de ce
qu'on exige* de vous. Ppis, faites un plan et, pour l'exé-
cuter comme il faut, donnez-vous une méthode, n'im-
provisez jamais. Les -qualités fondamentales requîmes
pour la bonne exécution d'un plan, c'est d'abord, bien
entendu, l'intellience, puis le discernement, le..juge-
ment, qui permettent de reconnaître à la fois le but* a
atteindre et les moyens les plus propres pour attein-
dre, puis la suite dans les, idées, et enfin, ce qui ,est
plus essentiel que tout, la volonté, une volonté opiniâ-
tre. J'ajoute, si nous avons affaire à un chef, ascen-
dant moral. l'ascendant moral, qui n'est pas l'esprit
d'autorité, mais qui donne au chef l'autorité néces-
saire pour agir sur ses subordonnés, les rallier à ses
vues et faire d'eux les souples et dociles instruments
de ses décisions. Un chef est, par excellence, un ani-
mateur. Il faut que sa pensée, sa foi se communiquent
à eux; il faut qu'eux et lui ne fassent qu'un au
moment de l'exécution. C'est la condition même du
succès.
Ses réflexions philosophiques étaient exposées
déjà dans les livres où sont résumées ses leçons,
mais la conduite de la guerre leur a prêté un son
nouveau, d'un métal magnifique.
,'̃.̃ ̃̃ ->̃
Il a été en toute circonstance l'homme de Èon
enseignement.
Quand son fils tomba au champ d'honneur et
qu'on vint lui apprendre sa mort, il répondit,
sans qu'un muscle de sa face bronchât « Je; ne
suis plus rien pour aai, je suis peut-être encore
quelque chose pour la France travaillons » »
II travailla, et l'armistice mit le terme, qu'il
avait prévu, à sa tâche écrasante. ̃
*̃'̃ '̃•̃̃̃
Fooh avait tenu- secret, jusqu'au dernier mo-
ment, cet événement mondial. Ce fut seulement
quand il s'y crut autorisé qu'il dit à Mme Foch
Ils arrivent.
Comment I
Oui, mais ils arrivent en plénipotentiaires
Ce ne sont là que quelques épis ramassés pour
une gerbe, qui serait' d'une luxuriante- richesse,fsi
chacun de- ceux qui ont approché le grand s et qui ont recueilli un mot; une anecdote, "un
souvenir, voulaient y ajouter. •̃
FOCH ET NAPOLÉON
Mais voici qui déborde le cadre des anecdotes.
C'était le 5 mai 1921. Une imposante cérémonie
officielle avait été organisée dans la chapelle des
Invalides pour le centenaire de la mort de Napo-
léon Ier. Le maréchal Foch prit la parole devant
le tombeau de l'empereur. Après avoir défini la
méthode et la doctrine napoléoniennes touchant
l'art de faire la guerre, s'adressant au vainqueur
d'Austerlttz, il proclama que « la morale doit
avoir raison de la force », qu'un peuple doit vivre
« non de gloire, mais de travail », et qu' « au
dessus de la guerre, il y a la paix ».
Voici l'essentiel de cette page magnifique et gé-
néreuse où le grand vainqueur de 1918 rendait
un hommage souverain à la paix
IdenUiflant la grandeur du pays avec la sieniie propre,
c'est par les armes que Napoléon voudra régler le sort
des nations. Comme si l'on pouvait faire sortir le bon-
heur de son peuple d'une suite désormais nécessaire de
victoires, aux sacrifices douloureux quand même 1
Comme si ce peuple pouvait vivre de gloire et non de
travail I Comme si les nations battues, atteintes dans
leur indépendance, ne devaient pas se lever un .jour
pour la reconquérir, mettre un terme au régime en pra-
tique, et présenter dos armées bientôt fortes par le
nombre et invincibles par l'ardeur que leur donne le
droit outragé I Com moral ne devait pas avoir raison d'une puissance faite
uniquement de ta force, si géniale solt-elle I Dans cette,
̃tentative, Napoléon lui-même sombre, non pour avoir,
manqué de génie, mais pour avoir tenté l'iimpossiiile,
pour avoir entrepris, Bvec -une' force/ ̃ëprulsée de touîtes
façons, de plier ses lois une Europe déjà iogtrultg; pair,
sesDécidément, le devoir reste commun à tous au-des-
sus des armées à commander viotori'eu&eiment, c'est le
pays à servir pour son bonheur tel qu'il l'entend; c'est
la justice à respecter partout au-dessus de la guerre,,
il y a la paix.
Décidément, l'homme même le plus doué s'égare qpj,
dams a.es règlements de comptes de, rhuimanifcé, se Ne à
ses vues propres et à ses seules lumières et s'écarte de
la loi morale des sociétés, faite. du respeot.de l'individu,
de ce» principes de liberté, d'égalité et de fraternité qui
constituent notre civilisation, et qui sont l'essence. même
du christlaoteme..
LES DERNIERS MOMENTS
C'est alors que les médecins avaient encore :un
certain espoir que l'illustre malade s'est éteint
à 17 h. 45, hier mercredi, en son hôtel, 168 rue
de Grenelle. L'après-mMi s'était annoncé comme
apportant une amélioration sensible que la visite
habituelle des docteurs Davenière, L. de Gennes et
Heitz-Boyer et le résultat de leur examen ne
laissaiient guère prévoir, d'ailleurs. Le maréchal,
se sentant mieux vers 16 heures, obtint l'auto-
risation de se lever. La maréchale et ses deux filles,
Mmes Béeourt et Fournier, l'aidèrent à gagner
son fauteuil, assistées de M, Jean Falaize, un des
deux internes qui se partageailent la garde du
malade. L'autre était M. Laporte.
Ecoutons M. Jean Falaize raconter les derniers
instants du maréchal.
Je suis arrivé vers 16 h. 30. Le malade m'accuèil-
lit en souriant et même en plaisantant. Presque aussitôt
il fut question qu'il se levât. >ïi.
Btes-vous consentant? lui demandai-je. >
-^iNon seulement je consens, répondit-il; maisïjsSle
désire très vivement.
Avant de permettre au maréchal de se lever, je pris
son pouls. Il était un peu rapide, mais régulier. Aidé
des ûlles du maréchal, je transportai donc le malade
dans le fauteuil Louis-Philipe, à rallonge, dans lequel
nous l'avions déjà assis, au cours de sa maladie, cinq bu
six fois. A un moment, il nous pria d'approcher son
fauteuil de la fenêtre, et c'est là qu'il a vécu ses der-
niers trois quarts d'heure. 11 était gai. Il regardait en-
trer et sortir les visiteurs dans la cour de son hôtpl. il
était parfaitement lucide. Vers 17 h. 40, le maréchal
demanda si son lit était prêt. Il l'était.
Attendons encore un peu, dit-il.
Cependant, cinq minutes après, il redemanda
Est-oe que mon lit est bien chaud?
Le lit venait d'être réchauffé par deux boules d'eau
chaude.
Vous: pouvez vous coucher, lui dis-je.,
Alors, allons-y 1 répliqua le maréchal en souriant.
Ce furent ses dernières paroles.
Je reoulai le fauteuil de cinquante centimètres, mais,
au moment même où j'allais soulever le malade, je le
vis pâlir étrangement, lever la tête comme pour regar-
der le ciel par le haut de la fenêtre.
Je compris aussitôt qu'il s'agissait là de la syncope
que mon maître, le professeur Heitz-Boyer, qui suivit.
d'une façon si perspicace l'évolution de la maladie,
avait prévue depuis vendredi soir. Immédiatement, je
fis une injection intra-veineuse. Elle ne produisit au-
cun résultat. Je transportai aussitôt, dans mes bras, le
malade sur son lit et je fis une deuxième piqûre, une
piqûre prescrite dans les cas- désespérés. Mais le
cœur du maréchal avait cessé de battre.
La nouvelle, à peine connue, causa una pro-
fonde émotion. Tout aussitôt accourut l'abbé de
L'Epinoy, que le général Baratier et le comman-
dant Bunier, de l'état-major du maréchal, étaient
allés quérir à Sainte-Clotilde. Au même mortent;
arrivaient -lies docteurs Hèitz-Boyer, DaveriîèTfe
et de Gennes qui diagnostiquèrent; la syncope^ car-
diaque, par eux prevue.
On procéda pieusement à la toilette funèbre.
Le maréchal repose sur un lit de camp. Le visage,
calme, n'a point changé; les mains sont croisées
sur un crucifix. Revêtu de son uniforme bleu,
celui de petite tenue qu'il affectionnait, et sur
lequel brille la médaille militaire, le glorieux
défunt dort son dernier sommeil, veillé par sa
famille et deux sœurs de Saint-Vincent-de-Paul
auxquelles s'était joint la nuit dernière le Père
Doncœur. Celui-ci, ancien soldat, visitait souvent
le maréchal. Le Père Lhande, confesseur et confi-
dent habituel de Foch, avait donné à celui-ci les
derniers sacrements^ il y a une dizaine de jours.
Le général Weygand, qui était en tournée d'ins-
pection au 1" corps d'armée à Lille et à Mau-
beuge, apprit la nouvelle sur le quai' de la gare
du Nord de la bouche de la générale Weygand.
Il se fit aussitôt conduire rue de Grenelle et vint
s'incliner devant la dépouille de son chef et ami
auprès duquel il resta longtemps à prier.
Le frère du maréchal, le R.P, Foch, de la Com-
pagnie de Jésus, était arrivé de Montpellier dans
l'après-midi, mais n'avait pu voir le malade, au-
près duquel il pénétra, le soir, seulement en
compagnie du R. p.. Lhande, J
Chez le concierge de l'hôtel, sur le même
registre où s'étaient inscrits d'illustres et nom-
breux visiteurs formulant'des vœux de rétablisse-
ment à l'adresse du maréchal, nous avons pu lire
sur une page blanche l'heure et la date de la
mort 20 mars, 17 h. 45. Peu après, les inscrilp-
tions de condoléances se succédaient, tandis que
les visiteurs affluaient.
A 19 h. 35, M. Raymond Poincaré, accompagné
de son chef de cabinet, M. Grignon, pénétrait rué
de Grenelle; conduit par le commandant Bunier
auprès de la maréchale Foch, il lui exprimait
toute sa douleur. Le président du conseil pénétra
dans la chambre mortuaire, se recueillit quelques
instants, puis regagna le ministère des finances.
LA FAMILLE DE FOCH
Le maréchal laisse une veuve, née Mlle Bien-
venue, d'origine bretonne; elle avait apporté
en dot à son mari le domaine de Trefeunteniou, où
Foch allait se reposer. Le maréchal et Mme Foch
ont eu trois enfants deux filles, l'une a épousé
le colonel Foùrnier qui a quatre enfants; l'autre
est veuve du commandant Béeourt, avec deux
enfants; enfin, un fils, René Foch, sorti de l'Ecole
normale, a été tué à l'ennemi comme sous-liteute-
nant» .̃
.••• -̃ • ♦ ̃
L'émotion à Paris
Messieurs, j'ai la douleur de vous apprendre
que le maréchal est mort à 17 h. 45.
C'est en ces termes que, sur le péristyle de
l'hôtel, le commandant Buni'er, de l'état-major de
Foch, annonça la fin du grand Français. Aussitôt
la nouvelle gagna Paris. Dans les cinémas l'écran
relata le funèbre événement, et ce fut dans le
public une grande émotion qui, à l'heure de la
sortie des théâtres, gagna la rue.
Devant l'hôtel de la rue de Grenelle, une foule
s'était rassemblée, et d'heure en heure s'accrut,
maintenue par un service d'ordre quil ne laissait
passer que les personnes allant s'inscrire sur le
registre déposé chez le concierge. Dans le ves-
tibule, se tient l'état-major du maréchal les
colonels Parisot, Riedinger, Chapouilly, les com-
mandants Bunier et Poupon. Ne sont admis à
pénétrer dans la chambre mortuaire que les in-
times du maréchal.
A partir de 22 heures, les portes de l'hôtel ont
été closes, et la veillée mortuaire a réuni la ma-
réchale Foch et ses filles, le général Weygand'ef
le professeur Heitz-Boyer.
»
OB@ÈQUE§ I%TATIOÏVA.LE.S
Les membres du gouvernement se sont réunis
en conseil de cabinet au .Palais-Bourbon aussitôt
après la séance de la Chambre. Ils ont décidé que
des obsèques nationales seraient faites au maré-
chal Foeh.
1. Le gouvernement a déposé un projet de loi ou-
vrant un crédit spécial à cette occasion. •
Les obsèques nationales sont faites -aux frais de
l'Etat et comportent une solennité et une pompe
exceptionnelles. Depuis la fondation de la Répu-
blique semblable honneur n'a été décerné qu'à
Gambetta, Victor Hugo, Pasteur et aux présidents
de la Rél ublique Carnot et Félix Faure.
v «
Déclaration de M. Painlevé
M. Paul Painlevé, aussitôt rentré au ministère
de la guerre, a réuni autour de lui les journalistes
et leur a fait la déclaration suivante
La mort de M. le maréchal Foch met en'deuil toute
l'armée française et toutes les armées qui ont combattu
ensemble durant la grande guerre.
C'est un des plus illustres hommes de guerre qui
aient jamais existé. Il vivra dans l'Histoire aux côtés des
grands conquérants César, Alexandre, Napoléon, mais
ce fut un libérateur. L'effort prodigieux par lequel il
fit tomber pan par pan, en 1918, les lignes continues
de défense minutieusement construites par l'ennemi,
fera l'admiration de toutes les époques. H fut vraiment
le génial forgeron, dont les coups succédaient aux coups
avec une précision, une vigueur, une rapidité irrésis-
tibles. Sa qualité maîtresse était la volonté, une volonté
qui devenait comme farouche dans, l'action et qui se
communiquait par une sorte de magnétisme, à tous
ceux qui l'approchaient et qui devaient exécuter ses
décisions.
Sa parole brève, imagée, réduite à l'essentiel, négli-
geait les développements, les indications de détails,
mais pour ceux qui savaient la comprendre, quelles
impérieuses directives.
Lors d'un des derniers entretiens qu'il voulut bien
avoir avec moi, j'évoquai quelques phases de son passe:
la Marne, i'Yser, les sanglants assauts d'Artois, la
Somme, l'Italie.
« Des fautes, j'en ai commis, disait-il, oomme se par-
lant à luirmeme, les1- yeux perdus dans une méditation,
,&nt à lul_m y p dans une etiitat on
intérieure, mais, si je ne les avais pas commises, je
n'aurais pas pu faire ce que j'ai fait en 1918. »
Le plus bel hommage qui puisse être rendu à un
Français, c'est l'admiration et le dévouement de tous
ceux qu'il a commandés. Cet hommage, les armées de
tous les pays qui ont lutté aux côtés de la France le
lui ont déjà rendu sur les champs de bataille et le lui
rendront demain, autour de son cercueil.
Chez le maréchal Joffre
4 Le maréchal Joffre a appris la fin de son com-
pagnon d'armes par un coup de téléphone du ma-
réchal Pétaiin. Il a exprimé son profond chagrin
aux personnes qui l'entouraient et évoqué l'amitié
qui l'unissait au grand disparu.
Chez le maréchal Lyautey
Le maréchal Lyautey a exprimé sa douleur et
son admiration dans les termes suivants
Sur son nom, l'opinion était unanime, sans une
discordance. Devant lui, tous, Français, alliés, amis,
adversaires, s'inclinaient. Il était celui qui s'impose, ce-
lui que la médisance, la calomnie n'ont jamais effleuré,
celui qui plane, dans cette sérénité souriante, qui aux
pires heures ne l'abandonna jamais. Il était l'arbitre su-
prême, le, chef, le chef, et. toujours le chef. Ah comme
nos regards vont le chercher, nos voix l'appeler 1 II est
déjà celui qui manque.
Chez le maréchal Franchet d'Esperey
Le maréchal Franchet d'Esperey a appris la lin
du chef glorieux au moment où il revenait d'une
tournée d'inspection au Mans. « Le maréchal Foch,
a-t-il dit, était un ami de fondation. Sa mort nous
cause à tous une grande, une très grande dou-
leur. » ̃ ̃̃
Chez le général Gouraud t
Le général Gouraud, lorsqu'on est venu lui
annoncer la mort du maréchal Foch, a fait la
déclaration suivante
La France et ses alliés pleurent le grand chef qui les
a conduits à la victoire; l'Alsace, la Lorraine, la Po-
logne, la Tchécoslovaquie, la Roumanie, le grand Fran-
çais qui les a délivrés.
Pour lui, resté toujours modeste, il pensa jusqu'à
la dernière heure ce qu'il disait souvent pendant la
guerre, comme Jeanne d'Aro les hommes d'armes
bataillent; Dieu donne la victoire.
Chez M. Clemenceau
M. Clemenceau a consigné sa porte, hier soir,
aux étrangers et n'a voulu confier ses regrets qu'à
ses intimes. De maréchal a droit au plus pro-
fond respect », disait-il, il y a quelques jours,
à une personne qui lui annonçait que l'on déses-
pérait de sauver l'illustre soldat.
Déclaration du maréchal Pershing
Le maréchal Pershing, actuellement à Paris, a
fait à un représentant de l'Associated Press la de-
claration suivante •
La mort du maréchal Fooh .remplit tous nos cœurs
de tristesse. 11 sera honoré non seulement par la nation
française, mais par tous les peuples dont les armées
ont combattu sous son commandement dans la grande
guerre.
Comme ami et comme camarade, sa mort m'apporte
un sentiment profond de perte personnelle.
Le maréchal Pershing a ensuite rappelé com-
ment le maréchal Foch, lorsqu'il prit le comman-
dement des armées alliées à l'heure la plus grave,
établit l'unité de leurs efforts.
'̃̃ Bien que les forces alliées fussent à leur niveau le
pjus bas, art-il ajouté, la croissance rapide de l'armée
américaine amena rapidement la supériorité numérique
nécessaire pour enrayer le mouvement de reôul.et
assurer la victoire finale;
En terminant, le maréchal Pershing a dit que,
grâce à' une large conception de sa tâche, le maré-
chal Fooh coordonna brillamment les opérations
sur le front occidental en laissant à chaque géné-
ralissime la direction de sa propre armée. Le ma-
réchal Pershing a conclu dans les termes suivants:
Le maréchal était superbe dans l'épanouissement de
sa force morale et dans sa grandeur d'âme. Ses quali-
tés essentielles étaient peut-être, son calme et sa con-
fiance en face de l'adversité. Sa grandeur est devenue
maintenant, l'héritage de l'humanité..
Chez M. Myron T. Herrick
Myron T. Herrick, ambassadeur des Etats-
Unis, a confié sa profonde émotion à un repré-
sentant du Neiv-Ynrk Herald, cc Combien je l'ai-
mais a-t-il dit. Qu'elles étaient simples èt nobles,
les directives de sa Vie C'était pour cela, je
pense, oui, c'était pour cela que nous l'aimions le
plus chèrement. Mais pourquoi vous dirais-je ce
que le monde entier connaît ? Je vous dirai seule-
ment qu'il fut une grande figure parmi l'élite. »
M,_ Myron T. Herrick a évolué le jour où goa fils
reçut la visite de l'illustre soldat, près de Cleve-
land. « J'ai toujours été frappé par cette pensée,
a-t-il dit, que le maréchal Foch ne pouvait être
mis qu'au nombre de ces exceptionnelles person-
1 nalités de l'Histoire, dont la bonté fut capable
d'inspirer le sentiment de l'humaine fraternité à
ceux-là mêmes qui ne les avaient jamais vues. »
En terminant, l'ambassadeur des Etats-Unis a dit:
« Ah je puis vous affirmer que, dans ma patrie,
des centaines de milliers d'hommes quil ne l'ont
connu que par la. légende, ̃porteront, cette nuit, le
deuil du grand soldat français. Notre ami le maré-
chal n'est plus. Notre ami le maréchal est avec
les immortels. »
Les condoléances de sir William Tyrrell
Aussitôt que sir William Tyrrell, ambassadeur
de Grande-Bretagne en France, a eu connaissance
de la mort du maréchal Foch, il a envoyé la lettre
suivante à la maréchale.
Par anticipation aux instructions de mon gouverne-
ment, je me permets de vous affirmer la sympathie la
plus cordiale et la plus sincère qu'il soit possible de res-
sentir au moment de la perte irréparable que vous ve-
nez de souffrir. il
Dans mon ffays, qui n'a pas eu le privilège de le
compter parmi ses fils, le maréchal Foch sera pleuré
comme un héros national.
Témoignages de sympathie
La nouvelle de la mort du généralissime des
armées alliées connue, de nombreuses personnali-
tés vinrent rue de Grenelle présenter leurs con-
doléances. Le président de la République pria le
général Lasson d'aller porter, en son nom, un
témoignage de sympathie à la maréchale. MM. Paul
Doumer, président du Sénat, et Fernand Bouisson,
président de là Chambre, vinrent peu après, puis,
dans la soirée, M. Poincaré, président du conseil,
ainsi que nous le signalons d'autre part, les mem-
bres du gouvernement, le maréchal Lyautey, le
général Dubail, grand chancelier de la Légion
d'honneur, le général Gouraud, gouverneur mili-
taire de Paris, les ambassadeurs de Grande-Breta-
gne, du Japon, d'Italie, d'Espagne et de la Répu-
blique Argentine, le préfet de la Seine et le préfet
de police, les présidents du Conseil municipal de
Paris et du Conseil général de la Seine, de nom-
breux parlementaires, des personnalités du monde
diplomatique et politique, les attachés militaires
des puissances étrangères, M. Donat-Guigue, pro-
cureur général, M. Pressard, procureur de la
République, M. Philippe Berthelot, le général du
Bois, représentant l'ambassadeur de Belgique, le
général Alvin, commandant l'Ecole polyteehni-
que, les généraux de Castelnau, Herr, Samt-Just.
le vice-amiral Violette, chef d'état-major de la
marine, etc..
M. Poincaré devait présider hier soir. assisté de
plusieurs membres du gouvernement, le banquet
des chambres d'agriculture de France et pro-
noncer à cette occasion un discours.
En raison de la mort du maréchal Foch, et en
signe de deuil, le président du conseil et les mem-
bres ,du gouvernement n'ont pas assisté à cette
manifestation. ',¡,
En Algérie '̃>̃
On télégraphie d'Alger
M. Bordes, gouverneur de l'Algérie, a adressé
au ministre de la guerre le télégramme suivant
« L'Algérie tout entière s'associe au deuil qui'
frappe l'armée française dans la personne du plus
illustre de ses chefs.ët la tristesse qu'elle éprouve
en apprenant le décès du glorieux maréchal Foch
sera ressentie jusqu'aux plus lointains de ses
douars. Pierre Bordes. »
L'impression et. S'étranger
En Grande-Bretagne
Notre correspondant de Londres téléphone jeudi
matin
La nouvelle de la mort du maréchal Foch s'est
répandue hier à Londres et dans toute l'Angleterre
avec une grande rapidité et a été accueillie par-
tout avec des sentiments de regret et de douleur
aussi sincères que si l'Angleterre elle-même ve-
nait de perdre un grand soldat.
Aussitôt que la nouvelle de la mort du maréchal
a été connue au palais de Buckingham elle a été
téléphonée à Craigweil House, où le roi a été
avisé.
Dès qu'il a connu là mort du maréchal Foch,
le prince de Galles a envoyé un télégramme de
condoléances à la maréchale Foch.
M. Baldwin et sir Austen Chamberlain étaient
précisément, mercredi soir, les Tiôtes d'honneur
au dîner annuel de l'Association'de la presse étran-
gère de Londres. Les deux hommes d'Etat en ont
preftté îpottr rendre hommage '-a ?la méntïoiffe ;8u
grand soldat.. 4j
M. Baldwin se tournant vers de M. de Fleuriau,
ambassadeur de France, également présent, a dé-
claré
Je veux exprimer à mon vieil ami, M. de Fleuriau,
au nom du gouvernement britannique, l'émotion pro-
fonde qu'a causée à Londres la mort du maréchal Foch.
Dans les années qui se sont écoulées depuis la guerre,
il n'est personne au monde qui ne reconnaisse qu'en
lui vient de mourir un des plus grands soldats et, ce
qui est bien plus, une des plus grandes âmes de tous
les temps. On se souviendra toujours de Foch comme
d'un jÉtnd chrétien, d'un grand gentleman et d'un
grand nomme.
Sir Austen Chamberlain, ministre des affaires
étrangères, s'est associé à l'hommage rendu par
le chef du gouvernement au maréchal Foch.
D'autre part, en apprenant la mort du maréchal
Foch, le maréchal Allenby a fait la déclaration
suivante
Il était le plus grand général de son temps et son
nom passera dans l'histoire comme celui d'un des plus
grands soldats que le monde ait jamais connu.
L'amiral Beatty a dit
C'est le plus grand homme que le monde ait connu.
Il a servi non seulement la France mais encore le monde
entier.
M. Lloyd George, qui présidait une réunion li-
Jjérale à Bolton, a déclaré
Avant de nous occuper de l'objet de cette réunion",
je tiens â prononcer quelques mots. Je viens d'appren-
dre la mort de ce grand soldat, le maréchal Foch, au
génie duquel, plus qu'à celui de tout autre, le monde
doit d'être débarrassé de la menace du militarisme
allemand.
Mon plus grand orgueil est d'avoir su discerner à
temps ses dons suprêmes et que, en tant que premier
ministre de ce pays, j'ai pris l'initiative de le faire
nommer généralissime des forces- alliées du front occi-
dental. Foch état un homme d'imagination et de cou-
rage et, plus que tout, il avait cette qualité inhérente
à la vraie grandeur il avait la simplicité. Son labeur
est terminé, mais les triomphes qu'il a acquis pour
la liberté de l'humanité demeurent.
Le comte de Cavan, ancien commandant du
14* corps en France, a dit
C'était un des plus grands « gentlemen » de France.
Il est mort noblement en citoyen privé de ce grand
pays.
Tous les journaux consacrent, ce matin, de longs
articles nécrologiques à l'ancien commandant en
chef des armées alliées.
Le Times voit en lui l'incarnation de la mé-
thode, de la volonté et de l'unité qui ont valu
la victoire aux alliés.
Il n'y a jamais eu dans l'histoire militaire, dit-il, de
théoricien plus clair et plus logique.
Le major-général, sir Frederick Maurice, con-
sacre, dans le Daily Mirror, un long article ̃ au
« seul étranger non couronné qui ait été field-
marshal britannique, au seul membre étranger de
l'ordre du Mérite ».
Le Daily Mail propose que l'on célèbre un
service religieux à la mémoire du maréchal Foch
au pied du cénotaphe de Whitehall.
Le Morning Post écrit
Le plus grand trait de son caractère, c'est que sa
grande >feuvre ne fut pas une sorte de miracle, mais
le résultat de toute une vie de travail, ce fut un pro-
duit typique du terroir de France, un homme qui, dans
sa jeunesse, avait vu sa patrie vaincue et qui consacra
toute son énergie et quarante ans d'études à empêcher
qu'elle ne fût vaincue à nouveau.
Le Daily Telegraph écrit
Il était le seul général français auquel le gouverne-
ment britannique pût accepter de confier le comman-
dement suprême de ses armées.
Son grand souci a été de donner à la France la
sécurité militaire et pour cela de donner le Rhin comme
frontière à son pays. Foch était chevaleresque pour
l'ennemi.
En Belgique
Notre correspondant particulier à Bruxelles nous
télégraphie jeudi matin
La nouvelle de la mort du maréchal Foch a
produit en Belgique une profonde émotion. Les
journaux du matin consacrent tous plusieurs co-
lonnes de première page à la vie et Ja carrière
de celui' qui a conduit les armées alliées à la
victoire. Ils rendent un vibrant hommage au glo-
rieux soldat, à l'homme d'études et à l'homme de
cœur. Le comité de direction de la fédération
des légionnaires belges 1914-1918, réuni d'ur-
gence, a décidé d'envoyer une délégation aux
funérailles du maréchal Foch. s
Plusieurs délégués de fraternelles, d'anciens
combattants sont allés signer Je registre de con-
doléances à l'ambassade de France. Des tél.égram-
mes de condoléances ont été expédiés au prësi-»
dent de la République française et à Mme la maa
réchale Foch par les légionnaires belges.
En Allemagne
L'état d'esprit se manifeste par ce fait à h
nouvelle de la mort de Foch les principaux chefs
allemands ont été interrogés sur l'homme de
guerre français qui avait rétabli dans-la dernière
période la fortune des armes alliées. Ni les gé-
néraux Ludendorff et von Kluck ni le kronprinz
n'ont voulu parler.
Seul le général von Seeckt, ancien chef d'état-
major à cette époque, a consenti à faire cette dé.
claration v
« La mort qui ne connaît pas de nationalité
permet un ancien ennemi d'abaisser son épée
devant le corps du maréchal Foch, qui fut un
grand soldat et un grand Français. »
Les journaux accompagnent la nouvelle de la
mort du maréchal Foch de note biographiques
complètes et de commentaires détaillés. Ils retra-
cent toute la carrière militaire du maréchal, rap-
pellent le rôle déterminant qu'il joua pendant la
guerre et se livrent de nouveau à des hypothèses
toutes gratuites sur ce qui aurait pu se produire
si l'armistice. n'avait pas été conclu en novembre
1918.
D'une façon générale, la presse, tout en recon-
naissant ses mérites militaires, lui reproche de
s'être montré trop dur, après la guerre, à l'égard
de l'Allemagne. Et sur les mérites militaires du
maréchal, que de réserves et de restrictions sans
objectivité historique!
La M or g en Post (démocrate) écrit :« ̃
Foch était, sans nul doute, un des meilleurs chefs de
l'armée française. Chaque chef a besoin pour vaincre,
comme l'ont dit Clausewitz et d'autres qui ont dirigé
la guerre, d'un certain coefficient de chance, et ce n'est
diminuer nullement son génie que d'affirmer que le
général Chance l'a grandement aidé. Le formidable ap-
point en tanks, armes et munitions, de même qu'en
renforts, en troupes fraîches de 1,500,000 Américains,
et aussi les lourdes fautes du commandement dirigé
par Ludendorff, ont placé le maréchal Foch en face de
oonditions militaires comme jadis jamais n'en avait
rencontrées aucun de ses prédécesseurs.
La Gazette de Voss (démocrate)
A la guerre comme en politique, il n'y a que le sud.
ces qui compte, et le maréchal l'a remporté. A la tête
de l'armée la plus puissante que le monde ait jamais
vue, il a gagné la guerre. La victoire qui a mis l'Allé-
magne à terre est pour toujours liée à son nom. Il ap-
paraît aux yeux du soldat français comme le plus
grand capitaine de l'Histoire.
Le fut-il, en vérité? Les opinions varient à. ce su-
jet, et la génération qui a fait la guerre est encore trop
près du drame pour répondre à la question par oui
ou par non. Attendons le jugement de l'Histoire.
Le Vorwserts, moniteur du socialisme, écrit 'ï ̃̃̃̃
Nous avons en Allemagne de bonnes raisons de con-
sidérer le génie militaire avec un extrême scepticisme 3
depuis que nous connaissons les capacités intellectuel-!
les de Ludendorff qui avait,, ..pendant .Ja. guerre, ^au-
réole d'un, capitaine génial, il nous, est difficile de croire
a l'art militaire comme à une manifestation particuliè-
rement élevée de l'intelligence humaine. Une chose tou-
tefois paraît incontestable; le prestige personnel de
Foch en France et dans les pays alliés était si grand
que sa nomination comme général en chef suscita un
grand enthousiasme.
La Gazette générale de l'Allemagne v S
Foch n'avait pas remporté une victoire militaire com-'1
plète, même pas en 1918, quand nous étions déjà vain*
eus. Le blocus de l'Angleterre et l'aide active de l'Amer
rique lui permirent de repousser lentement les armées
allemandes. L'écroulement économique et politique des
puissances centrales et la révolution allemande lui as-
surèrent un -succès facile.
Le Lokal-Anzeiger, journal nationaliste, donna
carrière à son ressentiment
Au cours des négociations pour l'armistice et la paix,
Foch ne fit pas preuve de générosité pour l'ennemi
vaincu. Son but était l'anéantissement complet de l'AI-
iemagne. Aucune condition n'était assez dure pour lui
et quand les Américains et les Anglais repoussèrent
quelques-unes de ces conditions, dictées par une haine
barbare, il menaça de se retirer. Il a cependant réussi
à imposer le désarmement complet de l'Allemagne et
l'occupation à long terme de territoires allemands. Il
n'a pas été seulement notre adversaire comme soldat,
mais comme homme un de nos plus farouches ennemis.
La Deutsche Tageszeitung écrit dans le même
esprit
Depuis janvier 1919 à la tête du comité de guerre de
l'Entente, Foch essaya, à plusieurs reprises, de détai
cher la rive gauche du Rhin de l'Allemagne. II fut l'atU
versaire le plus violent de l'évacuation des pays rhé-
nans il a tout fait pour abaisser l'Allemagne militai-
rement, politiquement. Les alliances militaires de la
France^ aVee la' Belgique, la Pologne, la TebécosloVà*
qui'e sont gonœuvre(< de même; que le idésarmement de
l'Allemagne. '̃ .̃.
La forte personnalité du maréchal a, sans aucun
doute, beaucoup contribué à ce que la viotoirp. fi:) aie
échût à nos ennemis. Ce mérite ne permet pas toute-
fois de prétendre qu'il fut le plus grand capitaine de
tous les temps. Sa tâche était infiniment plus facile que
celle de Hindenburg et de Ludendorff Il avait stous lés
atouts en main et il fut appelé plutôt à cueillir des fruits
mûrs.. ̃̃
Le Berliner Tageblatt (démocrate)
La France' considère qu'il n'y a jamais eu de meilleui'
soldat ni de plus grand capitaine.
Une heure après la mort de l'homme, ce n'est pas
moment de se livrer à une étude historique pour savoir
si cette gloire sans pareille résistera à l'épreuve du ju-
gement de la postérité.. ï
La Deutsche Zeitung écrit :̃. j ̃ ̃̃̃'•• ••
En lui s'incarnait la brutale politique de violence et
de destruction de la France à l'égard de l'Allemagne.
La Correspondance parlementaire socialiste
écrit
Depuis la paix, Foch était resté à la tête de l'armé?
française et commandant militaire interallié. En cette
qualité il participa aux négociations diplomatiques sur
le désarmement de l'Allemagne, et il rechercha toujours
par de nouvelles sanctions à acquérir de nouveaux ti«
tres de gloire.
Depuis Locarno il se montra un peu plus rawonnitble,
mais dans le fond il resta jusqu'à sa mort non seule-
ment un grand militaire, mais aussi un grand milita*
riste,
~J
En Italie '̃ "̃' v;" ̃-• ••
Lanouvlle de la mort du maréchal Foch n'a été
Connue en Italie que vers 21 heures, trop tard
pour que les journaux pussent ̃ l'annoncer 'dans
leurs dernières éditions.
Dans les cercles politiques et militaires où la
nouvelle s'est rapidement répandue, elle aj été
accueillie avec un sentiment de deuil.
Le roi et, M. Mussolini ont été immédiatement
informés de, la mort de' l'ancien généralissime.
La nouvelle a, dit-on, vivement impressionne la
pape qui avait le grand soldat français en parti-
culière estime.
On ne connaît pas encore les dispositions que
va prendre le gouvernement pour que l'armée Ha*
klienne soit représentée aux funérailles du.maré*
chal, mais on affirme qu'un détachement de trou^
pes, accompagné d'un officier général, va partir
sous peu pour Paris. l
Le Popolo d'Italia écrit •••̃̃
Le nom du maréchal Foch demeurera vivant dana
notre admiration et dans notre sentiment de combat-i
tants qui n'ont pas oublié la fraternité des armes, dé.
montré avec les faits pend&tït les heures les plus ora-
geuses de la guerre et avant notre intervention. Il fut
un condottière (conducteur) et un maitre de la stra-
tégie de premier rang, ne voulant appliquer d'autre
doctrine que la logique après l'avoir armée avec la sim-
plicité mathématique d'une volonté formidable adaptée
rigoureusement aux circonstances du moment.
Pour l'histoire, que nous avons construite ensemble
sur la victoire et sur le pacifisme, nous sentons la dou-
leur de la France ainsi que les Français sincèrement
partagèrent l'angoisse pour notre grand et cher condot.
tiere récemment disparu. » ̃
Le Corriere délia Sera écrit
Sa splendide carrière militaire était terminée depuis
longtemps; il a clos sa carrière mortelle. Son nom, ce-
pendant, ne mourra pas. Il restera uni à toujours S
l'histoire de la splendide résistance opposée par la
France avec l'aide d'une coalition mondiale contre- la
tentative d'hégémonie allemande. '̃ • ,i i,
En Pologne
On télégraphie de Varsovie:
Au cours de la séance de la Diète est arrivée
la nouvelle du décès du maréchal Foch.
Le maréchal de la Diète, M. Daszonski, a in-
terrompu les débats, et, après avoir rappelé' le
rôle du maréchal Foch dans la guerre mondiale
et souligné, ce qu'il fit,pour l'indépendance de la
Pologne, il a demandé à la Diète /l'honorer sa
mémoire.
Tous les députés se sont aussitôt levés.
Au Japon •
Le peuple japonais suivait avec inquiétude
l'évolution de la maladie du maréchal. Il a appris
sa mort avec une douloureuse surprise.
Les officiers japonais ont gardé le souvenir des
nombreux témoignages d'affection qu'ils reçurent
du grand soldat. Quand l'escadre-école, que com-
mandait l'amiral Yamamoto, débarqua il y a deux
ans à Marseille, les aspirants vinrent à Paris et le
maréchal Foch les reçut aux Invalides. Il leur fit
une conférence qui les impressionna, vivement et
dont eux, les futurs officiers de la marine japo-
naise, titèrent grand Broflt «
traire son esprit des problèmes tactiques limités
d'une portion du front pour lui fournir, le vaste
champ de l'ensemble des fronts alliés, on le pré-
parait a son rôle décisif, celui de commandant en
chef.
Il faut brûler les étapes dans le récit d'une telle
activité. C'est la préparation de l'envoi des ren-
forts en Italie, c'est la nomination, le 15 mai 1917,
comme chef, d'état-major général de l'armée, c'est
la campagne d'Italie, c'est la création du comité de
presse interallié de Versailles, c'est enfin, à la fin
de mars 1918, la conférence de Doullens où M.
Clemenceau et lord Milner tombent d'accord pour
confier à Foch le commandement suprême, déci-
sion à laquelle le général Pershing se rallie en
venant déclarer au nouveau chef
Je viens pour vous dire que le peuple américain tien-
drait à grand honneur que nos troupes fussent enga-
gées dans la présente bataille.
Je vous le demande en mon nom et au sien. H n'y a
pas en ce moment d'autre question que de combattre.
L'infanterie, l'artillerie, l'aviation, tout ce que nous
avons est à. vous. Disposez-en comme il vous plaira. H
en viendra encore d'autres, aussi nombreuses que né-
cessaire/ Je suis venu tout exprès pour vous dire que
ile peuple américain sera fler d'être engagé dans la
plus grande et la plus belle bataille de l'histoire.
A l'offensive allemande de l'Aisne et de la
Champagne, Foch répond, le 18 juillet, par celle
de Mangin débouchant de la forêt de Villers-Cotte-
rets. Conjuguée avec celle des Franco-Anglais à
l'est d'Amiens, elle ébranle définitivement l'édi-
fice allemand qui dès lors va s'effondrer. Le sablier
est tourné.
Le 6 août, M. Clemenceau propose d'élever. le
général Foch à la dignité de maréchal de France,
décret que M. Poincaré signe le jour même. Le
23 août, en présence de MM. Clemenceau, Leygues,
Loucheur, et d'officiers des armées alliées, le
président do la République lui remettait le bâton
étoile d'or, en terminant l'allocution où il rappe-
lait ses éminents services par ces mots « Nous
voulons vaincra. Nous vaincrons! »
Le 11 novembre, l'armistice signé dans son
wagon, à Rethondes, consacrait la victoire.
En ce même mois de novembre 1918 le maré-
chal Foch, après une motion du Parlement, joi-
gnant à son nom celui de M. Clemenceau, et
déclarant qu' « ils avaient bien mérité de la pa-
trie », était élu, sans concurrent, à l'Académie des
sciences et a l'Académie française; il recevait celles
des plus hautes décorations alliées qu'il ne possé-
dait pas encore; mais sa joie suprême devait être,
aux, premiers jours de décembre, de rentrer en
triomphateur dans Metz redevenue française. Ceux
qui avaient, en âge de comprendre et de souffrir,
vécu le drame de 1870-71 ont connu, en ces jours de
la nu de 1918, dans les villes-symboles Metz et
Strasbourg, la plus intense des emotions humai-
nes. Pour un officier comme Foch, dont toute
l'existence avait été étreinte par ce deuil de la
patrie mutilée, et qui, sans l'agression allemande
d'août 1914, eût pris sa retraite au moment où
l'âge inexorable vous raye de l'annuaire, sans
avoir réalisé ce pourquoi il avait Vécu et tra-
vaillé, l'entrée dans Metz était la joie au delà de
laquelle on n'en imagine pas d'autres.
Après la guerre
Le maréchal Foch était entré, vivant, dans la
gloire. Il fut fêté à Londres où le gouvernement
Êritannioue le fit field-marshal. Il reçut des lau-
riers d'or ciselé, des adresses reconnaissantes et
louangeuses, de Pologne (où il avait reçu le ma-
rechalat), de Portugal. d'Amérique, de Roumanie,
les villes deLeeds et de Manchester le firent citoyen
d'honneur, on l'acclama partout où il se rendit, à
•Morlaix, à Arreau, à Bordeaux, Tarbes, Bergues,
Dunkerque, Saint-Etienne, Lille, Tourcoing, Nan-
cy Lyon, Abbeville, Beauvais, Boulogne, Col-
mar, etc. On le convi'a à Valentina. le village. de
ses ancêtres, on l'invita à Bruxelles, à Rome, en
Pologne, en Tchécoslovaquie, en Algérie, au Maroc,
aux Etats-Unis, il se rendit à plusieurs reprises
en Angleterre soit comme hôte d'honneur soit
pour y rendre le dernier devoir à ses collabora-
teurs et amis de la grande guerre, Wi:lson et Dou-
glas Haig.
Dans l'esprit de l'actuelle génération française
et étrangère le maréchal Foch avait redonné au
génie militaire français une suprématie compa-
iable à celle de Bonaparte. Ces deux grands soldats
n'ont pourtant pas eu à envisager des problèmes
simillairès et l'unité du commandement ne s'est
pas exercée de la même manière; mais il faut aux
foules un nom qui concrète la victoire. Dans la
réponse que M. Poincaré lui adressa le 5 février
jy20,. lors de sa réception à l'Académie française,
lui dit
« Soldat respecté non seulement par toutes les
rations de l'Entente et par les jeunes Etats euro-
péens, mais par nos ennemis d'hier.. Vous et vos
armées vous avez sauvé notre vieille civilisation
latine, notre langue, nos chefs-d'œuvre, notre
passé et notre avenir. »
En juillet dernier le maréchal assistait à l'inau-
guration à Cassel de sa statue équestre, comme il
avait vu, deux ans auparavant, un autre monu-
ment s'élever à sa gloire Bouohavesnes.
Tout ce qu'un peuple. peut donner à un grand
serviteur, il l'avait reçu, mais les hommes sont
impuissants à guérir certaines blessures dont la
foi dans l'au-delà seule apaise le tourment. Le
maréchal Foch avait perdu son seul fils, Germain,
tué dans le premier mois de la guerre, et le mari
de l'une de ses deux filles, le lieutenant Bécourt.
Pour que le nom de Foch ne disparût pas, le
Conseil d'Etat avait autorisé, en juin 1927, qu'il
fût adjoint à celui des enfants de ses filles; Mmes
Fournier et Bécourt. Le maréchal, dont le cœur
avait subi tant d'assauts, a succombé par le cœur.
Il avait auprès de luil tous les siens. Dans ses
derniers jours, l'unique visite permise fut celle
du général Weygand, son collaborateur et son
ami, dont on ne dira jamais assez le rôle admi-
rable auprès du chef dont il comprenait et inter-
prétait la pensée. Leurs deux noms demeureront
inséparables dans l'histoire.
ANECDOTES ET JÉÇITS FAMILIERS
L'anecdote, si elle est authentique, peut tenir
fa place à côté de la biographie d'un grand homme.
Elle exprime, dans une sorte de raccourci, des
événements souvent considérables qui ne s'en
gravent que mieux dans la mémoire. Les foules
aie peuvent être que curieuses de ces miettes
de l'histoire quand elles sont recueillies dans l'en-
tourage d'un Foch.
Rien n'est indifférent des parales qu'a pu pro-
noncer l'illustre soldat dans l'abandon de con-
versations familières. Le maréchal Foch ne parlait
jamais pour ne rien dire. Tous ces propos étaient
substantiels, lumineux, évocateurs. Ils étaient à la
fois spontanés et réfléchis. « Attendez! attendez! »
Tels étaient les termes dont il ponctuait volontiers
son récit, rapide, imagé.
N'avait-il pas sa place dans nos annales ce mot
souvent cité sans qu'on sache toujours à qui l'at-
tribuer exactement, par lequel il caractérisait no-
tre effort militaire pendant l'action « long, dur,
Sûr »? C'est un des exemples les plus saisssants
de ces formules synthétiques qui étaient si bien
dans sa manière, soit qu'il enseignât la guerre,
goit qu'il la fit.
+**
Nous pensons qu'on nous saura gré d'avoir re-
'cherché dans les diverses circonstances où il parla
au cours des hostilités et depuis, et où il racon-
tait, avec la franchise et la simplicité qui le ca-
ractérisaient, ses souvenirs sur les gens et sur
les choses, et sur lui-même. Car il n'est homme
qui se soit mieux connu, observé, surveillé, pour
tendre à un rendement supérieur de ses facultés
sans autre ambition que de servir la gloire de
son pays, qu'il mettait bien au-dessus de la sienne.
Nous aimons à surprendre ies secrets de la
formation de ces intelligences exceptionnelles, de
ces surhommes. Charles Le Goffic qui, l'un des
̃premiers chanta dans des livres remarqués le
héros des marais de Saint-Gond, qui l'a approché
fréquemment, en a reçu peut-être les plus inté-
ressantes confidences. II l'interrogeait un jour sur
sa formation
Mon processus? lui répondit le maréchal. L'histoire
Se ma formation? Rien à dire jusqu'à mon départ pour
Metz, au collège Saint-Clément. Ah si, pourtant, mes
lectures: Thi ers d'abord. Dès ma sixième, à Tarbes,
je le savais presque par cœur. je l'avais bien lu dix
fois, et ce n'était pas flni. Et puis Walter Scott. Mais
Walter Scott, après tout, o'est encore de l'histoire. Et
enfin, mais plus ..tard, Taine, le Taine des Origines.
trop systématique peut-être. n'importe, il m'a impres-
sionné fortement aussi, oelui-là. Bien entendu, et pour
n'avoir pas à revenir sur ce chapitre, j'ai lu, étudié
avec toute l'attention requise, une fois dans le métier,
tous les classiques de la guerre: le Mémorial, Clau-
zevitch, Bernhardi, l'école allemande et l'école française,
Ardant du Picq, Maillard, Langlois, etc.
Quand, de son côté, M. Charles Chassé l'interro-
geait sur son style et ceci intéresse nos aca-
démiciens au milieu desquels il a siégé « Ma
phrase, concédait le maréchal Foch, doit quelque
chose au dix-huitième siècle, qui voulait simple-
ment un sujet, un verbe et un régime. » Parmi les
poètes du dix-neuvième siècle, il confessait n'avoir
jamais été dans ses lectures favorites au delà de
Musset.
:̃ ̃.̃
Il racontait qu'à l'école il avait été un remar-
quable cavalier il s'était astreint dans son exis-
tence en vertu du credo militaire, qu'à la guerre
il faut toujours être à cheval à monter deux
heures par jour, tous les jours.
Et voyez, ajoutait-il, l'ironie des choses! La guerre
éclate, elle dure quatre ans et pas une fois en ces
quatre ans, sauf pour des prises d'armes, je n'ai eu
l'occasion de montrer mes talents de cavalier. En
somme, j'ai cessé de faire du cheval à partir du jour
où j'ai commence de faire la guerre 1
Quand il fut devenu professeur à l'Ecole de
guerre, il lui sembla que quelque chose clochait
dans un enseignement trop théorique, trop en
l'air, pas assez concret. Sur son rôle d'éducateur,
il a développé dans une conversation familière
cette conception
Un professeur assume une grave responsabilité du
fait même qu'il est charge de façonner d'autres âmes,
d'autres esprits que le sien. J'ai cherché. cherche
suivant ma méthode habituelle, qui consiste à faire
table rase des théories et des principes et à me deman-
der, avant toutes choses: « De quoi s'agit-il? » Et je
ne dis pas que ce que j'ai trouvé fût bien sorcier.
Ça ne révolutionnait peut-être pas l'art militaire. mais
c'était du moins le fruit d'une réflexion mûrie, étroi-
tement appliquée aux faits et les épousant, s'y sou-
mettant, au lieu de les plier à une opinion préconçue.
« De quoi s'agit-il? » est l'expression qu'on re-
trouve à chaque instant alors qu'il a à pénétrer
une situation, une décision à prendre. « Compren-
dre d'abord » est une de ses formules habitueliesi
Des diverses anecdotes qu'on colporte sur lui,
il y a celle du dialogue qui s'engagea en 1907 en-
tre lui et M. Clemenceau, président du conseil.
M. Clemenceau qui l'avait fait appeler lui au-
rait dit
Je vous offre le commandement de l'Ecole
de guerre.
Je vous remercie, monsieur le président, au-
rait répondu Foch, mais vous n'ignorez sans doute
pas que l'un de mes frères est jésuite!
Je le sais, mais je m'en f. Vous nous ferez
de bons officiers, le reste ne compte pour rien.
Ces propos, si bien dans le caractère des deux
hommes, et qui les honoraient également, nous
ne pouvions que leur faire crédit. Mais le maré-
chal Foch eut l'occasion de démentir ce dialogue,
un jour qu'il s'entretenait avec Le Gofflc
Vous savez comment mes cours furent brusque-
ment interrompus par le général André. Planqué à la
porte par la fenêtre avec tout le haut personnel de
l'Ecole, je devais quelques années plus tard, sous le mi-
nistère Clemenceau, y rentrer par la grande porte, en
qualité de commandant. Mais ceci, c'est une autre his-
toire, comme dit Kipling, et que je renvoie à plus tard.
car elle est un peu longue. Ce que je puis vous dire
pour le moment, c'est que tout ce qu'on a raconté
là-dessus, l'anecdote du frère jésuite et le « je
m'en f. » de Clemenceau, est de la fantasmagorie.
C'est à M. Clemenceau à compléter l'anecdote,
s'il lui convient de le faire, mais voilà un dia-
logue que nous regretterons.
A ̃' '̃̃̃.̃"̃.
Le maréchal Foch n'a vraisemblablement pas
écrit de mémorial et nous devrons nous contenler
de quelques récits qu'il a faits, avec sa bonne
grâce coutumière 'dans l'intimité. C'est à la pre-
mière Marne. Foch, prévenu, se trouve à la Fère-
Champenoise vers midi, après le coup de surprise
réussi par le .général Dubois
Eh bienl dit-il aux généraux présents, ça
ne va pas trop mal. Allons, à l'ouvrage, il y a en-
core à faire.
Et il place dans son récit cette curieuse anec-
dote
La gare brûlait au-dessus de nous pendant que nous
piochions nos cartes. Des poutres craquaient. On n'y
faisait pas attention. Les troupes, même les meil-
l|ures, c'est comme les vibrions ça ne demande qu'à
danser, mais il faut leur donner le mouvement, l'im-
pulsion. GrçfS travail. Je n'en pouvais plus à la fin de
la journée. J'ai dormi, cette nuit-là, d'un sommeil de
plomb. Et pourtant c'était à la mairie de Fère. pleine
d'allées, de venues, au milieu d'un bruit infernal, sur
un vieux matelas qu'on avait étendu pour Weygand
et pour moi dans une grande pièoe sonore comme une
cloche. A minuit, on me réveille pour m'annoncer que
le G. Q. G. venait de me faire grand-officier de la
Légion d'honneur. « Bien! Bien! » dis-je. Et je re-
pique du nez sur ma paillasse. Une demi-heure après,
nouveau réveil en fanfare « Mon général, le Grand
Quartier vous envoie des cigares et des couvertures. »
Ça, par exemple, ça valait mieux qu'un grognement,
On grelottait par ces nuits de septembre et, depuis
huit jours, nous n'avions pas « touché » une miette de
tabac!
Le tabac est préféré aux honneurs. La pipe est
la joie du maréchal Foch, une brave pipe en me-
risier, bourrée de vulgaire « caporal ». Elle ne
quitte ses lèvres que pour revenir à sa main.
Elle est la compagne inséparable de ses médita-
tions.
*̃
Voici une autre anecdote, recueillie par M.» Sté-
phane Lauzanne, et qui a également son prix
C'est le 31 octobre 1915. L'ennemi a enlevé
Gheluzelt et menace Hooge. Les dernières réser-
ves anglaises, après un combat acharné, plient.
Foch se trouve à Vlamertinghe, poste de com-
mandement du général d'Urbal. II faut pourtant
tenir 24 heures, le temps nécessaire aux 16* et
32° corps de débarquer. Un hasard veut qu'à ce
moment passe l'automobile du maréchal French.
Informé de la présence du général Foch, il con-
sent à s'arrêter. Il est désespéré, ses dernières
réserves ont fondu dans la fournaise, ses divi-
sions épuisées seront incapables d'une plus
grande résitance il n'y a plus qu'à mourir.
Non, monsieur le maréchal, répond vivement Foch,
il faut tenir d'abord, tenir à tout prix, il sera temps de
mourir ensuite. Tenez jusqu'à, ce sonyje viens à votre
aide. ·
Le maréchal French n'est pas convaincu. Alors
Foch s'anime
Si la vieille infanterie de Wellington ne peut plue
tenir aujourd'hui derrière des tranchées, il faudra bien
que mes « gosses » y aillent.
Le maréchal French se redresse t
Elle tiendra, dit-il.
Et il donne ses instructions pour l'exécution de
l'ordre du général Foch.
*̃̃ .;̃•̃
C'est M. Stéphane Laùzahne qui! a également
recueilli ies propos de Foch sur cette expression
« Commander ».
Attendez, dit Foch, attendez, je n'ai pas commandé
tellement qu'on le croit. J'al amené ceux qui étaient au-
tour de moi à mes idées, ce qui est tout différent. Tenez,
te ïk juillet 1918, qui est le jour où furent prises les
plus grandes décisions de la guerre, je convoquai à tnom
quartier, général les commandants en chef des trois ar-
mées alliées. Et quand tout te monde fut assis autour de
la tahlr, je lus un papier où j'exposais la nécessité de
prendre l'offensive suivant un rythme alternatif dont
j'indiquais les cadences. Chacun y faisait une objeotion
de principe.
J'aurais pu répliquer en donnant un ordre formel,
catégorique, mais ce n'est pas ma manière et je sais
trop qu'un obéit mad quand on obéit à contre-oœwv Je
préférais prendre le ton d'un conseiller plutôt que d'un
chef. Je proférais convaincre chacun que mon plan était
parfaitement possible et réalisable. Je préférais donner
à chacun l'envis de le réaliser. Aussi, chacun, pris una-
lement par l'argument ou par ia logique, ou par la per-
suasion, ou mis simplement en présence de ses respon-
sabilités, se rallia de bonne grâce à mes idées, et tout
marcha bien mieux que si j'avais voulu simplement im-
poser mon autorMé.
Le maréchal terminait ainsi, scandant chacun
de ses mots
Commander n'est rien. Ce qu'il faut, c'est bien
comprendre ceux à qui on a affaire, et bien se
faire comprendre d'eux. Se bien comprendre, c'est tout
le secret de la vie.
Quand il remit au maréchal Foch, à Doullens,
l'insigne de sa dignité de maréchal de France, il y
avait dans le discours que le président de la Répu-
blique prononça à cette occasion un passage qui
sembla à bien des gens énigmatique
Mais c'est surtout dans les journées tragiques des
24, 25 et 26 mars dernier que vous avez donné la me
sure de votre caractère et que votre liberté d'esprit,
votre clairvoyance, votre sang-froid ont eu raison du
péril M. le président du conseil et moi, nous savons à
Douliens, devant la mairie, une allée de jardinier où il
fut aisé d'entrevoir vôtre bâton de maréchal,
En voici l'explication c'était à Doullens, le
24 mars. La séance où avait été décidée la nomina-
tion du généralissime venait de se terminer. Le
général Foch était sorti de la mairie ayant à sa
droite le maréchal Douglas Haig et à sa gauche le
général Pétain. Derrière eux marchaient MM. Poin-
caré et Clemenceau. A ce moment, dans une allée,
le généralissime s'arrêta, traça de sa canne quel-
ques traits sur le sable, et il indiqua brièvement
à ses deux collaborateurs comment il entendait ar-
rêter la marche de l'envahisseur. Puis, posant
amicalement la main sur l'épaule du maréchal
Haig, il se tourna vers MM. Poincaré et Clemen-
ceau et leur dit du ton le plus assuré « On les
aura. »
C'était ce souvenir que le président de la Répu-
blique évoquait et qui méritait de l'être,
y*
A la fin de mars 1918, Foch était venu s'ins-
taller à l'hôtel de ville de Beauvais. Il y répartit
ses services, puis il demanda au maire de lui in-
diquer, à proximité, une maison paisible où il
pourrait travailler tranquillement.
Très heureux, mon général, lui répondit le
maire, de vous être agréable, alors que vous avez
tant de préoccupations.
Mais, monsieur le maire, répondit-il avec
son calme imposant, je n'ai pas de préoccupa-
tions, je n'ai que des occupations.
Dans quel mot mieux, que dans celui-cï, qui'
est admirable, le généralissime a-t-il traduit le
sang-froid du chef? Ne dites pas son optimisme.
Le maréchal Foch repoussait cette expression
Optimisme, pessimisme, des mots qui n'ont pas de
sens. Ou plutôt l'optimisme est une température. En
tout cas, ça n'a rien à voir avec la guerre, ni avec ac-
tion, d'une façon générale. Oui, je sais, on a pu s'y
tromper et me croire un optimiste à tous crins.. Et
pourquoi? Parce que, de parti pris, je regarde toujours
du côté du salut et non de l'échec; je tourne volontai-
rement le dos au désastre; j'élimine l'hypothèse de
l'insuccès. Ma philosophie de l'action, car vivre, c'est
agir, la voulez-vous? Eh bien la voici toutes lès. fois
que vous avez une tâche à remplir, considérez-la soi-
gneusement rendez-vous compte exactement de ce
qu'on exige* de vous. Ppis, faites un plan et, pour l'exé-
cuter comme il faut, donnez-vous une méthode, n'im-
provisez jamais. Les -qualités fondamentales requîmes
pour la bonne exécution d'un plan, c'est d'abord, bien
entendu, l'intellience, puis le discernement, le..juge-
ment, qui permettent de reconnaître à la fois le but* a
atteindre et les moyens les plus propres pour attein-
dre, puis la suite dans les, idées, et enfin, ce qui ,est
plus essentiel que tout, la volonté, une volonté opiniâ-
tre. J'ajoute, si nous avons affaire à un chef, ascen-
dant moral. l'ascendant moral, qui n'est pas l'esprit
d'autorité, mais qui donne au chef l'autorité néces-
saire pour agir sur ses subordonnés, les rallier à ses
vues et faire d'eux les souples et dociles instruments
de ses décisions. Un chef est, par excellence, un ani-
mateur. Il faut que sa pensée, sa foi se communiquent
à eux; il faut qu'eux et lui ne fassent qu'un au
moment de l'exécution. C'est la condition même du
succès.
Ses réflexions philosophiques étaient exposées
déjà dans les livres où sont résumées ses leçons,
mais la conduite de la guerre leur a prêté un son
nouveau, d'un métal magnifique.
,'̃.̃ ̃̃ ->̃
Il a été en toute circonstance l'homme de Èon
enseignement.
Quand son fils tomba au champ d'honneur et
qu'on vint lui apprendre sa mort, il répondit,
sans qu'un muscle de sa face bronchât « Je; ne
suis plus rien pour aai, je suis peut-être encore
quelque chose pour la France travaillons » »
II travailla, et l'armistice mit le terme, qu'il
avait prévu, à sa tâche écrasante. ̃
*̃'̃ '̃•̃̃̃
Fooh avait tenu- secret, jusqu'au dernier mo-
ment, cet événement mondial. Ce fut seulement
quand il s'y crut autorisé qu'il dit à Mme Foch
Ils arrivent.
Comment I
Oui, mais ils arrivent en plénipotentiaires
Ce ne sont là que quelques épis ramassés pour
une gerbe, qui serait' d'une luxuriante- richesse,fsi
chacun de- ceux qui ont approché le grand s
souvenir, voulaient y ajouter. •̃
FOCH ET NAPOLÉON
Mais voici qui déborde le cadre des anecdotes.
C'était le 5 mai 1921. Une imposante cérémonie
officielle avait été organisée dans la chapelle des
Invalides pour le centenaire de la mort de Napo-
léon Ier. Le maréchal Foch prit la parole devant
le tombeau de l'empereur. Après avoir défini la
méthode et la doctrine napoléoniennes touchant
l'art de faire la guerre, s'adressant au vainqueur
d'Austerlttz, il proclama que « la morale doit
avoir raison de la force », qu'un peuple doit vivre
« non de gloire, mais de travail », et qu' « au
dessus de la guerre, il y a la paix ».
Voici l'essentiel de cette page magnifique et gé-
néreuse où le grand vainqueur de 1918 rendait
un hommage souverain à la paix
IdenUiflant la grandeur du pays avec la sieniie propre,
c'est par les armes que Napoléon voudra régler le sort
des nations. Comme si l'on pouvait faire sortir le bon-
heur de son peuple d'une suite désormais nécessaire de
victoires, aux sacrifices douloureux quand même 1
Comme si ce peuple pouvait vivre de gloire et non de
travail I Comme si les nations battues, atteintes dans
leur indépendance, ne devaient pas se lever un .jour
pour la reconquérir, mettre un terme au régime en pra-
tique, et présenter dos armées bientôt fortes par le
nombre et invincibles par l'ardeur que leur donne le
droit outragé I Com
uniquement de ta force, si géniale solt-elle I Dans cette,
̃tentative, Napoléon lui-même sombre, non pour avoir,
manqué de génie, mais pour avoir tenté l'iimpossiiile,
pour avoir entrepris, Bvec -une' force/ ̃ëprulsée de touîtes
façons, de plier ses lois une Europe déjà iogtrultg; pair,
ses
sus des armées à commander viotori'eu&eiment, c'est le
pays à servir pour son bonheur tel qu'il l'entend; c'est
la justice à respecter partout au-dessus de la guerre,,
il y a la paix.
Décidément, l'homme même le plus doué s'égare qpj,
dams a.es règlements de comptes de, rhuimanifcé, se Ne à
ses vues propres et à ses seules lumières et s'écarte de
la loi morale des sociétés, faite. du respeot.de l'individu,
de ce» principes de liberté, d'égalité et de fraternité qui
constituent notre civilisation, et qui sont l'essence. même
du christlaoteme..
LES DERNIERS MOMENTS
C'est alors que les médecins avaient encore :un
certain espoir que l'illustre malade s'est éteint
à 17 h. 45, hier mercredi, en son hôtel, 168 rue
de Grenelle. L'après-mMi s'était annoncé comme
apportant une amélioration sensible que la visite
habituelle des docteurs Davenière, L. de Gennes et
Heitz-Boyer et le résultat de leur examen ne
laissaiient guère prévoir, d'ailleurs. Le maréchal,
se sentant mieux vers 16 heures, obtint l'auto-
risation de se lever. La maréchale et ses deux filles,
Mmes Béeourt et Fournier, l'aidèrent à gagner
son fauteuil, assistées de M, Jean Falaize, un des
deux internes qui se partageailent la garde du
malade. L'autre était M. Laporte.
Ecoutons M. Jean Falaize raconter les derniers
instants du maréchal.
Je suis arrivé vers 16 h. 30. Le malade m'accuèil-
lit en souriant et même en plaisantant. Presque aussitôt
il fut question qu'il se levât. >ïi.
Btes-vous consentant? lui demandai-je. >
-^iNon seulement je consens, répondit-il; maisïjsSle
désire très vivement.
Avant de permettre au maréchal de se lever, je pris
son pouls. Il était un peu rapide, mais régulier. Aidé
des ûlles du maréchal, je transportai donc le malade
dans le fauteuil Louis-Philipe, à rallonge, dans lequel
nous l'avions déjà assis, au cours de sa maladie, cinq bu
six fois. A un moment, il nous pria d'approcher son
fauteuil de la fenêtre, et c'est là qu'il a vécu ses der-
niers trois quarts d'heure. 11 était gai. Il regardait en-
trer et sortir les visiteurs dans la cour de son hôtpl. il
était parfaitement lucide. Vers 17 h. 40, le maréchal
demanda si son lit était prêt. Il l'était.
Attendons encore un peu, dit-il.
Cependant, cinq minutes après, il redemanda
Est-oe que mon lit est bien chaud?
Le lit venait d'être réchauffé par deux boules d'eau
chaude.
Vous: pouvez vous coucher, lui dis-je.,
Alors, allons-y 1 répliqua le maréchal en souriant.
Ce furent ses dernières paroles.
Je reoulai le fauteuil de cinquante centimètres, mais,
au moment même où j'allais soulever le malade, je le
vis pâlir étrangement, lever la tête comme pour regar-
der le ciel par le haut de la fenêtre.
Je compris aussitôt qu'il s'agissait là de la syncope
que mon maître, le professeur Heitz-Boyer, qui suivit.
d'une façon si perspicace l'évolution de la maladie,
avait prévue depuis vendredi soir. Immédiatement, je
fis une injection intra-veineuse. Elle ne produisit au-
cun résultat. Je transportai aussitôt, dans mes bras, le
malade sur son lit et je fis une deuxième piqûre, une
piqûre prescrite dans les cas- désespérés. Mais le
cœur du maréchal avait cessé de battre.
La nouvelle, à peine connue, causa una pro-
fonde émotion. Tout aussitôt accourut l'abbé de
L'Epinoy, que le général Baratier et le comman-
dant Bunier, de l'état-major du maréchal, étaient
allés quérir à Sainte-Clotilde. Au même mortent;
arrivaient -lies docteurs Hèitz-Boyer, DaveriîèTfe
et de Gennes qui diagnostiquèrent; la syncope^ car-
diaque, par eux prevue.
On procéda pieusement à la toilette funèbre.
Le maréchal repose sur un lit de camp. Le visage,
calme, n'a point changé; les mains sont croisées
sur un crucifix. Revêtu de son uniforme bleu,
celui de petite tenue qu'il affectionnait, et sur
lequel brille la médaille militaire, le glorieux
défunt dort son dernier sommeil, veillé par sa
famille et deux sœurs de Saint-Vincent-de-Paul
auxquelles s'était joint la nuit dernière le Père
Doncœur. Celui-ci, ancien soldat, visitait souvent
le maréchal. Le Père Lhande, confesseur et confi-
dent habituel de Foch, avait donné à celui-ci les
derniers sacrements^ il y a une dizaine de jours.
Le général Weygand, qui était en tournée d'ins-
pection au 1" corps d'armée à Lille et à Mau-
beuge, apprit la nouvelle sur le quai' de la gare
du Nord de la bouche de la générale Weygand.
Il se fit aussitôt conduire rue de Grenelle et vint
s'incliner devant la dépouille de son chef et ami
auprès duquel il resta longtemps à prier.
Le frère du maréchal, le R.P, Foch, de la Com-
pagnie de Jésus, était arrivé de Montpellier dans
l'après-midi, mais n'avait pu voir le malade, au-
près duquel il pénétra, le soir, seulement en
compagnie du R. p.. Lhande, J
Chez le concierge de l'hôtel, sur le même
registre où s'étaient inscrits d'illustres et nom-
breux visiteurs formulant'des vœux de rétablisse-
ment à l'adresse du maréchal, nous avons pu lire
sur une page blanche l'heure et la date de la
mort 20 mars, 17 h. 45. Peu après, les inscrilp-
tions de condoléances se succédaient, tandis que
les visiteurs affluaient.
A 19 h. 35, M. Raymond Poincaré, accompagné
de son chef de cabinet, M. Grignon, pénétrait rué
de Grenelle; conduit par le commandant Bunier
auprès de la maréchale Foch, il lui exprimait
toute sa douleur. Le président du conseil pénétra
dans la chambre mortuaire, se recueillit quelques
instants, puis regagna le ministère des finances.
LA FAMILLE DE FOCH
Le maréchal laisse une veuve, née Mlle Bien-
venue, d'origine bretonne; elle avait apporté
en dot à son mari le domaine de Trefeunteniou, où
Foch allait se reposer. Le maréchal et Mme Foch
ont eu trois enfants deux filles, l'une a épousé
le colonel Foùrnier qui a quatre enfants; l'autre
est veuve du commandant Béeourt, avec deux
enfants; enfin, un fils, René Foch, sorti de l'Ecole
normale, a été tué à l'ennemi comme sous-liteute-
nant» .̃
.••• -̃ • ♦ ̃
L'émotion à Paris
Messieurs, j'ai la douleur de vous apprendre
que le maréchal est mort à 17 h. 45.
C'est en ces termes que, sur le péristyle de
l'hôtel, le commandant Buni'er, de l'état-major de
Foch, annonça la fin du grand Français. Aussitôt
la nouvelle gagna Paris. Dans les cinémas l'écran
relata le funèbre événement, et ce fut dans le
public une grande émotion qui, à l'heure de la
sortie des théâtres, gagna la rue.
Devant l'hôtel de la rue de Grenelle, une foule
s'était rassemblée, et d'heure en heure s'accrut,
maintenue par un service d'ordre quil ne laissait
passer que les personnes allant s'inscrire sur le
registre déposé chez le concierge. Dans le ves-
tibule, se tient l'état-major du maréchal les
colonels Parisot, Riedinger, Chapouilly, les com-
mandants Bunier et Poupon. Ne sont admis à
pénétrer dans la chambre mortuaire que les in-
times du maréchal.
A partir de 22 heures, les portes de l'hôtel ont
été closes, et la veillée mortuaire a réuni la ma-
réchale Foch et ses filles, le général Weygand'ef
le professeur Heitz-Boyer.
»
OB@ÈQUE§ I%TATIOÏVA.LE.S
Les membres du gouvernement se sont réunis
en conseil de cabinet au .Palais-Bourbon aussitôt
après la séance de la Chambre. Ils ont décidé que
des obsèques nationales seraient faites au maré-
chal Foeh.
1. Le gouvernement a déposé un projet de loi ou-
vrant un crédit spécial à cette occasion. •
Les obsèques nationales sont faites -aux frais de
l'Etat et comportent une solennité et une pompe
exceptionnelles. Depuis la fondation de la Répu-
blique semblable honneur n'a été décerné qu'à
Gambetta, Victor Hugo, Pasteur et aux présidents
de la Rél ublique Carnot et Félix Faure.
v «
Déclaration de M. Painlevé
M. Paul Painlevé, aussitôt rentré au ministère
de la guerre, a réuni autour de lui les journalistes
et leur a fait la déclaration suivante
La mort de M. le maréchal Foch met en'deuil toute
l'armée française et toutes les armées qui ont combattu
ensemble durant la grande guerre.
C'est un des plus illustres hommes de guerre qui
aient jamais existé. Il vivra dans l'Histoire aux côtés des
grands conquérants César, Alexandre, Napoléon, mais
ce fut un libérateur. L'effort prodigieux par lequel il
fit tomber pan par pan, en 1918, les lignes continues
de défense minutieusement construites par l'ennemi,
fera l'admiration de toutes les époques. H fut vraiment
le génial forgeron, dont les coups succédaient aux coups
avec une précision, une vigueur, une rapidité irrésis-
tibles. Sa qualité maîtresse était la volonté, une volonté
qui devenait comme farouche dans, l'action et qui se
communiquait par une sorte de magnétisme, à tous
ceux qui l'approchaient et qui devaient exécuter ses
décisions.
Sa parole brève, imagée, réduite à l'essentiel, négli-
geait les développements, les indications de détails,
mais pour ceux qui savaient la comprendre, quelles
impérieuses directives.
Lors d'un des derniers entretiens qu'il voulut bien
avoir avec moi, j'évoquai quelques phases de son passe:
la Marne, i'Yser, les sanglants assauts d'Artois, la
Somme, l'Italie.
« Des fautes, j'en ai commis, disait-il, oomme se par-
lant à luirmeme, les1- yeux perdus dans une méditation,
,&nt à lul_m y p dans une etiitat on
intérieure, mais, si je ne les avais pas commises, je
n'aurais pas pu faire ce que j'ai fait en 1918. »
Le plus bel hommage qui puisse être rendu à un
Français, c'est l'admiration et le dévouement de tous
ceux qu'il a commandés. Cet hommage, les armées de
tous les pays qui ont lutté aux côtés de la France le
lui ont déjà rendu sur les champs de bataille et le lui
rendront demain, autour de son cercueil.
Chez le maréchal Joffre
4 Le maréchal Joffre a appris la fin de son com-
pagnon d'armes par un coup de téléphone du ma-
réchal Pétaiin. Il a exprimé son profond chagrin
aux personnes qui l'entouraient et évoqué l'amitié
qui l'unissait au grand disparu.
Chez le maréchal Lyautey
Le maréchal Lyautey a exprimé sa douleur et
son admiration dans les termes suivants
Sur son nom, l'opinion était unanime, sans une
discordance. Devant lui, tous, Français, alliés, amis,
adversaires, s'inclinaient. Il était celui qui s'impose, ce-
lui que la médisance, la calomnie n'ont jamais effleuré,
celui qui plane, dans cette sérénité souriante, qui aux
pires heures ne l'abandonna jamais. Il était l'arbitre su-
prême, le, chef, le chef, et. toujours le chef. Ah comme
nos regards vont le chercher, nos voix l'appeler 1 II est
déjà celui qui manque.
Chez le maréchal Franchet d'Esperey
Le maréchal Franchet d'Esperey a appris la lin
du chef glorieux au moment où il revenait d'une
tournée d'inspection au Mans. « Le maréchal Foch,
a-t-il dit, était un ami de fondation. Sa mort nous
cause à tous une grande, une très grande dou-
leur. » ̃ ̃̃
Chez le général Gouraud t
Le général Gouraud, lorsqu'on est venu lui
annoncer la mort du maréchal Foch, a fait la
déclaration suivante
La France et ses alliés pleurent le grand chef qui les
a conduits à la victoire; l'Alsace, la Lorraine, la Po-
logne, la Tchécoslovaquie, la Roumanie, le grand Fran-
çais qui les a délivrés.
Pour lui, resté toujours modeste, il pensa jusqu'à
la dernière heure ce qu'il disait souvent pendant la
guerre, comme Jeanne d'Aro les hommes d'armes
bataillent; Dieu donne la victoire.
Chez M. Clemenceau
M. Clemenceau a consigné sa porte, hier soir,
aux étrangers et n'a voulu confier ses regrets qu'à
ses intimes. De maréchal a droit au plus pro-
fond respect », disait-il, il y a quelques jours,
à une personne qui lui annonçait que l'on déses-
pérait de sauver l'illustre soldat.
Déclaration du maréchal Pershing
Le maréchal Pershing, actuellement à Paris, a
fait à un représentant de l'Associated Press la de-
claration suivante •
La mort du maréchal Fooh .remplit tous nos cœurs
de tristesse. 11 sera honoré non seulement par la nation
française, mais par tous les peuples dont les armées
ont combattu sous son commandement dans la grande
guerre.
Comme ami et comme camarade, sa mort m'apporte
un sentiment profond de perte personnelle.
Le maréchal Pershing a ensuite rappelé com-
ment le maréchal Foch, lorsqu'il prit le comman-
dement des armées alliées à l'heure la plus grave,
établit l'unité de leurs efforts.
'̃̃ Bien que les forces alliées fussent à leur niveau le
pjus bas, art-il ajouté, la croissance rapide de l'armée
américaine amena rapidement la supériorité numérique
nécessaire pour enrayer le mouvement de reôul.et
assurer la victoire finale;
En terminant, le maréchal Pershing a dit que,
grâce à' une large conception de sa tâche, le maré-
chal Fooh coordonna brillamment les opérations
sur le front occidental en laissant à chaque géné-
ralissime la direction de sa propre armée. Le ma-
réchal Pershing a conclu dans les termes suivants:
Le maréchal était superbe dans l'épanouissement de
sa force morale et dans sa grandeur d'âme. Ses quali-
tés essentielles étaient peut-être, son calme et sa con-
fiance en face de l'adversité. Sa grandeur est devenue
maintenant, l'héritage de l'humanité..
Chez M. Myron T. Herrick
Myron T. Herrick, ambassadeur des Etats-
Unis, a confié sa profonde émotion à un repré-
sentant du Neiv-Ynrk Herald, cc Combien je l'ai-
mais a-t-il dit. Qu'elles étaient simples èt nobles,
les directives de sa Vie C'était pour cela, je
pense, oui, c'était pour cela que nous l'aimions le
plus chèrement. Mais pourquoi vous dirais-je ce
que le monde entier connaît ? Je vous dirai seule-
ment qu'il fut une grande figure parmi l'élite. »
M,_ Myron T. Herrick a évolué le jour où goa fils
reçut la visite de l'illustre soldat, près de Cleve-
land. « J'ai toujours été frappé par cette pensée,
a-t-il dit, que le maréchal Foch ne pouvait être
mis qu'au nombre de ces exceptionnelles person-
1 nalités de l'Histoire, dont la bonté fut capable
d'inspirer le sentiment de l'humaine fraternité à
ceux-là mêmes qui ne les avaient jamais vues. »
En terminant, l'ambassadeur des Etats-Unis a dit:
« Ah je puis vous affirmer que, dans ma patrie,
des centaines de milliers d'hommes quil ne l'ont
connu que par la. légende, ̃porteront, cette nuit, le
deuil du grand soldat français. Notre ami le maré-
chal n'est plus. Notre ami le maréchal est avec
les immortels. »
Les condoléances de sir William Tyrrell
Aussitôt que sir William Tyrrell, ambassadeur
de Grande-Bretagne en France, a eu connaissance
de la mort du maréchal Foch, il a envoyé la lettre
suivante à la maréchale.
Par anticipation aux instructions de mon gouverne-
ment, je me permets de vous affirmer la sympathie la
plus cordiale et la plus sincère qu'il soit possible de res-
sentir au moment de la perte irréparable que vous ve-
nez de souffrir. il
Dans mon ffays, qui n'a pas eu le privilège de le
compter parmi ses fils, le maréchal Foch sera pleuré
comme un héros national.
Témoignages de sympathie
La nouvelle de la mort du généralissime des
armées alliées connue, de nombreuses personnali-
tés vinrent rue de Grenelle présenter leurs con-
doléances. Le président de la République pria le
général Lasson d'aller porter, en son nom, un
témoignage de sympathie à la maréchale. MM. Paul
Doumer, président du Sénat, et Fernand Bouisson,
président de là Chambre, vinrent peu après, puis,
dans la soirée, M. Poincaré, président du conseil,
ainsi que nous le signalons d'autre part, les mem-
bres du gouvernement, le maréchal Lyautey, le
général Dubail, grand chancelier de la Légion
d'honneur, le général Gouraud, gouverneur mili-
taire de Paris, les ambassadeurs de Grande-Breta-
gne, du Japon, d'Italie, d'Espagne et de la Répu-
blique Argentine, le préfet de la Seine et le préfet
de police, les présidents du Conseil municipal de
Paris et du Conseil général de la Seine, de nom-
breux parlementaires, des personnalités du monde
diplomatique et politique, les attachés militaires
des puissances étrangères, M. Donat-Guigue, pro-
cureur général, M. Pressard, procureur de la
République, M. Philippe Berthelot, le général du
Bois, représentant l'ambassadeur de Belgique, le
général Alvin, commandant l'Ecole polyteehni-
que, les généraux de Castelnau, Herr, Samt-Just.
le vice-amiral Violette, chef d'état-major de la
marine, etc..
M. Poincaré devait présider hier soir. assisté de
plusieurs membres du gouvernement, le banquet
des chambres d'agriculture de France et pro-
noncer à cette occasion un discours.
En raison de la mort du maréchal Foch, et en
signe de deuil, le président du conseil et les mem-
bres ,du gouvernement n'ont pas assisté à cette
manifestation. ',¡,
En Algérie '̃>̃
On télégraphie d'Alger
M. Bordes, gouverneur de l'Algérie, a adressé
au ministre de la guerre le télégramme suivant
« L'Algérie tout entière s'associe au deuil qui'
frappe l'armée française dans la personne du plus
illustre de ses chefs.ët la tristesse qu'elle éprouve
en apprenant le décès du glorieux maréchal Foch
sera ressentie jusqu'aux plus lointains de ses
douars. Pierre Bordes. »
L'impression et. S'étranger
En Grande-Bretagne
Notre correspondant de Londres téléphone jeudi
matin
La nouvelle de la mort du maréchal Foch s'est
répandue hier à Londres et dans toute l'Angleterre
avec une grande rapidité et a été accueillie par-
tout avec des sentiments de regret et de douleur
aussi sincères que si l'Angleterre elle-même ve-
nait de perdre un grand soldat.
Aussitôt que la nouvelle de la mort du maréchal
a été connue au palais de Buckingham elle a été
téléphonée à Craigweil House, où le roi a été
avisé.
Dès qu'il a connu là mort du maréchal Foch,
le prince de Galles a envoyé un télégramme de
condoléances à la maréchale Foch.
M. Baldwin et sir Austen Chamberlain étaient
précisément, mercredi soir, les Tiôtes d'honneur
au dîner annuel de l'Association'de la presse étran-
gère de Londres. Les deux hommes d'Etat en ont
preftté îpottr rendre hommage '-a ?la méntïoiffe ;8u
grand soldat.. 4j
M. Baldwin se tournant vers de M. de Fleuriau,
ambassadeur de France, également présent, a dé-
claré
Je veux exprimer à mon vieil ami, M. de Fleuriau,
au nom du gouvernement britannique, l'émotion pro-
fonde qu'a causée à Londres la mort du maréchal Foch.
Dans les années qui se sont écoulées depuis la guerre,
il n'est personne au monde qui ne reconnaisse qu'en
lui vient de mourir un des plus grands soldats et, ce
qui est bien plus, une des plus grandes âmes de tous
les temps. On se souviendra toujours de Foch comme
d'un jÉtnd chrétien, d'un grand gentleman et d'un
grand nomme.
Sir Austen Chamberlain, ministre des affaires
étrangères, s'est associé à l'hommage rendu par
le chef du gouvernement au maréchal Foch.
D'autre part, en apprenant la mort du maréchal
Foch, le maréchal Allenby a fait la déclaration
suivante
Il était le plus grand général de son temps et son
nom passera dans l'histoire comme celui d'un des plus
grands soldats que le monde ait jamais connu.
L'amiral Beatty a dit
C'est le plus grand homme que le monde ait connu.
Il a servi non seulement la France mais encore le monde
entier.
M. Lloyd George, qui présidait une réunion li-
Jjérale à Bolton, a déclaré
Avant de nous occuper de l'objet de cette réunion",
je tiens â prononcer quelques mots. Je viens d'appren-
dre la mort de ce grand soldat, le maréchal Foch, au
génie duquel, plus qu'à celui de tout autre, le monde
doit d'être débarrassé de la menace du militarisme
allemand.
Mon plus grand orgueil est d'avoir su discerner à
temps ses dons suprêmes et que, en tant que premier
ministre de ce pays, j'ai pris l'initiative de le faire
nommer généralissime des forces- alliées du front occi-
dental. Foch état un homme d'imagination et de cou-
rage et, plus que tout, il avait cette qualité inhérente
à la vraie grandeur il avait la simplicité. Son labeur
est terminé, mais les triomphes qu'il a acquis pour
la liberté de l'humanité demeurent.
Le comte de Cavan, ancien commandant du
14* corps en France, a dit
C'était un des plus grands « gentlemen » de France.
Il est mort noblement en citoyen privé de ce grand
pays.
Tous les journaux consacrent, ce matin, de longs
articles nécrologiques à l'ancien commandant en
chef des armées alliées.
Le Times voit en lui l'incarnation de la mé-
thode, de la volonté et de l'unité qui ont valu
la victoire aux alliés.
Il n'y a jamais eu dans l'histoire militaire, dit-il, de
théoricien plus clair et plus logique.
Le major-général, sir Frederick Maurice, con-
sacre, dans le Daily Mirror, un long article ̃ au
« seul étranger non couronné qui ait été field-
marshal britannique, au seul membre étranger de
l'ordre du Mérite ».
Le Daily Mail propose que l'on célèbre un
service religieux à la mémoire du maréchal Foch
au pied du cénotaphe de Whitehall.
Le Morning Post écrit
Le plus grand trait de son caractère, c'est que sa
grande >feuvre ne fut pas une sorte de miracle, mais
le résultat de toute une vie de travail, ce fut un pro-
duit typique du terroir de France, un homme qui, dans
sa jeunesse, avait vu sa patrie vaincue et qui consacra
toute son énergie et quarante ans d'études à empêcher
qu'elle ne fût vaincue à nouveau.
Le Daily Telegraph écrit
Il était le seul général français auquel le gouverne-
ment britannique pût accepter de confier le comman-
dement suprême de ses armées.
Son grand souci a été de donner à la France la
sécurité militaire et pour cela de donner le Rhin comme
frontière à son pays. Foch était chevaleresque pour
l'ennemi.
En Belgique
Notre correspondant particulier à Bruxelles nous
télégraphie jeudi matin
La nouvelle de la mort du maréchal Foch a
produit en Belgique une profonde émotion. Les
journaux du matin consacrent tous plusieurs co-
lonnes de première page à la vie et Ja carrière
de celui' qui a conduit les armées alliées à la
victoire. Ils rendent un vibrant hommage au glo-
rieux soldat, à l'homme d'études et à l'homme de
cœur. Le comité de direction de la fédération
des légionnaires belges 1914-1918, réuni d'ur-
gence, a décidé d'envoyer une délégation aux
funérailles du maréchal Foch. s
Plusieurs délégués de fraternelles, d'anciens
combattants sont allés signer Je registre de con-
doléances à l'ambassade de France. Des tél.égram-
mes de condoléances ont été expédiés au prësi-»
dent de la République française et à Mme la maa
réchale Foch par les légionnaires belges.
En Allemagne
L'état d'esprit se manifeste par ce fait à h
nouvelle de la mort de Foch les principaux chefs
allemands ont été interrogés sur l'homme de
guerre français qui avait rétabli dans-la dernière
période la fortune des armes alliées. Ni les gé-
néraux Ludendorff et von Kluck ni le kronprinz
n'ont voulu parler.
Seul le général von Seeckt, ancien chef d'état-
major à cette époque, a consenti à faire cette dé.
claration v
« La mort qui ne connaît pas de nationalité
permet un ancien ennemi d'abaisser son épée
devant le corps du maréchal Foch, qui fut un
grand soldat et un grand Français. »
Les journaux accompagnent la nouvelle de la
mort du maréchal Foch de note biographiques
complètes et de commentaires détaillés. Ils retra-
cent toute la carrière militaire du maréchal, rap-
pellent le rôle déterminant qu'il joua pendant la
guerre et se livrent de nouveau à des hypothèses
toutes gratuites sur ce qui aurait pu se produire
si l'armistice. n'avait pas été conclu en novembre
1918.
D'une façon générale, la presse, tout en recon-
naissant ses mérites militaires, lui reproche de
s'être montré trop dur, après la guerre, à l'égard
de l'Allemagne. Et sur les mérites militaires du
maréchal, que de réserves et de restrictions sans
objectivité historique!
La M or g en Post (démocrate) écrit :« ̃
Foch était, sans nul doute, un des meilleurs chefs de
l'armée française. Chaque chef a besoin pour vaincre,
comme l'ont dit Clausewitz et d'autres qui ont dirigé
la guerre, d'un certain coefficient de chance, et ce n'est
diminuer nullement son génie que d'affirmer que le
général Chance l'a grandement aidé. Le formidable ap-
point en tanks, armes et munitions, de même qu'en
renforts, en troupes fraîches de 1,500,000 Américains,
et aussi les lourdes fautes du commandement dirigé
par Ludendorff, ont placé le maréchal Foch en face de
oonditions militaires comme jadis jamais n'en avait
rencontrées aucun de ses prédécesseurs.
La Gazette de Voss (démocrate)
A la guerre comme en politique, il n'y a que le sud.
ces qui compte, et le maréchal l'a remporté. A la tête
de l'armée la plus puissante que le monde ait jamais
vue, il a gagné la guerre. La victoire qui a mis l'Allé-
magne à terre est pour toujours liée à son nom. Il ap-
paraît aux yeux du soldat français comme le plus
grand capitaine de l'Histoire.
Le fut-il, en vérité? Les opinions varient à. ce su-
jet, et la génération qui a fait la guerre est encore trop
près du drame pour répondre à la question par oui
ou par non. Attendons le jugement de l'Histoire.
Le Vorwserts, moniteur du socialisme, écrit 'ï ̃̃̃̃
Nous avons en Allemagne de bonnes raisons de con-
sidérer le génie militaire avec un extrême scepticisme 3
depuis que nous connaissons les capacités intellectuel-!
les de Ludendorff qui avait,, ..pendant .Ja. guerre, ^au-
réole d'un, capitaine génial, il nous, est difficile de croire
a l'art militaire comme à une manifestation particuliè-
rement élevée de l'intelligence humaine. Une chose tou-
tefois paraît incontestable; le prestige personnel de
Foch en France et dans les pays alliés était si grand
que sa nomination comme général en chef suscita un
grand enthousiasme.
La Gazette générale de l'Allemagne v S
Foch n'avait pas remporté une victoire militaire com-'1
plète, même pas en 1918, quand nous étions déjà vain*
eus. Le blocus de l'Angleterre et l'aide active de l'Amer
rique lui permirent de repousser lentement les armées
allemandes. L'écroulement économique et politique des
puissances centrales et la révolution allemande lui as-
surèrent un -succès facile.
Le Lokal-Anzeiger, journal nationaliste, donna
carrière à son ressentiment
Au cours des négociations pour l'armistice et la paix,
Foch ne fit pas preuve de générosité pour l'ennemi
vaincu. Son but était l'anéantissement complet de l'AI-
iemagne. Aucune condition n'était assez dure pour lui
et quand les Américains et les Anglais repoussèrent
quelques-unes de ces conditions, dictées par une haine
barbare, il menaça de se retirer. Il a cependant réussi
à imposer le désarmement complet de l'Allemagne et
l'occupation à long terme de territoires allemands. Il
n'a pas été seulement notre adversaire comme soldat,
mais comme homme un de nos plus farouches ennemis.
La Deutsche Tageszeitung écrit dans le même
esprit
Depuis janvier 1919 à la tête du comité de guerre de
l'Entente, Foch essaya, à plusieurs reprises, de détai
cher la rive gauche du Rhin de l'Allemagne. II fut l'atU
versaire le plus violent de l'évacuation des pays rhé-
nans il a tout fait pour abaisser l'Allemagne militai-
rement, politiquement. Les alliances militaires de la
France^ aVee la' Belgique, la Pologne, la TebécosloVà*
qui'e sont gonœuvre(< de même; que le idésarmement de
l'Allemagne. '̃ .̃.
La forte personnalité du maréchal a, sans aucun
doute, beaucoup contribué à ce que la viotoirp. fi:) aie
échût à nos ennemis. Ce mérite ne permet pas toute-
fois de prétendre qu'il fut le plus grand capitaine de
tous les temps. Sa tâche était infiniment plus facile que
celle de Hindenburg et de Ludendorff Il avait stous lés
atouts en main et il fut appelé plutôt à cueillir des fruits
mûrs.. ̃̃
Le Berliner Tageblatt (démocrate)
La France' considère qu'il n'y a jamais eu de meilleui'
soldat ni de plus grand capitaine.
Une heure après la mort de l'homme, ce n'est pas
moment de se livrer à une étude historique pour savoir
si cette gloire sans pareille résistera à l'épreuve du ju-
gement de la postérité.. ï
La Deutsche Zeitung écrit :̃. j ̃ ̃̃̃'•• ••
En lui s'incarnait la brutale politique de violence et
de destruction de la France à l'égard de l'Allemagne.
La Correspondance parlementaire socialiste
écrit
Depuis la paix, Foch était resté à la tête de l'armé?
française et commandant militaire interallié. En cette
qualité il participa aux négociations diplomatiques sur
le désarmement de l'Allemagne, et il rechercha toujours
par de nouvelles sanctions à acquérir de nouveaux ti«
tres de gloire.
Depuis Locarno il se montra un peu plus rawonnitble,
mais dans le fond il resta jusqu'à sa mort non seule-
ment un grand militaire, mais aussi un grand milita*
riste,
~J
En Italie '̃ "̃' v;" ̃-• ••
Lanouvlle de la mort du maréchal Foch n'a été
Connue en Italie que vers 21 heures, trop tard
pour que les journaux pussent ̃ l'annoncer 'dans
leurs dernières éditions.
Dans les cercles politiques et militaires où la
nouvelle s'est rapidement répandue, elle aj été
accueillie avec un sentiment de deuil.
Le roi et, M. Mussolini ont été immédiatement
informés de, la mort de' l'ancien généralissime.
La nouvelle a, dit-on, vivement impressionne la
pape qui avait le grand soldat français en parti-
culière estime.
On ne connaît pas encore les dispositions que
va prendre le gouvernement pour que l'armée Ha*
klienne soit représentée aux funérailles du.maré*
chal, mais on affirme qu'un détachement de trou^
pes, accompagné d'un officier général, va partir
sous peu pour Paris. l
Le Popolo d'Italia écrit •••̃̃
Le nom du maréchal Foch demeurera vivant dana
notre admiration et dans notre sentiment de combat-i
tants qui n'ont pas oublié la fraternité des armes, dé.
montré avec les faits pend&tït les heures les plus ora-
geuses de la guerre et avant notre intervention. Il fut
un condottière (conducteur) et un maitre de la stra-
tégie de premier rang, ne voulant appliquer d'autre
doctrine que la logique après l'avoir armée avec la sim-
plicité mathématique d'une volonté formidable adaptée
rigoureusement aux circonstances du moment.
Pour l'histoire, que nous avons construite ensemble
sur la victoire et sur le pacifisme, nous sentons la dou-
leur de la France ainsi que les Français sincèrement
partagèrent l'angoisse pour notre grand et cher condot.
tiere récemment disparu. » ̃
Le Corriere délia Sera écrit
Sa splendide carrière militaire était terminée depuis
longtemps; il a clos sa carrière mortelle. Son nom, ce-
pendant, ne mourra pas. Il restera uni à toujours S
l'histoire de la splendide résistance opposée par la
France avec l'aide d'une coalition mondiale contre- la
tentative d'hégémonie allemande. '̃ • ,i i,
En Pologne
On télégraphie de Varsovie:
Au cours de la séance de la Diète est arrivée
la nouvelle du décès du maréchal Foch.
Le maréchal de la Diète, M. Daszonski, a in-
terrompu les débats, et, après avoir rappelé' le
rôle du maréchal Foch dans la guerre mondiale
et souligné, ce qu'il fit,pour l'indépendance de la
Pologne, il a demandé à la Diète /l'honorer sa
mémoire.
Tous les députés se sont aussitôt levés.
Au Japon •
Le peuple japonais suivait avec inquiétude
l'évolution de la maladie du maréchal. Il a appris
sa mort avec une douloureuse surprise.
Les officiers japonais ont gardé le souvenir des
nombreux témoignages d'affection qu'ils reçurent
du grand soldat. Quand l'escadre-école, que com-
mandait l'amiral Yamamoto, débarqua il y a deux
ans à Marseille, les aspirants vinrent à Paris et le
maréchal Foch les reçut aux Invalides. Il leur fit
une conférence qui les impressionna, vivement et
dont eux, les futurs officiers de la marine japo-
naise, titèrent grand Broflt «
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