Titre : Le Temps
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1928-03-20
Contributeur : Nefftzer, Auguste (1820-1876). Fondateur de la publication. Directeur de publication
Contributeur : Hébrard, Adrien (1833-1914). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 20 mars 1928 20 mars 1928
Description : 1928/03/20 (Numéro 24321). 1928/03/20 (Numéro 24321).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
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Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 15/10/2007
3. LE TEMPS. 20 mars 1928.
NOUVELLES' BU JOUR
M. Edouard Herriot à Lyon
M. Edouard Herriot, maire de Lyon et ministre,
de l'instruction publique, assistait hier aux mani- ·
festations organisées à l'occasion de la clôture de
la foire de Lyon. Deux banquets, celuii du comité
de la foire et celui de la Mutualité agricole, deux
discours. Retenons-en les déclarations suivantes
La France est, certes, une grande nation industrielle.
mais elle doit veiller à conserver le solide acquis de son
agriculture, faute de quoi elle perdrait son véritable
caractère.
Le gouvernement a d'ailleurs récemment arrêté un
plan précis de propagande pour assurer le maintien
des agriculteurs à la culture du sol et le retour la
terre. -•'
Parlant de la nécessité de relever la production
agricole, le ministre a' dit
Les chefs des grandes agglomérations urbaines doi-
vent donner l'exemple en encourageant le maintien et
le retour à la terrje, C'est ainsi que la municipalité de
Lyon "a créé une école d'agriculture, destinée' former
ut* à intéresser lés jeunes gens à la culture du soi..
Les enseignements et les statistiques, récemment
fournis par mon ami M. Queuille, ministre de l'agricul-
ture, m'ont profondément frappé. Alors qu'il y a cin-
quante à soixante ans., la France comptait 75 0/0 d'a-
griculteurs, elle n'en possède plus aujourd'hui que 52
k. 53 0/0.. ̃ ,_̃
Pour remédier à, cette crise grave, il faut'd'abord
rémunérer la producti-on. C'est une erreur pernicieuse,
à mon avis, d'opposer producteurs et transformateurs,
car si, en France, la production devenait déficitaire, la
situation serait catastrophique. C'est pourquoi le pro-
ducteur doit être largement rémunéré de ses efforts.
M. Edouard Herriot a insisté ensuite sur le rôle
Ue l'enseignement agricole
J'ai voulu, a-t-il dit, faciliter l'accession à l'instruc-
tion des enfants de la'campagne. Récemment, au Sénat,
comme je défendais le principe de l'égalité de tous les'
enfants devant l'instruction, on m'a objecté que ce se-
rait faire déserter les campagnes. Cette accusation est'
abominable, car ce serait insinuer que pour être culti-
vateur, il faut n'être pas instruit.
Invoquant l'exemple fourni par nos voisins d'ou-
tre-Rhin, l'orateur a dit encore
̃J'ai été frappé par le. développement énorme donné
'depuis la guerre par les Allemands à leur agriculture;
ils veulent faire produire par leurs terres ce qu'elles*
produisaient lorsqu'ils possédaient encore les provinces
reconquises. Cette énergie doit nous servir d'exemple.
Il est dans le programme.de notre ministre de l'agri-
culture de donner des phosphates au-dessous des cours
mondiaux aux cultivateurs français. Les gros exploi-
tants peuvent augmenter le rendement de leurs terres
par des machines, des engrais, des semences sélection-
nées, l'aménagement du drainage, et de: l'irrigation. Ce
qu'ils obtiennent par leur effort personnel, vous pouvez
l'obtenir par ''effort collectif, en vous unissant dans vos
coopératives. •'•̃
.M. Edouard Herriot, très applaudi, a conclu en
affirmant que l'agriculture est non seulement la
force' essentielle de la France, mais de la Hépu-
blique.
M. Joseph Caillaux dans la Sarthe
Dans un discours qu'il prononçait hier, au
cours d'une réunion devant un nombreux auditoire,
à Saint- Aubin-de-Locquenay, dans le canton de
Eresnay (Sarthe), M. Joseph Caillaux, sénateur du
département, a fait un ample exposé du problème
financier, politique et social, tel qu'il lui apparaît
à la veille de la consultation électorale du,22 avril.
Apres avoir évoqué une fois de plus la question
cien président du conseil a dit ̃
Le premier devoir des responsables de. l'angoissante
situation des budgets et du Trésor en 1924 était de
prêter leur concours, sans abdication, bien entendu, de
la liberté de conseil et de la liberté de discussion de
chacun, aux successeurs peinant pour résoudre les
énormes difficultés aooumulées. Tout autre fut l'atti-
tude des partis,de droite. A peine écartés du pouvoir,
leurs chefs se répandirent, dans le pays, alarmant les
possédants déjà trop enclins à écouter, poursuivant,
pendant deux années; quels que fussent les hommes
qui se succédassent au gouvernement, une campagne
d'affolement qui ne.cessa que quand le but recherché
eut été atteint, quand les vaincus du suffrage universel
eurent été; réintégrés dans. les consulats.
L'orateur rappelle le concours apporté par ses
amis du parti radical socialiste à l'œuvre de
redressement financier entreprise par M. Raymond
Poincaré, et il ajoute
En juin et juillet 1926, quand le franc menaçait de
couler à pic en suite de l'inquiétude propagée parmi
les. possédants, il n'y avait que. deux. moyçns/,tie .salut
les pleins pouvoirs à un ministère" groupant lés sàucties
qui eût taillé hardiment et rapidement dans le vif en
conformité du plan arrêté par les experts c'est ce
que M. Briand et moi nous proposâmes, nous ne fûmes
pas suivis. Seconde solution constituer un gouver-
nement qui, rassemblant des hommes représentatifs des
divers partis, fit large place aux prédiçants de la pa-
nique. Quelques réserves que suggère une méthode
dont la moralité politique n'est pas le trait dominant,
elle était la seule qui, le premier système étant écarté.
à la suite do la chute du ministère Briand-Caillaux,
pût être mise en œuvre..
Elle a donné à la longue la lenteur est son point
faible des résultats qu'il serait puéril de mécon-
naître. Elle' a abouti à un redressement financier qui
est sans doute loin d'être achevé, qui n'en est pas
inoins fort intéressant et dont je me diminuerais si je
ne reoonnaissais la qualité.
Il faut continuer, avance-t-on. Continuer le redresse-
ment financier en stabilisant le plus tôt possible notre
monnaie, en achevant de consolider la dette flottante,
«n réglant les dettes. interalliées?'Pleinement d'accord.
Mais continuer sans plan arrêté, continuer à sommeiller
sous le mancenillier de l'union nationale, à l'aveugle,
impossible!
Ce n'est pas d'hier qu'il fut remarqué que l'union de
tous. les Français était antienne chère aux rétrogrades,
rabâchée par tous ceux qui se complaisent à rêver
d'une adhésion universelle à un statu quo qui les en-
chante. Ils savent bien, ceux-là, que l'effaoement des
partis, leur confusion dans une masse amorphe, c'est,
,dans .une démocratie, la suppression de la vie et du
mouvement, c'est la stagnation, c'est le recul.
La stagnation car l'action politique chôme. Le
recul car les forces organisées des grands intérêts
ii-estent toujours en éveil, Ayant pleine liberté d'allures,:
elles s'empareront, elles achèveront de s'emparer de
l'Etat Elles en tireront mouture de protection doua-
FEuiLLETonr du %m$$
DU 20 MAHS 1928 (13)
LA SYMPHOHIE PASSIOMNÉE
11 flïffî GfiTES OF HRPPIPSS)
XIII
VIVKE HEUREUSE OU MOURIR
Une solide et sincère affection unissait dé-
sormais Janine à sa nouvelle amie, et lente-
ment, jour après jour, un peu dé paix revenait
dans son âme tourmentée.
A l'heure où, toute énergie l'abandonnant,
elle allait se laisser couler, le bras qui guide
les destinées avait jeté à portée de sa main la
bouée où elle s'était accrochée.
Une vie féminine n'est pas désespérée qui d&
couvre, à l'heure où; tout sombre, une possibilité
4e dévouement.> f
Maintenant Janine en venait à trouver à sa
souffrance une âpre douceur. Elle la chérissait,
l'entretenait, l'attisait même par l'évocation
constante du cher visage aux yeux de flamme,
par le souvenir de l'unique et merveilleux bai-
ser dont la 'brûlure était ineffaçable sur sa
lêvre.
La lettre quotidienne à l'absent reflétait dé-
sormais cette résignation en voiles noirs qui
suit la mort d'un être cher. Les ailes frémissan-
tes de la passion première n'y battaient plus.
On y voyait plutôt cette tendresse sereine et
sûre d'époux qui jadis se sont follement aimés
et qui s'en souviennent.
La douleur iriôrale n'est vraiment atroce que
tant qu'on doute, tant qu'on espère. La révéla-
tion d'un malheur consommé .est moins horri-
ble 'que l'attente dans les affres de l'incertitude.
Il s'ensuit un apaisement analogue à celui
qu.'anjène la conviction de l'inévitable.
Christian était parti sans retour. Jamais elle
ne saurait rien de lui. Il était perdu pour tou-
iieprodttctioa interdites
nière démesurée. Elles se satisferont de l'affairisme.
Elles culitveront le malthusianisme industriel déplo-
rable pour la santé économique de la nation. Elles ne
s'arrêteront pas là. Aussitôt qu'elles auront assis leur-
puissance, elles exigeront qu'on atténue des lois ou-
vrières désobligeantes pour elles, qu'on les débarrasse
d'une fiscalité qui les gêne. Un ancien ministre du Bloc
national ne s'élevait-il pas, ces jours, contre les doulou-
reuses investigations qu'implique l'impôt sur le revenu t
ne regrettait-il pas les vieilles contributions directes
qui laissaient en quiétude béate les favorisés de la for-
tune appelés jadis à participer de façon tout à fait
discrète aux charges de l'Etat?
Si, demain, un gouvernement s'appuyant sur les
gauohes, mais aussi largement ouvert à sa. droite qu'il
est possible, se forme, le laissera-t-on vivre? Ceux qui
sont parvenus a mettre dans l'impossibilité de subsister
tel cabinet où M. Briand avait pour collaborateur aux
finances M. Raoul Péret, supporteront-ils un ministère
de concentration républicaine?
Ils y seront contraints, me répondra-t-on, si le pays
dans ses comices en a ainsi décidé. Un passé tout pro-
che m'incite au doute. N'en a-t-on pas appelé, entre
1924 et Î92G, du suffrage universel à un suffrage
censitaire. ressuscité, -au. suffrage censitaire des possé»,
dants? Ne sera-t-on pas tenté de recommêncer la ma-
nœuvre ,qui a réussi? N'ira-t-on pas sonner la cloche
d'alarme jusqu'à ce que la crainte s'accordant avec là
faiblesse, avec la lassitude, enrégimentant là trahison,
véhicule à nouveau'les chefs des partis rétrogrades au
pouvoir?
Jeu singulièrement dangereux pour le bien général!
Aux flns de mesurer les périls qui s'y attacheraient, il,
me faut élargir mon exposé, considérer un Instant les
positions respectives du capitalisme et de la démocra-
tie- ̃
Il faut, dit encore l'orateur, que le capitalisme en-
tende qu'il est contraint de s'incliner devant la volonté
populaire quand elle s'est clairement manifestée et que
ceux-là sont ses mauvais bergers qui l'engagent à user
de sa force pour tenir la démocratie en un vasselage
qu'elle ne supporterait pas longtemps. Il y aurait fracas
inévitable si une féodalité nouvelle, de quelque façon
qu'elle fût composée, prétendait faire obstacle àf es
qu'un vieux légiste appelait; le droit de l'impôt », ou
encore s'érigeait contre la tutelle que l'Etat a le devoir
d'exercer sur les combinaisons d'industries et de capi-
taux. Pas davantage ne serait-il tolérable que la vio-
lence de l'argent barrât la route aux ennoblissements
du travail qui, toute liberté de discussion étant réser-
vée, toutes étapes utiles étant ménagées, doivent con-
duire à substituer, selon l'heureuse formule de .Jaurès,
« une société de collaboration à une société d'antago-
nismes ».
L'opinion publique saisira la gravité d'un problème
qui dépasse; tous :les autres. Si la démocratie ne doit ni
heurter,' ni effrayer les,' forces d'industrie," de commerce,
d'affaires dont elle a mission de seconder le dévelop-
pement, celles-ci ne peuvent en aucun cas, sous aucun
prétexte, prétendre à.uu droit de cop,trô|e quelconque
sur le suffrage universel dont il leur faut respecter
scrupuleusement, la volonté générale..Nous devrons
monter la garde autour, de la prééminence de l'Etat.
L'histoire apprend ce qu'il advient aux pays où les
factions,de quelque ordre, de quelque nature qu'elles
soient, (jjatâment, detpècent la puissance publique.
M.. Joseph Caillaux conclut en parlant de la
laïcité et en préconisant une' politique de conci-
liation européenne.
La quatrième conférence
de Mgr Baudrillart
Dans sa quatrième conférence à Notre-Dame,
Mgr Baudrillart a pris comme sujet « La Franco
catholique, la monarchie absolue et la papauté, de
l'avènement d'Henri IV a la mort do Louis XIV
Voici ce qu'il a dit du Roi-Soleil
Messieurs. le roll » Telle était la formule que pro-
nonçait chaque jour, sans lasser jamais l'émotion" ni le
respect, l'huissier'de service, lorsqu'il ouvrait à deux
battants la porte de la chambre royale, d'où sortait
Louis XIV pour,se rendre à travers les grands appar-
tements, jusqu'à, la chapelle où ir allait assister à la
:messé.
11 est temps, messieurs, qu'entre en scène celui qui
fut l'incarnation de la monarchie et de la France en
leur brillante époque Je suis Français autant que
roi. n C'est Louis XIV lui-même qui l'a dit.
Nul Français n'a le droit de l'oublier et de juger
légèrement le monarque qui, suivant la belle expression
d'un écrivain de rios jours, avait épousé la France »
La France, Louis XIV l'a défendue, agrandie, mise à
l'abri du péril constant que lui faisaient courir ses fron-
tières ouvertes et sa capitale à trois journées de marche
de l'envahisseur. Il l'a façonnée à son image suivant un
idéal d'ordre, d'intelligence, de beauté, de grandeur.
Parce qu'il a su tirer parti de toutes ses forces maté-
rielles et spirituelles, il l'a imposée à l'admiration et
à l'imitation du monde. De même qu'il s'est rencontré
dans l'histoire un sièele de Périolès, un siècle d'Au-
guste, un siècle de Charlomagne, un siècle de Léon X,
il y a eu un siècle de Louis XIV.
Après avoir parlé du rayonnement de la FraiW
catholique du grand siècle, du rayonnement de
son zèle apostolique par les missions, le confé-
rencier a continué
II est une autre forme d'expansion qui atteignit plus
d'ames encore et dont l'action, dans l'espace et dans le
temps, fut plus universelle je veux parler du rayon-
nement de la pensée catholique française.
En ce siècle, toutes tes puissances de l'âme furent au
service do l'idée chrétienne la raison la saisit, l'ima-
gination l'illumina, le sentiment la mut et l'échauffa.
Entreprise chimérique que d'évoquer, même- en une
simple nomenclature, les écrivains et les penseurs, arti-
sans de ce magnifique rayonnement! l
Qu'au fond de vos esprits se peigne, comme sur le
mur de la chambre de la Signature, au Vatican, une
nouvello Ecole d'AthèneB, synthèse, non plus do l'an-
tique sagesse, mais de la sagesse chrétienne.
L'évocation des noms de François do Sales, de
Pascal, de Malebranche, de Bossuet, Fénelon, Bour-
daloue, Fléchier, Massillon. de Mabillon, Martène,
Calmet, amène Mgr Baudrillart à dire
Levez-vous et groupez-vous l'
Autour de qui? Qui donc occupera le centre du ta-
bleau ? Doux d'entre vous peut-être, Fénelon et Bos-
suet, comme, dans le chef-d'œuvre de Raphaël, 'Aristote
et Platon? Non, messieurs, un seul et'ce sera Bossuet;
bar il fut tout, théologien, orateur, historien, contre-
versiste, apologiste, et môme, dans la sublimité de sa
biblique inspiration et de sa prose .imagée, poète. Qu'il
soit à cette, place, avec le geste de l'orateur;, que sa
bouche semble parler à tous et leur jeter ce cri du
sermon sur l'Unité « Que ma langue et ma main se
dessèchent, si jamais je t'oublie, ô sainte Eglise ro-
maine 1 « N'est-ce pas pour elle en effet que lui-même
et tous ceux que j'ai rassemblés autour de lui ont ac-
compli un si merveilleux labeur?
jours. Bientôt sa mère irait le rejoindre là-bas,
et la dernière passerelle s'écroulerait: il ne res-
terait plus rien que son souvenir.
Do temps à autre, Mme Miraldi venait la
voir. Janine ne lui rendait, pas ses visites, sous
le prétexte qu'elle ne pouvait quitter Clarisse.
En réalité elle ne se sentait pas le courage de,
revoir la villa, toute vibrante encore de l'heure
unique et passionnée qu'elle y avait vécue.
Mme Miraldi, avec embarras, disait quelques
mots de l'absent, sans le nommer. « Chris-
tian n eût été désormais trop intime, « mon
fils » trop cérémonieux. Un malaise planait,
empoisonnant à tel point ces minutes, pourtant
précieuses, que Janine souhaitait presque ne
plus revoir la mère de Christian.
Une fois elle s'était enhardie, après un long
débat, à lui poser une question. Elle y attachait
un grand. prix, la jugeait d une telle importance
que sa vie lui parut suspendue pendant les
quelques secondes où elle attendit la réponse.
Cette réponse tomba comme la dalle funé-
raire sur un cercueil.
Non Jamais Christian ne l'avait mention-
née dans ses lettres. Il disait ses travaux, lés.
concerts qu'il dirigeait, ses intentions, ses es-
poirs. parlait d'une grande œuvre lyrique qu'il
avait entreprise, et c'était tout: nulle allusion à
son amour.
*• II ne fallait donc plus que Christian eût fi-
gure de réalité. Désormais il n'était plus qu'un
songe.
Becky Carter venait aussi la voir, mais pour
lui parler de choses qui étaient si loin d'elle
son mari en fuite, disparu; le coffr dérobé,
probablement par lui, à l'instigation de Bir-
man. ses rôles au théâtre du faubourg, les
« rosseries » de ses camarades de misère, son
espoir de retrouver cet époux volage et voleur,
d'autant plus aimé qu'il le méritait moins.
Qu'importait à Janine ? Elle n'aspirait qu'à
être oubliée, sauf d'un seul qui ne voulait plus
penser à elle.
Ces visites lui étaient en somme, pénibles.
Elle eût préféré n'en plus recevoir. Elle se blâ-
mait de ne pas garder plus fidèle reconnais
sance à l'excellente et pitoyable Becky, à Mme
Miraldi, qui l'une et l'autre l'avaient si géné-
reusement secourue aux heures critiques, qui
l'avaient sauvée. Peut-être eussent-elles mieux
fait de l'abandonner, de la laisser mourir.
« La souffrance corrompt l'âme », pensait
.Janine. Ainsi cônnut-elle, qu'on, doit beaucoup
d'indulgence aux malheureux.
Malgré tout, la vie s'écoulait assez douce une
amitié très tendre étant au monde ce qu'il est
de meilleur à l'âme, après un grand amour.
Puis vint le drame.
UNE LETTRE DE M. MIILERAND
M. Monsservin, sénateur et président du conseil
général de l'Aveyron, avait demandé à M. Alexan-
dre Millerand de venir présider à Rodez, le di-
manche 18 mars, une conférence organisée par la
Fédération républicaine du Plateau Centrai (sec-
tion, de l'Aveyron)..
Après lui1 avoir rappelé le discours que M. Her-
riot avait prononcé, dans cette ville, le 9 novem-
bre 1924, pour développer le, programme cartel-
liste, M. Monsservin terminait ainsi la lettre qu'il
adressait, le 29 février, -à M. Alexandre Millerand:
« Que s'il vous était impossible de venir dans
notre Rouergue lointain, je vous prierais, mon-
sieur le. président, de bien vouloir me.contier vos
directives et m'autoriser à apporter à nos amis
votre haut encouragement. »
Voieii la lettre que M. Alexandre Millerand a
envoyée à M. Monsservin ̃-
̃ Mon cher collègue et ami,
Je suis très touché de l'appel que.vous mjadrp-
sez et j'aurais vivement désiré qu'il me f&tTpps-
sible de m'y rendre.. ̃ ̃
II m'aurait été aussi agréable qu'utile de m'en-
tretenir avec nos amis de la bataille qui, s'engage.
Personne ne met en doute la gravité de la pro-
chaine consultation électorale.
Du remarquable exposé de notre situation -fi-
nancière apporté à la tribune de la, Chambre par.
le président du conseil, deux conclusions ressor-
tent qui s'imposent avec'une égale netteté là
valeur des résultats" obtenus et leur fragilité.'
La majorité à laquelle demain la France se con-
fiera pourra tout aussi aisément rainer son re-
dressement que l'achever.
Lo choix de ses représentants est donc pour le
pays d'une importance suprême. Il doit se, faire en
pleine clarté. ̃.
L'équivoque se trouve malheureusement favo-
risée par deux circonstances fort différentes, mais
non moins fâcheuses l'une que l'autre,: le détes-
table retour au scrutin d'arrondissement, «|ce
miroir brisé où la France ne reconnait pas son
image »; le fait que, pour procéder au redresse-
ment financier, on a fait appel avec raison peut-
être à des concours qui permettent aux auteurs
responsables du mal de s'attribuer pour une part
le mérite de la guérison.
Le premier devoir des républicains nationaux.
est 4e subordonner le secondaire à l'essentiel, jes;
questions personnelles et locales l'intérêt pu-
blie. Il n'est d'autre moyen d'y parvenir qu'une
discipline étroite et, pour parler plus précisé-
ment, la soumission aux décisions des groupe-
ments nationaux. Si, le parti qui se donne pour but
le rétablissement de l'ordre se montrait incapable
de se discipliner lui-même, H se disqualifierait,
'avant m^me^ que d'avoir agi. La fragmentation
des circonscriptions rend !a tâche plus malaisée
elle ne la rend que plus nécessaire.
Voilà pour nos amis. Quant nos adversaires,
nous devons sans nous lasser leur remettre sQus
les yeux à quelle extrémité nous avait conduits le
régime de facilité et d'abandon démagogiques ias-,
tauré par le cartel.
Car enfin il faut choisir et toute la question des
élections est celle-là le suffrage universel est
mis en demeure d'opter entre la démagogie et. la
démocratie ordonnée sous la loi.
C'est une politique elle s'est librement; dé-
chaînée de juin 1924. à juillet 1926 que de flat-
ter tous les appétits et de se refuser à dire jamais
non.
Ses résultats malfaisants no se sont pas fait
attendre.
̃ Hier, à la tribune du Sénat, des républicains de
nuances diverses exposaient comment le rabais-
sant souci de tout égaliser par en bas avait in-
troduit l'anarchie dans l'enseignement secondaire
et menaçait do rendre impossible la formation
d'une élite intellectuelle.
Quelques jours auparavant, de la même trïïmne
s'élevaient des plaintes émouvantes et trop justi-
fiées contre l'impunité assurée à la campagne de
haine et de boue publiquement menée par la
presse communiste jusque dans nos casernés et
dans nos arsenaux. ?
En une période où les impôts ont atteint sinon,
sur certains points, dépassé ce qu'il est honnête-
ment permis de réclamer des contribuables, rien
de ce qui allégerait leur charge ne devrait, sern-
bie-t-ïl, être négligé. On" vu cependant la 'nïaœ- =
rrïé'dQ la Chambre refuser des ressources que. lui
proposait .le gouvernement par l'unique raison qjué
la combinaison projetée eût touché au monopole,
des allumettes. ̃ i
Ce sont des exemples, ce ne sont que des exenir
ples. Ils illustrent une politique qui dédaigneuse
des réalités s'imagine que des manifestations ora-
toiïes sont des solutions et qu'on gouverne en pé-
rorant.
Nous concevons autrement le devoir du parti
républicain. Une préoccupation constante nous
hante le souvenir des exemples et des, leçons do,
la guerre.
La fraternité des tranchées, ce n'est pas un îtijot
vide de sens et déclamatoire ce fut une réalité
vivante. Est-il donc impossible d'en ,prolonger le
bienfait jusque dans la paix et d'obtenir que les
artisans de la môme tâche, les enfants de la même
patrie ne.se considèrent pas comme des ennemis?
Par leurs vertus, leurs sacrifices, tes Français
ont mérité d'être traités en citoyens libres, dignes
d'entendre la vérité et capables de la suivre.
C'est un mensonge de prétendre qu'aucune col-
lectivité humaine puisse se passer d'une direc-
tion respectée et obéie. Dans la cité comme à Pate-
lier, Tautorité ;est nécessaire. Le nier, ou se con-
duire comme si l'on le niait, c'est vouer la nation
au désordre et à la ruine.
Ouvriers, agriculteurs, commerçants, industriels
ne demandent que la paix pour travailler et. pro-
duire. ̃'̃"̃'
Seule, une politique hardiment sociale, fondant
le progrès sur l'accord des classes, la leur assurefa
à l'intérieur. • ̃
Geoffrey Brickton avait passé raprès-nji'di'
entier auprès des jeunes filles. Il était amvëjles
mains chargées de friandises qu'on avait gri-
gnotées en devisant presque gaiement.
Une intimité charmante était née. Janine ne,
doutait plus que Geoff ne fût aussi épris de
Clarisse que celle-ci l'était de lui; ils étaient
devenus les meilleurs amis du monde.
S'il se montrait extrêmement courtois, Ja-
nine ne voyait rien dans ce flirt innocent qui
pût froisser Clarisse. La, pauvre infirme avait
frop,d'esprit pour en prendre ombrage., Elle sa-
vait bien qu'un jeune homme ne pouvait res-
sentir que de l'admiration en présence de Ja-
nine. Elle était même heureuse de leur mu-
tuelle estime. Janine était trop loyale, Geoff
trop droit elle enétait persuadée- puiir ac-
cueillir dans leur cœur un autre sentiment.
Souvent, sous divers prétextes, Janin,e lais-
sait Clarisse et Geoff en tête à tête, pour qu'ils
pussent échanger les aveux peut-etre plus-
qu'elle devinait au bord de leurs lèvres..
Cependant une chose demeurait pour elle
assez obscure quelle conclusion Clarisse vou-
lait-elle donner à leur amour ? Pour si. déli-
cieuse qu'elle fût par le visage, le cœur et l'es-
prit, elle n'en était pas moins infirme, et. trop
fière pour consentir jamais à unir sa vie à celle
d'un homme jeune, fringant et beau.
Avec peu de logique, Janine, qui avait tra-
vaillé à les rapprocher, maintenant s'inquiétait
du dénouement. Elle savait trop bien qu'ejlp-
même, dans l'état de Clarisse, n'eût pu ̃sëolp*
ment envisager l'idée de devenir une épouse.
Pourtant elle était bien sûre que si Chris-
tian fût devenu infirme, aveugle, mutilé de
la pire façon, elle n'aurait eu. que plus de
joie à devenir sa femme, à l'entourer d'une
telle tendresse qu'il en oubliât sa chair misé-
rable.
Ainsi se découvre l'abîme qui «épare un
amour d'homme d'un amour féminin.
"Peut-être Clarisse n'envisageait-elle rien au
delà de l'heure présente, trouvant infiniment
doux de se sentir aimée, plus doux encore
mille fois d'aimer, peut-être de le dire, de se
l'entendre dire, sans plus, sans espoir, sans
but,. pour. la seule beauté du sentiment.
Ah que Dieu veuille qu'il en soit ainsi
priait Janine.
Or, ce soir-là, après le départ de Geoffrey,
Clarisse, plus émue que de coutume, avait sou-
haité entendre un peu de musique. Janine
s'était mise au piano, berçant, une heure du-
rant, sur l'aile des sons, le rêve incertain de son
.%mie, •'
Pour la maintenir à l'extérieur, il ne suffit pas
de s'en proclamer partisan. C'est pis qu'une contre-
vérité, c'est une sotl ise de prêter à la France des
desseins guerriers. Elle veut la paix dans le res-
pect dee traités et le maintien de ses amitiés et
de ses alliances. Entre l'Allemagne et nous, il n'est
qu'une équivoque, mais ipro fende, et dangereuse.
Nous entendons maintenir l'ordre de choses créé
par la guerre; elle aspire à le modifier. Tant que
nos alliés comme nous-mêmes ne serons pas ga-
rantis contre la réalisation de desseins qui ne se
dissimulent même pas. nous n'avons pas le. droit,
sans folie. de renoncer à aucune des garanties que
nous tenons du traité de Versailles.
La République est, à nos yeux. la propriété de
tous les Français. Sous son égide, toutes les forces
morales doivent pouvoir librement se développer.
Notre programme a pour pôles la liberté et la
paix. Offrons-le, en toute sincérité,, à l'approba-
tion du suffrage universel.
Croyez-moi, je vous prie, votre cordialement
'dévoué, '̃
Aàëvoué, A. MILLERAND.
'1 1
CHRONIQUE ÉLECTORALE
Les élections législatives de £928
Socialistes et communistes >:
Au cours d'une réunion; électorale organisée hier
à Paris par le parti communiste, M. Semard, se-
crétaire général du parti, a déclaré qu'aux pro-?
chaines élections les candidats communistes au-
raient le devoir de refuser, même au second tour,
les suffrages socialistes.
M. Hussel, conseiller général de l'Isère, secré-
taire de la fédération socialiste et candidat de ce
parti dànsf la première circonscription de Vienne,
vient) d'adresser la lettre suivante au secrétaire
du parti communiste,' à Chasse '̃
Vous avez bien voulu me proposer, pour le deuxième
tour, un désistement mutuel entre le candidat commu-
niste et le candidat socialiste.
Si j'en crois les décisions de votre parti et votre
offre même, il s'agirait de maintenir le candidat, socia-
liste ou le candidat communiste, au deuxième tour,
quels que soient les résultats du premier.
Cette façon de procéder a fait déjà ses preuves dé-
plorables. En Allemagne, elle a permis, l'élection du
m'aréchariUndenbùrg contre un républicain; a Paris,
dans le 10° arrondissement, elle a assuré le succès du
candidat du Bloc national au lieu du socialiste.
Ne vous étonnez donc pas que, d'accord avec la sec-
tion socialiste de Vienne, je la repousse. Nous appli-
querons, au' contraire, fidèlement, "la ̃ décision de- notre
congrès national. Ce dernier a décidé que le candidat
socialiste, s'il n'arrive pas en tête du scrutin, au pre-
mier tour, se désistera pour le candidat de' gauche Je
plus capable de battre la-réaction, c'est-à-dirë'Çour- le
candidat de gauche « le plus voté ». C'est la vieille
tactique de la discipline républicaine. •
C'est la seule, à notre avis, que puissent approuver
les républicains qui tiennent à se débarrasser, au second
tour, de l'obstacle à la marche en avant, après avoir,
affirmé, au premier tour, leurs préférences doctrinales
^et de parti. Cette discipline républicaine, pratiquée de
ittfut temps dans notre pays, a sauvegardé la Répu-
blique que, fidèles en cela à la pensée de Jaurès, nous,
ne séparons jamais du socialisme. C'est elle, notam-
ment, pour ne choisir que l'exemple le plus éolatant,
qui a permis, avec le concours du parti radical d'ail-
leurs et à l'appel do ses chefs, de foire; élire à Paris les
députés commun jstes Duclos et Fournier contre les
réactionnaires de Kérillis' et Heynaud.
La préfecture de la ^eine a conimencé l'instal-
lation devant les mairies et les écoles des pan-,
neaux destinés à recevoir les affiches électorales
des candidats. Chaque candidat a droit à un pan-
neau dans la circonscription où il se présente.
Rappelons que, en vertu du décret organique du
2 févri'er 1852, c'est un décret du pouvoir exécutif
qui convoque les collèges électoraux. La promul-
,gation de. ce décret do convocation marque l'ou-
verture de la période électorale dont la durée
doit être au moins de vingt jours. Cette année, les
élections devant avoir lieu le 22 avril, le décret
doit être promulgué au plus tard le 2 du même
mois..
C'est à partir du jour de la promulgation que
les déclar étions de candidature doivent, confor-
mément à la loi, être reçues à la préfecture de la
Seine. C'est à partir de ce môme jour que les
préaux d'écoles peuvent être mis à la disposition
des candidats pour leurs réunions publiques et
que leurs affiches bénéficient de l'exonération du
timbre,. ,̃••̃ .-•;̃ .̃;̃̃;<̃ ̃ ̃' '̃
Paris (6° arrondissement). ̃ M. Henri-Jean
Frossard est, candidat républicain indépendant
dans la 2° circonscription du 6" arrondissement
(Notre-Dame-des-Champs)
9° arrondissement. On annonce la candida-
ture républicaine de M. Salzedo, avocat à la cour
d'appel, dans la lro circonscription de cet arron-
dissement (.Saint-Georges, Chaussée-d'Antin).
13e arrondissement. Les comités d'Union na-
tionale de là 2" circonscription du 13° arrondisse-
ment (Gare. Salpêtrière) ont désigné comme can-
didat M. Georges Boucheron, avocat à la cour
d'appel.
Seine. Le comité exécutif du parti républi-
cain radical et radical socialist-e a désigné M.
\einstein, docteur en droit, directeur d'école pri-
maire, comme candidat dans la 7° circonscription
de Sceaux (Sceaux).
Seine-f.t-Oise. La fédération radicale unio-
nisie a désigné pour lai" circonscription de Corbeil
M. Bloch. secrétaire de l'Association générale des
mutilés de la Seine, avocat; pour la'2e circonscrip-
tion de Corbeil, M. Ditte, maire de Soisy-sous-
Etiolles.
Ardkche. De'nouvelles candidatures se sont
affirmées arrondissement de Largentière MM.
Froment, maire de Largentière, socialiste S. F.
I. 0.; Bastidon, communiste; Privas, 1" circons-
cription M. Sauvertin, communiste; Privas, 2"
circonscription MM. Largier, conseiller général,
radical; Combier, conservateur; Mortier, commu-
niste Tournon 1™ circonscription MM. Roussil-
lon, conseiller général, union des forces de gau-
che, radical socialiste; Giny, communiste; Tour-
non, 2* circonscription MM. de Causon, radical;
Puis elle se tut, et, s'étant tournée vers Cla-
risse, elle eut la surprise de lui voir un nou-
veau regard et tout le visage empreint d'une,
sérénité nouvelle.
.Elle était très pâle, grave et calme, et Janine
songea que sur son lit de mort Clarisse aurait
ce même visage.
Impressionnée par cette pensée, elle s'appro-
cha de l'infirme, lui prit la main qu'elle sentit
trembler. Aussitôt Clarisse lui dit de sa voix
la meilleure
Je vais avoir besoin de vous, ma chérie.
de votre aide, dans une circonstance très grave.
.11 faut.
Elle s'arrêta, comme suffoquée par une mys-
térieuse émotion.
Vous savez bien, Clarisse, qu'il n'est au-
cune chose au monde que je ne sois prête à
faire pour vous.
Oui, je sais. Je ne doute pointde vous, Ja-
nine. Seulement ce que j'ai a vous demander
vous sera pénible, vous révoltera peut-être jus-
tement à cause de notre affection mutuelle.
Alors il faut d'abord que vous vous engagiez
en toute conscience à' suivre mes instructions,
quelles qu'elles soient.
Janine réfléchit une minute, puis, vaguement
inquiète, elle répondit évasivement
Clarisse, vous doutez de moi
Mais non, je vous l'ai dit C'est au con-
traite votre exquise amitié que je redoute..
parce que. dans' ce que je vais vous demander,
C'est ma vie qui est en jeu
Clarisse, vous m'effrayez Que voulez-vous
dire?
D'abord il me faut votre parole,
Oh c'est me faire Injure 1
Non, ma chérie Je vous demande sim-
plement de me promettre que vous ferez ce que
je vous demanderai de faire, que vous direz ce
que je vous prierai de dire, que vous tairez ce
qui devra rester secret.
Janine, rassurée, n'hésita plus.
J'ai confiance, Clarisse, que vous "ne me
demanderez jamais que des choses parfaite-
ment sages et raisonnables. Je n'ai donc au-
'cune raison de vous refuser ma' parole.
Bieni merci Je n'âtteudais pas moins de de J
vous, Janine. Je vais tout vous dire. Mais
'd'abord soyez assez gentille pour allumer. En-
core toute la lumière La Mettez-vous ici,
tout près de moi, donnez-moi vos mains
Avant tout, il faut que vous sachiez, ma chérie,
que les résolutions dont je vais vous faire part
sont définitives, inébranlables. Rien ne saurait
les faire changer. Vous n'allez donc rien tenter,
rien dire. oour essayer de m'en dissuader. Ce
Daudel, socialiste S. F. I. 0.; Poulard, commu-
niste.
Dordogne. Aux candidatures déjà signalées
pour la 2° circonscription de Périgueux, il faut
ajouter celles de MM. Çhaminade, conseiller géné-
ral, Union républicaine démocratique; docteur
Desmartin, maire d'Eyliac, radical socialiste
Freyssenge, avocat à la cour d'appel de Paris, ré-
publicain socialiste,
Loire. Le bloc républicain socialiste a décfdë
de se rallier, dans la 4e circonscription de Savnt-
Etienne, à la candidature de M. Brioude, socia'liste
S. F. I. 0., qui devient ainsi candidat de l'Union
des gauches.
Il convient d'ajouter trois candidatures à celles
quo nous avons fait connaître la Jeune- Répu-
blique présente, dans la 1" circonscription de
Saint-Etienne, M. Jean Bruyère. D'autre .part, là
section socialiste stéphanoise, qui a été dissoute
nar la commission administrative du pairti S. F.
I. 0. à la suite du conflit provoqué par l'admis-
sion des socialistes communistes et ,Qui s'est
reconstituée comme groupement autonome a- dé-
cidé de présenter deux candidatures celle de
M. Guillot, conseiller d'arrondissement, dans la
lr" circonscription de Saint-Etienne. et celle de
M. Benjamin Ledin, conseiller général, dans la 3".
Oise. De nouvelles candidatures ont été dé-
clarées, quelques modifications- fie sont produi-
tes nous publions ci-dessous une liste récapitu-
lative des candidats actuellement connus:
Bcauvàis^ V circonscription. MM. Jammy
Schmidt, député sortant, vice-président du Con-
seil général, radical socialiste: EmiSe Landé,
Union républicaine nationale; Albert HéraudQ.
conseiller général, socialiste (S.F.I.O.J; Brault,
communiste.
Beàuvois, 2* circonscription. MM. Manrice
Lecomte, conseiller d'arrondissement, républi-
cain de gauche; Etienne Weill-Raynal, professeur
au lycée de Rouen, socialiste (S.F.I.O.); Raoul
Aubaud, conseiller général, radical socialiste
Fernand Lhotelier, communiste.
Arrondissement de Clermont. MM. Désiré
Bouteille, député sortant, conseiller général,
union républicaine nationale; Berthelot. conseiller
général, socialiste (S.F.I.O.) Armand Dupuis,
conseiller général, radical socialiste Capon, com-
muniste,
Arrondissement de Compiègne. MM. Robert
Fourni er-Sarloyèze, député sortant, conseiller
général, républicain démocrate Edouard Vasseux,
vite-président du conseil géneral, Gauche radi'-
cale Jules Séguelas,' conseiller général, so-
cialiste (S.F.I.O.) Miquel, communiste.
Senlis, 1" circonscription. MM. Robert Bur-
nand, Union républicaine nationale, qui a reçu
l'investiture de la Fédération républicaine; Paul
Lévy, pubticiste, union républicaine nationale
Jean, Vassal, conseiller général.socialiste (S.F.I.O.)
Warusfel, avocat, radical socialiste Auguste
Séioux, communiste.
Senlis, 2* circonscription. MM.- Jules Uhry,
député' sortant, -"̃conseiller1 générai, socialiste
''S.F.LO.) Georges Decroze. ancien député, con-
seiller général, radical socialiste marquis de
Chanterae, radical unioniste;' comte Robert de
Billy, union républicaine nationale; André
din, communiste.
Conseils généraux
Abdennes. Dans le canton de Garïgnan, M.
Nivoix, radical socialiste, démissionnaire au mo-
ment de la suppression de la circonscription de
Sedan, a été réélu par 1,924 voix sur 3,047 ins-
crits, 2,024 votants et 1,937 suffrages exprimés.
Bouchks-du-Rhône, Au scrutin de ballottage
dans le 7° canton pour l'élection d'un conseiller
général, en remplacement de M. Clément Lévy, so-
cialiste S. F. I. O., décédé, il y a eu 12,293 inscrits,
7,552 votants, 7,395 suffrages exprimés. Ont ob-
tenu M. Vi'llecroze, socialiste S. F. I. O., 5,030
voix, élu; M. Edmond Jolly, candidat républicain
d'action sociale, patronné par l'Union républicaine,
2,365 voix.
Au premier tour, M. Villecroze avait obtenu
3,463 voix; M. Jolly 2,054 voix; M. Verjet,' socia-
liste indépendant, 785 voix; M. Gay, communiste,
gérant de VHumanité, 732 voix; M. Gavaudan, ra-
dical .socialiste. 288 voix; M.' Martres, socialiste
indépendant, 245 voix. `
Calvados. Une élection au conseil général a
eu lieu hier dans le canton d'Isigny-sur-Mer. En
voici le résultat inscrits 2,855, votants 2.070.
suffrages exprimés 2,060. Ont obtenu M. Hom-
met, républicain de gauche, 1,094 voix, élu. M.
Galliot, union nationale, 729 voix; M. Vacqucrio,
union nationale, 236 voix.
Charente Canton de Montmoreau M. Voil-
lade, radical socialiste, a été élu par 858 voix con-
tre. 7S4: à. M. Rousseau, ..union nationale, en ..rem-
placement de M. Jobit, républicain, décédé.
Eure-et-Loir. Le scrutin, d'hier, dans le
canton do Nogent-le-Rotrou, pour l'élection d'un
conseiller général en remplacement de M. Villette-
Gaté, décédé,- a donné les résultats suivants M.
Henri Roussard, maire de Nogent-le-Rotrou, ré-
publicain de gauche, 837 voix; M. Charles Guérin.
président du conseil d'arrondissement, radical in-
dépendant, 751; le docteur Levïllain. radical socia-
liste,. 364. Il y a ballottage. M. Villette-Gaté était
républicain de gauche.
NORD. Voici les résultats du scrutin d'hier,
dans. le canton d'Avesnes 4,465 inscrits. 3,582
votants, 3,570 suffrages exprimés. Ont obtenu
MM. Demarcq, radical socialiste. 1,457 voix, élu;
Louvrier, Union républicaine, 1,251; Léger, com-
muniste, 862.
ARMÉE
LE maréchal Fbanchet d'Espeiiey EN Tunisie.. Le
maréchal Franciiet d'Esperey, inspecteur général dos
armées françaises de l'Afrique du nord, est arrivé le
16 à Tunis. Le maréchal a commencé sa tournée d'ins-
pection des troupes de Tunisie.
Mutation DANS L'ÉTAT-MAJOR DE i/armée. Le gé-
néral de brigade Bourdais, commandant l'artillerie de
la 5" région, est placé dans la 2e section du cadre de
l'état-major général de l'armée.
MARINE •
MANOEUVRES AÉRIENNES ITALIENNES. On annonce de
Madrid qu'au cours des grandes manœuvres que l'a-
viation italienne exécutera en juin prochain dans la Mé-
diterranée, une flotte de 50 hydravions viendra à la
base de Los-Alcazares, située près de Carlhagène.
serait inutile et vous me feriez beaucoup de
peine. Je ne vous ai jamais dit, Janine, qu'a-
près mon accident noire médecin avait fait ap-
peler en consultation le professeur Hudson-
Weir, qui est, vous le savez, le premier chirur-
gien de l'Angleterre. Son avis fut des plus pré-
cis j'avais perdu à tout jamais l'usage de mes
jambes. à moins qu'on ne tentât une opération
très hasardeuse sur la moelle épinière opéra-
tion qui pouvait ou me guérir ou me tuer. Or
les chances de mort étaient infiniment plus
grandes que celles de guérison. A ce moment,
je fus lâche. Je n'étais pas très sûre de l'amour
de Geoff. et puis j'étais profondément abattue,
Réprimée, si faible Et maman me supplia de
ne pas risquer cette opération, trop dange-
reuse.
Clarisse s'arrêta. Puis au bout'de quelques
secondes elle laissa tomber ces simples mots
Voilà Aujourd'hui je suis résolue à la
tenter
Janine, pour toute réponse, se' contenta de
serrer plus fort les mains de la malade. Puis
elle les atira, mit ses lèvres sur chacune
Clarisse reprit
Et c'est ici, ma chérie, que j'ai besoin de
votre aide. Il faut que nous épargnions à ma-
man de trop cruelles angoisses. 'Je vais vous
charger de vous rendre dès demain à la. conr
sultation du professeur Hudson-Weir. Je lui
téléphonerai tout à l'heure pour lui demander
un rendez-vous. Vous lui direz que ma déci-
sion est prise, irrévocable, que s'il refusait je
m'adresserais à un autre chirurgien, moins
habile que lui et qui, plus "sûrement, me tue-
rait. Seulement vous lui direz que je demande,
que j'exige qu'il épargne à maman toute
crainte. Il faudra qu'après m'avoir à nouveau
examinée il prétende trouver mon état très amé-
lioré, qu'il affirme que l'opération jadis si pé-
rilleuse est aujourd'hui sans danger. D'ailleurs,
qui sait? C'est peut-être vrai. peu importe.!
Je suis prête à signer tous les papiers qu'il
voudra pour mettre sa responsabilité à couvert
en cas d'accident. Je suis majeure. J'ai donc
le droit dé vouloir, et je suis irrévocablement dé-
cidée à courir ma chance. Mais je ne veux pas
que maman s'inquiète, Imaginez son angoisse
pendant les jours qui vont précéder l'interven-
tion, si elle soupçonnait. Non, il faut à tout
prix lui épargner cela. Vous le comprenez, Ja-
nine, et vous me. comprenez aussi
Maintenant elle s'exaltait. Sa voix devenait
ardente, passionnée
Un jour vous me comprendrez mieux, et
vous m'approuverez, quoi qu'il arrive, j'en suis
convaincue. Je suis sûre qu'alors vous pense- I
rez avec moi au'eût-on ouatre-vinst-dix-nenf i
COURRIER LITTÉRAIRE
Lateuche et Balzac
Nous avons eu plusieurs fois déjà l'occasion
d'entretenir nos lecteurs de ce curieux Hyacinthe
(et non pas Henri) de Latouche, figure à part et
singulière du premier groupe romantique. Si l'on
ne lit plus guère, à l'exception peut-être de Fra-
golctla et de la Vallée aux loups, ses. livres incom-
plets, gâtés par une expression maladroite, Latou-
che a pourtant droit encore à notre souvenir il
fut le premier éditeur des Poésies d'André Chénier,
comme l'on sait, et l'infidèle, amant, qui fit tant
pleurer la pauvre Marceline Desbordes-Vatmore.
C'est aussi lui qui mit à l'étrier le pied de George
Sand en lui ouvrant le Figarç.. D'autre part. l'idée
de Ruy Dlas nn serait peut-être pas venue à Hugo
si Latouche n'avait publié, trois ans plus tôt. la
Reine d'Espagne. Et il avait également rappelé,
dans un poème de là Vallée aux loups, l'histoire de
Chatterton, bien avant que Vigny mît ce poète
à la scène. Ces divers titres justifient la curiosité
que .l'on' voit depuis quelque temps d'érudits his-
toriens de nos lettres nourrir pour cet excitateur.
L'un d'eux, M. Frédéric Ségu, professeur au lycée
de Toulouse, s'apprête à nous donner une nouvelle
édition de la Reine d'Espagne ainsi qu'une biogra-
phie du personnage, et prélude aujourd'hui à ce
grand travail en nous adressant les épreuves d'un
intéressant petit volume Un maître de Balzac
méconnu. Car Latouche, qui décidément est par-
tout, se trouverait aussi à l'origine de la Comédie
humaine. Dans quelle mesure? C'est à voir. Mais il
est bien certain que Balzac lui doit quelque chose,
ne serait-ce qu'un encouragement à l'heure obs-i
cure de ses débuts.
Leur première rencontre date de 1825. Latoucha
était déjà célèbre à cette époque, comme traduc-.
teur do Schiller et d'Hoffmann, auteur dramati-
que, contexir et pamphlétaire redouté Balza»
n'avait encore écrit que son injouable CromweLl
et ses premiers romans alimentaires, l'Héritière de
Birague, Jean Louis, Clotilde de Lusignan ou le
Beau juif, le Centenaire ou les Deux Beringheld,
il venait d'imprimer Waun-Chlore, quand sou
éditeur Urbain Canel attira l'attention de Latou-
che sur ce livre. Latouche en parla aussitôt bien-
vei:llamment dans la Pandore, et peu de jonrs
après reçut la visite du jeune écrivain qui, pour
remercier l'obligeant journaliste, lui promit un
petit cheval blanc, « d'une merveilleuse intelli-
gence et d'une docilité parfaite, et mangeant au
reste fort peu ». Comme ce cadeau princier tar-
dait .à' venir, Latouche se consolait en racontant
qu'il était en train de se ruiner à faire construire
une écurie en marbre blanc, avec des mangeoires
d'or, et des piscines en ivoire « afin, disait-il,
d'y loger le petit cheval merveilleux que M. de
Balzac doit m'envoyer ». Le pauvre Balzac avait
d'ailleurs de plus graves soucis que celui de tenir
ses mirobolantes promesses l'imprimerie et la
fonderie de caractères où il s'était follement
aventuré périclitaient, accumulant d'effroyables
dettes sur sa tête. Latouche lui offrit un asile, et,
mieux encore, plus d'une fois fit face aux
échéances. En même temps, il s'occupait des
manuscrits de son ami; une confiance entière
régnait entre eux. Et les lettres charmantes de
Latouche, conservées à Chantilly et dont M. Ségu
a pu obtenir communication, attestent la frater-
nelle autorité prise par l'auteur de Fragoletta eut
son cadet; celles de Balzao sont malheureusement
perdues et ont sans doute été détruites, aveo les
précieux manuscrits dé Chénier demeurés aux
mains de Latouche, lorsque sa maison de la Vallée-
aux-Loups fut occupée par les. Prussiens en 1870.
Mais on aperçoit l'efficacité des conseils donnés
par l'ingénieux journaliste au romancier encore
hésitant, tout empêtré de mélodrame Latouche a
deviné qu'il était fait pour mieux que cela et ne
se gêne pas pour le lui dire
Que le dieu de l'inspiration vous maudisse t Déjà,
vous en êtes maudit; et vous avez fait un brusque di-
vorce avec la raison. Quel livre que Gertrude
Quelle esquisse de grand maître et quels tableaux
promet ce beau et fanatique génie! Hélas! mon ami, il
vous faut des événements dans un livre pour qu'il
vous amuse! L'adorable développement d'une passion
vraie, la philosophie la plus élevée, l'inépuisable richesse
d'une âme vous sont lettres closes vous quitteriez
Rousseau pour une des cinquante-trois sorcières de
Walter Scott. Pauvre homme J'ai des' torrents d'in-
jures à verser sur' vous, des trésors de colère qui
m'étoufferont si vous ne venez. Venez dono!
Ce Venez donc fait allusion à Péloignement de
Balzac qui est allé, dans l'intervalle, s'installer
au diable Vauvert, près de l'Observatoire, en cette
rue Cassini où Latouche, tout en maugréant con-
tre cet exil, a présidé lui-même au somptueux
aménagement du romancier, « Que le diable
puisse confondre la rue de Cassini! et ne donner
jamais à ceux qui l'habitent que de vieilles mai-
tresses, du pain dur, des fourchettes de fer, des
dénouements détestables et des préfaces pleines
de pathos! Que ceux qui iront vous voir puissent
s'y rompre les jambes! Voilà! Ceci' est I expres-
sion du sens rassis, de .la méditation approfondie
et grave et virile et sénile. Ne prenez pas pour
vous l'histoire des dénouements et des préfaces;
;je ne connais pas les vôtres; je désire excessive-
ment qu'ils soient bien; je vous prie seulement
de montrer un peu la préface, car c'est là où je
vous donnerai' à mon tour les conseils et où l'ima-
gination ne peut excuser Y irrectitude d'esprit. »
Depuis quelques mois, en effet, Balzac est entré
dans sa voie, où Latouche, de toute sa force, l'a
poussé celle du roman historique et réaliste. Il
écrit les Chouans, pour lesquels il est allé se do-
cumenter sur place, à Fougères. Latouche trouve
qu'il y prolonge inutilement son séjour, qu'il perd
son temps. De retour à Paris, Balzac lit à son
ami des extraits de son livre, qu'il recommence
sans arrêt, mécontent de lui, redemandant con-
seil. L'autre l'exhorte
Qu'avez-vous besoin de mes rabâchages? Ce n'est,
par Dieu, pas que je refuse de vous entendre; il y a
toujours plaisir et profit: mais donnez-moi du nou-
veau. Ne, déclinons pas toujours musa, la muse. Assez,
assez, enfant que vous êtes! Si je savais bien les for-
mules de l'exorcisme, je les emploierais ici; car à la
lenteur tout.à. fait inattendue, tout à fait inexplicable
que ce fier Honoré, ce foudre de roman qui en a fait
quatre, en six semaines, a mise à parachever sob
Chouan, je crois que ledit Chouan a le diable au corps.
N'y a-t-il pas assez longtemps que vous léchez ce petit
ours? Je crois que je vous atme encore, puisque ja
vous dis des injures, mais ne vous y fiez pas.
Les injures de Latouche, les pressantes objur-»
chances sur cent de mourir, et une seule d'être
guérie, de sauver son amour, son bonheur, cela
vaudrait d'être tenté. qu'aucune hésitation
n'est' permise à celle qui aime de toute son
âme, qui est aimée de même amour et veut s'en
montrer digne Oui, Janine, un jour vous com-
prendrez cela, et si je ne suis pas là, si l'é-
preuve m'a été contraire, vous n'en penserez
pas moins que j'ai agi comme je devais agir.
Vous vous direz qu'à ma place vous eussiez
fait comme moi. Imaginez, chérie: pour sau-
ver son amour sa seule possibilité de bonheur
en ce monde Cela ne vaut-il pas de tout ris-
quer ?. Oui, n'y eût-il qu'une chance sur cent,
une femme vraiment femme n'a plus'le droit
cPhésiter. Car, voyez-vous, Janine, maintenant
je ne peux plus douter. Je suis sûre que Geof-
frey m'aime. Il ne me l'a jamais dit, et je refu-
serais de l'entendre tant que je serai en cet
état. Car il serait obligé d'ajouter qu'il désire
m'épouser, etvous savez bien qu'infirme je n'y
consentirais point. Il ne me l'a pas dit, mais
tout ne le prouve-t-il pas ? N'ai-je pas mieux
qu'un aveu ? Et lui non plus ne doute pas de
mon amour. lui aussi a compris. Il est des re-
gards plus éloquents que des paroles, et ces re-
gards-là nous les avons échangés Et quelle
estime nouvelle il aura pour moi, quand il
saura Si les choses tournent mal, tant pis
Je ne regretterai pas ma vie sans espoir, qui,
maintenant, serait impossible.
Clarisse se tut et Janine n'eut qu'un cri
Vous guérirez, Clarisse Vous serez sau-
vée parce qu'il y a une justice au monde et
que nulle ne mérite plus que vous d'être heu-
reuse.
Clarisse s'était redressée, rayonnante, pouf
lire dans les yeux de Janine.
Alors ?. Alors, vous m'approuvez, chérie?
Oh certes, de tout mon cœur Et je suis
sûre qu'à votre place je n'hésiterais pas davan-
tage.
La voix de Clarisse se fit grave, avec,! peut-
être, tout au fond, un reproche P
Pour que vous sentiez cela, Janine, il faut
que vous aussi veus ayez aimé. Il faut que
vous ayez souffert.
Janine courba le front, et dit très bas v
Peut-être '̃?.
La tête blonde et la tête brune se rapprochè-
rent. Leurs joues brûlantes se touchèrent, et
leurs larmes s'unirent, 1
EFFrE Adélaïde ROWLANDS.
Adapté di l'anglais par GEORGES Romieu.
(A $uivre.)
NOUVELLES' BU JOUR
M. Edouard Herriot à Lyon
M. Edouard Herriot, maire de Lyon et ministre,
de l'instruction publique, assistait hier aux mani- ·
festations organisées à l'occasion de la clôture de
la foire de Lyon. Deux banquets, celuii du comité
de la foire et celui de la Mutualité agricole, deux
discours. Retenons-en les déclarations suivantes
La France est, certes, une grande nation industrielle.
mais elle doit veiller à conserver le solide acquis de son
agriculture, faute de quoi elle perdrait son véritable
caractère.
Le gouvernement a d'ailleurs récemment arrêté un
plan précis de propagande pour assurer le maintien
des agriculteurs à la culture du sol et le retour la
terre. -•'
Parlant de la nécessité de relever la production
agricole, le ministre a' dit
Les chefs des grandes agglomérations urbaines doi-
vent donner l'exemple en encourageant le maintien et
le retour à la terrje, C'est ainsi que la municipalité de
Lyon "a créé une école d'agriculture, destinée' former
ut* à intéresser lés jeunes gens à la culture du soi..
Les enseignements et les statistiques, récemment
fournis par mon ami M. Queuille, ministre de l'agricul-
ture, m'ont profondément frappé. Alors qu'il y a cin-
quante à soixante ans., la France comptait 75 0/0 d'a-
griculteurs, elle n'en possède plus aujourd'hui que 52
k. 53 0/0.. ̃ ,_̃
Pour remédier à, cette crise grave, il faut'd'abord
rémunérer la producti-on. C'est une erreur pernicieuse,
à mon avis, d'opposer producteurs et transformateurs,
car si, en France, la production devenait déficitaire, la
situation serait catastrophique. C'est pourquoi le pro-
ducteur doit être largement rémunéré de ses efforts.
M. Edouard Herriot a insisté ensuite sur le rôle
Ue l'enseignement agricole
J'ai voulu, a-t-il dit, faciliter l'accession à l'instruc-
tion des enfants de la'campagne. Récemment, au Sénat,
comme je défendais le principe de l'égalité de tous les'
enfants devant l'instruction, on m'a objecté que ce se-
rait faire déserter les campagnes. Cette accusation est'
abominable, car ce serait insinuer que pour être culti-
vateur, il faut n'être pas instruit.
Invoquant l'exemple fourni par nos voisins d'ou-
tre-Rhin, l'orateur a dit encore
̃J'ai été frappé par le. développement énorme donné
'depuis la guerre par les Allemands à leur agriculture;
ils veulent faire produire par leurs terres ce qu'elles*
produisaient lorsqu'ils possédaient encore les provinces
reconquises. Cette énergie doit nous servir d'exemple.
Il est dans le programme.de notre ministre de l'agri-
culture de donner des phosphates au-dessous des cours
mondiaux aux cultivateurs français. Les gros exploi-
tants peuvent augmenter le rendement de leurs terres
par des machines, des engrais, des semences sélection-
nées, l'aménagement du drainage, et de: l'irrigation. Ce
qu'ils obtiennent par leur effort personnel, vous pouvez
l'obtenir par ''effort collectif, en vous unissant dans vos
coopératives. •'•̃
.M. Edouard Herriot, très applaudi, a conclu en
affirmant que l'agriculture est non seulement la
force' essentielle de la France, mais de la Hépu-
blique.
M. Joseph Caillaux dans la Sarthe
Dans un discours qu'il prononçait hier, au
cours d'une réunion devant un nombreux auditoire,
à Saint- Aubin-de-Locquenay, dans le canton de
Eresnay (Sarthe), M. Joseph Caillaux, sénateur du
département, a fait un ample exposé du problème
financier, politique et social, tel qu'il lui apparaît
à la veille de la consultation électorale du,22 avril.
Apres avoir évoqué une fois de plus la question
cien président du conseil a dit ̃
Le premier devoir des responsables de. l'angoissante
situation des budgets et du Trésor en 1924 était de
prêter leur concours, sans abdication, bien entendu, de
la liberté de conseil et de la liberté de discussion de
chacun, aux successeurs peinant pour résoudre les
énormes difficultés aooumulées. Tout autre fut l'atti-
tude des partis,de droite. A peine écartés du pouvoir,
leurs chefs se répandirent, dans le pays, alarmant les
possédants déjà trop enclins à écouter, poursuivant,
pendant deux années; quels que fussent les hommes
qui se succédassent au gouvernement, une campagne
d'affolement qui ne.cessa que quand le but recherché
eut été atteint, quand les vaincus du suffrage universel
eurent été; réintégrés dans. les consulats.
L'orateur rappelle le concours apporté par ses
amis du parti radical socialiste à l'œuvre de
redressement financier entreprise par M. Raymond
Poincaré, et il ajoute
En juin et juillet 1926, quand le franc menaçait de
couler à pic en suite de l'inquiétude propagée parmi
les. possédants, il n'y avait que. deux. moyçns/,tie .salut
les pleins pouvoirs à un ministère" groupant lés sàucties
qui eût taillé hardiment et rapidement dans le vif en
conformité du plan arrêté par les experts c'est ce
que M. Briand et moi nous proposâmes, nous ne fûmes
pas suivis. Seconde solution constituer un gouver-
nement qui, rassemblant des hommes représentatifs des
divers partis, fit large place aux prédiçants de la pa-
nique. Quelques réserves que suggère une méthode
dont la moralité politique n'est pas le trait dominant,
elle était la seule qui, le premier système étant écarté.
à la suite do la chute du ministère Briand-Caillaux,
pût être mise en œuvre..
Elle a donné à la longue la lenteur est son point
faible des résultats qu'il serait puéril de mécon-
naître. Elle' a abouti à un redressement financier qui
est sans doute loin d'être achevé, qui n'en est pas
inoins fort intéressant et dont je me diminuerais si je
ne reoonnaissais la qualité.
Il faut continuer, avance-t-on. Continuer le redresse-
ment financier en stabilisant le plus tôt possible notre
monnaie, en achevant de consolider la dette flottante,
«n réglant les dettes. interalliées?'Pleinement d'accord.
Mais continuer sans plan arrêté, continuer à sommeiller
sous le mancenillier de l'union nationale, à l'aveugle,
impossible!
Ce n'est pas d'hier qu'il fut remarqué que l'union de
tous. les Français était antienne chère aux rétrogrades,
rabâchée par tous ceux qui se complaisent à rêver
d'une adhésion universelle à un statu quo qui les en-
chante. Ils savent bien, ceux-là, que l'effaoement des
partis, leur confusion dans une masse amorphe, c'est,
,dans .une démocratie, la suppression de la vie et du
mouvement, c'est la stagnation, c'est le recul.
La stagnation car l'action politique chôme. Le
recul car les forces organisées des grands intérêts
ii-estent toujours en éveil, Ayant pleine liberté d'allures,:
elles s'empareront, elles achèveront de s'emparer de
l'Etat Elles en tireront mouture de protection doua-
FEuiLLETonr du %m$$
DU 20 MAHS 1928 (13)
LA SYMPHOHIE PASSIOMNÉE
11 flïffî GfiTES OF HRPPIPSS)
XIII
VIVKE HEUREUSE OU MOURIR
Une solide et sincère affection unissait dé-
sormais Janine à sa nouvelle amie, et lente-
ment, jour après jour, un peu dé paix revenait
dans son âme tourmentée.
A l'heure où, toute énergie l'abandonnant,
elle allait se laisser couler, le bras qui guide
les destinées avait jeté à portée de sa main la
bouée où elle s'était accrochée.
Une vie féminine n'est pas désespérée qui d&
couvre, à l'heure où; tout sombre, une possibilité
4e dévouement.> f
Maintenant Janine en venait à trouver à sa
souffrance une âpre douceur. Elle la chérissait,
l'entretenait, l'attisait même par l'évocation
constante du cher visage aux yeux de flamme,
par le souvenir de l'unique et merveilleux bai-
ser dont la 'brûlure était ineffaçable sur sa
lêvre.
La lettre quotidienne à l'absent reflétait dé-
sormais cette résignation en voiles noirs qui
suit la mort d'un être cher. Les ailes frémissan-
tes de la passion première n'y battaient plus.
On y voyait plutôt cette tendresse sereine et
sûre d'époux qui jadis se sont follement aimés
et qui s'en souviennent.
La douleur iriôrale n'est vraiment atroce que
tant qu'on doute, tant qu'on espère. La révéla-
tion d'un malheur consommé .est moins horri-
ble 'que l'attente dans les affres de l'incertitude.
Il s'ensuit un apaisement analogue à celui
qu.'anjène la conviction de l'inévitable.
Christian était parti sans retour. Jamais elle
ne saurait rien de lui. Il était perdu pour tou-
iieprodttctioa interdites
nière démesurée. Elles se satisferont de l'affairisme.
Elles culitveront le malthusianisme industriel déplo-
rable pour la santé économique de la nation. Elles ne
s'arrêteront pas là. Aussitôt qu'elles auront assis leur-
puissance, elles exigeront qu'on atténue des lois ou-
vrières désobligeantes pour elles, qu'on les débarrasse
d'une fiscalité qui les gêne. Un ancien ministre du Bloc
national ne s'élevait-il pas, ces jours, contre les doulou-
reuses investigations qu'implique l'impôt sur le revenu t
ne regrettait-il pas les vieilles contributions directes
qui laissaient en quiétude béate les favorisés de la for-
tune appelés jadis à participer de façon tout à fait
discrète aux charges de l'Etat?
Si, demain, un gouvernement s'appuyant sur les
gauohes, mais aussi largement ouvert à sa. droite qu'il
est possible, se forme, le laissera-t-on vivre? Ceux qui
sont parvenus a mettre dans l'impossibilité de subsister
tel cabinet où M. Briand avait pour collaborateur aux
finances M. Raoul Péret, supporteront-ils un ministère
de concentration républicaine?
Ils y seront contraints, me répondra-t-on, si le pays
dans ses comices en a ainsi décidé. Un passé tout pro-
che m'incite au doute. N'en a-t-on pas appelé, entre
1924 et Î92G, du suffrage universel à un suffrage
censitaire. ressuscité, -au. suffrage censitaire des possé»,
dants? Ne sera-t-on pas tenté de recommêncer la ma-
nœuvre ,qui a réussi? N'ira-t-on pas sonner la cloche
d'alarme jusqu'à ce que la crainte s'accordant avec là
faiblesse, avec la lassitude, enrégimentant là trahison,
véhicule à nouveau'les chefs des partis rétrogrades au
pouvoir?
Jeu singulièrement dangereux pour le bien général!
Aux flns de mesurer les périls qui s'y attacheraient, il,
me faut élargir mon exposé, considérer un Instant les
positions respectives du capitalisme et de la démocra-
tie- ̃
Il faut, dit encore l'orateur, que le capitalisme en-
tende qu'il est contraint de s'incliner devant la volonté
populaire quand elle s'est clairement manifestée et que
ceux-là sont ses mauvais bergers qui l'engagent à user
de sa force pour tenir la démocratie en un vasselage
qu'elle ne supporterait pas longtemps. Il y aurait fracas
inévitable si une féodalité nouvelle, de quelque façon
qu'elle fût composée, prétendait faire obstacle àf es
qu'un vieux légiste appelait; le droit de l'impôt », ou
encore s'érigeait contre la tutelle que l'Etat a le devoir
d'exercer sur les combinaisons d'industries et de capi-
taux. Pas davantage ne serait-il tolérable que la vio-
lence de l'argent barrât la route aux ennoblissements
du travail qui, toute liberté de discussion étant réser-
vée, toutes étapes utiles étant ménagées, doivent con-
duire à substituer, selon l'heureuse formule de .Jaurès,
« une société de collaboration à une société d'antago-
nismes ».
L'opinion publique saisira la gravité d'un problème
qui dépasse; tous :les autres. Si la démocratie ne doit ni
heurter,' ni effrayer les,' forces d'industrie," de commerce,
d'affaires dont elle a mission de seconder le dévelop-
pement, celles-ci ne peuvent en aucun cas, sous aucun
prétexte, prétendre à.uu droit de cop,trô|e quelconque
sur le suffrage universel dont il leur faut respecter
scrupuleusement, la volonté générale..Nous devrons
monter la garde autour, de la prééminence de l'Etat.
L'histoire apprend ce qu'il advient aux pays où les
factions,de quelque ordre, de quelque nature qu'elles
soient, (jjatâment, detpècent la puissance publique.
M.. Joseph Caillaux conclut en parlant de la
laïcité et en préconisant une' politique de conci-
liation européenne.
La quatrième conférence
de Mgr Baudrillart
Dans sa quatrième conférence à Notre-Dame,
Mgr Baudrillart a pris comme sujet « La Franco
catholique, la monarchie absolue et la papauté, de
l'avènement d'Henri IV a la mort do Louis XIV
Voici ce qu'il a dit du Roi-Soleil
Messieurs. le roll » Telle était la formule que pro-
nonçait chaque jour, sans lasser jamais l'émotion" ni le
respect, l'huissier'de service, lorsqu'il ouvrait à deux
battants la porte de la chambre royale, d'où sortait
Louis XIV pour,se rendre à travers les grands appar-
tements, jusqu'à, la chapelle où ir allait assister à la
:messé.
11 est temps, messieurs, qu'entre en scène celui qui
fut l'incarnation de la monarchie et de la France en
leur brillante époque Je suis Français autant que
roi. n C'est Louis XIV lui-même qui l'a dit.
Nul Français n'a le droit de l'oublier et de juger
légèrement le monarque qui, suivant la belle expression
d'un écrivain de rios jours, avait épousé la France »
La France, Louis XIV l'a défendue, agrandie, mise à
l'abri du péril constant que lui faisaient courir ses fron-
tières ouvertes et sa capitale à trois journées de marche
de l'envahisseur. Il l'a façonnée à son image suivant un
idéal d'ordre, d'intelligence, de beauté, de grandeur.
Parce qu'il a su tirer parti de toutes ses forces maté-
rielles et spirituelles, il l'a imposée à l'admiration et
à l'imitation du monde. De même qu'il s'est rencontré
dans l'histoire un sièele de Périolès, un siècle d'Au-
guste, un siècle de Charlomagne, un siècle de Léon X,
il y a eu un siècle de Louis XIV.
Après avoir parlé du rayonnement de la FraiW
catholique du grand siècle, du rayonnement de
son zèle apostolique par les missions, le confé-
rencier a continué
II est une autre forme d'expansion qui atteignit plus
d'ames encore et dont l'action, dans l'espace et dans le
temps, fut plus universelle je veux parler du rayon-
nement de la pensée catholique française.
En ce siècle, toutes tes puissances de l'âme furent au
service do l'idée chrétienne la raison la saisit, l'ima-
gination l'illumina, le sentiment la mut et l'échauffa.
Entreprise chimérique que d'évoquer, même- en une
simple nomenclature, les écrivains et les penseurs, arti-
sans de ce magnifique rayonnement! l
Qu'au fond de vos esprits se peigne, comme sur le
mur de la chambre de la Signature, au Vatican, une
nouvello Ecole d'AthèneB, synthèse, non plus do l'an-
tique sagesse, mais de la sagesse chrétienne.
L'évocation des noms de François do Sales, de
Pascal, de Malebranche, de Bossuet, Fénelon, Bour-
daloue, Fléchier, Massillon. de Mabillon, Martène,
Calmet, amène Mgr Baudrillart à dire
Levez-vous et groupez-vous l'
Autour de qui? Qui donc occupera le centre du ta-
bleau ? Doux d'entre vous peut-être, Fénelon et Bos-
suet, comme, dans le chef-d'œuvre de Raphaël, 'Aristote
et Platon? Non, messieurs, un seul et'ce sera Bossuet;
bar il fut tout, théologien, orateur, historien, contre-
versiste, apologiste, et môme, dans la sublimité de sa
biblique inspiration et de sa prose .imagée, poète. Qu'il
soit à cette, place, avec le geste de l'orateur;, que sa
bouche semble parler à tous et leur jeter ce cri du
sermon sur l'Unité « Que ma langue et ma main se
dessèchent, si jamais je t'oublie, ô sainte Eglise ro-
maine 1 « N'est-ce pas pour elle en effet que lui-même
et tous ceux que j'ai rassemblés autour de lui ont ac-
compli un si merveilleux labeur?
jours. Bientôt sa mère irait le rejoindre là-bas,
et la dernière passerelle s'écroulerait: il ne res-
terait plus rien que son souvenir.
Do temps à autre, Mme Miraldi venait la
voir. Janine ne lui rendait, pas ses visites, sous
le prétexte qu'elle ne pouvait quitter Clarisse.
En réalité elle ne se sentait pas le courage de,
revoir la villa, toute vibrante encore de l'heure
unique et passionnée qu'elle y avait vécue.
Mme Miraldi, avec embarras, disait quelques
mots de l'absent, sans le nommer. « Chris-
tian n eût été désormais trop intime, « mon
fils » trop cérémonieux. Un malaise planait,
empoisonnant à tel point ces minutes, pourtant
précieuses, que Janine souhaitait presque ne
plus revoir la mère de Christian.
Une fois elle s'était enhardie, après un long
débat, à lui poser une question. Elle y attachait
un grand. prix, la jugeait d une telle importance
que sa vie lui parut suspendue pendant les
quelques secondes où elle attendit la réponse.
Cette réponse tomba comme la dalle funé-
raire sur un cercueil.
Non Jamais Christian ne l'avait mention-
née dans ses lettres. Il disait ses travaux, lés.
concerts qu'il dirigeait, ses intentions, ses es-
poirs. parlait d'une grande œuvre lyrique qu'il
avait entreprise, et c'était tout: nulle allusion à
son amour.
*• II ne fallait donc plus que Christian eût fi-
gure de réalité. Désormais il n'était plus qu'un
songe.
Becky Carter venait aussi la voir, mais pour
lui parler de choses qui étaient si loin d'elle
son mari en fuite, disparu; le coffr dérobé,
probablement par lui, à l'instigation de Bir-
man. ses rôles au théâtre du faubourg, les
« rosseries » de ses camarades de misère, son
espoir de retrouver cet époux volage et voleur,
d'autant plus aimé qu'il le méritait moins.
Qu'importait à Janine ? Elle n'aspirait qu'à
être oubliée, sauf d'un seul qui ne voulait plus
penser à elle.
Ces visites lui étaient en somme, pénibles.
Elle eût préféré n'en plus recevoir. Elle se blâ-
mait de ne pas garder plus fidèle reconnais
sance à l'excellente et pitoyable Becky, à Mme
Miraldi, qui l'une et l'autre l'avaient si géné-
reusement secourue aux heures critiques, qui
l'avaient sauvée. Peut-être eussent-elles mieux
fait de l'abandonner, de la laisser mourir.
« La souffrance corrompt l'âme », pensait
.Janine. Ainsi cônnut-elle, qu'on, doit beaucoup
d'indulgence aux malheureux.
Malgré tout, la vie s'écoulait assez douce une
amitié très tendre étant au monde ce qu'il est
de meilleur à l'âme, après un grand amour.
Puis vint le drame.
UNE LETTRE DE M. MIILERAND
M. Monsservin, sénateur et président du conseil
général de l'Aveyron, avait demandé à M. Alexan-
dre Millerand de venir présider à Rodez, le di-
manche 18 mars, une conférence organisée par la
Fédération républicaine du Plateau Centrai (sec-
tion, de l'Aveyron)..
Après lui1 avoir rappelé le discours que M. Her-
riot avait prononcé, dans cette ville, le 9 novem-
bre 1924, pour développer le, programme cartel-
liste, M. Monsservin terminait ainsi la lettre qu'il
adressait, le 29 février, -à M. Alexandre Millerand:
« Que s'il vous était impossible de venir dans
notre Rouergue lointain, je vous prierais, mon-
sieur le. président, de bien vouloir me.contier vos
directives et m'autoriser à apporter à nos amis
votre haut encouragement. »
Voieii la lettre que M. Alexandre Millerand a
envoyée à M. Monsservin ̃-
̃ Mon cher collègue et ami,
Je suis très touché de l'appel que.vous mjadrp-
sez et j'aurais vivement désiré qu'il me f&tTpps-
sible de m'y rendre.. ̃ ̃
II m'aurait été aussi agréable qu'utile de m'en-
tretenir avec nos amis de la bataille qui, s'engage.
Personne ne met en doute la gravité de la pro-
chaine consultation électorale.
Du remarquable exposé de notre situation -fi-
nancière apporté à la tribune de la, Chambre par.
le président du conseil, deux conclusions ressor-
tent qui s'imposent avec'une égale netteté là
valeur des résultats" obtenus et leur fragilité.'
La majorité à laquelle demain la France se con-
fiera pourra tout aussi aisément rainer son re-
dressement que l'achever.
Lo choix de ses représentants est donc pour le
pays d'une importance suprême. Il doit se, faire en
pleine clarté. ̃.
L'équivoque se trouve malheureusement favo-
risée par deux circonstances fort différentes, mais
non moins fâcheuses l'une que l'autre,: le détes-
table retour au scrutin d'arrondissement, «|ce
miroir brisé où la France ne reconnait pas son
image »; le fait que, pour procéder au redresse-
ment financier, on a fait appel avec raison peut-
être à des concours qui permettent aux auteurs
responsables du mal de s'attribuer pour une part
le mérite de la guérison.
Le premier devoir des républicains nationaux.
est 4e subordonner le secondaire à l'essentiel, jes;
questions personnelles et locales l'intérêt pu-
blie. Il n'est d'autre moyen d'y parvenir qu'une
discipline étroite et, pour parler plus précisé-
ment, la soumission aux décisions des groupe-
ments nationaux. Si, le parti qui se donne pour but
le rétablissement de l'ordre se montrait incapable
de se discipliner lui-même, H se disqualifierait,
'avant m^me^ que d'avoir agi. La fragmentation
des circonscriptions rend !a tâche plus malaisée
elle ne la rend que plus nécessaire.
Voilà pour nos amis. Quant nos adversaires,
nous devons sans nous lasser leur remettre sQus
les yeux à quelle extrémité nous avait conduits le
régime de facilité et d'abandon démagogiques ias-,
tauré par le cartel.
Car enfin il faut choisir et toute la question des
élections est celle-là le suffrage universel est
mis en demeure d'opter entre la démagogie et. la
démocratie ordonnée sous la loi.
C'est une politique elle s'est librement; dé-
chaînée de juin 1924. à juillet 1926 que de flat-
ter tous les appétits et de se refuser à dire jamais
non.
Ses résultats malfaisants no se sont pas fait
attendre.
̃ Hier, à la tribune du Sénat, des républicains de
nuances diverses exposaient comment le rabais-
sant souci de tout égaliser par en bas avait in-
troduit l'anarchie dans l'enseignement secondaire
et menaçait do rendre impossible la formation
d'une élite intellectuelle.
Quelques jours auparavant, de la même trïïmne
s'élevaient des plaintes émouvantes et trop justi-
fiées contre l'impunité assurée à la campagne de
haine et de boue publiquement menée par la
presse communiste jusque dans nos casernés et
dans nos arsenaux. ?
En une période où les impôts ont atteint sinon,
sur certains points, dépassé ce qu'il est honnête-
ment permis de réclamer des contribuables, rien
de ce qui allégerait leur charge ne devrait, sern-
bie-t-ïl, être négligé. On" vu cependant la 'nïaœ- =
rrïé'dQ la Chambre refuser des ressources que. lui
proposait .le gouvernement par l'unique raison qjué
la combinaison projetée eût touché au monopole,
des allumettes. ̃ i
Ce sont des exemples, ce ne sont que des exenir
ples. Ils illustrent une politique qui dédaigneuse
des réalités s'imagine que des manifestations ora-
toiïes sont des solutions et qu'on gouverne en pé-
rorant.
Nous concevons autrement le devoir du parti
républicain. Une préoccupation constante nous
hante le souvenir des exemples et des, leçons do,
la guerre.
La fraternité des tranchées, ce n'est pas un îtijot
vide de sens et déclamatoire ce fut une réalité
vivante. Est-il donc impossible d'en ,prolonger le
bienfait jusque dans la paix et d'obtenir que les
artisans de la môme tâche, les enfants de la même
patrie ne.se considèrent pas comme des ennemis?
Par leurs vertus, leurs sacrifices, tes Français
ont mérité d'être traités en citoyens libres, dignes
d'entendre la vérité et capables de la suivre.
C'est un mensonge de prétendre qu'aucune col-
lectivité humaine puisse se passer d'une direc-
tion respectée et obéie. Dans la cité comme à Pate-
lier, Tautorité ;est nécessaire. Le nier, ou se con-
duire comme si l'on le niait, c'est vouer la nation
au désordre et à la ruine.
Ouvriers, agriculteurs, commerçants, industriels
ne demandent que la paix pour travailler et. pro-
duire. ̃'̃"̃'
Seule, une politique hardiment sociale, fondant
le progrès sur l'accord des classes, la leur assurefa
à l'intérieur. • ̃
Geoffrey Brickton avait passé raprès-nji'di'
entier auprès des jeunes filles. Il était amvëjles
mains chargées de friandises qu'on avait gri-
gnotées en devisant presque gaiement.
Une intimité charmante était née. Janine ne,
doutait plus que Geoff ne fût aussi épris de
Clarisse que celle-ci l'était de lui; ils étaient
devenus les meilleurs amis du monde.
S'il se montrait extrêmement courtois, Ja-
nine ne voyait rien dans ce flirt innocent qui
pût froisser Clarisse. La, pauvre infirme avait
frop,d'esprit pour en prendre ombrage., Elle sa-
vait bien qu'un jeune homme ne pouvait res-
sentir que de l'admiration en présence de Ja-
nine. Elle était même heureuse de leur mu-
tuelle estime. Janine était trop loyale, Geoff
trop droit elle enétait persuadée- puiir ac-
cueillir dans leur cœur un autre sentiment.
Souvent, sous divers prétextes, Janin,e lais-
sait Clarisse et Geoff en tête à tête, pour qu'ils
pussent échanger les aveux peut-etre plus-
qu'elle devinait au bord de leurs lèvres..
Cependant une chose demeurait pour elle
assez obscure quelle conclusion Clarisse vou-
lait-elle donner à leur amour ? Pour si. déli-
cieuse qu'elle fût par le visage, le cœur et l'es-
prit, elle n'en était pas moins infirme, et. trop
fière pour consentir jamais à unir sa vie à celle
d'un homme jeune, fringant et beau.
Avec peu de logique, Janine, qui avait tra-
vaillé à les rapprocher, maintenant s'inquiétait
du dénouement. Elle savait trop bien qu'ejlp-
même, dans l'état de Clarisse, n'eût pu ̃sëolp*
ment envisager l'idée de devenir une épouse.
Pourtant elle était bien sûre que si Chris-
tian fût devenu infirme, aveugle, mutilé de
la pire façon, elle n'aurait eu. que plus de
joie à devenir sa femme, à l'entourer d'une
telle tendresse qu'il en oubliât sa chair misé-
rable.
Ainsi se découvre l'abîme qui «épare un
amour d'homme d'un amour féminin.
"Peut-être Clarisse n'envisageait-elle rien au
delà de l'heure présente, trouvant infiniment
doux de se sentir aimée, plus doux encore
mille fois d'aimer, peut-être de le dire, de se
l'entendre dire, sans plus, sans espoir, sans
but,. pour. la seule beauté du sentiment.
Ah que Dieu veuille qu'il en soit ainsi
priait Janine.
Or, ce soir-là, après le départ de Geoffrey,
Clarisse, plus émue que de coutume, avait sou-
haité entendre un peu de musique. Janine
s'était mise au piano, berçant, une heure du-
rant, sur l'aile des sons, le rêve incertain de son
.%mie, •'
Pour la maintenir à l'extérieur, il ne suffit pas
de s'en proclamer partisan. C'est pis qu'une contre-
vérité, c'est une sotl ise de prêter à la France des
desseins guerriers. Elle veut la paix dans le res-
pect dee traités et le maintien de ses amitiés et
de ses alliances. Entre l'Allemagne et nous, il n'est
qu'une équivoque, mais ipro fende, et dangereuse.
Nous entendons maintenir l'ordre de choses créé
par la guerre; elle aspire à le modifier. Tant que
nos alliés comme nous-mêmes ne serons pas ga-
rantis contre la réalisation de desseins qui ne se
dissimulent même pas. nous n'avons pas le. droit,
sans folie. de renoncer à aucune des garanties que
nous tenons du traité de Versailles.
La République est, à nos yeux. la propriété de
tous les Français. Sous son égide, toutes les forces
morales doivent pouvoir librement se développer.
Notre programme a pour pôles la liberté et la
paix. Offrons-le, en toute sincérité,, à l'approba-
tion du suffrage universel.
Croyez-moi, je vous prie, votre cordialement
'dévoué, '̃
Aàëvoué, A. MILLERAND.
'1 1
CHRONIQUE ÉLECTORALE
Les élections législatives de £928
Socialistes et communistes >:
Au cours d'une réunion; électorale organisée hier
à Paris par le parti communiste, M. Semard, se-
crétaire général du parti, a déclaré qu'aux pro-?
chaines élections les candidats communistes au-
raient le devoir de refuser, même au second tour,
les suffrages socialistes.
M. Hussel, conseiller général de l'Isère, secré-
taire de la fédération socialiste et candidat de ce
parti dànsf la première circonscription de Vienne,
vient) d'adresser la lettre suivante au secrétaire
du parti communiste,' à Chasse '̃
Vous avez bien voulu me proposer, pour le deuxième
tour, un désistement mutuel entre le candidat commu-
niste et le candidat socialiste.
Si j'en crois les décisions de votre parti et votre
offre même, il s'agirait de maintenir le candidat, socia-
liste ou le candidat communiste, au deuxième tour,
quels que soient les résultats du premier.
Cette façon de procéder a fait déjà ses preuves dé-
plorables. En Allemagne, elle a permis, l'élection du
m'aréchariUndenbùrg contre un républicain; a Paris,
dans le 10° arrondissement, elle a assuré le succès du
candidat du Bloc national au lieu du socialiste.
Ne vous étonnez donc pas que, d'accord avec la sec-
tion socialiste de Vienne, je la repousse. Nous appli-
querons, au' contraire, fidèlement, "la ̃ décision de- notre
congrès national. Ce dernier a décidé que le candidat
socialiste, s'il n'arrive pas en tête du scrutin, au pre-
mier tour, se désistera pour le candidat de' gauche Je
plus capable de battre la-réaction, c'est-à-dirë'Çour- le
candidat de gauche « le plus voté ». C'est la vieille
tactique de la discipline républicaine. •
C'est la seule, à notre avis, que puissent approuver
les républicains qui tiennent à se débarrasser, au second
tour, de l'obstacle à la marche en avant, après avoir,
affirmé, au premier tour, leurs préférences doctrinales
^et de parti. Cette discipline républicaine, pratiquée de
ittfut temps dans notre pays, a sauvegardé la Répu-
blique que, fidèles en cela à la pensée de Jaurès, nous,
ne séparons jamais du socialisme. C'est elle, notam-
ment, pour ne choisir que l'exemple le plus éolatant,
qui a permis, avec le concours du parti radical d'ail-
leurs et à l'appel do ses chefs, de foire; élire à Paris les
députés commun jstes Duclos et Fournier contre les
réactionnaires de Kérillis' et Heynaud.
La préfecture de la ^eine a conimencé l'instal-
lation devant les mairies et les écoles des pan-,
neaux destinés à recevoir les affiches électorales
des candidats. Chaque candidat a droit à un pan-
neau dans la circonscription où il se présente.
Rappelons que, en vertu du décret organique du
2 févri'er 1852, c'est un décret du pouvoir exécutif
qui convoque les collèges électoraux. La promul-
,gation de. ce décret do convocation marque l'ou-
verture de la période électorale dont la durée
doit être au moins de vingt jours. Cette année, les
élections devant avoir lieu le 22 avril, le décret
doit être promulgué au plus tard le 2 du même
mois..
C'est à partir du jour de la promulgation que
les déclar étions de candidature doivent, confor-
mément à la loi, être reçues à la préfecture de la
Seine. C'est à partir de ce môme jour que les
préaux d'écoles peuvent être mis à la disposition
des candidats pour leurs réunions publiques et
que leurs affiches bénéficient de l'exonération du
timbre,. ,̃••̃ .-•;̃ .̃;̃̃;<̃ ̃ ̃' '̃
Paris (6° arrondissement). ̃ M. Henri-Jean
Frossard est, candidat républicain indépendant
dans la 2° circonscription du 6" arrondissement
(Notre-Dame-des-Champs)
9° arrondissement. On annonce la candida-
ture républicaine de M. Salzedo, avocat à la cour
d'appel, dans la lro circonscription de cet arron-
dissement (.Saint-Georges, Chaussée-d'Antin).
13e arrondissement. Les comités d'Union na-
tionale de là 2" circonscription du 13° arrondisse-
ment (Gare. Salpêtrière) ont désigné comme can-
didat M. Georges Boucheron, avocat à la cour
d'appel.
Seine. Le comité exécutif du parti républi-
cain radical et radical socialist-e a désigné M.
\einstein, docteur en droit, directeur d'école pri-
maire, comme candidat dans la 7° circonscription
de Sceaux (Sceaux).
Seine-f.t-Oise. La fédération radicale unio-
nisie a désigné pour lai" circonscription de Corbeil
M. Bloch. secrétaire de l'Association générale des
mutilés de la Seine, avocat; pour la'2e circonscrip-
tion de Corbeil, M. Ditte, maire de Soisy-sous-
Etiolles.
Ardkche. De'nouvelles candidatures se sont
affirmées arrondissement de Largentière MM.
Froment, maire de Largentière, socialiste S. F.
I. 0.; Bastidon, communiste; Privas, 1" circons-
cription M. Sauvertin, communiste; Privas, 2"
circonscription MM. Largier, conseiller général,
radical; Combier, conservateur; Mortier, commu-
niste Tournon 1™ circonscription MM. Roussil-
lon, conseiller général, union des forces de gau-
che, radical socialiste; Giny, communiste; Tour-
non, 2* circonscription MM. de Causon, radical;
Puis elle se tut, et, s'étant tournée vers Cla-
risse, elle eut la surprise de lui voir un nou-
veau regard et tout le visage empreint d'une,
sérénité nouvelle.
.Elle était très pâle, grave et calme, et Janine
songea que sur son lit de mort Clarisse aurait
ce même visage.
Impressionnée par cette pensée, elle s'appro-
cha de l'infirme, lui prit la main qu'elle sentit
trembler. Aussitôt Clarisse lui dit de sa voix
la meilleure
Je vais avoir besoin de vous, ma chérie.
de votre aide, dans une circonstance très grave.
.11 faut.
Elle s'arrêta, comme suffoquée par une mys-
térieuse émotion.
Vous savez bien, Clarisse, qu'il n'est au-
cune chose au monde que je ne sois prête à
faire pour vous.
Oui, je sais. Je ne doute pointde vous, Ja-
nine. Seulement ce que j'ai a vous demander
vous sera pénible, vous révoltera peut-être jus-
tement à cause de notre affection mutuelle.
Alors il faut d'abord que vous vous engagiez
en toute conscience à' suivre mes instructions,
quelles qu'elles soient.
Janine réfléchit une minute, puis, vaguement
inquiète, elle répondit évasivement
Clarisse, vous doutez de moi
Mais non, je vous l'ai dit C'est au con-
traite votre exquise amitié que je redoute..
parce que. dans' ce que je vais vous demander,
C'est ma vie qui est en jeu
Clarisse, vous m'effrayez Que voulez-vous
dire?
D'abord il me faut votre parole,
Oh c'est me faire Injure 1
Non, ma chérie Je vous demande sim-
plement de me promettre que vous ferez ce que
je vous demanderai de faire, que vous direz ce
que je vous prierai de dire, que vous tairez ce
qui devra rester secret.
Janine, rassurée, n'hésita plus.
J'ai confiance, Clarisse, que vous "ne me
demanderez jamais que des choses parfaite-
ment sages et raisonnables. Je n'ai donc au-
'cune raison de vous refuser ma' parole.
Bieni merci Je n'âtteudais pas moins de de J
vous, Janine. Je vais tout vous dire. Mais
'd'abord soyez assez gentille pour allumer. En-
core toute la lumière La Mettez-vous ici,
tout près de moi, donnez-moi vos mains
Avant tout, il faut que vous sachiez, ma chérie,
que les résolutions dont je vais vous faire part
sont définitives, inébranlables. Rien ne saurait
les faire changer. Vous n'allez donc rien tenter,
rien dire. oour essayer de m'en dissuader. Ce
Daudel, socialiste S. F. I. 0.; Poulard, commu-
niste.
Dordogne. Aux candidatures déjà signalées
pour la 2° circonscription de Périgueux, il faut
ajouter celles de MM. Çhaminade, conseiller géné-
ral, Union républicaine démocratique; docteur
Desmartin, maire d'Eyliac, radical socialiste
Freyssenge, avocat à la cour d'appel de Paris, ré-
publicain socialiste,
Loire. Le bloc républicain socialiste a décfdë
de se rallier, dans la 4e circonscription de Savnt-
Etienne, à la candidature de M. Brioude, socia'liste
S. F. I. 0., qui devient ainsi candidat de l'Union
des gauches.
Il convient d'ajouter trois candidatures à celles
quo nous avons fait connaître la Jeune- Répu-
blique présente, dans la 1" circonscription de
Saint-Etienne, M. Jean Bruyère. D'autre .part, là
section socialiste stéphanoise, qui a été dissoute
nar la commission administrative du pairti S. F.
I. 0. à la suite du conflit provoqué par l'admis-
sion des socialistes communistes et ,Qui s'est
reconstituée comme groupement autonome a- dé-
cidé de présenter deux candidatures celle de
M. Guillot, conseiller d'arrondissement, dans la
lr" circonscription de Saint-Etienne. et celle de
M. Benjamin Ledin, conseiller général, dans la 3".
Oise. De nouvelles candidatures ont été dé-
clarées, quelques modifications- fie sont produi-
tes nous publions ci-dessous une liste récapitu-
lative des candidats actuellement connus:
Bcauvàis^ V circonscription. MM. Jammy
Schmidt, député sortant, vice-président du Con-
seil général, radical socialiste: EmiSe Landé,
Union républicaine nationale; Albert HéraudQ.
conseiller général, socialiste (S.F.I.O.J; Brault,
communiste.
Beàuvois, 2* circonscription. MM. Manrice
Lecomte, conseiller d'arrondissement, républi-
cain de gauche; Etienne Weill-Raynal, professeur
au lycée de Rouen, socialiste (S.F.I.O.); Raoul
Aubaud, conseiller général, radical socialiste
Fernand Lhotelier, communiste.
Arrondissement de Clermont. MM. Désiré
Bouteille, député sortant, conseiller général,
union républicaine nationale; Berthelot. conseiller
général, socialiste (S.F.I.O.) Armand Dupuis,
conseiller général, radical socialiste Capon, com-
muniste,
Arrondissement de Compiègne. MM. Robert
Fourni er-Sarloyèze, député sortant, conseiller
général, républicain démocrate Edouard Vasseux,
vite-président du conseil géneral, Gauche radi'-
cale Jules Séguelas,' conseiller général, so-
cialiste (S.F.I.O.) Miquel, communiste.
Senlis, 1" circonscription. MM. Robert Bur-
nand, Union républicaine nationale, qui a reçu
l'investiture de la Fédération républicaine; Paul
Lévy, pubticiste, union républicaine nationale
Jean, Vassal, conseiller général.socialiste (S.F.I.O.)
Warusfel, avocat, radical socialiste Auguste
Séioux, communiste.
Senlis, 2* circonscription. MM.- Jules Uhry,
député' sortant, -"̃conseiller1 générai, socialiste
''S.F.LO.) Georges Decroze. ancien député, con-
seiller général, radical socialiste marquis de
Chanterae, radical unioniste;' comte Robert de
Billy, union républicaine nationale; André
din, communiste.
Conseils généraux
Abdennes. Dans le canton de Garïgnan, M.
Nivoix, radical socialiste, démissionnaire au mo-
ment de la suppression de la circonscription de
Sedan, a été réélu par 1,924 voix sur 3,047 ins-
crits, 2,024 votants et 1,937 suffrages exprimés.
Bouchks-du-Rhône, Au scrutin de ballottage
dans le 7° canton pour l'élection d'un conseiller
général, en remplacement de M. Clément Lévy, so-
cialiste S. F. I. O., décédé, il y a eu 12,293 inscrits,
7,552 votants, 7,395 suffrages exprimés. Ont ob-
tenu M. Vi'llecroze, socialiste S. F. I. O., 5,030
voix, élu; M. Edmond Jolly, candidat républicain
d'action sociale, patronné par l'Union républicaine,
2,365 voix.
Au premier tour, M. Villecroze avait obtenu
3,463 voix; M. Jolly 2,054 voix; M. Verjet,' socia-
liste indépendant, 785 voix; M. Gay, communiste,
gérant de VHumanité, 732 voix; M. Gavaudan, ra-
dical .socialiste. 288 voix; M.' Martres, socialiste
indépendant, 245 voix. `
Calvados. Une élection au conseil général a
eu lieu hier dans le canton d'Isigny-sur-Mer. En
voici le résultat inscrits 2,855, votants 2.070.
suffrages exprimés 2,060. Ont obtenu M. Hom-
met, républicain de gauche, 1,094 voix, élu. M.
Galliot, union nationale, 729 voix; M. Vacqucrio,
union nationale, 236 voix.
Charente Canton de Montmoreau M. Voil-
lade, radical socialiste, a été élu par 858 voix con-
tre. 7S4: à. M. Rousseau, ..union nationale, en ..rem-
placement de M. Jobit, républicain, décédé.
Eure-et-Loir. Le scrutin, d'hier, dans le
canton do Nogent-le-Rotrou, pour l'élection d'un
conseiller général en remplacement de M. Villette-
Gaté, décédé,- a donné les résultats suivants M.
Henri Roussard, maire de Nogent-le-Rotrou, ré-
publicain de gauche, 837 voix; M. Charles Guérin.
président du conseil d'arrondissement, radical in-
dépendant, 751; le docteur Levïllain. radical socia-
liste,. 364. Il y a ballottage. M. Villette-Gaté était
républicain de gauche.
NORD. Voici les résultats du scrutin d'hier,
dans. le canton d'Avesnes 4,465 inscrits. 3,582
votants, 3,570 suffrages exprimés. Ont obtenu
MM. Demarcq, radical socialiste. 1,457 voix, élu;
Louvrier, Union républicaine, 1,251; Léger, com-
muniste, 862.
ARMÉE
LE maréchal Fbanchet d'Espeiiey EN Tunisie.. Le
maréchal Franciiet d'Esperey, inspecteur général dos
armées françaises de l'Afrique du nord, est arrivé le
16 à Tunis. Le maréchal a commencé sa tournée d'ins-
pection des troupes de Tunisie.
Mutation DANS L'ÉTAT-MAJOR DE i/armée. Le gé-
néral de brigade Bourdais, commandant l'artillerie de
la 5" région, est placé dans la 2e section du cadre de
l'état-major général de l'armée.
MARINE •
MANOEUVRES AÉRIENNES ITALIENNES. On annonce de
Madrid qu'au cours des grandes manœuvres que l'a-
viation italienne exécutera en juin prochain dans la Mé-
diterranée, une flotte de 50 hydravions viendra à la
base de Los-Alcazares, située près de Carlhagène.
serait inutile et vous me feriez beaucoup de
peine. Je ne vous ai jamais dit, Janine, qu'a-
près mon accident noire médecin avait fait ap-
peler en consultation le professeur Hudson-
Weir, qui est, vous le savez, le premier chirur-
gien de l'Angleterre. Son avis fut des plus pré-
cis j'avais perdu à tout jamais l'usage de mes
jambes. à moins qu'on ne tentât une opération
très hasardeuse sur la moelle épinière opéra-
tion qui pouvait ou me guérir ou me tuer. Or
les chances de mort étaient infiniment plus
grandes que celles de guérison. A ce moment,
je fus lâche. Je n'étais pas très sûre de l'amour
de Geoff. et puis j'étais profondément abattue,
Réprimée, si faible Et maman me supplia de
ne pas risquer cette opération, trop dange-
reuse.
Clarisse s'arrêta. Puis au bout'de quelques
secondes elle laissa tomber ces simples mots
Voilà Aujourd'hui je suis résolue à la
tenter
Janine, pour toute réponse, se' contenta de
serrer plus fort les mains de la malade. Puis
elle les atira, mit ses lèvres sur chacune
Clarisse reprit
Et c'est ici, ma chérie, que j'ai besoin de
votre aide. Il faut que nous épargnions à ma-
man de trop cruelles angoisses. 'Je vais vous
charger de vous rendre dès demain à la. conr
sultation du professeur Hudson-Weir. Je lui
téléphonerai tout à l'heure pour lui demander
un rendez-vous. Vous lui direz que ma déci-
sion est prise, irrévocable, que s'il refusait je
m'adresserais à un autre chirurgien, moins
habile que lui et qui, plus "sûrement, me tue-
rait. Seulement vous lui direz que je demande,
que j'exige qu'il épargne à maman toute
crainte. Il faudra qu'après m'avoir à nouveau
examinée il prétende trouver mon état très amé-
lioré, qu'il affirme que l'opération jadis si pé-
rilleuse est aujourd'hui sans danger. D'ailleurs,
qui sait? C'est peut-être vrai. peu importe.!
Je suis prête à signer tous les papiers qu'il
voudra pour mettre sa responsabilité à couvert
en cas d'accident. Je suis majeure. J'ai donc
le droit dé vouloir, et je suis irrévocablement dé-
cidée à courir ma chance. Mais je ne veux pas
que maman s'inquiète, Imaginez son angoisse
pendant les jours qui vont précéder l'interven-
tion, si elle soupçonnait. Non, il faut à tout
prix lui épargner cela. Vous le comprenez, Ja-
nine, et vous me. comprenez aussi
Maintenant elle s'exaltait. Sa voix devenait
ardente, passionnée
Un jour vous me comprendrez mieux, et
vous m'approuverez, quoi qu'il arrive, j'en suis
convaincue. Je suis sûre qu'alors vous pense- I
rez avec moi au'eût-on ouatre-vinst-dix-nenf i
COURRIER LITTÉRAIRE
Lateuche et Balzac
Nous avons eu plusieurs fois déjà l'occasion
d'entretenir nos lecteurs de ce curieux Hyacinthe
(et non pas Henri) de Latouche, figure à part et
singulière du premier groupe romantique. Si l'on
ne lit plus guère, à l'exception peut-être de Fra-
golctla et de la Vallée aux loups, ses. livres incom-
plets, gâtés par une expression maladroite, Latou-
che a pourtant droit encore à notre souvenir il
fut le premier éditeur des Poésies d'André Chénier,
comme l'on sait, et l'infidèle, amant, qui fit tant
pleurer la pauvre Marceline Desbordes-Vatmore.
C'est aussi lui qui mit à l'étrier le pied de George
Sand en lui ouvrant le Figarç.. D'autre part. l'idée
de Ruy Dlas nn serait peut-être pas venue à Hugo
si Latouche n'avait publié, trois ans plus tôt. la
Reine d'Espagne. Et il avait également rappelé,
dans un poème de là Vallée aux loups, l'histoire de
Chatterton, bien avant que Vigny mît ce poète
à la scène. Ces divers titres justifient la curiosité
que .l'on' voit depuis quelque temps d'érudits his-
toriens de nos lettres nourrir pour cet excitateur.
L'un d'eux, M. Frédéric Ségu, professeur au lycée
de Toulouse, s'apprête à nous donner une nouvelle
édition de la Reine d'Espagne ainsi qu'une biogra-
phie du personnage, et prélude aujourd'hui à ce
grand travail en nous adressant les épreuves d'un
intéressant petit volume Un maître de Balzac
méconnu. Car Latouche, qui décidément est par-
tout, se trouverait aussi à l'origine de la Comédie
humaine. Dans quelle mesure? C'est à voir. Mais il
est bien certain que Balzac lui doit quelque chose,
ne serait-ce qu'un encouragement à l'heure obs-i
cure de ses débuts.
Leur première rencontre date de 1825. Latoucha
était déjà célèbre à cette époque, comme traduc-.
teur do Schiller et d'Hoffmann, auteur dramati-
que, contexir et pamphlétaire redouté Balza»
n'avait encore écrit que son injouable CromweLl
et ses premiers romans alimentaires, l'Héritière de
Birague, Jean Louis, Clotilde de Lusignan ou le
Beau juif, le Centenaire ou les Deux Beringheld,
il venait d'imprimer Waun-Chlore, quand sou
éditeur Urbain Canel attira l'attention de Latou-
che sur ce livre. Latouche en parla aussitôt bien-
vei:llamment dans la Pandore, et peu de jonrs
après reçut la visite du jeune écrivain qui, pour
remercier l'obligeant journaliste, lui promit un
petit cheval blanc, « d'une merveilleuse intelli-
gence et d'une docilité parfaite, et mangeant au
reste fort peu ». Comme ce cadeau princier tar-
dait .à' venir, Latouche se consolait en racontant
qu'il était en train de se ruiner à faire construire
une écurie en marbre blanc, avec des mangeoires
d'or, et des piscines en ivoire « afin, disait-il,
d'y loger le petit cheval merveilleux que M. de
Balzac doit m'envoyer ». Le pauvre Balzac avait
d'ailleurs de plus graves soucis que celui de tenir
ses mirobolantes promesses l'imprimerie et la
fonderie de caractères où il s'était follement
aventuré périclitaient, accumulant d'effroyables
dettes sur sa tête. Latouche lui offrit un asile, et,
mieux encore, plus d'une fois fit face aux
échéances. En même temps, il s'occupait des
manuscrits de son ami; une confiance entière
régnait entre eux. Et les lettres charmantes de
Latouche, conservées à Chantilly et dont M. Ségu
a pu obtenir communication, attestent la frater-
nelle autorité prise par l'auteur de Fragoletta eut
son cadet; celles de Balzao sont malheureusement
perdues et ont sans doute été détruites, aveo les
précieux manuscrits dé Chénier demeurés aux
mains de Latouche, lorsque sa maison de la Vallée-
aux-Loups fut occupée par les. Prussiens en 1870.
Mais on aperçoit l'efficacité des conseils donnés
par l'ingénieux journaliste au romancier encore
hésitant, tout empêtré de mélodrame Latouche a
deviné qu'il était fait pour mieux que cela et ne
se gêne pas pour le lui dire
Que le dieu de l'inspiration vous maudisse t Déjà,
vous en êtes maudit; et vous avez fait un brusque di-
vorce avec la raison. Quel livre que Gertrude
Quelle esquisse de grand maître et quels tableaux
promet ce beau et fanatique génie! Hélas! mon ami, il
vous faut des événements dans un livre pour qu'il
vous amuse! L'adorable développement d'une passion
vraie, la philosophie la plus élevée, l'inépuisable richesse
d'une âme vous sont lettres closes vous quitteriez
Rousseau pour une des cinquante-trois sorcières de
Walter Scott. Pauvre homme J'ai des' torrents d'in-
jures à verser sur' vous, des trésors de colère qui
m'étoufferont si vous ne venez. Venez dono!
Ce Venez donc fait allusion à Péloignement de
Balzac qui est allé, dans l'intervalle, s'installer
au diable Vauvert, près de l'Observatoire, en cette
rue Cassini où Latouche, tout en maugréant con-
tre cet exil, a présidé lui-même au somptueux
aménagement du romancier, « Que le diable
puisse confondre la rue de Cassini! et ne donner
jamais à ceux qui l'habitent que de vieilles mai-
tresses, du pain dur, des fourchettes de fer, des
dénouements détestables et des préfaces pleines
de pathos! Que ceux qui iront vous voir puissent
s'y rompre les jambes! Voilà! Ceci' est I expres-
sion du sens rassis, de .la méditation approfondie
et grave et virile et sénile. Ne prenez pas pour
vous l'histoire des dénouements et des préfaces;
;je ne connais pas les vôtres; je désire excessive-
ment qu'ils soient bien; je vous prie seulement
de montrer un peu la préface, car c'est là où je
vous donnerai' à mon tour les conseils et où l'ima-
gination ne peut excuser Y irrectitude d'esprit. »
Depuis quelques mois, en effet, Balzac est entré
dans sa voie, où Latouche, de toute sa force, l'a
poussé celle du roman historique et réaliste. Il
écrit les Chouans, pour lesquels il est allé se do-
cumenter sur place, à Fougères. Latouche trouve
qu'il y prolonge inutilement son séjour, qu'il perd
son temps. De retour à Paris, Balzac lit à son
ami des extraits de son livre, qu'il recommence
sans arrêt, mécontent de lui, redemandant con-
seil. L'autre l'exhorte
Qu'avez-vous besoin de mes rabâchages? Ce n'est,
par Dieu, pas que je refuse de vous entendre; il y a
toujours plaisir et profit: mais donnez-moi du nou-
veau. Ne, déclinons pas toujours musa, la muse. Assez,
assez, enfant que vous êtes! Si je savais bien les for-
mules de l'exorcisme, je les emploierais ici; car à la
lenteur tout.à. fait inattendue, tout à fait inexplicable
que ce fier Honoré, ce foudre de roman qui en a fait
quatre, en six semaines, a mise à parachever sob
Chouan, je crois que ledit Chouan a le diable au corps.
N'y a-t-il pas assez longtemps que vous léchez ce petit
ours? Je crois que je vous atme encore, puisque ja
vous dis des injures, mais ne vous y fiez pas.
Les injures de Latouche, les pressantes objur-»
chances sur cent de mourir, et une seule d'être
guérie, de sauver son amour, son bonheur, cela
vaudrait d'être tenté. qu'aucune hésitation
n'est' permise à celle qui aime de toute son
âme, qui est aimée de même amour et veut s'en
montrer digne Oui, Janine, un jour vous com-
prendrez cela, et si je ne suis pas là, si l'é-
preuve m'a été contraire, vous n'en penserez
pas moins que j'ai agi comme je devais agir.
Vous vous direz qu'à ma place vous eussiez
fait comme moi. Imaginez, chérie: pour sau-
ver son amour sa seule possibilité de bonheur
en ce monde Cela ne vaut-il pas de tout ris-
quer ?. Oui, n'y eût-il qu'une chance sur cent,
une femme vraiment femme n'a plus'le droit
cPhésiter. Car, voyez-vous, Janine, maintenant
je ne peux plus douter. Je suis sûre que Geof-
frey m'aime. Il ne me l'a jamais dit, et je refu-
serais de l'entendre tant que je serai en cet
état. Car il serait obligé d'ajouter qu'il désire
m'épouser, etvous savez bien qu'infirme je n'y
consentirais point. Il ne me l'a pas dit, mais
tout ne le prouve-t-il pas ? N'ai-je pas mieux
qu'un aveu ? Et lui non plus ne doute pas de
mon amour. lui aussi a compris. Il est des re-
gards plus éloquents que des paroles, et ces re-
gards-là nous les avons échangés Et quelle
estime nouvelle il aura pour moi, quand il
saura Si les choses tournent mal, tant pis
Je ne regretterai pas ma vie sans espoir, qui,
maintenant, serait impossible.
Clarisse se tut et Janine n'eut qu'un cri
Vous guérirez, Clarisse Vous serez sau-
vée parce qu'il y a une justice au monde et
que nulle ne mérite plus que vous d'être heu-
reuse.
Clarisse s'était redressée, rayonnante, pouf
lire dans les yeux de Janine.
Alors ?. Alors, vous m'approuvez, chérie?
Oh certes, de tout mon cœur Et je suis
sûre qu'à votre place je n'hésiterais pas davan-
tage.
La voix de Clarisse se fit grave, avec,! peut-
être, tout au fond, un reproche P
Pour que vous sentiez cela, Janine, il faut
que vous aussi veus ayez aimé. Il faut que
vous ayez souffert.
Janine courba le front, et dit très bas v
Peut-être '̃?.
La tête blonde et la tête brune se rapprochè-
rent. Leurs joues brûlantes se touchèrent, et
leurs larmes s'unirent, 1
EFFrE Adélaïde ROWLANDS.
Adapté di l'anglais par GEORGES Romieu.
(A $uivre.)
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